Lexbase Social n°524 du 18 avril 2013

Lexbase Social - Édition n°524

Conflit collectif

[Brèves] Exercice du droit de grève : mesures licites de réquisition des salariés grévistes

Réf. : CE contentieux, 12 avril 2013, n° 329570, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A0987KCK)

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N6729BTE

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Le 19 Avril 2013

Sont licites les décisions par lesquelles les dirigeants de la société EDF, après avoir vainement adressé des sommations interpellatives aux représentants des syndicats de salariés ayant déposé des préavis de grève, ont décidé que seraient requis les salariés dont l'intervention était strictement nécessaire à la bonne exécution, pour six des huit réacteurs encore affectés par les mouvements de grève, dix semaines après leur déclenchement et alors qu'ils étaient périodiquement reconduits, des opérations destinées à permettre le redémarrage de ces réacteurs dans les meilleurs délais, ce dispositif n'ayant eu ni pour objet ni pour effet de contraindre l'ensemble des personnels concernés à remplir un service normal, mais seulement de répondre de la continuité des fonctions indispensables pour assurer la remise en service des réacteurs arrêtés et éviter, en l'absence de solution alternative, des conséquences graves dans l'approvisionnement du pays en électricité. Telle est la solution retenue par le Conseil d'Etat dans un arrêt du 12 avril 2013 (CE contentieux, 12 avril 2013, n° 329570, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A0987KCK).
Dans cette affaire, au début du printemps 2009, 17 des 58 réacteurs du parc nucléaire de la société EDF étaient arrêtés pour la réalisation d'opérations de maintenance et de renouvellement du combustible usagé, conformément à la programmation pluriannuelle de ces opérations. A compter du 9 avril, des mouvements de grève ont affecté les réacteurs ainsi placés à l'arrêt, entraînant un décalage important dans les opérations nécessaires à leur redémarrage, si bien qu'à la mi-juin, les opérations de maintenance et de renouvellement du combustible étaient encore bloquées, du fait de la poursuite de la grève, pour huit réacteurs. Par décision du 15 juin 2009, le directeur général délégué d'EDF a décidé que seraient requis, sous peine de sanction disciplinaires, certains des salariés chargés de ces opérations perturbées par les mouvements de grève. Par des notes du même jour également, le directeur général adjoint "production et ingénierie" a transmis aux directeurs des centres nucléaires de production d'électricité concernés les décisions du directeur général délégué et du directeur "optimisation amont aval et trading". Plusieurs syndicats avaient saisi le Conseil d'Etat pour lui demander l'annulation de ces décisions et notes. Pour le Conseil d'Etat, les organes dirigeants de la société étaient compétents pour déterminer les limitations à apporter au droit de grève de ses agents, sans préjudice par ailleurs des pouvoirs de réquisition du préfet et de ceux du ministre chargé de l'Energie en cas d'atteinte grave et immédiate à la sécurité et à la sûreté des réseaux publics de transport et de distribution d'électricité. Il juge également que les mesures prises étaient à la fois justifiées au vu de la situation qui avait cours au printemps 2009 et proportionnées au but qu'elles pouvaient légalement poursuivre.

newsid:436729

Contrat de travail

[Brèves] Pas d'application de la Directive 1999/70 ni à la relation de travail à durée déterminée entre un travailleur intérimaire et une entreprise de travail intérimaire, ni à la relation de travail à durée déterminée entre un tel travailleur et une entreprise utilisatrice

Réf. : CJUE, 11 avril 2013, aff. C-290/12 (N° Lexbase : A1361KCE)

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N6730BTG

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Le 18 Avril 2013

La Directive 1999/70 du Conseil, du 28 juin 1999, concernant l'accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée (N° Lexbase : L0072AWL), et l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée, conclu le 18 mars 1999, qui figure en annexe de cette Directive, doivent être interprétés en ce sens qu'ils ne s'appliquent, ni à la relation de travail à durée déterminée entre un travailleur intérimaire et une entreprise de travail intérimaire, ni à la relation de travail à durée déterminée entre un tel travailleur et une entreprise utilisatrice. Telle est la solution retenue par la Cour de justice de l'Union européenne dans un arrêt du 11 avril 2013 (CJUE, 11 avril 2013, aff. C-290/12 N° Lexbase : A1361KCE).
Dans cette affaire, M. D. a conclu avec une société de travail intérimaire italienne, trois contrats de travail à durée déterminée successifs en vertu desquels il a été mis à la disposition de la poste italienne en qualité de facteur. Ces contrats couvraient, respectivement, les périodes comprises entre le 2 novembre 2005 et le 31 janvier 2006, le 2 février et le 30 septembre 2006, ainsi que le 2 octobre 2006 et le 31 janvier 2007. Ces contrats de travail ont été conclus sur la base d'un contrat de mise à disposition de main-d'oeuvre à durée déterminée passé entre la société intérimaire et la poste en vue de pourvoir au remplacement du personnel absent du service de distribution du courrier dans la région de Campanie. Il est constant que seul le contrat de mise à disposition de main d'oeuvre, et non pas les contrats de travail à durée déterminée, comporte les raisons objectives justifiant leur conclusion et leur renouvellement. Estimant que les raisons du recours à la mise à disposition de main-d'oeuvre à durée déterminée étaient "vagues et inconsistantes" et que la prorogation de celle-ci n'était pas motivée, le salarié a saisi le Tribunale di Napoli en vue de faire constater que ladite mise à disposition étant irrégulière, il était lié à la poste italienne par une relation de travail à durée indéterminée. Le tribunal se demande si la Directive vise aussi la relation de travail à durée déterminée entre le travailleur mis à disposition et l'agence de travail intérimaire ou entre le travailleur mis à disposition et l'utilisateur. Pour la Cour de justice, il convient de relever que l'exclusion prévue par ledit préambule de l'accord-cadre porte sur le travailleur intérimaire, en tant que tel, et non sur l'une ou l'autre de ses relations de travail, si bien que tant sa relation de travail avec l'entreprise de travail intérimaire que celle établie avec l'entreprise utilisatrice échappent au champ d'application de cet accord-cadre. Elle relève également que les relations de travail à durée déterminée d'un travailleur intérimaire mis à la disposition d'une entreprise utilisatrice par une entreprise de travail intérimaire ne relèvent pas du champ d'application de l'accord-cadre ni, partant, de celui de la Directive 1999/70.

newsid:436730

Contrat de travail

[Brèves] Effets de la délégation dans un emploi sur l'agent délégué en cas d'absence du salarié remplacé pour une affection de longue durée ou une invalidité inférieure à trois ans : dispositions de la Convention collective du personnel des organismes de Sécurité sociale

Réf. : Cass. soc., 10 avril 2013, n° 11-22.554, FS-P+B, sur le premier moyen (N° Lexbase : A0871KCA)

Lecture: 2 min

N6735BTM

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Le 18 Avril 2013

Il résulte de l'article 35 de la Convention collective du personnel des organismes de Sécurité sociale que les dispositions de ce texte, prévoyant qu'à l'expiration d'un délai de six mois de délégation dans un emploi supérieur, l'agent délégué doit être replacé dans ses fonctions ou faire l'objet d'une promotion définitive, ne sont pas applicables lorsque l'absence du salarié remplacé est motivée par une affection de longue durée ou une invalidité inférieure à trois ans ; au retour de ce salarié, l'agent délégué ne peut prétendre qu'à une inscription en tête du tableau d'avancement et à une promotion au premier emploi vacant de la catégorie ou échelon immédiatement supérieur au sien. Telle est la solution retenue par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 10 avril 2013 (Cass. soc., 10 avril 2013, n° 11-22.554, FS-P+B, sur le premier moyen N° Lexbase : A0871KCA).
Dans cette affaire, Mme C., engagée à compter du 5 juillet 1996 en qualité de technicien du service médical, niveau 3, coefficient 185 par la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés a remplacé un salarié, placé en congé de longue durée, au poste de responsable administratif, niveau 5B, du 1er octobre 2003 au 14 juin 2004. Le 5 février 2008, elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant à se voir reconnaître le niveau de classification 5B, à obtenir le paiement de rappel de salaires s'y rapportant et à voir condamner l'employeur à lui payer des dommages et intérêts pour harcèlement moral. Après avoir reçu un avertissement le 31 octobre 2007, elle a été licenciée, le 13 novembre 2008, pour inaptitude et impossibilité de reclassement. La salariée fait grief à l'arrêt de la cour d'appel (CA Pau, 9 juin 2011, n° 2731/11 N° Lexbase : A2542HUP) de la débouter de sa demande tendant à voir reconnaître la mauvaise foi de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail et de dire que le début d'intérim assuré depuis le 1er octobre 2003 ne lui avait pas permis de bénéficier des dispositions de l'article 35 de la Convention collective de travail des personnels des organismes de Sécurité sociale, alors que selon cet article, tout agent appelé à effectuer un remplacement pour une durée supérieure à un mois dans un emploi supérieur au sien pour une durée supérieure à six mois doit être inscrit en tête du tableau d'avancement et être promu au premier emploi vacant de la catégorie ou échelon immédiatement supérieur au sien. Pour la Haute juridiction, après avoir exactement relevé que la salariée ne pouvait faire l'objet d'une promotion définitive, dans la mesure où elle avait remplacé un salarié absent pour un motif énoncé à l'article 42 de ladite convention, la cour d'appel a constaté que la salariée avait été inscrite au tableau d'avancement au niveau 5B à compter du 6 décembre 2004, et qu'il n'existait pas d'emploi de niveau supérieur en rapport avec ses compétences et aptitudes.

newsid:436735

Cotisations sociales

[Jurisprudence] Une CCI ne relève pas du champ d'application de la réduction "Fillon"

Réf. : Cons. const., décision n° 2013-300 QPC, 5 avril 2013 (N° Lexbase : A5759KBW)

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N6709BTN

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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen et Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Droit de la protection sociale"

Le 18 Avril 2013

Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 17 janvier 2013, par la Cour de cassation (1) d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Brest, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'exclusion des CCI du champ d'application de la réduction "Fillon" (CSS, art. L. 241-13, II N° Lexbase : L1981IP3). La CCI avançait que l'exclusion des CCI du champ d'application de la réduction "Fillon" portait atteinte au principe d'égalité devant les charges publiques. Le Conseil constitutionnel a écarté le grief d'inconstitutionnalité. En effet, le législateur a entendu favoriser l'emploi en allégeant le coût des charges sociales pesant sur l'employeur. Pour définir les conditions ouvrant droit à cette réduction, le législateur s'est fondé sur des différences de situation en lien direct avec l'objet de la loi : il a pris en compte le régime juridique de l'employeur, les modalités selon lesquelles l'employeur est assuré contre le risque de privation d'emploi de ses salariés ainsi que le régime de Sécurité sociale auquel ces salariés sont affiliés. Ainsi, il a fondé son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en lien avec l'objectif poursuivi. L'intérêt de cette décision est triple : elle contribue à enrichir le régime contentieux du dispositif, assez pauvre, spécialement sur cette question précise du champ d'application (2) ; elle s'inscrit dans un mouvement général initié par le législateur et les institutions en charge de l'emploi (notamment le Conseil d'orientation de l'emploi) ou des comptes publics (notamment la Cour des comptes) de recherche d'efficacité des aides à l'emploi et de lutte contre ses effets pervers (effets d'aubaine, effet de substitution, effet de financement, trappe à la pauvreté...) ; enfin, elle nourrit le débat sur la capacité de l'Etat a accompagner les entreprises à ne pas délocaliser, à améliorer leur compétitivité, débat qui ne s'entend et ne se comprend que pour le secteur marchand, et non le secteur non marchand (dont les CCI).
Résumé

Par la réduction des cotisations à la charge de l'employeur, le législateur a entendu favoriser l'emploi en allégeant le coût des charges sociales pesant sur l'employeur. Pour définir les conditions ouvrant droit à cette réduction, le législateur s'est fondé sur des différences de situation en lien direct avec l'objet de la loi. Il a pris en compte le régime juridique de l'employeur, les modalités selon lesquelles l'employeur est assuré contre le risque de privation d'emploi de ses salariés ainsi que le régime de Sécurité sociale auquel ces salariés sont affiliés. Ainsi, il a fondé son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en lien avec l'objectif poursuivi. Les dispositions contestées ne créent pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques.


I - Objectifs assignés à la réduction "Fillon"

A - Une aide à l'emploi "anti délocalisations"

1 - Objet, calcul

La réduction "Fillon" se présente comme une réduction s'appliquant aux seules cotisations patronales de Sécurité sociale, à l'exclusion des autres contributions (versement transport, Fnal, retraite complémentaire, assurance-chômage, contribution solidarité autonomie). Les cotisations salariales ne sont pas concernées. La réduction vise les gains et rémunérations inférieurs au salaire minimum de croissance majoré de 60 % ; elle est dégressive, pour être nulle au niveau 1,6 Smic (CSS., art. L. 241-13, I).

Initialement (période du 1er juillet 2005 au 30 juin 2007), le coefficient maximal de réduction applicable était fixé à 0,26, ce coefficient maximal étant atteint pour un salaire horaire égal au Smic. Un salarié bénéficiant d'une rémunération égale au Smic ouvrait droit à une réduction de cotisations sociales patronales égale à 26 % de son salaire mensuel. Ce coefficient décroissant en fonction de la rémunération, il devenait nul pour un salaire horaire égal à 1,6 Smic.

A partir du 1er juillet 2007, une distinction a été opérée selon l'effectif de l'entreprise. Une formule spéciale a été retenue pour les entreprises de moins de 20 salariés. Le coefficient est calculé selon une formule (CSS, art. D. 241-7 mod. N° Lexbase : L1061IUT) : pour les entreprises de moins de 20 salariés, coefficient = (0,281/0,6) × (1,6 × Smic calculé pour un an/ rémunération annuelle brute - 1) ; pour les entreprises d'au moins 20 salariés, coefficient = (0,26/0,6) × (1,6 Smic calculé pour un an/rémunération annuelle brute - 1).

Bref, deux coefficients s'appliquent à la réduction générale de cotisation : un coefficient de 0,26 pour les entreprises de 20 salariés et plus et un autre de 0,281 pour celles d'un à 19 salariés (CSS, art. L. 241-13).

2 - Objectifs

En mettant en place ce dispositif, le législateur et le pouvoir réglementaire visaient deux objectifs, d'une portée et d'un intérêt inégal. D'abord, et très fondamentalement, réduire le coût du travail pour inciter les entreprises à maintenir leurs activités en France. Cet objectif a été souligné par les nombreux travaux parlementaires (3), les travaux du Conseil d'orientation pour l'emploi (4), et enfin ceux de la Cour des comptes (5). Partant du constat d'un coût élevé de la main d'oeuvre peu qualifiée en France, les pouvoirs publics ont voulu soutenir les entreprises utilisatrices de main d'oeuvre faiblement qualifiée mais hautement substituable, en réduisant les charges sociales (d'où le mécanisme de la réduction "Fillon", qui ne vise que les cotisations patronales), pour inciter les entreprises à maintenir leur production sur le territoire français, alors même que ces entreprises pourraient avoir la tentation de délocaliser leurs activités (dont la particularité réside dans la mobilisation d'une main d'oeuvre faiblement qualifiée) vers des pays où cette même main d'oeuvre, peu qualifiée, serait beaucoup moins chère. La réduction "Fillon" s'inscrit dans la continuité d'un certain nombre de mesures animées des mêmes objectifs : en 1993, réduction générale des cotisations patronales de Sécurité sociale pour les bas salaires (6) ; en 1992, abattement de cotisations patronales en faveur du travail à temps partiel ; en 1995, réduction sur les bas salaires (dite ristourne "Juppé") (7).

Ensuite, et plus accessoirement, inciter les branches professionnelles à revaloriser leurs grilles salariales. Ce second objectif n'a pas été formalisé ab initio, mais ultérieurement. La loi n° 2008-1258 du 3 décembre 2008, en faveur des revenus du travail (N° Lexbase : L9777IBQ) a, en effet, mis en place un mécanisme de "conditionnalité" de la réduction générale de cotisations patronales (8). A défaut, le montant de l'exonération est diminué de 10 % au titre des rémunérations versées cette même année. Lorsqu'elle ne s'acquitte pas de son obligation trois années de suite, la réduction est entièrement supprimée. Seules sont visées les entreprises soumises à l'obligation annuelle de négocier sur les salaires, c'est-à-dire celles de 50 salariés et plus disposant d'une section syndicale et celles de moins de 50 salariés dans lesquelles un syndicat représentatif a désigné un délégué du personnel comme délégué syndical.

B - Un objectif maintenu malgré de nombreuses réformes

Le dispositif a été amendé, rectifié, modifié à de nombreuses reprises, mais jamais le législateur n'est revenu sur la dimension essentielle et originelle de la réduction "Fillon", à savoir inciter les entreprises à ne pas délocaliser en réduisant le coût du travail.

- 2004 : le législateur a abaissé le niveau de rémunération horaire à partir duquel le montant de la réduction s'annule (loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004, art. 29 N° Lexbase : L5203GUA) (9) ;

- 2006 : le législateur a amélioré le niveau d'exonération accordé aux entreprises de moins de 20 salariés, en vue de leur faire bénéficier d'une exonération totale de charges sociales patronales (loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006, art. 41, V N° Lexbase : L8561HTA) ;

- 2007 : l'article 53 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 (N° Lexbase : L5929HU7) a élargi le bénéfice de cette exonération totale aux groupements d'employeurs, pour les salariés exclusivement mis à disposition, au cours d'un même mois, des membres du groupement dont l'effectif est inférieur à 20 salariés. La loi n° 2007-1223 du 21 août 2007, en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (loi "TEPA") (N° Lexbase : L2417HY8) avait modifié les règles de calcul de la réduction générale de cotisations patronales de Sécurité sociale (10). L'article 12 de la loi n° 2007-1786 du 19 décembre 2007, de financement de la Sécurité sociale pour 2008 (N° Lexbase : L5482H3G) a apporté une nouvelle modification, excluant de l'application de la réduction générale la rémunération des temps de pause, d'habillage et de déshabillage ;

- 2008 : la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 (N° Lexbase : L7358IAR) a prévu que le coefficient de réduction de 0,281 continue de s'appliquer pendant trois ans aux employeurs qui, en raison de l'accroissement de leurs effectifs, dépassent au titre de l'année 2008, 2009 ou 2010, pour la première fois, l'effectif de 19 salariés. La mesure a été reconduite pour une année par la loin n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 (art. 135) (N° Lexbase : L9901INZ) ;

- 2010 : la loi n° 2010-1594 du 20 décembre 2010, de financement de la Sécurité sociale pour 2011 (LFSS 2011) (N° Lexbase : L9761INT) a modifié la base de calcul de la réduction "Fillon", qui est désormais annualisé, c'est-à-dire effectué sur la base de la rémunération annuelle et non plus de la rémunération versée au cours de chaque mois civil (11). De même, la LFSS 2011 a exclu les cotisations d'accidents du travail et maladies professionnelles de la liste des cotisations concernées par la réduction "Fillon". Celle-ci n'est donc désormais applicable qu'aux cotisations d'assurances sociales et d'allocations familiales (CSS, art. L. 241-13, modifié) (12) ;

- 2012 : l'article 37 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012, relative à la simplification du droit et à l'allègement des démarches administratives (N° Lexbase : L5099ISN) a remplacé le seuil (CSS, art. L. 241-18 N° Lexbase : L9509ITD) "entreprises employant au plus 20 salariés" (soit 20 salariés ou moins) par le seuil "moins de 20 salariés" (soit strictement moins de 20 salariés). La loi n° 2012-958 du 16 août 2012 (N° Lexbase : L9357ITQ) (13) a confirmé la nouvelle définition du seuil d'effectif mis en place par la première loi de finances rectificative pour 2012 (loi n° 2012-354 du 14 mars 2012 N° Lexbase : L4518IS7), les "employeurs de moins de 20 salariés", au lieu des "employeurs de 20 salariés au plus".

De même, les modalités d'application de la réduction générale de cotisations patronales aux régimes spéciaux des marins, des mines, des clercs et employés de notaires ont été réécrites afin de prendre en compte l'annualisation de son calcul, ainsi que la réintégration des heures supplémentaires dans la rémunération à prendre en compte (14).

