Le Quotidien du 8 mai 2025

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Actualité judiciaire

[Brèves] Huit ans après, le parquet général requiert quatre ans de prison avec sursis contre François Fillon dans l’affaire des emplois prétendument fictifs de son épouse

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par Axel Valard

Le 06 Mai 2025

Huit ans après, il ne s’attendait sans doute pas à devoir revenir sur tout ça. Encore. Et encore… Certes, c’est le principe d’un procès. Mais François Fillon s’était certainement préparé à simplement décliner son identité à la barre de la cour d’appel de Paris, mardi 29 avril. Cela n’aurait pas été illogique. Un an plus tôt, la Cour de cassation avait définitivement confirmé sa culpabilité pour « détournement de fonds publics » dans l’affaire des emplois prétendus fictifs de son épouse, Penelope. La Cour de cassation avait prononcé une simple cassation partielle sur la question de la peine à infliger à l’ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy. Il ne devait être question que de ça devant la cour d’appel, autrement composée. Et les débats étaient prévus pour être courts.

Mais le président de l’audience n’a pas laissé passer sa chance. Dans un prétoire quasi vide, il a donc lâché la question à l’ancien homme à qui l’on prédisait de diriger un jour la France. « Avec le recul, que diriez-vous de toute cette affaire ? » Voix forte et posture rigide, François Fillon a d’abord accusé le coup. Quelques secondes interdit à la barre, il s’est finalement laissé un peu aller : « J’ai déjà dit à la cour que j’avais commis des erreurs dans l’organisation de mon équipe, attaqua-t-il. Organisation due au fait qu’on est avant tout dans l’action... » Était-ce une forme d’aveu huit ans après les faits ? De lassitude, alors que deux élections présidentielles ont eu lieu depuis son échec en 2017 ?

Pas du tout. Immédiatement après, le prévenu a enchaîné pour dénoncer, à sa manière, la façon dont la justice, et les médias, l’ont considéré dans ce dossier. « J’ai été traité d’une manière très particulière. Ce traitement a sans doute un peu quelque chose à voir avec le fait que j’ai été éliminé à l’élection présidentielle... », a-t-il rétorqué. La thèse du complot politique, donc. Encore et encore. Comme si les faits n’avaient pas eu lieu.

L’enjeu ? Éviter la pose d’un bracelet électronique

Mais, on l’a dit : la culpabilité de l’ancien « collaborateur » de Nicolas Sarkozy est définitive. Nul besoin donc de revenir dessus. C’est du reste ce que la cour d’appel a tenté de faire lors de cette audience, en slalomant habilement entre les écueils d’un dossier qui n’a que trop encombré la justice. La question ici était celle de la peine.

François Fillon avait été lourdement condamné en appel à quatre ans de prison dont un an ferme, 375 000 euros d’amende et dix ans d’inéligibilité. Mais la peine de prison ferme avait été mal motivée par la cour d’appel, selon la Cour de cassation. Il fallait donc y revenir. C’était donc l’enjeu de ce jour. Comment punir un fait délictuel, qui s’est produit il y a plusieurs décennies et qui a éclaté aux yeux de l’opinion publique et de la Justice, il y a huit ans maintenant.

« La société ne comprendrait pas que le manquement à la probité ne soit pas sanction », a attaqué le parquet général au moment des réquisitions. Non, pour les magistrats du ministère public, il n’était pas normal que François Fillon emploie son épouse, Penelope, en qualité d’assistante parlementaire et sans la faire réellement travailler. Alors, certes, il y a eu quelques traces de son « travail ». Un courrier reçu ici ou là. Un rapport sur le bocage sabolien pour l’élu originaire de la Sarthe. Mais trop peu au regard de la rémunération qu’elle a touché tout au long de ses années.

Pas question pour autant de condamner l’homme aujourd’hui septuagénaire d’une peine de prison ferme, quand bien même celle-ci serait aménagée sous la forme d’une détention sous surveillance électronique à domicile. Nicolas Sarkozy, Patrick Balkany... Les hommes politiques commencent à prendre l’habitude de porter des bracelets. Mais pas lui. Au terme d’un court réquisitoire, le parquet a simplement réclamé une peine de quatre ans de prison avec sursis, le maintien de l’amende à 375 000 euros et les dix ans d’inéligibilité, que François Fillon considère encore aujourd’hui « comme une blessure morale ». Loin donc des deux ans de prison ferme prononcés en première instance, et de l’année ferme prononcée en appel avant la décision de la Cour de cassation.

François Fillon n’était pas seul

Juste avant les réquisitions, Yves Claisse, l’avocat de l’Assemblée nationale, avait rappelé les grands principes qui régissent la vie démocratique française et réclamé la poursuite du remboursement des salaires indûment perçus par Penelope Fillon durant toute ces années pour le compte de son époux. François Fillon étant en train de « rendre l’argent », il ne restait plus qu’Antonin Levy, son avocat historique, pour fermer le bal. Brillant depuis huit ans dans la défense de son illustre client, il a réussi à ne pas redire ce qu’il avait déjà plaidé par le passé.

Pas question ici de revenir sur les « preuves » matérielles du travail de Penelope et d’évoquer le « rôle social » de l’épouse d’un député. Non, l’avocat s’est contenté d’expliquer qu’au moment de l’éclatement de l’affaire, bon nombre de parlementaires embauchaient leurs parents (époux ou épouse, enfants, etc.) Chiffres à l’appui, il a démontré que certes François Fillon n’était pas dans la légalité, mais qu’il n’était pas le seul dans ce cas… Suffisamment intelligent pour susciter quelques questions de la part du président qui a donc la lourde charge de mettre un point final à cette affaire politico-financière.

Son délibéré sera connu le 17 juin. « J’espère que c’était ma dernière plaidoirie dans ce dossier », a, dans un sourire, commenté Antonin Levy.

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Autorité parentale

[Commentaire] La condamnation d’une atteinte à la coparentalité en matière médicale

Réf. : Cass. civ. 1, 5 mars 2025, n° 22-20.631, F-D N° Lexbase : A853863M

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N2038B3U

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par Adeline Gouttenoire, Professeure à l’Université de Bordeaux

Le 30 Avril 2025

Mots-clés : coparentalité • ordre public • décisions relatives à la santé de l'enfant • nécessité médicale • urgence • conflit parental • office du juge • Juge aux affaires familiales (JAF) • juge des enfants • prérogative du médecin

L’arrêt du 5 mars 2025 vient rappeler le caractère d’ordre public du principe de coparentalité. La Cour de cassation condamne en effet les tentatives d’un parent de déséquilibrer à son profit les droits de chacun des titulaires de l’exercice en commun de l’autorité parentale.


 

En l’espèce, le père d’un enfant de trois ans avait saisi le juge aux affaires familiales à propos des modalités d'exercice de l'autorité parentale après la séparation du couple. Les juges du fond n’avaient pas écarté l’exercice en commun de l’autorité parentale. En revanche, la mère a été autorisée par la cour d’appel « à prendre seule les décisions relatives à la santé de l'enfant qui relèvent de la nécessité médicale ou de l'urgence, et, uniquement lorsqu'elle aura sollicité au préalable l'avis du père et que celui-ci, soit se sera abstenu de répondre, soit s'y sera opposé sans raison légitime et sans faire de contre-propositions efficientes. »

Cette atteinte à l’exercice conjoint de l’autorité parentale en matière de santé est logiquement condamnée par la Cour de cassation (I), en ce qu’elle constitue une délégation de pouvoir du juge aux affaires familiales (II).

I. L’atteinte à la coparentalité en matière de santé

Prérogative parentale. Les soins, traitements, opérations rendus nécessaires par l'état de santé de l'enfant relèvent de l'autorité parentale des père et mère (C. civ., art. 371-1, al. 2 N° Lexbase : L6252ML7). Il leur appartient de choisir un traitement, de demander l'admission de l'enfant à l'hôpital (CSP, art. R. 1112-34 N° Lexbase : L4592DKB), de consentir à une opération (CSP, art. R. 1112-35 N° Lexbase : L4593DKC) et, plus généralement, de décider des soins à donner à l'enfant. Dans l'arrêt « Hanzelkovi c/ République tchèque » [1], la Cour européenne des droits de l'Homme a condamné les autorités étatiques qui avaient imposé à une mère l'hospitalisation pendant trois jours de son nouveau-né. En effet, selon le juge européen, la notion de vie privée et familiale inclut le droit d’un parent de décider du traitement médical, et partant, de l'hospitalisation de son enfant.

