Lexbase Droit privé - Archive n°464 du 1 décembre 2011

Lexbase Droit privé - Archive - Édition n°464

Ce qu'il faut retenir...

[A la une] Cette semaine dans Lexbase Hebdo - édition privée...

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N9037BSI

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par Anne-Lise Lonné-Clément, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition privée
Sous la Direction de Véronique Nicolas, Professeur agrégé, vice-doyen de la Faculté de droit de l'Université de Nantes

Le 01 Décembre 2011


Copropriété. Il y a seize ans déjà, la Commission des clauses abusives avait étudié les pratiques contractuelles des syndics de copropriété et avait dénoncé plusieurs stipulations généralement ou trop souvent employées qui relevaient selon elle de la réglementation des clauses abusives (recommandation n° 96-01, BOCCRF du 24 janvier 1996). Tous les syndics de copropriété n'ont probablement pas modifié leurs pratiques puisque la Commission vient de diffuser, le 17 octobre 2011, une seconde recommandation sur le sujet (recommandation n° 11-01, adoptée le 15 septembre 2011, à paraître au BOCCRF). Ce sont au total 24 types de clauses qui sont visés par cette recommandation. Cela n'implique pas qu'elles sont dorénavant automatiquement retirées des contrats en cause. Si tel était le cas, et si la simple recommandation de la Commission suffisait à rendre illicite une stipulation contractuelle visée, il n'eut pas été nécessaire de procéder à une seconde recommandation. Pour faire le point sur ces pratiques contractuelles des syndics mises en cause par la Commission, Lexbase Hebdo - édition privée vous invite à lire les observations de Malo Depincé, Maître de conférences à l'Université de Montpellier I et avocat au barreau de Montpellier (N° Lexbase : N9009BSH).
Homoparentalité. Largement commenté sur les ondes, le jugement du tribunal de grande instance de Bayonne du 26 octobre 2011 (TGI Bayonne, 26 octobre 2011, n° 11/00950), admettant la délégation-partage de l'autorité parentale à la concubine pacsée d'une mère de jumelles, constitue un acte de résistance fort à la jurisprudence limitative de la Cour de cassation sur cette question. Dans un arrêt du 8 juillet 2010, la Cour de cassation avait, en effet, mis un "coup d'arrêt" à la délégation-partage de l'autorité parentale en refusant catégoriquement qu'elle puisse être accordée à la concubine d'une mère en l'absence de circonstances particulières, laissant entendre qu'une telle délégation ne répondait pas aux exigences de l'intérêt de l'enfant (Cass. civ. 1, 8 juillet 2010, n° 08-21.740, FP-P+B+R+I). Le juge aux affaires familiales bayonnais prend clairement -et heureusement-, selon Adeline Gouttenoire, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directrice de l'Institut des Mineurs de Bordeaux, le contre-pied de la solution posée par la Haute cour. Il retient, en effet, que la délégation peut être admise en dehors de toute circonstance exceptionnelle et considère que le partage de l'autorité parentale entre les deux femmes qui l'élèvent satisfait l'intérêt de l'enfant (lire Délégation-partage de l'autorité parentale : la résistance basque... N° Lexbase : N9019BST).

newsid:429037

Assurances

[Brèves] Le conjoint du sociétaire ne perd pas sa qualité d'assuré en cas de séparation de fait

Réf. : Cass. civ. 2, 24 novembre 2011, n° 10-25.635, FS-P+B (N° Lexbase : A0184H39)

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N9058BSB

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Le 06 Décembre 2011

Le contrat d'assurance définissant l'assuré comme étant le sociétaire et son conjoint "non divorcé ni séparé" implique que le conjoint perd la qualité d'assuré en cas de séparation de corps judiciairement prononcée et non en cas de simple séparation de fait. Tel est l'enseignement délivré par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 24 novembre 2011(Cass. civ. 2, 24 novembre 2011, n° 10-25.635, FS-P+B N° Lexbase : A0184H39). En l'espèce, Mme C. a souscrit un contrat auprès de la MAIF pour assurer un véhicule automobile ainsi qu'un tracteur. Selon la police, l'assuré est le sociétaire ainsi que son conjoint non divorcé ni séparé. L'assureur, averti par Mme C. que le juge aux affaires familiales avait prononcé une ordonnance de non-conciliation l'ayant autorisée à résider séparément, a adressé à l'époux de cette dernière, M. C., un courrier pour l'informer qu'il ne bénéficiait plus de la qualité d'assuré. M. C. a alors assigné la MAIF devant le tribunal de grande instance pour obtenir le maintien de la garantie portant sur le véhicule agricole ainsi que des dommages-intérêts en réparation, d'une part, du préjudice matériel subi du fait de la privation de jouissance de l'automobile, d'autre part, de la résistance abusive de l'assureur. En appel, M. C. a été débouté de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour résistance abusive et l'assureur s'est vu contraint de maintenir la garantie du tracteur agricole. La décision des juges du fond a donc fait l'objet d'un pourvoi en cassation. Sur le premier point, la Haute juridiction relève que, sous le couvert du grief non fondé de violation de l'article 455 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L6565H7B), le moyen critique une omission de statuer sur un chef de demande. Or, cette omission de statuer ne donne pas ouverture à cassation car elle peut être réparée par la procédure prévue par l'article 463 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L6574H7M). En conséquence, le moyen n'est pas recevable. Sur le second point, la Cour de cassation indique que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'interprétation de la clause de la police, que l'ambiguïté de cette dernière rendait nécessaire, que la cour d'appel a décidé, hors toute dénaturation, que seuls étaient exclus de la garantie les époux judiciairement séparés de corps. Dès lors, elle juge le moyen non fondé.

newsid:429058

Assurances

[Brèves] Le montant de l'indemnité ne saurait être réduit en cas d'organisation d'une mesure de protection des majeurs

Réf. : Cass. civ. 2, 24 novembre 2011, n° 10-25.133, FS-P+B (N° Lexbase : A0185H3A)

Lecture: 1 min

N9059BSC

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Le 01 Décembre 2011

Dans un arrêt rendu le 24 novembre 2011, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation décide que le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce personne ne saurait être réduit ni en cas d'assistance familiale, ni en cas d'organisation d'une mesure de protection des majeurs (Cass. civ. 2, 24 novembre 2011, n° 10-25.133, FS-P+B N° Lexbase : A0185H3A). En l'espèce, pour n'allouer qu'une certaine somme à Mme D. au titre de l'assistance par une tierce personne, l'arrêt attaqué prend en compte plusieurs fois le rôle joué par le fils et la fille de Mme D. relevé par l'expert et retient, s'agissant de l'indemnisation de l'assistance à la gestion du budget et aux démarches administratives, que la curatelle est de nature à apporter à Mme D. une aide au moins partielle (CA Aix-en-Provence, 10e, 20-01-2010, n° 08/08989 (N° Lexbase : A2349EZZ). Or, ce faisant, la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale.

newsid:429059

Consommation

[Communiqué] La Commission des clauses abusives met en cause certaines pratiques contractuelles de syndics de copropriété

Réf. : Commission des clauses abusives, recommandation n° 11-01 relative aux contrats de syndic de copropriété

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N9009BSH

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par Malo Depincé, Maître de conférences à l'Université de Montpellier I et avocat au barreau de Montpellier

Le 01 Décembre 2011

Il y a seize ans déjà la Commission des clauses abusives avait étudié les pratiques contractuelles des syndics de copropriété et avait mis en cause plusieurs stipulations généralement ou trop souvent employées qui relevaient, selon elle, de la réglementation des clauses abusives (recommandation n° 96-01). Tous les syndics de copropriété n'ont probablement pas modifié leurs pratiques puisque la Commission vient de diffuser, le 17 octobre 2011, une seconde recommandation sur le sujet (recommandation n° 11-01, adoptée le 15 septembre 2011, à paraître au BOCCRF). Ce sont au total 24 types de clauses qui sont visés par cette recommandation. Cela n'implique pas qu'elles sont dorénavant automatiquement retirées des contrats en cause. Si tel était le cas, et si la simple recommandation de la Commission suffisait à rendre illicite une stipulation contractuelle visée, il n'eut pas été nécessaire de procéder à une seconde recommandation. Pour que la clause soit retirée d'un contrat, et même si elle correspond à l'exact cas stigmatisé dans une recommandation de la Commission, encore faut-il qu'un juge, pour chaque contrat ou chaque contrat-type qui lui est présenté, se prononce dans le même sens que la recommandation. On constate en pratique que c'est fort heureusement ce que le juge décide dans la plupart des contentieux. Pour autant, néanmoins, qu'un juge en soit saisi. Là réside la première faiblesse du dispositif de lutte contre les clauses abusives. Il existe quelques actions d'associations de consommateur en suppression de ces clauses sur le fondement de l'article L. 421-6 du Code de la consommation (N° Lexbase : L3081IQ8) : l'action est ouverte aux associations contre des contrats généralement proposés à des consommateurs par un professionnel, qu'il l'ait lui-même rédigé (CA Colmar, 16 juin 1995, JCP éd. G, 1995, II, 22932) ou que le modèle de contrat soit établi par un tiers, un franchiseur qui le transmet à ses franchisés par exemple (TGI Brest, 21 décembre 1994, Dalloz, 1995, somm. p. 310) ou par un syndicat à ses adhérents (Cass. civ. 1, 3 février 2011, n° 08-14.402, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A2358GRR ; nos obs. L'action en suppression des clauses réputées non écrites est ouverte contre les rédacteurs de contrats, qu'ils soient ou non contractants des consommateurs, Lexbase Hebdo n° 431 du 10 mars 2011 - édition privée N° Lexbase : N6385BRW) pourvu qu'il s'agisse effectivement d'un contrat de consommation (pour un exemple d'irrecevabilité de l'action des associations de consommateurs contre des contrats conclus entre professionnels et non-professionnels, cf. Cass. civ. 1, 4 mai 1999, n° 97-14.187 N° Lexbase : A3406AUP, Dalloz, 2000, somm. 48). De telles actions demeurent en quantité insignifiante au regard du nombre de contrats qui continuent à contenir des clauses abusives. Le caractère abusif d'une clause est également soulevé devant le juge à titre d'exception. Le consommateur assigné (en paiement) invoque le caractère abusif de la clause qui fonde l'action qui lui est intentée : créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur, la clause abusive est réputée non-écrite.

Si le juge est saisi, il convient d'admettre que la recommandation de la Commission des clauses abusives est suivie dans la très grande majorité des cas, probablement parce qu'étant un organisme paritaire (composée outre des spécialiste de ce contentieux et de magistrats, à proportion égale de représentants des consommateurs de représentants des professionnels, C. consom., art. L. 132-2 N° Lexbase : L6641ABL et art. R. 132-3 et s. N° Lexbase : L1565IBL). Si les recommandations n'ont aucune force obligatoire en droit (CE, 1° et 6° s-s-r., 16 janvier 2006, n° 274721 N° Lexbase : A4227DMI, Dalloz Affaires, 2006, AJ, 56), elles n'en ont pas moins un fort effet contraignant. Elles ne s'imposent pas au juge, en effet (Cass. civ. 1, 13 novembre 1996, n° 94-17.369 N° Lexbase : A8587ABN, Dalloz, 1997, somm. 174), mais l'on retrouve quelques décisions où il est expressément fait référence à une recommandation de la Commission, appui implicite de sa motivation (par exemple, Cass. civ. 1, 10 février 1998, n° 96-13.316 N° Lexbase : A2237ACT, Dalloz 1998, J., 539).