Enfin, le décret n° 2012-1074 du 21 septembre 2012 (N° Lexbase : L1032IUR) a tiré les conséquences de l'abrogation du dispositif dit de "TVA sociale" et de celle du barème progressif des cotisations d'allocations familiales, qui aurait dû s'appliquer aux rémunérations versées à compter du 1er octobre 2012 (décret n° 2012-664 du 4 mai 2012 N° Lexbase : L0206ITS).

Bref, toutes ces réformes ont modifié l'assiette, le calcul, le montant, le régime de la réduction "Fillon", mais le législateur est toujours resté fidèle à l'objectif initial assigné au dispositif, de soutien aux entreprises utilisatrices de main d'oeuvre peu qualifiée, et susceptibles de délocaliser leur production (activités industrielles, activités de transformation, agriculture), mais, a contrario, peu voire pas du tout, activités de service.

II - Un champ d'application encadré, conformément aux objectifs assignés à la réduction "Fillon"

A - Un champ d'application limitativement compris

Le législateur (CSS, art. L. 241-13, II, dans sa rédaction de la loi du 17 janvier 2003) a limité le bénéfice de la réduction "Fillon" au secteur privé ("secteur marchand", selon la terminologie employée). La réduction générale de cotisations patronales de Sécurité sociale s'applique :

- aux employeurs du secteur privé relevant du régime d'assurance chômage (entreprises industrielles, commerciales, artisanales et agricoles ; entreprises du secteur des services ; professions libérales ; sociétés civiles ; associations ; offices publics et ministériels ; syndicats professionnels ; organismes de Sécurité sociale n'ayant pas le caractère d'établissement public) ;

- aux employeurs de salariés dont l'emploi ouvre droit à l'allocation d'assurance chômage (entreprises nationales ; établissements publics industriels et commerciaux de collectivités territoriales ; sociétés d'économie mixte dans lesquelles ces collectivités ont une participation majoritaire) ;

- à certains employeurs des régimes spéciaux de Sécurité sociale (marins, mines, clercs et employés de notaires CSS., art. L. 241-13, II ; L. 711-13 N° Lexbase : L9510ITE) ;

- aux employeurs de salariés agricoles (C. rur., art. L. 741-4 N° Lexbase : L9544ITN ; C. rur., art. L. 741-15 N° Lexbase : L9514ITK ; C. rur., art. L. 751-17 N° Lexbase : L9717IN9).

Sont, en revanche, exclus : l'Etat ; les collectivités territoriales ; les établissements publics administratifs, scientifiques ou culturels ; les chambres de commerce et d'industrie, de métiers et d'agriculture ; les particuliers employeurs ; les exploitants publics de la Poste et de France Télécom ; les employeurs relevant de régimes spéciaux de Sécurité sociale, excepté les régimes des marins, des mines, des clercs et employés de notaires (SNCF, Banque de France, EDF-GDF, RATP, Théâtre national de l'opéra, Comédie française) (15).

La définition précise de ce champ d'application s'explique aisément : la réduction "Fillon", dans le prolongement des dispositifs d'aide à l'emploi des entreprise, ciblées sur les "bas salaires" (supra), est intitulée "allègements généraux", réduction "Fillon", "réduction générale de cotisations", "réduction générale de cotisations patronales de Sécurité sociale". La réduction "Fillon" vise les bas salaires (jusqu'à 1,6 le Smic), et se présente comme une aide destinée aux entreprises utilisant une main d'oeuvre peu ou pas qualifiée, dans le secteur industriel essentiellement. Dans ces conditions, la réduction "Fillon" s'adresse exclusivement au secteur dit "marchand", puisque le secteur non marchand ne correspond pas du tout à ce profil d'entreprise. Le secteur non marchand n'est pas touché, a priori, par des risques de délocalisation de ses activités, contrairement au secteur industriel.

B - Une interprétation du champ d'application par les juges et par le Conseil constitutionnel

1 - Une interprétation du champ d'application par les juridictions du fond

La cour d'appel de Rouen (CA Rouen, 20 septembre 2006, n° 05/04686 N° Lexbase : A1618G3C) a souligné la variété des missions des chambres de commerce et d'industrie, ainsi que celle des statuts : le personnel relève de statuts juridiques différents, suivant leur affectation. Dans le cadre des activités industrielles et commerciales des chambres, les salariés relèvent du régime de droit privé. La cour d'appel affirme que le personnel portuaire de la CCI de Dieppe ressort du service industriel et commercial de la chambre et relève du régime général, alors, la réduction "Fillon" s'applique.

2 - Une interprétation du champ d'application par le Conseil constitutionnel conforme

En l'espèce de la décision étudiée, l'employeur (la CCI de Brest), à la suite d'un contrôle portant sur la période s'étendant du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006, a contesté le redressement décidé par l'URSSAF du Finistère. A l'occasion de l'appel formé contre la décision du tribunal des affaires de Sécurité sociale de Brest, la CCI de Brest a posé une question prioritaire de constitutionnalité. Selon la requérante, l'exclusion des chambres de commerce et d'industrie du bénéfice de la réduction de cotisations sociales patronales, a eu pour effet de placer les chambres de commerce et d'industrie, lorsqu'elles concourent à des marchés identiques, en situation désavantageuse par rapport à des sociétés de droit privé. Aussi, ces dispositions méconnaîtraient le principe d'égalité devant les charges publiques garanti par l'article 13 de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 (N° Lexbase : L1360A9A).

Le Conseil constitutionnel a écarté ce grief d'inconstitutionnalité (cons. 8). En effet, le législateur a entendu, avec ce dispositif, favoriser l'emploi en allégeant le coût des charges sociales pesant sur l'employeur. Pour définir les conditions ouvrant droit à cette réduction, le législateur s'est fondé sur des différences de situation en lien direct avec l'objet de la loi : il a pris en compte le régime juridique de l'employeur, les modalités selon lesquelles l'employeur est assuré contre le risque de privation d'emploi de ses salariés ainsi que le régime de Sécurité sociale auquel ces salariés sont affiliés. Bref, il a fondé son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en lien avec l'objectif poursuivi. Les dispositions contestées ne créent pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques.

La solution retenue par le Conseil constitutionnel est tout à fait conforme à l'esprit des textes, dans la mesure où les dispositifs législatifs et réglementaires ont clairement ciblé la réduction "Fillon" sur les entreprises appartenant au secteur industriel et agricole, utilisatrice de main d'oeuvre peu qualifiée, et à ce titre tentées par une délocalisation, en raison du coût élevé de cette main d'oeuvre en France. Dans ces conditions, le bénéfice de la réduction "Fillon" au personnel des chambres de commerce et d'industrie n'a pas de sens, car elles ne correspondent absolument pas au cahier des charges : elles ne sont pas susceptibles de délocaliser leurs activités, ne sont donc pas concernées par un problème de coût de la main d'oeuvre et, au final, de compétitivité.


(1) Cass. civ. 2, 17 janvier 2013, n° 12-40.090, F-D (N° Lexbase : A5071I39).
(2) V. nos obs., Calcul de la réduction "Fillon" et indemnités de congés payés, en application de la "règle du dixième" (Cass. soc., 10 mai 2012, n° 11-14.519 N° Lexbase : A1160ILK), Lexbase Hebdo n° 487 du 31 mai 2012 - édition sociale (N° Lexbase : N2188BT9). Cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" (N° Lexbase : E8347EQ9).
(3) Y. Bur, Pour une révision générale des exonérations de cotisations sociales, Rapport, Assemblée nationale n° 1001, juin 2008, spéc. p. 265 ; G. Gorce, F. Lefebvre, Rapport d'information, Assemblée nationale n° 745, 26 mars 2008 ; S. Dassault, Avis, Sénat n° 48 (2008-2009), 22 octobre 2008.
(4) Conseil d'orientation pour l'emploi, Rapport au Premier Ministre relatif aux aides publiques, 8 février 2006, p. 36.
(5) Le marché du travail : face à un chômage élevé, mieux cibler les politiques, Rapport public thématique, janvier 2013 ; Communication à la commission des finances, de l'économie générale et du Plan de l'Assemblée nationale, Les exonérations de charges sociales en faveur des territoires et des secteurs d'activité, dans Y. Bur, Pour une révision générale des exonérations de cotisations sociales, Rapport, Assemblée nationale n° 1001, juin 2008, préc., spéc. p. 246 ; Les allègements et exonérations de charges sociales, Rapport public annuel, 2009 ; L'intégration dans un barème, des taux de cotisations patronales et des exonérations sur les bas salaires et sur les heures supplémentaires, Communication à la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale, mai 2008, dans P. Méhaignerie, Rapport d'information, Assemblée nationale n° 1002, 25 juin 2008.
(6) Loi n° 93-953 du 27 juillet 1993, relative au développement de l'emploi et de l'apprentissage (N° Lexbase : L4793GU3) : institution d'un allégement des cotisations patronales d'allocations familiales (CSS, art. L. 241-6-1 N° Lexbase : L4602ISA), exonération totale (5,4 points de cotisations) jusqu'à 1,1 Smic et de moitié entre 1,1 et 1,2 Smic, applicable aux gains et rémunérations versés à compter du 1er juillet 1993. La loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993, relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle (N° Lexbase : L7486AI4) a porté ces seuils par étapes, jusqu'au 1er janvier 1998, à respectivement 1,6 et 1,7 Smic.
(7) Loi n° 95-882 du 4 août 1995, relative à des mesures d'urgence pour l'emploi et la Sécurité sociale (N° Lexbase : L0869BDK) : mise en place d'une réduction dégressive, dite ristourne "Juppé", au profit de l'ensemble des employeurs du secteur privé soumis à l'obligation d'assurance chômage (à l'exception des particuliers employant des salariés à domicile), comprenant une baisse de la part patronale des cotisations sociales fixée à 12,8 points au niveau du Smic, puis s'annulant lorsque le salaire parvient à un seuil de 1,2 Smic (CSS, art. L. 241-13).
(8) Ch. Willmann, Les contreparties aux exonérations de charges sociales : deux lois pour rien ? Dr. soc., 2009, p. 168 et ref. citées.
(9) Circ. DSS, n° 2005/139, 15 mars 2005 (N° Lexbase : L2133G8I) ; décret n° 2005-88 du 4 février 2005 (N° Lexbase : L5171G7N).
(10) Décret n° 2007-1380 du 24 septembre 2007 (N° Lexbase : L5255HYB) ; Circ. DSS, n° 2007-358, 1er octobre 2007 (N° Lexbase : L5768HYB) ; Circ. DSS, n° 2007-422, 27 novembre 2007, portant complément d'information sur la mise en oeuvre de l'article 1er de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (N° Lexbase : L5202H33) ; Circ. DSS, n° 2008-34, 5 février 2008, portant diffusion d'un "questions/réponses" relatif aux modalités techniques d'application de l'article 1er de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 (N° Lexbase : L8018H3D).
(11) Décret n° 2010-1779 du 31 décembre 2010 (N° Lexbase : L9979INW) ; Circ. DSS, n° 2011/34, 27 janvier 2011, relative à la mise en oeuvre de l'annualisation de la réduction générale de cotisations sociales patronales (N° Lexbase : L3737IP4) ; Lettre circ. Acoss n° 2011-39, 29 mars 2011, p. 8-10 (N° Lexbase : L1373IPK) ; Lettre circ. Acoss n° 2011-38, 29 mars 2011 (N° Lexbase : L1372IPI) ; Lettre circ. Acoss n° 2011-40, 5 avril 2011 (N° Lexbase : L6258IWP) ; Lettre circ. Acoss n° 2011-42, 15 avril 2011 (N° Lexbase : L6259IWQ) ; Lettre circ. Acoss n° 2012-80, 11 juillet 2012 (N° Lexbase : L6261IWS).
(12) Lettre min. 2011/042, 5 juillet 2011 diffusée par la lettre circulaire Acoss n° 2011-87 du 29 juillet 2011 (N° Lexbase : L6260IWR).
(13) Circ. DSS, n° 2012/319, 18 août 2012, relative au régime social applicable aux heures supplémentaires et au taux du forfait social résultant de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 (N° Lexbase : L0252IUU) ; LSQ, n° 16165, 3 septembre 2012 et n° 16170, 10 septembre 2012 ; SSL, n° 1548, 27 août 2012 ; Lettre circ. ACOSS n° 2012-103 du 11 décembre 2012 (N° Lexbase : L6262IWT) ; LSQ, n° 16279, 6 février 2013.
(14) Décret n° 2012-1524 du 28 décembre 2012 (N° Lexbase : L7994IUM), LSQ, n° 16258, 8 janvier 2013.
(15) Ces employeurs peuvent toutefois bénéficier de la réduction générale pour les salariés titulaires d'un contrat de droit privé, affiliés au régime général, pour lesquels l'employeur est tenu de se placer sous le régime d'assurance chômage, en application de l'article L. 5422-13 du Code du travail (N° Lexbase : L2771H9I) ou de l'article L. 5424-1 du Code du travail (N° Lexbase : L9122IMS).

Décision

Cons. const., décision n° 2013-300 QPC, 5 avril 2013 (N° Lexbase : A5759KBW)

Textes concernés : CSS, art. L. 241-13 ([LXB=L1981IP3)])

Mots-clés : réduction "Fillon", champ d'application, employeurs bénéficiaires, CCI, exclusion, rupture d'égalité devant les charges publiques (non)

Liens base : (N° Lexbase : E8347EQ9)

newsid:436709

Cotisations sociales

[Brèves] Rappel de la prescription triennale des cotisations de Sécurité sociale indues

Réf. : CA Orléans, 27 mars 2013, n° 11/02711 (N° Lexbase : A0359KBW)

Lecture: 2 min

N6725BTA

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Le 18 Avril 2013

La demande en remboursement des cotisations de Sécurité sociale indûment versées se prescrit par trois ans à compter de la date à laquelle lesdites cotisations ont été acquittées Telle est la solution retenue par la cour d'appel d'Orléans, dans un arrêt rendu le 27 mars 2013 (CA Orléans, 27 mars 2013, n° 11/02711 N° Lexbase : A0359KBW).
Dans cette affaire, une commission de recours amiable ayant déclaré inopposable à la société intéressée la prise en charge d'un accident du travail dont son salarié, la Caisse régionale d'assurance maladie (CRAM) a notifié à cet employeur des taux de cotisations AT/MP rectifiés pour les années 1999 à 2008. La société a, alors, sollicité le remboursement des cotisations indûment versées pendant cette période, mais l'URSSAF a limité le remboursement à celles réglées après le 1er février 2005 en opposant la prescription de l'article L. 243-6 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L9558INC) pour la période antérieure. La société fait valoir en appel que la prescription de la demande de remboursement peut être interrompue par une contestation du taux de cotisation AT/MP ou par une contestation relative à l'opposabilité de la décision de la CPAM et qu'un employeur, au regard de l'article R. 143-21 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L5883IUG), n'est pas obligé de saisir d'emblée la cour nationale de l'incapacité mais peut d'abord présenter une contestation amiable. Elle prétend justifier d'une contestation conservatoire de son taux de cotisation accidents du travail de l'année 1999 formée auprès de la CRAM, notamment au titre du dossier du même salarié, ce qui a eu un effet interruptif de la prescription. Elle se réfère à la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle l'interruption de la prescription peut s'étendre d'une action à une autre lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent à un même but, et considère que la contestation du taux de cotisation tend au même but que la demande de remboursement. Elle souligne que la distinction opérée par l'URSSAF entre demande de remboursement et répétition de l'indu est artificielle. La cour estime qu'en l'espèce, aucun élément ne permet de fixer le point de départ du délai de prescription à une date différente de celle prévue par l'article L. 243-6 précité, de sorte que la réclamation de la société ne peut être accueillie (sur le remboursement des cotisations indûment versée, cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E3192ADL).

newsid:436725

Droit social européen

[Brèves] Entrave à la libre circulation des travailleurs : décret imposant de rédiger en néerlandais tous les contrats de travail à caractère transfrontalier

Réf. : CJUE, 16 avril 2013, aff. C-202/11 (N° Lexbase : A1317KCR)

Lecture: 2 min

N6714BTT

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Le 18 Avril 2013

Un décret imposant de rédiger en néerlandais tous les contrats de travail à caractère transfrontalier, sous peine de nullité, enfreint la libre circulation des travailleurs. Telle est la solution retenue par la Cour de justice de l'Union européenne dans un arrêt du 16 avril 2013 (CJUE, 16 avril 2013, aff. C-202/11 N° Lexbase : A1317KCR).
Dans cette affaire, un ressortissant néerlandais réside aux Pays-Bas et a été engagé en 2004, en qualité de "Chief Financial Officer", par une société située à Anvers, mais appartenant à un groupe multinational dont le siège est établi à Singapour. Le contrat de travail, rédigé en anglais, stipulait que le salarié exerçait ses activités professionnelles en Belgique. Par lettre rédigée en anglais, il a été licencié, en 2009, par la société qui lui a versé une indemnité de licenciement, calculée en application du contrat de travail. Il a saisi le tribunal du travail de Belgique en soutenant que les dispositions du contrat de travail étaient entachées de nullité pour violation des dispositions du décret de la Communauté flamande sur l'emploi des langues. La juridiction belge demande si l'article 45 du TFUE (N° Lexbase : L2693IPG) doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une réglementation d'une entité fédérée d'un Etat membre, telle que celle en cause au principal, qui impose à tout employeur ayant son siège d'exploitation sur le territoire de cette entité de rédiger les contrats de travail à caractère transfrontalier exclusivement dans la langue officielle de cette entité fédérée, sous peine de nullité de ces contrats relevée d'office par le juge. La Cour constate que seule la langue néerlandaise fait foi dans la rédaction des contrats de travail à caractère transfrontalier conclus par des employeurs dont le siège d'exploitation se trouve dans la région de langue néerlandaise de la Belgique. Par conséquent, une telle réglementation, pouvant avoir un effet dissuasif envers les travailleurs et employeurs non néerlandophones, constitue une restriction à la libre circulation des travailleurs. Or, souligne la Cour, les parties à un contrat de travail à caractère transfrontalier ne maîtrisent pas nécessairement la langue officielle de l'Etat membre concerné. Dans une telle situation, la formation d'un consentement libre et éclairé entre les parties requiert que celles-ci puissent établir leur contrat dans une langue autre que la langue officielle de cet Etat membre. Par ailleurs, une réglementation qui permettrait également d'établir une version faisant foi dans une langue connue de toutes les parties concernées serait moins attentatoire à la libre circulation de travailleurs tout en étant propre à garantir les objectifs poursuivis par une telle réglementation. Ainsi, le décret contesté va, selon la Cour, au-delà de ce qui est strictement nécessaire pour atteindre les objectifs invoqués et ne saurait être considéré comme proportionné (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E7650ES7).

newsid:436714

Emploi

[Brèves] Activité partielle de longue durée

Réf. : Décret n° 2013-309 du 12 avril 2013, portant modification des dispositions du code du travail relatives à l'activité partielle de longue durée (N° Lexbase : L6190IW8)

Lecture: 1 min

N6732BTI

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Le 18 Avril 2013

Le décret n° 2013-309 du 12 avril 2013, portant modification des dispositions du Code du travail relatives à l'activité partielle de longue durée (N° Lexbase : L6190IW8), publié au Journal officiel du 13 avril 2013, reconduit jusqu'au 31 juillet 2013 les dispositions permettant, par dérogation à l'article D. 5122-43 du Code du travail (N° Lexbase : L1427IEL), d'abaisser de trois mois à deux mois la durée minimale des conventions ouvrant droit au bénéfice du régime de l'activité partielle de longue durée (sur le chômage partiel et l'activité partielle de longue durée, cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E4610ETW).

newsid:436732

Emploi

[Brèves] Chômage : allocation chômage versée dans l'Etat de résidence du travailleur frontalier, sauf application du régime transitoire du Règlement européen de 2004

Réf. : CJUE, 11 avril 2013, aff. C-443/11 (N° Lexbase : A1364KCI)

Lecture: 2 min

N6721BT4

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Le 25 Avril 2013

Un travailleur frontalier au chômage complet ne peut demander une allocation de chômage que dans son Etat de résidence, sauf lorsque le régime transitoire du Règlement n° 883/2004 de 2004 (N° Lexbase : L7666HT4) lui est applicable. Telle est la solution retenue par la Cour de justice de l'Union européenne, dans un arrêt rendu le 11 avril 2013 (CJUE, 11 avril 2013, aff. C-443/11 N° Lexbase : A1364KCI).
Dans cette affaire, des travailleurs frontaliers de nationalité néerlandaise ont travaillé aux Pays-Bas alors qu'ils résidaient, les deux premiers, en Belgique et, le troisième, en Allemagne. L'un des travailleurs s'est trouvé en situation de chômage à compter de 2010, soit après l'entrée en vigueur du Règlement européen n° 988/2009 du 16 septembre 2009 sur la coordination des systèmes de Sécurité sociale (N° Lexbase : L8947IE4). Il a demandé l'octroi d'une prestation de chômage auprès des autorités néerlandaises, mais celles-ci ont rejeté sa demande en se fondant sur le règlement. Les deux autres salariés ont perdu leur emploi respectif avant l'entrée en vigueur du nouveau règlement, et ont bénéficié de prestations de chômage accordées par les autorités néerlandaises. Ils ont chacun retrouvé un emploi après l'entrée en vigueur de ce règlement, avant d'être de nouveau en situation de chômage. Les autorités néerlandaises ont refusé de reprendre les versements des prestations, en s'appuyant sur l'entrée en vigueur du Règlement de 2009. Le Règlement européen de 2004 modifié par le Règlement de 2009 prévoit que les travailleurs frontaliers se trouvant au chômage complet se mettent à la disposition du service de l'emploi de leur pays de résidence. Ils peuvent à titre complémentaire se mettre à la disposition des services de l'emploi du pays où ils ont travaillé en dernier lieu. Le Tribunal d'Amsterdam interroge la Cour de justice sur l'interprétation du nouveau règlement. En effet, sur le régime existant sous l'empire de l'ancien règlement, la Cour (CJCE, 12 juin 1986, aff. C-1/85 N° Lexbase : A8097AUG) a considéré qu'un travailleur frontalier qui a conservé des liens personnels et professionnels particulièrement étroits dans l'Etat membre de son dernier emploi peut choisir l'Etat membre dans lequel il se met à la disposition des services de l'emploi et duquel il perçoit une prestation de chômage. Elle relève que selon la volonté du législateur les dispositions du nouveau règlement ne doivent pas être interprétées à la lumière de sa jurisprudence antérieure. Le dispositif transitoire du règlement s'applique aux travailleurs frontaliers se trouvant en chômage complet qui, compte tenu des liens qu'ils ont conservés dans l'Etat membre de leur dernier emploi, perçoivent de celui-ci des allocations de chômage sur le fondement de la législation de cet Etat aussi longtemps que la situation qui a prévalu reste inchangée. La notion de "situation inchangée" doit être appréciée au regard de la législation nationale.

newsid:436721

Protection sociale

[Evénement] La généralisation de la couverture complémentaire santé : quelles conséquences ?

