Réf. : Décret n° 2013-594 du 5 juillet 2013, relatif aux risques d'exposition à l'amiante (N° Lexbase : L3114IXM)
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Le 11 Juillet 2013
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Réf. : Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU)
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par Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale
Le 12 Juillet 2013
Intérêt du dispositif. Le présent dispositif doit permettre à l'employeur de rendre les salariés encore plus facilement mobiles au-delà de l'actuel secteur géographique, et sans être contraint d'insérer dans chaque contrat de travail une clause de mobilité. Il s'agit donc ici d'une mobilité collective favorisée par la conclusion d'un accord en échange de garanties elles-mêmes collectives.
Dispositions de l'ANI du 11 janvier 2013 (N° Lexbase : L9638IUI). Dans l'accord du 11 janvier 2013, les partenaires sociaux avaient souhaité donner encore plus de souplesse aux entreprises en permettant à un accord collectif de définir une zone conventionnelle de mobilité, opposable aux salariés, et de permettre aux employeurs qui prétendent l'imposer de ne pas redouter la mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi dans l'hypothèse où les salariés s'y opposeraient en masse (3).
Accord de mobilité. Le nouveau régime favorisant la mobilité "professionnelle" (c'est-à-dire fonctionnelle) ou "géographique" repose sur la conclusion d'un accord collectif, marquant ainsi la volonté des partenaires sociaux de rééquilibrer, en faveur des normes collectives, les rapports avec le contrat de travail (4).
Articulation avec la GPEC et les PSE. Il ne s'agit pas ici d'utiliser ce nouveau régime pour contourner les règles en matière de GPEC ou de plans de sauvegarde de l'emploi négociés, mais bien de s'articuler avec eux, ce qui explique que l'accord de mobilité interne porte sur des "mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs" (C. trav., nouv. art. L. 2242-21 N° Lexbase : L0635IXS) et ce afin de ne pas entrer en concurrence avec d'autres accords s'inscrivant plutôt dans des logiques de restructuration.
Les liens avec la négociation relative à la GPEC sont, toutefois, évidents puisqu'il s'agit, dans tous les cas, de rendre la main d'oeuvre plus flexible pour anticiper sur d'éventuelles nécessités de réorganisation future ; c'est pourquoi les entreprises qui sont soumises à l'obligation triennale de négociation sur la GPEC, devront intégrer dans celle-ci la question nouvelle de la mobilité professionnelle et géographique (C. trav., art. L. 2242-1, al. 2 N° Lexbase : L2369H9M), et celles qui ne le sont pas devront, également, négocier en termes de GPEC.
Le législateur n'a pas exactement repris les dispositions de l'accord du 11 janvier 2013 sur ce point qui imposait une négociation triennale pour toutes les entreprises dotées de délégués syndicaux.
Délimitation de la zone conventionnelle de mobilité. L'article L. 2242-22 nouveau (N° Lexbase : L0636IXT) impose à l'accord de délimiter la "zone géographique d'emploi du salarié" en tenant compte de sa vie "personnelle et familiale". L'accord devra d'ailleurs comporter des "mesures" visant à articuler les différents intérêts en cause (intégrant d'ailleurs la situation des salariés handicapés), notamment en prévoyant des critères d'ordre entre salariés également susceptibles d'être mobiles, pour protéger ceux dont la situation personnelle ou familiale serait la plus critique en cas de mobilité.
On peut imaginer qu'un salarié pourrait contester l'étendue de cette zone conventionnelle en la considérant comme étant disproportionnée, à l'occasion d'un contentieux du refus d'exécution d'un ordre de mobilité, et qu'un juge, considérant cette mobilité conventionnelle comme excessive au regard du respect de la vie personnelle et familiale du salarié, pourrait à son tour considérer le refus du salarié comme légitime, privant ainsi l'employeur du bénéfice du régime dérogatoire applicable à la rupture du contrat qui s'en suivrait. Le licenciement du salarié serait alors privé de justification et pourrait même être requalifié de licenciement pour motif économique "de droit commun", refaisant alors surgir le spectre de la mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi.
L'accord devra également prévoir les modalités professionnelle (en termes de formation) et financière (participation aux coûts induits par la mobilité, ou à la perte de pouvoir d'achat en cas de mobilité vers une zone de vie chère, par exemple).
Limites à la mobilité conventionnelle. La mise en oeuvre par l'employeur de l'accord de mobilité lui permet de modifier le lieu d'exécution du contrat de travail au-delà du secteur géographique contractuel, au sein de la zone conventionnelle de mobilité.
Seul le lieu d'exécution du contrat de travail pourra être modifié. La loi du 14 juin 2013 interdit, en effet, à l'employeur d'en profiter pour modifier la rémunération du salarié, sa classification professionnelle ou sa qualification professionnelle.
S'agissant de la rémunération, le texte ne vise toutefois que le "niveau" ; l'employeur n'aurait donc pas à garantir la "structure" à l'occasion de la mobilité, ce qui est étonnant car on sait qu'un changement de structure (répartition des parts fixes et variables) créé toujours un risque de modification du niveau de rémunération au travers du changement d'assiette de la part variable. Les employeurs devront donc se montrer prudent et laisser totalement inchangée la rémunération, dans toutes ses composantes.
Articulation avec les droits contractuels des salariés. L'objectif de la réforme est d'imposer aux salariés la mobilité conventionnelle.
Les salariés devront être informés de l'existence et du contenu de l'accord. A défaut, celui-ci ne leur sera pas opposable et l'actuelle jurisprudence leur permettant de refuser toute mobilité au-delà du secteur géographique sera maintenue.
Contrairement aux principes de droit commun qui régissent les concours entre accord collectif et contrat de travail et qui font prévaloir les dispositions plus favorables (5), le nouvel article L. 2242-23 (N° Lexbase : L0637IXU) neutralise les clauses contraires du contrat de travail (c'est-à-dire les clauses de localisation exclusive du lieu d'exécution du contrat de travail, mais aussi les clauses de mobilité ayant stipulé une zone de mobilité moins étendue) qui se trouvent donc suspendues.
Mise en oeuvre de la mobilité conventionnelle. L'employeur qui souhaite "proposer" la mobilité conventionnelle doit au préalable "prendre en compte les contraintes personnelles et familiales de chacun des salariés potentiellement concernés" (C. trav., nouv. art. L. 2242-23, al. 3).
Il s'agit d'une obligation de moyens. L'employeur devra prouver qu'il a bien pris en compte ces critères, mais des exigences professionnelles matériellement vérifiables par le juge et légitimes peuvent justifier qu'il ait choisi de muter un salarié, même chargé de famille, notamment lorsqu'il était le mieux placé pour occuper un poste déterminé, compte tenu des caractéristiques de ce poste, de la qualification du salarié, de son expérience, etc..
L'accord du salarié est nécessaire. Celui-ci a donc le droit de refuser la mobilité et ne pourra pas être licencié pour faute pour le seul fait d'avoir refusé cette "proposition".
Ce droit de refuser la mobilité suppose, toutefois, que l'employeur ne puisse pas se passer de l'accord de mobilité, c'est-à-dire qu'il ne dispose pas, par ailleurs, d'un moyen juridique de l'imposer, ce qui sera le cas si la mobilité envisagée n'excède pas le secteur géographique pour lequel le salarié a été recruté (zone d'environ 20 kilomètres) ou si le salarié est lié par une clause individuelle de mobilité (6).
Licenciement consécutif au refus. Si le salarié refuse cette mobilité, le licenciement prononcé par l'employeur, et fondé sur ce motif, est légalement qualifié de "licenciement pour motif économique".
Cette qualification s'impose aux parties et au juge qui ne pourra donc pas la discuter ni l'écarter sous prétexte que ce licenciement ne serait pas consécutif à des difficultés économiques ou à une réorganisation de l'entreprise, puisqu'il s'agit bien d'un motif économique sui generis.
On se rappellera que l'ANI du 11 janvier 2013 avait pour sa part opté pour la qualification de licenciement pour motif personnel tout en prévoyant le bénéfice pour les salariés concernés des dispositifs de reclassement, ce qui n'était pas cohérent. Le choix de la qualification économique, finalement opéré par le Législateur, se justifie, en effet, dans la mesure où le lien avec la prévention des difficultés économiques est clairement établi dans la loi par le rapprochement avec la GPEC. Il présente également un intérêt pour les salariés qui bénéficieront des "mesures d'accompagnement et de reclassement que doit prévoir l'accord, qui adapte le champ et les modalités de mise en oeuvre du reclassement interne prévu aux articles L. 1233-4 (N° Lexbase : L3135IM3) et L. 1233-4-1 (N° Lexbase : L3134IMZ)".
Le législateur considère également que l'employeur doit suivre la procédure du licenciement individuel pour motif économique, ce qui a pour principal objet, et intérêt, de lui épargner les affres d'un licenciement collectif et de la mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi.
Ce choix procédural n'est d'ailleurs pas aberrant dans la mesure où la loi fait peser sur l'employeur l'obligation de tenir compte de la situation individuelle des salariés auxquels il va "proposer" cette mobilité.
Incertitudes sur la justification des licenciements. Reste que si le nouvel article L. 2242-23 du Code du travail indique que le "licenciement repose sur un motif économique", il ne dit pas s'il repose ou non sur une cause réelle et sérieuse.
Il semble que le législateur ait simplement voulu désigner la procédure applicable (sa cause "qualificative"), sans préjuger de la justification de la rupture (sa cause "justificative") qui dépendra d'un certain nombre de facteurs appréciés concrètement par les juges du fond. On sait, en effet, que l'employeur doit, par exemple, prendre en considération les contraintes personnelles et familiales pesant sur le salarié, ainsi que d'éventuelles règles de priorité stipulées par l'accord de mobilité. Dans ces conditions, chaque situation devra être examinée individuellement (c'est d'ailleurs pour cette raison que le choix de la procédure du licenciement pour motif économique individuelle peut se justifier), ce qui justifie pleinement l'office du juge.
Par ailleurs, le juge pourra également rechercher la justification de la rupture au travers de la légalité des mesures prévues dans l'accord collectif, comme il avait été conduit à le faire lors de la mise en oeuvre des accords de réduction du temps de travail après 2000 où le Code du travail avait prévu la possibilité pour l'employeur de modifier unilatéralement la durée de travail des salariés, en dépit d'une clause de 39 heures de leur contrat individuel, pour autant qu'il ne modifiait pas leur rémunération (7). Pour déterminer, dans ces conditions, si le refus opposé par les salariés était justifiés, au-delà de la qualification du licenciement retenue par le législateur, la Cour de cassation avait été conduite à indiquer aux juges qu'ils devaient s'aider du contenu des accords de réduction du temps de travail eux-mêmes (8).
(1) Cass. soc., 16 février 1998, n° 96-40.227, publié (N° Lexbase : A4538AG8). Jurisprudence constante.
(2) Cass. soc., 3 juin 2003, n° 01-40.376, publié (N° Lexbase : A6993CK9). Jurisprudence constante.
(3) Voir le commentaire de Gilles Auzero, Commentaire des articles 12 à 17 (Titre II) de l'Accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l'emploi et des parcours professionnels des salariés, Lexbase Hebdo n° 514 du 31 janvier 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N5518BTK).
(4) Plaidant pour ce rééquilibrage, dernièrement J. Barthélémy et G. Cette, Pour une nouvelle articulation des normes en droit du travail, Dr. soc., 2013, p. 17.
(5) Par application de l'article L. 2254-1 (N° Lexbase : L2417H9E).
(6) Cette possibilité pourrait, toutefois, être contrariée par le principe de suspension des clauses contractuelles contraires, car dans cette hypothèse l'employeur perdrait le bénéfice de la clause contractuelle de mobilité, moins étendue, s'il dépend par ailleurs d'une zone conventionnelle de mobilité. Il ne semble toutefois pas que tel soit l'intention des partenaires sociaux de priver l'employeur du bénéfice de la clause contractuelle de mobilité, si le dispositif conventionnel est mis en échec.
(7) Article 30-II de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 (N° Lexbase : L0988AH3), codifié à l'article L. 1222-8 du Code du travail (N° Lexbase : L0822H9C).
(8) Cass. soc., 23 septembre 2009, n° 07-44.712, FS-P+B ({"IOhtml_internalLink": {"_href": {"nodeid": 2848681, "corpus": "sources"}, "_target": "_blank", "_class": "color-sources", "_title": "Cass. soc., 23-09-2009, n\u00b0 07-44.712, FS-P+B, Rejet", "_name": null, "_innerText": "N\u00b0\u00a0Lexbase\u00a0: A3388EL3"}}).
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Réf. : Décret n° 2013-597 du 8 juillet 2013, modifiant les modalités de fonctionnement de l'interlocuteur social unique et d'organisation du régime social des indépendants (N° Lexbase : L3142IXN)
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Réf. : CA Basse-Terre, ch. soc., 10 juin 2013, n° 12/00467 (N° Lexbase : A5943KIX)
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Réf. : Circ. RSI, n° 2013/017, du 5 juillet 2013, réforme des cotisations - 2012 (N° Lexbase : L3127IX4)
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Réf. : CA Basse-Terre, ch. soc., 10 juin 2013, n° 12/00467 (N° Lexbase : A5943KIX)
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Le 11 Juillet 2013
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Réf. : Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU)
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par Sébastien Tournaux, Professeur à l'Université des Antilles et de la Guyane
Le 12 Juillet 2013
L'article 17 de la loi du 14 juin 2013 insère au Code du travail un nouveau chapitre V au titre II du livre Ier de la cinquième partie consacrée à l'emploi. Ce nouveau chapitre retranscrit, à quelques nuances près, les dispositions issues de l'article 18 de l'ANI du 11 janvier 2013 relatives aux accords de maintien de l'emploi (N° Lexbase : L9638IUI) .
Il sera donc désormais possible, en cas de difficultés économiques conjoncturelles, de négocier avec les organisations syndicales de l'entreprise un tel accord qui, en contrepartie d'un engagement de maintien de l'emploi, permettra à l'employeur d'aménager "la durée du travail, ses modalités d'organisation et de répartition ainsi que la rémunération" des salariés de l'entreprise.
Immédiatement, deux remarques doivent être présentées à l'égard de ces difficultés économiques conjoncturelles.
La première tient à l'absence de définition de ce concept. Si l'on peut certainement l'opposer à des difficultés économiques structurelles, la distinction entre les deux types de difficultés ne sera probablement pas simple. On peut toutefois penser que la première sera récente et liée à des circonstances économiques exogènes à l'entreprise alors que des difficultés structurelles, plus pérennes et internes à l'entreprise, ne permettront pas la conclusion de ces accords. Quoiqu'il en soit, cela devrait constituer une véritable condition de validité des accords de maintien de l'emploi, la cause de l'accord si l'on raisonne en termes de droit des contrats. Si l'on peut regretter que les mesures prévues par l'ANI du 11 janvier 2013 afin d'établir l'existence de ces difficultés n'aient pas été reprises, elles pourraient cependant faire l'objet d'un décret d'application qui assurerait une meilleure définition du concept de difficultés conjoncturelles.
La seconde tient à une modification apportée par le nouvel article L. 5125-1 I du Code du travail (N° Lexbase : L0646IX9) qui diffère légèrement des prévisions du texte conventionnel d'origine. En effet, alors que l'ANI prévoyait que le diagnostic porté sur les difficultés économiques soit partagé avec les "représentants du personnel", la loi restreint cette concertation aux organisations syndicales. D'un côté, cette modification peut sembler logique puisqu'en principe, ce sont bien ces organisations syndicales qui concluront l'accord avec l'employeur. Cela étant, il ne faut pas oublier que le comité d'entreprise conservera un regard sur ces questions au titre de la combinaison des articles L. 2323-6 et L. 2323-2 du Code du travail (2). En outre, l'article L. 5125-1 ajoute qu'"un expert-comptable peut être mandaté par le comité d'entreprise pour accompagner les organisations syndicales dans l'analyse du diagnostic et dans la négociation", ce qui accrédite l'idée que les représentants du personnel, au sens large, demeureront impliqués dans les discussions relatives à la négociation de l'accord. Enfin, faute de représentation syndicale dans l'entreprise, les élus du personnel pourront négocier l'accord de maintien de l'emploi. La restriction de l'analyse du diagnostic aux seules organisations syndicales n'est donc guère adaptée.
Les engagements de l'employeur comporteront, comme cela était déjà prévu par l'accord, une durée déterminée qui, au regard du III de l'article L. 5125-1 du Code du travail, ne pourra excéder deux années (3). Pendant la durée de l'accord, l'employeur ne "peut procéder à aucune rupture du contrat de travail pour motif économique des salariés auxquels l'accord s'applique".
La formule est à la fois plus restrictive que celle utilisée par l'ANI mais offre, pourtant, une garantie non négligeable aux salariés concernés. Plus restrictive d'abord puisque l'accord stipulait que "l'employeur s'engage à maintenir dans l'emploi les salariés auxquels ils s'appliquent", formule d'une telle ampleur qu'elle semblait interdire toute rupture du contrat de travail des salariés concernés. La loi est donc plus restrictive en ne visant que la rupture "pour motif économique", ce qui paraît raisonnable tant le pouvoir disciplinaire, par exemple, ne doit pas être entravé par l'existence d'un accord de maintien de l'emploi. La formule offre cependant une véritable garantie aux salariés puisqu'elle ne se limite pas à exclure les licenciements pour motif économique mais vise toute rupture reposant sur un motif économique. On peut ainsi penser qu'une rupture conventionnelle pour laquelle il serait démontré qu'elle a été conclue en raison de difficultés économiques dans l'entreprise pourrait être remise en cause alors que les textes relatifs à la rupture conventionnelle ne semblent pas, par principe, exclure un tel motif (4).
L'accord du 11 janvier 2013 stipule que l'acceptabilité de l'accord "par les salariés concernés requiert le respect d'une certaine symétrie des formes à l'égard de la rémunération des mandataires sociaux et des actionnaires. Les dirigeants salariés qui exercent leurs responsabilités dans le périmètre de l'accord doivent participer aux mêmes efforts que ceux qui sont demandés aux salariés". La formule, qui demeurait un peu vague, est sensiblement renforcée par l'article L. 5125-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0646IX9) qui prévoit désormais que "l'accord prévoit les conditions dans lesquelles fournissent des efforts proportionnés à ceux demandés aux autres salariés" les dirigeants salariés, les mandataires sociaux et les actionnaires. Le poids de cette mesure ne doit pas être sous-estimé puisqu'elle peut elle aussi être envisagée comme une véritable condition de validité de l'accord et que l'exigence de proportionnalité imposera de véritables sacrifices des dirigeants et des actionnaires. Il faut tout de même demeurer lucide quant à la portée de cette exigence. Si l'accord conclu ne remplit pas ces conditions, les salariés pourront en théorie obtenir des rappels de salaire compte tenu des diminutions de temps de travail ou de rémunération subies. Cependant, ces rappels ne pourront être effectifs qu'à la condition que la situation économique de l'entreprise ne se soit pas encore davantage dégradée.
Quant au salarié, celui-ci pourra voir sa durée de travail ou sa rémunération modifiée. La loi pose une limite à la diminution de rémunération, comme l'avait d'ailleurs déjà envisagé l'accord du 11 janvier 2013. Ainsi, les salariés percevant un salaire horaire équivalent au SMIC majoré de 20 % ne pourront subir de diminution de leur rémunération. Quant aux autres salariés, la baisse de rémunération ne pourra les amener en deçà de ce seuil du SMIC majoré de 20 %. Les plus bas salaires de l'entreprise devraient donc être épargnés par les effets de l'accord.
Aucune précision n'étant apportée en matière de modulation du temps de travail, une grande marge de manoeuvre est accordée aux négociateurs sous réserve, bien sûr, du respect des règles d'ordre public telles que le respect des temps de repos minimaux ou les durées de travail quotidiennes et hebdomadaires maximales.
S'agissant d'un accord d'entreprise, c'est l'employeur ou son représentant qui sera habilité à conclure l'accord côté patronal.
Côté salariés, ce sont là encore assez traditionnellement les syndicats qui exerceront leur vocation naturelle à la négociation sur le thème du maintien de l'emploi. Toutefois, le nouvel article L. 5125-4 du Code du travail (N° Lexbase : L0649IXC) prévoit des règles de conclusion spécifique et dérogatoires aux dispositions de droit commun édictées par les articles L. 2232-12 (N° Lexbase : L3770IBA) et suivants du même code.
D'abord, les syndicats ne pourront se contenter d'une majorité d'engagement de 30 % des suffrages recueillis au premier tour des élections des membres du comité d'entreprise, de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel. Le critère d'audience a été porté à 50 %, il s'agit donc d'une véritable majorité d'engagement et non d'une simple exigence d'audience minimale. Le système a l'avantage de la simplicité puisqu'il rend sans objet l'existence d'une procédure d'opposition ouverte à des non-signataires qui, par définition, ne pourront être majoritaires. Il répond également à l'idée que ces accords, particulièrement sensibles, doivent recueillir l'assentiment d'un plus grand nombre, lequel est matérialisé par l'exigence accrue en matière d'audience électorale des signataires.
Ensuite, la négociation dérogatoire faute de délégué syndical dans l'entreprise est elle aussi aménagée. Habituellement, il suffit que l'accord soit conclu par les élus du comité d'entreprise ou, à défaut, par les délégués du personnel avec approbation ultérieure d'une commission paritaire de branche (5). Or l'article L. 5125-4 II du Code du travail (N° Lexbase : L0649IXC) n'autorise pas tout représentant élu à conclure l'accord de maintien de l'emploi et cumule les qualités de représentant du personnel avec celle de mandataire syndical. En effet, les représentants du personnel habilités à négocier l'accord devront avoir été mandatés par "une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans la branche dont relève l'entreprise ou, à défaut, par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel". La présence syndicale, en amont de la négociation, est donc renforcée selon la même idée que la dangerosité de l'accord pour les salariés implique des garanties accrues en leur faveur au stade de sa conclusion. Plus classiquement, à défaut de représentants élus, un ou plusieurs salariés de l'entreprise peuvent être mandatés par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives pour conclure l'accord qui devra être approuvé par referendum d'entreprise.
II - Effets de l'accord de maintien de l'emploi
Les modifications apportées à la rémunération ou au temps de travail du salarié peuvent constituer des modifications du contrat de travail qui, habituellement, ne peuvent être imposées au salarié. La loi revient à une meilleure orthodoxie juridique sur cette question. En effet, on se souviendra que l'ANI prévoyait, assez paradoxalement, que "bien que s'imposant au contrat de travail, l'accord de maintien dans l'emploi requiert néanmoins l'accord individuel du salarié". La loi n'entre pas dans ce raisonnement un peu contradictoire puisque l'article L. 5125-2 dispose que "pour les salariés qui l'acceptent, les stipulations de l'accord mentionné à l'article L. 5125-1 sont applicables au contrat de travail". Si la théorie de la modification du contrat de travail est donc ménagée, la procédure de modification qui s'y appliquera pourra en revanche être dérogatoire là où l'accord se contentait de renvoyer à la procédure classique de modification du contrat pour motif économique issue de l'article L. 1222-6 du Code du travail (N° Lexbase : L0818H98). En effet, la procédure légale de modification du contrat de travail pour motif économique ne sera applicable qu'à défaut de stipulations spécifiques prévues par l'accord de maintien de l'emploi. Ainsi, le délai d'un mois pour donner une réponse pourra être modulé alors même qu'il ne paraît pas excessivement long.
Quant aux effets du refus du salarié de voir son contrat de travail modifié, le législateur prévoit que le salarié sera alors susceptible d'être licencié pour motif économique. Ce qui pourrait sembler être une conséquence très classique du refus d'une proposition de modification du contrat de travail pour motif économique (6) pose tout de même une difficulté compte tenu de la cause de l'accord qui, rappelons-le, réside dans l'existence de difficultés économiques conjoncturelles. La difficulté pourra cependant être aisément levée puisque les difficultés économiques visées en matière de licenciement pour motif économique paraissent être un concept plus vaste que les difficultés conjoncturelles visées par le nouvel article L. 5125-1 du Code du travail. Qu'elles soient conjoncturelles ou structurelles, des difficultés économiques demeurent des difficultés économiques. Il n'en reste pas moins que les indices jurisprudentiels permettant d'identifier des difficultés économiques au sens de l'article L. 1233-3 du Code du travail devront être conciliés avec la définition qui ne manquera pas d'être établie par le juge des difficultés conjoncturelles. Pour le dire autrement, la possibilité de conclure un accord de maintien de l'emploi pourrait être reconnue alors même que, parfois, les difficultés en cause ne seraient pas suffisamment graves pour permettre un licenciement. Dans ce cas de figure, on peut craindre que le licenciement prononcé contre un salarié refusant l'application de l'accord à son contrat de travail repose néanmoins sur une cause réelle et sérieuse, la règle spéciale prenant le pas sur la règle générale posée pour la cause réelle et sérieuse de licenciement. Indirectement, les exigences de la chambre sociale en matière de preuve de l'existence de difficultés économiques pourraient alors s'en trouver amoindries.