Accord des deux parents. En matière de santé comme dans les autres domaines, le principe est la coparentalité c’est-à-dire l’accord des deux parents pour tous les actes concernant l’enfant. Toutefois, en vertu de l’article 372-2 du Code civil N° Lexbase : L2902AB4, chacun des parents peut faire seul les actes usuels. La cour d’appel de Paris, dans la décision du 9 juin 2022 objet du pourvoi en cassation [2], constate qu’il n’existe pas de définition des actes usuels et apporte des précisions intéressantes à ce sujet. Elle considère que les actes usuels sont « des soins obligatoires comme certaines vaccinations ou des soins courants (soins dentaires, maladies infantiles courantes etc…) ou des soins habituels pour tel ou tel enfant. ». À l’inverse, les actes non usuels, à propos desquels le juge aux affaires familiales est amené à intervenir pour trancher le conflit parental se caractérisent par « leur caractère inhabituel, ou de leur incidence particulière sur l’éducation et la santé de l’enfant ».

Obstruction. La cour d’appel a, en l’espèce, relevé une propension habituelle du père à la contestation qui va bien au-delà de l’expression de points de vue contraires entre des parents séparés et de la revendication d’une place égale à celle de la mère. Or, « l’intérêt de l’enfant est avant tout de pouvoir être suivi au plan de sa santé sans être pris en étau dans le conflit parental et les contestations quasi-systématiques du père en réplique aux choix de praticiens bien souvent faits de manière unilatérale par la mère », alors que ce choix relève de la coparentalité. Cette situation justifiait, selon la cour d’appel, l’autorisation donnée a priori à la mère de réaliser seule les actes non usuels qui relèvent de la nécessité médicale ou de l’urgence après avoir sollicité l’avis du père. Le refus de ce dernier, de même que son silence n’empêcheront pas la mère de prendre la décision, sauf à ce qu’il fasse « des propositions efficientes ». Les prérogatives accordées à la mère ne sont pas très claires ni pour ce qui est du type de décisions pouvant être prises, ni pour ce qui est des contrepropositions du père. On peut en outre s’interroger sur l’appréciation de l’absence de motifs légitimes du refus du père qui constitue une condition de la prise de décision par la seule mère. L’attitude du père peut, cependant, être analysée comme une atteinte indirecte à la coparentalité, et les prérogatives reconnues à la mère comme un moyen de l’empêcher.

II. L’interdiction faite au juge des déléguer ses prérogatives

Office du juge. La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel « en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les parents exerçaient en commun l'autorité parentale, a délégué à la mère son pouvoir de trancher les éventuels conflits d'autorité parentale relativement à certaines décisions concernant la santé de l'enfant. » La condamnation par la Cour de cassation de la décision de la Cour d’appel d’autoriser la mère à prendre seules les décisions médicales nécessaires ou urgentes concernant l’enfant est sans appel. L’office du juge aux affaires familiales implique que le juge fixe lui-même les modalités de l’exercice de l’autorité parentale. Cette affirmation n’est toutefois pas antinomique avec l’obligation pour le juge de tenir compte des accords parentaux. Ce que la Cour de cassation prohibe, c’est le fait pour le juge de laisser un seul des parents organiser directement ou indirectement un des aspects de l’exercice de l’autorité parentale. Il est vrai que la reconnaissance à la mère d’une telle prérogative a de quoi surprendre tant la matière médicale revêt une importance essentielle en matière de coparentalité.

Droit de visite. Selon le même raisonnement, la Cour de cassation a maintes fois condamné les droits de visite soumis à la volonté de l’enfant [3], considérant – à tort ou à raison – qu’il s’agit pour le juge, de déléguer ses pouvoirs, puisque qu’en réalité, il ne fixe par le droit de visite mais le laisse au bon vouloir de l’enfant, et donc, dans l’esprit de la Cour de cassation, à la volonté du parent hébergeant.

Compétence pour trancher les conflits. La Cour de cassation estime qu’en accordant à un parent la possibilité de prendre une décision relative à l’enfant sans l’accord de l’autre – ce qui suppose qu’il s’agisse d’un acte non usuel pour lesquels le consentement des deux parents est requis – le juge délègue son pouvoir de décision. Elle se fonde sur l’article 373-2-6 du Code civil N° Lexbase : L6254ML9 selon lequel le juge aux affaires familiales règle les questions qui lui sont soumises en veillant spécialement à la sauvegarde des intérêts des enfants mineurs. Ce que le juge délègue en autorisant la mère à prendre seule la décision relative à la santé de l’enfant en cas de conflit – positif ou négatif – c’est son pouvoir de trancher un désaccord entre les parents à propos d’une question relevant de l’exercice de l’autorité parentale.

Pouvoir du juge de trancher les conflits parentaux. Dans plusieurs arrêts antérieurs, la Cour de cassation a affirmé clairement que le juge aux affaires familiales était compétent pour trancher les conflits parentaux à propos d’une décision spécifique relative à l’enfant. Elle a ainsi admis que le juge aux affaires familiales tranche un conflit entre les parents à propos du baptême des enfants [4] ou d'un traitement à base d'hormones de croissance [5]. Dans ces deux décisions, elle a refusé de passer outre le refus de l’un des parents, ce qui est conforme aux exigences de la coparentalité. La décision judiciaire accordant, de manière anticipée, à la mère, le droit de prendre seule une décision médicale en cas de désaccord ou de silence du père, prive ce dernier de la possibilité de saisir, a priori, le juge pour qu’il tranche le conflit.

Opportunité. On peut comprendre la volonté du juge de faciliter la prise de décision médicale nécessaire ou urgente par le parent hébergeant lorsque l’autre parent s’oppose par principe aux décisions qu’il estime nécessaires. L’obligation de saisir le juge pour chaque décision médicale qui constitue un acte non usuel rend en effet la prise en charge médicale de la santé de l’enfant particulièrement complexe. La possibilité pour le parent non hébergeant de bloquer l’exercice de l’autorité parentale est manifestement contraire à l’intérêt de l’enfant.

Exercice exclusif de l’autorité parentale. Bien que rarement admis par le juge aux affaires familiales, l’exercice exclusif de l’autorité parentale peut constituer une solution face à l’obstruction systématique d’un parent à la réalisation des actes non usuels. En effet, l’article 373-2-1 du Code civil N° Lexbase : L7190IMA permet au juge de déroger au principe de l’exercice conjoint de l’autorité parentale lorsque l’intérêt de l’enfant l’impose. Le refus d'un parent de collaborer avec l'autre a ainsi pu être retenu comme pouvant fonder un exercice unilatéral de l’autorité parentale [6]. On peut considérer que tel est bien le cas si les décisions médicales relatives à ce dernier ne peuvent être prises dans un délai raisonnable. Cette solution peut paraître cependant disproportionnée si l’opposition du père ne se manifeste que dans le domaine médical. 

Prérogatives du médecin. Un dispositif exceptionnel permet au médecin de passer outre le refus d'un ou des parent(s) sans avoir besoin de recours au juge. En effet, selon l'article L. 1111-4, alinéa 6, du Code de la santé publique N° Lexbase : L4849LWI, « dans le cas où un refus de traitement par la personne titulaire de l'autorité parentale ou le tuteur risque d'entraîner des conséquences graves pour la santé du mineur, le médecin délivre les soins indispensables ». Ainsi, la cour administrative d'appel de Bordeaux a pu considérer, dans une décision du 4 mars 2003 [7], que les médecins qui avaient pratiqué une transfusion sanguine sur un mineur malgré le refus des parents ne commettaient pas de faute ; il était en effet établi que l'enfant présentait des signes cliniques de péril vital imminent. En outre, l'article R. 4127-42 du Code de la santé publique N° Lexbase : L7283L4I dispose que : « Sous réserve des dispositions de l'article L. 1111-5, un médecin appelé à donner des soins à un mineur […] doit s'efforcer de prévenir ses parents ou son représentant légal et d'obtenir leur consentement. En cas d'urgence, le médecin doit donner les soins nécessaires ». Cette prérogative reconnue au médecin permet à celui-ci de réaliser l’acte nonobstant le refus d’un parent, lorsque l’absence de soin est susceptible d’avoir de graves conséquences sur l’enfant. Cette règle permettait dans la situation de l’espèce de répondre ponctuellement aux besoins de l’enfant en matière médicale.

Juge des enfants. Contrairement au juge aux affaires familiales, le juge des enfants peut, en vertu de l’article 375-7 alinéa du Code civil N° Lexbase : L2302MBU, autoriser la réalisation d’un acte ou d’une série d’actes non usuels par le service ou la personne à qui l’enfant et confié en cas de refus abusif ou injustifié ou en cas de négligence des détenteurs de l'autorité parentale. Cette disposition destinée à éviter que les parents empêchent l’effectivité de la prise en charge de l’enfant, peut être appliquée à une domaine particulier tel que la santé de l’enfant. La disposition en cause dans l’arrêt du 5 mars 2025, correspond à cette situation. Certes, le contexte de l’assistance éducative qui implique une mise en danger de l’enfant dans son milieu familial justifie davantage une telle atteinte aux droits parentaux. Il n’en reste pas moins qu’une possibilité similaire pour le juge aux affaires familiales, dans des circonstances exceptionnelles et selon des modalités très encadrées, pourrait être opportune et faciliter la vie quotidienne de certains enfants de parents séparés qui subissent, comme l’a constaté la cour d’appel de Paris, les effets délétères du conflit parental dans leur vie quotidienne.