Lecture: 12 min

N6654BTM

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par Elise Rossi, SGR Protection sociale

Le 19 Avril 2013

La généralisation de la couverture complémentaire santé est un sujet, a priori consensuel, participant à l'amélioration à l'accès aux soins. Pourquoi utiliser le terme de "généralisation" de la complémentaire santé alors qu'aujourd'hui, 94 % de la population française dispose d'une couverture complémentaire ? En réalité, ce chiffre masque de nombreuses disparités. En effet, environ 60 % des personnes couvertes le sont à titre individuel et 40 % le sont via leur entreprise par des contrats collectifs. Or, l'assurance à titre collectif est souvent plus avantageuse pour les salariés, tant en terme de cotisations que de prestations. Le rapport 2011 de la COMAREP (1) indique dans une enquête sur 270 branches que seules 48 branches sont couvertes par un régime de frais de santé, soit 18 % du total. L'emploi est devenu un mode d'accès important à la complémentaire santé (pour 40 % des personnes couvertes) mais de façon inégalitaire selon la taille de l'entreprise, sa composition socioprofessionnelle, sa situation géographique, son secteur d'activité. Au-delà de l'accès aux soins, la protection sociale d'entreprise fait partie de ce qu'on nomme les droits sociaux. Elle est devenue un élément permettant d'attirer et fidéliser des salariés. L'article 1er de l'ANI (2), dont le projet de loi sur la sécurisation de l'emploi de loi le transposant vient d'être adopté par l'Assemblée nationale le 9 avril 2013, prévoit l'ouverture, à partir du 1er juin 2013, de négociations au niveau des branches professionnelles pour permettre aux salariés qui ne bénéficient pas encore d'une couverture collective à adhésion obligatoire en santé, au niveau de leur branche ou de leur entreprise, d'y accéder. Néanmoins, certaines voix se sont élevées pour dénoncer ce socle commun, adopté par la branche, qui pourrait être inférieur à la CMU-C. La généralisation de la complémentaire santé aurait-elle pour conséquence le nivellement vers le bas des garanties ? Par ailleurs, une autre question est posée : la généralisation de la couverture complémentaire santé est-elle susceptible de favoriser la solidarité intergénérationnelle ? Sur ce sujet, une table ronde des rendez-vous Experts Klesia s'est réunie, le 3 avril 2013, dans l'optique de favoriser les échanges entre les différents acteurs de la protection sociale complémentaire et proposer des illustrations concrètes.

Le débat public a largement été focalisé sur la question des clauses de désignation. Sans nier les enjeux que cette question de désignation de l'organisme assureur suscitent, on ne peut réduire cet article 1er à cette problématique. A défaut, comme l'a fait remarquer Maître Jacques Barthélemy, "cela donne l'illusion qu'on assure la promotion ici du contrat d'assurance donc d'un produit de consommation alors que l'objectif de la loi est d'organiser un élément de protection sociale par le biais de l'amélioration des conditions de travail". Plus largement le débat n'a pas fait véritablement état des conséquences de la généralisation et notamment de ses interactions sur les couvertures santé des retraités.

I - La nature de la généralisation de la complémentaire santé

Comme le remarque Maître Jacques Barthélémy, l'article 1er de l'ANI pourrait apparaître comme étant étranger au reste de l'ANI et de la loi en discussion, une sorte de "cavalier social". Toutefois, l'a priori tombe rapidement car la généralisation de la couverture de la complémentaire santé participe à la même dynamique d'amélioration des conditions de travail. Cette "généralisation" participe à un droit à la santé, droit fondamental et s'inscrit dans l'objectif qui est celui du droit communautaire d'organiser un degré élevé de protection sociale y compris par le biais des institutions de protection sociale complémentaire.

  • La nature juridique du nouvel avantage

L'affirmation de Maître Barthélémy est sans équivoque : ce droit est "un droit du salarié et non du consommateur" se traduisant par une obligation faite à l'employeur. L'avocat poursuit en faisant un parallèle, ou plutôt, une distinction sur la nature de l'obligation avec l'exemple de l'ANI du 10 décembre 1977. Dans cet accord créant une obligation de l'employeur, ici en matière de salaire, qui réside dans le versement direct d'une prestation. Or, la nature de l'obligation prévue dans l'ANI du 11 janvier 2013 est bien différente. En effet, l'employeur est contraint d'assurer ses salariés auprès d'un organisme assureur qui devient prestataire. Les conséquences de cette nature de l'obligation ne sont pas anodines. Dans le premier cas, la responsabilité de l'employeur peut être mise en cause directement, dans le second, la responsabilité de l'employeur ne peut être qu'indirecte, par exemple en cas de défaut d'assurance. Selon Maître Barthélémy "l'impossibilité de couvrir les salariés met en cause la responsabilité de l'employeur au titre d'une perte de chance des salariés".

L'ANI et la loi de sécurisation de l'emploi prévoient l'obligation pour l'employeur de s'assurer. Cette obligation, si elle ne pose, a priori, pas de problèmes pour les grosses entreprises, pourrait s'avérer plus problématique pour les PME. A titre d'exemple, une société comprenant en tout et pour tout deux salariés, la soixantaine et la santé vacillante voire défaillante, rencontrera de vraies difficultés à s'assurer si sa branche n'a pas adopté de clause de désignation. Et dans l'hypothèse où elle arriverait à assurer ses salariés, dans ces conditions, les cotisations risqueraient d'être très élevées.

La généralisation de la couverture santé par le biais de la négociation d'entreprise est-elle l'unique option qui s'offrait aux partenaires sociaux ? Selon Jacques Barthélémy, plusieurs solutions auraient pu être envisagées. L'exemple de la fonction publique, et plus particulièrement de la fonction publique hospitalière où une autre solution a été adoptée, le démontre. Les solutions envisagées sont les suivantes :

- un abondement de la prime du salarié par l'employeur. Toutefois, la prime étant un élément du contrat de travail, elle entre dans l'assiette de cotisation de Sécurité sociale. La solution n'a, donc, pas été retenue, pour éviter une taxation supplémentaire ;

- une adhésion certes collective mais facultative dont la gestion aurait été confiée au comité d'entreprise ayant compétence en matière d'activité sociale ;

- un élément du statut collectif où une neutralité fiscale et sociale des cotisations peut être exercée. Cette dernière solution a été retenue notamment du fait des avantages fiscaux et sociaux qu'elle présente.

Un autre sujet est soulevé, celui de l'opposabilité des salariés de cette obligation. Il est prévisible que certains salariés ne souhaiteront pas être assurés par la couverture d'entreprise. Néanmoins, le souhait ne suffit pas, seules les personnes entrant dans des cas définis par le législateur pourront, à titre d'exception, ne pas être couvertes par l'assurance collective d'entreprise.

Dans le cas où le salarié remplirait les conditions pour être dispensé d'affiliation à la couverture collective, pour Maître Barthélémy, il est nécessaire qu'il y ait renonciation expresse de sa part. En outre, l'employeur ne doit pas négliger d'informer le salarié de ce à quoi il renonce afin que le refus résulte d'un consentement éclairé. Le salarié ne perd pas qu'une simple couverture santé, il perd la contribution employeur (50 % du total au minimum), la neutralité fiscale et sociale des cotisations réservée aux régimes collectifs obligatoire, la portabilité des droits gratuite pendant un temps lors du chômage et l'accès pour les retraités et invalides aux même système en vertu de l'article 4 de la loi "Evin" (3). A défaut d'avoir fourni ces informations, un an après, par exemple, le salarié qui se trouve en situation de chômage pourra réclamer à l'employeur sa part de cotisation. Il est donc nécessaire d'organiser au niveau de la branche une procédure d'information.

  • Les conséquences de la nature collective et obligatoire du droit à une complémentaire santé

La couverture santé, telle que prévue dans l'ANI, doit présenter un caractère collectif et obligatoire. Au niveau de la branche, le caractère collectif et obligatoire induit que seul un accord collectif signé entre les partenaires sociaux a la capacité de créer ces normes. Toutefois, au niveau de l'entreprise, le problème ne se pose pas de la même manière, il y a concurrence entre l'accord collectif d'entreprise, le référendum ou l'accord unilatéral de l'employeur. Or, "dans le microcosme de l'assurance collective on ne s'aperçoit pas que les effets du choix de telle ou telle source sont importants" (4). De fait, les conséquences sont de taille, notamment en terme de résistance possible du salarié et aussi de capacité à modifier le texte. Si la couverture a été mise en place via un accord d'entreprise, le salarié ne peut la refuser (sauf exceptions). A l'inverse, l'article 11 de la loi "Evin" est clair sur ce point : "aucun salarié employé dans une entreprise avant la mise en place, à la suite d'une décision unilatérale de l'employeur, d'un système de garanties collectives contre le risque décès, les risques portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ou liés à la maternité ou les risques d'incapacité de travail ou d'invalidité ne peut être contraint à cotiser contre son gré à ce système". Autre exemple, après dénonciation d'un accord d'entreprise, ce dernier continue de produire ses effets pendant un certain temps, et peut même amener à la constitution d'avantages individuels acquis. Ainsi, les solutions retenues au niveau de l'entreprise pour concrétiser l'obligation d'assurance ne sont pas les mêmes et pourraient amener une grande hétérogénéité entre entreprises.

La clause de désignation, qui a suscité une vive polémique, n'est pas obligatoire, les accords de branche selon le projet de loi "peuvent" y recourir. Ainsi, si la mise en place des garanties frais de santé dans l'accord de branche n'est pas assortie d'une clause de désignation, l'accord d'entreprise peut toujours y déroger, y compris en moins favorable sauf si l'accord l'interdit.

  • L'objet de l'accord : un régime de prévoyance et non un système

Maitre Barthélémy qui souhaite "faire oeuvre de pédagogie" souligne la différence fondamentale entre un système de prévoyance et un régime de protection sociale complémentaire. Or, les négociateurs oublient souvent cette nuance pourtant lourde de conséquences. Dans un système de protection sociale complémentaire, les partenaires sociaux se contentent d'indiquer la nature des niveaux des garanties, et éventuellement la clé de répartition de la cotisation totale. "C'est un élément de salaire différé point !" précise Maitre Barthélémy. En pareil cas, l'accord d'entreprise peut parfaitement déroger à la convention de branche y compris en moins favorable, depuis la loi n° 2004-391du 4 mai 2004, relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social (N° Lexbase : L1877DY8), sauf si la convention de branche l'interdit. En revanche, dans un régime de protection sociale complémentaire, les partenaires sociaux, bien évidemment, mettent en place la nature des niveaux des garanties mais poursuivent, en outre, un objectif de solidarité qui se concrétise par des droits non contributifs : une action sociale, une politique de prévention et pas simplement par un taux de cotisation unique pour toutes les entreprises de la branche.

L'objectif de solidarité peut ne pas être suivi par les partenaires sociaux, c'est un choix. Avant de discuter sur le choix de l'assureur, les partenaires sociaux doivent d'abord faire ce choix initial et fondamental entre se contenter d'un système ou mettre en place un régime. Si le choix se porte sur un régime de prévoyance, les clauses de désignation sont alors licites au regard du droit de l'Union Européenne. Jacques Barthélémy, se fondant sur l'article 101 TFUE (N° Lexbase : L2398IPI) qui prohibe les ententes illicites, affirme qu'un régime de prévoyance n'est jamais une entente prohibée en raison de sa nature d'accord entre partenaires sociaux en liaison avec le droit fondamental de négociation de son objet : l'amélioration des conditions de travail mettant un système de solidarité (4). Néanmoins, l'avocat soutient que la moitié au moins des clauses de désignations existantes sur le marché sont illicites car les partenaires sociaux n'ont fait que définir la nature des garanties, c'est-à-dire établir un système et non pas un régime, où l'objectif de solidarité fait défaut.

Martine Rapoport, Directrice des clientèles collectives chez CNP Assurances, fait état de l'opposition que suscite cette clause de désignation entre les trois principaux acteurs de la protection sociale (institutions de prévoyance, mutuelles et sociétés d'assurance) et qui vise, également, des catégories intermédiaires comme les consultants et les courtiers. En effet, le dispositif de désignation de l'organisme, chargé de fournir une couverture complémentaire à l'ensemble des entreprises d'une même branche risque d'apporter un grand bouleversement sur le marché de la complémentaire santé. Les sociétés d'assurance et les mutuelles redoutent que les institutions de prévoyance, institutions paritaire, qui gèrent la majorité des contrats collectifs, renforcent leur "position dominante". L'Autorité de la concurrence, dans son avis n° 13-A-11 rendu le 29 mars 2013 N° Lexbase : X2504AMP), s'est fait également le relais de cette crainte. Pour Maître Barthélémy "même si position dominante il y a, la clause de désignation n'est pas nécessairement critiquable dès l'instant où l'on poursuit un objectif de solidarité". En outre, le contrat d'assurance santé n'est pas un contrat de consommation, de ce fait, l'idée d'appel d'offre, telle que prévue dans l'ANI du 11 janvier 2013, est "inepte" selon Maître Barthélémy puisque cette notion d'appel d'offre concerne, uniquement, les marchés publics, ce qui n'a rien à voir avec le choix d'un assureur.

II - L'articulation de la généralisation des complémentaires santé avec la loi "Evin"

La généralisation de la complémentaire santé ne concerne que les salariés. Il est intéressant de constater que ceux qui, a priori, ont le plus besoin d'avoir accès à une couverture santé comme les étudiants, les retraités ou les chômeurs, ne sont pas compris dans cette généralisation. La logique de baser la généralisation des complémentaires santé sur la négociation collective exclut, de fait, les inactifs.

  • Impact sur les inactifs de la généralisation

Des mouvements pourraient être initiés par l'ANI et la loi sur la sécurisation de l'emploi, d'une partie de l'assurance individuelle vers l'assurance collective. Les mutuelles redoutent que ces mouvements conduisent à ne laisser couvrir par leurs soins une majorité de seniors. Il est évident que réfléchir sur la couverture santé des actifs interagit avec celle des inactifs et en particulier des retraités.

La thématique de la couverture des retraités n'est pas nouvelle, dans la mesure où la loi "Evin" dès 1989 l'a abordé. Parmi les dispositions légales organisant le maintien des garanties après la rupture du contrat de travail sous certaines conditions, figure l'article 4 de la loi "Evin". En application de cette disposition naît, pour le retraité, un contrat individuel d'assurance frais de santé avec l'organisme assureur. L'article 4, alinéa 3 de la loi et l'article 1er du décret d'application n° 90-769 du 30 août 1990 (N° Lexbase : L6189IW7) abordent, également, la question du tarif de ce contrat individuel d'assurance postérieur à la rupture du contrat de travail : les primes ou les cotisations ne peuvent être supérieures "de plus de 50 % aux tarifs globaux applicables aux salariés actifs".

Cet article de la loi "Evin", souligne Yanick Philippon, Directeur des assurances collectives chez Generali, laisse subsister un certain nombre d'interrogations sur le lien tarifaire institué par la loi entre la couverture des actifs avec celle des inactifs. Cela mériterait d'être clarifié. L'article 4 de la loi de 1989 prévoit un maximum de 150 % d'augmentation donc 50 % par rapport à la cotisation des actifs (part patronal et salariale) mais à quel moment ? A celui du départ à la retraite ?

Maître Barthélémy estime, également, que cet article doit être revisité, notamment pour les retraités puisque la possibilité d'augmenter la cotisation dans la limite de 150 % ne correspond pas à la réalité de l'aggravation du risque. Avec la généralisation de la couverture santé, le problème de l'article 4 de la loi "Evin" ne se pose plus du tout de la même manière. Le constat est le suivant : les dépenses de santé augmentent avec l'âge, la durée de vie progresse, la limitation de l'augmentation des tarifs pour l'organisme assureur imposée par l'article 4 de la loi "Evin" en cas de sortie de groupe va, donc, être de plus en plus problématique. La complémentaire santé des retraités pourrait devenir un problème pour les assureurs notamment s'il leur est interdit d'augmenter la cotisation au-delà des plafonds prévus par le décret du 30 août 1990. En effet, en dehors de l'augmentation dans la limite de 50 % des montants applicables au personnel en activité, l'organisme assureur doit ainsi maintenir des garanties identiques à celles dont bénéficiait l'ancien salarié au moment de son départ de l'entreprise (5).

Certains acteurs de la protection sociale complémentaire présents ont exprimé leurs doutes sur leur capacité de pouvoir garantir le risque spécifique des retraités, s'ils doivent supporter l'impossibilité de répercuter les hausses de cotisations nécessaires ?

Outre, l'augmentation de tarif liée à son passage d'actif à retraité et la perte de la part prise en charge patronale, le salarié va perdre sa couverture souvent familiale, pour une couverture individuelle. Tous ces éléments conduisent à ce que, selon une étude de l'IRDES, plus de 50 % des retraités optent pour un régime autre que celui de l'entreprise pour essentiellement des raisons tarifaires mais également pour l'adapter à son niveau, sur des risques de longues durée.

Usuellement, la couverture santé en entreprise est une couverture familiale, le salarié est couvert dans son entreprise pour toute sa famille. Or, si on examine l'ANI et le projet de loi de sécurisation de l'emploi, la couverture n'est pas familiale mais individuelle.

  • Les limites de la mutualisation entre actifs et retraités

La solution de facilité, comme le rapporte Yanick Philippon, pourrait être de créer des pôles de mutualisation en comprenant les inactifs. Néanmoins, il faut saisir les limites de la mutualisation entre actifs et retraités. La situation par rapport à la santé n'est pas la même selon l'âge, plus l'âge augmente plus les dépenses de santé augmentent également. La dépense moyenne d'une personne de quatre-vingt ans et trois fois supérieure à celle d'une personne de soixante ans. Par conséquent, une mutualisation complète induirait un problème de tarifs et donc de coût du financement de la couverture, tant pour l'entreprise que pour les salariés. Pour minorer le coût, il y aurait alors le risque de baisser les prestations.