L'article L. 5125-5 du Code du travail (N° Lexbase : L0650IXD) donne au président du tribunal de grande instance une nouvelle compétence en référé de suspension de l'accord de maintien de l'emploi, soit parce que les engagements de l'employeur ne seraient pas exécutés de manière "loyale et sérieuse", soit parce que la situation de l'entreprise a évolué "de manière significative". Ces concepts de loyauté, de sérieux, d'évolution significative sont d'une telle souplesse qu'ils laisseront en réalité une grande marge d'appréciation au juge des référés. Cela donne le sentiment d'une volonté de privilégier le "cas par cas". Si l'idée est louable, elle laisse tout de même un très large pouvoir à un juge unique et il faut espérer que, contrairement à l'adage, il ne rendra pas des ordonnances iniques.
La durée de suspension judiciaire de l'accord de maintien de l'emploi sera établie par le juge et, à l'issue de cette durée, celui-ci décidera de la poursuite ou de la résiliation de l'accord. L'application d'un tel type de suspension risque cependant de poser d'importantes difficultés. En particulier, on peut se demander si la modification du contrat de travail acceptée par le salarié à la suite de la conclusion de l'accord de maintien de l'emploi sera elle aussi "suspendue". La technique contractuelle parviendrait alors au comble de la complexité puisqu'il s'agirait de la suspension provisoire d'une modification elle-même temporaire du contrat de travail ! Il est vrai que la loi du 14 juin 2013 semble prendre un certain nombre de liberté avec les théories classiques de la modification et de la suspension du contrat de travail (7), libertés dont on ne mesure probablement pas encore tous les effets...
Toujours en cas de suspension judiciaire de l'accord, l'employeur retrouve en principe son droit de rupture du contrat de travail comme en témoigne l'article L. 5125-6 du Code du travail (N° Lexbase : L0651IXE) qui fixe le montant des indemnités servies au salarié "en cas de rupture du contrat de travail, consécutive notamment à la décision du juge de suspendre les effets de l'accord mentionné à l'article L. 5125-1". On peine, pour tout dire, à percevoir la rationalité de la règle posée. La suspension peut, d'abord, intervenir lorsque les engagements de l'employeur ne sont pas exécutés de manière "loyale et sérieuse". La suspension de l'accord permet ainsi à l'employeur, malgré ses turpitudes, de retrouver la liberté de rompre les contrats de travail ! La suspension peut, ensuite, résulter d'un changement significatif de la situation économique dont on peut penser qu'il s'agisse d'une amélioration puisque, dans le cas contraire, la suspension de l'accord ne serait pas justifiée. A nouveau, il est difficile de comprendre pourquoi l'employeur serait amené à rompre un contrat de travail pour motif économique alors précisément que l'entreprise ne subirait plus de difficultés économiques (8) ! Quoiqu'il en soit, comme le prévoyait déjà l'accord du 11 janvier 2013, les indemnités de licenciement et les allocations de retour à l'emploi servies au salarié licencié à la suite de la suspension de l'accord seront calculées sur la base des rémunérations perçues avant l'entrée en vigueur de l'accord de maintien de l'emploi. Cela permettra, et c'est heureux, d'éviter que ces indemnités ne soient calculées sur la base d'une rémunération amoindrie par l'effet de l'accord.
Enfin, le nouvel article L. 5125-2 du Code du travail (N° Lexbase : L0647IXA) reprend l'idée des partenaires sociaux d'assortir les engagements de l'employeur d'une clause pénale. Indubitablement, et ce malgré la référence faite par le texte à l'article 1226 du Code civil (N° Lexbase : L1340ABA), la notion de clause pénale fait là l'objet d'une adaptation à la spécificité du contrat "accord collectif de travail" (9). En effet, les bénéficiaires de la clause pénale ne seront pas, comme dans la théorie classique, les cocontractants de l'employeur que sont les syndicats mais les destinataires de l'accord, c'est-à-dire les salariés. L'adaptation de la théorie de la clause pénale est cependant salutaire puisque les victimes de l'inexécution par l'employeur de ses engagements seront bien davantage les salariés licenciés que les syndicats cocontractants. Les parties devront cependant veiller à ce que les indemnités prévues par la clause pénale ne soient ni manifestement dérisoires, ni manifestement excessives auxquels cas le juge pourra en réviser le montant.
(1) V. nos obs., Commentaire des articles 18 à 21 et article 25 de l'Accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l'emploi et des parcours professionnels des salariés, Lexbase Hebdo n° 514 du 31 janvier 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N5539BTC). V. également E. Peskine, Les accords de maintien dans l'emploi. Ruptures et continuités, RDT, 2013, p. 168 ; G. Borenfreund, Le refus du salarié face aux accords collectifs de maintien de l'emploi et de mobilité interne, ibid., p. 316
(2) Le comité est consulté quant à la décision de l'employeur de conclure un accord collectif, v. Cass. soc., 5 mai 1998, n° 96-13.498, publié (N° Lexbase : A2677AC7), Bull. civ. V, n° 219 ; Dr. soc., 1998, p. 579, rapp. J.-Y. Frouin ; D., 1998, p. 608 et les obs. de G. Auzero.
(3) Les difficultés soulevées à la suite de la conclusion de l'ANI quant à la compatibilité de cet accord à durée déterminée et des règles du Code du travail relatives aux conventions et accords à durée déterminée n'ont pas donné lieu à éclaircissement par le législateur, v. sur cette question nos obs. préc..
(4) Le Code du travail n'exclut la rupture conventionnelle que du cadre des plan de sauvegarde de l'emploi et des accords de GPEC, v. C. trav., art. L. 1237-16 (N° Lexbase : L8479IAB). Jusqu'ici, la Chambre sociale s'était contentée d'appliquer le droit du licenciement pour motif économique à de multiples ruptures conventionnelles conclues en vue d'éluder les règles du droit du licenciement, v. Cass. soc., 9 mars 2011, n° 10-11.581, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A3242G79) et les obs. de Ch. Willmann, La Cour de cassation assimile les ruptures conventionnelles à des licenciements pour motif économique, Lexbase Hebdo n° 433 du 24 mars 2011 - édition sociale (N° Lexbase : N7642BRH).
(5) C. trav., art. L. 2232-21 (N° Lexbase : L5837IEW).
(6) Situation qui, rappelons-le, constitue l'un des éléments potentiels de la cause réelle et sérieuse de licenciement pour motif économique, v. C. trav. art. L. 1233-3 (N° Lexbase : L8772IA7).
(7) V., notamment, la modification temporaire du contrat de travail à temps partiel ou la suspension temporaire adjointe d'une modification du contrat de travail s'agissant de la période de mobilité externe.
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par Sébastien Tournaux, Professeur à l'Université des Antilles et de la Guyane
Le 11 Juillet 2013
I - L'aménagement de la procédure de licenciement collectif
L'article 18 de la loi du 14 juin 2013 modifie un certain nombre de dispositions du Code du travail relatives au licenciement pour motif économique avec pour volonté de "renforcer l'encadrement des licenciements collectifs et instaurer une obligation de recherche de repreneur en cas de fermeture de site".
L'objet principal de cet article tient à renforcer l'attrait des anciens accords de méthode qui permettent d'anticiper et d'aménager la procédure de licenciement pour motif économique collectif (1).
A cet effet, un nouvel article L. 1233-24-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0630IXM) prévoit la possibilité, dans les entreprises de cinquante salariés et plus, de conclure un accord collectif qui déterminera "le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi [...] ainsi que les modalités de consultation du comité d'entreprise et de mise en oeuvre des licenciements". Comme pour les accords de maintien de l'emploi, une véritable majorité d'engagement est exigée des syndicats signataires qui devront avoir recueilli au moins 50 % des suffrages aux dernières élections des représentants du personnel pour valablement conclure l'accord. Les organisations syndicales pourront bénéficier, à l'initiative du comité d'entreprise, de l'analyse d'un expert-comptable (2). Cette mesure fait écho au droit du comité d'entreprise de bénéficier de cette expertise dans le cadre de la consultation traditionnelle en cas de projet de licenciement pour motif économique.
La liste non exhaustive des mesures qui peuvent être envisagées par cet accord est établie par l'article L. 1233-24-2 du Code du travail(N° Lexbase : L0631IXN). Pour l'essentiel, cela concernera le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise, les critères d'ordre de licenciement et leur pondération, le calendrier des licenciements, le nombre de suppression d'emploi et les catégories professionnelles concernées ou, encore, les modalités de reclassement, d'adaptation ou de formation des salariés concernés. L'article L. 1233-24-3 (N° Lexbase : L0632IXP) établit une liste, limitative cette fois, de mesures auxquelles il est interdit de déroger par cet accord : obligation d'adaptation, de formation et de reclassement ; règles générales relatives à la consultation du comité d'entreprise et obligation d'information des représentants du personnel ; obligation de proposer la conclusion au salarié d'un contrat de sécurisation professionnelle ; règles spécifiques au cas de redressement ou de liquidation judiciaires.
Comme l'accord avant elle, la loi autorise faute d'accord que ce dispositif soit établi par un document unilatéral de l'employeur ce qui, pour certains aspects, constitue un changement fondamental. En effet, si l'employeur avait déjà unilatéralement le pouvoir d'établir le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi ou les critères de l'ordre des licenciements, il n'était jusqu'ici pas autorisé à aménager seul les règles relatives à la consultation des représentants du personnel.
II - Rationalisation des délais de procédure
L'accord du 11 janvier 2013 (N° Lexbase : L9638IUI) avait pour ambition de réduire les durées excessives des procédures de licenciement collectif en posant des délais préfix maximaux que la procédure ne devait pas excéder (3). Le respect de ces délais dans lesquels l'intégralité de la procédure devait être effectuée paraissait peu réaliste, mais la mesure était guidée par une volonté d'endiguement de certaines manoeuvres dilatoires qui retardaient artificiellement l'aboutissement de la procédure. Cette idée est reprise par l'insertion d'un avant-dernier alinéa à l'article L. 1233-30 du Code du travail (N° Lexbase : L0709IXK). Cet article fixe des délais maximums qui peuvent séparer les réunions du comité d'entreprise en cas de projet de licenciement collectif, délai variant selon le nombre de licenciement en cause (4). Désormais, "en l'absence d'avis du comité d'entreprise dans ces délais, celui-ci est réputé avoir été consulté", ce qui devrait dissuader les membres du comité d'entreprise de jouer au jeu de la politique de la "chaise vide".
Dans le même ordre d'idée de rationalisation des durées de procédure, l'article L. 1233-35 du Code du travail (N° Lexbase : L1176H9G), dans sa nouvelle rédaction, détermine des délais de communication entre l'expert-comptable mandaté par le comité d'entreprise et l'employeur afin que les demandes d'informations complémentaires interviennent dans des délais raisonnables mais, aussi, que la communication des pièces demandées ait lieu rapidement. La même raison guide l'article L. 1233-45-1 (N° Lexbase : L0634IXR) qui permet désormais, après avis du comité d'entreprise, à l'employeur de proposer des mesures de reclassement interne avant l'écoulement des délais minimums qui doivent séparer les réunions du comité d'entreprise par l'effet de l'article L. 1233-30. Même si cela n'aura, probablement, pas d'importantes conséquences, la place de ce nouveau texte est curieuse puisqu'elle vient s'insérer à la suite des dispositions relatives à la priorité de réembauche alors qu'on aurait pu l'attendre après l'article L. 1233-4 (N° Lexbase : L3135IM3), relatif à l'obligation de reclassement mise à la charge de l'employeur.
III - Le rôle accru de l'administration du travail
D'une manière générale, le rôle de l'administration du travail demeure inchangé s'agissant des licenciements collectifs projetés dans les entreprises de moins de cinquante salariés. Ainsi, les articles L. 1233-53 (N° Lexbase : L0715IXR) et suivants du Code du travail, qui conservent pour l'essentiel la procédure antérieure à la loi, seront, désormais, réservés aux entreprises ne dépassant pas ce seuil d'effectif.
S'agissant, en revanche, des projets de licenciements élaborés dans les entreprises de plus de cinquante salariés, les nouveaux articles L. 1233-57 (N° Lexbase : L1227H9C) à L. 1233-57-8 du Code du travail instituent une procédure nouvelle et adaptée à la mise en valeur des accords d'aménagement de la procédure de licenciement et à la faculté d'adapter la procédure par voie de document unilatéral de l'employeur.
A l'article L. 1233-57, relatif aux propositions que peut présenter l'administration du travail en vue de compléter ou de modifier le plan de sauvegarde de l'emploi, la loi ajoute un nouvel alinéa qui impose à l'employeur d'adresser à l'autorité administrative "une réponse motivée" à ces propositions.
L'article L. 1233-57-6 du Code du travail (N° Lexbase : L0643IX4) prévoit qu'à tout moment de la procédure, l'administration peut faire des observations ou propositions concernant le déroulement de la procédure ou les "mesures sociales" désormais visées par l'article L. 1233-22 du Code du travail (N° Lexbase : L1147H9D). Ces observations seront bien entendu présentées à l'employeur, mais également, au comité d'entreprise ou à défaut aux délégués du personnel et, lorsqu'une négociation d'aménagement de la procédure est en cours, aux syndicats représentatifs de l'entreprise. Outre que la réponse, que l'employeur doit apporter à l'administration, doit être motivée, elle devra encore être communiquée aux représentants du personnel et aux syndicats lorsqu'elle porte sur le déroulement de la procédure ou les mesures sociales. En pratique, l'immense majorité des observations de l'administration du travail devrait porter sur ces éléments si bien que les employeurs seront bien avisés de transmettre automatiquement toute observation ou proposition administrative aux représentants du personnel.
En outre, l'accord collectif (5) ou le document unilatéral (6) aménageant la procédure de licenciement devra, impérativement, être transmis à l'autorité administrative, le premier pour validation, le second pour homologation. L'administration aura la charge de vérifier que le contenu de l'accord ou du document est conforme aux articles L. 1233-24-1 (N° Lexbase : L0630IXM) à L. 1233-24-3 et aux articles L. 1233-61 (N° Lexbase : L6215ISY) et L. 1233-63 (N° Lexbase : L1242H9U), tous relatifs au contenu du plan de sauvegarde de l'emploi. Elle s'assurera, en outre, que la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise et du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail est régulièrement envisagée par l'accord ou le document.
La décision administrative est enserrée dans des délais précis puisque l'article L. 1233-57-4 (N° Lexbase : L0641IXZ) prévoit que la décision de validation devra intervenir sous quinze jours alors que la décision d'homologation devra être rendue dans un délai de vingt-et-un jours (7). Cette décision devra être notifiée à l'employeur (8), au comité d'entreprise et aux syndicats s'il s'agit d'un accord d'aménagement. Ces représentants du personnel ou des syndicats pourront, ainsi, s'appuyer sur les remarques et propositions effectuées par l'administration du travail pour tenter de faire évoluer le projet voire, en cas de blocage, pour argumenter un recours contentieux dirigé contre la procédure engagée. La décision de validation ou d'homologation sera, enfin, portée à la connaissance des salariés par voie d'affichage sur les lieux de travail.
En cas de refus d'homologation ou de validation, l'employeur peut reprendre son projet de licenciement après l'avoir amendé et avoir présenté une nouvelle demande d'homologation ou de validation.
Après analyse de ces différentes dispositions, on peut, légitimement, se demander quelle mesure viendra sanctionner l'absence de demande d'homologation ou de validation ou la poursuite du projet après un refus d'homologation ou de validation. Si le paragraphe comportant les articles étudiés n'aborde pas la question de la sanction, le législateur a tout de même modifié l'article L. 1233-39 du Code du travail (N° Lexbase : L1189H9W), relatif à la notification du licenciement.
Deux alinéas sont ajoutés à ce texte. Le premier précise que la notification du licenciement intervient après la notification de la décision de validation ou d'homologation ce qui semble faire de la décision administrative une condition de validité du licenciement. Ce sentiment est confirmé par l'alinéa suivant qui dispose que l'employeur "ne peut procéder, à peine de nullité, à la rupture des contrats de travail avant la notification de cette décision d'homologation ou de validation".A la suite de la modification de l'article L. 1235-10 du Code du travail (N° Lexbase : L6214ISX), la nullité viendra encore sanctionner la procédure et les éventuels licenciements subséquents en cas d'annulation de la décision d'homologation ou de validation.
Si le principe de la réintégration du salarié à la suite de la nullité de son licenciement est maintenu, les conséquences de celle-ci varieront selon qu'est en cause l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi ou une autre cause ayant justifié l'annulation. Dans le premier cas, la règle ancienne de l'article L. 1235-11 du Code du travail (N° Lexbase : L0725IX7) est maintenue : le salarié sera réintégré sauf si cette modalité est devenue impossible ; à défaut de réintégration, est servie une indemnité qui ne peut être inférieure à douze mois de salaire. Dans le second cas, l'article L. 1235-16 du Code du travail (N° Lexbase : L0724IX4) dispose que la réintégration ne peut, en principe, être évitée par la preuve d'une quelconque impossibilité, mais que l'indemnité servie au salarié faute de réintégration ne peut être inférieure à six mois de salaire.
D'une certaine manière, la procédure nouvelle consiste dans le rétablissement d'une autorisation administrative de licenciement pour les licenciements collectifs, autorisation qui diffère, cependant, sensiblement de celle qui s'appliquait avant 1986 puisqu'elle n'aura pour objet que de vérifier le respect des règles procédurales, le contenu suffisant du plan de sauvegarde de l'emploi et les "mesures sociales" envisagées. En favorisant des délais courts, cette mesure pourrait intéresser les entreprises qui seront mieux assurées de la validité des procédures engagées. Mais ce n'est pas là le plus grand des intérêts de cette procédure nouvelle.
A l'image de ce qui est prévu s'agissant de la rupture conventionnelle du contrat de travail qui, elle aussi, fait l'objet d'une homologation administrative, le nouvel article L. 1235-7-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0653IXH) dispose que l'accord, le document unilatéral, le contenu du plan et les décisions de l'administration "ne peuvent faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à la décision de validation ou d'homologation" administrative. Contrairement au contentieux de la rupture conventionnelle, ce nouveau bloc de compétence est attribué au juge administratif "à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux". Pris au pied de la lettre, ce texte exclut donc la compétence du juge prud'homal pour apprécier la validité ou la régularité de la procédure de licenciement économique collectif, seules les questions de fond consistant à l'appréciation du motif de licenciement et de cause réelle et sérieuse du licenciement demeurant de sa compétence. Indirectement, le juge prud'homal ne devrait donc plus être mesure de prononcer la nullité d'un plan de sauvegarde de l'emploi ni, subséquemment, des licenciements prononcés.
(1) V. C. Figerou, Accords de méthode : vers des licenciements économiques négociés ?, Lexbase Hebdo n° 168 du 18 mai 2005 - édition sociale (N° Lexbase : N4282AIG). V., également, F. Gaudu, Les accords de méthode, Dr. soc., 2008, p. 915 ; R. Vatinet, L'accord de méthode en quête de cohérence, Gaz. Pal., 12-14 août 2007, p. 10 ; P.-H. Antonmattéi, Accord de méthode, génération 2005 : la positive attitude, Dr. soc., 2005, p. 399 ; S. Nadal, Négociation collective et licenciement économique : propos introductifs sur le nouvel article L. 320-2 du Code du travail, Dr. ouvrier, 2005, p. 303.
(2) C. trav., art. L. 1233-34 (N° Lexbase : L6216ISZ) dans sa nouvelle rédaction.
(3) V. nos obs., Commentaire des articles 18 à 21 et article 25 de l'Accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l'emploi et des parcours professionnels des salariés, Lexbase Hebdo n° 514 du 31 janvier 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N5539BTC).
(4) Le texte est, également, modifié s'agissant du nombre de réunions qui n'est plus impérativement limité à deux, ce chiffre devenant un minimum.
(5) C. trav. art. L. 1233-57-2 (N° Lexbase : L0639IXX).
(6) C. trav. art. L. 1233-57-3 (N° Lexbase : L0640IXY).
(7) Ces délais sont encore raccourcis par l'effet de l'article L. 1233-58 du Code du travail (N° Lexbase : L0712IXN) à huit jours en cas de redressement judiciaire, à quatre jours en cas de liquidation judiciaire.
(8) A rebours de la règle classique en droit administratif, mais de plus en plus commune en droit du travail, l'absence de réponse de l'administration du travail dans ces délais vaut décision de validation ou d'homologation. L'idée est toujours de ne pas aboutir à un blocage de la procédure qui en accroîtrait sensiblement la durée.
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par Sébastien Tournaux, Professeur à l'Université des Antilles et de la Guyane
Le 20 Juillet 2013
L'article 21 de la loi du 14 juin 2013 reprend l'essentiel des mesures envisagées par l'article 25 de l'ANI du 11 janvier 2013 (N° Lexbase : L9638IUI), ce qui était d'ailleurs totalement indispensable tant un accord collectif, fût-il interprofessionnel et national, ne pouvait avoir pour effet d'aménager les règles d'ordre public applicable en matière de contentieux prud'homal (1).
Le texte modifie l'article L. 1235-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0733IXG) relatif au contentieux de la rupture du contrat de travail. Avant qu'un litige permette, éventuellement, au juge d'apprécier la régularité de la procédure et la cause réelle et sérieuse du licenciement, les parties pourront s'entendre, à leur initiative ou sur proposition du bureau de conciliation, afin qu'il soit mis fin au litige relatif à la rupture en contrepartie du versement au salarié d'une indemnité dont le montant sera déterminé par décret, lequel pourrait vraisemblablement reprendre les propositions présentées par les partenaires sociaux dans l'ANI. Cette indemnité ne devrait pas avoir vocation à se substituer à toutes les indemnités auxquelles le salarié a droit en raison de la rupture puisque le texte dispose qu'elle sera versée "sans préjudice des indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles". La loi est, en la matière, plus favorable que ne l'était l'accord qui, faute de précision, semblait suggérer de remplacer toutes les indemnités par une indemnité unique.
Après l'arrêt "Durafroid" (2), c'est une nouvelle mission qui doit être désormais assumée par les conseillers prud'hommes au stade de la conciliation : non seulement ils devront informer les parties de leurs droits mais, encore, devront proposer que soit mis fin au litige par le versement de cette indemnité. On peut regretter que le législateur n'ait pas souhaité articuler ces deux missions tant on peut penser que l'ordre dans lequel ces informations et propositions vont être données peut avoir une influence sur le choix des parties. Quoiqu'il en soit, il est probable que l'absence d'information des parties sur leurs droits ait le même effet sur l'accord conclu entre les parties que ceux qu'elle produirait sur une conciliation plus classique, c'est-à-dire la possibilité d'annulation de l'ordonnance de conciliation.
On relèvera, enfin, que les dispositions insérées au Code du travail figurent dans le titre relatif à la rupture du contrat de travail à durée indéterminée si bien qu'elles ne devraient en théorie pas s'appliquer à la rupture anticipée du contrat à durée déterminée ou du contrat de mission.
Conformément là encore aux prescriptions de l'ANI, un nouvel alinéa est ajouté à l'article L. 1235-1 du Code du travail, lequel dispose que le juge "justifie dans le jugement qu'il prononce le montant des indemnités qu'il octroie". Le juge prud'homal, comme toute juridiction judiciaire, a déjà l'obligation de motiver ses décisions si bien que la mesure pourrait sembler superflue. Elle a, cependant, une valeur symbolique puisque certains jugements suscitent la circonspection de justiciables qui s'estiment insuffisamment informés des raisons ayant permis la détermination du montant des indemnités. Pour autant, l'appréciation du montant des préjudices relève traditionnellement du pouvoir souverain des juges du fond si bien que les effets réels de la mesure devraient être limités à l'hypothèse, relativement rare, d'absence totale de motivation du montant décidé (3).
II - Prescription des actions en justice
Un nouveau titre VII intitulé "prescription des actions en justice" est inséré au livre IV de la première partie du Code du travail. Ce titre qui ne comportera qu'un seul chapitre qui, lui-même, ne compte qu'un unique article L. 1471-1 (N° Lexbase : L0620IXA).