 

[1] CEDH, 11 décembre 2014, Req. 43643/10, Hanzelkovi c/ République tchèque N° Lexbase : A2144M7K, JCP 2015. Doctr. 70, obs. Sudre.

[2] CA Paris, 3, 3, 9 juin 2022, n° 19/12243 N° Lexbase : A53410EK.

[3] Cass. civ. 2, 7 octobre 1987, n° 86-15.026, publié au bulletin N° Lexbase : A6548C8Z ; RTD civ. 1988. 321, obs. J. Rubellin-Devichi ; Cass. civ. 2, 11 octobre 1995, n° 93-15415, publié au bulletin N° Lexbase : A7811ABW, RTD civ. 1996. 142, obs. J. Hauser ; Cass. civ. 2, 22 octobre 1997, n° 96-12.011 N° Lexbase : A1022ACT, RTD civ. 1998. 95, obs. J. Hauser ; JCP 1998. II. 10014, note T. Garé ; Cass. civ. 1, 4 octobre 2001, n° 99-05.088 N° Lexbase : A1491AW7, Dr. fam. 2002, comm. no 58, obs. P. Murat ; Cass. civ. 1, 6 mars 2013, n° 11-22.770, F-D N° Lexbase : A3089I9B, Dr. fam. 2013, comm. n° 70, obs. C. Neirinck.

[4] Cass. civ. 1, 23 septembre 2015, no 14-23.724, F-P+B N° Lexbase : A8224NPB.

[5] Cass. civ. 1, 15 mars 2017, no 16-24.055, F-D N° Lexbase : A2742UCK, D. 2017. 1727, obs. Bonfils et Gouttenoire

[6] Cass. civ. 1, 10 mai 2001, n° 00-11.083 N° Lexbase : A4281ATQ, RJPF 2001-9/25. – CA Paris, 29 mars 2001, no 2000/11036 N° Lexbase : A1822MGL.

[7] CAA Bordeaux, 4 mars 2003, no 99BX02360 N° Lexbase : A5779C9W, JCPAdm. 2003, no 51, p. 15.

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Données personnelles

[Questions à...] Données personnelles des salariés : assurer leur conformité avec le RGPD - Questions à Eric Delisle de la CNIL

Lecture: 15 min

N2217B3I

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Le 06 Mai 2025

Le présent article est issu d’un dossier spécial consacré au droit du travail et aux données personnelles, publié dans l’édition n° 1012 du 7 mai 2025 de la revue Lexbase Social. Le sommaire de ce dossier est à retrouver en intégralité ici N° Lexbase : N2231B3Z.


Mots clés : CNIL • droit du travail • données personnelles • RGPD • conformité • obligations • contrôles • sanctions

Toute entreprise qui réalise un traitement de données doit respecter le Règlement général sur la protection des données (RGPD). Eric Delisle, chef du service des affaires sociales, des collectivités territoriales, du sport et de l’environnement à la CNIL, fait le point, pour la revue Lexbase Social, sur les règles et les enjeux du traitement des données personnelles en droit du travail ainsi que sur le déroulement des contrôles de la CNIL.


Lexbase Social : L’employeur peut être amené à collecter des données lors du processus de recrutement. Quelles sont les limites ?

Dans le cadre de la recherche de profils de candidats pertinents, de l’analyse des candidatures, et de la mesure de leurs aptitudes professionnelles (qualifications, expériences, etc.), les recruteurs (qu’il s’agisse notamment de l’employeur direct, d’un cabinet de recrutement ou encore d’une société d’intérim) sont amenés à accéder, utiliser, conserver et, au bout d’un certain temps, à détruire, des informations personnelles concernant les candidats à un emploi. Ces actions constituent autant d’opérations de traitement de données à caractère personnel qui sont encadrées par le RGPD, mais également par le Code du travail.

Le principe est relativement simple : vous ne pouvez utiliser que les informations qui vous permettent d’évaluer la capacité des candidats à occuper le poste proposé ou à mesurer leurs aptitudes professionnelles.

Les informations demandées doivent ainsi vous permettre d’identifier le candidat le plus adapté au poste à pourvoir et de vérifier ses compétences (notamment ses connaissances, son savoir-faire et son savoir-être) ainsi que les qualifications requises (par exemple : ses diplômes et certifications).

Bien qu’il puisse être tentant d’obtenir un maximum d’informations sur les candidats, vous devez veiller au respect de leur vie privée. Les questions posées doivent donc toujours être en lien avec le contexte professionnel. La collecte d’informations qui n’auraient pas de lien direct et nécessaire avec l'emploi proposé ou avec l’évaluation des aptitudes professionnelles des candidats est par conséquent interdite.

Il est notamment interdit de demander à un candidat :

  • son numéro de Sécurité sociale et ses coordonnées bancaires (sauf dans le cas spécifique des entreprises de travail temporaire en leur qualité d’employeur). Ces données seront en revanche utiles au stade de l’embauche, si le candidat choisi est recruté dans la structure ;
  • des informations relatives aux membres de sa famille ;
  • s’il souhaite avoir des enfants ;
  • ses mensurations, poids, couleur des cheveux, etc., sauf pour certains types de postes particuliers (mannequins, pilotes de course, jockeys, etc.) : l’annonce publiée devra alors spécifier les caractéristiques recherchées.

Le recruteur ne doit également procéder à aucune forme de discrimination liée à la collecte des informations, telle que des discriminations liées à l’âge ou à l’apparence physique.

Lexbase Social : Quelles informations personnelles, concernant ses employés, l’employeur peut-il collecter ?

Dans le cadre de la gestion du personnel, les employeurs utilisent régulièrement les données personnelles de leurs salariés/agents pour différents objectifs. Les informations personnelles pouvant être traitées par l’employeur vont dépendre des traitements mis en œuvre et des objectifs qu’ils poursuivent. Ces données seront donc différentes selon qu’il s’agit de la gestion de la paie, de la déclaration sociale nominative (DSN), de la mise en œuvre d’un dispositif d’alertes professionnelles, ou encore de mesures relatives à l’action sociale prise en charge par l’employeur.

Afin de savoir quelles données peuvent être traitées, l’employeur doit veiller à respecter certains les 5 principes de bon sens posés par le RGPD :

  • les informations personnelles doivent être traitées de manière licite, loyale et transparente. Par exemple, dans le cadre d’un recrutement, demander le lieu de résidence d’un candidat n’est pas licite, excepté dans les cas où le candidat doit participer à un dispositif de garde et d’astreinte. Ou encore, le fait de mettre en œuvre un dispositif de vidéosurveillance à des fins d’assurer la sécurité des biens et des personnes sans en informer le personnel ne constitue pas une collecte loyale et transparente des données ;
  • les informations concernant les employés doivent être collectées et conservées pour des finalités déterminées, explicites et légitimes. L’employeur doit donc savoir ce pourquoi il collecte des données sur ses employés : on peut penser ainsi à certains formulaires remplis à l’embauche qui doivent être remplis, sans que personne ne soit en mesure d’expliquer ce pourquoi ils le sont ;
  • seules les informations adéquates, pertinentes et limitées à ce qui est nécessaire peuvent être collectées. Par exemple, il est a priori interdit de demander à un employé des informations sur ses parents, ou ses opinions politiques ;
  • les données du candidat doivent être conservées pour une durée strictement nécessaire à l’objectif poursuivi par le traitement. Par exemple, la conservation des données d’un employé qui quitte l’entreprise, n’ont a priori plus à être conservées dans les bases de données « actives » du service RH : elles pourront en revanche être conservées un certain nombre d’années (souvent 5 ans) à des fins de répondre à des obligations règlementaires puis devront être supprimées ;
  • enfin, des mesures de sécurité et de confidentialité appropriées doivent être mises en œuvre. Par exemple, tous les salariés d’une entreprise n’ont a priori pas vocation à accéder aux fiches de paie des salariés : seules les personnes en charge de les établir devront pouvoir y accéder.

Lexbase Social : Dans quel cadre l’employeur peut-il mettre en place un outil de calcul du temps de travail effectif de ses salariés ?

La question du contrôle du temps de travail des salariés est une prérogative et parfois une obligation de l’employeur issue de la législation du travail. Les employeurs, comme les employés, ont ainsi parfois besoin de connaître les horaires effectués : pour ce faire, ils peuvent mettre en place des outils de calcul du temps de travail.

Ces outils traitent de la donnée à caractère personnel et doivent par conséquent respecter les règles relatives à la protection des données.