Toute recommandation de la Commission des clauses abusives constitue, donc, pour le praticien un texte de référence qui lui servira, dans l'hypothèse d'un contentieux, à appuyer son argumentation. Elle est également un outil précieux pour le consommateur lui-même qui, plus que les articles du Code de la consommation toujours d'un accès difficile pour le non-initié, lui permet de trouver une illustration plus précise de sa situation. Il reste que les recommandations ont parfois peu d'effet si le secteur incriminé est peu sensible à la pression exercée sur lui par les publications de la Commission des clauses abusives, souvent relayées par les associations de consommateurs. Tel est sans doute le cas des syndics de copropriété puisqu'après une première recommandation, la Commission a souhaité, aujourd'hui, non-seulement remettre à jour son contenu, mais sans doute surtout rappeler à l'ordre les professionnels du secteur qu'une recommandation vieille de plus de seize ans n'inquiétait plus. La recommandation a, par conséquent, l'intérêt de replacer sur le devant de la scène les contrats proposés par les syndics de copropriété aux consommateurs ou plus exactement aux syndicats de copropriétaires (personnes morales, certes, mais dont la qualité de consommateur est reconnue en jurisprudence, cf. par exemple : Cass. civ. 1, 23 juin 2011, n° 10-30.645, FS-P+B+I N° Lexbase : A2997HUK, Cont. conc. cons., 2011, comm. 226, malgré quelques résistances des juges du fond comme : CA Aix-en-Provence, 1ère ch., sect. B, 16 décembre 2010, n° 10/05150 N° Lexbase : A1253GP4 ou surtout la position de la CJUE qui refuse la qualité de consommateur à toute personne morale, CJCE, 22 novembre 2001, aff. C-541/99 N° Lexbase : A5814AXM, JCP éd. G, 2002, II, 10047).

Pour la Commission des clauses abusives, en revanche, il ne fait aucun doute que les syndicats de copropriétaires méritent la protection du Code de la consommation : "Considérant que les syndics proposent des contrats de mandat aux copropriétaires consommateurs réunis en syndicats ; Considérant que les syndicats de copropriétaires, dotés de la personnalité morale, bénéficient de la protection accordée par la loi aux consommateurs et aux non-professionnels". Ce faisant, la Commission rappelle implicitement la faiblesse de certains syndicats qui ne sont finalement que le porte-parole de propriétaires souvent personnes physiques (mais pas toujours) qui sont, à l'égard du professionnel qu'est le syndic, dans la même situation de faiblesse qu'un consommateur stricto sensu.

En 1996, la précédente recommandation stigmatisait plusieurs comportements. Elle proposait la suppression des clauses (9 en l'occurrence) : qui permettaient au syndic de démissionner (et donc en réalité de résilier son contrat) sans prévoir pour le syndicat des copropriétaires la même possibilité de résiliation en cours d'exécution ; qui laissaient supposer une reconduction automatique du contrat à la fin du mandat et le maintien en fonction du syndic au-delà de la durée légale sans vote de l'assemblée générale ; qui présentaient comme légalement obligatoire l'ouverture d'un compte séparé au nom du syndicat, ou, au contraire, l'utilisation d'un compte unique au nom du syndic ; qui imposaient sans contrepartie au syndicat des copropriétaires la renonciation à percevoir les fruits et produits financiers des sommes placées sur un compte séparé ; qui restreignaient la notion de gestion courante par l'accumulation de prestations particulières et/ou par le recours à la rubrique "divers" ; qui mettaient à la charge du syndicat, en cas de non-renouvellement ou de résiliation du contrat du syndic, une indemnité forfaitaire ne correspondant pas à une prestation effective liée à la remise du dossier au successeur ; qui faisaient supporter au copropriétaire défaillant une rémunération au profit du syndic à l'occasion des frais de relance et de recouvrement ; qui imposaient une clause de révision des honoraires dont les éléments n'étaient pas suffisamment explicites et qui n'était pas illustrée par une application chiffrée ; et enfin qui dérogeaient aux règles légales de compétence territoriale ou d'attribution. Qu'en est-il aujourd'hui ?

La Commission semble toujours constater des abus, avec, semble-t-il, une plus grande subtilité et surtout un plus grand nombre de pratiques abusives. La recommandation en distingue de deux ordres, celles relatives à la formation et à la résiliation du contrat d'une part, et celles relatives à l'exécution du contrat, d'autre part.

Au titre de la formation et de la résiliation du contrat, sont visées les clauses qui, de facto, laissent toute liberté au syndic tout en contraignant le syndicat de copropriétaires dans le carcan contractuel qu'il a signé.

Certaines clauses y parviennent en désinformant le syndicat sur la véritable portée de son engagement : "certains contrats de syndics de copropriété sont conclus pour une durée ne correspondant pas à celle résultant des dates calendaires qui y figurent ; [...] ces clauses conduisent à un déséquilibre significatif pour le consommateur ou le non-professionnel qui ne connaît pas la durée réelle de son engagement". Certaines clauses, déjà repérées en 1996, semblent toujours exister et sont relatives aux conditions de rémunération des comptes de gestion séparés "Considérant que l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 modifiée (N° Lexbase : L4813AHQ), prévoit le principe de l'ouverture d'un compte bancaire ou postal au nom du syndicat, sur lequel sont versées sans délai toutes les sommes ou valeurs réputées au nom ou pour le compte du syndicat et que l'assemblée générale peut en décider autrement à la majorité requise par les articles 25 (N° Lexbase : L4825AH8) et 25-1 (N° Lexbase : L5476IGW) ; qu'un nombre important de contrats indique un prix de forfait annuel de gestion courante sur la base de la gestion d'un compte bancaire unique pour l'ensemble du cabinet de syndic ; que certains de ces mêmes contrats prévoient au titre des prestations particulières rémunérées distinctement l'ouverture d'un compte bancaire séparé pour le syndicat ; que les autres stipulent un coût de forfait annuel plus élevé en cas d'ouverture d'un compte séparé ; que ces deux types de clauses sont abusifs en ce que, d'une part, ils laissent croire aux syndicats des copropriétaires que le principe est celui de l'ouverture d'un compte unique alors que la loi prévoit le contraire, d'autre part, en ce qu'ils font apparaître au titre des prestations particulières, rémunérées distinctement, l'ouverture d'un compte séparé alors que celle-ci doit figurer au titre des prestations courantes".

Certaines clauses, manifestement abusives, permettent la révision unilatérale du prix par le syndic "Considérant que des contrats prévoient que lorsque le syndic est mandaté pour la location d'une partie commune, les honoraires seront ceux affichés en agence ; que ces clauses, qui laissent au professionnel le droit de modifier unilatéralement les prix du service à rendre, par un simple changement d'affichage, sont présumées de manière irréfragable abusives en vertu de l'article R. 132-1 3° du Code de la consommation (N° Lexbase : L1596IBQ) [...] Considérant que certains contrats de syndics de copropriété proposent des prestations sans en mentionner le prix ou leur mode de calcul ; que cette présentation ne permet pas au consommateur ou non-professionnel, d'avoir connaissance du prix à payer pour ces prestations et empêche une comparaison efficace avec les autres contrats de syndic, ce qui est de nature à déséquilibrer significativement le contrat au détriment du syndicat des copropriétaires [...] Considérant que certains contrats n'opèrent pas une distinction stricte dans leur présentation entre les prestations de gestion courante, dont le prix est inclus dans le forfait annuel, et les prestations variables facturées séparément ; que cette présentation ne permet pas au consommateur ou non-professionnel de connaître aisément les prestations incluses dans le forfait annuel et, par suite, rend difficile une comparaison efficace avec les autres contrats de syndic, ce qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat au détriment du syndicat des copropriétaires".

D'autres, de manière très classique, allouent au professionnel des avantages que n'a pas le consommateur : "Considérant qu'un nombre important de contrats de syndic impose des modalités de résolution ou de résiliation plus rigoureuses pour le consommateur ou le non-professionnel que pour le professionnel ; que, selon l'article R. 132-2 du Code de la consommation (N° Lexbase : L1618IBK), sont présumées abusives les clauses soumettant la résiliation du contrat à des conditions ou modalités plus rigoureuses pour le consommateur ou non-professionnel que pour le professionnel".

S'agissant du temps d'exécution du contrat, la Commission repère des clauses particulièrement graves puisqu'elles sont ni plus ni moins contraires à des dispositions légales d'ordre public : " 7. Considérant qu'il résulte de l'article 35-1 du décret du 17 mars 1967 (N° Lexbase : L5528IGT) que l'assemblée générale des copropriétaires décide, s'il y a lieu, du placement des fonds recueillis et de l'affectation des intérêts produits par ce placement ; que certains contrats prévoient qu'en cas de gestion financière par le biais d'un compte unique ouvert au nom du syndic, les profits éventuels de ce compte seront versés automatiquement à ce dernier, sans qu'il y ait lieu à un vote spécial de l'assemblée générale sur l'affectation des intérêts [...] ;
8. Considérant que certains contrats mentionnent la possibilité pour le syndic de mener une activité de courtage pour la conclusion de toute convention, en qualité de mandataire du syndicat des copropriétaires [...] ;
9. Considérant que des contrats imposent, pour des prestations ne relevant pas du contrat de syndic (location d'une partie commune, gestion des travaux en tant que maître d'oeuvre), que le syndic soit mandaté de plein droit pour ces prestations [...] ;
10. Considérant que certains contrats prévoient la rémunération du syndic dans le cas d'une déclaration de sinistre concernant les parties communes [...] ;
11. Considérant que certains contrats prévoient la possibilité pour le syndic de se faire rémunérer, à titre de prestation particulière, pour le suivi de travaux, sans préciser la nature des travaux concernés, [...] ;
12. Considérant que certains contrats imposent la rémunération de'prestations exceptionnelles non répertoriées', [...] ;
13. Considérant que plusieurs contrats scindent des prestations de gestion courante prévues dans l'arrêté du 19 mars 2010 (N° Lexbase : L2780IRE) modifiant l'arrêté du 2 décembre 1986, telles que l'établissement et la mise à jour du carnet d'entretien, en plusieurs prestations particulières du type 'création du carnet d'entretien', 'tenue du carnet d'entretien de l'immeuble' ; qu'ainsi, le syndic peut être rémunéré de manière particulière pour des prestations de gestion courante ; [...]
14. Considérant qu'un nombre très important de contrats indique, dans le cas de travaux autres que ceux d'entretien et de maintenance, dont la liste est fixée à l'article 44 du décret du 17 mars 1967 (N° Lexbase : L5547IGK), que la rémunération du syndic sera constituée par un montant minimum ou un pourcentage du montant de ces travaux, [...].
[Toutes] ces clauses sont illicites au regard du texte susvisé et, maintenues dans un contrat, abusives".

Certaines clauses, peut-être moins dangereuses en apparence, sont néanmoins redondantes et peuvent permettre d'aboutir à une double facturation au profit du professionnel : "16. Considérant que certains contrats prévoient une prestation particulière consistant à notifier les travaux nécessitant l'accès aux parties privatives ; qu'il s'agit d'une obligation pour le syndic prévue à l'article 9 de la loi du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L4861AHI) ; qu'il résulte de l'arrêté du 2 décembre 1986 modifié que la gestion des travaux de maintenance et d'entretien est incluse dans le forfait annuel et que la gestion administrative des autres travaux est une prestation particulière ; qu'ainsi, cette clause est abusive en ce qu'elle permet au syndic de se faire rémunérer pour une prestation comprise dans une prestation déjà rémunérée ;
17. Considérant que certains contrats énumèrent, au titre des prestations particulières, des rubriques susceptibles de permettre deux fois la rémunération d'une même prestation
[...] ;
18. Considérant que
[...] cette clause qui met à la charge du syndicat des copropriétaires une prestation qui ne lui incombe pas, dès lors qu'elle ne profite qu'au seul copropriétaire concerné, crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du syndicat des copropriétaires ;
19. Considérant que certains contrats mentionnent des honoraires, des frais de correspondance, des frais administratifs en plus des frais de tirage, d'affranchissement et d'acheminements pour les activités de productions de documents, sans indiquer en quoi elles se distinguent de prestations déjà rémunérées au titre de la gestion courante ou de prestations particulières
[...]".

