Jurisprudence : Cass. soc., 10-04-2013, n° 12-12.734, F-D, Rejet

Cass. soc., 10-04-2013, n° 12-12.734, F-D, Rejet

A0873KCC

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2013:SO00688

Identifiant Legifrance : JURITEXT000027307743

Référence

Cass. soc., 10-04-2013, n° 12-12.734, F-D, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/8064450-cass-soc-10042013-n-1212734-fd-rejet
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SOC. PRUD'HOMMES CM
COUR DE CASSATION
Audience publique du 10 avril 2013
Rejet
M. LINDEN, conseiller le plus ancien faisant fonction de président
Arrêt no 688 F-D
Pourvoi no Q 12-12.734
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par M. Claude Z, domicilié Haguenau,
contre l'arrêt rendu le 24 novembre 2011 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section A), dans le litige l'opposant à M. Dominique Y, domicilié Waldighoffen,
défendeur à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 12 mars 2013, où étaient présents M. Linden, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Guyot, conseiller rapporteur, M. Ludet, conseiller, Mme Becker, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Guyot, conseiller, les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat de M. Z, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. Y, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 24 novembre 2011), que M. Y a été engagé le 21 mai 2003 en qualité de "chargé de clientèle entreprises" par M. Z ; qu'après avoir pris acte de la rupture de son contrat de travail le 5 septembre 2007, il a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le moyen unique, pris en ses première, deuxième et troisième branches