Comme l'avaient souhaité les partenaires sociaux, le délai de prescription des actions en contestation de l'exécution ou de la rupture du contrat de travail est, désormais, ramené de cinq à deux ans "à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit". Sont toutefois exclues de ce délai de prescription aménagé les actions en vue de la réparation d'un dommage corporel, les actions en paiement ou répétition du salaire et les actions portant sur une discrimination, un harcèlement moral ou un harcèlement sexuel. S'agissant des actions en paiement des salaires, l'article L. 3245-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0734IXH) est modifié et la prescription est ramenée à trois années au lieu de cinq.
Cette mesure s'inscrit dans une tendance récente tendant à restreindre les délais de prescription en droit du travail, comme cela avait déjà été le cas, par exemple, s'agissant de la contestation susceptible d'entraîner la nullité de la procédure de licenciement collectif pour motif économique en raison de l'absence ou de l'insuffisance d'un plan de sauvegarde de l'emploi (4) ou s'agissant de la contestation de la validité de la rupture conventionnelle du contrat de travail (5). L'appréciation de cette mesure dépend naturellement de l'origine du regard qui lui est porté. Pour les entreprises, la mesure est favorable puisqu'elle leur permettra de mieux sécuriser les ruptures du contrat de travail et de ne pas rester pendant cinq ans dans l'expectative d'une éventuelle action judiciaire, qu'elle permettra une rationalisation des éventuelles provisions comptables qui pourraient avoir été effectuées. Pour les salariés, en revanche, la diminution du délai est plus problématique puisqu'ils sont dans l'immense majorité des cas les demandeurs devant la juridiction prud'homale et qu'ils devront donc réagir rapidement. La limite posée par le texte de connaissance des faits qui justifie le recours était indispensable. La loi ne prend cependant pas en compte -mais le pourrait-elle ?- le fait que nombre des recours intentés tardivement par les salariés ne reposent sur aucune malveillance mais, seulement, sur une découverte tardive de leurs droits...
Enfin, la loi aménage l'entrée en vigueur de ces nouveaux délais de prescription d'une manière relativement simple puisque ces délais ne seront pas applicables aux actions introduites avant la promulgation de la loi.
(1) V. nos obs., Commentaire des articles 18 à 21 et article 25 de l'Accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l'emploi et des parcours professionnels des salariés, Lexbase Hebdo n° 514 du 31 janvier 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N5539BTC).
(2) Cass. soc., 28 mars 2000, n° 97-42.419, publié (N° Lexbase : A6373AG7), D., 2000, p. 537, obs. J. Savatier ; Dr. soc., 2000. 661, obs. Keller.
(3) V. déjà nos propos, préc..
(4) C. trav., art. L. 1235-7 (N° Lexbase : L1351H9W). Adde. Cass. soc., 15 juin 2010, n° 09-65.062, FS-P+B+R (N° Lexbase : A2884EZT) et nos obs., La prescription de l'action en contestation du licenciement économique, Lexbase Hebdo n° 400 du 24 juin 2010 - édition sociale (N° Lexbase : N4275BPZ).
(5) C. trav., art. L. 1237-14, dernier al. (N° Lexbase : L8504IA9).
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Réf. : Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU)
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par Sébastien Tournaux, Professeur à l'Université des Antilles et de la Guyane
Le 11 Juillet 2013
Alors qu'il ne semblait pas indispensable que le législateur se saisisse de cette question pour que les mesures conventionnelles produisent leurs effets (1), sont insérées au Code du travail de nouvelles dispositions relatives à la "reprise de site" qui viennent s'adjoindre à celles déjà envisagées aux articles L. 1233-84 (N° Lexbase : L1283H9E) et suivants du Code du travail s'agissant de la revitalisation des bassins d'emploi.
Le nouvel article L. 1233-90-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0622IXC) impose, désormais, à l'entreprise d'engager un processus de recherche d'un repreneur, procédure dont doit être informé le comité d'entreprise. Celui-ci peut recourir à l'analyse d'un expert-comptable afin de mieux comprendre "le processus de recherche d'un repreneur, sa méthodologie et son champ, pour apprécier les informations mises à la disposition des repreneurs potentiels et pour analyser les projets de reprise". Le comité d'entreprise sera informé des différentes propositions, pourra émettre un avis et formuler des propositions quant à ces différentes offres dans les mêmes délais que ceux prévus par l'article L. 1233-30 du Code du travail (N° Lexbase : L6222ISA) applicables aux réunions du comité.
L'implication du comité d'entreprise dans la procédure de recherche d'un repreneur est salutaire et traduit les préoccupations fréquemment émises dans les médias par les représentants du personnel de grandes entreprises subissant la fermeture de sites de production.
On peut, cependant, rester dubitatif devant la formulation du premier alinéa de l'article L. 1233-90-1 du Code du travail qui semble, véritablement, imposer une obligation de recherche d'un repreneur. En effet, s'il s'agit bien d'une nouvelle contrainte légale imposée en cas de fermeture de site, aucun détail n'est donné quant aux modalités de cette recherche. L'obligation est effective au moment où l'entreprise "envisage un projet de licenciement" ce qui demeure relativement flou. Aucune précision n'est apportée quant aux moyens qui doivent être mobilisés par l'entreprise pour procéder à cette recherche. Il faut dire que la question est périlleuse puisqu'une publicité trop grande des difficultés de l'entreprise, laquelle permettrait une recherche efficace d'un repreneur, pourrait avoir des conséquences aggravantes sur la situation de l'entreprise en termes d'image ou de cotation par exemple.
Enfin, aucune mesure ne vient, explicitement, sanctionner l'absence de recherche de repreneur, ce qui affaiblit considérablement son effectivité. Seule l'absence d'information ou de consultation du comité d'entreprise sur les démarches effectivement réalisées pourront donner lieu à sanction, soit sur le plan pénal -délit d'entrave- soit sur le plan civil -non-respect des règles procédurales afférentes à la consultation des représentants du personnel en matière de licenciement pour motif économique-.
On peut, en définitive, rejoindre le Professeur Gilles Auzero pour considérer qu'une intervention législative d'une si faible ampleur n'était, probablement, pas nécessaire...
(1) V. les obs. de G. Auzero, Commentaire des articles 12 à 17 (Titre II) de l'Accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l'emploi et des parcours professionnels des salariés, Lexbase Hebdo n° 514 du 31 janvier 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N4418BTK).
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Réf. : Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU)
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N7936BT4
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par Sébastien Tournaux, Professeur à l'Université des Antilles et de la Guyane
Le 11 Juillet 2013
L'article L. 1233-5 du Code du travail (N° Lexbase : L0732IXE), relatif à l'ordre des licenciements, est modifié par l'adjonction d'un nouvel alinéa qui dispose que "l'employeur peut privilégier un de ces critères, à condition de tenir compte de l'ensemble des autres critères prévus au présent article". L'idée est donc de permettre à l'employeur de pondérer les critères légaux d'ordre de licenciement pour donner plus d'importance à l'un ou l'autre. A moins qu'il ne s'agisse là de sécuriser une pratique jurisprudentielle déjà bien ancrée, la règle nouvelle paraît, totalement, inutile puisque c'est déjà l'interprétation que retenait la Chambre sociale de la Cour de cassation de l'article dans son ancienne rédaction (1).
Le texte modifie encore l'article L. 1233-71 du Code du travail (N° Lexbase : L0731IXD), relatif au congé de reclassement dont la durée est alignée sur celle du contrat de sécurisation professionnelle à douze mois, ce qui permet d'obtenir une meilleure harmonie entre deux dispositifs répondant au même objet mais réservés, pour le premier aux entreprises de plus de mille salariés, pour le second aux entreprises dont l'effectif est inférieur à cette taille.
Enfin, les conditions de report du congé de reclassement lorsque celui-ci est interrompu par des périodes de travail, prévues par l'article L. 1233-72-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0730IXC), sont, légèrement, modifiées. Alors que le texte prévoyait que le congé de reclassement reprenait son cours après la période de travail "sans excéder son terme initial", l'employeur peut désormais prévoir "un report du terme initial du congé à due concurrence des périodes de travail effectuées".
(1) Cass. soc., 2 mars 2004, n° 01-44.084, publié (N° Lexbase : A3996DBM) ; Les grands arrêts du droit du travail , D., 4ème éd., 2008, n° 113.
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Réf. : Circ. UNEDIC, n° 2013-11, du 1 juillet 2013, revalorisation au 1er juillet 2013 des allocations d'assurance chômage (N° Lexbase : L2795IXS)
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N7941BTB
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Le 11 Juillet 2013
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Réf. : CJUE, 4 juillet 2013, aff. C-312/11 N° Lexbase : A3980KIA
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N8031BTM
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Le 16 Juillet 2013
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Réf. : CA Basse-Terre, ch. soc., 10 juin 2013, n° 12/00467 (N° Lexbase : A5943KIX)
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N8020BT9
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Le 11 Juillet 2013
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Réf. : Décret n° 2013-579 du 3 juillet 2013, relatif aux dépenses du fonds de solidarité vieillesse concernant certaines périodes d'assurance du régime de retraite de Mayotte (N° Lexbase : L2958IXT)
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N8029BTK
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Le 11 Juillet 2013
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Réf. : Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU)
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N7813BTK
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par Gilles Auzero, Professeur à l'Université Montesquieu - Bordeaux IV
Le 12 Juillet 2013
Reprenant les stipulations de l'article 17 de l'ANI du 11 janvier 2013 (N° Lexbase : L9638IUI), l'article 23 de la loi, relative à la sécurisation de l'emploi vient atténuer les rigueurs du franchissement de ce seuil à deux égards. Ces dispositions s'ajoutent à d'autres ayant le même objet, qu'il s'agisse de l'exclusion de certains travailleurs du décompte des effectifs, de la prise en compte d'autres au prorata de leur temps de présence ou de travail ou encore de la règle selon laquelle le seuil doit être franchi pendant douze mois consécutifs ou non au cours des trois années précédentes.
I - Le délai pour tenir le premier tour des élections
L'article L. 2314-2 du Code du travail (N° Lexbase : L0738IXM), qui intéresse les délégués du personnel, dispose que "l'employeur informe tous les quatre ans le personnel par affichage de l'organisation des élections. Le document affiché précise la date envisagée pour le premier tour. Celui-ci doit se tenir, au plus tard, le quarante-cinquième jour suivant le jour de l'affichage, sous réserve qu'une périodicité différente n'ait pas été fixée par accord en application de l'article L. 2314-27 (N° Lexbase : L2650H9Z)".
L'article 23 de la loi du 14 juin 2013 ajoute un second alinéa à ce texte qui précise que "lorsque l'organisation de l'élection est consécutive au franchissement du seuil mentionné à l'article L. 2312-2 (N° Lexbase : L6231ISL), le premier tour se tient dans les quatre-vingt-dix jours suivant le jour de l'affichage". Une disposition similaire est introduite à l'article L. 2324-4 (N° Lexbase : L3771IBB) qui intéresse le comité d'entreprise.
En résumé, et dans l'évident souci de conférer plus de souplesse à l'employeur, le délai habituel de 45 jours pour organiser le premier tour des élections des délégués du personnel ou du comité d'entreprise est doublé lorsque celles-ci sont organisées pour la première fois.
II - Le délai pour satisfaire aux obligations d'information et de consultation du comité d'entreprise lors de sa mise en place
Si la modification évoquée précédemment n'est pas de nature à susciter, outre mesure, le débat, il n'en va pas de même de celle qui va être évoquée maintenant. La loi relative à la sécurisation de l'emploi vient ajouter un second alinéa à l'article L. 2322-2 du Code du travail (N° Lexbase : L0737IXL) (2), au terme duquel "l'employeur dispose d'un délai d'un an à compter du franchissement de ce seuil pour se conformer complètement aux obligations récurrentes d'information et de consultation du comité d'entreprise prévues au présent code, selon des modalités déterminées par décret en Conseil d'Etat".
On peut évidemment s'étonner que le législateur vienne ainsi priver les salariés, ne serait-ce que temporairement, de leur droit constitutionnel à la participation, même si, il est vrai, ce même législateur dénie le même droit aux salariés travaillant dans les entreprises dont l'effectif est inférieur à onze salariés.
En tout état de cause, la latitude ainsi donnée à l'employeur est bornée, d'une part, nous venons de le voir, dans le temps, mais aussi, d'autre part, quant aux informations et consultations en cause. Ne sont en effet visées que les obligations "récurrentes" d'information et de consultation du comité d'entreprise, auxquelles l'employeur n'est pas tenu de se conformer "complètement". L'emploi de cet adverbe est curieux, qui laisse entrevoir que l'employeur ne peut pas se dispenser totalement du respect de ses obligations. Mais quel est en ce cas la mesure à retenir ? La loi n'en dit rien. Peut-être cette mesure sera-t-elle fixée par le décret annoncé.
Quant aux obligations "récurrentes", elles paraissent s'opposer aux obligations ponctuelles, liées à un évènement particulier. A titre d'exemple, si, dans le délai d'un an, l'entreprise est cible d'une offre publique d'acquisition ou auteur d'une telle offre, l'employeur ne peut pas ne pas se conformer aux obligations d'information et de consultation prescrites par les articles L. 2323-21 (N° Lexbase : L2778H9R) et suivants du Code du travail. De même, l'employeur ne pourrait sans doute pas échapper à l'obligation de communiquer au comité, un mois après l'élection, la documentation économique et financière visée par l'article L. 2323-7 (N° Lexbase : L2737H9A). En revanche, durant sa première année de fonctionnement, le comité d'entreprise ne semble pas devoir être destinataire des documents comptables et financiers, dont le caractère "récurrent" paraît devoir être retenu. Cela étant, et sous réserve là encore des dispositions du décret, des contentieux pourraient surgir quant au fait de savoir ce qui est "récurrent" et ce qui ne l'est pas.
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Réf. : Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU)
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N7814BTL
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par Gilles Auzero, Professeur à l'Université Montesquieu - Bordeaux IV
Le 11 Juillet 2013
I - L'information du comité d'entreprise : la base de données économiques et sociales
Le comité d'entreprise est destinataire de deux types d'informations. Les unes, qui reviennent à intervalles réguliers, sont périodiques. Les autres, liées à la survenance d'un évènement particulier, sont ponctuelles. Les premières sont les plus nombreuses. On est même tenté de dire que, de ce point de vue, le comité d'entreprise "croule" sous les informations. A l'évidence, cela permet au comité d'avoir une vision précise de la situation de l'entreprise, mais aussi, lorsque cela est le cas, de la société dont dépend, juridiquement, la structure. Il n'est, cependant, pas certain, compte tenu de leur quantité, que ces informations soient toujours parfaitement maîtrisées et exploitées par leur destinataire. Sans alléger le volume des informations périodiques délivrées au comité d'entreprise, la loi du 14 juin 2013 simplifie, en revanche, les modalités de leur mise à disposition par la création d'une base de données économiques et sociales.
Destinataires. Ainsi que l'affirme l'alinéa 1er de l'article L. 2323-7-2, nouveau, du Code du travail (N° Lexbase : L0434IXD), "une base de données économiques et sociales, mise régulièrement à jour, rassemble un ensemble d'informations que l'employeur met à disposition du comité d'entreprise et, à défaut, des délégués du personnel". Si ces deux institutions représentatives du personnel sont, en quelque sorte, et de manière fort logique compte tenu de leurs attributions, les destinataires privilégiés de cette base de données, elles ne sont pas les seules à y avoir accès. En effet, l'alinéa deuxième du texte en cause dispose que la base de données est "accessible en permanence [...] aux membres du comité central d'entreprise, du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et aux délégués syndicaux".
En ouvrant l'accès à la base de données au CHSCT et aux délégués syndicaux, la loi du 14 juin 2013 apporte un progrès réel et indéniable puisque, faut-il le rappeler, seuls le comité d'entreprise et, dans une certaine mesure, les délégués du personnel étaient, jusqu'à cette date, en droit de recevoir les informations périodiques énumérées par le Code du travail. S'agissant de ces derniers, la loi ne leur ouvre l'accès à la base de données qu'"à défaut" de comité d'entreprise ; c'est-à-dire lorsque, une entreprise occupant plus de cinquante salariés, un comité n'a pas pu être mis en place . Pour le dire autrement, dans une entreprise dont l'effectif est inférieur à ce seuil, la mise en place d'une base de données n'est pas obligatoire (3).
On peut s'étonner du fait que l'article L. 2323-7-2, nouveau, ne vise que le comité d'entreprise et le comité central d'entreprise et pas les comités d'établissement. Est-ce à dire que ces derniers sont privés de l'accès à la base de données ? Une réponse négative doit certainement être apportée à cette question, ne serait-ce que parce que les comités d'établissement ont, en application de l'article L. 2327-15 du Code du travail (N° Lexbase : L9909H8I), "les mêmes attributions que les comités d'entreprise". Mais, ce même texte n'en précise pas moins que cette identité d'attributions est limitée par "les pouvoirs confiés aux chefs de ces établissements". Il peut, par suite, être inféré de cette disposition que si un comité d'établissement doit avoir accès à une base de données économiques et sociales, c'est à une base de données propre à l'établissement.
Support de la base de données. La loi, pas plus d'ailleurs que l'ANI, ne précisent le support matériel de la base de données. Il est, certes, indiqué que celle-ci est "mise régulièrement à jour" et qu'elle est "accessible en permanence" aux représentants du personnel concernés. On peut par suite penser que c'est la voie électronique qui doit être privilégiée pour la mise à disposition de la base de données. Mais la loi n'exclut pas le support papier, au demeurant pour le moins contraignant, puisque les documents doivent être mis à la disposition de tous les "membres" des institutions représentative du personnel.
Confidentialité. L'ensemble des représentants du personnel ayant accès à la base de données est tenu "à une obligation de discrétion à l'égard des informations contenues dans la base de données revêtant un caractère confidentiel et présentées comme telles par l'employeur" (C. trav., art. L. 2323-7-2, nouveau). On retrouve ici la formule de l'article L. 2325-5 du Code du travail (N° Lexbase : L9797H8D) et les récurrentes difficultés d'interprétation qu'il pose. On peut à cet égard penser qu'une obligation n'est pas confidentielle parce que l'employeur l'a présentée comme telle. S'il ne peut y avoir de confidentialité sans déclaration en ce sens de l'employeur (4), il faut, d'abord, que l'information soit, par son objet, objectivement et intrinsèquement, confidentielle (5). Cela étant, compte tenu de l'élargissement considérable des destinataires de l'information, il sera, en pratique, souvent très délicat, d'identifier l'auteur d'une éventuelle "fuite".
Contenu. L'article L. 2323-7-2, nouveau, du Code du travail fixe le contenu minimum de la base de données. Plus exactement, il énumère huit thèmes sur lesquels les informations figurant dans la base de données doivent porter. Il s'agit :
- des investissements. Investissement social (emploi, évolution et répartition des contrats précaires, des stages et des emplois à temps partiel, formation professionnelle et conditions de travail), investissement matériel et immatériel et, pour les entreprises mentionnées au sixième alinéa de l'article L. 225-102-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L5756ISY), les informations en matière environnementale présentées en application du cinquième alinéa du même article ;
- des fonds propres et endettement ;
- de l'ensemble des éléments de la rémunération des salariés et dirigeants ;
- des activités sociales et culturelles ;
- de la rémunération des financeurs ;
- des flux financiers à destination de l'entreprise, notamment aides publiques et crédits d'impôts ;
- de la sous-traitance ;
- le cas échéant, des transferts commerciaux et financiers entre les entités du groupe.
Si les thèmes sont fixés par la loi, le contenu des informations en relevant sera déterminé par un décret en Conseil d'Etat. La loi précise qu'il pourra varier selon que l'entreprise compte plus ou moins de trois cents salariés (6) et être enrichi par un accord de branche ou d'entreprise ou, le cas échéant, un accord de groupe, en fonction de l'organisation et du domaine d'activité de l'entreprise. Il est enfin précisé que ces informations portent sur les deux années précédentes et l'année en cours et intègrent des perspectives sur les trois années suivantes.
Dans l'attente du décret précité, dont l'importance est évidente, on peut d'ores et déjà considérer que cette base de données économiques et sociales est riche de potentialités. Sans doute, certaines des informations qui y figureront sont déjà délivrées au comité d'entreprise. On songe, notamment, ici aux documents comptables et financiers obligatoirement remis au comité en application de l'article L. 2323-8 du Code du travail (N° Lexbase : L2739H9C), qui retracent normalement les fonds propres et l'endettement ou encore la rémunération des financeurs. On peut, néanmoins, attendre de la base de données qu'elle fasse apparaître ces informations de façon plus claire.
Mais il faut surtout prendre acte du versant nécessairement prospectif de l'information, dont on a vu qu'elle doit "intégrer des perspectives sur les trois années suivantes". Sans doute ne faut-il pas trop attendre de simples "perspectives" qui, en aucune façon, ne renvoie à des décisions de l'employeur. Pour autant, cela est de nature à permettre au comité d'entreprise d'avoir une certaine vision de l'avenir.
Substitution. L'article L. 2323-7-3, nouveau, du Code du travail (N° Lexbase : L0436IXG) dispose, en son alinéa 1er, que "les éléments d'information contenus dans les rapports et informations transmis de manière récurrente au comité d'entreprise sont mis à la disposition de ses membres dans la base de données [...] et cette mise à disposition actualisée vaut communication des rapports et informations au comité d'entreprise, dans les conditions et limites fixées par un décret en Conseil d'Etat". L'alinéa second du même texte précise toutefois que "les consultations du comité d'entreprise pour des évènements ponctuels continuent de faire l'objet de l'envoi des rapports et informations".
Il y a là un élément de simplification notable, au moins sur le plan matériel. Cet article suscite néanmoins un certain nombre d'interrogations quant à sa mise en oeuvre. En premier lieu, et la difficulté est relative, il conviendra de soigneusement déterminer quels sont les rapports et informations transmis au comité "de manière récurrente". Sont ici visées les documents et informations transmis au comité de manière périodique, c'est-à-dire sans être liés à un évènement ponctuel. On songe, par exemple, aux informations trimestrielles et annuelles transmises au comité, que ce soit dans les entreprises de moins de trois cents salariés (C. trav., art. L. 2323-46 N° Lexbase : L3225IME à L. 2323-49) , ou celles employant trois cents salariés et plus (C. trav., art. L. 2323-50 N° Lexbase : L6296ISY à L. 2323-57). Sont sans doute aussi concernés les documents comptables et financiers visés par l'article L. 2323-8, évoqués précédemment et remis annuellement. Il faut à cet égard rappeler que, pour l'examen de ces documents, le comité peut se faire assister d'un expert-comptable (C. trav., art. L. 2325-35 N° Lexbase : L0655IXK). Le fait qu'ils figurent dans la base de données n'exclut évidemment pas qu'une telle prérogative puisse être exercée par le comité.
On peut, en revanche, hésiter pour certaines autres informations. Ainsi, la documentation économique et financière remise au comité d'entreprise un mois après chaque élection, en application de l'article L. 2323-7 (N° Lexbase : L2737H9A), peut-elle figurer dans la base de données ? On peut le penser étant observé que, si la délivrance de cette information est liée à un évènement particulier, elle n'en revêt pas moins une certaine récurrence. Plus généralement, compte tenu de la formulation compréhensive de l'alinéa 1er de l'article L. 2323-7-2 (N° Lexbase : L0434IXD), nouveau, peuvent figurer dans la base de données, les éléments d'information contenus dans les rapports et informations transmis de manière récurrente, que cette information soit accompagnée ou non de la consultation du comité d'entreprise.
En tout état de cause, l'article L. 2323-7-3 du Code du travail ne saurait avoir pour finalité d'amoindrir les informations transmises au comité. Partant, et sous réserves des dispositions du décret visé par ce texte, on peut recommander de faire apparaître dans la base de données le texte légal auquel chaque information se rapporte, afin d'éviter, autant que faire se peut, le contentieux.
Il reste à évoquer le second alinéa de l'article L. 2323-7-3, nouveau. Il ressort de celui-ci que, chaque fois que le comité d'entreprise est consulté sur un évènement "ponctuel", il doit recevoir communication des rapports et informations ad hoc, conformément d'ailleurs aux prescriptions générales de l'article L. 2323-4 (N° Lexbase : L0658IXN) qui, rappelons-le, dispose que "pour lui permettre de formuler un avis motivé, le comité d'entreprise dispose d'informations précises et écrites transmises par l'employeur [...]". Il convient toutefois de relever que l'alinéa 2nd de l'article L. 2323-7-3, nouveau, vise "ces" rapports et documents, ce qui renvoie nécessairement aux rapports et documents évoqués par l'alinéa 1er, c'est-à-dire à ceux qui sont transmis "de manière récurrente" au comité. Il nous semble qu'il y a là une certaine contradiction, car un document ne peut pas être lié à un évènement ponctuel, tout en état "récurrent".