Si le développement des technologies offre aux employeurs de nouveaux outils pour effectuer cette mesure, certains permettent parfois de collecter bien plus d’informations sur les personnes concernées que de besoin. Des limites à leur utilisation sont donc indispensables pour préserver les droits et libertés de chacun.

Ainsi, si les règles classiques (notamment de transparence, de durée de conservation limitée et de finalité déterminée, explicite, et légitime) doivent être respectées, un point d’attention tout particulier doit être apporté aux données pouvant être collectées, notamment l’usage de la biométrie.

Les données biométriques permettent d’identifier un individu, de manière unique, à partir de caractéristiques physiques ou biologiques qui lui sont propres (reconnaissance du visage, de l’empreinte du doigt, etc.). Eu égard aux risques pour les droits et libertés des individus, le traitement est par principe interdit, sauf à justifier d’une exception juridique fondée sur l’article 9. 2 du RGPD.

Comme tout traitement de données sensibles, il appelle une appréciation particulièrement exigeante de la pertinence, de l’adéquation et de la proportionnalité de la collecte d’une telle donnée. Or, la CNIL a considéré à plusieurs reprises, en l’absence de circonstances exceptionnelles pouvant être démontrées, que la mise en œuvre d’un dispositif biométrique est un moyen disproportionné de contrôle des horaires des employés qui peut être atteinte par d’autres moyens moins intrusifs.

Lexbase Social : Quelles actions les entreprises peuvent-elles mettre en œuvre afin d'anticiper un contrôle de la CNIL ?

Le RGPD a, pour l’essentiel, mis fin à une logique de formalités préalables auprès de la CNIL, en consacrant la logique d’« accountability », ou de responsabilisation des acteurs : chaque organisme est donc comptable de sa propre conformité au texte. Il doit ainsi :

  • veiller à la conformité des traitements de données mis en œuvre ;
  • et être en mesure de la démontrer, à tout moment, à l’autorité de contrôle.

Afin d’anticiper au mieux un contrôle, la meilleure réponse est d’avoir une bonne gestion de sa conformité. Pour ce faire, tout organisme dispose d’outils qu’il peut ou parfois doit mettre en œuvre.

Parmi ces outils, le registre des activités de traitement qui permet de recenser les traitements de données et disposer d’une vue d’ensemble des traitements de données mis en œuvre dans l’organisme. Document de recensement et d’analyse, il doit refléter la réalité des traitements de données personnelles et permet d’identifier précisément les principales caractéristiques des traitements.

Véritable outil de pilotage, sa création et sa mise à jour sont ainsi l’occasion d’identifier et de hiérarchiser les risques au regard du RGPD. Il est donc essentiel que l’organisme dispose de ce registre et sache le trouver rapidement afin de la présenter dans le cas d’une demande de l’autorité de contrôle.

Pour se préparer au mieux, il est également essentiel d’établir une petite procédure et d’avoir particulièrement bien défini les rôles de chacun. On oublie souvent, par exemple, de prévenir et de sensibiliser les personnels à l’accueil de l’organisme sur la manière de réagir à l’arrivée de contrôleurs : il est essentiel qu’ils sachent qui contacter dans cette éventualité.

De la même manière, dans le cadre d’un contrôle, les agents de la CNIL vont demander à être mis en en relation avec différentes personnes en capacité de présenter les traitements visés par le contrôle d’un point de vue juridique, mais aussi technique. Il est donc important d’anticiper en identifiant et en sensibilisant les acteurs clés qui pourraient être sollicités par les services de la CNIL. Lorsqu’il est désigné, ils vont également demander à échanger avec le délégué à la protection des données (DPD/DPO).  

Le DPO est, à ce titre, un acteur central de la mise en conformité d’un organisme, chargé de piloter la conformité au RGPD au sein de l’organisme qui l’a désigné, mais également de sensibiliser et de conseiller l’ensemble des collaborateurs à ce texte.

Lexbase Social : Comment se déroule un contrôle de la CNIL et quels sont ses pouvoirs d’investigations ?

La CNIL dispose de pouvoirs de contrôle auprès de tout organisme public ou privé mettant en œuvre des traitements de données personnelles. Afin de faire comprendre ces missions au public, une charte des contrôles a été diffusée sur son site web.

Les missions de contrôle, en plus d’être un moyen d’action indispensable pour vérifier l'application concrète de la législation sur la protection des données personnelles, permettent d'apprécier concrètement les enjeux émergents en matière de protection des données personnelles.

Ces missions sont déclenchées sur décision de la présidente de la CNIL, à la suite d’une réclamation ou d’un signalement, d’une alerte parue dans la presse, ou de sa propre initiative (notamment sur la base de thématiques prioritaires annuelles).

Lors de ces missions, les contrôleurs peuvent demander communication de tous documents ou renseignements utiles et nécessaires à l’accomplissement de sa mission, à l’exception des informations protégées par l’un des secrets cités à l’article 19(III) de la loi "Informatique et Libertés".

Ces contrôles peuvent être réalisés sur place, sur pièces, sur convocation ou en ligne.

  • Le contrôle sur place : une délégation de la CNIL se rend directement au sein des locaux d’un organisme (entre 6 heures et 21 heures) afin de mener des investigations portant sur des traitements de données personnelles.
  • L’audition sur convocation : un courrier est adressé à l’organisme afin qu’il se représente se présente, à une date donnée, dans les locaux de la Commission. Ces représentants devront répondre à des questions portant sur le(s) traitement(s) objet des vérifications et, le cas échéant, rendre possible un accès aux ressources informatiques de l’organisme.
  • Le contrôle en ligne : les contrôleurs effectuent des vérifications, depuis les locaux de la Commission, en consultant notamment des données librement accessibles ou rendues accessibles directement en ligne. Ces vérifications sont effectuées à partir d’un service de communication au public en ligne (par exemple, sur un site internet, une application mobile ou un produit connecté) et peuvent, le cas échéant, être réalisées sous une identité d’emprunt.
  • Le contrôle sur pièces : les agents de la CNIL adressent un courrier accompagné d’un questionnaire destiné à évaluer la conformité des traitements mis en œuvre par un organisme. Ce dernier doit communiquer à la Commission ses réponses en y joignant tout document utile permettant de les justifier.

Chacune de ces modalités de contrôle peut être utilisée de manière complémentaire. Ainsi, la CNIL pourra, par exemple, initier ses vérifications en ligne et les poursuivre sur place. Un contrôle sur pièces pourra également être opéré préalablement à un contrôle sur place.

Tout contrôle, à l’exception du contrôle sur pièces, nécessite la rédaction d’un procès-verbal au sein duquel les agents de la CNIL consignent, de manière factuelle, l’ensemble des informations qui ont été portées à leur connaissance pendant le contrôle ainsi que les constatations qu’ils ont effectuées.

Lexbase Social : Quelles sanctions encourent les entreprises en cas de non-respect des dispositions légales ?

Lorsque des manquements au RGPD ou à la loi sont portés à sa connaissance, la formation restreinte de la CNIL (sa formation de sanction) peut prononcer, après une procédure contradictoire, une ou plusieurs mesures parmi lesquelles : 

  • un rappel à l'ordre ;
  • une injonction de se mettre en conformité. Cette injonction peut être assortie d'une astreinte dont le montant ne peut excéder 100 000 euros par jour de retard ;
  • une amende administrative ne pouvant excéder 10 millions d'euros ou 2 % du chiffre d'affaires annuel mondial de la société. Pour les manquements les plus graves, ce montant peut s'élever jusqu'à 20 millions d'euros ou 4 % du chiffre d'affaires annuel mondial ;
  • la formation restreinte peut décider de rendre publique la décision qu'elle adopte. Elle peut également ordonner l'insertion, aux frais des organismes sanctionnés, de la décision dans des publications, journaux et supports qu'elle désigne.

Il faut également noter qu’il existe désormais une procédure de sanction simplifiée pour les dossiers peu complexes ou de faible gravité. Cette procédure, qui permet d’augmenter très sensiblement le nombre de sanctions prononcées, est :

  • Instruite par un rapporteur désigné par la présidente parmi les agents de la CNIL (et non parmi le collège de la Commission).
  • Les sanctions ne peuvent pas être rendues publiques et sont limitées (rappel à l'ordre, amende d'un montant maximum de 20 000 euros, injonction avec astreinte plafonnée à 100 euros par jour de retard).
  • Le président de la formation restreinte (ou un membre qu'il désigne) statue seul.
  • Aucune séance publique n'est organisée, sauf si l'organisme demande à être entendu.

Lexbase Social : Les salariés et anciens salariés peuvent demander l’accès aux courriels dont ils sont expéditeurs, destinataires, en copie ou dans lesquels ils sont cités ou visés. Quels conseils apportez-vous aux employeurs pour qu’ils traitent au mieux ce type de demande ?  