Le dernier type de clause, enfin, concerne le manque de clarté de certaines stipulations qui seraient à même d'induire le consommateur en erreur : "20. Considérant que certains contrats permettent de faire peser sur le syndicat, des frais engagés au profit des copropriétaires bailleurs ; que de telles clauses sont abusives ;
21. Considérant que certains contrats prévoient la même prestation particulière de tenue d'assemblée générale extraordinaire, en indiquant soit un mode de rémunération à la vacation, soit un droit proportionnel par lot principal ; que de telles clauses, qui réservent au seul professionnel le choix de son mode de rémunération, sont abusives ;
22. Considérant que des contrats précisent que le compte unique permettra d'assurer une garantie financière aux sommes versées ou qu'il permettra de disposer de la situation de la trésorerie et du détail des recettes et des dépenses, sans préciser que le compte séparé offre les mêmes garanties et services, alors que la garantie et la délivrance de ces informations sont obligatoires, respectivement en application de la loi du 2 janvier 1970
(loi n° 70-9 N° Lexbase : L7536AIX) et du décret du 17 mars 1967 ; que cette présentation laisse croire qu'un compte séparé ne permettrait pas de bénéficier des mêmes prestations, ce qui est de nature à créer un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat au détriment du syndicat des copropriétaires ;
23. Considérant que les clauses de certains contrats mentionnent, en prestation particulière, 'la gestion des comptes à terme', 'le suivi des placements de fonds' ; que l'imprécision de ces termes ne permet pas de savoir si ces prestations sont incluses ou non dans 'l'état financier du syndicat des copropriétaires' qui est une prestation intégrée dans la liste a minima des prestations de gestion courante fixée par l'arrêté du 2 décembre 1986 modifié ; qu'en conséquence, le manque de clarté de ces clauses crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat au détriment du syndicat des copropriétaires ;
24. Considérant que les contrats conclus entre le syndic et le syndicat des copropriétaires comportent des clauses prétendant créer des obligations à la charge des copropriétaires individuellement considérés ; que de telles clauses, qui portent atteinte à l'effet relatif du contrat et laissent croire à chaque copropriétaire qu'il est engagé par le contrat de syndic, sont abusives
[...]".

On s'interrogera, alors, sur le caractère abusif de ces clauses. Manquant de clarté, elles pourraient peut-être être sanctionnées au titre du dol ou de l'erreur et non des clauses abusives. La sanction serait alors bien plus lourde. On attendra avec impatience la prochaine recommandation ou le prochain avis de la Commission pour savoir si les professionnels du secteur auront modifié leur comportement.

newsid:429009

Consommation

[Brèves] Publication d'une Directive relative aux droits des consommateurs

Réf. : Directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs (N° Lexbase : L2807IRE)

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N9051BSZ

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Le 02 Décembre 2011

A été publiée au Journal officiel de l'Union européenne du 22 novembre 2011, la Directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs (N° Lexbase : L2807IRE). Modifiant la Directive 93/13/CEE du Conseil (N° Lexbase : L7468AU7) et la Directive 1999/44/CE du Parlement européen et du Conseil (N° Lexbase : L0050AWR) et abrogeant la Directive 85/577/CEE du Conseil (N° Lexbase : L9639AUK) et la Directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil (N° Lexbase : L7888AUP), cette nouvelle Directive, qui devra être transposée par les Etats membres d'ici au 13 décembre 2013, pour entrer en vigueur au plus tard le 13 juin 2014, vise à harmoniser certains aspects des contrats de consommation à distance et hors établissement, afin de promouvoir un véritable marché intérieur des consommateurs offrant un juste équilibre entre un niveau élevé de protection des consommateurs et la compétitivité des entreprises, dans le respect du principe de subsidiarité. La nouvelle Directive s'écarte, ainsi, du principe d'harmonisation minimale, présent dans les anciennes Directives, tout en permettant aux Etats membres de maintenir ou d'adopter des règles nationales concernant certains aspects. Elle établit des règles relatives aux informations à fournir pour les contrats à distance, les contrats hors établissement et les contrats autres que les contrats à distance et hors établissement. Elle prévoit, également, pour les contrats à distance et hors établissement, un droit de rétractation qui peut s'exercer dans un délai de 14 jours sans avoir à motiver sa décision et sans encourir de coûts. Elle harmonise, par ailleurs, les dispositions traitant de l'exécution des contrats, s'agissant notamment des délais de livraison. Le champ d'application du texte est limité aux contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs.

newsid:429051

Construction

[Brèves] CCMI avec fourniture du plan : clause d'abandon préalable de créance relative à la prime EDF et indétermination des conditions du contrat

Réf. : CA Lyon, 27 octobre 2011, n° 10/05777 (N° Lexbase : A2341HZQ)

Lecture: 1 min

N9030BSA

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Le 30 Novembre 2011

Conformément aux articles L. 231-2 (N° Lexbase : L7277AB7) et R. 231-4 (N° Lexbase : L8030IAN) du Code de la construction, dispositions d'ordre public relatives au contrat de construction d'une maison individuelle avec fourniture du plan, destinées à sécuriser financièrement le maître de l'ouvrage, le surcoût ou plus-value est intégré au prix forfaitaire et toute modification du prix doit faire l'objet d'un avenant détaillant et liquidant son montant destiné à garantir le consentement du maître de l'ouvrage. Tel est le principe rappelé par la cour d'appel de Lyon dans un arrêt du 27 octobre 2011 (CA Lyon, 27 octobre 2011, n° 10/05777 (N° Lexbase : A2341HZQ). En l'espèce, la rédaction même de la clause d'abandon préalable de créance relative à la prime EDF intégrée au contrat de construction traduit une indétermination des conditions du contrat de construction et du forfait en ce qu'il est stipulé que l'adaptation du descriptif est envisageable avec l'installation de convecteurs électriques radiants dans certaines pièces dont le nombre et le coût ne sont pas définis. Il en résulte que la société S., qui n'a pas précisé dans le contrat et la notice descriptive faisant partie intégrante du contrat, le coût correspondant au choix des équipements permettant l'obtention du label Promotelec confort électrique ainsi que le montant de la prime destinée à compenser ce surcoût, éléments pouvant être déterminés et connus lors de la souscription du contrat, est mal fondée à prétendre avoir avancé, pour le compte du maître d'ouvrage, des frais non facturés au contrat de construction d'une maison individuelle soumis à des dispositions d'ordre public qu'elle ne pouvait ignorer en sa qualité de constructeur de maison individuelle.

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Copropriété

[Evénement] Les droits et actions des copropriétaires lors des désordres et malfaçons - Compte-rendu de la réunion de la Commission de droit immobilier du barreau de Paris

Lecture: 22 min

N9062BSG

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par Anne-Lise Lonné-Clément, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition privée

Le 06 Décembre 2011

La sous-commission "Responsabilité assurance construction" de la Commission de droit immobilier de l'Ordre des avocats du barreau de Paris tenait, le 15 novembre 2011, sous la responsabilité de Jean-François Péricaud et de Michel Vauthier, une réunion sur le thème des "droits et actions des copropriétaires lors des désordres et malfaçons", animée par Maître Elisabeth Kalantarian. Présentes à cette occasion, les éditions Lexbase vous proposent de retrouver un compte-rendu de cette réunion. L'intervenant a suivi le déroulement classique d'un dossier.

1. La procédure de référé préalable et ses effets interruptifs

Avant tout, Elisabeth Kalantarian a rappelé que l'interruption ne porte que sur les désordres désignés, sachant que la désignation doit viser la manifestation du désordre, et son siège, mais non la cause.

Par ailleurs, avant toute procédure de référé, il convient de rappeler, d'une part, que le sinistre doit faire l'objet d'une déclaration préalable auprès de l'assureur dommages-ouvrage, à peine d'irrecevabilité de la demande en référé (Cass. civ. 1, 28 octobre 1997, n° 95-20.421 N° Lexbase : A0745ACL), et d'autre part, que les dispositions de l'article L. 242-1 du Code des assurances (N° Lexbase : L1892IBP), d'ordre public, interdisent à l'assuré de saisir une juridiction aux fins de désignation d'un expert avant l'expiration du délai de soixante jours (Cass. civ. 3, 10 mai 2007, n° 06-12.467, FS-P+B N° Lexbase : A1156DWQ). A noter que l'irrégularité tenant à l'absence de déclaration préalable du sinistre peut être soulevée ultérieurement au fond, même si l'assureur ne le soulève pas au moment du référé.

S'agissant de la portée de l'effet interruptif en cas d'ordonnances de référé successives communes qui étendent la mission de l'expert à de nouvelles parties, la question s'est posée de savoir si l'effet interruptif provoqué par une nouvelle ordonnance avait un effet interruptif à l'égard des parties initialement assignées. Cette question fait l'objet d'une divergence entre les trois chambres de la Cour de cassation. La première chambre civile y répond positivement en considérant que "toute décision judiciaire apportant une modification quelconque à une mission d'expertise ordonnée par une précédente décision a un effet interruptif de prescription à l'égard de toutes les parties, y compris à l'égard de celles appelées uniquement à la procédure initiale, et pour tous les chefs de préjudice procédant du sinistre en litige" (Cass. civ. 1, 27 janvier 2004, n° 01-10.748, F-D N° Lexbase : A0344DBD). La troisième chambre civile a retenu la solution contraire (Cass. civ. 3, 21 mai 2008, n° 07-13.561, FS-P+B+I N° Lexbase : A6681D8X). La deuxième chambre civile s'est ralliée à la position de la première civile (Cass. civ. 2, 3 septembre 2009, n° 08-18.068, F-D N° Lexbase : A8427EKC ; Cass. civ. 2, 22 octobre 2009, n° 08-19.840, FS-P+B N° Lexbase : A2709EMB).

Il est à noter que l'ancien article 2244 du Code civil (N° Lexbase : L2532ABE) est devenu l'article 2241 (N° Lexbase : L7181IA9) depuis la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, portant réforme de la prescription en matière civile (N° Lexbase : L9102H3I) et qu'il ne vise plus une signification à celui que l'on veut empêcher de prescrire.

2. L'opposabilité du rapport d'expertise

Le rapport d'expertise n'est opposable qu'à la partie assignée ou représentée, en application de l'article 16 du Code de procédure civile (Cass. civ. 3, 7 octobre 1987, n° 86-12.830 N° Lexbase : A3012CPA ; Cass. civ. 3, 23 avril 1992, n° 90-14.071 N° Lexbase : A5161AHM).

Toutefois, il a été jugé que le rapport est opposable à l'assureur de responsabilité civile qui n'a pas été assigné, dès lors que son assuré l'a été, sauf en cas de fraude de l'assuré (Cass. civ. 2, 4 novembre 1992, n° 90-19.807 N° Lexbase : A5499AH7 ; Cass. civ. 1, 20 octobre 1993, n° 91-18.969 N° Lexbase : A7551CXX ; Cass. civ. 2, 1er juillet 2010, n° 09-10.590, FS-P+B N° Lexbase : A6699E3I).

A noter, toutefois, un arrêt rendu par la deuxième chambre civile le 8 septembre 2011 qui remet en cause le principe selon lequel le rapport d'expertise n'est opposable qu'à la partie assignée ou représentée (Cass. civ. 2, 8 septembre 2011, n° 10-19.919, FS-P+B N° Lexbase : A5449HX4). Mais Maître Kalantarian s'est montrée réservée quant à la portée à donner à cette décision.