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces griefs qui ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur le moyen unique, pris en ses quatrième, cinquième et sixième branches
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de décider que la prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, de le condamner à payer au salarié diverses sommes à ce titre, et de le débouter de sa demande d'indemnité de préavis, alors, selon le moyen
1o/ que M. Z avait fait expressément valoir que les parties s'étaient réunies une première fois le 8 janvier 2004 et que la deuxième réunion annuelle avait eu lieu le 18 janvier 2005, entretien au cours duquel avaient été évoqués les mauvais résultats de M. Y et le refus de M. Z de le faire évoluer vers un poste de manager commercial et de le faire bénéficier de la prime mensuelle récurrente ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué qu'un entretien a eu lieu entre les parties en janvier 2005 ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans rechercher si, lors de la réunion du 18 janvier 2005, les parties n'avaient pas évoqué l'octroi de la prime (correspondant à la rétrocession de commissions) et l'évolution des fonctions de M. Y, ni examiner le compte rendu de la réunion du 18 janvier 2005 qui avait été régulièrement versé aux débats, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L. 1231-1, L. 1232-1, L. 1234-5, L. 1234-9, L. 1235-5 et L. 1237-1 du code du travail ;
2o/ que lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail, la charge de la preuve des manquements reprochés à l'employeur lui incombe exclusivement ; que la cour d'appel a considéré que le grief était établi aux motifs que l'employeur n'apportait pas la preuve d'avoir exécuté son obligation de négociation ; que la cour d'appel, qui a fait supporter à l'employeur la charge et le risque de la preuve, a violé l'article 1315 du code civil ;
3o/ que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite du contrat de travail ; que l'absence de réunion avant le 1er janvier 2005 ne constitue pas un manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêcherait la poursuite du contrat de travail et justifierait la prise d'acte de rupture par le salarié près de trois années après, en septembre 2007 ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1231-1, L. 1232-1, L. 1234- 5, L. 1234-9, L. 1235-5 et L. 1237-1 du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant constaté que l'employeur ne justifiait pas avoir entrepris la négociation prévue au contrat de travail en vue d'une éventuelle promotion du salarié et de versement de la prime qui en était l'accessoire, négociation ne pouvant se confondre avec l'entretien annuel d'évaluation, et qu'il n'avait pas abondé les comptes d'épargne-entreprise du salarié, a, sans inverser la charge de la preuve, ni être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, retenu que la gravité de ces manquements justifiait la prise d'acte du salarié ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Z aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Z et condamne celui-ci à payer à M. Y la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix avril deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. Z
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la prise d'acte de son contrat de travail par Monsieur Dominique Y produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, condamné Monsieur Claude Z à payer à Monsieur Dominique Y les sommes de 13 908 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 1390,08 euros au titre des congés payés y afférents, 4636 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement et 14 000 euros sur le fondement de l'article L. 1235-5 du Code du travail, dit que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter du jour de l'arrêt, débouté Monsieur Claude Z de sa demande en paiement de l'indemnité de préavis, condamné Monsieur Claude Z à payer à Monsieur Dominique Y la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et condamné Monsieur Claude Z aux dépens de première instance et d'appel ;
AUX MOTIFS QUE, sur la prise d'acte de la rupture du contrat de travail la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si elle repose sur des manquements suffisamment graves de l'employeur à ses obligations et d'une démission dans le cas contraire ; il convient d'examiner les différents manquements allégués par le salarié à l'encontre de l'employeur A/ sur le défaut de négociation de l'octroi d'une prime et d'une promotion le salarié invoque en premier lieu le défaut d'ouverture de discussions avant le 1er janvier 2005 tendant au versement d'une "prime mensuelle récurrente" et à son évolution vers un poste de manager ; à cet égard, le contrat de travail du 21 mai 2003 prévoyait en son article 6 que " Il est convenu entre les parties de se réunir avant le 1er janvier 2005 en vue de prévoir, en cas d'accord, d'un engagement qui se réaliserait sur les bases suivantes - une prime mensuelle récurrente sur les affaires antérieures et futures réalisées personnellement par Monsieur Y (...) ; - une évolution vers un poste de manager commercial..." ; ainsi, l'employeur ne s'était ni engagé à verser une prime dite '"récurrente" au salarié ni à lui garantir une promotion mais seulement à négocier avec lui la possibilité de l'octroi de cette prime indissociable de sa promotion comme manager commercial avant le 1er janvier 2005 ; l'administration d'une preuve négative ne pouvant être mise à la charge du salarié, il incombe à l'employeur d'apporter la preuve qu'il a bien accompli son obligation de négociation avec le salarié avant le 1er janvier 2005 ; force est de constater qu'il n'en justifie pas ; il allègue d'une réunion qui aurait eu lieu en janvier 2005 sans autre précision mais dont la réalité n'est pas établie ; il ressort des pièces versées aux débats que le 8 janvier 2005, s'est tenu un entretien d'évaluation de Monsieur Y qui ne peut être assimilé à l'obligation de négocier contenue dans l'article 6 du contrat de travail ; l'employeur n'apporte donc pas la preuve d'avoir exécuté son obligation de négociation avec le salarié sur une évolution de carrière et une augmentation de salaire concomitante contenue dans le contrat de travail ; .../...D/ sur le défaut d'abondemment de comptes PERCO et PEE par l'employeur ce manquement est expressément reconnu par l'employeur ; au vu de ce qui précède, deux manquements à ses obligations sont établis à rencontre de l'employeur Défaut de négociation d'une promotion et de la prime qui en était l'accessoire avant le 1er janvier 2005, d'une part, et défaut d'abondemment des comptes PERCO et PEE, d'autre part ; ces manquements étaient suffisamment graves pour que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; en effet, l'espoir d'une promotion et d'une augmentation de salaire sous la forme d'une prime, était un élément déterminant de l'engagement de Monsieur Y et de son investissement dans son travail ; l'employeur