Il faut réfléchir à des solutions qui peuvent être, par exemple, une mutualisation partielle, une cotisation solidarité intergénérationnelle où une partie de l'effort de cotisation des retraités est pris en charge par les actifs.

En outre, de manière plus technique, si on s'oriente, dans le cadre de l'application de l'ANI, vers un régime qui couvrirait plus systématiquement les retraités, il y a un risque d'aller vers la constitution de provisions de risques croissants qui pourraient alourdir les cotisations. La durée d'espérance de vie augmentant, se pose pour l'assureur un problème de contingentement des cotisations en raison de l'article 4 de la loi "Evin". L'organisme assureur se voit contraint de continuer à offrir la même garantie frais de santé, pour un temps qui s'accroît avec l'espérance de vie.

En conclusion, il convient de se demander si l'ambition majeure d'un texte comme celui-ci n'est pas d'être la pierre initiale à la construction d'un droit de la protection santé inspiré de ce qui a été fait il y a de cela quarante ans en matière de retraite complémentaire, c'est-à-dire un système reposant sur trois piliers : premier pilier les régimes légaux ou assimilés, deuxième pilier les garanties collectives, troisième : l'assurance individuelle. On peut regretter que le législateur n'ait pas su, du moins pour le moment, inscrire dans son ambition, les inactifs.


(1) V. les obs. de M. Del Sol, Commentaire des articles 1 et 2 de l'Accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l'emploi et des parcours professionnels des salariés : généralisation de la couverture santé des salariés : des avancées, des évolutions, des interrogations, Lexbase Hebdo n° 514 du 31 janvier 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N5516BTH).
(2) COMAREP : commission des accords de retraite et de prévoyance.
(3) Loi n° 89-1009, 31 décembre 1989, renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques (N° Lexbase : L5011E4D).
(4) CJUE, 3 mars 2011, aff. C-437/09 (N° Lexbase : A8049G3I).
(5) Cass. civ. 2, 7 février 2008, n° 06-15.006, FS-P+B+R (N° Lexbase : A7197D4C).

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QPC

[Jurisprudence] La constitutionnalité de la loi "Censi" en question

Réf. : Cass. soc., 4 avril 2013, n° 12-25.469, FS-P+B (N° Lexbase : A8062KB9)

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par Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale

Le 24 Octobre 2014

La loi n° 2005-5 du 5 janvier 2005, relative à la situation des maîtres des établissements d'enseignement privés sous contrat (N° Lexbase : L5254GU7) dite loi "Censi", destinée à clarifier la situation des maîtres contractuels de l'enseignement privé sous contrat, n'en finit pas de faire naître de nouvelles difficultés en raison des choix opérés par le législateur et de leur interprétation par les tribunaux. Dans cette affaire qui concernait le paiement des heures de délégation prises par les maîtres contractuels investis de mandats syndicaux, une QPC a été formulée par un enseignant qui contestait l'application de la loi nouvelle et la mise à l'écart de la qualification de contrat de travail dans les rapports avec l'établissement, au regard, notamment, du droit au respect de la liberté contractuelle. Cette question a été jugée suffisamment sérieuse pour être transmise au Conseil constitutionnel (I), même si ses chances de succès sont relativement minces (II).
Résumé

La Chambre sociale de la Cour de cassation a transmis au Conseil constitutionnel une QPC portant sur l'article 1er de la loi "Censi" du 5 janvier 2005 aux termes duquel aucun contrat de travail n'existe entre les maîtres contractuels et les établissements privés d'enseignement sous contrat.

I - Présentation de la QPC mettant en cause la constitutionnalité de la loi "Censi" du 5 janvier 2005

La confusion antérieure à la loi "Censi". Se fondant sur les dispositions de la loi "Debré" de 1959 faisant référence à l'existence d'un contrat liant les maîtres de l'enseignement privé sous contrat (non fonctionnaires) à l'Etat (1), le Conseil d'Etat avait reconnu l'existence d'un "contrat d'enseignement" (2) portant sur la rémunération, les conditions d'emploi, ou encore le régime disciplinaire applicable aux enseignants (3). Mais constatant que certains des aspects de la relation de travail avec l'établissement demeuraient extérieurs à ce contrat, la Cour de cassation avait caractérisé l'existence concomitante d'une autre convention conclue avec l'établissement, en réalité d'un contrat de travail qui ne disait pas son nom (4).

La reconnaissance simultanée de ces deux contrats a fait difficulté, singulièrement dans les secteurs où le statut de droit public et l'application des règles du Code du travail se sont appliqués de manière concurrente, singulièrement s'agissant du droit syndical, conduisant le Conseil d'Etat à faire une application cumulative des dispositions réglementaires, propres à la fonction publique (5), et de celles du Code du travail (6).

Vertus de la loi "Censi". C'est (notamment (7)) pour clarifier cette double appartenance que la loi "Censi" a été adoptée en 2005 pour faire pencher la balance du côté du droit administratif. L'article 1er de la loi n° 2005-5 du 5 janvier 2005, relative à la situation des maîtres des établissements d'enseignement privés sous contrat, pose ainsi clairement le principe selon lequel "en leur qualité d'agent public, [les maîtres contractuels] ne sont pas, au titre des fonctions pour lesquelles ils sont employés et rémunérés par l'Etat, liés par un contrat de travail à l'établissement au sein duquel l'enseignement leur est confié, dans le cadre de l'organisation arrêtée par le chef d'établissement, dans le respect du caractère propre de l'établissement et de la liberté de conscience des maîtres" (8).

Soucieux de compenser les pertes inhérentes à l'inapplication du Code du travail, le législateur a prévu quelques compensations, singulièrement en matière de droits collectifs ; l'article L. 442-5 du Code de l'éducation (N° Lexbase : L2176ICL), issu de la loi du 5 janvier 2005, dispose ainsi que "nonobstant l'absence de contrat de travail avec l'établissement, les personnels enseignants mentionnés à l'alinéa précédent sont, pour l'application des articles L. 236-1 (N° Lexbase : L8442HNY), L. 412-5 (N° Lexbase : L9599GQL), L. 421-2 (N° Lexbase : L9601GQN) et L. 431-2 (N° Lexbase : L9585GQ3) du Code du travail, pris en compte dans le calcul des effectifs de l'établissement, tel que prévu à l'article L. 620-10 du même code (N° Lexbase : L3112HI4). Ils sont électeurs et éligibles pour les élections des délégués du personnel et les élections au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et au comité d'entreprise. Ils bénéficient de ces institutions dans les conditions prévues par le code du travail. Les rémunérations versées par l'Etat à ces personnels sont prises en compte pour le calcul de la masse salariale brute, tel que prévu à l'article L. 434-8 du même code (N° Lexbase : L6440ACI), et la détermination du rapport entre la contribution aux institutions sociales et le montant global des salaires, mentionné à l'article L. 432-9 du même code (N° Lexbase : L6416ACM)".

Insuffisances de la loi "Censi". En dépit de sa clarté, la loi "Censi" n'a pas répondu explicitement à toutes les interrogations suscitées par le rattachement des enseignants au droit administratif, et singulièrement celles portant sur la possibilité de compléter le dispositif légal par le recours au Code du travail. Ainsi, l'article L. 442-5 du Code de l'éducation a bien prévu les droits de ces maîtres d'être électeurs et éligibles, dans les établissements (DP, CE, CHSCT), mais n'a pas prévu la possibilité de les y désigner comme délégué syndical. Alors qu'on pouvait raisonnablement penser qu'en l'absence de prévisions expresses, les maîtres ne pourraient pas exercer de mandat syndical, la Cour de cassation a considéré qu'il s'agissait là d'un simple oubli qu'il convenait de combler (9), et a même jugé que les heures de délégation prises par ces enseignants, en dehors de leurs obligations de service, leur ouvrent droit au paiement d'heures supplémentaires payées par les établissements, ce qui est extrêmement contestable en l'absence de tout contrat de travail (10).

L'affaire. C'est précisément pour obtenir le paiement d'heures de délégation auprès de l'établissement où il enseignait qu'un maître contractuel avait été conduit à saisir la juridiction prud'homale. La cour d'appel de Montpellier s'était déclarée incompétente, en raison de l'absence de contrat de droit privé, mais l'arrêt avait été cassé une première fois, la Haute juridiction affirmant que "le paiement des heures de délégation accomplies en dehors de son temps de travail, pour l'exercice de ses mandats dans l'intérêt de la communauté de travail constituée par l'ensemble du personnel de l'établissement" (11). Statuant sur renvoi, la cour d'appel de Toulouse avait résisté (12) et, de nouveau, essuyé les foudres de la Cour de cassation (13) ; l'affaire fut donc renvoyée devant la cour d'appel de Bordeaux qui statua dans le sens voulu par la Cour de cassation (14), mais ne fit que partiellement droit aux demandes du salarié, provoquant un nouveau pourvoi, dans le cadre duquel une QPC a été posée par le salarié.

La QPC. Alors qu'on pouvait s'attendre à ce qu'une QPC soit posée par l'établissement sur la constitutionnalité de l'interprétation constante que la Cour de cassation a pu faire des dispositions de la loi "Censi" qui la conduit à condamner les établissements au paiement d'heures de délégation de représentants du personnel qui ne sont pas ses salariés, c'est le maître, qui avait pourtant obtenu en grande partie gain de cause au fond, qui formule devant la Haute juridiction une QPC remettant en cause l'application de la loi nouvelle aux maîtres embauchés avant 2005 et qui perdent, par l'effet de la loi, le bénéfice de la reconnaissance d'un contrat de travail les liant à l'établissement, et des avantages qui en découlent, notamment sur le plan collectif (15).

L'article 1er de la loi n° 2005-5 du 5 janvier 2005 serait ainsi contraire aux articles 4 (N° Lexbase : L1368A9K) et 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, à l'article 1er de la Constitution de 1958 (N° Lexbase : L1277A98) et à l'alinéa 8 du Préambule de la Constitution de 1946 (N° Lexbase : L6815BHU).

La transmission. Pour la Chambre sociale de la Cour de cassation, "le moyen tiré d'une atteinte à l'économie des conventions et des contrats légalement conclus présente un caractère sérieux en ce que la disposition en cause, du seul fait de son entrée en vigueur, a, d'une part, supprimé le contrat de travail de droit privé dont bénéficiaient les maîtres contractuels qui exercent au sein des établissements d'enseignement privé sous contrat d'association avec l'Etat et, d'autre part, entraîné l'extinction sans les remplacer de droits conventionnels que des accords collectifs avaient pu leur reconnaître en leur qualité de salariés".

Premières observations. Le salarié considère donc que l'entrée en vigueur de la loi de 2005, et son application aux contrats en cours, porte atteinte à l'économie des conventions en rendant caduque l'existence d'un contrat, valablement "conclu" sous l'empire du droit antérieur, le privant également des accords et conventions collectives applicables dans l'établissement. En d'autres termes, la Cour de cassation s'interroge sur les conditions dans lesquelles le législateur s'est permis de nier l'existence d'un contrat de travail avec les établissements d'enseignement privé sous contrat... Quelques jours après la transmission d'une QPC contestant la mise à l'écart de la qualification de contrat de travail entre les détenus et l'administration pénitentiaire, c'est de nouveau la capacité du législateur à définir le périmètre du droit du travail qui se trouve ici discutée (16).

II - Spéculations sur la constitutionnalité de la loi "Censi"

A - De l'atteinte à l'économie des conventions

Cadre constitutionnel. La première référence à l'économie des conventions apparaît dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel à l'occasion de l'examen de la loi "Aubry I" (17). Pour le Conseil, en effet, "le législateur ne saurait porter à l'économie des conventions et contrats légalement conclus une atteinte d'une gravité telle qu'elle méconnaisse manifestement la liberté découlant de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789".

L'argument a été souvent invoqué depuis pour paralyser l'application immédiate des réformes en droit du travail car, conformément aux exigences de l'ordre public social, les lois nouvelles (mais la règle vaut d'ailleurs également pour les conventions collectives) s'appliquent immédiatement aux conventions en cours. Il n'a, en revanche, jamais conduit le Conseil à censurer l'application de lois nouvelles dans le domaine des relations individuelles de travail (18), notamment lorsque le législateur a fixé les incidences de la réduction de la durée du travail sur les contrats conclus antérieurement (19).

Par la suite, le Conseil a précisé sa jurisprudence, notamment pour poser comme principe qu'il "est loisible au législateur d'apporter, pour des motifs d'intérêt général, des modifications à des contrats en cours d'exécution" (20), sous la réserve formulée dès 1998 (respect de l'économie des conventions) et du respect du principe de participation des travailleurs, s'agissant des atteintes réalisées aux accords et conventions collectives (21).

Par ailleurs, le Conseil constitutionnel, conformément à l'ordre public social, prend en compte non seulement les motifs du législateur, qui peut parfaitement poursuivre un objectif de valeur constitutionnelle (22) mais également le caractère plus ou moins favorable de l'atteinte réalisée, pour la juger justifiée lorsque le nouveau régime est plus favorable que l'ancien (23).

Le Conseil a également tenu compte du fait que le juge sera amené à "vérifier l'existence et le caractère suffisant du motif d'intérêt général en cause" (24).

Le Conseil apprécie aussi, ce qui est logique, le nombre de personnes affectées par la loi nouvelle (25), l'effet des modifications induites par la loi nouvelle (26) ainsi que les compensations apportées aux salariés afin de diminuer l'atteinte réalisée à l'économie des conventions (27).

Prise en compte des motifs de la réforme. S'il n'existe pas de précédent comparable dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel (28), la décision rendue en 2009 à l'occasion de la création de Pôle emploi, par la fusion des réseaux ANPE-ASSEDIC, peut fournir des éléments intéressants (29). Dans cette décision, en effet, le Conseil avait pris en compte le motif de la fusion et le fait que celle-ci permettait l'application d'un seul et même statut collectif, "sans pour autant multiplier les statuts des personnels au sein de Pôle emploi" (30).

On pourrait donc considérer que le rattachement des maîtres contractuels au statut de droit public répond à un objectif d'intérêt général de simplification des règles applicables et de prévention du dualisme des compétences juridictionnelles ; l'atteinte pourrait donc apparaître comme étant justifiée.

Interrogations sur la proportionnalité de l'atteinte à l'économie des conventions. Si l'atteinte semble justifiée, est-elle proportionnée dans la mesure où la négation de tout contrat conclu avec les établissements d'enseignement prive les maîtres du bénéfice des accords collectifs applicables à l'ensemble du personnel ?

Certes, le législateur a prévu des compensations puisque l'article L. 442-5, alinéa 3, du Code de l'éducation, énonce que "nonobstant l'absence de contrat de travail avec l'établissement, les personnels enseignants mentionnés à l'alinéa précédent sont, pour l'application des articles L. 2141-11 (N° Lexbase : L2156H9Q), L. 2312-8 (N° Lexbase : L2546H98), L. 2322-6 (N° Lexbase : L2715H9G), L. 4611-1 (N° Lexbase : L6276ISA) à L. 4611-4 (N° Lexbase : L3362IQL) et L. 4611-6 (N° Lexbase : L1731H9Y) du Code du travail, pris en compte dans le calcul des effectifs de l'établissement, tel que prévu à l'article L. 1111-2 du même code (N° Lexbase : L3822IB8). Ils sont électeurs et éligibles pour les élections des délégués du personnel et les élections au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et au comité d'entreprise. Ils bénéficient de ces institutions dans les conditions prévues par le code du travail. Les rémunérations versées par l'Etat à ces personnels sont prises en compte pour le calcul de la masse salariale brute, tel que prévu aux articles L. 2325-12 (N° Lexbase : L9812H8W) et L. 2325-43 (N° Lexbase : L9874H89) du même code, et la détermination du rapport entre la contribution aux institutions sociales et le montant global des salaires, mentionné à l'article L. 2323-86 du même code (N° Lexbase : L2957H9E)".

Mais si, sur le plan des droits collectifs, la loi du 5 janvier 2005 a apporté des droits nouveaux (31), sur le plan individuel les contreparties semblent bien maigres.

La présence du juge administratif, pour garantir les droits des salariés, ainsi que l'application d'un certain nombre de principes généraux du droit tirés du Code du travail, pourraient toutefois suffire à "sauver" l'article 1er si le Conseil s'en tenait à son habituel contrôle minimum en matière sociale.

B - De l'atteinte au principe de la garantie des droits

Un grief mal fondé. Soulevé par le demandeur au titre de l'article 16 de la DDHC, l'argument n'a pas été repris par la Cour de cassation, et pour cause puisqu'il ne nous semble pas pertinent ici. On sait, en effet, qu'à ce titre le Conseil constitutionnel protège essentiellement le principe de séparation des pouvoirs et ne consacre pas de droit à la sécurité juridique (32), pas plus que la Cour de cassation à ce titre d'ailleurs (33).

C - De l'atteinte au principe d'égalité devant la loi

Un grief impuissant. L'atteinte au principe d'égalité devant la loi, reconnue tant par l'article 2 de la DDHC que par l'article 1er de la Constitution de 1958, est souvent invoqué mais n'a conduit, hormis les hypothèses de discriminations fondées sur la nationalité, à aucune invalidation en droit du travail. On sait, en effet, qu'en matière sociale le Conseil constitutionnel laisse au législateur une importante marge d'appréciation tant pour considérer que les personnes, dont on compare le traitement, ne sont pas placées dans la même situation, que pour déterminer s'il existe un motif suffisant pour justifier d'éventuelles disparités de traitement (34).

On comprend, dans ces conditions, pourquoi la Cour de cassation a préféré se référer au principe de l'économique générale des conventions.

D - De l'atteinte au principe de participation

Intérêt. L'atteinte au principe de participation a surtout été invoquée en complément des atteintes à l'économie générale des conventions lorsque le législateur a porté atteinte à l'autorité des conventions et accords collectifs.

Un grief qui manque en fait. Il n'est pas certain que la loi du 5 janvier 2005 porte atteinte aux prérogatives des maîtres contractuels rattachées au principe de participation. L'article L. 442-5 du Code de l'éducation, tel que modifié par l'article 1er de la loi déférée, maintient, en effet, les droits des salariés s'agissant des délégués du personnel, des comités d'entreprise et des CHSCT. Par ailleurs, et quoi qu'on puisse en penser, la Cour de cassation considère que les maîtres peuvent également être désignés comme représentant syndical dans les établissements. Dans ces conditions, il semble difficile de prétendre que la loi aurait porté atteinte au droit à participation des maîtres au sein des établissements, alors qu'il s'agit, au contraire, de le mettre en oeuvre.