3. L'habilitation du syndic

En vertu de l'article 55, alinéa 2, du décret du 17 mars 1967 (N° Lexbase : L5562IG4), le syndic est dispensé de justifier d'une autorisation de l'assemblée générale pour agir en référé. S'agissant d'une action au fond, lorsqu'une habilitation est nécessaire, celle-ci doit énoncer les désordres avec précision. Il est toutefois admis que les désordres puissent être référencés non pas dans le procès-verbal d'assemblée lui-même, mais dans un document extérieur, tel un rapport amiable ou un rapport d'expertise judiciaire, à condition que ce document ait été préalablement communiqué aux copropriétaires ou annexé à la convocation pour l'assemblée (Cass. civ. 3, 11 mai 2000, n° 98-19.325 N° Lexbase : A4637CR8 ; Cass. civ. 3, 16 décembre 2008, n° 07-19.133, F-D N° Lexbase : A9019EBN). La prudence commande, toutefois, de faire figurer les désordres dans le procès-verbal lui-même.

En revanche, il n'est pas nécessaire d'indiquer l'identité des personnes à assigner, une désignation catégorielle étant suffisante (Cass. civ. 3, 17 février 1988, n° 86-16.747 N° Lexbase : A6962AA4 ; Cass. civ. 3, 4 décembre 2002, n° 00-18.022, FS-P+B N° Lexbase : A2051A4Q ; Cass. civ. 3, 29 janvier 2003, n° 01-01.483, FS-P+B N° Lexbase : A8359A4D ; Cass. civ. 3, 23 juin 2004, n° 01-17.723, FS-P+B N° Lexbase : A7956DCN ; Cass. civ. 3, 9 février 2011, n° 10-10.599, FS-D N° Lexbase : A7326GWA).

Par ailleurs, il n'est pas nécessaire de prévoir une nouvelle autorisation à agir du syndic pour interjeter appel.

Il faut savoir, également, qu'un tiers n'a pas qualité pour contester la régularité de l'habilitation du syndic au regard des règles de la copropriété et ne peut discuter que de l'existence et de l'étendue de l'habilitation (CA Paris, 23ème B, 3 juillet 2008 n° 07/16609 N° Lexbase : A7735D9D).

Quoi qu'il en soit l'habilitation doit intervenir avant la prescription de l'action, en tenant compte des interruptions de délai résultant des assignations en référé (Cass. civ. 3, 7 juillet 1999, n° 97-15419, publié au bulletin N° Lexbase : A4938CGY).

Enfin, il a été jugé que le défaut d'habilitation du syndic constitue un défaut de pouvoir, en vertu de l'article 117 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1403H4Q), qui est sanctionné par une nullité de fond qui ne profite qu'à celui qui l'invoque et non une fin de non-recevoir que le juge peut relever d'office (Cass. civ. 3, 9 avril 2008, n° 07-13.236, FS-P+B+I N° Lexbase : A8898D7P). Maître Kalantarian souligne que, s'agissant d'une exception de procédure, elle ne peut être soulevée que devant le juge de la mise en état, et non devant le tribunal.

4. Les régimes juridiques en fonction de la nature des désordres

  • La garantie décennale

L'article 1792 du Code civil (N° Lexbase : L1920ABQ) pose trois critères pour la mise en oeuvre de la garantie décennale.

Tout d'abord, le désordre doit porter sur la construction d'un ouvrage. La notion d'ouvrage a donné lieu à débat, notamment concernant des travaux de rénovation. Il ressort de la jurisprudence que le ravalement constitue un ouvrage lorsque les prestations exécutées vont au-delà d'une simple remise en propreté des façades ; il en est ainsi, par exemple, quand il revêt une fonction d'étanchéité (Cass. civ. 3, 18 décembre 1996, n° 95-20.782 N° Lexbase : A7230CWP), en cas de changements de pierres de façades, en cas d'application d'un hydrofuge (CA Paris, 19ème A, 23 janvier 2001), ou en cas de pose d'un complexe isolant (Cass. civ. 3, 18 juin 2008, n° 07-12.977, FS-P+B N° Lexbase : A2192D93). La technique utilisée constitue également un critère jouant en faveur de la qualification d'ouvrage. En tout état de cause, il s'agit d'une appréciation in concreto.

Ensuite, le désordre doit porter atteinte à la solidité, ou à la destination de cet ouvrage. Si l'atteinte à la solidité est relativement aisée à déterminer, l'atteinte à la destination est plus difficilement appréciable, dans la mesure où il s'agit d'une notion subjective. Sur cette notion d'impropriété à la destination, le Professeur Malinvaud, dans un éditorial (RDI, 2010, p. 465), a récemment rappelé la définition retenue en 1992 par le Comité pour l'application de la loi (COPAL), laquelle permet de donner une ligne de conduite : "l'impropriété à la destination de l'ouvrage est celle qui entraîne l'impossibilité d'en jouir conformément à l'attente légitime du maître de l'ouvrage". L'attente légitime diffère ainsi selon la destination de l'immeuble.

Par exemple, l'inondation d'un parking extérieur rendant impossible l'accès aux voitures par les propriétaires a été jugée comme constituant une atteinte à la destination de l'ouvrage (CA Paris, Pôle 4, 5ème ch., 30 juin 2010, n° 08/12291 N° Lexbase : A4301E43). Il a également été jugé que des cloquages et des décollements de sols en résine de balcons constituaient une atteinte à la destination, qui peut donc se manifester à l'extérieur (CA Paris, 19ème ch., sect. A, 25 mars 2009, n° 06/14252 N° Lexbase : A5422EEK).

Maître Kalantarian a également cité tous les cas d'"impropriété dangerosité", en cas de risque pour la sécurité des personnes (cf., notamment, en cas de défaut de conformité à la réglementation parasismique : Cass. civ. 3, 7 octobre 2009, n° 08-17.620, FS-P+B N° Lexbase : A2665EMN et Cass. civ. 3, 11 mai 2011, n° 10-11.713, FS-P+B N° Lexbase : A1162HRH ; en cas de largeur insuffisante du passage piéton le long de la porte basculante du garage, et le défaut de report d'alarme de la porte basculante vers la loge du gardien : Cass. civ. 3, 3 mars 2010, n° 07-21.950, FS-P+B N° Lexbase : A6471ESH). Il ressort de ces décisions que le risque, même non réalisé, constitue en lui-même une impropriété à la destination.

La garantie décennale s'applique également en cas d'atteinte à la solidité d'un élément d'équipement indissociable, selon la définition donnée par l'article 1792-2 du Code civil (N° Lexbase : L6349G9Z).

La jurisprudence a, par ailleurs, posé une quatrième condition, à savoir que le vice doit être caché, du moins pour ce qui concerne le constructeur. En revanche, dans le cadre d'une action contre le vendeur en l'état futur d'achèvement, ce dernier reste tenu des vices apparents à condition d'intenter l'action dans le délai d'un an fixé par l'article 1648, alinéa 2, du Code civil (N° Lexbase : L9212IDK). Ainsi que le souligne Elisabeth Kalantarian, l'application jurisprudentielle reste bienveillante pour l'acquéreur dans la mesure où certains vices qui sont apparents, sont en réalité qualifiés de cachés ; les juges estiment que n'est qualifié d'apparent qu'un vice perçu comme tel dans sa cause, ses manifestations et ses conséquences dommageables.

  • La garantie de bon fonctionnement

La garantie de bon fonctionnement, prévue par l'article 1792-3 du Code civil (N° Lexbase : L6350G93), et limitée à deux ans, concerne les éléments d'équipement dissociables.

Selon l'intervenante, cette garantie constitue l'une des notions les plus "irritantes" du droit de la construction, dans la mesure où elle est extrêmement difficile à cerner, d'une part du fait de l'absence de définition de l'élément d'équipement, d'autre part, en raison de sa difficile application à l'égard d'éléments inertes.

Face à ces deux difficultés d'interprétation, la jurisprudence est extrêmement hétéroclite. La Cour de cassation a estimé que ne relevaient pas de la garantie de bon fonctionnement : des cloisons et des plafonds (Cass. civ. 3, 22 mars 1995, n° 93-15.233 N° Lexbase : A7797ABE ; Cass. civ. 3, 14 décembre 2004, n° 03-18.142, F-D N° Lexbase : A4830DEM), des peintures n'ayant qu'un rôle esthétique (Cass. civ. 3, 27 avril 2000, n° 98-15970 N° Lexbase : A1961CKT), ou encore pour des enduits de façade (Cass. civ. 3, 22 octobre 2002, n° 01-01.539, F-D N° Lexbase : A3409A3N).

  • Les dommages intermédiaires

Les dommages intermédiaires constituent, selon Maître Kalantarian, une "sous-garantie décennale". Leur définition est négative puisqu'il s'agit des désordres ne relevant ni de la garantie décennale, faute de remplir la condition de gravité, ni de la garantie de bon fonctionnement, faute d'affecter un élément d'équipement dissociable. Il s'agit, par exemple, des fissures sans gravité sur les façades.

Ces dommages relèvent d'un régime original de responsabilité contractuelle dans la mesure où il s'agit d'une responsabilité pour faute prouvée contrairement au régime de la responsabilité contractuelle classique prévu par l'article 1147 du Code civil (N° Lexbase : L1248ABT), qui institue une obligation de résultat.

  • La responsabilité contractuelle de droit commun

Concernant le délai de prescription, il convient de distinguer avant et après la loi du 17 juin 2008.

La jurisprudence antérieure à la loi du 17 juin 2008 retenait, en matière contractuelle, et concernant les désordres de construction, un délai de dix ans à compter de la réception des travaux, par similitude avec la garantie décennale. En revanche, lorsque la responsabilité contractuelle était invoquée en dehors de désordres de construction, le droit commun devait s'appliquer.

L'article 1792-4-3 du Code civil (N° Lexbase : L7190IAK), institué par la loi du 17 juin 2008, a consacré cette solution jurisprudentielle, avec quelques nuances.

En effet, dans certains cas, les dispositions prévues par l'article 1792-4-3 instituent un régime plus restrictif que la jurisprudence antérieure. Cet article vise les actions en responsabilité dirigées contre les constructeurs désignés aux articles 1792 et 1792-1 et leurs sous-traitants. Ainsi, ne relèvent pas de cet article : le vendeur en état futur d'achèvement, qui n'est pas juridiquement un constructeur, ou encore le contrôleur technique.

Par ailleurs, la notion de constructeur implique la notion d'ouvrage. Aussi, en l'absence d'ouvrage, cet article n'est pas applicable.

En outre, dans l'hypothèse d'une absence de réception, la jurisprudence antérieure fixait le point de départ de ce délai de dix ans à la date de la manifestation du dommage (Cass. civ. 3, 24 mai 2006, n° 04-19.716, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A7420DPI). Dans la mesure où l'article 1792-4-3 précise que le délai court à compter de la réception, on peut se demander si cette jurisprudence antérieure est transposable, ou s'il y a lieu de faire application du nouvel article 2224 du Code civil (N° Lexbase : L7184IAC), selon lequel le droit commun est désormais de cinq ans à compter du jour où la victime a connu les faits lui permettant d'exercer le droit.

Dans d'autres cas, les dispositions de l'article 1792-4-3 entraînent une application plus large que la jurisprudence antérieure. Dans la mesure où celle-ci excluait le dol du délai contractuel de dix ans, de même que les actions en responsabilité fondées sur des situations n'ayant pas donné lieu à des désordres, la question se pose aujourd'hui de savoir si une telle interprétation est encore permise à la lecture des dispositions de l'article 1792-4-3, qui vise toutes les actions (en dehors des autres actions légales), et qui semble englober toutes les actions autres que celles fondées sur les garanties décennales ou biennales. La question reste ouverte selon Elisabeth Kalantarian.

Concernant le régime de l'action en responsabilité contractuelle, l'intervenante a rappelé qu'il s'agit d'une obligation de moyens ou de résultat selon la nature de la prestation ; les prestations intellectuelles (prestation d'architecte, par exemple) impliquent une obligation de moyens, alors que les prestations matérielles d'entreprises consistent en une obligation de résultat.

Maître Kalantarian a également rappelé la jurisprudence relative aux défauts de conformité, selon laquelle, même s'ils ont comme origine une non-conformité aux stipulations contractuelles, les dommages qui relèvent d'une garantie légale ne peuvent donner lieu, à l'encontre des personnes tenues à cette garantie, à une action en réparation sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun (Cass. civ. 3, 13 avril 1988, n° 86-17.824 N° Lexbase : A7781AAG).