Toute personne peut demander à un organisme la communication des données qu’il détient sur elle et en obtenir une copie : c’est le principe du droit d’accès prévu par l’article 15 du RGPD.

Un salarié peut ainsi demander à son employeur l’accès et la communication des données personnelles qu’il a en sa possession. Les courriels comportant des données à caractère personnel, ce droit s’applique donc aux données qui y sont contenues.

Lorsqu’il répond à une demande de droit d’accès d’un salarié à des courriels professionnels, l’employeur peut tout d’abord rappeler que le droit d’accès ne porte que sur les données à caractère personnel contenues dans les courriels : il peut parfois y avoir de la part du demandeur une confusion sur la portée exacte de ce droit qui peut être confondu avec le droit d’accès aux documents administratifs qui porte, lui, sur des documents et non des données.

Il doit ensuite apprécier l’atteinte au droit des tiers que représenterait cette communication : il va ainsi devoir faire un tri entre ce qui est communicable et ce qui n’est pas. En effet, si le droit d’accès est un droit important accordé par le RGPD à l’ensemble des individus, l’exercice de ce droit ne peut pas se faire au détriment des autres personnes dont les données sont traitées.

Ainsi, l’organisme doit permettre un accès aux seules données dont la communication ne porte pas une atteinte disproportionnée aux droits d’autrui, sans toutefois refuser de satisfaire à la demande de manière générale. Les droits des tiers (secret des affaires et à la propriété intellectuelle, droit à la vie privée, secret des correspondances, etc.) peuvent donc venir restreindre l’éventail des données accessibles ou communicables.

Cette analyse peut être effectuée au cas par cas, message par message. Cependant, pour faciliter cette analyse et accélérer la réponse à la demande, la CNIL propose à l’employeur de distinguer deux situations, selon que le salarié demandeur est :

  • l’expéditeur ou le destinataire des courriels ;
  • ou seulement mentionné dans le contenu des courriels.

La CNIL propose sur son site web une fiche pratique et une méthodologie qui devrait aider les organismes à faire face à ces demandes.

Enfin, un dernier point d’attention porte sur le cas particulier des courriels identifiés comme étant personnels ou dont le contenu s’avère être privé malgré l’absence de la mention du caractère personnel : ces derniers font l’objet d’une protection particulière liée au secret des correspondances, l’employeur n’étant pas autorisé à y accéder.

Pour ces courriels, l’employeur ne pourra pas prendre connaissance du contenu même en vue d’occulter des informations et devra fournir au demandeur le courriel en l’état, à condition que ce dernier soit l’expéditeur ou le destinataire. En cas de doute, les tribunaux ont rappelé que l’employeur peut saisir le juge afin qu’il ordonne l’ouverture de messages « personnels » suspectés, par exemple, de récupérer des documents confidentiels. 

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Magistrats

[Podcast] Président de la 5e chambre du Conseil d'État, c'est quoi ?

Lecture: 1 min

N2176B3Y

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par Jean-Philippe Mochon, Président de la 5e chambre du Conseil d’État

Le 28 Avril 2025

► Dans cet épisode de LexFlash, Jean-Philippe Mochon, Président de la 5e chambre du Conseil d’État, partage avec nous les coulisses de son métier, son parcours, les enjeux de sa fonction, ainsi que sa vision du rôle du juge administratif dans la société.
► Retrouvez cet épisode sur Youtube, Deezer, Apple et Spotify.

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Social général

[Veille] Actualités du droit du travail et de la protection sociale (avril 2025)

Lecture: 29 min

N2234B37

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par Béatrice Renard Marsili, Juriste en droit du travail et Conseil en ressources humaines - DRH externalisé et Charlotte Moronval, Rédactrice en chef

Le 06 Mai 2025

La revue Lexbase Social vous propose de retrouver dans un plan thématique, une sélection des décisions (I.) qui ont fait l’actualité des dernières semaines, en droit du travail et droit de la protection sociale, ainsi que toute l’actualité normative (II.), classée sous différents thèmes/mots-clés.


I. Actualités jurisprudentielles

1) Droit du travail

♦ Amour au travail - Licenciement pour faute grave

Cass. soc., 26 mars 2025, n° 23-17.544, F-B N° Lexbase : A16040CE : un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut pas en principe justifier un licenciement disciplinaire, à moins qu'il constitue un manquement du salarié à une obligation découlant de son contrat de travail.

Constitue une faute grave rendant impossible son maintien dans l'entreprise, le comportement du directeur ayant porté atteinte à la santé psychique d'une collaboratrice en faisant pression sur elle et usant de sa position hiérarchique, notamment par l'envoi de courriels sur sa boîte professionnelle et de messages sur son téléphone, afin de continuer à entretenir une relation amoureuse malgré le refus clairement opposé de la salariée.

Pour aller plus loin : Ch. Mathieu, Quand le dépit amoureux conduit au licenciement disciplinaire, Lexbase Social, mai 2025, n° 1012 N° Lexbase : N2203B3Y.

♦ Remplacement salarié en poste - Licenciement verbal

Cass. soc., 26 mars 2025, n° 23-23.625, F-B N° Lexbase : A16140CR : la rupture du contrat de travail, en l'absence de lettre de licenciement, ne peut résulter que d'un acte de l'employeur par lequel il manifeste au salarié ou publiquement sa volonté de mettre fin au contrat de travail.

L'intention de l'employeur de recruter un nouveau directeur général, manifestée uniquement par un échange entre le président de la société et la responsable des ressources humaines afin d'établir une promesse d'embauche, n'est pas exprimée publiquement ou auprès du salarié. Dès lors, l'employeur qui conserve la faculté de ne pas mettre en œuvre la procédure de licenciement, ne manifeste pas de manière irrévocable la volonté de mettre fin au contrat de travail dans un tel cas. Le salarié remplacé ne peut donc pas se prévaloir d'un licenciement de fait.

Pour aller plus loin : M. Rascle, L’anticipation du remplacement d’un salarié encore en poste n’équivaut pas un licenciement verbal, Lexbase Social, mai 2025, n° 1012 N° Lexbase : N2174B3W.

♦ Harcèlement moral - Dégradation de l’état de santé

Cass. soc., 11 mars 2025, n° 23-16.415, FS-B N° Lexbase : A302864W : la reconnaissance d’une situation de harcèlement moral n’est pas conditionnée à la dégradation de l’état de santé du salarié.

La Cour de cassation considère que ni la dégradation des conditions de travail, ni la dégradation effective de l’état de santé ne sont des conditions exclusives ou indispensables pour qualifier une situation de harcèlement moral.

♦ Présomption de démission - Abandon de poste

CPH Lyon, 21 février 2025, n° 23/02471 : Le refus d'un salarié de voir transférer son contrat de travail dans le cadre de la perte d'un marché constitue un motif légitime d'absence pouvant être invoqué par le salarié dans le cadre de sa réponse à la mise en demeure de l'employeur de justifier son absence.

♦ Représentant du personnel - Statut protecteur

CE, 7 mars 2025, n° 492105 : en matière disciplinaire, le salarié protégé ne peut pas toujours se retrancher derrière son mandat.

Les propos à caractère raciste et homophobe, tenus par un représentant du personnel sur un groupe Whatsapp, ayant pour effet une dégradation des conditions de travail et son comportement irrespectueux envers la direction caractérisant un manquement à ses obligations de loyauté et de sécurité découlant de son contrat de travail, justifient son licenciement pour faute grave.

♦ Travail dissimulé - Défaut de mention des heures supplémentaires - Bulletin de paie

Cass. soc., 19 mars 2025, n° 23-19.120, F-D N° Lexbase : A51150B3 : les heures supplémentaires effectuées par un salarié doivent figurer sur le bulletin de paie. Cette règle s'applique également lorsqu'un salarié, bien que soumis à un accord d'annualisation du temps de travail, est assujetti par son contrat de travail à la durée légale du travail et à l'accomplissement ponctuel d'heures supplémentaires.

L’absence, sur les bulletins de paie, de la mention des heures supplémentaires effectuées par le salarié caractérise l’élément matériel et l'élément intentionnel du travail dissimulé.

♦ Elections du CSE - Vote électronique

Cass. soc., 26 mars 2025, n° 24-12.607, F-D N° Lexbase : A33280DM : l'article R. 2314-9 du Code du travail N° Lexbase : L0627LI3, selon lequel, préalablement à sa mise en place ou à toute modification substantielle de sa conception, le système de vote électronique utilisé pour les élections au sein des institutions représentatives du personnel est soumis à une expertise indépendante destinée à vérifier le respect des articles R. 2314-5 N° Lexbase : L0631LI9 à R. 2314-8 N° Lexbase : L0628LI4 du même code, n'impose pas, en l'absence de modification substantielle de ce système, qu'une telle expertise soit diligentée avant chaque scrutin.