Application dans le temps. La base de données économiques et sociales devra être mise en place dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi dans les entreprises de trois cents salariés et plus, et de deux ans dans les entreprises de moins de trois cents salariés.
Quant à l'article L. 2323-7-3, nouveau, il entrera en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d'Etat et, au plus tard, au 31 décembre 2016.
II - La consultation du comité d'entreprise
A - Les délais pour rendre les avis
Présentation. L'article L. 2323-3 du Code du travail (N° Lexbase : L0659IXP) dispose, dans ses deux premiers alinéas, d'un part, que "dans l'exercice de ses attributions consultatives, définies aux articles L. 2323-6 (N° Lexbase : L2734H97) à L. 2323-60 (N° Lexbase : L2882H9M), le comité d'entreprise émet des avis et voeux" et, d'autre part, que "l'employeur rend compte, en la motivant, de la suite donnée à ces avis et voeux". La loi du 14 juin 2013 vient ajouter trois alinéas à ce texte.
Tout d'abord, l'alinéa 3, nouveau, indique que le comité d'entreprise "dispose d'un délai d'examen suffisant" ; précision qui figurait jusqu'à présent à l'article suivant, duquel elle est supprimée. Ce sont donc les deux alinéas suivants qui doivent retenir l'attention.
L'alinéa 4, nouveau, de l'article L. 2323-3 dispose quant à lui que "sauf dispositions législatives spéciales, un accord entre l'employeur et le comité d'entreprise ou, le cas échéant, le comité central d'entreprise, adopté à la majorité des membres titulaires élus du comité, ou, à défaut d'accord, un décret en Conseil d'Etat fixe les délais dans lesquels les avis du comité d'entreprise sont rendus dans le cadre des consultations prévues aux articles L. 2323-6 à L. 2323-60, ainsi qu'aux articles L. 2281-12 (N° Lexbase : L2521H9A), L. 2323-72 (N° Lexbase : L2917H9W) et L. 3121-11 (N° Lexbase : L3752IBL). Ces délais, qui ne peuvent être inférieurs à quinze jours, doivent permettre au comité d'entreprise d'exercer utilement sa compétence, en fonction de la nature et de l'importance des questions qui lui sont soumises et, le cas échéant, de l'information et de la consultation du ou des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail".
Le changement est ici de taille et vise à éviter une dilatation excessive dans le temps de la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise. Cette disposition appelle plusieurs remarques.
La voie de la négociation. Prééminence est accordée à la négociation, pour fixer les délais dans lesquels le comité d'entreprise rend ses avis dans le cadre des consultations prévues par les textes visés par la loi. Plus précisément, un accord doit intervenir entre l'employeur et le comité d'entreprise ou, le cas échéant, le comité central d'entreprise, adopté à la majorité des membres titulaires élus du comité.
On doit s'étonner que la loi ne vise que le comité central d'entreprise et pas les comités d'établissement. Est-ce à dire que la voie de l'accord leur est fermée, auquel cas, lui sont seuls applicables les délais fixés par la voie réglementaire (v. infra) ? Ce serait pour le moins curieux. Faut-il alors considérer que l'accord conclu avec le comité central d'entreprise doit leur être appliqué ? Ce serait discutable car les comités d'établissement, qui sont dotés de prérogatives propres, sont tiers à l'accord en cause. A notre sens, et dans la mesure, où les comités d'établissement ont les mêmes attributions que les comités d'entreprise (C. trav., art. L. 2327-15 (7), ils sont en mesure, au même titre que ce dernier, de conclure de tels accords.
A défaut d'accord, les délais à respecter seront ceux fixés par un décret en Conseil d'Etat.
Le contenu de l'accord. L'accord fixe "les" délais dans lesquels sont rendus les avis. L'emploi du pluriel et l'usage du présent de l'indicatif qui a valeur impérative, démontre qu'il ne peut y avoir un délai unique pour toutes les consultations. Cela est confirmé par la précision selon laquelle "ces délais, qui ne peuvent être inférieurs à quinze jours, doivent permettre au comité d'entreprise d'exercer utilement sa compétence, en fonction de la nature et de l'importance des questions qui lui sont soumises et, le cas échéant, de l'information et de la consultation du ou des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail".
Ces exigences, applicables tant à l'accord qu'au décret futur, confirme que plusieurs délais maximums doivent être prévus, en fonction de l'objet de la consultation et de la nécessité que celle-ci produise un effet utile. Si cela peut sembler logique et nécessaire, ne faut-il pas craindre que le comité vienne contester les délais prévus par l'accord, en estimant qu'ils ne sont pas conformes aux exigences légales. On admettra que cela serait étrange, dans la mesure où c'est le comité lui-même qui a conclu l'accord. Il est vrai que ce comité peut être renouvelé et être, par suite, soumis à un accord conclu antérieurement. Mais, précisément, ne faut-il pas considérer qu'un nouvel accord doit être conclu avec le comité nouvellement mis en place ? Cette voie est délicate à emprunter car c'est l'institution qui est partie à l'accord et non ses membres, qui ont pu, éventuellement, changer. Afin d'éviter toute discussion, peut-être sera-t-il plus prudent de conclure des accords à durée déterminée.
Une présomption d'avis négatif. Il arrive en pratique qu'un comité d'entreprise refuse de rendre un avis, souhaitant ainsi bloquer la procédure d'information et de consultation et retarder, de ce fait, la mise en oeuvre de la décision de l'employeur (8). Cette situation ne sera plus de mise à l'avenir. En effet, le dernier alinéa de l'article L. 2323-3 du Code du travail dispose désormais qu'"à l'expiration de ces délais, ou du délai mentionné au dernier alinéa de l'article L. 2323-4, le comité est réputé avoir été consulté et avoir rendu un avis négatif".
Complément d'informations. Ainsi que nous l'avons rappelé précédemment, l'article L. 2323-4, alinéa 1er, du Code du travail précise que "pour lui permettre de formuler un avis motivé, le comité d'entreprise dispose d'informations précises et écrites transmises par l'employeur[...]" (9).
Il est rare que le Code du travail décrive précisément les informations nécessaires à la consultation du comité d'entreprise. Lorsque tel n'est pas le cas, la Cour de cassation considère que les juges du fond apprécient souverainement le caractère suffisant des informations transmises au comité avant la réunion (10), avec, à la clef, la possibilité d'ordonner la reprise de la procédure d'information et de consultation et la suspension, à titre conservatoire, de la mesure envisagée (11).
Le nouvel alinéa 2 de l'article L. 2323-4 dispose que "les membres élus du comité peuvent, s'ils estiment ne pas disposer d'éléments suffisants, saisir le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés, pour qu'il ordonne la communication par l'employeur des éléments manquants. Le juge statue dans un délai de huit jours". Toutefois, l'alinéa suivant (12), également introduit par la loi du 14 juin 2013, précise que "cette saisine n'a pas pour effet de prolonger le délai dont dispose le comité pour rendre son avis. Toutefois, en cas de difficultés particulières d'accès aux informations nécessaires à la formulation de l'avis motivé du comité d'entreprise, le juge peut décider la prolongation du délai prévu à l'article L. 2323-3".
Ces dispositions marquent bien la volonté du législateur d'éviter que la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise s'éternise de trop. La loi ne règle toutefois pas une question importante. Un comité ayant rendu son avis, sans demander un complément d'information au juge dans les délais prescrits, perd-il le droit de demander au juge d'ordonner la reprise de la procédure d'information et de consultation et la suspension de la mesure envisagée ?
B - La consultation sur les orientations stratégiques
Principe. La loi du 14 juin 2013 introduit dans le Code du travail un nouveau cas de consultation du comité d'entreprise (13), prévu par l'article L. 2323-7-1, nouveau : "chaque année, le comité d'entreprise est consulté sur les orientations stratégiques de l'entreprise, définies par l'organe chargé de l'administration ou de la surveillance de l'entreprise, et sur leurs conséquences sur l'activité, l'emploi, l'évolution des métiers et des compétences, l'organisation du travail, le recours à la sous-traitance, à l'intérim, à des contrats temporaires et à des stages" (al. 1er).
A cette occasion, "le comité émet un avis sur ces orientations et peut proposer des orientations alternatives. Cet avis est transmis à l'organe chargé de l'administration ou de la surveillance de l'entreprise, qui formule une réponse argumentée. Le comité en reçoit communication et peut y répondre" (al. 2).
Cette nouvelle hypothèse de consultation du comité d'entreprise doit certainement être rattachée aux "nouveaux droits collectifs en faveur de la participation des salariés". On peut effectivement y voir un progrès notable dès lors qu'elle permet au comité d'avoir une certaine prise sur l'avenir de l'entreprise, afin que les intérêts des salariés soient pris en compte au plus tôt ou, à tout le moins, qu'ils ne soient pas méconnus au moment où le futur de l'entreprise est engagé par les décisions des organes sociaux compétents. Le progrès n'est toutefois, à notre sens, qu'apparent. Il convient, en effet, de rappeler que le comité d'entreprise est, de longue date, en droit de participer aux conseils d'administration ou de surveillance des sociétés (C. trav., art. L. 2323-62 N° Lexbase : L2888H9T et s.). Or, le meilleur moyen d'être associé à la détermination des orientations stratégiques de l'entreprise ne réside-t-il pas dans le fait de siéger au sein même de l'organe social en charge d'arrêter les décisions y afférentes (14) ?
Modalités de la consultation. La base de données économiques et sociales évoquée précédemment constitue, selon l'alinéa 3, de l'article L. 2323-7-1, nouveau, "le support de la préparation de cette consultation". Sans doute conviendra-t-il de clairement identifier les documents à remettre au comité en vue de cette consultation. Compte tenu de l'objet de cette dernière, et de sa complexité, il faut saluer la possibilité reconnue par la loi au comité de se faire assister par un expert-comptable (15). Une nouveauté est toutefois introduite en la matière par la loi. Par dérogation à l'article L. 2325-40 (N° Lexbase : L9868H8Y), dont on sait qu'il précise que l'expert-comptable est rémunéré par l'employeur, le dernier alinéa de l'article L. 2323-7-1 (N° Lexbase : L0433IXC), nouveau, dispose que "sauf accord entre l'employeur et le comité d'entreprise, le comité contribue, sur son budget de fonctionnement, au financement de cette expertise à hauteur de 20 %, dans la limite du tiers de son budget annuel". Au-delà de cette limite, le coût de l'expertise devra être pris en charge par l'employeur. Le comité aura tout intérêt à prévoir le coût de l'expertise, étant observé que le fait qu'il ait utilisé la totalité de son budget de fonctionnement antérieurement semble exclure le recours à l'expertise.
C - La consultation sur l'utilisation du crédit d'impôt compétitivité emploi
Les sommes reçues par l'entreprise au titre du crédit d'impôt compétitivité emploi (16) et leur utilisation sont retracées dans la base de données économiques et sociales. Le comité d'entreprise est informé et consulté, avant le 1er juillet de chaque année, sur l'utilisation de ce crédit d'impôt par l'entreprise (C. trav., art. L. 2323-26-1 N° Lexbase : L0607IXR, nouveau).
Le législateur ne s'est cependant pas borné à prévoir la consultation du comité sur ce crédit d'impôt. Le comité est érigé en organe de contrôle de son utilisation, par l'effet d'un dispositif bâti sur le modèle de son droit d'alerte, qui se déroule donc en plusieurs étapes.
Etape 1 : lorsque le comité d'entreprise constate que tout ou partie du crédit d'impôt n'a pas été utilisé conformément à l'article 244 quater C du Code général des impôts (N° Lexbase : L9889IW8), il peut demander à l'employeur de lui fournir des explications. Cette demande est inscrite de droit à l'ordre du jour de la prochaine séance du comité d'entreprise (C. trav., art. L. 2323-26-2, nouveau, al. 1 et 2 N° Lexbase : L0608IXS).
Etape 2 : Si le comité d'entreprise n'a pu obtenir d'explications suffisantes de l'employeur ou si celles-ci confirment l'utilisation non conforme de ce crédit d'impôt, il établit un rapport. Ce rapport est transmis à l'employeur et au comité de suivi régional, crée par le IV de l'article 66 de la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 (N° Lexbase : L7970IUQ), qui adresse une synthèse annuelle au comité national de suivi (C. trav., art. L. 2323-26-2, nouveau, al. 3 et 4).
Etape 3 : Au vu de ce rapport, le comité d'entreprise peut décider, à la majorité des membres présents, de saisir de ses conclusions l'organe chargé de l'administration ou de la surveillance dans les sociétés ou personnes morales qui en sont dotées, ou d'en informer les associés dans les autres formes de sociétés ou les membres dans les groupements d'intérêt économique.
Dans les sociétés dotées d'un conseil d'administration ou d'un conseil de surveillance, la demande d'explication sur l'utilisation du crédit d'impôt est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance du conseil d'administration ou du conseil de surveillance, à condition que celui-ci ait pu être saisi au moins quinze jours à l'avance. La réponse de l'employeur est motivée et adressée au comité d'entreprise (17).
D - Délai de l'expertise
Si le Code du travail autorise, de longue date, le comité d'entreprise à faire appel à des experts, qu'ils soient rémunérés par l'employeur, le comité d'entreprise ou, désormais, les deux, il n'avait pas enserré la mission de l'expert dans des délais maximums ; ce qui, là encore, pouvait entraîner un allongement excessif des procédures d'information et de consultation.
Cette lacune est comblée par la loi du 14 juin 2013. Le nouvel article L. 2325-42-1 (N° Lexbase : L0606IXQ) dispose désormais, en son alinéa 1er, que "l'expert-comptable ou l'expert technique mentionnés à la présente section remettent leur rapport dans un délai raisonnable fixé par un accord entre l'employeur et le comité d'entreprise ou, à défaut d'accord, par décret en Conseil d'Etat. Ce délai ne peut être prorogé que par commun accord". Ce délai ne devra pas être trop bref car, en application de second alinéa du même texte, "l'accord ou, à défaut, le décret mentionné au premier alinéa détermine, au sein du délai prévu au même alinéa, le délai dans lequel l'expert désigné par le comité d'entreprise peut demander à l'employeur toutes les informations qu'il juge nécessaires à la réalisation de sa mission et le délai de réponse de l'employeur à cette demande".
On peut relever que, de manière collatérale, l'alinéa 1er de l'article L. 2325-42-1, nouveau, consacre le fait que l'expert doit remettre un rapport au comité. Sans doute un tel rapport était-il en pratique remis au comité dans la grande majorité des cas. Mais, jusqu'à la loi en cause, aucun texte légal n'en faisait mention explicitement.
III - L'instance de coordination des CHSCT
En application de l'article L. 4611-1 du Code du travail (N° Lexbase : L6276ISA), un CHSCT doit être mis en place dans tout établissement de cinquante salariés et plus. Toutefois, plusieurs CHSCT peuvent être constitués dans un même établissement lorsque celui-ci occupe habituellement plus de cinq cents salariés (C. trav., art. L. 4613-4 N° Lexbase : L6256ISI). En outre, alors même que l'établissement n'atteint pas ce seuil, plusieurs CHSCT peuvent également y être créés s'il comporte des secteurs d'activités différents (18). En résumé, dans une entreprise à structure complexe peuvent coexister une pluralité de CHSCT aux attributions et prérogatives propres. Il en résulte que tous ces CHSCT peuvent avoir recours à un expert, dans les conditions prévues par l'article L. 4614-12 (N° Lexbase : L1819H9A), dès lors qu'ils sont affectés par un projet commun à plusieurs établissements ou secteurs d'activités.
Outre que l'exercice de cette prérogative par tous les CHSCT multiplie les coûts pour l'employeur, on peut s'interroger sur l'utilité d'une pluralité d'expertises portant sur un même projet, même si la situation de chaque établissement ou secteur d'activité peut, éventuellement, la justifier. Elle est enfin de nature à ralentir la procédure de consultation de ces institutions.
Conscient de ces difficultés, depuis longtemps dénoncées en pratique, le législateur a décidé d'y remédier, à l'invitation des partenaires sociaux eux-mêmes, à tout le moins ceux qui ont signé l'ANI de janvier 2013 (N° Lexbase : L9638IUI). Un nouvel article L. 4616-1 (N° Lexbase : L0611IXW) dispose ainsi que "lorsque les consultations prévues aux articles L. 4612-8 (N° Lexbase : L1754H9T), L. 4612-9 (N° Lexbase : L1756H9W), L. 4612-10 (N° Lexbase : L1758H9Y) et L. 4612-13 (N° Lexbase : L1766H9B) portent sur un projet commun à plusieurs établissements, l'employeur peut mettre en place une instance temporaire de coordination de leurs comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, qui a pour mission d'organiser le recours à une expertise unique par un expert agréé dans les conditions prévues au 2° de l'article L. 4614-12 et à l'article L. 4614-13 (N° Lexbase : L0722IXZ), et qui peut rendre un avis au titre des articles L. 4612-8, L. 4612-9, L. 4612-10 et L. 4612-13".
L'article L. 4616-2, nouveau, du Code du travail (N° Lexbase : L0612IXX) détermine la composition de cette instance de coordination (19). L'expert est désigné lors de la première réunion de l'instance. Il remet son rapport et l'instance se prononce, le cas échéant, dans les délais prévus par un décret en Conseil d'Etat. A l'expiration de ces délais, l'instance de coordination est réputée avoir été consultée (C. trav., art. L. 4616-3, nouveau, al. 1 et 2 N° Lexbase : L0613IXY). Cette disposition suscite une interrogation. Alors que l'article L. 4616-2, nouveau, ne confère à l'instance de coordination que la mission "d'organiser le recours à une expertise unique", l'article L. 4616-3, nouveau, lui attribue le droit d'être consulté.
En tout état de cause, et le dernier alinéa de l'article L. 4616-3, nouveau, le confirme, cette consultation ne saurait se substituer à celle des CHSCT concernés. Ce texte dispose, en effet, que "le rapport de l'expert et, le cas échéant, l'avis de l'instance de coordination sont transmis par l'employeur aux comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail concernés par le projet ayant justifié la mise en place de l'instance de coordination, qui rendent leurs avis" (20).
Il convient enfin de noter que l'article L. 4616-5 (N° Lexbase : L0615IX3), nouveau, permet à un accord d'entreprise de prévoir des modalités particulières de composition et de fonctionnement de l'instance de coordination, notamment si un nombre important de CHSCT sont concernés. Même si elle est ici résiduelle, la loi ménage à nouveau une place à la négociation.
(1) V. en ce sens, A. Martinon, L'information et la consultation des représentants du personnel : nouveaux droits ou nouveau partage de responsabilités, JCP éd. S, 2013, 1263.
(2) Ce qui signifie qu'un PV de carence a été établi.
(3) Rien n'interdit évidemment qu'une convention collective le prévoie ou que l'employeur le décide de son propre chef. De même, dans une entreprise dotée d'un comité, il est tout à fait possible, selon les mêmes modalités, d'autoriser les délégués du personnel à accéder à la base de données.
(4) Sous réserve des informations que la loi répute confidentielles (C. trav., art. L. 2323-10 N° Lexbase : L2746H9L et L. 2323-82 N° Lexbase : L2946H9Y).
(5) V., sur la question, l'article précédent d'A. Martinon, § 6 et la jurisprudence des juges du fond citée.
(6) Il faut certainement comprendre que le pouvoir exécutif pourra prendre en compte cet état de fait.
(7) Ce texte n'en précise pas moins que cette identité dans les attributions est bornée par les pouvoirs confiés aux chefs de ces établissements. Cela confirme la nécessité de conclure des accords propres à chaque établissement et l'impossibilité de leur appliquer un accord conclu avec le comité central d'entreprise.
(8) Attitude dilatoire que l'employeur peut néanmoins contourner en mettant en oeuvre sa décision nonobstant l'absence d'avis du comité, dès lors, évidemment, qu'il a respecté, en amont, toutes ses obligations vis-à-vis de lui.
(9) Ces informations pourront figurer dans la base de données économiques et sociales, ce qui exclut, nous l'avons vu, que l'employeur les transmette à nouveau au comité en vue de la consultation. On peut toutefois se demander si celui-ci n'aura pas intérêt, antérieurement à celle-ci, à préciser les informations de la base de données concernées par la consultation.
(10) Cass. soc., 25 juin 2003, n° 01-02.990, publié (N° Lexbase : A0556A4D), Bull. civ. V, n° 210.
(11) Cass. soc., 25 juin 2002, n° 00-20.939, publié (N° Lexbase : A0106AZX), Bull. civ. V, n° 217.
(12) C'est-à-dire, désormais, le dernier alinéa de l'article L. 2323-4.
(13) Un de plus est-on tenté de dire.
(14) Rappelons qu'en application de l'article L. 225-35 du Code de commerce (N° Lexbase : L5906AIL), "le conseil d'administration détermine les orientations de l'activité de la société et veille à leur mise en oeuvre". On admettra que c'est l'activité de la "société" qui est ici en cause et non les orientations stratégiques de l'entreprise. Mais comment distinguer les deux ?
(15) Possibilité de recours à l'expert-comptable qui ne se substitue pas aux autres expertises. Prévue par l'article L. 2323-7-1 (N° Lexbase : L0433IXC), nouveau, ce cas de recours à l'expertise est également mentionné désormais dans l'article L. 2325-35.
(16) Crédit d'impôt prévu par l'article 244 quater C du CGI.
(17) Dans les autres formes de sociétés ou dans les groupements d'intérêt économique, lorsque le comité d'entreprise a décidé d'informer les associés ou les membres de l'utilisation du crédit d'impôt, le gérant ou les administrateurs leur communiquent le rapport du comité d'entreprise. Dans les autres personnes morales, le présent article s'applique à l'organe chargé de l'administration ou de la surveillance. Il est curieux que l'information soit, dans certains cas, destinée aux organes sociaux et, dans d'autres, aux associés.
(18) V. sur la question, J. Pélissier, G. Auzero, E. Dockès, Droit du travail, Précis Dalloz, 27ème édition, 2013, n° 862.
(19) Outre des représentants de chaque CHSCT concerné par le projet, l'instance comprend diverses personnalités, tel le médecin du travail ou encore l'inspecteur du travail.
(20) Texte qui laisse entendre que l'instance de coordination ne rend pas systématiquement un avis. On peut toutefois considérer que la formule, "le cas échéant" renvoie au cas dans lequel l'instance a effectivement formulé un avis avant l'expiration du délai imparti. Par suite, la consultation paraît devoir être systématique.
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Réf. : Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU)
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N7974BTI
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par Grégory Singer, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo - édition sociale
Le 12 Juillet 2013
Il est également prévu que pour les sociétés en commandite par action (C. com., art. L. 226-5-1 N° Lexbase : L0621IXB), les salariés sont représentés au sein du conseil de surveillance dans les conditions prévues pour les sociétés anonymes avec un directoire et un conseil de surveillance.
L'article 9 de la loi reprend assez fidèlement la base de l'article 13 de l'Accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l'emploi et des parcours professionnels des salariés (N° Lexbase : L9638IUI) (1). Il développe certains points notamment les modalités de désignation des représentants des salariés.
Les entreprises, concernées par ce dispositif, emploient donc, à la clôture de deux exercices successifs, au moins 5 000 salariés permanents dans la société et ses filiales, directes ou indirectes, dont le siège social est fixé sur le territoire français, ou au moins 10 000 salariés permanents dans la société et ses filiales, directes ou indirectes, dont le siège social est fixé sur le territoire français et à l'étranger. Les entreprises doivent avoir pour obligation de mettre en place un comité d'entreprise en application de l'article L. 2322-1 du Code du travail. Une société n'est pas soumise à cette obligation dès lors qu'elle est la filiale, directe ou indirecte, d'une société elle-même soumise à cette obligation.
Il est à noter que les sociétés répondant aux critères énoncés précédemment et dont le conseil d'administration comprend un ou plusieurs membres désignés en application de l'article L. 225-27 (N° Lexbase : L5898AIB) ou de l'article L. 225-79 (N° Lexbase : L5950AI9) du Code de commerce, de l'article 5 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983, relative à la démocratisation du secteur public (N° Lexbase : L6981AGN) ou de l'article 8-1 de la loi n° 86-912 du 6 août 1986, relative aux modalités des privatisations (N° Lexbase : L7086AZH), ainsi que leurs filiales directes ou indirectes, ne sont pas soumises à l'obligation dès lors que le nombre de ces administrateurs est au moins égal au nombre instauré par la loi de sécurisation de l'emploi pour les entreprise visées précédemment. La loi précise ainsi l'articulation des nouvelles dispositions avec les dispositifs déjà existants mais bien souvent facultatifs permettant d'assurer la présence de représentants des salariés au sein des conseils d'administration.