Enfin, l'évolution législative découlant de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion (N° Lexbase : L0743IDU), a modifié les articles 1642-1 (N° Lexbase : L8942IDK) et 1648 du Code civil en ajoutant aux mots "vices apparents", les mots "non-conformités apparentes". Autrement dit, à l'égard du vendeur, les non-conformités apparentes sont également encadrées dans le délai d'un an imparti pour intenter une action.

  • La garantie de parfait achèvement

Sur cette garantie, Maître Kalantarian a simplement rappelé qu'elle ne permet qu'une réparation en nature et qu'elle ne peut donc donner lieu à un paiement, à moins que le maître d'ouvrage, après mise en demeure infructueuse, ait fait réaliser les travaux et en réclame le remboursement.

Par ailleurs, le bénéficiaire de la garantie est le maître de l'ouvrage. Il convient de préciser qu'il s'agit donc, jusqu'à la réception des travaux, du vendeur en état futur d'achèvement, et du syndicat des copropriétaires par la suite, en application de l'article 1601-3 du Code civil (N° Lexbase : L1700ABL).

5. Deux cas particuliers : les dommages évolutifs et le préjudice futur

Au lieu de "dommages évolutifs", Elisabeth Kalantarian préfère l'expression "d'aggravation post-décennale" d'un désordre dont réparation a déjà été demandé en justice pendant le délai décennal.

La jurisprudence est assez sévère puisqu'elle exige trois conditions cumulatives pour que l'on puisse demander réparation après l'expiration de la garantie décennale.

Trois conditions cumulatives sont ainsi exigées. Tout d'abord, les désordres initiaux doivent avoir été dénoncés judiciairement dans le délai décennal. Il est ensuite nécessaire que les désordres d'origine aient bien eu la gravité de la nature de ceux exigés pour relever de l'article 1792 du Code civil. Enfin, les nouveaux désordres apparus postérieurement au délai de dix ans doivent être la suite des désordres initiaux, dont ils constituent une aggravation. S'agissant de cette troisième condition, pour vérifier qu'il s'agit bien de la suite des désordres initiaux, les juges s'attachent soit au fait que la partie sinistrée est la même, soit au fait qu'il s'agit de la même cause de sinistre alors qu'elle affecte d'autres parties.

La Cour de cassation a ainsi retenu l'identité d'ouvrage lorsque les désordres ont affecté 38 garde-corps à l'intérieur du délai décennal, puis 267 après expiration du délai (Cass. civ. 3, 8 octobre 2003, n° 01-17.868, FS-P+B+I N° Lexbase : A7162C97). En revanche, elle a retenu une solution contraire s'agissant de corbeaux (Cass. civ. 3, 18 janvier 2006, n° 04-17.400, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A3805DMU). Concernant l'identité de cause, la Cour de cassation a retenu que la fissuration de carrelages dans cinq appartements qui s'est étendue à trente nouveaux appartements, résultait d'une même cause, à savoir de la faiblesse des chapes (Cass. civ. 3, 11 mai 2005, n° 04-11.186, FS-D N° Lexbase : A2386DI9).

Si ce principe des désordres évolutifs existe, Maître Kalantarian relève toutefois la difficulté de sa mise en oeuvre, notamment au regard de la troisième condition, dans la mesure où la jurisprudence est relativement fluctuante.

La notion de "préjudice futurs" est différente puisqu'elle concerne un désordre qui apparaît dans le délai de la garantie décennale mais qui ne remplit pas encore la condition de gravité, mais qui est susceptible de la remplir à brève échéance. Depuis un arrêt du 29 janvier 2003, il faut prouver que la condition de gravité se réalisera avec certitude dans le délai de dix ans. La troisième chambre civile a retenu, en l'espèce, "qu'un procès-verbal de constat d'huissier de justice établissait que les détritus de bois provenant de la démolition de parties de l'immeuble entreposés dans un réduit muré au sous-sol étaient envahis par les termites et que ce désordre était de nature à porter atteinte à brève échéance et en tous cas avant l'expiration du délai de garantie décennale, à la solidité de l'immeuble" (Cass. civ. 3, 29 janvier 2003, n° 01-13.034, FS-P+B N° Lexbase : A8328A49).

6. Questions pratiques en matière d'assurances

S'agissant, notamment, de la prescription biennale à l'égard de l'assureur de dommages-ouvrage, il faut, tout d'abord, rappeler que le nouvel article 2239 du Code civil (N° Lexbase : L7224IAS), issu de la loi du 17 juin 2008, prévoit la suspension de la prescription en cas d'expertise judiciaire. Le délai de prescription recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à compter du jour où la mesure a été exécutée. Maître Kalantarian souligne que ces dispositions sont applicables à la prescription et non à la forclusion, et qu'elles ne sont, par conséquent, pas applicables aux garanties décennales et biennales qui prévoient des délais de forclusion.

Ensuite, l'intervenante a rappelé quelques éléments permettant d'écarter la prescription biennale invoquée par l'assureur.

La Cour de cassation a ainsi retenu que l'assureur ne peut pas opposer la prescription biennale s'il n'a pas rappelé, avec précision, les causes d'interruption dans la police (Cass. civ. 2, 2 juin 2005, n° 03-11.871, FS-P+B N° Lexbase : A5094DII ; Cass. civ. 2, 3 septembre 2009, n° 08-13.094, FS-P+B N° Lexbase : A8411EKQ ; Cass. civ. 2, 17 mars 2011, n° 10-15.267, F-D N° Lexbase : A1732HDI ; Cass. civ. 2, 28 avril 2011, n° 10-16.403, F-P+B N° Lexbase : A5346HPP ; Cass. civ. 3, 28 avril 2011, n° 10-16.269, FS-P+B N° Lexbase : A5356HP3).

Par ailleurs, il faut savoir que la prescription décennale ne s'applique pas à la police dommages-ouvrage elle-même, puisqu'elle ne concerne que les rapports avec le constructeur, et non les rapports entre l'assuré et l'assureur dommages-ouvrage. En effet, l'article L. 242-1 du Code des assurances, qui définit les obligations d'assureur DO, ne mentionne pas un délai de prescription de dix ans ; il se borne à renvoyer à l'article 1792 du Code civil, lequel ne contient aucun délai puisqu'il vise la réparation des désordres de nature décennale. La Cour de cassation, dans un arrêt du 4 mai 1999 a clairement indiqué que l'assuré dispose d'un délai pour agir contre l'assureur DO de deux ans à compter de la connaissance qu'il a des désordres survenus dans les dix ans qui ont suivi la réception (Cass. civ. 1, 4 mai 1999, n° 97-13.198, publié au bulletin N° Lexbase : A0312CGN ; Cass. civ. 1, 29 avril 2003, n° 00-12.046, F-D N° Lexbase : A7475BSN).

Enfin, à supposer que le délai soit prescrit, il est toujours possible d'assigner l'assureur sur le fondement du volet "CNR", c'est-à-dire au titre de l'action directe dont dispose la victime. C'est donc la prescription de l'action directe qui s'applique, à savoir la prescription de l'action contre le responsable auquel s'ajoute un délai de deux ans à compter du jour de l'assignation du responsable (Cass. civ. 1, 29 octobre 2002, n° 99-19.742, F-D N° Lexbase : A4057A3N ; Cass. civ. 1, 13 novembre 2002, n° 99-14.865, F-D N° Lexbase : A7268A3L ; Cass. civ. 2, 17 février 2005, n° 03-16.590, FS-P+B N° Lexbase : A7388DGQ).

Indépendamment de la prescription, il faut également signaler que, lorsque l'assureur dommages-ouvrage commence par missionner un expert pour un rapport préliminaire, la pratique consistant à notifier, dans un courrier unique, et non dans deux courriers distincts, le rapport de l'expert désigné d'une part, et sa position sur la garantie d'autre part, est sanctionnée par la Cour de cassation qui retient la nullité de la prise de position de l'assureur (Cass. civ. 3, 12 janvier 2011, n° 09-71.991, FS-D N° Lexbase : A9828GPP). Toutefois, cette jurisprudence va devenir obsolète compte tenu d'un arrêté en date du 19 novembre 2009, portant actualisation des clauses-types en matière d'assurance-construction (N° Lexbase : L2737IRS), qui permet désormais à l'assureur de notifier par une lettre unique le rapport préliminaire et sa position de garantie.

7. La qualité à agir : syndicat ou copropriétaires (action collective ou individuelle)

Il convient de se reporter à l'article 15 de la loi du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L4808AHK). Le premier alinéa prévoit la compétence du syndicat qui peut notamment agir, conjointement ou non avec un ou plusieurs copropriétaires, en vue de la sauvegarde des droits afférents à l'immeuble. Le second alinéa ajoute que "tout copropriétaire peut néanmoins exercer seul les actions concernant la propriété ou la jouissance de son lot, à charge d'en informer le syndic".

Concernant, tout d'abord, l'action collective, il faut rappeler que l'article 14, alinéa 4, prévoit également que le syndicat a pour objet la conservation de l'immeuble et qu'il est responsable des dommages causés aux copropriétaires par le vice de construction des parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires. En vertu de ces deux articles, le syndicat a donc qualité à agir en cas de désordres pour malfaçons à la construction et ce, bien qu'il ne soit pas propriétaire de l'immeuble, ni des parties communes.

Si la compétence du syndicat est évidente s'agissant des parties communes, la jurisprudence l'a étendue à des désordres apparus dans les parties privatives, sous certaines conditions. Il en est ainsi, tout d'abord, lorsque de tels désordres sont la conséquence de ceux affectant une partie commune (Cass. civ. 3, 16 mars 1988, n° 86-17.127 N° Lexbase : A7764AAS ; Cass. civ. 3, 31 mai 2000, n° 98-16.079 N° Lexbase : A8687C7U ; Cass. civ. 3, 11 mai 2005, n° 04-11.186 FS-D N° Lexbase : A2386DI9), étant précisé que cette solution s'applique même si le désordre affectant une partie privative ne concerne qu'un ou plusieurs lots ; de même lorsque les désordres privatifs et communs sont imbriqués (Cass. civ. 3, 20 juin 1978, n° 77-10.054 N° Lexbase : A2820CIB ; Cass. civ. 3, 27 février 2008, n° 06-14.062, FS-D N° Lexbase : A1729D78) ; ou encore lorsque les désordres n'affectent que les parties privatives mais sont collectifs, comme par exemple un désordre affectant toutes les robinetteries (Cass. civ. 3, 14 novembre 1990, n° 88-12.995 N° Lexbase : A4338ACN).

Il faut savoir que la solution est totalement différente en cas de désordres privatifs immatériels. En cas de trouble de jouissance privative, par définition le trouble de jouissance ne peut être subi que par le copropriétaire individuellement, et ce dernier est fondé à agir en vertu de l'action qui lui est ouverte par l'article 15, alinéa 2, de la loi. Toutefois, la jurisprudence admet la recevabilité à agir du syndicat, sous condition que le préjudice soit collectif, c'est-à-dire qu'il touche l'ensemble des copropriétaires, et qu'il soit ressenti de manière identique par chacun d'entre eux. Ainsi, par exemple, en cas de défaut de délivrance de certificat de conformité, le syndicat des copropriétaires a été jugé recevable à agir contre le promoteur pour obtenir la réalisation d'emplacements de stationnements privatifs prévus, dès lors qu'il s'agit d'un préjudice collectif (CA Paris, 23ème ch., 6 janvier 1995, RDI, 1995, p. 384 ; CA Paris, 18 novembre 2004, Loyers et copropriété, 2005, comm. 76). De même, en cas d'interruption totale de chauffage d'un immeuble, ou en cas de nuisances acoustiques ou olfactives subies par l'ensemble des copropriétaires, sachant que les juges ont retenu qu'une gêne olfactive pouvait être collective, même si elle n'était pas ressentie de façon identique par tous les copropriétaires, dès lors qu'ils l'ont tous subie (CA Paris, 23ème ch., sect. B, 29 janvier 2009, n° 06/21543 N° Lexbase : A1961EDY).