♦ Obligation de sécurité - Altercation entre salariés

Cass. soc., 26 mars 2025, n° 23-13.081, F-D N° Lexbase : A34310DG : au titre de son obligation de sécurité, l'employeur est tenu de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

L'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention nécessaires et qui, informé de l'existence de faits de violences envers un salarié, a pris les mesures immédiates propres à les faire cesser, ne méconnaît donc pas son obligation légale.

Mais face à un salarié qui a été victime de deux altercations et qui lui reproche d'avoir manqué à son obligation de sécurité, l'employeur doit justifier qu'il a pris toutes les mesures de protection et de prévention nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé du salarié. Charge au juge, pour écarter tout manquement de l'employeur, de vérifier que les mesures prises sont concrètes et suffisantes.

♦ CSE - Règlement intérieur - Clauses

Cass. soc., 26 mars 2025, n° 23-16.219, F-D N° Lexbase : A33720DA : sauf accord de l'employeur, le règlement intérieur du CSE ne peut pas comporter des clauses lui imposant des obligations non prévues par la loi. En cas d’accord de l’employeur, cet accord constitue un engagement unilatéral de l’employeur que celui-ci peut dénoncer à l’issue d’un délai raisonnable et après en avoir informé les membres de la délégation du personnel du CSE.

Ainsi, par exemple, le règlement intérieur du CSE ne peut pas contenir une clause prévoyant l’attribution aux élus d’une indemnité de grand déplacement lorsque leurs déplacements ne répondent pas aux conditions d’attribution de cette indemnité conventionnelle.

♦ Garantie AGS - CSP - Contribution due au titre du préavis

Cass. soc., 26 mars 2025, n° 24-11.889, F-D N° Lexbase : A34570DE : la contribution due par l'employeur à France travail, au titre du financement du contrat de sécurisation professionnelle, qui équivaut au salaire auquel le salarié aurait eu droit au titre du préavis et participe au financement de l'allocation perçue par l'intéressé, est une créance du salarié au sens de l'article L. 3253-17 du Code du travail N° Lexbase : L7958LGT, et entre dans le calcul des créances garanties par l'AGS.

♦ Violation du repos quotidien - Préjudice

Cass. soc., 2 avril 2025, n° 23-23.614, F-D N° Lexbase : A12520GH : Le dépassement de la durée maximale de travail et le non-respect du droit au repos quotidien causent nécessairement au salarié un préjudice et ouvrent, à eux seuls, droit à la réparation.

♦ Modification du contrat de travail - Changement de tâches

Cass. soc., 2 avril 2025, n° 23-23.783, F-D N° Lexbase : A12070GS : l'employeur, dans le cadre de son pouvoir de direction, peut changer les conditions de travail d'un salarié et la circonstance que la tâche donnée à un salarié soit différente de celle qu'il exécutait antérieurement, dès l'instant qu'elle correspond à sa qualification, ne caractérise pas une modification du contrat de travail.

Ainsi, la proposition d'un poste similaire situé dans le même secteur géographique est un simple changement de fonction et non une modification du contrat de travail.

♦ VRP - Obligation de sécurité

Cass. soc., 2 avril 2025, n° 23-20.373, F-D N° Lexbase : A12470GB : en application de l'article L. 4121-1 du Code du travail N° Lexbase : L8043LGY, l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité envers les salariés, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Par ailleurs, le droit à la santé et au repos est au nombre des exigences constitutionnelles.

L'employeur manque ainsi à son obligation de sécurité dès lors qu'un salarié a été soumis à un rythme de travail préjudiciable à sa santé et à son équilibre, et n'a pas toujours pu bénéficier du temps de repos nécessaire à une récupération effective, propice à éviter toute altération de son état de santé, et ce même si le salarié a le statut de VRP et n'est donc pas soumis à un horaire déterminé.

Le manquement de l'employeur est caractérisé dès lors qu'il se contentait d'alléguer n'avoir commis aucun manquement, sans justifier des mesures prises pour assurer la protection de la santé du salarié, alors que ses plannings et les attestations communiquées démontraient une quantité importante de travail.

♦ Véhicule de fonction - Indemnité d’occupation du domicile

Cass. soc., 2 avril 2025, n° 23-22.158, F-D N° Lexbase : A11850GY : l’occupation, à la demande de l’employeur, du domicile du salarié à des fins professionnelles, constitue une immixtion dans la vie privée de celui-ci et n’entre pas dans l’économie générale du contrat de travail.

Le salarié peut prétendre à une indemnité au titre de l’occupation de son domicile à des fins professionnelles dès lors qu’un local professionnel n’est pas mis effectivement à sa disposition.

Ainsi, le salarié commercial itinérant qui travaille à son domicile a droit à une indemnité d'occupation du domicile dès lors que l'employeur n’a pas mis de local professionnel à sa disposition ou qu'il a été convenu que le travail s'effectue sous la forme du télétravail.

Et une voiture de fonction mise à sa disposition n'est pas un local professionnel qui dédouanerait l'employeur d'une indemnité d'occupation du domicile.

♦ Discrimination en raison de la situation familiale

Cass. soc., 9 avril 2025, n° 23-14.016, FS-B N° Lexbase : A09870HZ : au terme de l'article L. 1132-1 du Code du travail N° Lexbase : L0918MCY, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, en raison de sa situation de famille.

La Cour de cassation considère que le défaut d'appartenance du salarié à la famille de son employeur, en ce qu'il constitue le motif d'un traitement moins favorable, relève du champ d'application de ce texte.

Dès lors que l'employeur entend justifier la différence de traitement en matière de rémunération entre la salariée et la salariée de comparaison par la qualité d'épouse de cette dernière, le motif de discrimination prohibé tenant à la situation de famille est donc applicable.

♦ Licenciement pour faute grave - Transfert de mails professionnels

Cass. soc., 9 avril 2025, n° 24-12.055, F-D N° Lexbase : A67120IG : le transfert d'un courriel et des pièces jointes de la messagerie professionnelle d'un salarié vers son adresse électronique personnelle ne caractérise pas une faute d'une telle gravité qu'elle justifie un licenciement pour faute grave, dès lors qu'aucun élément ne permettait d'imputer une transmission des données confidentielles par le salariée à des personnes extérieures à l'entreprise.

De plus, vu l'ancienneté du salarié et l'absence de toute sanction ou rappel à ses obligations avant la procédure de licenciement, les faits ne rendaient pas impossible son maintien dans l'entreprise et ne pouvaient constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement.

♦ Obligation de sécurité - Souffrances au travail

Cass. soc., 9 avril 2025, n° 23-22.121, F-D N° Lexbase : A65870IS : l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité envers les salariés, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Il ne méconnaît pas cette obligation légale s'il justifie avoir pris toutes les mesures.

Ne méconnaît son obligation de sécurité, l'employeur qui, face à une situation de souffrances morales d'une salariée, a mis en place un suivi régulier de la salariée par le médecin du travail et la directrice des ressources humaines, la mise à disposition d'un psychologue, et diligenté une enquête interne afin d'évaluer les causes des difficultés évoquées par la salariée et de tenter d'y remédier.

♦ Paiement des heures de nuit - Preuve

Cass. soc., 2 avril 2025, n° 23-23.724, F-D N° Lexbase : A12330GR : c'est à l'employeur de rapporter la preuve qu'il a payé les heures de nuit à un salarié.

Une cour d'appel ne peut pas débouter un salarié d'une demande de rappel de salaire au titre de majorations sur les heures de nuit, aux motifs que sur les bulletins de salaire produits par le salarié, figurait le paiement de sommes au titre des majorations de nuit et qu'à la lecture des feuilles de paie, il ressortait que des heures de nuit étaient versées régulièrement.

Il est de jurisprudence constante qu'il appartient à l'employeur de prouver le paiement du salaire, notamment par la production des pièces comptables.

♦ Congés non pris

Cass. soc., 9 avril 2025, n° 23-17.723, F-D N° Lexbase : A66930IQ : il appartient à l'employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congés payés, et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement.

En cas de litige sur des congés payés non pris et dus au salarié, c’est à l’employeur de justifier qu'il a tout mis en œuvre pour remplir son obligation. À défaut, la condamnation à payer les sommes correspondantes est assurée.

♦ Elections du CSE - Dépôt des listes de candidatures

Cass. soc., 9 avril 2025, n° 24-11.979, F-D N° Lexbase : A67270IY : les modalités d'organisation du scrutin, fixées par le protocole d'accord préélectoral dont la régularité n'est pas contestée, s'imposent à l'employeur et aux organisations syndicales.

Le dépôt des listes de candidatures doit respecter la date et l'heure prévues par le protocole électoral. La liste de candidats déposée à l'heure mais tardivement corrigée peut ainsi être refusée par l'employeur.