(1) Loi n° 59-1557 du 31 décembre 1959, sur les rapports entre l'Etat et les établissements d'enseignement privés (N° Lexbase : L5339AGT). Lire B. Toulemonde, Le cinquantenaire de la loi Debré. Qu'est devenu l'enseignement privé ?, RDP, 2011, p. 1157-1187.
(2) CE, avis, 13 novembre 1969, sec. fin., n° 303011.
(3) CE, sec., 26 juin 1987, n° 75569 (N° Lexbase : A3803APK). L'article 5 de la loi disposait d'ailleurs que "les établissements d'enseignement privés du premier degré peuvent passer avec l'Etat un contrat simple suivant lequel les maîtres agréés reçoivent de l'Etat leur rémunération qui est déterminée compte tenu notamment de leurs diplômes et des rémunérations en vigueur dans l'enseignement public".
(4) La Cour de cassation n'a, en effet, jamais osé le qualifier de "contrat de travail", mais a fait application du régime de celui-ci... : Cass. soc., 14 juin 1989, n° 86-40.315, publié (N° Lexbase : A8716AA3), Bull. civ. V, n° 445 (le litige portait ici sur "la délivrance d'une lettre de licenciement, d'un certificat de travail et le paiement de salaires, ainsi que de diverses indemnités") ; Ass. plén., 20 décembre 1991, n° 90-43.616, publié (N° Lexbase : A1108AAB), Bull. Ass. plén., n° 7, Dr. soc., 1992, 439, note J. Savatier (le salarié avait ici saisi la juridiction prud'homale d'une demande portant sur la "réduction du nombre hebdomadaire de ses heures de cours décidée par la direction de son collège") ; Ass. plén., 5 novembre 1993, n° 92-60.595, publié (N° Lexbase : A7472ABD), JCP 1993, II, 22.780, concl. M. Jéol, note Y. Saint-Jours ; Cass. soc., 25 mars 1998, n° 95-41.466, publié (N° Lexbase : A5353ACA), Dr. soc., 1998, p. 616, obs. J. Savatier (application du régime du contrat de travail à durée déterminée).
(5) Décret n° 82-447 du 28 mai 1982 (N° Lexbase : L0991G89), art. 16. Sur ces éléments lire le rapport de R. Hadas-Lebel, Pour un dialogue social efficace et légitime : représentativité et financement des organisations professionnelles et syndicales, mai 2006, p. 69 s..
(6) CE 8° et 3° s-s-r., 31 janvier 2001, n° 202676, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A4540AQ9), AJDA, 2001, p. 484, note B. Toulemonde ; CE 3° s-s-r., 21 novembre 2001, n° 206085 (N° Lexbase : A5998AXG).
(7) Il s'agissait également d'améliorer la situation des enseignants en matière de droits à la retraite.
(8) AJDA, 2005, p. 478, chron. B. Toulemonde ; AJFP, 2005, p. 178, chron. A. Taillefait.
(9) Cass. avis, 15 janvier 2007, n°007 0002 P (N° Lexbase : A1648GRH), M.-C. Haller, Les maîtres contractuels de l'enseignement privé peuvent être désignés délégués syndicaux, JSL, 2007, n° 207.
(10) V. notre étude, A propos des heures de délégation des maîtres contractuels de l'enseignement privé : l'Etat employeur doit payer, Dr. soc., 2012, p. 477, et les réf. citées.
(11) Cass. soc., 18 novembre 2008, n° 07-42.921, FS-P+B (N° Lexbase : A3514EBR), v. les obs. de S. Martin-Cuenot, Paiement des heures de délégation d'un maître contractuel es établissements de l'enseignement privé sous contrat : le juge prud'homal reste compétent, Lexbase Hebdo n° 329 du 4 décembre 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N9071BHG).
(12) CA Toulouse, 4ème ch., sect. 1, 20 janvier 2010, n° 08/06253 (N° Lexbase : A6426EWW).
(13) Cass. soc., 18 mai 2011, n° 10-14.121, FS-P+B (N° Lexbase : A2618HSR), Dr. soc., 2011, p. 797 : le paiement des heures de délégation des maîtres des établissements d'enseignement privé sous contrat prises en dehors de leur temps de travail, qui ne se confondent pas avec les décharges d'activités de service accordées au représentant syndical en application de l'article 16 du décret n° 82-447 du 28 mai 1982, incombe à l'établissement au sein duquel ils exercent les mandats prévus par le code du travail dans l'intérêt de la communauté constituée par l'ensemble du personnel de l'établissement ;que ces heures, effectuées en sus du temps de service, constituent du temps de travail effectif et ouvrent droit au paiement du salaire correspondant".
(14) CA Bordeaux, 6 juillet 2012, n° 11/03639 (N° Lexbase : A5060IQH).
(15) Devant la cour d'appel de Bordeaux le même demandeur avait visé, comme fondement de sa QPC, la violation du droit international et communautaire, entraînant logiquement le rejet de la question posée.
(16) Cass. soc., 20 mars, deux arrêts, n° 12-40.104, FS-P+B (N° Lexbase : A9043KA8) et n° 12-40.105, FS-P+B (N° Lexbase : A9046KAB), v. nos obs., L'application du Code du travail aux détenus en questions, Lexbase Hebdo n° 522 du 4 avril 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N6456BTB).
(17) Décision n° 98-401 DC du 10 juin 1998 (N° Lexbase : A8747ACX) : "le législateur ne saurait porter à l'économie des conventions et contrats légalement conclus une atteinte d'une gravité telle qu'elle méconnaisse manifestement la liberté découlant de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'Homme". B. Mathieu, Liberté contractuelle et sécurité juridique, LPA, 1997, n° 125, p. 17 ; AJDA, 1998, p. 495, chron. J.-E. Schoettl ; RTD civ., 1999, p. 78, n° 1, obs. J. Mestre, cons. 29.
(18) Il a, en revanche, censuré les atteintes excessives à l'économie générale des conventions légalement conclues par les partenaires sociaux : décision n° 2008-568 DC du 7 août 2008, loi portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail (N° Lexbase : A8775D9U), cons. 19 et 20.
(19) Décision du 10 juin 1998, préc..
(20) Décision n° 2001-451 DC du 27 novembre 2001, loi portant amélioration de la couverture des non salariés agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles (N° Lexbase : A2333AXP), cons. 27.
(21) Décision n° 2002-465 DC du 13 janvier 2003, loi relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi (N° Lexbase : A6295A4W), cons. 4 ; décision n° 2004-490 DC du 12 février 2004, loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française (N° Lexbase : A8653DQK), cons. 93 ; décision n° 2007-556 DC du 16 août 2007, loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs (N° Lexbase : A6455DXD), cons. 17 ; décision n° 2008-568 DC du 7 août 2008, loi portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, cons. 18 (N° Lexbase : A8775D9U) ; décision n° 2009-592 DC du 19 novembre 2009, loi relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie (N° Lexbase : A6693EN9), cons. 9.
(22) Décision n° 2009-578 DC du 18 mars 2009, loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion (N° Lexbase : A8079EDL), cons. 14 : "le législateur a entendu, par la disposition critiquée, favoriser la mobilité au sein du parc locatif social afin d'attribuer les logements aux personnes bénéficiant des ressources les plus modestes ; que, dès lors, il était loisible au législateur de modifier, y compris pour les conventions en cours, le cadre légal applicable à l'attribution de ces logements et à la résiliation des contrats correspondants ; qu'en outre, ces dispositions contribuent à mettre en oeuvre l'objectif de valeur constitutionnelle que constitue la possibilité pour toute personne de disposer d'un logement décent".
(23) Décision n° 2002-465 DC du 13 janvier 2003, Loi relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi, cons. 11.
(24) Décision n° 2004-490 DC du 12 février 2004, loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française (N° Lexbase : A8653DQK), cons. 94.
(25) Décision 2006-544 DC du 14 décembre 2006, loi de financement de la Sécurité sociale pour 2007 (N° Lexbase : A8814DSA), cons. 19 : "cette suppression touche plusieurs centaines de conventions ou accords collectifs applicables à plusieurs millions de salariés".
(26) Décision n° 2008-568 DC du 7 août 2008, loi portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail (N° Lexbase : A8775D9U), cons. 19 : "la suppression des clauses relatives aux heures supplémentaires au sein des conventions existantes en modifierait l'équilibre et conférerait à ces accords antérieurs d'autres effets que ceux que leurs signataires ont entendu leur attacher".
(27) Décision n° 2006-544 DC du 14 décembre 2006, loi de financement de la Sécurité sociale pour 2007, préc., cons. 33.
(28) Le Conseil n'a pas eu à statuer sur la constitutionnalité de l'article L. 1224-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0840H9Y), qui constitue une hypothèse de changement forcé d'employeur, et on attend la décision sur le travail des détenus.
(29) Décision n° 2009-592 DC du 19 novembre 2009, loi relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie.
(30) Cons. 10 : "mettre la situation de cette association en conformité avec les règles de concurrence résultant du droit communautaire [...] qu'ainsi, le grief tiré de l'absence de motif d'intérêt général manque en fait".
(31) Imparfaitement d'ailleurs puisque la Cour de cassation a dû régler les questions ignorées par la loi "Censi", relative à la désignation comme délégué syndical et au paiement des heures de délégation.
(32) Sur la distinction entre sécurité juridique et garantie des droits, v. nos obs., La Chambre sociale de la Cour de cassation, chambre des requêtes constitutionnelles, Lexbase Hebdo n° 458 du 19 octobre 2011 - édition sociale (N° Lexbase : N8247BSA).
(33) Cass. soc., 5 octobre 2011, n° 11-40.053, FS-P+B (N° Lexbase : A6053HYT).
(34) V. nos obs., L'application du Code du travail aux détenus en questions, Lexbase Hebdo édition sociale n°522 du 4 avril 2013 - édition sociale, préc..

Décision

Cass. soc., 4 avril 2013, n° 12-25.469, FS-P+B (N° Lexbase : A8062KB9)

QPC, renvoi

Textes visés : loi n° 2005-5 du 5 janvier 2005 (N° Lexbase : L5254GU7), art. 1er

Mots-clés : QPC, liberté contractuelle, économie des conventions, enseignement privé, maîtres contractuels

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Rel. collectives de travail

[Jurisprudence] Désignation d'un représentant de la section syndicale dans les entreprises de moins de cinquante salariés

Réf. : Cass. soc., 27 mars 2013, n° 12-20.369, FS-P+B (N° Lexbase : A2607KB8)

Lecture: 6 min

N6699BTB

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par Gilles Auzero, Professeur à l'Université Montesquieu - Bordeaux IV

Le 18 Avril 2013

Créé par la loi du 20 août 2008 (loi n° 2008-789 du 20 août 2008, portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail N° Lexbase : L7392IAZ), le représentant de la section syndicale présente de grandes similitudes avec le délégué syndical, notamment quant à ses conditions de désignation. Ainsi, tous deux ne peuvent être désignés que dans les entreprises ou établissements occupant cinquante salariés et plus. Toutefois, dans les entités qui n'atteignent pas ce seuil, la loi prévoit qu'un délégué du personnel peut, pour la durée de son mandat, être investi d'un mandat de délégué syndical ou de représentant de la section syndicale. Prolongeant cette large assimilation légale, la Cour de cassation étend au second, par un arrêt en date du 27 mars 2013, une solution retenue, de longue date, pour le premier. Elle décide, en effet, que "sous réserve de conventions ou accords collectifs comportant des clauses plus favorables, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, seul un délégué du personnel titulaire disposant d'un crédit d'heures à ce titre peut être désigné comme représentant de section syndicale".
Résumé

Sous réserve de conventions ou accords collectifs comportant des clauses plus favorables, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, seul un délégué du personnel titulaire disposant d'un crédit d'heures à ce titre peut être désigné comme représentant de la section syndicale.

Observations

I - L'ajout à la loi

Les textes légaux. A l'instar du délégué syndical (C. trav., L. 2143-3 N° Lexbase : L6224ISC), le représentant de la section syndicale ne peut être désigné que dans une entreprise ou un établissement de cinquante salariés et plus (C. trav., art. L. 2142-1-1 N° Lexbase : L6225ISD). Toutefois, l'article L. 2142-1-4 du Code du travail (N° Lexbase : L3806IBL) dispose que "dans les entreprises qui emploient moins de cinquante salariés, les syndicats non représentatifs dans l'entreprise qui constituent une section syndicale peuvent désigner, pour la durée de son mandat, un délégué du personnel comme représentant de la section syndicale [...]".

Ce texte n'est évidemment pas sans rappeler l'article L. 2143-6 du même code (N° Lexbase : L3785IBS), dont on sait qu'il énonce une règle similaire à propos du délégué syndical. Il convient toutefois de relever que cette dernière disposition n'exige pas que le syndicat ait constitué une section syndicale pour pouvoir désigner un délégué du personnel en qualité de délégué syndical. Dans un arrêt déjà ancien, la Cour de cassation avait d'ailleurs pu décider que "les syndicats représentatifs peuvent désigner un délégué du personnel, pour la durée de son mandat, comme délégué syndical sans avoir à justifier de la constitution d'une section syndicale" (1). La loi du 20 août 2008 ayant clairement soumis la désignation d'un délégué syndical à la constitution d'une section syndicale, il n'est pas certain que cette solution soit encore d'actualité aujourd'hui. On comprendrait au demeurant difficilement que cette exigence soit retenue pour le représentant de la section syndicale et non pour le délégué syndical, nonobstant les termes de l'article L. 2143-6 (2).

Le problème soumis à la Cour de cassation dans l'arrêt rapporté était cependant d'une autre nature. En l'espèce, dans une entreprise employant moins de cinquante salariés, un syndicat avait désigné un délégué du personnel suppléant en qualité de représentant de la section syndicale. A la suite d'une action en contestation exercée par l'employeur, les juges du fond avaient annulé cette désignation. Le syndicat reprochait à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statué, alors qu'aucune disposition législative n'interdit de procéder à la désignation d'un délégué du personnel suppléant.

Une solution attendue. La Cour de cassation rejette le pourvoi du syndicat. Après avoir affirmé que "sous réserve de conventions ou d'accords collectifs comportant des clauses plus favorables, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, seul un délégué du personnel titulaire disposant d'un crédit d'heures à ce titre peut être désigné comme représentant de la section syndicale", elle relève que le tribunal, qui a constaté que le salarié désigné, "était délégué du personnel suppléant, en a exactement déduit que, ne disposant pas d'un crédit d'heures, il ne pouvait être désigné en qualité de représentant de section syndicale".

Cette solution ne saurait surprendre. Il est certes vrai, ainsi que le soutenait le syndicat mandant dans son pourvoi, que la loi n'exige pas que le délégué du personnel soit titulaire. Il faut donc se rendre à l'évidence et constater que la Cour de cassation ajoute à la loi une condition qui n'y figure pas. Il faut néanmoins se souvenir qu'une solution identique est retenue, de longue date, par la Chambre sociale, relativement à la désignation d'un délégué syndical dans les entreprises de moins de cinquante salariés (3). Ainsi qu'il a été relevé, "cette jurisprudence s'explique par le fait que seul le délégué du personnel titulaire dispose d'un crédit d'heures et paraît ainsi pouvoir exercer la mission de délégué syndical" (4).

Cette explication peut ne pas convaincre. En effet, si le fait de ne disposer d'aucune heure de délégation n'est certainement pas de nature à faciliter l'exercice d'un mandat de délégué syndical, elle ne le rend pas totalement impossible. Ainsi, l'article L. 2143-20 du Code du travail (N° Lexbase : L2212H9S) dispose que ce dernier peut, "tant durant ses heures de délégation qu'en dehors de [ses] heures habituelles de travail, circuler librement dans l'entreprise et y prendre tous contacts nécessaires à l'accomplissement de [sa] mission, notamment auprès d'un salarié à son poste de travail, sous réserve de ne pas apporter de gêne importante à l'accomplissement du travail des salariés". On comprend ainsi que la liberté de circulation du délégué syndical n'est pas, à proprement parler, liée au fait de bénéficier d'heures de délégation. Il faut, en outre, rappeler que, par application des dispositions de l'article L. 2142-1-1, alinéa 2, le représentant de la section syndicale bénéficie des mêmes prérogatives que le délégué syndical, à l'exception du pouvoir de négocier des accords collectifs.

En d'autres termes, alors même qu'il ne bénéficie pas d'heures de délégation, un délégué du personnel suppléant n'est pas dans l'impossibilité matérielle totale d'assumer un mandat de délégué syndical ou de représentant de la section syndicale. Cela est d'autant plus vrai pour ce dernier, qui a surtout vocation à faire du prosélytisme, afin d'assurer le succès du syndicat mandant aux élections professionnelles.

II - Les atténuations jurisprudentielles

Les améliorations conventionnelles. Si la Cour de cassation exclut la possibilité de désigner un délégué du personnel suppléant en qualité de représentant de la section syndicale, c'est sous réserve "de conventions ou d'accords collectifs comportant des clauses plus favorables" (5). Ce renvoi aux normes conventionnelles plus favorables est pour le moins classique (6). On peut néanmoins s'interroger sur la marge de manoeuvre ainsi offerte aux partenaires sociaux.

Il ne fait aucun doute que la norme conventionnelle doit recevoir application lorsqu'elle stipule la possibilité de désigner un délégué du personnel suppléant en qualité de représentant de la section syndicale en octroyant à ce dernier, et à ce titre, des heures de délégation. Il doit également en aller de même lorsque la convention collective octroie des heures de délégation à un délégué du personnel suppléant, en cette qualité, tout en prévoyant qu'il peut être désigné représentant de la section syndicale. L'incertitude naît, en revanche, lorsque la norme conventionnelle se borne à octroyer des heures de délégation aux délégués du personnel suppléants, sans prévoir qu'ils peuvent assumer un mandat de représentant de la section syndicale.

A dire vrai, l'incertitude n'est ici que relative. A suivre la jurisprudence de la Cour de cassation, seul importe le fait que le salarié puisse disposer d'heures de délégation pour exercer son mandat. L'arrêt sous examen est en ce sens, la Cour de cassation relevant que le tribunal, "qui a constaté que M. X était délégué du personnel suppléant, en a exactement déduit que, ne disposant pas d'un crédit d'heures, il ne pouvait être désigné en qualité de représentant de section syndicale" (nous soulignons). On peut donc penser qu'il aurait suffi que le tribunal constate que le salarié disposait d'un crédit d'heures, à un titre quelconque, pour que la désignation soit validée.

Cela étant admis, il reste encore à évoquer le cas dans lequel la convention collective se borne à énoncer qu'un délégué du personnel suppléant peut être désigné en qualité de représentant de la section syndicale, sans lui octroyer la moindre heure de délégation. Il faut ici se demander si l'on est en présence d'une "clause plus favorable". A notre sens, une réponse négative doit être apportée à cette question, au regard, à nouveau, de la justification de la jurisprudence de la Cour de cassation. Allant au-delà de la loi, celle-ci n'interdit pas purement et simplement à un délégué du personnel suppléant d'être représentant de la section syndicale, auquel cas la stipulation conventionnelle serait plus favorable. Elle ne lui permet pas d'assumer un tel mandat uniquement lorsqu'il ne dispose pas, à un titre quelconque, d'heures de délégation. A cet égard, la stipulation n'est donc pas plus favorable que la loi ou, plus exactement, que la loi telle qu'interprétée par la Cour de cassation.

Les atténuations prétoriennes. En l'absence de stipulations conventionnelles plus favorables, il est au moins une situation dans laquelle un délégué du personnel suppléant pourra, très certainement, être désigné en qualité de représentant de la section syndicale. Il résulte de l'article L. 2314-30 du Code du travail (N° Lexbase : L2657H9B), que lorsque un délégué du personnel titulaire cesse momentanément ses fonctions, pour une cause quelconque, il est remplacé par un délégué suppléant, dont le dernier alinéa du texte précité nous dit qu'il "devient titulaire jusqu'au retour de celui qu'il remplace [...]".

Tirant toutes les conséquences de ce texte, la Cour de cassation a décidé, dans un arrêt en date du 20 juin 2012, que "le délégué du personnel suppléant assurant ce remplacement peut, pour la durée de celui-ci, être désigné comme délégué syndical" (7). Il ne fait guère de doute que cette solution doit être transposée à la désignation d'un représentant de la section syndicale.


(1) Cass. soc., 12 décembre 1990, n° 88-60.671, publié (N° Lexbase : A1593AAA), Bull. civ. V, n° 666.
(2) Cela étant, dans la mesure où cette solution ne facilite pas l'implantation syndicale dans l'entreprise, la Cour de cassation pourrait s'en tenir à une stricte lecture de l'article L. 2143-6 pour maintenir sa solution.
(3) Cass. soc., 30 octobre 2001, n° 00-60.313, publié (N° Lexbase : A9899AWK), Bull. civ. V, n° 336 ; Cass. soc., 24 septembre 2008, n° 06-42.269, FS-P+B sur le premier moyen (N° Lexbase : A4840EAI), Bull. civ. V, n° 184 ; RDT, 2009, p. 51, note F. Signoretto.
(4) M.-L. Morin, L. Pécaut-Rivolier, Y. Struillou, Le guide des élections professionnelles, Dalloz, 2ème édition, 2011, n° 412.93.
(5) La même solution s'applique aux délégués syndicaux. V., en ce sens, l'arrêt préc. du 24 septembre 2008.
(6) Seuls les conventions et accords collectifs étant visés, il n'appartient pas à un usage ou un engagement unilatéral de l'employeur de faire de même.
(7) Cass. soc., 20 juin 2012, n° 11-61.176, FS-P+B (N° Lexbase : A4910IPK).