S'agissant de l'action individuelle d'un copropriétaire, le copropriétaire peut agir pour des désordres affectant ses parties privatives, mais également pour des désordres affectant les parties communes, sachant qu'il est titulaire d'une quote-part de parties communes, à condition qu'il justifie alors d'un préjudice personnel. Ainsi, par exemple, un copropriétaire bailleur a été jugé recevable à agir contre les constructeurs d'une verrière partie commune en raison des désordres résultant de la violation de la réglementation en matière de sécurité incendie relative aux bâtiments accueillant du public, qui faisaient ainsi obstacle à l'exploitation de la cour à jouissance exclusive située en dessous par le locataire commercial (Cass. civ. 3, 10 février 2010, n° 09-10.418, FS-D N° Lexbase : A7795ER7) ; cf. également : Cass. civ. 3, 3 mars 2010, n° 07-21.950, FS-P+B N° Lexbase : A6471ESH).

8. La réparation des dommages

Il faut rappeler que l'action tend à la réparation intégrale du préjudice subi, la jurisprudence retenant la formule selon laquelle il convient de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable ne s'était pas produit (Cass. civ. 3, 28 février 2001, n° 99-16.791 N° Lexbase : A0338ATP ; Cass. civ. 3, 22 octobre 2002, n° 01-12.327, F-D N° Lexbase : A3491A3P), sachant qu'il n'y a pas d'abattement pour amélioration, ni d'abattement pour vétusté.

Maître Kalantarian a estimé utile de revenir sur le problème des réparations inefficaces, donnant lieu à de nouvelles indemnisations. La Cour de cassation a ainsi retenu que lorsque la persistance des désordres trouve sa cause dans l'ouvrage d'origine, le constructeur initial et son assureur restent tenus du montant de la nouvelle indemnisation (Cass. civ. 3, 12 mai 1999, n° 97-10.146 N° Lexbase : A9704CRT : Cass. civ. 3, 11 octobre 2000, n° 98-19.917 N° Lexbase : A6729CRN).

Puis, dans un arrêt du 18 février 2003, la première chambre civile de la Cour de cassation a appliqué le même principe à l'égard de l'assureur dommages-ouvrage (Cass. civ. 1, 18 février 2003, n° 99-12.203, F-D N° Lexbase : A2013A7P). De même, la troisième chambre civile a retenu que l'assureur dommages-ouvrage devait assurer le préfinancement des travaux jusqu'à réparation intégrale (Cass. civ. 3, 7 juillet 2004, n° 03-12.325, F-D N° Lexbase : A0482DD9 ; Cass. civ. 3, 7 décembre 2005, n° 04-17.418, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A9233DLK).

Dans un arrêt rendu le 24 mai 2006, la troisième chambre civile est allée encore plus loin en faisant prévaloir le droit civil en retenant une responsabilité contractuelle de l'assureur dommages-ouvrage autorisant ainsi une indemnisation d'un préjudice non prévu dans la police Cass. civ. 3, 24 mai 2006, n° 05-11.708, FS-P+B N° Lexbase : A7564DPT ; Cass. civ. 3, 20 juin 2007, n° 06-15.686, FS-D A8796DWP ; Cass. civ. 3, 11 février 2009, n° 07-21.761 N° Lexbase : A1247EDK) Cass. civ. 3, 22 juin 2011, n° 10-16.308, FS-P+B N° Lexbase : A5238HUK). Dans ce dernier arrêt, la Cour de cassation ajoute que la réparation ne doit pas seulement être efficace mais également pérenne. Cette jurisprudence, parfaitement logique et conforme à l'esprit des textes, doit inciter les experts missionnés par les assureurs dommages-ouvrage à ne pas choisir des prestations minimum.

A noter que lorsqu'une procédure a donné lieu à un jugement condamnant les constructeurs à indemnisation au titre des travaux de réparation, et que ceux-ci s'avèrent inefficaces, les constructeurs ne peuvent opposer l'autorité de la chose jugée dans le cadre d'une deuxième procédure, dès lors que la nouvelle procédure ne présente ni une identité d'objet, ni une identité de chose, ni une identité de cause. En effet, il faut tenir compte des éléments postérieurs au premier litige qui ont modifié la situation antérieurement reconnue en justice, à savoir le caractère inefficace de la réparation (Cass. civ. 2, 6 mai 2010, n° 09-14.737, FS-P+B N° Lexbase : A0786EXE ; Cass. civ. 2, 10 juin 2010, n° 09-67.172, F-D N° Lexbase : A0212EZU ; et plus spécifiquement en droit de la construction : Cass. civ. 3, 12 mai 1999, n° 97-10.146 N° Lexbase : A9704CRT ; CA Paris, Pôle 4, 5ème ch., 30 juin 2010, n° 08/12291 N° Lexbase : A4301E43).

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Consommation

[Communiqué] La Commission des clauses abusives met en cause certaines pratiques contractuelles de syndics de copropriété

Réf. : Commission des clauses abusives, recommandation n° 11-01 relative aux contrats de syndic de copropriété

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par Malo Depincé, Maître de conférences à l'Université de Montpellier I et avocat au barreau de Montpellier

Le 01 Décembre 2011

Il y a seize ans déjà la Commission des clauses abusives avait étudié les pratiques contractuelles des syndics de copropriété et avait mis en cause plusieurs stipulations généralement ou trop souvent employées qui relevaient, selon elle, de la réglementation des clauses abusives (recommandation n° 96-01). Tous les syndics de copropriété n'ont probablement pas modifié leurs pratiques puisque la Commission vient de diffuser, le 17 octobre 2011, une seconde recommandation sur le sujet (recommandation n° 11-01, adoptée le 15 septembre 2011, à paraître au BOCCRF). Ce sont au total 24 types de clauses qui sont visés par cette recommandation. Cela n'implique pas qu'elles sont dorénavant automatiquement retirées des contrats en cause. Si tel était le cas, et si la simple recommandation de la Commission suffisait à rendre illicite une stipulation contractuelle visée, il n'eut pas été nécessaire de procéder à une seconde recommandation. Pour que la clause soit retirée d'un contrat, et même si elle correspond à l'exact cas stigmatisé dans une recommandation de la Commission, encore faut-il qu'un juge, pour chaque contrat ou chaque contrat-type qui lui est présenté, se prononce dans le même sens que la recommandation. On constate en pratique que c'est fort heureusement ce que le juge décide dans la plupart des contentieux. Pour autant, néanmoins, qu'un juge en soit saisi. Là réside la première faiblesse du dispositif de lutte contre les clauses abusives. Il existe quelques actions d'associations de consommateur en suppression de ces clauses sur le fondement de l'article L. 421-6 du Code de la consommation (N° Lexbase : L3081IQ8) : l'action est ouverte aux associations contre des contrats généralement proposés à des consommateurs par un professionnel, qu'il l'ait lui-même rédigé (CA Colmar, 16 juin 1995, JCP éd. G, 1995, II, 22932) ou que le modèle de contrat soit établi par un tiers, un franchiseur qui le transmet à ses franchisés par exemple (TGI Brest, 21 décembre 1994, Dalloz, 1995, somm. p. 310) ou par un syndicat à ses adhérents (Cass. civ. 1, 3 février 2011, n° 08-14.402, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A2358GRR ; nos obs. L'action en suppression des clauses réputées non écrites est ouverte contre les rédacteurs de contrats, qu'ils soient ou non contractants des consommateurs, Lexbase Hebdo n° 431 du 10 mars 2011 - édition privée N° Lexbase : N6385BRW) pourvu qu'il s'agisse effectivement d'un contrat de consommation (pour un exemple d'irrecevabilité de l'action des associations de consommateurs contre des contrats conclus entre professionnels et non-professionnels, cf. Cass. civ. 1, 4 mai 1999, n° 97-14.187 N° Lexbase : A3406AUP, Dalloz, 2000, somm. 48). De telles actions demeurent en quantité insignifiante au regard du nombre de contrats qui continuent à contenir des clauses abusives. Le caractère abusif d'une clause est également soulevé devant le juge à titre d'exception. Le consommateur assigné (en paiement) invoque le caractère abusif de la clause qui fonde l'action qui lui est intentée : créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur, la clause abusive est réputée non-écrite.

Si le juge est saisi, il convient d'admettre que la recommandation de la Commission des clauses abusives est suivie dans la très grande majorité des cas, probablement parce qu'étant un organisme paritaire (composée outre des spécialiste de ce contentieux et de magistrats, à proportion égale de représentants des consommateurs de représentants des professionnels, C. consom., art. L. 132-2 N° Lexbase : L6641ABL et art. R. 132-3 et s. N° Lexbase : L1565IBL). Si les recommandations n'ont aucune force obligatoire en droit (CE, 1° et 6° s-s-r., 16 janvier 2006, n° 274721 N° Lexbase : A4227DMI, Dalloz Affaires, 2006, AJ, 56), elles n'en ont pas moins un fort effet contraignant. Elles ne s'imposent pas au juge, en effet (Cass. civ. 1, 13 novembre 1996, n° 94-17.369 N° Lexbase : A8587ABN, Dalloz, 1997, somm. 174), mais l'on retrouve quelques décisions où il est expressément fait référence à une recommandation de la Commission, appui implicite de sa motivation (par exemple, Cass. civ. 1, 10 février 1998, n° 96-13.316 N° Lexbase : A2237ACT, Dalloz 1998, J., 539).

Toute recommandation de la Commission des clauses abusives constitue, donc, pour le praticien un texte de référence qui lui servira, dans l'hypothèse d'un contentieux, à appuyer son argumentation. Elle est également un outil précieux pour le consommateur lui-même qui, plus que les articles du Code de la consommation toujours d'un accès difficile pour le non-initié, lui permet de trouver une illustration plus précise de sa situation. Il reste que les recommandations ont parfois peu d'effet si le secteur incriminé est peu sensible à la pression exercée sur lui par les publications de la Commission des clauses abusives, souvent relayées par les associations de consommateurs. Tel est sans doute le cas des syndics de copropriété puisqu'après une première recommandation, la Commission a souhaité, aujourd'hui, non-seulement remettre à jour son contenu, mais sans doute surtout rappeler à l'ordre les professionnels du secteur qu'une recommandation vieille de plus de seize ans n'inquiétait plus. La recommandation a, par conséquent, l'intérêt de replacer sur le devant de la scène les contrats proposés par les syndics de copropriété aux consommateurs ou plus exactement aux syndicats de copropriétaires (personnes morales, certes, mais dont la qualité de consommateur est reconnue en jurisprudence, cf. par exemple : Cass. civ. 1, 23 juin 2011, n° 10-30.645, FS-P+B+I N° Lexbase : A2997HUK, Cont. conc. cons., 2011, comm. 226, malgré quelques résistances des juges du fond comme : CA Aix-en-Provence, 1ère ch., sect. B, 16 décembre 2010, n° 10/05150 N° Lexbase : A1253GP4 ou surtout la position de la CJUE qui refuse la qualité de consommateur à toute personne morale, CJCE, 22 novembre 2001, aff. C-541/99 N° Lexbase : A5814AXM, JCP éd. G, 2002, II, 10047).

Pour la Commission des clauses abusives, en revanche, il ne fait aucun doute que les syndicats de copropriétaires méritent la protection du Code de la consommation : "Considérant que les syndics proposent des contrats de mandat aux copropriétaires consommateurs réunis en syndicats ; Considérant que les syndicats de copropriétaires, dotés de la personnalité morale, bénéficient de la protection accordée par la loi aux consommateurs et aux non-professionnels". Ce faisant, la Commission rappelle implicitement la faiblesse de certains syndicats qui ne sont finalement que le porte-parole de propriétaires souvent personnes physiques (mais pas toujours) qui sont, à l'égard du professionnel qu'est le syndic, dans la même situation de faiblesse qu'un consommateur stricto sensu.