♦ Protection liée au harcèlement

Cass. soc., 9 avril 2025, n° 24-11.421, F-D N° Lexbase : A66380IP : le licenciement d'une victime ou d'un témoin de faits de harcèlement moral ou sexuel est considéré comme nul par les juges, sauf mauvaise foi du salarié.

Pour que le licenciement d'un salarié, harcelé moralement, soit considéré comme nul, il est nécessaire que le salarié ait subi ou refusé de subir le harcèlement moral.

Et il faut également que les juges du fond aient caractérisé que le licenciement était motivé par le fait que le salarié a subi ou refusé de subir ce harcèlement. À défaut, le licenciement n'est pas nul.

♦ Désignation d'un RSS dans une entreprise de moins de 50 salariés - QPC

Cass. QPC, 10 avril 2025, n° 25-40.001, FS-B N° Lexbase : A60360HZ : l'obligation faite par l'article L. 2142-1-4 du Code du travail N° Lexbase : L8709LGN aux syndicats non représentatifs dans l'entreprise, s'ils souhaitent désigner dans les entreprises qui emploient moins de cinquante salariés un représentant de section syndicale, de le choisir parmi les membres du CSE, en ce qu'elle tend à assurer la désignation de personnes disposant des moyens effectifs de défendre les intérêts des salariés dans l'entreprise, ne constitue pas une ingérence arbitraire dans le fonctionnement syndical et ne porte pas atteinte à la liberté pour tout travailleur de participer à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises.

La Cour de cassation a donc refusé de renvoyer cette question prioritaire de constitutionnalité devant le Conseil constitutionnel.

2) Droit de la protection sociale

Contrôle URSSAF - Lettre d’observations

Cass. civ. 2, 20 mars 2025, n° 23-10.061, F-B N° Lexbase : A530668Z : lorsque plusieurs inspecteurs participent aux opérations de contrôle, la lettre d'observations doit être revêtue de la signature de chacun d'eux, à peine de nullité.

En cas de contrôles concertés et simultanés de plusieurs sociétés d'un même groupe, la lettre d'observations adressée à chaque société doit être signée par l'inspecteur ayant personnellement procédé à la vérification de la situation individuelle de chacune.

Pour aller plus loin : J. Kovac et J. Webert, Contrôles URSSAF concertés et simultanés dans plusieurs sociétés d’un groupe : qui doit signer la lettre d’observations ?, Lexbase Social, mai 2025, n° 1012 N° Lexbase : N2132B3D.

AT/MP - Rapport d’autopsie - Secret médical

Cass. civ. 2, 3 avril 2025, n° 22-22.634, FS-B+R N° Lexbase : A52380EQ : après la déclaration d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, à l'issue de ses investigations, la CPAM met le dossier à la disposition de la victime ou de ses représentants ainsi qu'à celle de l'employeur.

Opérant un revirement jurisprudentiel, la Cour de cassation juge qu'il convient désormais de considérer que le rapport d'autopsie constitue un élément couvert par le secret médical, qui n'a pas à figurer dans les pièces du dossier constitué par les services administratifs de la CPAM.

Pour aller plus loin : C. Ciuba, Revirement jurisprudentiel relatif à la communication du rapport d'autopsie dans le cadre de la procédure de reconnaissance du caractère professionnel d’un malaise mortel survenu dans le cadre du travail, Lexbase Social, mai 2025, n° 1012 N° Lexbase : N2222B3P.

II. Actualités normatives

1) Journal officiel de la République française (JORF)

a. Lois et ordonnances

♦ Loi DDADUE - Dispositions en droit du travail

Loi n° 2025-391 du 30 avril 2025, portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes N° Lexbase : L4775M9Q :  cette loi, dite « DDADUE », a été publiée au Journal officiel du 2 mai 2025 et contient des dispositions portant sur le droit du travail, notamment sur les conditions d'obtention de la carte bleue européenne.

b. Décrets et projets de décrets

Pénibilité - Homologation des référentiels professionnels de branche

Décret n° 2025-277 du 25 mars 2025, modifiant les modalités d'homologation des référentiels professionnels de branche N° Lexbase : L0773M9I :  les postes, métiers ou situations de travail exposés à la pénibilité sont définis par un référentiel professionnel de branche.

Jusqu'à présent, le référentiel était réévalué selon une périodicité qu’il prévoyait dans la limite de 5 ans maximum.  Depuis le 28 mars 2025, l’homologation est obligatoirement accordée pour une durée de 5 ans.

Le renouvellement d’un référentiel professionnel de branche peut désormais être demandé par une organisation professionnelle représentative au niveau de la branche, au plus tard 6 mois avant l'expiration de l'homologation. Elle doit d’abord avoir procédé à sa réévaluation pour tenir compte de l'évolution des postes, métiers ou situations de travail ainsi que de l'impact des mesures de protection individuelle et collective.

Réduction générale de cotisations patronales - Paramètres de calcul pour 2025

Décret n° 2025-318 du 4 avril 2025, relatif aux modalités d'application de divers dispositifs de réduction de cotisations patronales N° Lexbase : L1871M98 :  attendu depuis la publication de la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2025, le décret a été publié.

Il fixe les seuils de rémunérations en-deçà desquels les réductions des taux de cotisations patronales d'assurance maladie et d'allocations familiales sont applicables pour l'année 2025.

Il fixe également pour 2025 les valeurs maximales du coefficient de la réduction générale des cotisations et contributions patronales compte tenu de la part mutualisée du taux de la cotisation d'accidents du travail et maladies professionnelles et du taux de la contribution d'assurance chômage.

Pour la réduction générale, le paramètre T évoluera au 1er mai 2025, de façon à intégrer en une seule fois la baisse de la cotisation chômage et la hausse de la fraction de cotisation AT/M comprise dans le périmètre de la réduction.

Le décret prévoit pour 2025 des modalités d'entrée en vigueur dérogatoires pour les cotisations d'accidents du travail et maladies professionnelles. Les arrêtés de tarification AT/MP entreront en vigueur au 1er mai 2025.

Enfin, il intègre dans le Code de la Sécurité sociale les dispositions règlementaires relatives à la déduction forfaitaire patronale sur les heures supplémentaires pour les entreprises d'au moins 20 à moins de 250 salariés.

APLD Rebond

Décret n° 2025-338 du 14 avril 2025, relatif au dispositif d'activité partielle de longue durée rebond N° Lexbase : L2794M9D :  l’APLD Rebond vise les entreprises confrontées à une réduction d’activité durable qui n’est pas de nature à compromettre leur pérennité, en leur permettant de diminuer l’horaire de travail en contrepartie d’engagements en matière de maintien de l’emploi et de formation professionnelle.

Deux voies d’accès :

  • par accord collectif conclu au niveau de l’établissement, de l’entreprise ou du groupe ;
  • par décision unilatérale de l’employeur élaborée sur la base d’un accord de branche étendu relatif à l’APLD Rebond.

L’accord ou le document unilatéral doit être validé ou homologué par le préfet du département, dans les 15 jours pour un accord collectif ou 21 jours pour un document unilatéral.

Il doit contenir un certain nombre de mentions obligatoires dont les dates d’application du dispositif, la réduction maximale de l’horaire de travail, les engagements pris en termes de maintien dans l'emploi et de formation professionnelle, ainsi que les modalités d’information, au minimum trimestrielle, des organisations syndicales signataires et du CSE sur la mise en œuvre de l’accord ou du document unilatéral.

Information des salariés et du CSE : les salariés et le CSE doivent être informés de la mise en œuvre du dispositif dès la validation ou l’homologation.

Réduction de l’horaire de travail : maximum 40 %, pouvant aller jusqu’à 50 % en fonction de la situation particulière de l’entreprise et sur autorisation.

Indemnité horaire d’activité partielle versée aux salariés par l’employeur :

  • 70 % de la rémunération horaire brute retenue à hauteur de 4,5 SMIC maximum ;
  • 100 % de la rémunération nette antérieure si le salarié suit, pendant les heures chômées, des actions de formations ou des formations permettant de progresser au cours de la vie professionnelle réalisées notamment dans le cadre du plan de développement des compétences.

Indemnisation de l’employeur : allocation de 60 % de la rémunération horaire brute retenue à hauteur de 4,5 SMIC maximum, versée par l’ASP.

Durée d’indemnisation de l’employeur : jusqu’à 18 mois, consécutifs ou non, sur une période de référence de 24 mois consécutifs.

Dates d’application du dispositif : le dispositif s’applique aux accords ou documents transmis à l'administration pour validation ou homologation depuis le 1er mars 2025 jusqu’au 28 février 2026.