Décision

Cass. soc., 27 mars 2013, n° 12-20.369, FS-P+B (N° Lexbase : A2607KB8)

Rejet, TI Saint-Etienne (contentieux des élections professionnelles), 24 mai 2012

Texte concerné : C. trav., art. L. 2142-1-4 (N° Lexbase : L3806IBL)

Mots-clés : représentant de la section syndicale, conditions de désignation, effectif de l'entreprise, délégué du personnel suppléant

Liens base : (N° Lexbase : E6025EXG)

newsid:436699

Rel. individuelles de travail

[Manifestations à venir] Cybersurveillance pour cybersécurité : droits et devoirs de l' employeur au fil de la jurisprudence

Lecture: 1 min

N6715BTU

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Le 18 Avril 2013

L'Association pour le développement de l'informatique juridique (ADIJ), organise le mercredi 24 avril 2013 de 8h30 à 10h30 de 8h30 à 10h30 à la Maison du Barreau, 2/4 rue de Harlay, Paris 1er, une conférence sur le thème "Cybersurveillance pour cybersécurité : droits et devoirs de l'employeur au fil de la jurisprudence".
  • Accueil des participants

Pascal Petitcollot, Président de l'ADIJ, Rédacteur en chef de Legifrance

  • Animation

Christine Baudoin,Vice Président de l'Adij, Associée du Cabinet Lmt Avocats, Spécialiste en droit social

  • Intervenants

Anne Souvira, Commissaire Divisionnaire, Chef de la Brigade d'enquête sur les Fraudes aux technologies de l'information de la Direction de la Police Judiciaire, de la préfecture de police

Myriam Quemener, Magistrat, Procureur adjoint

Jean-Emmanuel Ray, Professeur à l'Université de Paris I (Panthéon Sorbonne) et à l'Institut d'Etudes Politiques de Paris

  • Modalités

Inscription en ligne pour les avocats du barreau de Paris.

Inscription par mail pour les avocats des autres barreaux et non avocats.

newsid:436715

Rel. individuelles de travail

[Brèves] Propos tenus par une ancienne salariée sur Facebook : absence d'injures publiques

Réf. : Cass. civ. 1, 10 avril 2013, n° 11-19.530, FS-P+B+I (N° Lexbase : A9954KBB)

Lecture: 1 min

N6737BTP

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Le 18 Avril 2013

Ne constituent pas des injures publiques des propos tenus par une ancienne salarié et diffusés sur ses comptes ouverts tant sur le site Facebook que sur le site MSN, lesquels n'étaient en l'espèce accessibles qu'aux seules personnes agréées par l'intéressée, en nombre très restreint, celles ci formant une communauté d'intérêts. Telle est la solution retenue par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 10 avril 2013 (Cass. civ. 1, 10 avril 2013, n° 11-19.530, FS-P+B+I N° Lexbase : A9954KBB).
Dans cette affaire, une société qui avait employé Mme Y, et sa gérante, Mme X, avaient assigné leur ancienne salariée en paiement de dommages intérêts et prescription de diverses mesures d'interdiction et de publicité, pour avoir publié sur divers réseaux sociaux accessibles sur internet, les propos suivants, qu'elles qualifiaient d'injures publiques : "sarko devrait voter une loi pour exterminer les directrices chieuses comme la mienne !!!" (site MSN) ; "extermination des directrices chieuses" (Facebook) ; "éliminons nos patrons et surtout nos patronnes (mal baisées) qui nous pourrissent la vie !!!" (Facebook) ; "Rose Marie motivée plus que jamais à ne pas me laisser faire. Y'en a marre des connes". Si la cour d'appel de Paris (CA Paris, Pôle 2, 7ème ch., 9 mars 2011, n° 09/21478 N° Lexbase : A2410H7E) avait valablement retenu que les propos ne constituaient pas des injures publiques (après avoir constaté que les propos litigieux avaient été diffusés sur les comptes ouverts par Mme Y tant sur le site Facebook que sur le site MSN, lesquels n'étaient en l'espèce accessibles qu'aux seules personnes agréées par l'intéressée, en nombre très restreint, et retenu que celles-ci formaient une communauté d'intérêts), elle se voit reprocher de ne pas avoir recherché, comme il lui incombait de le faire, si les propos litigieux pouvaient être qualifiés d'injures non publiques, punies par l'article R. 621-2 du Code pénal (N° Lexbase : L0963ABB).

newsid:436737

Rel. individuelles de travail

[Brèves] Saisine du Tribunal des conflits : détermination de la juridiction compétente pour indemniser un détenu travaillant sous le régime de la concession

Réf. : CE 1° et 6° s-s-r., 5 avril 2013, n° 349683, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6572KBZ)

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N6727BTC

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Le 18 Avril 2013

Le Conseil d'Etat saisit le Tribunal des conflits pour déterminer l'ordre de juridiction compétent pour trancher un litige né de l'action en réparation d'un détenu tendant à ce que l'Etat et une société privée l'indemnisent solidairement du préjudice qu'il estime avoir subi au titre des faibles rémunérations qui lui ont été versées par l'administration pénitentiaire sous le régime de la concession de main d'oeuvre pénale, pour son activité exercée au sein d'une prison (CE 1° et 6° s-s-r., 5 avril 2013, n° 349683, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6572KBZ).
Dans cette affaire, M. V., alors détenu dans un centre pénitentiaire, a été employé en qualité d'opérateur sous le régime de la concession de main d'oeuvre pénale dans les ateliers de cet établissement exploités par la société G. durant les mois de janvier, février et mars 2006. L'intéressé a présenté une réclamation tendant à la majoration de la rémunération qui lui a été versée par l'administration. Par un jugement du 10 février 2011, contre lequel M. V. se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation des décisions du Garde des sceaux, ministre de la Justice et des Libertés et de la société G. rejetant sa réclamation et, d'autre part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de cette société à l'indemniser du chef des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'insuffisance de sa rémunération.

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Rémunération

[Brèves] Bénéfice des indemnités de grand déplacement : effets de la création d'une sixième zone de "petits déplacements" par un accord collectif

Réf. : Cass. soc., 10 avril 2013, n° 12-13.506, FS-P+B (N° Lexbase : A0903KCG)

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N6734BTL

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Le 25 Avril 2013

La création par accord paritaire régional d'une sixième zone de "petits déplacements" qui entre dans le champ d'application des adaptations prévues par l'accord national ne prive pas le salarié travaillant dans cette zone supplémentaire du bénéfice des indemnités de grand déplacement lorsque les conditions mises à leur attribution sont remplies. Telle est la solution retenue par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 10 avril 2013 (Cass. soc., 10 avril 2013, n° 12-13.506, FS-P+B N° Lexbase : A0903KCG).
Dans cette affaire, un accord paritaire régional, conclu le 10 décembre 2004 entre la fédération régionale des travaux publics du Limousin et plusieurs organisations syndicales, a institué une sixième zone de "petits déplacements" pour les entreprises de travaux publics de cette région en application de la Convention collective nationale des ouvriers de travaux publics du 15 décembre 1992 (N° Lexbase : X0652AEU). Cet accord ayant été ultérieurement reconduit, le syndicat Union syndicale de la construction de la CGT de la Haute-Vienne (le syndicat) a saisi la juridiction civile d'une demande en annulation de la clause créant cette sixième zone. Le syndicat fait grief à l'arrêt de la cour d'appel (CA Limoges, 16 novembre 2010, n° 09/00111 N° Lexbase : A7468GKS) de l'en débouter alors que la Convention collective des ouvriers des travaux publics a institué pour l'indemnisation forfaitaire des petits déplacements à l'échelon régional, un système de cinq zones circulaires concentriques dont les circonférences sont distantes entre elles de dix kilomètres mesurés à vol d'oiseau soit au total une zone de cinquante kilomètres. En décidant que l'accord paritaire du 10 décembre 2004 a pu instaurer une sixième zone de cinquante à soixante kilomètres pour les indemnités de trajet et de transport, qui portait le champs d'application des indemnités de petits déplacements à la limite de soixante kilomètres, la cour d'appel a violé les articles 8.1 et suivants de la Convention collective nationale des ouvriers de travaux publics du 15 décembre 1992. Pour la Haute juridiction, après avoir rappelé des adaptations aux zones de "petits déplacements" peuvent être toutefois adoptées par accord paritaire régional, notamment par la division en deux de la première zone, pour tenir compte de certaines particularités géographiques, spécialement dans les zones montagneuses ou littorales ou à forte concentration urbaine, rejette le pourvoi (sur le temps de trajet entre deux lieux de travail, cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E0292ETY).

newsid:436734

Rupture du contrat de travail

[Jurisprudence] De quelques précisions sur la procédure et les conséquences du licenciement d'un salarié protégé

Réf. : Cass. soc., 26 mars 2013, n° 11-27.964, FS-P+B, sur 1er moyen, 1ère branche et 2ème moyen pourvoi employeur, et sur 3ème moyen pourvoi salarié (N° Lexbase : A2624KBS)

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N6696BT8

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par Sébastien Tournaux, Professeur à l'Université des Antilles et de la Guyane

Le 18 Avril 2013

Les salariés titulaires d'un mandat de représentation du personnel disposent d'un statut protecteur au sein duquel figurent des dispositions destinées à encadrer leur licenciement par une procédure spéciale. Quoique cette procédure soit ancienne et désormais bien connue, il subsiste toujours, à la marge, quelques questions qui peuvent être éclairées par la Chambre sociale de la Cour de cassation. C'est tout l'intérêt de l'arrêt rendu le 26 mars 2013 (I) qui apporte quelques précisions sur la date exacte à laquelle la procédure spéciale doit être engagée (II) mais, surtout, apporte des précisions sur les conséquences de la nullité du licenciement prononcée par le juge judiciaire (III).
Résumé

L'employeur est tenu de demander l'autorisation administrative de licencier un salarié lorsque ce dernier bénéficie du statut protecteur à la date de l'envoi de la convocation à l'entretien préalable au licenciement, peu important que le courrier prononçant le licenciement soit envoyé postérieurement à l'expiration de la période de protection.

Le salarié ayant attendu plus de quatre années après l'expiration de la période de protection pour demander sa réintégration ainsi qu'une indemnisation courant à compter de la date de son éviction de l'entreprise, sans pouvoir justifier de ce délai, la cour d'appel a ainsi caractérisé un abus dans l'exercice de ce droit à indemnisation.

Le salarié, dont le licenciement a été annulé, et qui demande sa réintégration, ne peut prétendre à l'indemnisation du préjudice lié au respect, après la rupture de son contrat de travail, d'une clause de non-concurrence dépourvue de contrepartie financière.

Si le licenciement d'un salarié prononcé en violation du statut protecteur est atteint de nullité et ouvre droit pour ce salarié à sa réintégration s'il l'a demandée et, dans ce cas, au versement d'une indemnité compensatrice de ses salaires jusqu'à sa réintégration qui constitue la sanction de la méconnaissance de son statut protecteur, le salarié ne peut prétendre au paiement d'une autre indemnité à ce titre.

Commentaire

I - L'affaire

  • Faits et procédure

Une fois n'est pas coutume, la complexité de l'affaire soumise à la Chambre sociale de la Cour de cassation justifie de commencer par la présenter avant de l'analyser.

Un salarié, expert-comptable, avait été élu délégué du personnel suppléant dans le cabinet au sein duquel il était employé. Son mandat prenait fin le 24 juin 2006, la protection perdurant donc jusqu'au 24 décembre de la même année. Le 18 décembre 2006, il était convoqué à un entretien préalable de licenciement pour être finalement licencié au début de l'année 2007 sans qu'une demande d'autorisation de licenciement ait été présentée à l'inspecteur du travail. Le salarié saisit le juge prud'homal pour obtenir la nullité de son licenciement, demander sa réintégration et obtenir des dommages et intérêts pour harcèlement (1).

La cour d'appel de Paris, saisie de l'affaire, répondait à de nombreux moyens essentiellement relatifs à la procédure de licenciement et aux conséquences du licenciement qu'elle jugeait illicite. Ainsi, selon les juges d'appel, le licenciement aurait dû faire l'objet d'une demande d'autorisation auprès de l'inspection du travail si bien qu'il encourrait la nullité. La cour prononça la réintégration du salarié, condamna l'employeur au paiement d'une indemnité réparant le caractère illicite de la rupture et ordonna le paiement des salaires que le salarié aurait dû percevoir entre le jour de sa demande de réintégration et le jour effectif de celle-ci. Elle débouta, en revanche, le salarié de sa demande de dommages et intérêts destinés à compenser le respect d'une clause de non-concurrence dépourvue de contrepartie pécuniaire.

Ni l'employeur, ni le salarié ne semblent avoir été satisfaits de cette décision puisque chacun d'eux présenta plusieurs moyens de cassation à la Chambre sociale de la Cour de cassation.

  • Motivation de la décision

L'employeur, d'abord, contestait l'exigence d'une autorisation administrative de licenciement alors que la décision de licenciement était clairement postérieure à la fin de la période de protection, quand bien même les faits sanctionnés étaient eux antérieurs à cette date butoir. La Chambre sociale rejette le pourvoi sur ce moyen en jugeant "que l'employeur est tenu de demander l'autorisation administrative de licencier un salarié lorsque ce dernier bénéficie du statut protecteur à la date de l'envoi de la convocation à l'entretien préalable au licenciement, peu important que le courrier prononçant le licenciement soit envoyé postérieurement à l'expiration de la période de protection".

La seconde branche de ce premier moyen invoqué par l'employeur critiquait la condamnation à verser au salarié une indemnité compensant le caractère illicite du licenciement. Cet argument trouve grâce aux yeux de la Chambre sociale qui prononce la cassation au visa de l'article L. 2411-5 du Code du travail (N° Lexbase : L0150H9G) et juge que si le salarié a demandé sa réintégration, il a droit "au versement d'une indemnité compensatrice de ses salaires jusqu'à sa réintégration qui constitue la sanction de la méconnaissance de son statut protecteur" mais "ne peut prétendre au paiement d'une autre indemnité à ce titre".

Le salarié, ensuite, invoquait d'abord par un premier moyen un manquement de la cour d'appel aux règles de calcul des indemnités allouées au titre de la violation du statut protecteur des délégués du personnel. Le salarié soutenait qu'il avait droit au paiement des salaires dus entre le moment de son éviction de l'entreprise et le moment de sa réintégration, quand bien même il avait introduit sa demande de réintégration après l'expiration de la période de protection car la tardiveté de sa demande reposait sur des raisons qui ne lui étaient pas imputables. La Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi formé sur ce moyen. Elle conforte la cour d'appel qui avait constaté que "le salarié avait attendu plus de quatre années après l'expiration de la période de protection pour demander sa réintégration ainsi qu'une indemnisation courant à compter de la date de son éviction de l'entreprise, sans pouvoir justifier de ce délai", comportement qui caractérisait "un abus dans l'exercice de ce droit à indemnisation".

Le troisième moyen soulevé par le salarié contestait le refus d'indemnisation du respect d'une clause de non-concurrence illicite. Le salarié soutenait, en effet, que, nonobstant la nullité du licenciement et le prononcé de la réintégration, la rupture du contrat de travail avait été effective et qu'il avait par conséquent pas été tenu par une clause de non-concurrence illicite. Ce raisonnement n'est pas, lui non plus, accueilli par la Chambre sociale de la Cour de cassation qui dispose que "le salarié dont le licenciement a été annulé et qui demande sa réintégration, ne peut prétendre à l'indemnisation du préjudice lié au respect, après la rupture de son contrat de travail, d'une clause de non-concurrence dépourvue de contrepartie financière".

II - Sur la procédure de licenciement d'un délégué du personnel

  • Fin de la protection du délégué du personnel

Aux termes de l'article L. 2411-1 du Code du travail (N° Lexbase : L3619IPQ), le salarié investi d'un mandat de délégué du personnel bénéficie d'une protection contre le licenciement. L'article L. 2411-5 précise que le licenciement d'un délégué du personnel, qu'il soit titulaire ou suppléant, ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail et étend cette protection "aux six premiers mois suivant l'expiration" de son mandat. Pris au pied de la lettre, ces textes semblent donc indiquer que c'est contre la décision de licenciement que le délégué du personnel est protégé puisque, par une jurisprudence constante, la Chambre sociale juge que la date du licenciement est fixée au jour de l'envoi de la lettre de notification du licenciement par l'employeur (2).

Le Code ne donne cependant pas davantage de précision. Ainsi, si l'on sait que l'entretien préalable de licenciement doit avoir lieu préalablement à la consultation du comité d'entreprise ou, à défaut de comité, préalablement à la présentation de la demande d'autorisation à l'inspecteur du travail (3), cela ne permet pas de savoir si la procédure de licenciement de droit commun, sans demande d'autorisation, peut-être engagée avant la fin de la période de protection pour que le licenciement soit lui-même prononcé après celle-ci.

En revanche, quelques décisions prennent parti sur l'hypothèse dans laquelle les faits justifiant le licenciement se sont produits pendant la période de protection alors que le licenciement est prononcé après son échéance. Dans ce cas de figure, la Chambre sociale juge que la procédure spéciale doit être respectée (4), plus encore d'ailleurs s'il est démontré que l'employeur avait déjà pris sa décision de licencier au cours de la période de protection (5). Il est cependant fait exception à cette règle lorsqu'il est démontré que l'employeur n'a eu connaissance du comportement fautif antérieur du salarié qu'après l'expiration de la période de protection (6) et, probablement, lorsque le comportement fautif a perduré après l'échéance de la période de protection.

  • L'engagement de la procédure durant la période de protection

On peut tout d'abord relever, dans cette affaire, que l'employeur reconnaissait avoir engagé une procédure de licenciement de droit commun en raison de faits s'étant déroulés durant la période de protection sans justifier avoir découvert ces faits après l'expiration de celle-ci. Cet argument, non soulevé par le salarié, aurait certainement suffit à remettre en cause le licenciement pour lequel aucune demande d'autorisation n'avait été présentée à l'inspecteur du travail.

La décision n'en est que plus intéressante puisqu'elle permet de déterminer avec davantage de précision quels éléments de la procédure doivent se dérouler durant la période de protection. Ainsi, lorsqu'un employeur envisage de licencier un salarié protégé et qu'il le convoque à un entretien préalable durant la période de protection, la procédure spéciale doit être mise en oeuvre quand bien même la notification du licenciement interviendrait après l'échéance de la période de protection.

Cette solution, très protectrice du salarié représentant du personnel, semble à première vue s'accorder difficilement avec l'idée selon laquelle, lors de l'entretien préalable de licenciement et, a fortiori, au moment de la convocation du salarié à cet entretien, l'employeur ne doit pas avoir définitivement pris la décision de le licencier. En effet, l'article L. 1232-2 du Code du travail (N° Lexbase : L1075H9P) dispose, sans aucune ambiguïté, que l'employeur doit convoquer le salarié à l'entretien préalable "avant toute décision". Par sa décision, la Chambre sociale impose le respect de la procédure spéciale de licenciement alors que, théoriquement, la décision de licencier n'est pas encore prise.

La décision est cependant parfaitement logique puisque, si l'employeur convoque le salarié à un entretien préalable de licenciement durant la période de protection, cela signifie nécessairement que les faits justifiant l'éventuel licenciement se sont eux aussi produits durant la période de protection ce qui, nous l'avons vu, justifie que la procédure spéciale soit mise en oeuvre. Elle est, en outre, respectueuse de l'article L. 2421-3 du Code du travail (N° Lexbase : L0209H9M) qui prévoit que "le licenciement envisagé par l'employeur d'un délégué du personnel [...] est soumis au comité d'entreprise [...]. Lorsqu'il n'existe pas de comité d'entreprise dans l'établissement, l'inspecteur du travail est directement saisi". Il suffit donc que le licenciement soit envisagé et non déjà décidé pour que la procédure spéciale soit mise en oeuvre.

Il faudra donc retenir désormais que la procédure de licenciement engagée durant la période de protection doit respecter les dispositions spéciales, qu'une demande d'autorisation doit être présentée à l'inspecteur du travail quand bien même la décision de licencier est reportée après la fin de la période de protection.

III - Sur les conséquences du licenciement illicite

  • Les différentes sanctions

Lorsqu'un salarié est licencié sans que l'employeur n'ait demandé d'autorisation à l'inspecteur du travail, le licenciement est de plein droit frappé de nullité (7). Cette nullité produit tous ses effets si bien que le salarié est en droit d'exiger sa réintégration dans son emploi (8) que l'employeur ne peut naturellement pas refuser (9).