En 1996, la précédente recommandation stigmatisait plusieurs comportements. Elle proposait la suppression des clauses (9 en l'occurrence) : qui permettaient au syndic de démissionner (et donc en réalité de résilier son contrat) sans prévoir pour le syndicat des copropriétaires la même possibilité de résiliation en cours d'exécution ; qui laissaient supposer une reconduction automatique du contrat à la fin du mandat et le maintien en fonction du syndic au-delà de la durée légale sans vote de l'assemblée générale ; qui présentaient comme légalement obligatoire l'ouverture d'un compte séparé au nom du syndicat, ou, au contraire, l'utilisation d'un compte unique au nom du syndic ; qui imposaient sans contrepartie au syndicat des copropriétaires la renonciation à percevoir les fruits et produits financiers des sommes placées sur un compte séparé ; qui restreignaient la notion de gestion courante par l'accumulation de prestations particulières et/ou par le recours à la rubrique "divers" ; qui mettaient à la charge du syndicat, en cas de non-renouvellement ou de résiliation du contrat du syndic, une indemnité forfaitaire ne correspondant pas à une prestation effective liée à la remise du dossier au successeur ; qui faisaient supporter au copropriétaire défaillant une rémunération au profit du syndic à l'occasion des frais de relance et de recouvrement ; qui imposaient une clause de révision des honoraires dont les éléments n'étaient pas suffisamment explicites et qui n'était pas illustrée par une application chiffrée ; et enfin qui dérogeaient aux règles légales de compétence territoriale ou d'attribution. Qu'en est-il aujourd'hui ?

La Commission semble toujours constater des abus, avec, semble-t-il, une plus grande subtilité et surtout un plus grand nombre de pratiques abusives. La recommandation en distingue de deux ordres, celles relatives à la formation et à la résiliation du contrat d'une part, et celles relatives à l'exécution du contrat, d'autre part.

Au titre de la formation et de la résiliation du contrat, sont visées les clauses qui, de facto, laissent toute liberté au syndic tout en contraignant le syndicat de copropriétaires dans le carcan contractuel qu'il a signé.

Certaines clauses y parviennent en désinformant le syndicat sur la véritable portée de son engagement : "certains contrats de syndics de copropriété sont conclus pour une durée ne correspondant pas à celle résultant des dates calendaires qui y figurent ; [...] ces clauses conduisent à un déséquilibre significatif pour le consommateur ou le non-professionnel qui ne connaît pas la durée réelle de son engagement". Certaines clauses, déjà repérées en 1996, semblent toujours exister et sont relatives aux conditions de rémunération des comptes de gestion séparés "Considérant que l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 modifiée (N° Lexbase : L4813AHQ), prévoit le principe de l'ouverture d'un compte bancaire ou postal au nom du syndicat, sur lequel sont versées sans délai toutes les sommes ou valeurs réputées au nom ou pour le compte du syndicat et que l'assemblée générale peut en décider autrement à la majorité requise par les articles 25 (N° Lexbase : L4825AH8) et 25-1 (N° Lexbase : L5476IGW) ; qu'un nombre important de contrats indique un prix de forfait annuel de gestion courante sur la base de la gestion d'un compte bancaire unique pour l'ensemble du cabinet de syndic ; que certains de ces mêmes contrats prévoient au titre des prestations particulières rémunérées distinctement l'ouverture d'un compte bancaire séparé pour le syndicat ; que les autres stipulent un coût de forfait annuel plus élevé en cas d'ouverture d'un compte séparé ; que ces deux types de clauses sont abusifs en ce que, d'une part, ils laissent croire aux syndicats des copropriétaires que le principe est celui de l'ouverture d'un compte unique alors que la loi prévoit le contraire, d'autre part, en ce qu'ils font apparaître au titre des prestations particulières, rémunérées distinctement, l'ouverture d'un compte séparé alors que celle-ci doit figurer au titre des prestations courantes".

Certaines clauses, manifestement abusives, permettent la révision unilatérale du prix par le syndic "Considérant que des contrats prévoient que lorsque le syndic est mandaté pour la location d'une partie commune, les honoraires seront ceux affichés en agence ; que ces clauses, qui laissent au professionnel le droit de modifier unilatéralement les prix du service à rendre, par un simple changement d'affichage, sont présumées de manière irréfragable abusives en vertu de l'article R. 132-1 3° du Code de la consommation (N° Lexbase : L1596IBQ) [...] Considérant que certains contrats de syndics de copropriété proposent des prestations sans en mentionner le prix ou leur mode de calcul ; que cette présentation ne permet pas au consommateur ou non-professionnel, d'avoir connaissance du prix à payer pour ces prestations et empêche une comparaison efficace avec les autres contrats de syndic, ce qui est de nature à déséquilibrer significativement le contrat au détriment du syndicat des copropriétaires [...] Considérant que certains contrats n'opèrent pas une distinction stricte dans leur présentation entre les prestations de gestion courante, dont le prix est inclus dans le forfait annuel, et les prestations variables facturées séparément ; que cette présentation ne permet pas au consommateur ou non-professionnel de connaître aisément les prestations incluses dans le forfait annuel et, par suite, rend difficile une comparaison efficace avec les autres contrats de syndic, ce qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat au détriment du syndicat des copropriétaires".

D'autres, de manière très classique, allouent au professionnel des avantages que n'a pas le consommateur : "Considérant qu'un nombre important de contrats de syndic impose des modalités de résolution ou de résiliation plus rigoureuses pour le consommateur ou le non-professionnel que pour le professionnel ; que, selon l'article R. 132-2 du Code de la consommation (N° Lexbase : L1618IBK), sont présumées abusives les clauses soumettant la résiliation du contrat à des conditions ou modalités plus rigoureuses pour le consommateur ou non-professionnel que pour le professionnel".

S'agissant du temps d'exécution du contrat, la Commission repère des clauses particulièrement graves puisqu'elles sont ni plus ni moins contraires à des dispositions légales d'ordre public : " 7. Considérant qu'il résulte de l'article 35-1 du décret du 17 mars 1967 (N° Lexbase : L5528IGT) que l'assemblée générale des copropriétaires décide, s'il y a lieu, du placement des fonds recueillis et de l'affectation des intérêts produits par ce placement ; que certains contrats prévoient qu'en cas de gestion financière par le biais d'un compte unique ouvert au nom du syndic, les profits éventuels de ce compte seront versés automatiquement à ce dernier, sans qu'il y ait lieu à un vote spécial de l'assemblée générale sur l'affectation des intérêts [...] ;
8. Considérant que certains contrats mentionnent la possibilité pour le syndic de mener une activité de courtage pour la conclusion de toute convention, en qualité de mandataire du syndicat des copropriétaires [...] ;
9. Considérant que des contrats imposent, pour des prestations ne relevant pas du contrat de syndic (location d'une partie commune, gestion des travaux en tant que maître d'oeuvre), que le syndic soit mandaté de plein droit pour ces prestations [...] ;
10. Considérant que certains contrats prévoient la rémunération du syndic dans le cas d'une déclaration de sinistre concernant les parties communes [...] ;
11. Considérant que certains contrats prévoient la possibilité pour le syndic de se faire rémunérer, à titre de prestation particulière, pour le suivi de travaux, sans préciser la nature des travaux concernés, [...] ;
12. Considérant que certains contrats imposent la rémunération de'prestations exceptionnelles non répertoriées', [...] ;
13. Considérant que plusieurs contrats scindent des prestations de gestion courante prévues dans l'arrêté du 19 mars 2010 (N° Lexbase : L2780IRE) modifiant l'arrêté du 2 décembre 1986, telles que l'établissement et la mise à jour du carnet d'entretien, en plusieurs prestations particulières du type 'création du carnet d'entretien', 'tenue du carnet d'entretien de l'immeuble' ; qu'ainsi, le syndic peut être rémunéré de manière particulière pour des prestations de gestion courante ; [...]
14. Considérant qu'un nombre très important de contrats indique, dans le cas de travaux autres que ceux d'entretien et de maintenance, dont la liste est fixée à l'article 44 du décret du 17 mars 1967 (N° Lexbase : L5547IGK), que la rémunération du syndic sera constituée par un montant minimum ou un pourcentage du montant de ces travaux, [...].
[Toutes] ces clauses sont illicites au regard du texte susvisé et, maintenues dans un contrat, abusives".

Certaines clauses, peut-être moins dangereuses en apparence, sont néanmoins redondantes et peuvent permettre d'aboutir à une double facturation au profit du professionnel : "16. Considérant que certains contrats prévoient une prestation particulière consistant à notifier les travaux nécessitant l'accès aux parties privatives ; qu'il s'agit d'une obligation pour le syndic prévue à l'article 9 de la loi du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L4861AHI) ; qu'il résulte de l'arrêté du 2 décembre 1986 modifié que la gestion des travaux de maintenance et d'entretien est incluse dans le forfait annuel et que la gestion administrative des autres travaux est une prestation particulière ; qu'ainsi, cette clause est abusive en ce qu'elle permet au syndic de se faire rémunérer pour une prestation comprise dans une prestation déjà rémunérée ;
17. Considérant que certains contrats énumèrent, au titre des prestations particulières, des rubriques susceptibles de permettre deux fois la rémunération d'une même prestation
[...] ;
18. Considérant que
[...] cette clause qui met à la charge du syndicat des copropriétaires une prestation qui ne lui incombe pas, dès lors qu'elle ne profite qu'au seul copropriétaire concerné, crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du syndicat des copropriétaires ;
19. Considérant que certains contrats mentionnent des honoraires, des frais de correspondance, des frais administratifs en plus des frais de tirage, d'affranchissement et d'acheminements pour les activités de productions de documents, sans indiquer en quoi elles se distinguent de prestations déjà rémunérées au titre de la gestion courante ou de prestations particulières
[...]".

Le dernier type de clause, enfin, concerne le manque de clarté de certaines stipulations qui seraient à même d'induire le consommateur en erreur : "20. Considérant que certains contrats permettent de faire peser sur le syndicat, des frais engagés au profit des copropriétaires bailleurs ; que de telles clauses sont abusives ;
21. Considérant que certains contrats prévoient la même prestation particulière de tenue d'assemblée générale extraordinaire, en indiquant soit un mode de rémunération à la vacation, soit un droit proportionnel par lot principal ; que de telles clauses, qui réservent au seul professionnel le choix de son mode de rémunération, sont abusives ;
22. Considérant que des contrats précisent que le compte unique permettra d'assurer une garantie financière aux sommes versées ou qu'il permettra de disposer de la situation de la trésorerie et du détail des recettes et des dépenses, sans préciser que le compte séparé offre les mêmes garanties et services, alors que la garantie et la délivrance de ces informations sont obligatoires, respectivement en application de la loi du 2 janvier 1970
(loi n° 70-9 N° Lexbase : L7536AIX) et du décret du 17 mars 1967 ; que cette présentation laisse croire qu'un compte séparé ne permettrait pas de bénéficier des mêmes prestations, ce qui est de nature à créer un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat au détriment du syndicat des copropriétaires ;
23. Considérant que les clauses de certains contrats mentionnent, en prestation particulière, 'la gestion des comptes à terme', 'le suivi des placements de fonds' ; que l'imprécision de ces termes ne permet pas de savoir si ces prestations sont incluses ou non dans 'l'état financier du syndicat des copropriétaires' qui est une prestation intégrée dans la liste a minima des prestations de gestion courante fixée par l'arrêté du 2 décembre 1986 modifié ; qu'en conséquence, le manque de clarté de ces clauses crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat au détriment du syndicat des copropriétaires ;
24. Considérant que les contrats conclus entre le syndic et le syndicat des copropriétaires comportent des clauses prétendant créer des obligations à la charge des copropriétaires individuellement considérés ; que de telles clauses, qui portent atteinte à l'effet relatif du contrat et laissent croire à chaque copropriétaire qu'il est engagé par le contrat de syndic, sont abusives
[...]".