Election ou désignation des représentants. Le nombre des administrateurs représentant les salariés est au moins égal à deux dans les sociétés dont le nombre d'administrateurs est supérieur à douze et au moins à un s'il est égal ou inférieur à douze. Les administrateurs représentant les salariés ne sont pas pris en compte pour la détermination du nombre minimal et du nombre maximal d'administrateurs prévus à l'article L. 225-17 (N° Lexbase : L3630IP7) (2), ni pour l'application du premier alinéa de l'article L. 225-18-1 (N° Lexbase : L0420IXT) (3). Il en va de même pour les membres du conseil de surveillance représentant les salariés (C. com., art. L. 225-69 N° Lexbase : L3635IPC et 225-69-1 N° Lexbase : L3595IPT).
Dans les six mois suivant la clôture du second des deux exercices, après avis, selon le cas, du comité de groupe, du comité central d'entreprise ou du comité d'entreprise, l'assemblée générale extraordinaire procède à la modification des statuts pour déterminer les conditions dans lesquelles sont désignés les administrateurs représentant les salariés ou les membres du conseil de surveillance représentant les salariés.
Elle peut décider l'organisation d'une élection auprès des salariés de la société et de ses filiales, directes ou indirectes, dont le siège social est fixé sur le territoire français dans les conditions fixées à l'article L. 225-28 (N° Lexbase : L0740IXP).
Peut être mise en place la désignation, selon le cas, par le comité de groupe prévu à l'article L. 2331-1 du Code du travail (N° Lexbase : L9924H83), le comité central d'entreprise ou le comité d'entreprise de la société.
La désignation peut être également effectuée par l'organisation syndicale ayant obtenu le plus de suffrages au premier tour des élections mentionnées aux articles L. 2122-1 (N° Lexbase : L3823IB9) et L. 2122-4 (N° Lexbase : L3798IBB) du Code du travail dans la société et ses filiales, directes ou indirectes, dont le siège social est fixé sur le territoire français lorsqu'un seul administrateur est à désigner, ou par chacune des deux organisations syndicales ayant obtenu le plus de suffrages au premier tour de ces élections lorsque deux administrateurs sont à désigner.
Enfin, lorsqu'au moins deux administrateurs sont à désigner, la désignation de l'un des administrateurs selon l'une des modalités énoncées précédemment et de l'autre par le comité d'entreprise européen, s'il existe, ou, pour les sociétés européennes au sens de l'article L. 2351-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0062H98), par l'organe de représentation des salariés mentionné à l'article L. 2352-16 du même code (N° Lexbase : L0103H9P) ou, à défaut, par le comité de la société européenne mentionné à l'article L. 2353-1 (N° Lexbase : L0108H9U) dudit code.
L'élection ou la désignation intervient dans les six mois suivant la modification des statuts.
Si l'assemblée générale extraordinaire ne s'est pas réunie dans les six mois de la clôture du second exercice, tout salarié peut demander au président du tribunal statuant en référé d'enjoindre sous astreinte au conseil d'administration ou au directoire de convoquer une assemblée générale extraordinaire et de soumettre à celle-ci les projets de résolution tendant à modifier les statuts. A défaut de modification des statuts à l'issue de ce même délai de six mois, les administrateurs ou les membres du conseil de surveillance représentant les salariés sont désignés par la voie de l'élection dans les six mois suivant l'expiration du même délai. Tout salarié peut demander au président du tribunal statuant en référé d'enjoindre sous astreinte à la société d'organiser l'élection.
Les administrateurs élus par les salariés ou désignés doivent être titulaires d'un contrat de travail avec la société ou l'une de ses filiales directes ou indirectes dont le siège social est fixé sur le territoire français antérieur de deux années au moins à leur nomination et correspondant à un emploi effectif. Toutefois, la condition d'ancienneté n'est pas requise lorsque au jour de la nomination la société est constituée depuis moins de deux ans. Tous les salariés de la société et le cas échéant de ses filiales directes ou indirectes, dont le siège social est fixé sur le territoire français dont le contrat de travail est antérieur de trois mois à la date de l'élection sont électeurs. Le vote est secret.
Lorsqu'il est fait application de l'article L. 225-27-1 du Code de commerce, les candidats ou listes de candidats sont présentés par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives. Lorsqu'il y a un seul siège à pourvoir pour l'ensemble du corps électoral, l'élection a lieu au scrutin majoritaire à deux tours. Lorsqu'il y a un seul siège à pourvoir dans un collège électoral, l'élection a lieu au scrutin majoritaire à deux tours dans ce collège. Chaque candidature doit comporter, outre le nom du candidat, celui de son remplaçant éventuel. Est déclaré élu le candidat ayant obtenu au premier tour la majorité absolue des suffrages exprimés, au second tour la majorité relative. Il est important de souligner que le candidat et son remplaçant sont de sexe différent.
Dans les autres cas, l'élection a lieu au scrutin de liste à la représentation proportionnelle au plus fort reste et sans panachage. Chaque liste doit comporter un nombre de candidats double de celui des sièges à pourvoir et être composée alternativement d'un candidat de chaque sexe. Sur chacune des listes, l'écart entre le nombre des candidats de chaque sexe ne peut être supérieur à un. En cas d'égalité des voix, les candidats dont le contrat de travail est le plus ancien sont déclarés élus.
La durée du mandat d'administrateur élu par les salariés ou désigné en application de l'article L. 225-27-1 est déterminée par les statuts, sans pouvoir excéder six ans. Le mandat est renouvelable, sauf stipulation contraire des statuts.
La loi de sécurisation de l'emploi prévoit également l'articulation du mandat d'administrateur avec d'autres mandats. Le cumul est ainsi interdit. L'article L. 225-30 (N° Lexbase : L0664IXU) énonce que le mandat d'administrateur élu par les salariés ou désigné est incompatible avec tout mandat de délégué syndical, de membre du comité d'entreprise, de membre du comité de groupe, de délégué du personnel ou de membre du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la société. Il est également incompatible avec tout mandat de membre d'un comité d'entreprise européen, s'il existe, ou, pour les sociétés européennes, de membre de l'organe de représentation des salariés mentionné ou de membre d'un comité de la société européenne. L'administrateur qui, lors de son élection ou de sa désignation est titulaire d'un ou de plusieurs de ces mandats doit s'en démettre dans les huit jours. A défaut, il est réputé démissionnaire de son mandat d'administrateur.
Exercice du mandat. Les administrateurs élus par les salariés ou désignés disposent du temps nécessaire pour exercer utilement leur mandat, dans les conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Ils bénéficient également à leur demande d'une formation adaptée à l'exercice de leur mandat, à la charge de la société, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Il est à souligner que ce temps de formation n'est pas imputable sur le crédit d'heures.
Ils ne perdent pas le bénéfice de leur contrat de travail. Leur rémunération en tant que salariés ne peut être réduite du fait de l'exercice de leur mandat. La rupture du contrat de travail met fin au mandat de l'administrateur élu par les salariés ou désigné. Ils peuvent être révoqués que pour faute dans l'exercice de leur mandat, par décision du président du tribunal de grande instance, rendue en la forme des référés, à la demande de la majorité des membres de l'instance.
Il est important de souligner que, selon l'article L. 225-80 (N° Lexbase : L0672IX8), les conditions relatives à l'éligibilité, à l'électorat, à la composition des collèges, aux modalités du scrutin, aux contestations, à la durée et aux conditions d'exercice du mandat, à la révocation, à la protection du contrat de travail et au remplacement des membres du conseil de surveillance élus par les salariés ou désignés en application de l'article L. 225-79-2 sont fixées selon les modalités précédemment énoncées pour les administrateurs.
Les représentants des salariés au conseil d'administration ou de surveillance ainsi que les représentants des salariés participant à l'assemblée générale ou aux assemblées de section ou de branche bénéficient de la protection instituée à l'article L. 2411-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0667IXY). Dans le prolongement, le licenciement d'un représentant des salariés au conseil d'administration ou de surveillance des entreprises du secteur public, des sociétés anonymes et des sociétés en commandite par actions ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail (C. trav., art. L. 2411-17 N° Lexbase : L0674IXA). Le licenciement est également soumis pour avis au conseil d'administration ou de surveillance dont il est membre. Enfin, selon l'article L. 2435-1 (N° Lexbase : L0676IXC), le fait de licencier un représentant des salariés au conseil d'administration ou de surveillance d'une entreprise du secteur public, d'une société anonyme ou d'une société en commandite par actions, en méconnaissance des dispositions relatives à la procédure d'autorisation administrative prévues par le présent livre, est puni d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 3 750 euros.
Bilan. Avant le 30 juin 2015, le Gouvernement remet au Parlement un rapport portant sur le bilan de la mise en oeuvre de l'obligation de représentation des salariés au conseil d'administration ou de surveillance et formulant des propositions en vue de son extension, s'agissant notamment du nombre de représentants des salariés, du champ des entreprises concernées, de l'application de cette obligation aux filiales et de la participation des représentants des salariés aux différents comités du conseil d'administration ou de surveillance.
(1) V. les obs. de G. Auzero, Commentaire des articles 12 à 17 (Titre II) de l'Accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l'emploi et des parcours professionnels des salariés, Lexbase Hebdo n° 514 du 31 janvier 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N5518BTK).
(2) La société anonyme est administrée par un conseil d'administration composé de trois membres au moins. Les statuts fixent le nombre maximum des membres du conseil, qui ne peut dépasser dix-huit.
(3) "La proportion des administrateurs de chaque sexe ne peut être inférieure à 40 % dans les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé et, à l'issue de la plus prochaine assemblée générale ayant à statuer sur des nominations, dans les sociétés qui, pour le troisième exercice consécutif, emploient un nombre moyen d'au moins cinq cents salariés permanents et présentent un montant net de chiffre d'affaires ou un total de bilan d'au moins 50 millions d'euros. Dans ces mêmes sociétés, lorsque le conseil d'administration est composé au plus de huit membres, l'écart entre le nombre des administrateurs de chaque sexe ne peut être supérieur à deux".
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Réf. : Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU)
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N7992BT8
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par Grégory Singer, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo - édition sociale
Le 11 Juillet 2013
GPEC et orientations stratégiques. L'ancien article L. 2242-15 du Code du travail (N° Lexbase : L6297ISZ) prévoyait une négociation triennale sur "les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise sur la stratégie de l'entreprise ainsi que ses effets prévisibles sur l'emploi et sur les salaires" puis une négociation sur la mise en place d'un dispositif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Désormais, l'article L. 2242-15 (N° Lexbase : L0686IXP) est modifié et son 1° est supprimé. L'employeur doit désormais engager "tous les trois ans, notamment sur le fondement des orientations stratégiques de l'entreprise et de leurs conséquences mentionnées à l'article L. 2323-7-1(N° Lexbase : L0433IXC)", une négociation sur la mise en place d'un dispositif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Ainsi, la négociation triennale est orientée directement sur la GPEC sur la base notamment des orientations stratégiques de l'entreprise "et sur leurs conséquences sur l'activité, l'emploi, l'évolution des métiers et des compétences, l'organisation du travail, le recours à la sous-traitance, à l'intérim, à des contrats temporaires et à des stages" (2). Cette négociation doit aussi porter sur les mesures d'accompagnement susceptibles d'être associées à la GPEC, en particulier en matière de formation, de validation des acquis de l'expérience, de bilan de compétences ainsi que d'accompagnement de la mobilité professionnelle et géographique des salariés autres que celles prévues dans le cadre des articles L. 2242-21 (N° Lexbase : L0635IXS) et L. 2242-22 (N° Lexbase : L0636IXT). Par cette dernière précision, la loi prévoit l'articulation de la négociation triennale avec les nouvelles dispositions mettant en place la mobilité interne (3). L'article L. 2242-15 prévoit ainsi une négociation, "le cas échéant, les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise prévue à l'article L. 2242-21, qui doivent, en cas d'accord, faire l'objet d'un chapitre spécifique".
Négociation triennale et formation professionnelle. La loi prévoit également des nouveaux thèmes de négociation. L'employeur devra engager, tous les trois ans, une négociation sur les grandes orientations à trois ans de la formation professionnelle dans l'entreprise et les objectifs du plan de formation, en particulier les catégories de salariés et d'emplois auxquels ce dernier est consacré en priorité et les compétences et qualifications à acquérir pour les trois années de validité de l'accord. Cette négociation, entamée par l'employeur, devra être coordonnée avec les orientations de la formation professionnelle dans l'entreprise soumise au comité d'entreprise. La loi de sécurisation de l'emploi modifie l'article L. 2323-33 (N° Lexbase : L0688IXR) traitant de cette question et précise que chaque année, le comité d'entreprise est consulté sur les orientations de la formation professionnelle dans l'entreprise en fonction des perspectives économiques et de l'évolution de l'emploi, des investissements et des technologies dans l'entreprise. Ces orientations sont établies en cohérence avec le contenu de l'accord issu, le cas échéant, de la négociation mentionnée à l'article L. 2242-15, notamment avec les grandes orientations sur trois ans de la formation professionnelle dans l'entreprise qu'il a arrêtées. Le projet de plan de formation tient ainsi compte des orientations de la formation professionnelle dans l'entreprise dont le comité d'entreprise a eu à délibérer, des grandes orientations à trois ans de la formation professionnelle dans l'entreprise et des objectifs du plan de formation arrêtés, le cas échéant, par l'accord issu de la négociation prévue à l'article L. 2242-15.
Les nouveaux thèmes de négociation. Par ailleurs, la négociation triennale devra également porter sur les perspectives de recours par l'employeur aux différents contrats de travail, au travail à temps partiel et aux stages, ainsi que les moyens mis en oeuvre pour diminuer le recours aux emplois précaires dans l'entreprise au profit des contrats à durée indéterminée.
La loi renforce aussi les conditions dans lesquelles les entreprises sous-traitantes sont informées des orientations stratégiques de l'entreprise ayant un effet sur leurs métiers, l'emploi et les compétences, ces mêmes entreprises sous-traitantes pouvant être associées au dispositif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences de l'entreprise (C. trav., art. L. 2242-16 N° Lexbase : L0687IXQ).
Enfin, l'employeur pourra négocier sur les conditions dans lesquelles son entreprise participe aux actions de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences mises en oeuvre à l'échelle des territoires où elle est implantée. Ce dernier thème de négociation semble vouloir développer la mise en place d'une GPEC territoriale plus efficace en lien avec les bassins d'emplois.
A l'échéance de l'accord sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, un bilan devra être réalisé (C. trav., art. L. 2242-15).
(1) V. les obs. de G. Auzero, Commentaire des articles 12 à 17 (Titre II) de l'Accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l'emploi et des parcours professionnels des salariés, Lexbase Hebdo n° 514 du 31 janvier 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N5518BTK).
(2) Sur cette question, v. les obs. de G. Auzero, Commentaire de l'article 8 de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi sur le comité d'entreprise et CHSCT : des droits nouveaux, mais aussi des contraintes nouvelles, Lexbase Hebdo n° 535 du 11 juillet 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N7814BTL).
(3) V. les obs. de Ch. Radé, Commentaire de l'article 15 de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi, sur la mobilité interne, Lexbase Hebdo n° 535 du 11 juillet 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N7811BTH).
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Réf. : Cass. soc., 3 juillet 2013, n° 12-14.429, FS-P+B (N° Lexbase : A5489KI7)
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N8037BTT
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Le 11 Juillet 2013
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Réf. : Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU)
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N7934BTZ
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par Sébastien Tournaux, Professeur à l'Université des Antilles et de la Guyane
Le 11 Juillet 2013
I - L'aménagement de la procédure de licenciement collectif
L'article 18 de la loi du 14 juin 2013 modifie un certain nombre de dispositions du Code du travail relatives au licenciement pour motif économique avec pour volonté de "renforcer l'encadrement des licenciements collectifs et instaurer une obligation de recherche de repreneur en cas de fermeture de site".
L'objet principal de cet article tient à renforcer l'attrait des anciens accords de méthode qui permettent d'anticiper et d'aménager la procédure de licenciement pour motif économique collectif (1).
A cet effet, un nouvel article L. 1233-24-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0630IXM) prévoit la possibilité, dans les entreprises de cinquante salariés et plus, de conclure un accord collectif qui déterminera "le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi [...] ainsi que les modalités de consultation du comité d'entreprise et de mise en oeuvre des licenciements". Comme pour les accords de maintien de l'emploi, une véritable majorité d'engagement est exigée des syndicats signataires qui devront avoir recueilli au moins 50 % des suffrages aux dernières élections des représentants du personnel pour valablement conclure l'accord. Les organisations syndicales pourront bénéficier, à l'initiative du comité d'entreprise, de l'analyse d'un expert-comptable (2). Cette mesure fait écho au droit du comité d'entreprise de bénéficier de cette expertise dans le cadre de la consultation traditionnelle en cas de projet de licenciement pour motif économique.
La liste non exhaustive des mesures qui peuvent être envisagées par cet accord est établie par l'article L. 1233-24-2 du Code du travail(N° Lexbase : L0631IXN). Pour l'essentiel, cela concernera le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise, les critères d'ordre de licenciement et leur pondération, le calendrier des licenciements, le nombre de suppression d'emploi et les catégories professionnelles concernées ou, encore, les modalités de reclassement, d'adaptation ou de formation des salariés concernés. L'article L. 1233-24-3 (N° Lexbase : L0632IXP) établit une liste, limitative cette fois, de mesures auxquelles il est interdit de déroger par cet accord : obligation d'adaptation, de formation et de reclassement ; règles générales relatives à la consultation du comité d'entreprise et obligation d'information des représentants du personnel ; obligation de proposer la conclusion au salarié d'un contrat de sécurisation professionnelle ; règles spécifiques au cas de redressement ou de liquidation judiciaires.
Comme l'accord avant elle, la loi autorise faute d'accord que ce dispositif soit établi par un document unilatéral de l'employeur ce qui, pour certains aspects, constitue un changement fondamental. En effet, si l'employeur avait déjà unilatéralement le pouvoir d'établir le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi ou les critères de l'ordre des licenciements, il n'était jusqu'ici pas autorisé à aménager seul les règles relatives à la consultation des représentants du personnel.
II - Rationalisation des délais de procédure
L'accord du 11 janvier 2013 (N° Lexbase : L9638IUI) avait pour ambition de réduire les durées excessives des procédures de licenciement collectif en posant des délais préfix maximaux que la procédure ne devait pas excéder (3). Le respect de ces délais dans lesquels l'intégralité de la procédure devait être effectuée paraissait peu réaliste, mais la mesure était guidée par une volonté d'endiguement de certaines manoeuvres dilatoires qui retardaient artificiellement l'aboutissement de la procédure. Cette idée est reprise par l'insertion d'un avant-dernier alinéa à l'article L. 1233-30 du Code du travail (N° Lexbase : L0709IXK). Cet article fixe des délais maximums qui peuvent séparer les réunions du comité d'entreprise en cas de projet de licenciement collectif, délai variant selon le nombre de licenciement en cause (4). Désormais, "en l'absence d'avis du comité d'entreprise dans ces délais, celui-ci est réputé avoir été consulté", ce qui devrait dissuader les membres du comité d'entreprise de jouer au jeu de la politique de la "chaise vide".
Dans le même ordre d'idée de rationalisation des durées de procédure, l'article L. 1233-35 du Code du travail (N° Lexbase : L1176H9G), dans sa nouvelle rédaction, détermine des délais de communication entre l'expert-comptable mandaté par le comité d'entreprise et l'employeur afin que les demandes d'informations complémentaires interviennent dans des délais raisonnables mais, aussi, que la communication des pièces demandées ait lieu rapidement. La même raison guide l'article L. 1233-45-1 (N° Lexbase : L0634IXR) qui permet désormais, après avis du comité d'entreprise, à l'employeur de proposer des mesures de reclassement interne avant l'écoulement des délais minimums qui doivent séparer les réunions du comité d'entreprise par l'effet de l'article L. 1233-30. Même si cela n'aura, probablement, pas d'importantes conséquences, la place de ce nouveau texte est curieuse puisqu'elle vient s'insérer à la suite des dispositions relatives à la priorité de réembauche alors qu'on aurait pu l'attendre après l'article L. 1233-4 (N° Lexbase : L3135IM3), relatif à l'obligation de reclassement mise à la charge de l'employeur.
III - Le rôle accru de l'administration du travail
D'une manière générale, le rôle de l'administration du travail demeure inchangé s'agissant des licenciements collectifs projetés dans les entreprises de moins de cinquante salariés. Ainsi, les articles L. 1233-53 (N° Lexbase : L0715IXR) et suivants du Code du travail, qui conservent pour l'essentiel la procédure antérieure à la loi, seront, désormais, réservés aux entreprises ne dépassant pas ce seuil d'effectif.
S'agissant, en revanche, des projets de licenciements élaborés dans les entreprises de plus de cinquante salariés, les nouveaux articles L. 1233-57 (N° Lexbase : L1227H9C) à L. 1233-57-8 du Code du travail instituent une procédure nouvelle et adaptée à la mise en valeur des accords d'aménagement de la procédure de licenciement et à la faculté d'adapter la procédure par voie de document unilatéral de l'employeur.
A l'article L. 1233-57, relatif aux propositions que peut présenter l'administration du travail en vue de compléter ou de modifier le plan de sauvegarde de l'emploi, la loi ajoute un nouvel alinéa qui impose à l'employeur d'adresser à l'autorité administrative "une réponse motivée" à ces propositions.
L'article L. 1233-57-6 du Code du travail (N° Lexbase : L0643IX4) prévoit qu'à tout moment de la procédure, l'administration peut faire des observations ou propositions concernant le déroulement de la procédure ou les "mesures sociales" désormais visées par l'article L. 1233-22 du Code du travail (N° Lexbase : L1147H9D). Ces observations seront bien entendu présentées à l'employeur, mais également, au comité d'entreprise ou à défaut aux délégués du personnel et, lorsqu'une négociation d'aménagement de la procédure est en cours, aux syndicats représentatifs de l'entreprise. Outre que la réponse, que l'employeur doit apporter à l'administration, doit être motivée, elle devra encore être communiquée aux représentants du personnel et aux syndicats lorsqu'elle porte sur le déroulement de la procédure ou les mesures sociales. En pratique, l'immense majorité des observations de l'administration du travail devrait porter sur ces éléments si bien que les employeurs seront bien avisés de transmettre automatiquement toute observation ou proposition administrative aux représentants du personnel.
En outre, l'accord collectif (5) ou le document unilatéral (6) aménageant la procédure de licenciement devra, impérativement, être transmis à l'autorité administrative, le premier pour validation, le second pour homologation. L'administration aura la charge de vérifier que le contenu de l'accord ou du document est conforme aux articles L. 1233-24-1 (N° Lexbase : L0630IXM) à L. 1233-24-3 et aux articles L. 1233-61 (N° Lexbase : L6215ISY) et L. 1233-63 (N° Lexbase : L1242H9U), tous relatifs au contenu du plan de sauvegarde de l'emploi. Elle s'assurera, en outre, que la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise et du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail est régulièrement envisagée par l'accord ou le document.
La décision administrative est enserrée dans des délais précis puisque l'article L. 1233-57-4 (N° Lexbase : L0641IXZ) prévoit que la décision de validation devra intervenir sous quinze jours alors que la décision d'homologation devra être rendue dans un délai de vingt-et-un jours (7). Cette décision devra être notifiée à l'employeur (8), au comité d'entreprise et aux syndicats s'il s'agit d'un accord d'aménagement. Ces représentants du personnel ou des syndicats pourront, ainsi, s'appuyer sur les remarques et propositions effectuées par l'administration du travail pour tenter de faire évoluer le projet voire, en cas de blocage, pour argumenter un recours contentieux dirigé contre la procédure engagée. La décision de validation ou d'homologation sera, enfin, portée à la connaissance des salariés par voie d'affichage sur les lieux de travail.
En cas de refus d'homologation ou de validation, l'employeur peut reprendre son projet de licenciement après l'avoir amendé et avoir présenté une nouvelle demande d'homologation ou de validation.
Après analyse de ces différentes dispositions, on peut, légitimement, se demander quelle mesure viendra sanctionner l'absence de demande d'homologation ou de validation ou la poursuite du projet après un refus d'homologation ou de validation. Si le paragraphe comportant les articles étudiés n'aborde pas la question de la sanction, le législateur a tout de même modifié l'article L. 1233-39 du Code du travail (N° Lexbase : L1189H9W), relatif à la notification du licenciement.