Selon que le salarié accepte ou refuse la réintégration dans son emploi, les conséquences indemnitaires vont être différentes.

S'il n'est pas réintégré, le salarié peut demander des indemnités de rupture du contrat de travail, une indemnité réparant le caractère illicite du licenciement (10) ainsi qu'une indemnité "égale à la rémunération qu'il aurait perçue jusqu'à la fin de la période de protection en cours, peu important qu'il ne soit pas resté à la disposition de l'employeur" (11), c'est-à-dire entre le jour de son licenciement et la date à laquelle la protection prenait fin.

Si, en revanche, le salarié est réintégré dans son emploi, les conséquences indemnitaires vont être différentes. La réintégration étant de droit, le salarié ne peut prétendre à des indemnités de rupture, ce que confirme d'ailleurs la Chambre sociale dans l'arrêt exposé (12). Le salarié peut, nonobstant la réintégration, bénéficier d'une indemnité compensant la perte de salaire subie entre le licenciement et la réintégration (13). Dans ce cas, l'évaluation des salaires perdus est donc indépendante de la durée effective de la protection mais relève, en revanche, de la date à laquelle le salarié sera effectivement réintégré.

Or, le délai de prescription pour contester un licenciement est aujourd'hui d'une durée de cinq ans (14), ce qui implique que la décision de réintégration peut être prononcée très longtemps après le licenciement. Afin de limiter les conséquences indemnitaires extrêmes qui pourraient en découler, la Chambre sociale de la Cour de cassation admet une telle indemnisation tardive à la condition que la tardiveté de la demande, survenue après la fin de la période de protection, ne soit pas imputable au salarié (15).

  • L'abus du salarié de son droit à indemnité

C'est, à notre connaissance, la première fois que la Chambre sociale de la Cour de cassation statue sur le cas inverse, celui dans lequel elle juge que la tardiveté de la demande est imputable au salarié. La Chambre sociale va plus loin en estimant qu'il s'agit en réalité d'"un abus dans l'exercice de ce droit à indemnisation" imputable au salarié, celui-ci ne justifiant pas du délai excessif de sa demande.

La qualification d'abus de droit, quoiqu'un peu imprécise, peut être acceptée. En effet, s'il est peu probable qu'une intention de nuire puisse être mise à la charge du salarié, il est plus vraisemblable que l'on puisse lui reprocher une légèreté blâmable qui, on le sait, peut permettre de caractériser l'abus de droit (16).

L'administration de la preuve est cependant plus contestable. En effet, la Chambre sociale retient que le salarié n'apportait aucune justification à la tardiveté de sa demande. C'est donc l'auteur présumé de l'abus de droit qui devait démontrer l'absence d'abus alors qu'en principe, c'est à la prétendue victime de l'abus de droit de démontrer l'existence de l'intention de nuire ou de la légèreté blâmable (17).

Cette entorse aux règles de droit commun est d'autant plus regrettable qu'elle aurait pu être évitée par la Chambre sociale si celle-ci était demeurée sur le terrain, plus neutre et malléable, de l'imputabilité au salarié de la tardiveté du recours.

  • Nullité, réintégration et clause de non-concurrence illicite

Dernier apport de la décision sous examen, la Chambre sociale juge que "le salarié, dont le licenciement a été annulé, et qui demande sa réintégration, ne peut prétendre à l'indemnisation du préjudice lié au respect, après la rupture de son contrat de travail, d'une clause de non-concurrence dépourvue de contrepartie financière".

Il est jugé par la Chambre sociale, de manière constante, que le respect par le salarié d'une clause de non-concurrence dont l'une des conditions de validité faisait défaut ouvre droit à compensation du préjudice que celui-ci a subi (18). L'employeur ne peut être dispensé de cette indemnité qu'à la condition de prouver que le salarié n'a pas respecté la clause nulle (19).

Lorsqu'un salarié est réintégré à la suite de l'annulation de son licenciement et que, dans le même temps, la clause de non-concurrence stipulée par son contrat de travail est également annulée faute de contrepartie financière, les deux nullités doivent être articulées.

Le licenciement étant annulé, le contrat de travail est réputé n'avoir jamais été rompu si bien que le salarié est considéré comme n'ayant jamais été placé dans la situation de respecter la clause de non-concurrence nulle. Ce raisonnement est d'ailleurs corroboré par le versement par le juge des salaires que le salarié aurait dû percevoir entre le licenciement et la réintégration même si, en l'espèce nous l'avons vu, cette indemnisation a été minorée en raison d'un abus de droit du salarié.


(1) Nous ne reviendrons pas sur cette question subsidiaire du harcèlement, la nullité du licenciement ne reposant pas sur ce fondement. Il faut simplement ici relever que la Chambre sociale fait dans cette affaire preuve d'une grande casuistique puisqu'elle contrôle la qualification opérée par les juges du fond de la cause objective permettant à l'employeur de renverser la présomption de faits de harcèlement. Ainsi, la Chambre sociale juge que l'exercice du pouvoir de direction de l'employeur ne peut justifier que le salarié fasse "l'objet de multiples mesures vexatoires, telles que l'envoi de notes contenant des remarques péjoratives assénées sur un ton péremptoire propre à le discréditer, les reproches sur son incapacité professionnelle et psychologique et sa présence nuisible et inutile, le retrait des clés de son bureau, sa mise à l'écart du comité directeur, la diminution du taux horaire de sa rémunération".
(2) Cass. soc., 11 mai 2005 n° 03-40.650, F-P+B+R+I (N° Lexbase : A2303DI7) et les obs. de G. Auzero, Revirement quant à la date de la rupture du contrat de travail en période d'essai, Lexbase Hebdo n° 169 du 26 mai 2005 - édition sociale (N° Lexbase : N4538AIW) ; Cass. soc., 26 septembre 2006, n° 05-44.670, F-P (N° Lexbase : A3623DRM).
(3) C. trav., art. R. 2421-8 (N° Lexbase : L0048IAZ).
(4) Cass. soc., 23 novembre 2004, n° 01-46.234, publié (N° Lexbase : A0228DE8) ; Cass. soc., 8 juin 2011, n° 10-11.933 à n° 10-13.663, P+B+R+I (N° Lexbase : A3806HT7), commenté pour l'autre importante question que l'arrêt sous-tendait, v. les obs. de Ch. Radé, La Cour de cassation et les avantages catégoriels : la montagne accouche d'une souris, Lexbase Hebdo n° 444 du 16 juin 2011 - édition sociale (N° Lexbase : N4332BSA).
(5) Cass. soc., 10 octobre 2012, n° 11-20.550, F-D (N° Lexbase : A3321IUK).
(6) Cass. soc., 9 février 2012, n° 10-19.686, F-D (N° Lexbase : A3546ICC).
(7) Cass. soc., 18 décembre 2000, n° 98-42.320, publié (N° Lexbase : A2077AIR).
(8) Cass. soc., 20 mai 1992, n° 90-44.725, publié (N° Lexbase : A5214ABQ).
(9) Un refus de réintégration constitue un trouble manifestement illicite justifiant la saisie du juge des référés, v. Cass. soc., 26 novembre 1997, n° 95-44.578, publié (N° Lexbase : A9382AXR).
(10) Cass. soc., 12 juin 2001, n° 99-41.695, publié (N° Lexbase : A5217AGC).
(11) Cass. soc., 17 octobre 2006, n° 05-40.769, F-D (N° Lexbase : A9713DR8).
(12) Cass. soc., 28 avril 2006, n° 03-45.912, F-D (N° Lexbase : A2046DPH).
(13) Cass. soc., 11 décembre 2001, n° 99-42.476, publié (N° Lexbase : A6551AXW) ; Cass. soc., 10 octobre 2006, n° 04-47.623, FS-P+B (N° Lexbase : A7719DRC).
(14) Ce délai pourrait prochainement être ramené à deux ans en application de la future loi de sécurisation de l'emploi, v. le projet de loi, art. 16.
(15) Cass. soc., 11 décembre 2001, n° 99-42.476, publié (N° Lexbase : A6551AXW).
(16) Par ex., en matière d'abus du droit de rompre la période d'essai, v. Cass. soc., 6 janvier 2010, n° 08-42.826, F-D (N° Lexbase : A2151EQQ) et nos obs., Le retour de la légèreté blâmable dans la rupture d'essai, Lexbase Hebdo n° 379 du 21 janvier 2010 - édition sociale (N° Lexbase : N9649BMC).
(17) V. par ex. Cass. civ. 1, 30 octobre 2008, n° 07-19.736, F-D (N° Lexbase : A0661EB4).
(18) V. l’Ouvrage "Droit du travail" (N° Lexbase : E5208EX8) et les réf. citées.
(19) Cass. soc., 11 janvier 2006, n° 03-46.933, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A3385DMC) et les obs. de G. Auzero, Les clauses de non-concurrence sont d'interprétation stricte !, Lexbase Hebdo n° 200 du 2 février 2006 - édition sociale (N° Lexbase : N3793AKP).

Décision

Cass. soc., 26 mars 2013, n° 11-27.964, FS-P+B, sur 1er moyen, 1ère branche et 2ème moyen pourvoi employeur, et sur 3ème moyen pourvoi salarié (N° Lexbase : A2624KBS)

Cassation partielle, CA Paris, Pôle 6, 7ème ch., 13 octobre 2011, n° 08/07917 (N° Lexbase : A6122H7U)

Textes visés : C. trav., art. L. 2411-5 (N° Lexbase : L0150H9G)

Mots-clés : salarié protégé, licenciement, procédure, entretien préalable, conséquences, réintégration, clause de non-concurrence

Liens base : (N° Lexbase : E9559EST) ; ; (N° Lexbase : E9602ESG)

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Rupture du contrat de travail

[Brèves] Articulation entre une rupture conventionnelle et une résiliation judiciaire

Réf. : Cass. soc., 10 avril 2013, n° 11-15.651, FS-P+B (N° Lexbase : A0813KC4)

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N6683BTP

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Le 18 Avril 2013

Est sans objet la demande de résiliation judiciaire d'un contrat de travail rompu par la conclusion d'une rupture conventionnelle dès lors que la demande d'annulation de cette rupture a été demandée hors délai. Telle est la solution retenue par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 10 avril 2013 (Cass. soc., 10 avril 2013, n° 11-15.651, FS-P+B N° Lexbase : A0813KC4).
Dans cette affaire, un salarié a saisi la juridiction prud'homale en janvier 2009 d'une demande en résiliation judiciaire du contrat de travail. Les parties ont conclu le 27 avril 2009 une rupture conventionnelle du contrat de travail prévoyant le paiement d'une indemnité spécifique de rupture. La convention de rupture a été homologuée par l'autorité administrative le 29 mai 2009. Le salarié ayant maintenu sa demande en résiliation judiciaire, le conseil de prud'hommes l'en a débouté par jugement du 19 mai 2010. Par des conclusions du 28 décembre 2010, M. Y. a demandé l'annulation de la convention de rupture et la condamnation de l'employeur à lui payer diverses indemnités au titre de la résiliation judiciaire du contrat de travail. Le salarié fait grief à l'arrêt de juger irrecevable sa demande en résiliation judiciaire du contrat de travail et en paiement de diverses indemnités, alors que si un salarié accepte une rupture conventionnelle bien qu'il a déjà déposé une demande de résiliation judiciaire, le juge doit rechercher si la demande de résiliation du contrat était justifiée, c'est-à-dire si les inexécutions alléguées constituent une faute justifiant la résiliation du contrat de travail, avant de faire application de la rupture conventionnelle. Pour la Haute juridiction, l'annulation de la rupture conventionnelle n'ayant pas été demandée dans le délai prévu par l'article L. 1237-14 du Code du travail (N° Lexbase : L8504IA9), la cour d'appel n'avait plus à statuer sur une demande, fût-elle antérieure à cette rupture, en résiliation judiciaire du contrat de travail devenue sans objet .

newsid:436683

Rupture du contrat de travail

[Brèves] Licéité de la clause contractuelle permettant au salarié de rompre son contrat en cas de changement de direction, de contrôle, de fusion-absorption ou de changement significatif d'actionnariat

Réf. : Cass. soc., 10 avril 2013, n° 11-25.841, FS-P+B (N° Lexbase : A0793KCD)

Lecture: 2 min

N6733BTK

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Le 24 Avril 2013

La clause contractuelle, qui permet au salarié de rompre le contrat de travail, ladite rupture étant imputable à l'employeur, en cas de changement de direction, de contrôle, de fusion-absorption ou de changement significatif d'actionnariat entraînant une modification importante de l'équipe de direction, est licite dès lors qu'elle est justifiée par les fonctions du salarié au sein de l'entreprise et qu'elle ne fait pas échec à la faculté de résiliation unilatérale du contrat par l'une ou l'autre des parties. N'est pas soumise à la procédure spéciale d'autorisation des conventions conclues entre une société et l'un des membres du directoire, la clause prévoyant une indemnité de départ, contenue dans un contrat de travail conclu régulièrement et sans fraude à une date à laquelle le bénéficiaire n'était pas encore mandataire social. Telles sont les solutions retenues par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 10 avril 2013 (Cass. soc., 10 avril 2013, n° 11-25.841, FS-P+B N° Lexbase : A0793KCD).
Dans cette affaire, M. F. a été engagé par la société A., en qualité de directeur Europe du Sud et Amérique. L'article 13 de son contrat de travail stipulait que : "dans les cas où, au cours des 24 mois suivant la date d'effet, le président du directoire viendrait à quitter la société, ou un changement de contrôle portant sur plus de 33 % du capital de la société viendrait à survenir, le salarié pourra quitter la société et obtenir une indemnité équivalente au double de la rémunération totale perçue au cours des douze mois précédant le fait générateur". M. F. a été ensuite nommé membre du directoire de la société. A la suite de la démission du président du directoire et de son remplacement, le salarié a, invoquant les stipulations de son contrat de travail, démissionné. Il a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir paiement de l'indemnité. La société fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande alors qu'est dépourvue de cause l'obligation de payer au salarié une indemnité contractuelle de rupture dite "golden parachute" qui trouve son fait générateur dans la seule décision d'un tiers au contrat de travail ou de circonstances extérieures à ce contrat, parmi lesquelles, notamment le départ du président du directoire de la société employeur. Pour la Haute juridiction, après avoir constaté que la clause litigieuse avait été convenue en raison des avantages que la société A. tirait du recrutement de ce salarié et de l'importance des fonctions qui lui avaient été attribuées, la cour d'appel en a déduit à bon droit que l'obligation de l'employeur avait une cause. La Cour estime également qu'il résulte de la combinaison des articles L. 225-79-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L9222HZL) et 1134 du Code civil (N° Lexbase : L1234ABC) que n'est pas soumise à la procédure spéciale d'autorisation des conventions conclues entre une société et l'un des membres du directoire.

newsid:436733

Rupture du contrat de travail

[Brèves] Demande d'autorisation de licenciement : pas d'examen par l'inspecteur du travail de la faute ou de la légèreté blâmable de l'employeur en cas de cessation d'activité

Réf. : CE 4° et 5° s-s-r., 8 avril 2013, n° 348559, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A7203KBE)

Lecture: 2 min

N6665BTZ

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Le 18 Avril 2013

Dans le cadre d'une demande d'autorisation de licenciement présentée par l'employeur, fondée sur un motif de caractère économique, il n'appartient pas à l'inspecteur du travail de rechercher si la cessation d'activité est due à la faute ou à la légèreté blâmable de l'employeur, sans que sa décision fasse obstacle à ce que le salarié, s'il s'y estime fondé, mette en cause devant les juridictions compétentes la responsabilité de l'employeur en demandant réparation des préjudices que lui auraient causé cette faute ou légèreté blâmable dans l'exécution du contrat de travail. Il est à noter également que, si les dispositions de l'article R. 2421-8 du Code du travail (N° Lexbase : L0048IAZ) imposent que la réunion du comité d'entreprise appelé à se prononcer sur le projet de licenciement d'un salarié protégé ait lieu après l'entretien préalable, elles n'interdisent pas que la convocation des membres du comité d'entreprise soit envoyée antérieurement à l'entretien préalable. Telles sont les solutions retenues par le Conseil d'Etat dans un arrêt du 8 avril 2013 (CE 4° et 5° s-s-r., 8 avril 2013, n° 348559, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A7203KBE).
Dans cette affaire, le Conseil d'Etat rappelle que, lorsque le licenciement d'un salarié protégé est envisagé, celui-ci ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé et que, dans le cas où la demande d'autorisation de licenciement présentée par l'employeur est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié. A ce titre, lorsque la demande est fondée sur la cessation d'activité de l'entreprise, celle-ci n'a pas à être justifiée par l'existence de mutations technologiques, de difficultés économiques ou de menaces pesant sur la compétitivité de l'entreprise, il appartient alors à l'autorité administrative de contrôler, outre le respect des exigences procédurales légales et des garanties conventionnelles, que la cessation d'activité de l'entreprise est totale et définitive, que l'employeur a satisfait, le cas échéant, à l'obligation de reclassement prévue par le Code du travail et que la demande ne présente pas de caractère discriminatoire. En l'espèce, il résulte de ce qui précède qu'après avoir constaté que la réalité du motif économique de licenciement de l'ensemble des personnels du centre éducatif et de formation professionnelle, où était employé M. S, était établie dès lors que le préfet en avait prononcé la fermeture totale et définitive. La cour administrative d'appel (N° Lexbase : A1500G4C) n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que le fait que cette fermeture était due à une faute et une légèreté blâmable de l'employeur était sans incidence sur la légalité de l'autorisation de licenciement attaquée.

newsid:436665

Rupture du contrat de travail

[Brèves] Protection contre licenciement : représentants du personnel institués par voie conventionnelle relevant d'une catégorie de même nature que celle prévue par la loi

Réf. : CE 4° et 5° s-s-r., 8 avril 2013, n° 348162, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A7202KBD)

Lecture: 2 min

N6726BTB

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Le 18 Avril 2013

Les dispositions de l'article L. 2411-2 du Code du travail (N° Lexbase : L0147H9C), énonçant le champ d'application de la protection contre le licenciement, ne peuvent recevoir application que dans le cas des représentants du personnel institués par voie conventionnelle qui relèvent d'une catégorie de même nature que celle qui est prévue par la loi. Telle est la solution retenue par le Conseil d'Etat dans un arrêt du 8 avril 2013 (CE 4° et 5° s-s-r., 8 avril 2013, n° 348162, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A7202KBD).
Dans cette affaire, M. L., agent de la Régie autonome des transports parisiens, a été désigné, par le syndicat SUD comme représentant syndical au sein de l'établissement en application de l'article 2-2 du protocole relatif au droit syndical et à l'amélioration du dialogue social à la RATP, du 23 octobre 2001. Il a fait l'objet, en 2005, d'une procédure disciplinaire qui a conduit à proposer son licenciement mais par décision du 5 août 2005, l'inspectrice du travail a refusé d'autoriser ce licenciement. La RATP a formé auprès du ministre des Transports un recours hiérarchique qui a fait l'objet d'une décision implicite de rejet le 7 février 2006. Par décision du 6 avril 2006, le ministre a retiré sa décision implicite de rejet, a annulé la décision de l'inspecteur du travail et a autorisé la révocation de M. L.. Par l'arrêt attaqué du 3 février 2011 (CAA Paris, 3ème ch., 3 février 2011, n° 09PA03383 N° Lexbase : A8088GZL), contre lequel M. L. se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Paris, après avoir annulé le jugement du tribunal administratif en tant qu'il avait décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur la demande d'annulation de la décision implicite du ministre, a notamment annulé la décision implicite du ministre, l'article 2 de la décision du 6 avril 2006, qui autorisait le licenciement de M. L.. Le Conseil d'Etat annule les articles 2 à 4 de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 3 février 2011. Pour juger que le ministre des Transports, saisi par un recours hiérarchique de l'employeur contre la décision de l'inspecteur du travail refusant d'autoriser le licenciement du requérant, n'était pas compétent pour statuer sur une telle demande, la cour s'est bornée à constater que les représentants dont l'article 2-2 du protocole d'accord relatif au droit syndical prévoit l'accréditation par un syndicat représentatif et qui sont investis de la mission de parler et décider en son nom, ne pouvaient être regardés comme relevant d'une catégorie de même nature que les délégués du personnel prévus par la loi. Pour le Conseil d'Etat, en statuant ainsi, sans rechercher si, comme cela était soutenu devant elle, ces représentants, dont faisaient partie M. L., pouvaient être regardés comme relevant d'une catégorie de même nature que les délégués syndicaux et bénéficier à ce titre de la qualité de salarié protégé, la cour n'a pas légalement justifié sa décision.