devait dès lors scrupuleusement respecter son obligation de négociation qui constituait une étape importante dans la carrière que le salarié escomptait accomplir au sein de l'entreprise ; en outre, cette obligation de négociation devait être menée de façon sérieuse et loyale, ce qui impliquait des discussions menées selon un processus spécifique clairement identifié et non se confondre dans une évaluation des qualités professionnelles du salarié ; s'agissant du défaut d'abondemment des comptes épargnes, il s'agit d'un manquement ayant trait à la rémunération du salarié ; le jugement entrepris doit donc être infirmé en ce qu'il a dit et jugé que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié produisait les effets d'une démission et en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes subséquentes ; statuant à nouveau à ce sujet, il convient de dire que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par Monsieur Y produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; l'employeur doit en conséquence être condamné à lui payer les sommes de 13 908 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 1390,08 euros au titre des congés payés y afférents et 4636 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement ; par ailleurs, il est constant que l'entreprise employait habituellement moins de onze salariés au jour de la rupture du contrat de travail si bien que Monsieur Y a droit, sur le fondement de l'article 1235-5 du Code du travail, à une indemnité correspondant au préjudice subi ; il est constant que Monsieur Y a retrouvé un nouvel emploi à compter du 1er janvier 2008 de sorte qu'il convient de condamner l'employeur à lui payer la somme de 14 000 euros à titre de dommages et intérêts qui répare intégralement le préjudice subi au regard des pièces justificatives versées aux débats et de la courte période de chômage qui a suivi la rupture des liens contractuels ; l'ensemble des montants alloués au salarié portera intérêt au taux légal à compter du jour du présent arrêt ;...sur les demandes en paiement de dommages et intérêts pour brusque rupture du contrat de travail et de l'indemnité de préavis la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par le salarié entraîne la cessation immédiate du contrat de travail si bien que celui-ci n'est pas tenu d'exécuter un préavis ; il s'ensuit que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a débouté l'employeur de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour brusque rupture du contrat de travail ; en revanche qu'il doit être infirmé en ce qu'il a condamné le salarié à payer à l'employeur la somme de 13 908 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis;
-ALORS sur l'abondement
1o) QUE lorsque le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail, le juge doit rechercher si elle produit les effets d'une démission ou d'un licenciement au vu des seuls griefs invoqués par le salarié pour justifier cette prise d'acte et non pas au vu d'autres demandes que le salarié a formulées sans considérer qu'elles justifiaient la prise d'acte ; que la Cour d'appel a considéré d'office que le défaut d'abondement justifiait que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement alors pourtant que le Monsieur Y n'avait invoqué ce défaut ni à l'appui de sa prise d'acte, ni pour justifier, dans la procédure, sa demande tendant à voir juger que sa prise d'acte devait produire les effets d'un licenciement ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé les articles L 1231-1, L 1232-1, L 1234-5, L 1234-9, L 1235-5 et L 1237-1 du Code du Travail ;
2o) QUE subsidiairement le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement, il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que la Cour d'appel a considéré d'office que le défaut d'abondement justifiait que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement mais sans avoir invité au préalable les parties à présenter leurs observations ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de Procédure Civile ;
ET ALORS, sur la réunion prévue au contrat de travail
1 o) QUE le contrat de travail stipulait qu'il était " convenu entre les parties de se réunir avant le 1er janvier 2005 en vue de prévoir en cas d'accord, d'un engagement qui se réaliserait sur les bases " d'une rétrocession de commissions et d'une évolution vers un poste de manager commercial ; que la Cour d'appel, après avoir constaté qu'un entretien avait eu lieu en janvier 2005 entre l'employeur et 1e salarié, a affirmé que cet entretien ne pouvait être assimilé à l'obligation de négocier contenue dans l'article 6 du contrat de travail qui " impliquait des discussions menées selon un processus spécifique clairement identifié " ; qu'en statuant comme elle l'a fait alors que le contrat ne prévoyait aucun formalisme concernant la tenue de la réunion, la Cour d'appel a méconnu l'article 6 du contrat de travail et violé l'article 1134 du Code Civil ;
2o) QUE Monsieur Z avait fait expressément valoir que les parties s'étaient réunies une première fois le 8 janvier 2004 et que la deuxième réunion annuelle avait eu lieu le 18 janvier 2005, entretien au cours duquel avaient été évoqués les mauvais résultats de Monsieur Y et le refus de Monsieur Z de le faire évoluer vers un poste de manager commercial et de le faire bénéficier de la prime mensuelle récurrente ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué qu'un entretien a eu lieu entre les parties en janvier 2005 ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans rechercher si, lors de la réunion du 18 janvier 2005, les parties n'avaient pas évoqué l'octroi de la prime (correspondant à la rétrocession de commissions) et l'évolution des fonctions de Monsieur Y, ni examiner le compte rendu de la réunion du 18 janvier 2005 qui avait été régulièrement versé aux débats, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L 1231-1, L 1232-1, L 1234-5, L 1234-9, L 1235-5 et L 1237-1 du Code du Travail ;
3o) QU'en outre, lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail, la charge de la preuve des manquements reprochés à l'employeur lui incombe exclusivement ; que la Cour d'appel a considéré que le grief était établi aux motifs que l'employeur n'apportait pas la preuve d'avoir exécuté son obligation de négociation ; que la Cour d'appel, qui a fait supporter à l'employeur la charge et le risque de la preuve, a violé l'article 1315 du Code Civil ;
4o) ET ALORS subsidiairement QUE la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite du contrat de travail ; que l'absence de réunion avant le 1er janvier 2005 ne constitue pas un manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêcherait la poursuite du contrat de travail et justifierait la prise d'acte de rupture par le salarié près de trois années après, en septembre 2007 ; qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles L 1231-1, L 1232-1, L 1234-5, L 1234-9, L 1235-5 et L 1237-1 du Code du Travail.

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