Deux alinéas sont ajoutés à ce texte. Le premier précise que la notification du licenciement intervient après la notification de la décision de validation ou d'homologation ce qui semble faire de la décision administrative une condition de validité du licenciement. Ce sentiment est confirmé par l'alinéa suivant qui dispose que l'employeur "ne peut procéder, à peine de nullité, à la rupture des contrats de travail avant la notification de cette décision d'homologation ou de validation".A la suite de la modification de l'article L. 1235-10 du Code du travail (N° Lexbase : L6214ISX), la nullité viendra encore sanctionner la procédure et les éventuels licenciements subséquents en cas d'annulation de la décision d'homologation ou de validation.
Si le principe de la réintégration du salarié à la suite de la nullité de son licenciement est maintenu, les conséquences de celle-ci varieront selon qu'est en cause l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi ou une autre cause ayant justifié l'annulation. Dans le premier cas, la règle ancienne de l'article L. 1235-11 du Code du travail (N° Lexbase : L0725IX7) est maintenue : le salarié sera réintégré sauf si cette modalité est devenue impossible ; à défaut de réintégration, est servie une indemnité qui ne peut être inférieure à douze mois de salaire. Dans le second cas, l'article L. 1235-16 du Code du travail (N° Lexbase : L0724IX4) dispose que la réintégration ne peut, en principe, être évitée par la preuve d'une quelconque impossibilité, mais que l'indemnité servie au salarié faute de réintégration ne peut être inférieure à six mois de salaire.
D'une certaine manière, la procédure nouvelle consiste dans le rétablissement d'une autorisation administrative de licenciement pour les licenciements collectifs, autorisation qui diffère, cependant, sensiblement de celle qui s'appliquait avant 1986 puisqu'elle n'aura pour objet que de vérifier le respect des règles procédurales, le contenu suffisant du plan de sauvegarde de l'emploi et les "mesures sociales" envisagées. En favorisant des délais courts, cette mesure pourrait intéresser les entreprises qui seront mieux assurées de la validité des procédures engagées. Mais ce n'est pas là le plus grand des intérêts de cette procédure nouvelle.
A l'image de ce qui est prévu s'agissant de la rupture conventionnelle du contrat de travail qui, elle aussi, fait l'objet d'une homologation administrative, le nouvel article L. 1235-7-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0653IXH) dispose que l'accord, le document unilatéral, le contenu du plan et les décisions de l'administration "ne peuvent faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à la décision de validation ou d'homologation" administrative. Contrairement au contentieux de la rupture conventionnelle, ce nouveau bloc de compétence est attribué au juge administratif "à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux". Pris au pied de la lettre, ce texte exclut donc la compétence du juge prud'homal pour apprécier la validité ou la régularité de la procédure de licenciement économique collectif, seules les questions de fond consistant à l'appréciation du motif de licenciement et de cause réelle et sérieuse du licenciement demeurant de sa compétence. Indirectement, le juge prud'homal ne devrait donc plus être mesure de prononcer la nullité d'un plan de sauvegarde de l'emploi ni, subséquemment, des licenciements prononcés.
(1) V. C. Figerou, Accords de méthode : vers des licenciements économiques négociés ?, Lexbase Hebdo n° 168 du 18 mai 2005 - édition sociale (N° Lexbase : N4282AIG). V., également, F. Gaudu, Les accords de méthode, Dr. soc., 2008, p. 915 ; R. Vatinet, L'accord de méthode en quête de cohérence, Gaz. Pal., 12-14 août 2007, p. 10 ; P.-H. Antonmattéi, Accord de méthode, génération 2005 : la positive attitude, Dr. soc., 2005, p. 399 ; S. Nadal, Négociation collective et licenciement économique : propos introductifs sur le nouvel article L. 320-2 du Code du travail, Dr. ouvrier, 2005, p. 303.
(2) C. trav., art. L. 1233-34 (N° Lexbase : L6216ISZ) dans sa nouvelle rédaction.
(3) V. nos obs., Commentaire des articles 18 à 21 et article 25 de l'Accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l'emploi et des parcours professionnels des salariés, Lexbase Hebdo n° 514 du 31 janvier 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N5539BTC).
(4) Le texte est, également, modifié s'agissant du nombre de réunions qui n'est plus impérativement limité à deux, ce chiffre devenant un minimum.
(5) C. trav. art. L. 1233-57-2 (N° Lexbase : L0639IXX).
(6) C. trav. art. L. 1233-57-3 (N° Lexbase : L0640IXY).
(7) Ces délais sont encore raccourcis par l'effet de l'article L. 1233-58 du Code du travail (N° Lexbase : L0712IXN) à huit jours en cas de redressement judiciaire, à quatre jours en cas de liquidation judiciaire.
(8) A rebours de la règle classique en droit administratif, mais de plus en plus commune en droit du travail, l'absence de réponse de l'administration du travail dans ces délais vaut décision de validation ou d'homologation. L'idée est toujours de ne pas aboutir à un blocage de la procédure qui en accroîtrait sensiblement la durée.
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Réf. : Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU)
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N7812BTI
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par Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale
Le 20 Juillet 2013
Les partenaires sociaux ont souhaité, dans l'accord du 11 janvier 2013 (N° Lexbase : L9638IUI), ramener à deux années la prescription des actions en contestation de la rupture du contrat de travail et à trois années celles portant sur les salaires, le tout sans préjudice des prescriptions particulières.
Précisions. Le législateur a donc repris ces deux délais (le délai de deux ans à l'article L. 1471-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0620IXA), et trois ans pour les salaires à l'article L. 3245-1 modifié (N° Lexbase : L0734IXH) et est donc revenu sur la prescription quinquennale des gains et salaires qui avait résisté à la réforme générale des prescriptions intervenue en 2008.
Il s'est toutefois montré un peu plus précis que les partenaires sociaux.
C'est tout d'abord le point de départ des délais qui a été modifié. L'article 26 de l'accord du 11 janvier visait "le jour de la rupture du contrat", alors que le législateur l'a fixé "du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit", reprenant ainsi le même principe que celui qui figure, en droit commun, à l'article 2224 du Code civil (N° Lexbase : L7184IAC), qui est d'ailleurs plus favorable pour les salariés.
La loi a repris le maintien des délais plus courts de prescription mais s'est montré plus précis en visant, de manière limitative, les délais de douze mois applicables à la contestation du CSP (C. trav., art. L. 1233-67 N° Lexbase : L8853IQX), des délais en matière de contestation des procédures de licenciement pour motif économique (C. trav., art. L. 1235-7 N° Lexbase : L0727IX9), du délai de douze mois pour contester l'homologation de la rupture conventionnelle du contrat de travail (C. trav., art. L. 1237-14 N° Lexbase : L8504IA9) mais aussi au délai de six mois pour dénoncer le reçu pour solde de tout compte (C. trav., art. L. 1234-20 N° Lexbase : L8044IA8), ce qui est étonnant dans la mesure où il ne s'agit pas véritablement d'un délai de prescription.
Les nouveaux délais ne s'appliquent pas non plus à la prescription quinquennale spéciale des actions en discriminations (C. trav., art. L. 1134-5 N° Lexbase : L7245IAL) ni à celles qui portent sur la réparation de dommages corporels et qui continueront donc de relever de la prescription décennale de l'article 2226 du Code civil (N° Lexbase : L7212IAD).
Droit transitoire. Le législateur a précisé les règles applicables de manière transitoire, reprenant ainsi le principe général applicable lorsque la prescription nouvelle est plus courte que l'ancienne (C. civ., art. 2222 N° Lexbase : L7186IAE). Le V de l'article 21 de la loi dispose ainsi que "les dispositions du Code du travail prévues aux III et IV du présent article s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la présente loi, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure", à moins qu'une instance n'ait été engagée avant le 17 juin 2013, auquel cas elle demeurera régie par l'ancienne prescription.
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Réf. : Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU)
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N7935BT3
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par Sébastien Tournaux, Professeur à l'Université des Antilles et de la Guyane
Le 11 Juillet 2013
Alors qu'il ne semblait pas indispensable que le législateur se saisisse de cette question pour que les mesures conventionnelles produisent leurs effets (1), sont insérées au Code du travail de nouvelles dispositions relatives à la "reprise de site" qui viennent s'adjoindre à celles déjà envisagées aux articles L. 1233-84 (N° Lexbase : L1283H9E) et suivants du Code du travail s'agissant de la revitalisation des bassins d'emploi.
Le nouvel article L. 1233-90-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0622IXC) impose, désormais, à l'entreprise d'engager un processus de recherche d'un repreneur, procédure dont doit être informé le comité d'entreprise. Celui-ci peut recourir à l'analyse d'un expert-comptable afin de mieux comprendre "le processus de recherche d'un repreneur, sa méthodologie et son champ, pour apprécier les informations mises à la disposition des repreneurs potentiels et pour analyser les projets de reprise". Le comité d'entreprise sera informé des différentes propositions, pourra émettre un avis et formuler des propositions quant à ces différentes offres dans les mêmes délais que ceux prévus par l'article L. 1233-30 du Code du travail (N° Lexbase : L6222ISA) applicables aux réunions du comité.
L'implication du comité d'entreprise dans la procédure de recherche d'un repreneur est salutaire et traduit les préoccupations fréquemment émises dans les médias par les représentants du personnel de grandes entreprises subissant la fermeture de sites de production.
On peut, cependant, rester dubitatif devant la formulation du premier alinéa de l'article L. 1233-90-1 du Code du travail qui semble, véritablement, imposer une obligation de recherche d'un repreneur. En effet, s'il s'agit bien d'une nouvelle contrainte légale imposée en cas de fermeture de site, aucun détail n'est donné quant aux modalités de cette recherche. L'obligation est effective au moment où l'entreprise "envisage un projet de licenciement" ce qui demeure relativement flou. Aucune précision n'est apportée quant aux moyens qui doivent être mobilisés par l'entreprise pour procéder à cette recherche. Il faut dire que la question est périlleuse puisqu'une publicité trop grande des difficultés de l'entreprise, laquelle permettrait une recherche efficace d'un repreneur, pourrait avoir des conséquences aggravantes sur la situation de l'entreprise en termes d'image ou de cotation par exemple.
Enfin, aucune mesure ne vient, explicitement, sanctionner l'absence de recherche de repreneur, ce qui affaiblit considérablement son effectivité. Seule l'absence d'information ou de consultation du comité d'entreprise sur les démarches effectivement réalisées pourront donner lieu à sanction, soit sur le plan pénal -délit d'entrave- soit sur le plan civil -non-respect des règles procédurales afférentes à la consultation des représentants du personnel en matière de licenciement pour motif économique-.
On peut, en définitive, rejoindre le Professeur Gilles Auzero pour considérer qu'une intervention législative d'une si faible ampleur n'était, probablement, pas nécessaire...
(1) V. les obs. de G. Auzero, Commentaire des articles 12 à 17 (Titre II) de l'Accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l'emploi et des parcours professionnels des salariés, Lexbase Hebdo n° 514 du 31 janvier 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N4418BTK).
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Réf. : Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU)
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N7936BT4
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par Sébastien Tournaux, Professeur à l'Université des Antilles et de la Guyane
Le 11 Juillet 2013
L'article L. 1233-5 du Code du travail (N° Lexbase : L0732IXE), relatif à l'ordre des licenciements, est modifié par l'adjonction d'un nouvel alinéa qui dispose que "l'employeur peut privilégier un de ces critères, à condition de tenir compte de l'ensemble des autres critères prévus au présent article". L'idée est donc de permettre à l'employeur de pondérer les critères légaux d'ordre de licenciement pour donner plus d'importance à l'un ou l'autre. A moins qu'il ne s'agisse là de sécuriser une pratique jurisprudentielle déjà bien ancrée, la règle nouvelle paraît, totalement, inutile puisque c'est déjà l'interprétation que retenait la Chambre sociale de la Cour de cassation de l'article dans son ancienne rédaction (1).
Le texte modifie encore l'article L. 1233-71 du Code du travail (N° Lexbase : L0731IXD), relatif au congé de reclassement dont la durée est alignée sur celle du contrat de sécurisation professionnelle à douze mois, ce qui permet d'obtenir une meilleure harmonie entre deux dispositifs répondant au même objet mais réservés, pour le premier aux entreprises de plus de mille salariés, pour le second aux entreprises dont l'effectif est inférieur à cette taille.
Enfin, les conditions de report du congé de reclassement lorsque celui-ci est interrompu par des périodes de travail, prévues par l'article L. 1233-72-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0730IXC), sont, légèrement, modifiées. Alors que le texte prévoyait que le congé de reclassement reprenait son cours après la période de travail "sans excéder son terme initial", l'employeur peut désormais prévoir "un report du terme initial du congé à due concurrence des périodes de travail effectuées".
(1) Cass. soc., 2 mars 2004, n° 01-44.084, publié (N° Lexbase : A3996DBM) ; Les grands arrêts du droit du travail , D., 4ème éd., 2008, n° 113.
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Réf. : CE 4° et 5° s-s-r, 3 juillet 2013, n° 342291, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A4561KIR)
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N8032BTN
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Le 11 Juillet 2013
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Réf. : Cass. soc., 3 juillet 2013, n° 12-13.612, FS-P+B (N° Lexbase : A5506KIR)
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N8036BTS
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Le 13 Juillet 2013
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Réf. : Cass. soc., 3 juillet 2013, n° 12-19.268 (N° Lexbase : A5419KIK)
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N8038BTU
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Le 12 Juillet 2013
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Réf. : Cass. soc., 3 juillet 2013, n° 12-11.857, FS-P+B (N° Lexbase : A5438KIA)
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N8034BTQ
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Le 11 Juillet 2013
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Réf. : Cass. soc., 3 juillet 2013, n° 11-23.687, FS-P+B (N° Lexbase : A5561KIS)
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N8033BTP
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Le 17 Juillet 2013
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Réf. : Cass. soc., 3 juillet 2013, n° 12-13.612, FS-P+B (N° Lexbase : A5506KIR)
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Le 18 Juillet 2013
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Réf. : CA Aix-en-Provence, 27 juin 2013, n° 12/19472 (N° Lexbase : A9211KHM)
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Le 11 Juillet 2013
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Réf. : Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU)
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N7814BTL
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par Gilles Auzero, Professeur à l'Université Montesquieu - Bordeaux IV
Le 11 Juillet 2013
I - L'information du comité d'entreprise : la base de données économiques et sociales
Le comité d'entreprise est destinataire de deux types d'informations. Les unes, qui reviennent à intervalles réguliers, sont périodiques. Les autres, liées à la survenance d'un évènement particulier, sont ponctuelles. Les premières sont les plus nombreuses. On est même tenté de dire que, de ce point de vue, le comité d'entreprise "croule" sous les informations. A l'évidence, cela permet au comité d'avoir une vision précise de la situation de l'entreprise, mais aussi, lorsque cela est le cas, de la société dont dépend, juridiquement, la structure. Il n'est, cependant, pas certain, compte tenu de leur quantité, que ces informations soient toujours parfaitement maîtrisées et exploitées par leur destinataire. Sans alléger le volume des informations périodiques délivrées au comité d'entreprise, la loi du 14 juin 2013 simplifie, en revanche, les modalités de leur mise à disposition par la création d'une base de données économiques et sociales.
Destinataires. Ainsi que l'affirme l'alinéa 1er de l'article L. 2323-7-2, nouveau, du Code du travail (N° Lexbase : L0434IXD), "une base de données économiques et sociales, mise régulièrement à jour, rassemble un ensemble d'informations que l'employeur met à disposition du comité d'entreprise et, à défaut, des délégués du personnel". Si ces deux institutions représentatives du personnel sont, en quelque sorte, et de manière fort logique compte tenu de leurs attributions, les destinataires privilégiés de cette base de données, elles ne sont pas les seules à y avoir accès. En effet, l'alinéa deuxième du texte en cause dispose que la base de données est "accessible en permanence [...] aux membres du comité central d'entreprise, du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et aux délégués syndicaux".
En ouvrant l'accès à la base de données au CHSCT et aux délégués syndicaux, la loi du 14 juin 2013 apporte un progrès réel et indéniable puisque, faut-il le rappeler, seuls le comité d'entreprise et, dans une certaine mesure, les délégués du personnel étaient, jusqu'à cette date, en droit de recevoir les informations périodiques énumérées par le Code du travail. S'agissant de ces derniers, la loi ne leur ouvre l'accès à la base de données qu'"à défaut" de comité d'entreprise ; c'est-à-dire lorsque, une entreprise occupant plus de cinquante salariés, un comité n'a pas pu être mis en place . Pour le dire autrement, dans une entreprise dont l'effectif est inférieur à ce seuil, la mise en place d'une base de données n'est pas obligatoire (3).
On peut s'étonner du fait que l'article L. 2323-7-2, nouveau, ne vise que le comité d'entreprise et le comité central d'entreprise et pas les comités d'établissement. Est-ce à dire que ces derniers sont privés de l'accès à la base de données ? Une réponse négative doit certainement être apportée à cette question, ne serait-ce que parce que les comités d'établissement ont, en application de l'article L. 2327-15 du Code du travail (N° Lexbase : L9909H8I), "les mêmes attributions que les comités d'entreprise". Mais, ce même texte n'en précise pas moins que cette identité d'attributions est limitée par "les pouvoirs confiés aux chefs de ces établissements". Il peut, par suite, être inféré de cette disposition que si un comité d'établissement doit avoir accès à une base de données économiques et sociales, c'est à une base de données propre à l'établissement.
Support de la base de données. La loi, pas plus d'ailleurs que l'ANI, ne précisent le support matériel de la base de données. Il est, certes, indiqué que celle-ci est "mise régulièrement à jour" et qu'elle est "accessible en permanence" aux représentants du personnel concernés. On peut par suite penser que c'est la voie électronique qui doit être privilégiée pour la mise à disposition de la base de données. Mais la loi n'exclut pas le support papier, au demeurant pour le moins contraignant, puisque les documents doivent être mis à la disposition de tous les "membres" des institutions représentative du personnel.
Confidentialité. L'ensemble des représentants du personnel ayant accès à la base de données est tenu "à une obligation de discrétion à l'égard des informations contenues dans la base de données revêtant un caractère confidentiel et présentées comme telles par l'employeur" (C. trav., art. L. 2323-7-2, nouveau). On retrouve ici la formule de l'article L. 2325-5 du Code du travail (N° Lexbase : L9797H8D) et les récurrentes difficultés d'interprétation qu'il pose. On peut à cet égard penser qu'une obligation n'est pas confidentielle parce que l'employeur l'a présentée comme telle. S'il ne peut y avoir de confidentialité sans déclaration en ce sens de l'employeur (4), il faut, d'abord, que l'information soit, par son objet, objectivement et intrinsèquement, confidentielle (5). Cela étant, compte tenu de l'élargissement considérable des destinataires de l'information, il sera, en pratique, souvent très délicat, d'identifier l'auteur d'une éventuelle "fuite".
Contenu. L'article L. 2323-7-2, nouveau, du Code du travail fixe le contenu minimum de la base de données. Plus exactement, il énumère huit thèmes sur lesquels les informations figurant dans la base de données doivent porter. Il s'agit :
- des investissements. Investissement social (emploi, évolution et répartition des contrats précaires, des stages et des emplois à temps partiel, formation professionnelle et conditions de travail), investissement matériel et immatériel et, pour les entreprises mentionnées au sixième alinéa de l'article L. 225-102-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L5756ISY), les informations en matière environnementale présentées en application du cinquième alinéa du même article ;
- des fonds propres et endettement ;
- de l'ensemble des éléments de la rémunération des salariés et dirigeants ;
- des activités sociales et culturelles ;
- de la rémunération des financeurs ;
- des flux financiers à destination de l'entreprise, notamment aides publiques et crédits d'impôts ;
- de la sous-traitance ;
- le cas échéant, des transferts commerciaux et financiers entre les entités du groupe.
Si les thèmes sont fixés par la loi, le contenu des informations en relevant sera déterminé par un décret en Conseil d'Etat. La loi précise qu'il pourra varier selon que l'entreprise compte plus ou moins de trois cents salariés (6) et être enrichi par un accord de branche ou d'entreprise ou, le cas échéant, un accord de groupe, en fonction de l'organisation et du domaine d'activité de l'entreprise. Il est enfin précisé que ces informations portent sur les deux années précédentes et l'année en cours et intègrent des perspectives sur les trois années suivantes.
Dans l'attente du décret précité, dont l'importance est évidente, on peut d'ores et déjà considérer que cette base de données économiques et sociales est riche de potentialités. Sans doute, certaines des informations qui y figureront sont déjà délivrées au comité d'entreprise. On songe, notamment, ici aux documents comptables et financiers obligatoirement remis au comité en application de l'article L. 2323-8 du Code du travail (N° Lexbase : L2739H9C), qui retracent normalement les fonds propres et l'endettement ou encore la rémunération des financeurs. On peut, néanmoins, attendre de la base de données qu'elle fasse apparaître ces informations de façon plus claire.
Mais il faut surtout prendre acte du versant nécessairement prospectif de l'information, dont on a vu qu'elle doit "intégrer des perspectives sur les trois années suivantes". Sans doute ne faut-il pas trop attendre de simples "perspectives" qui, en aucune façon, ne renvoie à des décisions de l'employeur. Pour autant, cela est de nature à permettre au comité d'entreprise d'avoir une certaine vision de l'avenir.
Substitution. L'article L. 2323-7-3, nouveau, du Code du travail (N° Lexbase : L0436IXG) dispose, en son alinéa 1er, que "les éléments d'information contenus dans les rapports et informations transmis de manière récurrente au comité d'entreprise sont mis à la disposition de ses membres dans la base de données [...] et cette mise à disposition actualisée vaut communication des rapports et informations au comité d'entreprise, dans les conditions et limites fixées par un décret en Conseil d'Etat". L'alinéa second du même texte précise toutefois que "les consultations du comité d'entreprise pour des évènements ponctuels continuent de faire l'objet de l'envoi des rapports et informations".
Il y a là un élément de simplification notable, au moins sur le plan matériel. Cet article suscite néanmoins un certain nombre d'interrogations quant à sa mise en oeuvre. En premier lieu, et la difficulté est relative, il conviendra de soigneusement déterminer quels sont les rapports et informations transmis au comité "de manière récurrente". Sont ici visées les documents et informations transmis au comité de manière périodique, c'est-à-dire sans être liés à un évènement ponctuel. On songe, par exemple, aux informations trimestrielles et annuelles transmises au comité, que ce soit dans les entreprises de moins de trois cents salariés (C. trav., art. L. 2323-46 N° Lexbase : L3225IME à L. 2323-49) , ou celles employant trois cents salariés et plus (C. trav., art. L. 2323-50 N° Lexbase : L6296ISY à L. 2323-57). Sont sans doute aussi concernés les documents comptables et financiers visés par l'article L. 2323-8, évoqués précédemment et remis annuellement. Il faut à cet égard rappeler que, pour l'examen de ces documents, le comité peut se faire assister d'un expert-comptable (C. trav., art. L. 2325-35 N° Lexbase : L0655IXK). Le fait qu'ils figurent dans la base de données n'exclut évidemment pas qu'une telle prérogative puisse être exercée par le comité.
On peut, en revanche, hésiter pour certaines autres informations. Ainsi, la documentation économique et financière remise au comité d'entreprise un mois après chaque élection, en application de l'article L. 2323-7 (N° Lexbase : L2737H9A), peut-elle figurer dans la base de données ? On peut le penser étant observé que, si la délivrance de cette information est liée à un évènement particulier, elle n'en revêt pas moins une certaine récurrence. Plus généralement, compte tenu de la formulation compréhensive de l'alinéa 1er de l'article L. 2323-7-2 (N° Lexbase : L0434IXD), nouveau, peuvent figurer dans la base de données, les éléments d'information contenus dans les rapports et informations transmis de manière récurrente, que cette information soit accompagnée ou non de la consultation du comité d'entreprise.
En tout état de cause, l'article L. 2323-7-3 du Code du travail ne saurait avoir pour finalité d'amoindrir les informations transmises au comité. Partant, et sous réserves des dispositions du décret visé par ce texte, on peut recommander de faire apparaître dans la base de données le texte légal auquel chaque information se rapporte, afin d'éviter, autant que faire se peut, le contentieux.