CPF - Dotation volontaire

Décret n° 2025-341 du 14 avril 2025, relatif aux modalités d'alimentation supplémentaire du compte personnel de formation N° Lexbase : L2917M9W :  ce texte permet désormais à l'employeur de flécher l’utilisation d'une dotation volontaire sur le CPF d'un salarié vers une formation préparant à une ou plusieurs certifications précisément identifiées. À charge ensuite pour le salarié de profiter ou non de cette dotation en suivant la formation identifiée par l’employeur.

L’employeur peut également fixer le délai dont dispose le salarié pour utiliser les droits supplémentaires. En cas de non-utilisation ou d’utilisation partielle de la dotation par le salarié, un remboursement à l’employeur peut être prévu.

Imputation du coût d’un AT/MP mortel sur le compte employeur

Décret n° 2025-342 du 15 avril 2025, modifiant les règles de tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles mortels des assurés du régime général de Sécurité sociale N° Lexbase : L2919M9Y :  l'imputation par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) du coût de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle mortel au compte de l'employeur s'effectue à la date de la notification de la reconnaissance du caractère professionnel du décès (et non plus l’année de survenance du décès).

Cette disposition est applicable depuis le 17 avril 2025.

Suivi médical renforcé

Décret n° 2025-355 du 18 avril 2025, relatif au suivi individuel de l'état de santé des travailleurs ainsi qu'à l'autorisation de conduite et aux habilitations à effectuer certaines opérations prévues aux articles R. 4323-56 et R. 4544-9 du Code du travail N° Lexbase : L3486M9Y :  ce texte écarte de la liste des salariés bénéficiant d'un droit à un suivi individuel renforcé les travailleurs qui peuvent être affectés à un poste pouvant nécessiter une autorisation de conduite ou une habilitation électrique.

A la place du suivi individuel renforcé, le décret subordonne l'autorisation de conduite de certains équipements et l'habilitation à la réalisation de travaux sous tension ou d'opérations au voisinage de pièces nues sous tension à la délivrance d'une attestation d'une durée de validité de 5 ans justifiant l'absence de contre-indications médicales.

Le modèle d'attestation sera défini par décret.

Ces nouvelles dispositions entreront en vigueur le 1er octobre 2025.

c. Arrêtés

Cotisations AT/MP - Arrêtés de tarification

Arrêté du 29 avril 2025, relatif à la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles pour l'année 2025 N° Lexbase : Z36037XC ; Arrêté du 29 avril 2025, fixant le montant des majorations prévues à l'article D. 242-6-9 du Code de la Sécurité sociale et de la contribution prévue à l'article D. 242-6-9-1 du même code pour l'année 2025 N° Lexbase : Z35945XC ; Arrêté du 29 avril 2025, relatif à la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles dans les exploitations minières et assimilées pour l'année 2025 N° Lexbase : Z36094XC :  les arrêtés de tarification des cotisations AT/MP pour 2025 ont été publiés au Journal officiel et précisent les taux nets collectifs, le taux net moyen national, les coûts moyens des catégories d'incapacité temporaire et d'incapacité permanente, et les majorations applicables.

d. Mises à jour du BOSS

Rescrits sociaux

BOSS, communiqué, mise à jour du 2 avril 2025 : un nouvel espace du BOSS est consacré aux rescrits sociaux : Rescrits - Boss.gouv.fr

Des rescrits opposables seront progressivement ajoutés dans le but de renforcer l’accessibilité au droit en matière de cotisations et de contributions sociales.

Lorsque des rescrits portent sur des dispositifs qui font déjà l’objet d’une rubrique du BOSS, ces rescrits sont disponibles à la fois dans l’espace dédié et dans la rubrique thématique.

Allègements et exonérations

BOSS, communiqué, mise à jour du 10 avril 2025 : les rubriques Allégements généraux, Assiette générale, Exonérations zonées, Exonération Aide à domicile, Heures supplémentaires et complémentaires, Exonération contrat d'apprentissage, Protection sociale complémentaire ont été actualisées.

Allègements et exonérations

BOSS, communiqué, mise à jour du 30 avril 2025 : Les rubriques Allégements généraux, Exonérations zonées, Exonération Aide à domicile et Remboursements de frais professionnels ont été actualisées.

e. Circulaires

Salariés en forfait jours réduit - Cotisations AGIRC-ARCCO

Circulaire Agirc-Arrco 2025 6SG-DRJ : une circulaire AGIRC-ARRCO diffuse l’avenant n° 23, signé par les partenaires sociaux lors de la réunion de la Commission paritaire AGIRC-ARCCO du 18 décembre 2024, qui modifie l’article 75 de l’accord national interprofessionnel du 17 novembre 2017, afin de permettre aux salariés dont la rémunération n’est pas déterminée selon un nombre d’heures de travail d’accéder au dispositif de maintien des cotisations AGIRC-ARRCO, sur la base de la rémunération qu’ils auraient perçue s’ils travaillaient à temps plein, et ce même s’ils ne sont pas éligibles au même dispositif pour le régime de base.

f. Communiqués

Contribution assurance chômage

Net-entreprises.fr, communiqué, 29 avril 2025 : Net-entreprises rappelle la diminution du taux de contribution d’assurance chômage de 4,05 % à 4,00 % au 1er mai 2025, qui impacte le dispositif du bonus-malus.

La transmission des taux modulés applicables à partir du 1er mai 2025, et jusqu’à la fin de la période de modulation (au 31 août 2025), est donc effectuée par 2 canaux :

  • les comptes rendus métier DSN « Bonus-Malus » n° 117, transmis le 23 avril sur les tableaux de bord DSN (ou dans le logiciel de paie si utilisation de l’API/machine-to-machine) ;
  • les notifications effectuées par l’URSSAF et la CCMSA, qui sont également en cours de transmission.

 Taux de cotisation AT/MP 2025

Ameli, actualités, 7 avril 2025 :  les taux de cotisation AT/MP 2025 sont applicables au 1er mai 2025, sans effet rétroactif.

Les entreprises pourront consulter leur taux 2025 en ligne, dans leur compte entreprise, après la parution des arrêtés fixant les majorations, les taux collectifs et les coûts moyens.

 Arrêts de travail - Nouveau CERFA

Ameli, actualités, 22 avril 2025 :  en cas d'arrêt de travail, il existe désormais un nouveau formulaire papier CERFA sécurisé, avec 7 points d’authentification (une étiquette holographique, de l'encre magnétique, etc.).

Les professionnels de santé sont encouragés à l'utiliser dès maintenant lorsqu'ils ne peuvent pas réaliser un arrêt dématérialisé.

Mais dès le 1er juillet 2025, l'utilisation de ce formulaire sécurisé deviendra obligatoire pour tout envoi d'un avis d’arrêt de travail sous format papier. Tous les autres formats seront systématiquement rejetés. Les scans et les photocopies, notamment, ne pourront être acceptés et seront considérés comme des faux.

Dans un premier temps, l'Assurance maladie avait annoncé rendre obligatoire l'utilisation de ce nouveau CERFA à compter du 1er juin 2025. C'est désormais à compter du 1er juillet qu'il le sera.

 Inspection du travail - Recours abusif aux contrats précaires

Min. Travail, communiqué, 18 avril 2025 :  en 2025, la campagne nationale de contrôles de l’inspection du travail porte sur le recours abusif aux contrats précaires : contrats à durée déterminée et contrats de mission intérimaire. Les contrôles sont ciblés sur les entreprises qui ont le plus recours aux contrats précaires afin de les conduire à privilégier l’embauche en CDI.

Ils seront réalisés par les inspecteurs du travail entre juin et novembre 2025. Des contre-visites pour s’assurer des mesures de régularisation opérées s’étaleront jusqu’en mai 2026.

Les contrôles porteront plus particulièrement sur :

  • le recours abusif aux contrats précaires pour pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise ;
  • les cas de recours interdits : travaux dangereux, remplacement d’un salarié gréviste, période post licenciement économique ;
  • le respect des prérogatives des CSE.

Les inspecteurs du travail, après avoir rappelé et expliqué les règles applicables et en fonction de leurs constats, demanderont aux employeurs de se mettre en conformité avec la règlementation. Ils pourront engager des sanctions si nécessaire.

 Passeport de prévention - Organismes de formation

Min. Travail, actualités, 29 avril 2025 :  le déploiement du passeport prévention, qui doit recenser tous les éléments certifiant les qualifications obtenues par un salarié dans le cadre des formations relatives à la santé et à la sécurité au travail, continue.

Depuis le 29 avril 2025, les organismes de formation ont accès à l’espace leur permettant de déclarer les formations dispensées en santé et sécurité au travail. L’obligation de déclarer des formations qu’ils dispensent en matière de santé et sécurité au travail par le biais de ce service débutera à partir du 1er septembre 2025.

g. Autres

 Cessibilité des droits issus du CPF

Le ministère du Travail a apporté des précisions sur le Compte Personnel de Formation (CPF), dans le cadre de questions - réponses de plusieurs députés :

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