newsid:436726

Santé

[Brèves] Définition du handicap par la Cour de justice de l'Union européenne

Réf. : CJUE, 11 avril 2013, aff. C-335/11 et C-337/11 (N° Lexbase : A1362KCG)

Lecture: 2 min

N6731BTH

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Le 20 Avril 2013

Est assimilé à un handicap, une maladie curable ou incurable entraînant une limitation physique, mentale ou psychique. La réduction du temps de travail peut être considérée comme une mesure d'aménagement que doit prendre l'employeur pour permettre à une personne handicapée de travailler. Telles sont les solutions retenues par la Cour de justice de l'Union européenne dans un arrêt du 11 avril 2013 (CJUE, 11 avril 2013, aff. C-335/11 et C-337/11 N° Lexbase : A1362KCG).
Dans cette affaire, un syndicat de travailleurs danois a introduit deux actions en réparation au nom de deux salariées, en raison de leur licenciement avec un préavis réduit. Le syndicat affirme que ces deux employées étant atteintes d'un handicap, leur employeur respectif était tenu de leur proposer une réduction de leur temps de travail. Le syndicat affirme également que la disposition nationale concernant le préavis réduit ne peut s'appliquer à ces deux travailleuses car leurs absences pour cause de maladie résultent de leur handicap. La cour maritime et commerciale du Danemark, saisi de ces deux affaires, demande à la Cour de justice de préciser la notion de handicap. Il s'agit également de savoir si la réduction du temps de travail peut être considérée comme une mesure d'aménagement raisonnable et si la loi danoise concernant le préavis réduit de licenciement est contraire au droit de l'Union. La Cour relève que, contrairement à ce que font valoir les employeurs dans ces deux affaires, la notion de "handicap" n'implique pas nécessairement l'exclusion totale du travail ou de la vie professionnelle. En outre, le constat de l'existence d'un handicap ne dépend pas de la nature des mesures d'aménagement que doit prendre l'employeur, telles que l'utilisation d'équipements spéciaux. Il appartiendra à la juridiction nationale d'apprécier si, en l'espèce, les travailleuses étaient des personnes handicapée. Pour la Cour, la Directive 2000/78 du 27 novembre 2000 (N° Lexbase : L3822AU4) impose à l'employeur de prendre les mesures d'aménagement appropriées et raisonnables, notamment, pour permettre à une personne handicapée d'accéder à un emploi, de l'exercer ou d'y progresser. Il incombe cependant au juge national d'apprécier si, en l'espèce, la réduction du temps de travail en tant que mesure d'aménagement représente une charge disproportionnée pour les employeurs. La Cour énonce aussi que la Directive doit être interprétée en ce sens qu'elle s'oppose à une disposition nationale qui prévoit qu'un employeur peut mettre fin au contrat de travail avec un préavis réduit si le travailleur handicapé concerné a été absent pour cause de maladie avec maintien de la rémunération pendant 120 jours au cours des douze derniers mois lorsque ces absences sont la conséquence de l'omission, par l'employeur, de prendre les mesures appropriées conformément à l'obligation de prévoir des aménagements raisonnables prévue à l'article 5 de cette Directive.

newsid:436731

Santé

[Brèves] Inaptitude : obligation de reclassement apprécié en fonction de l'envergure de la société

Réf. : CA Rennes, 12 avril 2013, n° 11/06549 (N° Lexbase : A0376KCW)

Lecture: 2 min

N6728BTD

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Le 18 Avril 2013

Pour établir qu'elle a sérieusement et loyalement satisfait à son obligation de reclassement, une société d'une grande envergure nationale et internationale ne peut se contenter d'envoyer un courriel à certaines des structures du groupe où figure uniquement l'avis du médecin du travail, l'étude de poste réalisée par lui faisant apparaître la fragilité du salarié et le curriculum vitae actualisé de ce dernier. Telle est la solution retenue par la cour d'appel de Rennes, dans un arrêt rendu le 12 avril 2013 (CA Rennes, 12 avril 2013, n° 11/06549 N° Lexbase : A0376KCW).
Dans cette affaire, un salarié en arrêt maladie a rencontré le médecin du travail qui a conclu à une inaptitude temporaire avant d'établir, après des examens complémentaires, un avis d'inaptitude dans le cadre de la procédure de danger immédiat en visant les dispositions de l'article R. 4624-31 du Code du Travail (N° Lexbase : L0995ISN). Il a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement lequel lui est notifié pour "inaptitude et impossibilité de reclassement". Le salarié relève le manquement avéré selon lui de recherches de reclassement par l'employeur au motif que la preuve n'était pas rapportée de ce que son profil ait été correctement détaillé, précis et conforme, ses compétences développées dans le cadre de son parcours professionnel n'ayant pas été suffisamment relayées d'autant que les recherches avaient été restreintes à neuf des vingt-sept pôles régionaux de la société. La société soutient, quant à elle, avoir loyalement et sérieusement recherché un poste de reclassement en adressant à toutes les structures du groupe des courriers détaillés s'appuyant sur l'avis du médecin du travail, l'étude de poste réalisée par lui et le curriculum vitae actualisé du salarié. La cour d'appel estime que si ce courriel a fait l'objet de réponses négatives quant à l'existence d'un poste disponible compatible avec les recommandations du médecin du travail ou les compétences du salarié, celles-ci ne peuvent à elles seules démontrer l'absence de possibilité de reclassement eu égard à la taille importante de l'entreprise et à sa politique de recrutement. Même en admettant que l'intéressé ne disposait pas de la compétence professionnelle et de la formation nécessaire pour occuper les postes disponibles sur le site de recrutement de la société, l'absence d'indication sur les autres postes disponibles lors du licenciement ne permet pas à la cour de vérifier qu'aucun d'eux n'était accessible à l'intéressé d'autant que les mentions extraites de l'étude de poste étaient plutôt dissuasives comme faisant apparaître la fragilité du salarié. De plus, l'employeur doit proposer non seulement les postes correspondants à la qualification du salarié devenu inapte mais également ceux de catégorie inférieure. Or, aucune proposition n'a été faite au salarié dans ce sens. Par conséquent, la cour déclare le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

newsid:436728

Sécurité sociale

[Brèves] Une caisse peut exercer, pour le compte d'une ou plusieurs autres caisses, le recours subrogatoire à l'encontre du tiers responsable de l'accident

Réf. : CE 1° et 6° s-s-r., 12 avril 2013, n° 362009 (N° Lexbase : A1003KC7)

Lecture: 2 min

N6722BT7

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Le 23 Avril 2013

Le directeur général de la CNAMTS peut confier à une caisse primaire la charge d'agir en justice pour le compte de la caisse d'affiliation de l'assuré dans tous les contentieux liés au service des prestations d'assurance maladie. A ce titre, une caisse peut se voir confier la mission d'exercer, pour le compte d'une ou plusieurs autres caisses, le recours subrogatoire à l'encontre du tiers responsable de l'accident, un tel recours tendant au remboursement des prestations servies à l'assuré à la suite de l'accident. Telle est la solution retenue par le Conseil d'Etat, dans un arrêt rendu le 12 avril 2013 (CE 1° et 6° s-s-r., 12 avril 2013, n° 362009 N° Lexbase : A1003KC7).
Dans cette affaire, deux CPAM demandent la condamnation d'un centre hospitalier à lui payer une somme en remboursement de ses débours. La cour administrative d'appel de Nancy (CAA Nancy, 3ème ch., 5 avril 2012, n° 11NC00946 N° Lexbase : A6313IKZ) avant de statuer sur la requête de la caisse décide, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen la question suivante : les conventions de mutualisation conclues entre différentes caisses d'assurance maladie, qui constituent des mandats de gestion, permettent-elles à la caisse désignée comme gestionnaire d'agir au contentieux et de rechercher la responsabilité du tiers responsable sur le fondement des dispositions de l'article L. 376-1 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L4530IR9) en lieu et place de la caisse d'affiliation désignée par ce texte ? Il résulte de l'article L. 122-1 du même code (N° Lexbase : L1274GUQ) que c'est en principe le directeur de la caisse primaire d'assurance maladie qui décide des actions en justice dirigées contre les tiers responsables de dommages causés à l'assuré social affilié à la caisse et qui représente alors celle-ci en justice. Toutefois, l'article L. 216-2-1 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L7066IUA) dispose que le directeur général de la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés peut confier à un ou plusieurs organismes de la branche la réalisation de missions ou d'activités relatives à la gestion des organismes, au service des prestations et au recouvrement. Les modalités de mise en oeuvre sont fixées par convention. Ainsi, il résulte des dispositions législatives, que le législateur a entendu permettre qu'un organisme de Sécurité sociale du régime général puisse agir en justice pour le compte d'un autre organisme de la même branche, lorsque le contentieux est lié au service des prestations (sur le principe du recours de la caisse contre le tiers responsable, cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E9589ADI).

newsid:436722

Sécurité sociale

[Brèves] Répétition d'indu : la caisse supporte la charge de la preuve de l'établissement de la prescription médicale d'un transport sanitaire s'il ne revêt pas de caractère d'urgence

Réf. : Cass. Avis, 8 avril 2013, n° 15009 (N° Lexbase : A1338KCK)

Lecture: 1 min

N6723BT8

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Le 18 Avril 2013

Lors d'une action en répétition d'indu, la charge de la preuve de l'établissement de la prescription médicale d'un transport sanitaire, à défaut de caractère d'urgence, pèse sur la caisse de Sécurité sociale. Telle est la solution retenue par la la Cour de cassation, dans un avis rendu le 8 avril 2013 (Cass. Avis, 8 avril 2013, n° 15009 N° Lexbase : A1338KCK).
Le TASS de l'Ariège formule la demande suivante auprès de la Cour de cassation : en matière de frais de transports sanitaires, visés aux articles R. 322-10 et suivants du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L5043IPH), lorsque la prescription médicale porte la même date que le jour où le transport (non urgent) a été effectué, à quelle partie appartient-il de démontrer que cette prescription a été établie a posteriori ? S'agissant d'une demande en répétition de l'indu, la question ne présente pas de difficulté sérieuse, dès lors que la charge de la preuve de l'établissement de la prescription médicale d'un transport sanitaire après l'accomplissement de celui-ci, de nature à exclure sa prise en charge, s'il ne revêt pas de caractère d'urgence, pèse sur l'organisme social (sur la présentation par l'assuré d'une prescription médicale, cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E8363ABD).

newsid:436723

Sécurité sociale

[Brèves] Congé parental d'éducation : droit aux indemnités journalières même à défaut d'avoir respecté le formalisme d'information de l'employeur

Réf. : CA Bourges, 12 avril 2013, n° 12/00081 (N° Lexbase : A0201KCG)

Lecture: 2 min

N6724BT9

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Le 18 Avril 2013

Un assuré ayant bénéficié d'un congé parental retrouve ses droits aux prestations en espèce qui lui étaient ouverts avant le début de son congé parental y compris s'il n'a pas justifié avoir informé son employeur par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé, dès l'instant que l'employeur était au courant de sa situation et ne l'a pas remise en cause. Telle est la solution retenue par la cour d'appel de Bourges, dans un arrêt rendu le 12 avril 2013 (CA Bourges, 12 avril 2013, n° 12/00081 (N° Lexbase : A0201KCG).
Dans cette affaire, une salariée a sollicité un congé parental d'éducation à compter du 1er décembre 2006 d'une durée d'un an puis elle a donné naissance à un autre enfant et n'a pas repris son travail à l'issue de son congé maternité. Enceinte à compter du mois de février 2011, son médecin lui a prescrit des arrêts maladie jusqu'au début de son congé maternité qui s'est poursuivi jusqu'au 29 mars 2012. Elle demande le versement d'indemnités journalières au titre de ses derniers arrêts maladie et au titre de son dernier congé maternité que la CPAM lui refuse. Le TASS a constaté que l'intéressée ne justifiait pas d'un congé parental et a confirmé la décision de la CRA de la CPAM rejetant la demande de versement d'indemnités journalières au titre de la maladie et au titre de la maternité et l'a débouté de ses demandes de dommages et intérêts. Suivant les dispositions de l'article D. 161-2 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L8954ADY) l'assuré qui a bénéficié d'un congé parental retrouve ses droits aux prestations en espèce qui lui étaient ouverts avant le début de son congé parental, sous réserve de justifier de la continuité du congé parental. La CPAM soutient que c'est à l'assurée dans ses rapports avec la caisse de rapporter la preuve de sa situation vis à vis de son employeur et qu'en l'espèce l'intéressée ne fournit aucun justificatif de sa situation au regard de son employeur et que dès lors elle ne peut solliciter le bénéfice des droits qu'ouvre cette situation. La cour d'appel estime que certes en vertu des dispositions des articles L. 1225-50 (N° Lexbase : L0954H99), L. 1225-48 (N° Lexbase : L5736IAP) et R. 1225-13 (N° Lexbase : L2589IA7) du Code du travail le salarié qui souhaite bénéficier d'un congé parental et de prorogations doit en informer son employeur par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé, cependant, ce dernier peut dispenser le salarié de ce formalisme. Selon la cour d'appel il ne s'agit pas d'une condition du droit au salarié au bénéfice de ce congé mais d'un moyen de preuve de l'information de l'employeur. En l'espèce, l'arrêt précise que l'employeur s'il a déploré l'absence d'information de la part de sa salariée de ses divers congés parentaux, n'a pas remis en cause cette situation. La cour considère que l'assurée est en congé parental et fait droit à sa demande à prétendre aux indemnités journalières (cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E9357AB8).

newsid:436724

Social général

[Panorama] Panorama des arrêts inédits rendus par la Cour de cassation - Semaine du 8 au 12 avril 2013

Lecture: 2 min

N6700BTC

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Le 18 Avril 2013

Retrouvez, chaque semaine, une sélection des arrêts inédits de la Cour de cassation, les plus pertinents, classés par thème.
  • Modification du contrat/Limitation de la zone géographique de prospection d'un commercial

- Cass. soc., 10 avril 2013, n° 12-10.193, F-D (N° Lexbase : A0806KCT) : est constitutive d'une modification du contrat de travail, nécessitant l'accord du salarié et peut ainsi justifier une résiliation judiciaire, la limitation de la zone géographique de prospection d'un commercial, qui est de nature à amoindrir son potentiel commercial et à influer par suite sur le montant de la partie variable de sa rémunération, assise sur le "chiffre d'affaires généré" selon les termes du contrat (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E8923ESB).

  • Prise d'acte justifiée/Manquement dans l'exécution du contrat de travail

- Cass. soc., 10 avril 2013, n° 12-12.734, F-D (N° Lexbase : A0873KCC) : justifie la prise d'acte du salarié, le fait que son employeur n'a pas entrepris la négociation prévue au contrat de travail en vue d'une éventuelle promotion du salarié et de versement de la prime qui en était l'accessoire, négociation ne pouvant se confondre avec l'entretien annuel d'évaluation, et le fait qu'il n'a pas abondé les comptes d'épargne-entreprise du salarié .

  • Prise d'acte injustifiée/Calcul de la rémunération

- Cass. soc., 10 avril 2013, n° 12-14.749, F-D (N° Lexbase : A0931KCH) : ne peut être justifiée la prise d'acte d'une salariée pour un manquement de son employeur dans ses obligations contractuelles relatives à la rémunération lorsque la salariée a eu la possibilité de vérifier si le calcul de sa rémunération variable était conforme aux stipulations contractuelles (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E5829ET3).

  • Port de vêtement de travail/Prise en charge de l'entretien par l'employeur

- Cass. soc., 10 avril 2013, n° 12-16.225, F-D (N° Lexbase : A0750KCR) : les frais qu'un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent être supportés par ce dernier et la sécurité juridique, invoquée sur le fondement du droit à un procès équitable prévu par l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (N° Lexbase : L7558AIR), ne saurait consacrer un droit acquis à une jurisprudence immuable, l'évolution de la jurisprudence relevant de l'office du juge dans l'application du droit. Lorsque pour chacune des catégories d'emplois concernés, le port du vêtement de travail est obligatoire et inhérent à l'emploi, l'employeur doit assurer la charge de leur entretien (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E0737ETH).

  • Assistants maternels employés par des particuliers/Rupture du contrat

- Cass. soc., 10 avril 2013, n° 11-28.777, F-D (N° Lexbase : A0879KCK) : lorsque l'employeur n'a plus confié son enfant à la salariée sans respecter les dispositions de l'article L. 423-24 du Code de l'action sociale et des familles (N° Lexbase : L4194H8T), ni celles de l'article 18 de la Convention collective nationale étendue des assistants maternels du particulier employeur du 1er juillet 2004 (N° Lexbase : X0813AET), prévoyant la notification du retrait de l'enfant par lettre recommandée avec avis de réception, l'employeur, responsable de la rupture intervenue à cette date, est redevable de diverses indemnités au titre de cette rupture et la lettre de licenciement pour faute lourde adressée postérieurement à la salariée est, dès lors, sans objet (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E0737ETH).

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Social général

[Brèves] Opération illicite de prêt de main-d'oeuvre : recours à une main-d'oeuvre extérieure pour travailler à des postes qui auraient dû être occupés par des salariés de l'entreprise

Réf. : Cass. crim., 19 mars 2013, n° 11-86.552, F-P+B (N° Lexbase : A0875KCE)

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Le 18 Avril 2013

Le procès-verbal établi par le contrôleur du travail fait foi jusqu'à preuve contraire de ce que son auteur avait vu, entendu et donc personnellement constaté. Par ailleurs, a pris part à une opération illicite de prêt de main-d'oeuvre dont le caractère lucratif est ainsi avéré, l'employeur ayant recours à une main-d'oeuvre pour travailler, avec du matériel fourni par sa société et sous les ordres de son personnel d'encadrement, à des postes qui auraient dû être occupés par des salariés de ladite société et en éludant le paiement de charges sociales. Telles sont les solutions retenues par la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt du 19 mars 2013 (Cass. crim., 19 mars 2013, n° 11-86.552, F-P+B N° Lexbase : A0875KCE).
Dans cette affaire, lors d'un contrôle effectué dans les locaux de la société A. services, spécialisée dans le montage d'armatures métalliques, un fonctionnaire de l'inspection du travail a constaté que trois salariés de l'entreprise de droit polonais N. travaillaient, au sein de l'équipe des soudeurs-assembleurs de la société, à des tâches de montage d'armatures ne nécessitant aucune technicité particulière, et que ces travailleurs, sous le couvert de contrats de prestation de services, étaient rémunérés sur la base d'une facturation forfaitaire comportant le montant des salaires ainsi que le coût des trajets des ouvriers depuis la Pologne et de leurs vêtements de travail. A la suite de ces faits, M. R., dirigeant de la société A., cité devant le tribunal correctionnel, sur le fondement de l'article L. 8241-1 du Code du travail (N° Lexbase : L8849IQS), pour avoir pris part à une opération de prêt de main-d'oeuvre à but lucratif hors du cadre légal du travail temporaire, a été déclaré coupable de cette infraction alors que, selon la loi pénale de fond plus douce, n° 2011-893 du 11 juillet 2011 (N° Lexbase : L8283IQT), réformant l'incrimination de prêt illicite de main-d'oeuvre dans un but lucratif prévue à l'article L. 8241-1 du Code du travail, une opération de prêt de main-d'oeuvre ne poursuit pas de but lucratif lorsque l'entreprise prêteuse ne facture à l'entreprise utilisatrice, pendant la mise à disposition, que les salaires versés au salarié, les charges sociales y afférentes et les frais professionnels remboursés à l'intéressé au titre de la mise à disposition. Pour la Haute juridiction, les juges du fond ont justifié leur décision au regard des dispositions de l'article L. 8241-1 du Code du travail, qui prohibe, hors les exceptions prévues par ce texte, les opérations à but lucratif ayant pour objet le prêt exclusif de main-d'oeuvre. "Le moyen, qui se prévaut vainement des dispositions, non applicables en l'espèce, du dernier alinéa dudit article, dans sa rédaction issue de la loi du 28 juillet 2011, ne saurait être admis" (sur le prêt exclusif de main d'oeuvre, cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E7590ESW).

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