Il reste à évoquer le second alinéa de l'article L. 2323-7-3, nouveau. Il ressort de celui-ci que, chaque fois que le comité d'entreprise est consulté sur un évènement "ponctuel", il doit recevoir communication des rapports et informations ad hoc, conformément d'ailleurs aux prescriptions générales de l'article L. 2323-4 (N° Lexbase : L0658IXN) qui, rappelons-le, dispose que "pour lui permettre de formuler un avis motivé, le comité d'entreprise dispose d'informations précises et écrites transmises par l'employeur [...]". Il convient toutefois de relever que l'alinéa 2nd de l'article L. 2323-7-3, nouveau, vise "ces" rapports et documents, ce qui renvoie nécessairement aux rapports et documents évoqués par l'alinéa 1er, c'est-à-dire à ceux qui sont transmis "de manière récurrente" au comité. Il nous semble qu'il y a là une certaine contradiction, car un document ne peut pas être lié à un évènement ponctuel, tout en état "récurrent".
Application dans le temps. La base de données économiques et sociales devra être mise en place dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi dans les entreprises de trois cents salariés et plus, et de deux ans dans les entreprises de moins de trois cents salariés.
Quant à l'article L. 2323-7-3, nouveau, il entrera en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d'Etat et, au plus tard, au 31 décembre 2016.
II - La consultation du comité d'entreprise
A - Les délais pour rendre les avis
Présentation. L'article L. 2323-3 du Code du travail (N° Lexbase : L0659IXP) dispose, dans ses deux premiers alinéas, d'un part, que "dans l'exercice de ses attributions consultatives, définies aux articles L. 2323-6 (N° Lexbase : L2734H97) à L. 2323-60 (N° Lexbase : L2882H9M), le comité d'entreprise émet des avis et voeux" et, d'autre part, que "l'employeur rend compte, en la motivant, de la suite donnée à ces avis et voeux". La loi du 14 juin 2013 vient ajouter trois alinéas à ce texte.
Tout d'abord, l'alinéa 3, nouveau, indique que le comité d'entreprise "dispose d'un délai d'examen suffisant" ; précision qui figurait jusqu'à présent à l'article suivant, duquel elle est supprimée. Ce sont donc les deux alinéas suivants qui doivent retenir l'attention.
L'alinéa 4, nouveau, de l'article L. 2323-3 dispose quant à lui que "sauf dispositions législatives spéciales, un accord entre l'employeur et le comité d'entreprise ou, le cas échéant, le comité central d'entreprise, adopté à la majorité des membres titulaires élus du comité, ou, à défaut d'accord, un décret en Conseil d'Etat fixe les délais dans lesquels les avis du comité d'entreprise sont rendus dans le cadre des consultations prévues aux articles L. 2323-6 à L. 2323-60, ainsi qu'aux articles L. 2281-12 (N° Lexbase : L2521H9A), L. 2323-72 (N° Lexbase : L2917H9W) et L. 3121-11 (N° Lexbase : L3752IBL). Ces délais, qui ne peuvent être inférieurs à quinze jours, doivent permettre au comité d'entreprise d'exercer utilement sa compétence, en fonction de la nature et de l'importance des questions qui lui sont soumises et, le cas échéant, de l'information et de la consultation du ou des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail".
Le changement est ici de taille et vise à éviter une dilatation excessive dans le temps de la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise. Cette disposition appelle plusieurs remarques.
La voie de la négociation. Prééminence est accordée à la négociation, pour fixer les délais dans lesquels le comité d'entreprise rend ses avis dans le cadre des consultations prévues par les textes visés par la loi. Plus précisément, un accord doit intervenir entre l'employeur et le comité d'entreprise ou, le cas échéant, le comité central d'entreprise, adopté à la majorité des membres titulaires élus du comité.
On doit s'étonner que la loi ne vise que le comité central d'entreprise et pas les comités d'établissement. Est-ce à dire que la voie de l'accord leur est fermée, auquel cas, lui sont seuls applicables les délais fixés par la voie réglementaire (v. infra) ? Ce serait pour le moins curieux. Faut-il alors considérer que l'accord conclu avec le comité central d'entreprise doit leur être appliqué ? Ce serait discutable car les comités d'établissement, qui sont dotés de prérogatives propres, sont tiers à l'accord en cause. A notre sens, et dans la mesure, où les comités d'établissement ont les mêmes attributions que les comités d'entreprise (C. trav., art. L. 2327-15 (7), ils sont en mesure, au même titre que ce dernier, de conclure de tels accords.
A défaut d'accord, les délais à respecter seront ceux fixés par un décret en Conseil d'Etat.
Le contenu de l'accord. L'accord fixe "les" délais dans lesquels sont rendus les avis. L'emploi du pluriel et l'usage du présent de l'indicatif qui a valeur impérative, démontre qu'il ne peut y avoir un délai unique pour toutes les consultations. Cela est confirmé par la précision selon laquelle "ces délais, qui ne peuvent être inférieurs à quinze jours, doivent permettre au comité d'entreprise d'exercer utilement sa compétence, en fonction de la nature et de l'importance des questions qui lui sont soumises et, le cas échéant, de l'information et de la consultation du ou des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail".
Ces exigences, applicables tant à l'accord qu'au décret futur, confirme que plusieurs délais maximums doivent être prévus, en fonction de l'objet de la consultation et de la nécessité que celle-ci produise un effet utile. Si cela peut sembler logique et nécessaire, ne faut-il pas craindre que le comité vienne contester les délais prévus par l'accord, en estimant qu'ils ne sont pas conformes aux exigences légales. On admettra que cela serait étrange, dans la mesure où c'est le comité lui-même qui a conclu l'accord. Il est vrai que ce comité peut être renouvelé et être, par suite, soumis à un accord conclu antérieurement. Mais, précisément, ne faut-il pas considérer qu'un nouvel accord doit être conclu avec le comité nouvellement mis en place ? Cette voie est délicate à emprunter car c'est l'institution qui est partie à l'accord et non ses membres, qui ont pu, éventuellement, changer. Afin d'éviter toute discussion, peut-être sera-t-il plus prudent de conclure des accords à durée déterminée.
Une présomption d'avis négatif. Il arrive en pratique qu'un comité d'entreprise refuse de rendre un avis, souhaitant ainsi bloquer la procédure d'information et de consultation et retarder, de ce fait, la mise en oeuvre de la décision de l'employeur (8). Cette situation ne sera plus de mise à l'avenir. En effet, le dernier alinéa de l'article L. 2323-3 du Code du travail dispose désormais qu'"à l'expiration de ces délais, ou du délai mentionné au dernier alinéa de l'article L. 2323-4, le comité est réputé avoir été consulté et avoir rendu un avis négatif".
Complément d'informations. Ainsi que nous l'avons rappelé précédemment, l'article L. 2323-4, alinéa 1er, du Code du travail précise que "pour lui permettre de formuler un avis motivé, le comité d'entreprise dispose d'informations précises et écrites transmises par l'employeur[...]" (9).
Il est rare que le Code du travail décrive précisément les informations nécessaires à la consultation du comité d'entreprise. Lorsque tel n'est pas le cas, la Cour de cassation considère que les juges du fond apprécient souverainement le caractère suffisant des informations transmises au comité avant la réunion (10), avec, à la clef, la possibilité d'ordonner la reprise de la procédure d'information et de consultation et la suspension, à titre conservatoire, de la mesure envisagée (11).
Le nouvel alinéa 2 de l'article L. 2323-4 dispose que "les membres élus du comité peuvent, s'ils estiment ne pas disposer d'éléments suffisants, saisir le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés, pour qu'il ordonne la communication par l'employeur des éléments manquants. Le juge statue dans un délai de huit jours". Toutefois, l'alinéa suivant (12), également introduit par la loi du 14 juin 2013, précise que "cette saisine n'a pas pour effet de prolonger le délai dont dispose le comité pour rendre son avis. Toutefois, en cas de difficultés particulières d'accès aux informations nécessaires à la formulation de l'avis motivé du comité d'entreprise, le juge peut décider la prolongation du délai prévu à l'article L. 2323-3".
Ces dispositions marquent bien la volonté du législateur d'éviter que la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise s'éternise de trop. La loi ne règle toutefois pas une question importante. Un comité ayant rendu son avis, sans demander un complément d'information au juge dans les délais prescrits, perd-il le droit de demander au juge d'ordonner la reprise de la procédure d'information et de consultation et la suspension de la mesure envisagée ?
B - La consultation sur les orientations stratégiques
Principe. La loi du 14 juin 2013 introduit dans le Code du travail un nouveau cas de consultation du comité d'entreprise (13), prévu par l'article L. 2323-7-1, nouveau : "chaque année, le comité d'entreprise est consulté sur les orientations stratégiques de l'entreprise, définies par l'organe chargé de l'administration ou de la surveillance de l'entreprise, et sur leurs conséquences sur l'activité, l'emploi, l'évolution des métiers et des compétences, l'organisation du travail, le recours à la sous-traitance, à l'intérim, à des contrats temporaires et à des stages" (al. 1er).
A cette occasion, "le comité émet un avis sur ces orientations et peut proposer des orientations alternatives. Cet avis est transmis à l'organe chargé de l'administration ou de la surveillance de l'entreprise, qui formule une réponse argumentée. Le comité en reçoit communication et peut y répondre" (al. 2).
Cette nouvelle hypothèse de consultation du comité d'entreprise doit certainement être rattachée aux "nouveaux droits collectifs en faveur de la participation des salariés". On peut effectivement y voir un progrès notable dès lors qu'elle permet au comité d'avoir une certaine prise sur l'avenir de l'entreprise, afin que les intérêts des salariés soient pris en compte au plus tôt ou, à tout le moins, qu'ils ne soient pas méconnus au moment où le futur de l'entreprise est engagé par les décisions des organes sociaux compétents. Le progrès n'est toutefois, à notre sens, qu'apparent. Il convient, en effet, de rappeler que le comité d'entreprise est, de longue date, en droit de participer aux conseils d'administration ou de surveillance des sociétés (C. trav., art. L. 2323-62 N° Lexbase : L2888H9T et s.). Or, le meilleur moyen d'être associé à la détermination des orientations stratégiques de l'entreprise ne réside-t-il pas dans le fait de siéger au sein même de l'organe social en charge d'arrêter les décisions y afférentes (14) ?
Modalités de la consultation. La base de données économiques et sociales évoquée précédemment constitue, selon l'alinéa 3, de l'article L. 2323-7-1, nouveau, "le support de la préparation de cette consultation". Sans doute conviendra-t-il de clairement identifier les documents à remettre au comité en vue de cette consultation. Compte tenu de l'objet de cette dernière, et de sa complexité, il faut saluer la possibilité reconnue par la loi au comité de se faire assister par un expert-comptable (15). Une nouveauté est toutefois introduite en la matière par la loi. Par dérogation à l'article L. 2325-40 (N° Lexbase : L9868H8Y), dont on sait qu'il précise que l'expert-comptable est rémunéré par l'employeur, le dernier alinéa de l'article L. 2323-7-1 (N° Lexbase : L0433IXC), nouveau, dispose que "sauf accord entre l'employeur et le comité d'entreprise, le comité contribue, sur son budget de fonctionnement, au financement de cette expertise à hauteur de 20 %, dans la limite du tiers de son budget annuel". Au-delà de cette limite, le coût de l'expertise devra être pris en charge par l'employeur. Le comité aura tout intérêt à prévoir le coût de l'expertise, étant observé que le fait qu'il ait utilisé la totalité de son budget de fonctionnement antérieurement semble exclure le recours à l'expertise.
C - La consultation sur l'utilisation du crédit d'impôt compétitivité emploi
Les sommes reçues par l'entreprise au titre du crédit d'impôt compétitivité emploi (16) et leur utilisation sont retracées dans la base de données économiques et sociales. Le comité d'entreprise est informé et consulté, avant le 1er juillet de chaque année, sur l'utilisation de ce crédit d'impôt par l'entreprise (C. trav., art. L. 2323-26-1 N° Lexbase : L0607IXR, nouveau).
Le législateur ne s'est cependant pas borné à prévoir la consultation du comité sur ce crédit d'impôt. Le comité est érigé en organe de contrôle de son utilisation, par l'effet d'un dispositif bâti sur le modèle de son droit d'alerte, qui se déroule donc en plusieurs étapes.
Etape 1 : lorsque le comité d'entreprise constate que tout ou partie du crédit d'impôt n'a pas été utilisé conformément à l'article 244 quater C du Code général des impôts (N° Lexbase : L9889IW8), il peut demander à l'employeur de lui fournir des explications. Cette demande est inscrite de droit à l'ordre du jour de la prochaine séance du comité d'entreprise (C. trav., art. L. 2323-26-2, nouveau, al. 1 et 2 N° Lexbase : L0608IXS).
Etape 2 : Si le comité d'entreprise n'a pu obtenir d'explications suffisantes de l'employeur ou si celles-ci confirment l'utilisation non conforme de ce crédit d'impôt, il établit un rapport. Ce rapport est transmis à l'employeur et au comité de suivi régional, crée par le IV de l'article 66 de la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 (N° Lexbase : L7970IUQ), qui adresse une synthèse annuelle au comité national de suivi (C. trav., art. L. 2323-26-2, nouveau, al. 3 et 4).
Etape 3 : Au vu de ce rapport, le comité d'entreprise peut décider, à la majorité des membres présents, de saisir de ses conclusions l'organe chargé de l'administration ou de la surveillance dans les sociétés ou personnes morales qui en sont dotées, ou d'en informer les associés dans les autres formes de sociétés ou les membres dans les groupements d'intérêt économique.
Dans les sociétés dotées d'un conseil d'administration ou d'un conseil de surveillance, la demande d'explication sur l'utilisation du crédit d'impôt est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance du conseil d'administration ou du conseil de surveillance, à condition que celui-ci ait pu être saisi au moins quinze jours à l'avance. La réponse de l'employeur est motivée et adressée au comité d'entreprise (17).
D - Délai de l'expertise
Si le Code du travail autorise, de longue date, le comité d'entreprise à faire appel à des experts, qu'ils soient rémunérés par l'employeur, le comité d'entreprise ou, désormais, les deux, il n'avait pas enserré la mission de l'expert dans des délais maximums ; ce qui, là encore, pouvait entraîner un allongement excessif des procédures d'information et de consultation.
Cette lacune est comblée par la loi du 14 juin 2013. Le nouvel article L. 2325-42-1 (N° Lexbase : L0606IXQ) dispose désormais, en son alinéa 1er, que "l'expert-comptable ou l'expert technique mentionnés à la présente section remettent leur rapport dans un délai raisonnable fixé par un accord entre l'employeur et le comité d'entreprise ou, à défaut d'accord, par décret en Conseil d'Etat. Ce délai ne peut être prorogé que par commun accord". Ce délai ne devra pas être trop bref car, en application de second alinéa du même texte, "l'accord ou, à défaut, le décret mentionné au premier alinéa détermine, au sein du délai prévu au même alinéa, le délai dans lequel l'expert désigné par le comité d'entreprise peut demander à l'employeur toutes les informations qu'il juge nécessaires à la réalisation de sa mission et le délai de réponse de l'employeur à cette demande".
On peut relever que, de manière collatérale, l'alinéa 1er de l'article L. 2325-42-1, nouveau, consacre le fait que l'expert doit remettre un rapport au comité. Sans doute un tel rapport était-il en pratique remis au comité dans la grande majorité des cas. Mais, jusqu'à la loi en cause, aucun texte légal n'en faisait mention explicitement.
III - L'instance de coordination des CHSCT
En application de l'article L. 4611-1 du Code du travail (N° Lexbase : L6276ISA), un CHSCT doit être mis en place dans tout établissement de cinquante salariés et plus. Toutefois, plusieurs CHSCT peuvent être constitués dans un même établissement lorsque celui-ci occupe habituellement plus de cinq cents salariés (C. trav., art. L. 4613-4 N° Lexbase : L6256ISI). En outre, alors même que l'établissement n'atteint pas ce seuil, plusieurs CHSCT peuvent également y être créés s'il comporte des secteurs d'activités différents (18). En résumé, dans une entreprise à structure complexe peuvent coexister une pluralité de CHSCT aux attributions et prérogatives propres. Il en résulte que tous ces CHSCT peuvent avoir recours à un expert, dans les conditions prévues par l'article L. 4614-12 (N° Lexbase : L1819H9A), dès lors qu'ils sont affectés par un projet commun à plusieurs établissements ou secteurs d'activités.
Outre que l'exercice de cette prérogative par tous les CHSCT multiplie les coûts pour l'employeur, on peut s'interroger sur l'utilité d'une pluralité d'expertises portant sur un même projet, même si la situation de chaque établissement ou secteur d'activité peut, éventuellement, la justifier. Elle est enfin de nature à ralentir la procédure de consultation de ces institutions.
Conscient de ces difficultés, depuis longtemps dénoncées en pratique, le législateur a décidé d'y remédier, à l'invitation des partenaires sociaux eux-mêmes, à tout le moins ceux qui ont signé l'ANI de janvier 2013 (N° Lexbase : L9638IUI). Un nouvel article L. 4616-1 (N° Lexbase : L0611IXW) dispose ainsi que "lorsque les consultations prévues aux articles L. 4612-8 (N° Lexbase : L1754H9T), L. 4612-9 (N° Lexbase : L1756H9W), L. 4612-10 (N° Lexbase : L1758H9Y) et L. 4612-13 (N° Lexbase : L1766H9B) portent sur un projet commun à plusieurs établissements, l'employeur peut mettre en place une instance temporaire de coordination de leurs comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, qui a pour mission d'organiser le recours à une expertise unique par un expert agréé dans les conditions prévues au 2° de l'article L. 4614-12 et à l'article L. 4614-13 (N° Lexbase : L0722IXZ), et qui peut rendre un avis au titre des articles L. 4612-8, L. 4612-9, L. 4612-10 et L. 4612-13".
L'article L. 4616-2, nouveau, du Code du travail (N° Lexbase : L0612IXX) détermine la composition de cette instance de coordination (19). L'expert est désigné lors de la première réunion de l'instance. Il remet son rapport et l'instance se prononce, le cas échéant, dans les délais prévus par un décret en Conseil d'Etat. A l'expiration de ces délais, l'instance de coordination est réputée avoir été consultée (C. trav., art. L. 4616-3, nouveau, al. 1 et 2 N° Lexbase : L0613IXY). Cette disposition suscite une interrogation. Alors que l'article L. 4616-2, nouveau, ne confère à l'instance de coordination que la mission "d'organiser le recours à une expertise unique", l'article L. 4616-3, nouveau, lui attribue le droit d'être consulté.
En tout état de cause, et le dernier alinéa de l'article L. 4616-3, nouveau, le confirme, cette consultation ne saurait se substituer à celle des CHSCT concernés. Ce texte dispose, en effet, que "le rapport de l'expert et, le cas échéant, l'avis de l'instance de coordination sont transmis par l'employeur aux comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail concernés par le projet ayant justifié la mise en place de l'instance de coordination, qui rendent leurs avis" (20).
Il convient enfin de noter que l'article L. 4616-5 (N° Lexbase : L0615IX3), nouveau, permet à un accord d'entreprise de prévoir des modalités particulières de composition et de fonctionnement de l'instance de coordination, notamment si un nombre important de CHSCT sont concernés. Même si elle est ici résiduelle, la loi ménage à nouveau une place à la négociation.
(1) V. en ce sens, A. Martinon, L'information et la consultation des représentants du personnel : nouveaux droits ou nouveau partage de responsabilités, JCP éd. S, 2013, 1263.
(2) Ce qui signifie qu'un PV de carence a été établi.
(3) Rien n'interdit évidemment qu'une convention collective le prévoie ou que l'employeur le décide de son propre chef. De même, dans une entreprise dotée d'un comité, il est tout à fait possible, selon les mêmes modalités, d'autoriser les délégués du personnel à accéder à la base de données.
(4) Sous réserve des informations que la loi répute confidentielles (C. trav., art. L. 2323-10 N° Lexbase : L2746H9L et L. 2323-82 N° Lexbase : L2946H9Y).
(5) V., sur la question, l'article précédent d'A. Martinon, § 6 et la jurisprudence des juges du fond citée.
(6) Il faut certainement comprendre que le pouvoir exécutif pourra prendre en compte cet état de fait.
(7) Ce texte n'en précise pas moins que cette identité dans les attributions est bornée par les pouvoirs confiés aux chefs de ces établissements. Cela confirme la nécessité de conclure des accords propres à chaque établissement et l'impossibilité de leur appliquer un accord conclu avec le comité central d'entreprise.
(8) Attitude dilatoire que l'employeur peut néanmoins contourner en mettant en oeuvre sa décision nonobstant l'absence d'avis du comité, dès lors, évidemment, qu'il a respecté, en amont, toutes ses obligations vis-à-vis de lui.
(9) Ces informations pourront figurer dans la base de données économiques et sociales, ce qui exclut, nous l'avons vu, que l'employeur les transmette à nouveau au comité en vue de la consultation. On peut toutefois se demander si celui-ci n'aura pas intérêt, antérieurement à celle-ci, à préciser les informations de la base de données concernées par la consultation.
(10) Cass. soc., 25 juin 2003, n° 01-02.990, publié (N° Lexbase : A0556A4D), Bull. civ. V, n° 210.
(11) Cass. soc., 25 juin 2002, n° 00-20.939, publié (N° Lexbase : A0106AZX), Bull. civ. V, n° 217.
(12) C'est-à-dire, désormais, le dernier alinéa de l'article L. 2323-4.
(13) Un de plus est-on tenté de dire.
(14) Rappelons qu'en application de l'article L. 225-35 du Code de commerce (N° Lexbase : L5906AIL), "le conseil d'administration détermine les orientations de l'activité de la société et veille à leur mise en oeuvre". On admettra que c'est l'activité de la "société" qui est ici en cause et non les orientations stratégiques de l'entreprise. Mais comment distinguer les deux ?
(15) Possibilité de recours à l'expert-comptable qui ne se substitue pas aux autres expertises. Prévue par l'article L. 2323-7-1 (N° Lexbase : L0433IXC), nouveau, ce cas de recours à l'expertise est également mentionné désormais dans l'article L. 2325-35.
(16) Crédit d'impôt prévu par l'article 244 quater C du CGI.
(17) Dans les autres formes de sociétés ou dans les groupements d'intérêt économique, lorsque le comité d'entreprise a décidé d'informer les associés ou les membres de l'utilisation du crédit d'impôt, le gérant ou les administrateurs leur communiquent le rapport du comité d'entreprise. Dans les autres personnes morales, le présent article s'applique à l'organe chargé de l'administration ou de la surveillance. Il est curieux que l'information soit, dans certains cas, destinée aux organes sociaux et, dans d'autres, aux associés.
(18) V. sur la question, J. Pélissier, G. Auzero, E. Dockès, Droit du travail, Précis Dalloz, 27ème édition, 2013, n° 862.
(19) Outre des représentants de chaque CHSCT concerné par le projet, l'instance comprend diverses personnalités, tel le médecin du travail ou encore l'inspecteur du travail.
(20) Texte qui laisse entendre que l'instance de coordination ne rend pas systématiquement un avis. On peut toutefois considérer que la formule, "le cas échéant" renvoie au cas dans lequel l'instance a effectivement formulé un avis avant l'expiration du délai imparti. Par suite, la consultation paraît devoir être systématique.
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Réf. : Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU)
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par Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale
Le 12 Juillet 2013
Intérêt du dispositif. Le présent dispositif doit permettre à l'employeur de rendre les salariés encore plus facilement mobiles au-delà de l'actuel secteur géographique, et sans être contraint d'insérer dans chaque contrat de travail une clause de mobilité. Il s'agit donc ici d'une mobilité collective favorisée par la conclusion d'un accord en échange de garanties elles-mêmes collectives.
Dispositions de l'ANI du 11 janvier 2013 (N° Lexbase : L9638IUI). Dans l'accord du 11 janvier 2013, les partenaires sociaux avaient souhaité donner encore plus de souplesse aux entreprises en permettant à un accord collectif de définir une zone conventionnelle de mobilité, opposable aux salariés, et de permettre aux employeurs qui prétendent l'imposer de ne pas redouter la mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi dans l'hypothèse où les salariés s'y opposeraient en masse (3).
Accord de mobilité. Le nouveau régime favorisant la mobilité "professionnelle" (c'est-à-dire fonctionnelle) ou "géographique" repose sur la conclusion d'un accord collectif, marquant ainsi la volonté des partenaires sociaux de rééquilibrer, en faveur des normes collectives, les rapports avec le contrat de travail (4).
Articulation avec la GPEC et les PSE. Il ne s'agit pas ici d'utiliser ce nouveau régime pour contourner les règles en matière de GPEC ou de plans de sauvegarde de l'emploi négociés, mais bien de s'articuler avec eux, ce qui explique que l'accord de mobilité interne porte sur des "mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs" (C. trav., nouv. art. L. 2242-21 N° Lexbase : L0635IXS) et ce afin de ne pas entrer en concurrence avec d'autres accords s'inscrivant plutôt dans des logiques de restructuration.
Les liens avec la négociation relative à la GPEC sont, toutefois, évidents puisqu'il s'agit, dans tous les cas, de rendre la main d'oeuvre plus flexible pour anticiper sur d'éventuelles nécessités de réorganisation future ; c'est pourquoi les entreprises qui sont soumises à l'obligation triennale de négociation sur la GPEC, devront intégrer dans celle-ci la question nouvelle de la mobilité professionnelle et géographique (C. trav., art. L. 2242-1, al. 2 N° Lexbase : L2369H9M), et celles qui ne le sont pas devront, également, négocier en termes de GPEC.
Le législateur n'a pas exactement repris les dispositions de l'accord du 11 janvier 2013 sur ce point qui imposait une négociation triennale pour toutes les entreprises dotées de délégués syndicaux.
Délimitation de la zone conventionnelle de mobilité. L'article L. 2242-22 nouveau (N° Lexbase : L0636IXT) impose à l'accord de délimiter la "zone géographique d'emploi du salarié" en tenant compte de sa vie "personnelle et familiale". L'accord devra d'ailleurs comporter des "mesures" visant à articuler les différents intérêts en cause (intégrant d'ailleurs la situation des salariés handicapés), notamment en prévoyant des critères d'ordre entre salariés également susceptibles d'être mobiles, pour protéger ceux dont la situation personnelle ou familiale serait la plus critique en cas de mobilité.
On peut imaginer qu'un salarié pourrait contester l'étendue de cette zone conventionnelle en la considérant comme étant disproportionnée, à l'occasion d'un contentieux du refus d'exécution d'un ordre de mobilité, et qu'un juge, considérant cette mobilité conventionnelle comme excessive au regard du respect de la vie personnelle et familiale du salarié, pourrait à son tour considérer le refus du salarié comme légitime, privant ainsi l'employeur du bénéfice du régime dérogatoire applicable à la rupture du contrat qui s'en suivrait. Le licenciement du salarié serait alors privé de justification et pourrait même être requalifié de licenciement pour motif économique "de droit commun", refaisant alors surgir le spectre de la mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi.
L'accord devra également prévoir les modalités professionnelle (en termes de formation) et financière (participation aux coûts induits par la mobilité, ou à la perte de pouvoir d'achat en cas de mobilité vers une zone de vie chère, par exemple).
Limites à la mobilité conventionnelle. La mise en oeuvre par l'employeur de l'accord de mobilité lui permet de modifier le lieu d'exécution du contrat de travail au-delà du secteur géographique contractuel, au sein de la zone conventionnelle de mobilité.
Seul le lieu d'exécution du contrat de travail pourra être modifié. La loi du 14 juin 2013 interdit, en effet, à l'employeur d'en profiter pour modifier la rémunération du salarié, sa classification professionnelle ou sa qualification professionnelle.
S'agissant de la rémunération, le texte ne vise toutefois que le "niveau" ; l'employeur n'aurait donc pas à garantir la "structure" à l'occasion de la mobilité, ce qui est étonnant car on sait qu'un changement de structure (répartition des parts fixes et variables) créé toujours un risque de modification du niveau de rémunération au travers du changement d'assiette de la part variable. Les employeurs devront donc se montrer prudent et laisser totalement inchangée la rémunération, dans toutes ses composantes.
Articulation avec les droits contractuels des salariés. L'objectif de la réforme est d'imposer aux salariés la mobilité conventionnelle.
Les salariés devront être informés de l'existence et du contenu de l'accord. A défaut, celui-ci ne leur sera pas opposable et l'actuelle jurisprudence leur permettant de refuser toute mobilité au-delà du secteur géographique sera maintenue.
Contrairement aux principes de droit commun qui régissent les concours entre accord collectif et contrat de travail et qui font prévaloir les dispositions plus favorables (5), le nouvel article L. 2242-23 (N° Lexbase : L0637IXU) neutralise les clauses contraires du contrat de travail (c'est-à-dire les clauses de localisation exclusive du lieu d'exécution du contrat de travail, mais aussi les clauses de mobilité ayant stipulé une zone de mobilité moins étendue) qui se trouvent donc suspendues.
Mise en oeuvre de la mobilité conventionnelle. L'employeur qui souhaite "proposer" la mobilité conventionnelle doit au préalable "prendre en compte les contraintes personnelles et familiales de chacun des salariés potentiellement concernés" (C. trav., nouv. art. L. 2242-23, al. 3).
Il s'agit d'une obligation de moyens. L'employeur devra prouver qu'il a bien pris en compte ces critères, mais des exigences professionnelles matériellement vérifiables par le juge et légitimes peuvent justifier qu'il ait choisi de muter un salarié, même chargé de famille, notamment lorsqu'il était le mieux placé pour occuper un poste déterminé, compte tenu des caractéristiques de ce poste, de la qualification du salarié, de son expérience, etc..
L'accord du salarié est nécessaire. Celui-ci a donc le droit de refuser la mobilité et ne pourra pas être licencié pour faute pour le seul fait d'avoir refusé cette "proposition".
Ce droit de refuser la mobilité suppose, toutefois, que l'employeur ne puisse pas se passer de l'accord de mobilité, c'est-à-dire qu'il ne dispose pas, par ailleurs, d'un moyen juridique de l'imposer, ce qui sera le cas si la mobilité envisagée n'excède pas le secteur géographique pour lequel le salarié a été recruté (zone d'environ 20 kilomètres) ou si le salarié est lié par une clause individuelle de mobilité (6).
Licenciement consécutif au refus. Si le salarié refuse cette mobilité, le licenciement prononcé par l'employeur, et fondé sur ce motif, est légalement qualifié de "licenciement pour motif économique".
Cette qualification s'impose aux parties et au juge qui ne pourra donc pas la discuter ni l'écarter sous prétexte que ce licenciement ne serait pas consécutif à des difficultés économiques ou à une réorganisation de l'entreprise, puisqu'il s'agit bien d'un motif économique sui generis.
On se rappellera que l'ANI du 11 janvier 2013 avait pour sa part opté pour la qualification de licenciement pour motif personnel tout en prévoyant le bénéfice pour les salariés concernés des dispositifs de reclassement, ce qui n'était pas cohérent. Le choix de la qualification économique, finalement opéré par le Législateur, se justifie, en effet, dans la mesure où le lien avec la prévention des difficultés économiques est clairement établi dans la loi par le rapprochement avec la GPEC. Il présente également un intérêt pour les salariés qui bénéficieront des "mesures d'accompagnement et de reclassement que doit prévoir l'accord, qui adapte le champ et les modalités de mise en oeuvre du reclassement interne prévu aux articles L. 1233-4 (N° Lexbase : L3135IM3) et L. 1233-4-1 (N° Lexbase : L3134IMZ)".
Le législateur considère également que l'employeur doit suivre la procédure du licenciement individuel pour motif économique, ce qui a pour principal objet, et intérêt, de lui épargner les affres d'un licenciement collectif et de la mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi.
Ce choix procédural n'est d'ailleurs pas aberrant dans la mesure où la loi fait peser sur l'employeur l'obligation de tenir compte de la situation individuelle des salariés auxquels il va "proposer" cette mobilité.
Incertitudes sur la justification des licenciements. Reste que si le nouvel article L. 2242-23 du Code du travail indique que le "licenciement repose sur un motif économique", il ne dit pas s'il repose ou non sur une cause réelle et sérieuse.
Il semble que le législateur ait simplement voulu désigner la procédure applicable (sa cause "qualificative"), sans préjuger de la justification de la rupture (sa cause "justificative") qui dépendra d'un certain nombre de facteurs appréciés concrètement par les juges du fond. On sait, en effet, que l'employeur doit, par exemple, prendre en considération les contraintes personnelles et familiales pesant sur le salarié, ainsi que d'éventuelles règles de priorité stipulées par l'accord de mobilité. Dans ces conditions, chaque situation devra être examinée individuellement (c'est d'ailleurs pour cette raison que le choix de la procédure du licenciement pour motif économique individuelle peut se justifier), ce qui justifie pleinement l'office du juge.
Par ailleurs, le juge pourra également rechercher la justification de la rupture au travers de la légalité des mesures prévues dans l'accord collectif, comme il avait été conduit à le faire lors de la mise en oeuvre des accords de réduction du temps de travail après 2000 où le Code du travail avait prévu la possibilité pour l'employeur de modifier unilatéralement la durée de travail des salariés, en dépit d'une clause de 39 heures de leur contrat individuel, pour autant qu'il ne modifiait pas leur rémunération (7). Pour déterminer, dans ces conditions, si le refus opposé par les salariés était justifiés, au-delà de la qualification du licenciement retenue par le législateur, la Cour de cassation avait été conduite à indiquer aux juges qu'ils devaient s'aider du contenu des accords de réduction du temps de travail eux-mêmes (8).
(1) Cass. soc., 16 février 1998, n° 96-40.227, publié (N° Lexbase : A4538AG8). Jurisprudence constante.
(2) Cass. soc., 3 juin 2003, n° 01-40.376, publié (N° Lexbase : A6993CK9). Jurisprudence constante.
(3) Voir le commentaire de Gilles Auzero, Commentaire des articles 12 à 17 (Titre II) de l'Accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l'emploi et des parcours professionnels des salariés, Lexbase Hebdo n° 514 du 31 janvier 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N5518BTK).
(4) Plaidant pour ce rééquilibrage, dernièrement J. Barthélémy et G. Cette, Pour une nouvelle articulation des normes en droit du travail, Dr. soc., 2013, p. 17.
(5) Par application de l'article L. 2254-1 (N° Lexbase : L2417H9E).
(6) Cette possibilité pourrait, toutefois, être contrariée par le principe de suspension des clauses contractuelles contraires, car dans cette hypothèse l'employeur perdrait le bénéfice de la clause contractuelle de mobilité, moins étendue, s'il dépend par ailleurs d'une zone conventionnelle de mobilité. Il ne semble toutefois pas que tel soit l'intention des partenaires sociaux de priver l'employeur du bénéfice de la clause contractuelle de mobilité, si le dispositif conventionnel est mis en échec.
(7) Article 30-II de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 (N° Lexbase : L0988AH3), codifié à l'article L. 1222-8 du Code du travail (N° Lexbase : L0822H9C).
(8) Cass. soc., 23 septembre 2009, n° 07-44.712, FS-P+B (N° Lexbase : A3388EL3).
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Réf. : Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU)
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par Sébastien Tournaux, Professeur à l'Université des Antilles et de la Guyane
Le 20 Juillet 2013
L'article 21 de la loi du 14 juin 2013 reprend l'essentiel des mesures envisagées par l'article 25 de l'ANI du 11 janvier 2013 (N° Lexbase : L9638IUI), ce qui était d'ailleurs totalement indispensable tant un accord collectif, fût-il interprofessionnel et national, ne pouvait avoir pour effet d'aménager les règles d'ordre public applicable en matière de contentieux prud'homal (1).
Le texte modifie l'article L. 1235-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0733IXG) relatif au contentieux de la rupture du contrat de travail. Avant qu'un litige permette, éventuellement, au juge d'apprécier la régularité de la procédure et la cause réelle et sérieuse du licenciement, les parties pourront s'entendre, à leur initiative ou sur proposition du bureau de conciliation, afin qu'il soit mis fin au litige relatif à la rupture en contrepartie du versement au salarié d'une indemnité dont le montant sera déterminé par décret, lequel pourrait vraisemblablement reprendre les propositions présentées par les partenaires sociaux dans l'ANI. Cette indemnité ne devrait pas avoir vocation à se substituer à toutes les indemnités auxquelles le salarié a droit en raison de la rupture puisque le texte dispose qu'elle sera versée "sans préjudice des indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles". La loi est, en la matière, plus favorable que ne l'était l'accord qui, faute de précision, semblait suggérer de remplacer toutes les indemnités par une indemnité unique.
Après l'arrêt "Durafroid" (2), c'est une nouvelle mission qui doit être désormais assumée par les conseillers prud'hommes au stade de la conciliation : non seulement ils devront informer les parties de leurs droits mais, encore, devront proposer que soit mis fin au litige par le versement de cette indemnité. On peut regretter que le législateur n'ait pas souhaité articuler ces deux missions tant on peut penser que l'ordre dans lequel ces informations et propositions vont être données peut avoir une influence sur le choix des parties. Quoiqu'il en soit, il est probable que l'absence d'information des parties sur leurs droits ait le même effet sur l'accord conclu entre les parties que ceux qu'elle produirait sur une conciliation plus classique, c'est-à-dire la possibilité d'annulation de l'ordonnance de conciliation.
On relèvera, enfin, que les dispositions insérées au Code du travail figurent dans le titre relatif à la rupture du contrat de travail à durée indéterminée si bien qu'elles ne devraient en théorie pas s'appliquer à la rupture anticipée du contrat à durée déterminée ou du contrat de mission.
Conformément là encore aux prescriptions de l'ANI, un nouvel alinéa est ajouté à l'article L. 1235-1 du Code du travail, lequel dispose que le juge "justifie dans le jugement qu'il prononce le montant des indemnités qu'il octroie". Le juge prud'homal, comme toute juridiction judiciaire, a déjà l'obligation de motiver ses décisions si bien que la mesure pourrait sembler superflue. Elle a, cependant, une valeur symbolique puisque certains jugements suscitent la circonspection de justiciables qui s'estiment insuffisamment informés des raisons ayant permis la détermination du montant des indemnités. Pour autant, l'appréciation du montant des préjudices relève traditionnellement du pouvoir souverain des juges du fond si bien que les effets réels de la mesure devraient être limités à l'hypothèse, relativement rare, d'absence totale de motivation du montant décidé (3).
II - Prescription des actions en justice
Un nouveau titre VII intitulé "prescription des actions en justice" est inséré au livre IV de la première partie du Code du travail. Ce titre qui ne comportera qu'un seul chapitre qui, lui-même, ne compte qu'un unique article L. 1471-1 (N° Lexbase : L0620IXA).
Comme l'avaient souhaité les partenaires sociaux, le délai de prescription des actions en contestation de l'exécution ou de la rupture du contrat de travail est, désormais, ramené de cinq à deux ans "à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit". Sont toutefois exclues de ce délai de prescription aménagé les actions en vue de la réparation d'un dommage corporel, les actions en paiement ou répétition du salaire et les actions portant sur une discrimination, un harcèlement moral ou un harcèlement sexuel. S'agissant des actions en paiement des salaires, l'article L. 3245-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0734IXH) est modifié et la prescription est ramenée à trois années au lieu de cinq.
Cette mesure s'inscrit dans une tendance récente tendant à restreindre les délais de prescription en droit du travail, comme cela avait déjà été le cas, par exemple, s'agissant de la contestation susceptible d'entraîner la nullité de la procédure de licenciement collectif pour motif économique en raison de l'absence ou de l'insuffisance d'un plan de sauvegarde de l'emploi (4) ou s'agissant de la contestation de la validité de la rupture conventionnelle du contrat de travail (5). L'appréciation de cette mesure dépend naturellement de l'origine du regard qui lui est porté. Pour les entreprises, la mesure est favorable puisqu'elle leur permettra de mieux sécuriser les ruptures du contrat de travail et de ne pas rester pendant cinq ans dans l'expectative d'une éventuelle action judiciaire, qu'elle permettra une rationalisation des éventuelles provisions comptables qui pourraient avoir été effectuées. Pour les salariés, en revanche, la diminution du délai est plus problématique puisqu'ils sont dans l'immense majorité des cas les demandeurs devant la juridiction prud'homale et qu'ils devront donc réagir rapidement. La limite posée par le texte de connaissance des faits qui justifie le recours était indispensable. La loi ne prend cependant pas en compte -mais le pourrait-elle ?- le fait que nombre des recours intentés tardivement par les salariés ne reposent sur aucune malveillance mais, seulement, sur une découverte tardive de leurs droits...
Enfin, la loi aménage l'entrée en vigueur de ces nouveaux délais de prescription d'une manière relativement simple puisque ces délais ne seront pas applicables aux actions introduites avant la promulgation de la loi.
(1) V. nos obs., Commentaire des articles 18 à 21 et article 25 de l'Accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013, pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l'emploi et des parcours professionnels des salariés, Lexbase Hebdo n° 514 du 31 janvier 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N5539BTC).
(2) Cass. soc., 28 mars 2000, n° 97-42.419, publié (N° Lexbase : A6373AG7), D., 2000, p. 537, obs. J. Savatier ; Dr. soc., 2000. 661, obs. Keller.
(3) V. déjà nos propos, préc..
(4) C. trav., art. L. 1235-7 (N° Lexbase : L1351H9W). Adde. Cass. soc., 15 juin 2010, n° 09-65.062, FS-P+B+R (N° Lexbase : A2884EZT) et nos obs., La prescription de l'action en contestation du licenciement économique, Lexbase Hebdo n° 400 du 24 juin 2010 - édition sociale (N° Lexbase : N4275BPZ).
(5) C. trav., art. L. 1237-14, dernier al. (N° Lexbase : L8504IA9).
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Réf. : Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU)
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par Gilles Auzero, Professeur à l'Université Montesquieu - Bordeaux IV
Le 12 Juillet 2013
Reprenant les stipulations de l'article 17 de l'ANI du 11 janvier 2013 (N° Lexbase : L9638IUI), l'article 23 de la loi, relative à la sécurisation de l'emploi vient atténuer les rigueurs du franchissement de ce seuil à deux égards. Ces dispositions s'ajoutent à d'autres ayant le même objet, qu'il s'agisse de l'exclusion de certains travailleurs du décompte des effectifs, de la prise en compte d'autres au prorata de leur temps de présence ou de travail ou encore de la règle selon laquelle le seuil doit être franchi pendant douze mois consécutifs ou non au cours des trois années précédentes.
I - Le délai pour tenir le premier tour des élections
L'article L. 2314-2 du Code du travail (N° Lexbase : L0738IXM), qui intéresse les délégués du personnel, dispose que "l'employeur informe tous les quatre ans le personnel par affichage de l'organisation des élections. Le document affiché précise la date envisagée pour le premier tour. Celui-ci doit se tenir, au plus tard, le quarante-cinquième jour suivant le jour de l'affichage, sous réserve qu'une périodicité différente n'ait pas été fixée par accord en application de l'article L. 2314-27 (N° Lexbase : L2650H9Z)".
L'article 23 de la loi du 14 juin 2013 ajoute un second alinéa à ce texte qui précise que "lorsque l'organisation de l'élection est consécutive au franchissement du seuil mentionné à l'article L. 2312-2 (N° Lexbase : L6231ISL), le premier tour se tient dans les quatre-vingt-dix jours suivant le jour de l'affichage". Une disposition similaire est introduite à l'article L. 2324-4 (N° Lexbase : L3771IBB) qui intéresse le comité d'entreprise.
En résumé, et dans l'évident souci de conférer plus de souplesse à l'employeur, le délai habituel de 45 jours pour organiser le premier tour des élections des délégués du personnel ou du comité d'entreprise est doublé lorsque celles-ci sont organisées pour la première fois.
II - Le délai pour satisfaire aux obligations d'information et de consultation du comité d'entreprise lors de sa mise en place
Si la modification évoquée précédemment n'est pas de nature à susciter, outre mesure, le débat, il n'en va pas de même de celle qui va être évoquée maintenant. La loi relative à la sécurisation de l'emploi vient ajouter un second alinéa à l'article L. 2322-2 du Code du travail (N° Lexbase : L0737IXL) (2), au terme duquel "l'employeur dispose d'un délai d'un an à compter du franchissement de ce seuil pour se conformer complètement aux obligations récurrentes d'information et de consultation du comité d'entreprise prévues au présent code, selon des modalités déterminées par décret en Conseil d'Etat".
On peut évidemment s'étonner que le législateur vienne ainsi priver les salariés, ne serait-ce que temporairement, de leur droit constitutionnel à la participation, même si, il est vrai, ce même législateur dénie le même droit aux salariés travaillant dans les entreprises dont l'effectif est inférieur à onze salariés.
En tout état de cause, la latitude ainsi donnée à l'employeur est bornée, d'une part, nous venons de le voir, dans le temps, mais aussi, d'autre part, quant aux informations et consultations en cause. Ne sont en effet visées que les obligations "récurrentes" d'information et de consultation du comité d'entreprise, auxquelles l'employeur n'est pas tenu de se conformer "complètement". L'emploi de cet adverbe est curieux, qui laisse entrevoir que l'employeur ne peut pas se dispenser totalement du respect de ses obligations. Mais quel est en ce cas la mesure à retenir ? La loi n'en dit rien. Peut-être cette mesure sera-t-elle fixée par le décret annoncé.
Quant aux obligations "récurrentes", elles paraissent s'opposer aux obligations ponctuelles, liées à un évènement particulier. A titre d'exemple, si, dans le délai d'un an, l'entreprise est cible d'une offre publique d'acquisition ou auteur d'une telle offre, l'employeur ne peut pas ne pas se conformer aux obligations d'information et de consultation prescrites par les articles L. 2323-21 (N° Lexbase : L2778H9R) et suivants du Code du travail. De même, l'employeur ne pourrait sans doute pas échapper à l'obligation de communiquer au comité, un mois après l'élection, la documentation économique et financière visée par l'article L. 2323-7 (N° Lexbase : L2737H9A). En revanche, durant sa première année de fonctionnement, le comité d'entreprise ne semble pas devoir être destinataire des documents comptables et financiers, dont le caractère "récurrent" paraît devoir être retenu. Cela étant, et sous réserve là encore des dispositions du décret, des contentieux pourraient surgir quant au fait de savoir ce qui est "récurrent" et ce qui ne l'est pas.
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Réf. : Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU)
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par Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale
Le 20 Juillet 2013
Les partenaires sociaux ont souhaité, dans l'accord du 11 janvier 2013 (N° Lexbase : L9638IUI), ramener à deux années la prescription des actions en contestation de la rupture du contrat de travail et à trois années celles portant sur les salaires, le tout sans préjudice des prescriptions particulières.
Précisions. Le législateur a donc repris ces deux délais (le délai de deux ans à l'article L. 1471-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0620IXA), et trois ans pour les salaires à l'article L. 3245-1 modifié (N° Lexbase : L0734IXH) et est donc revenu sur la prescription quinquennale des gains et salaires qui avait résisté à la réforme générale des prescriptions intervenue en 2008.
Il s'est toutefois montré un peu plus précis que les partenaires sociaux.
C'est tout d'abord le point de départ des délais qui a été modifié. L'article 26 de l'accord du 11 janvier visait "le jour de la rupture du contrat", alors que le législateur l'a fixé "du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit", reprenant ainsi le même principe que celui qui figure, en droit commun, à l'article 2224 du Code civil (N° Lexbase : L7184IAC), qui est d'ailleurs plus favorable pour les salariés.
La loi a repris le maintien des délais plus courts de prescription mais s'est montré plus précis en visant, de manière limitative, les délais de douze mois applicables à la contestation du CSP (C. trav., art. L. 1233-67 N° Lexbase : L8853IQX), des délais en matière de contestation des procédures de licenciement pour motif économique (C. trav., art. L. 1235-7 N° Lexbase : L0727IX9), du délai de douze mois pour contester l'homologation de la rupture conventionnelle du contrat de travail (C. trav., art. L. 1237-14 N° Lexbase : L8504IA9) mais aussi au délai de six mois pour dénoncer le reçu pour solde de tout compte (C. trav., art. L. 1234-20 N° Lexbase : L8044IA8), ce qui est étonnant dans la mesure où il ne s'agit pas véritablement d'un délai de prescription.
Les nouveaux délais ne s'appliquent pas non plus à la prescription quinquennale spéciale des actions en discriminations (C. trav., art. L. 1134-5 N° Lexbase : L7245IAL) ni à celles qui portent sur la réparation de dommages corporels et qui continueront donc de relever de la prescription décennale de l'article 2226 du Code civil (N° Lexbase : L7212IAD).
Droit transitoire. Le législateur a précisé les règles applicables de manière transitoire, reprenant ainsi le principe général applicable lorsque la prescription nouvelle est plus courte que l'ancienne (C. civ., art. 2222 N° Lexbase : L7186IAE). Le V de l'article 21 de la loi dispose ainsi que "les dispositions du Code du travail prévues aux III et IV du présent article s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la présente loi, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure", à moins qu'une instance n'ait été engagée avant le 17 juin 2013, auquel cas elle demeurera régie par l'ancienne prescription.
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Réf. : Consultation des syndicats et des représentants des employeurs sur le travail non déclaré
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Le 11 Juillet 2013
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