On s'interrogera, alors, sur le caractère abusif de ces clauses. Manquant de clarté, elles pourraient peut-être être sanctionnées au titre du dol ou de l'erreur et non des clauses abusives. La sanction serait alors bien plus lourde. On attendra avec impatience la prochaine recommandation ou le prochain avis de la Commission pour savoir si les professionnels du secteur auront modifié leur comportement.

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Divorce

[Chronique] Chronique de droit patrimonial du divorce - Décembre 2011

Lecture: 9 min

N9014BSN

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par Marjorie Brusorio-Aillaud, Maître de conférences à l'Université du Sud Toulon-Var

Le 14 Mars 2012

Lexbase Hebdo - édition privée vous propose, cette semaine, de retrouver la chronique d'actualités en droit patrimonial du divorce réalisée par Marjorie Brusorio-Aillaud, Maître de conférences à l'Université du Sud Toulon-Var. Au sommaire de cette nouvelle chronique, on retrouve, en premier lieu, deux arrêts rendus tout récemment par la première chambre civile de la Cour de cassation, par lesquels la Haute juridiction précise, une nouvelle fois, les éléments qui doivent être pris en considération par les juges pour la fixation de la prestation compensatoire, en l'occurrence, le concubinage et la pension militaire d'invalidité du créancier (Cass. civ. 1, 26 octobre 2011, n° 10-26.003, F-D ; Cass. civ. 1, 9 novembre 2011, n° 10-15.381, FS-P+B+I). Si les magistrats ont régulièrement à se prononcer sur la révision de prestations compensatoires accordées lors de divorces "français", il est plus rare qu'ils doivent statuer sur des demandes consécutives à des divorces "étrangers". C'est ainsi que l'auteur revient, en second lieu, sur un arrêt rendu le 9 novembre 2011, par lequel la Cour de cassation a précisé que la révision de la pension versée à la suite du divorce était soumise à la loi du divorce (Cass. civ. 1, 9 novembre 2011, n° 10-25.399, F-D).
  • Prestation compensatoire : la Cour de cassation précise -encore- ce que les juges du fond doivent prendre en considération (le concubinage et la pension militaire d'invalidité du créancier) (Cass. civ. 1, 26 octobre 2011, n° 10-26.003, F-D N° Lexbase : A0652HZ8 ; Cass. civ. 1, 9 novembre 2011, n° 10-15.381, FS-P+B+I N° Lexbase : A8903HZR)

Dans deux décisions rendues à quelques jours d'intervalle, la Cour de cassation a dû, une fois encore, préciser quels éléments doivent être pris en considération, par les juges du fond, pour la fixation du montant de la prestation compensatoire. Elle a, cette fois, indiqué que le concubinage et la pension militaire d'invalidité du créancier de la prestation devaient être retenus.

Les éléments dont le juge doit tenir compte, pour décider si l'un des époux peut prétendre à une prestation compensatoire, sont énumérés par le Code civil. Cette liste n'étant pas exhaustive, les magistrats doivent régulièrement préciser si tel revenu, telle ressource ou telle situation doit être pris(e) en considération (cf. l’Ouvrage "Droit du divorce" N° Lexbase : E7546ETN).

D'une part, d'après l'article 271 du Code civil (N° Lexbase : L3212INB), la prestation compensatoire est fixée "selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible.
A cet effet, le juge prend en considération notamment :
- la durée du mariage ;
- l'âge et l'état de santé des époux ;
- leur qualification et leur situation professionnelles ;
- les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne ;
- le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial ;
- leurs droits existants et prévisibles ;
- leur situation respective en matière de pensions de retraite en ayant estimé, autant qu'il est possible, la diminution des droits à retraite qui aura pu être causée, pour l'époux créancier de la prestation compensatoire, par les circonstances visées au sixième alinéa
".

D'autre part, le second alinéa de l'article 272 du même code (N° Lexbase : L8783G8S) précise "Dans la détermination des besoins et des ressources, le juge ne prend pas en considération les sommes versées au titre de la réparation des accidents du travail et les sommes versées au titre du droit à compensation d'un handicap". Il a ainsi été jugé que la rente accident du travail perçue par le mari ne devait pas être prise en considération mais que, au contraire, l'allocation aux adultes handicapés devait être retenue dès lors que, à la différence de la prestation de compensation, elle est destinée à garantir un minimum de revenus à l'allocataire et non à compenser son handicap (1).

L'adverbe "notamment", au début de l'article 271, indique clairement que la liste qu'il énonce n'est pas exhaustive. Il a ainsi été jugé que les tribunaux devaient prendre en considération :

- tous les composants du patrimoine des époux "et notamment leurs biens propres ou personnels quelle qu'en soit l'origine", telle que, par exemple, la perception d'"une somme importante lors de la vente d'un bien propre, dont il (le défendeur) n'avait pas justifié l'emploi" (2) ;
- le concubinage d'un des conjoints, qu'il s'agisse de l'époux créancier (3) ou débiteur (4) ;
- l'allocation chômage de l'époux débiteur (5) ;
- l'indemnité de fonction perçue en tant que maire, par le mari (6) ;
- la prestation compensatoire versée à une précédente épouse (7) ;
- la contribution à l'entretien et l'éducation des enfants, pour déterminer les ressources de l'époux débiteur (8), mais pas celles du conjoint qui en a la garde (9) ;
- le RMI (10).

En revanche, les magistrats n'ont pas à tenir compte :

- de la vocation successorale de l'épouse créancière (11), puisque, l'héritage pouvant ne jamais être transmis (si, par exemple, les parents dilapident tout, exhérèdent ou décèdent après leur enfant), il ne s'agit pas d'un droit prévisible ;
- des perspectives de versement d'une pension de réversion en cas de prédécès de l'ex-mari, débiteur de la prestation compensatoire (12), dès lors que, comme la vocation successorale, la pension de réversion attribuée en cas de prédécès du conjoint est aléatoire, personne ne pouvant prédire qui va mourir en premier ;
- des prestations destinées aux enfants (allocations familiales, prestations dédiées à la naissance et au jeune enfant, aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée (AFEAMA), allocation de garde d'enfant à domicile (AGED), prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE), allocation de soutien familial (ASF), complément familial, allocation de rentrée scolaire), qui ne constituent pas des revenus bénéficiant aux parents (13).

Dans la première affaire commentée, jugée le 26 octobre 2011 (14), le juge aux affaires familiales avait fixé le montant de la prestation compensatoire dû par le mari à 95 000 euros. La cour d'appel avait ramené celui-ci à 20 000 euros et la Cour de cassation a cassé cet arrêt au motif que les magistrats n'avaient pas pris en considération, comme ils y étaient invités, la situation de concubinage de l'époux.

Dans le second arrêt retenu, rendu le 9 novembre 2011, la cour d'appel avait condamné l'époux au versement de 700 euros, par mois, à titre de prestation compensatoire, en prenant en considération, pour ses revenus, le versement mensuel d'une pension militaire d'invalidité de 1 638 euros. L'époux invoquait, notamment, à l'appui de son pourvoi, l'article 272 du Code civil, selon lequel le juge ne prend pas en considération les sommes versées au titre de la réparation des accidents du travail et les sommes versées au titre du droit à compensation d'un handicap. Or, la pension militaire d'invalidité est attribuée aux personnes souffrant d'infirmités résultant de blessures de guerre. Ces sommes sont versées au titre de la perte d'efficience physique ou psychique, liées à la personne du pensionné et visent à compenser son handicap. Elles n'ont donc pas à être prises en compte en tant que revenus, lors du calcul de la prestation compensatoire. La Haute juridiction n'a pas retenu ce raisonnement. Elle a déclaré que "dès lors que la pension militaire d'invalidité comprend l'indemnisation de pertes de gains professionnels et des incidences professionnelles de l'incapacité, et qu'elle ne figure pas au nombre des sommes exclues, par l'article 272, alinéa 2, du Code civil, des ressources que le juge prend en considération pour fixer la prestation compensatoire, c'est à bon droit que la cour d'appel a fait entrer la pension militaire d'invalidité litigieuse dans le champ desdites ressources".

Que le concubinage de l'un des époux, qu'il s'agisse du créancier, comme en l'espèce, ou du débiteur de la prestation compensatoire, soit pris en compte dans la détermination des ressources peut se comprendre. Il est indiscutable que le fait de partager sa vie avec une personne a une incidence sur les ressources, que cela les accroissent ou les diminuent. La solution de la Cour de cassation, régulièrement énoncée d'ailleurs (14), est parfaitement logique.

La décision relative à la pension militaire d'invalidité, en revanche, peut davantage surprendre. Selon l'article L. 114 du Code de l'action sociale et des familles (N° Lexbase : L8905G8C), "Constitue un handicap, au sens de la présente loi [loi n° 2005-102 du 11 février 2005, pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées (N° Lexbase : L5228G7R), à l'origine du second alinéa de l'article 272 du Code civil], toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant". Or, d'après l'article L. 2 du Code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre (N° Lexbase : L1050G9R), "ouvrent droit à pension militaire d'invalidité : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; 4° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'accidents éprouvés entre le début et la fin d'une mission opérationnelle, y compris les opérations d'expertise ou d'essai, ou d'entraînement ou en escale, sauf faute de la victime détachable du service".

Certes, la pension militaire d'invalidité comprend l'indemnisation de pertes de gains professionnels et des incidences professionnelles de l'incapacité lesquels constituent, sans doute, des revenus à prendre en considération pour la fixation de la prestation compensatoire. Néanmoins, en appliquant strictement l'article 272, alinéa 2 du Code civil et en concluant que la pension militaire d'invalidité n'est pas une somme versée au titre de la réparation des accidents du travail ou une somme versées au titre du droit à compensation d'un handicap, les Hauts magistrats distinguent "handicap" et "invalidité", alors que la plupart des dictionnaires donnent ces deux termes comme synonymes.

  • Divorce entre étrangers : la révision de la pension versée à la suite du divorce est soumise à la loi du divorce (Cass. civ. 1, 9 novembre 2011, n° 10-25.399, F-D N° Lexbase : A8929HZQ)

Si les magistrats ont régulièrement à se prononcer sur la révision de prestations compensatoires accordées lors de divorces "français", il est plus rare qu'ils doivent statuer sur des demandes consécutives à des divorces "étrangers". Dans un arrêt rendu le 9 novembre 2011, la Cour de cassation a précisé que la révision de la pension versée à la suite du divorce est soumise à la loi du divorce.

Selon l'article 309 du Code civil (N° Lexbase : L8850G9N) : "le divorce et la séparation de corps sont régis par la loi française :
- lorsque l'un et l'autre époux sont de nationalité française ;
- lorsque les époux ont, l'un et l'autre, leur domicile sur le territoire français ;
- lorsque aucune loi étrangère ne se reconnaît compétence, alors que les tribunaux français sont compétents pour connaître du divorce ou de la séparation de corps
".

Ces dispositions ont été "bilatéralisées". Cela signifie que, lorsque deux époux étrangers ont la même nationalité, c'est en principe leur loi nationale commune qui s'applique en matière de divorce, même lorsqu'ils vivent tous les deux en France. L'objectif est de faciliter la reconnaissance de ce divorce (exequatur) dans le pays dont ils ont la nationalité.

En février 2008, le tribunal de grande instance de Bastia a prononcé un divorce pour manquement de l'époux à l'une des conditions stipulées dans l'acte de mariage, en application de l'article 99 du Code de la famille marocain (15). Le mari a été condamné à verser à son épouse une pension mensuelle de 350 euros pendant vingt-quatre mois. Or, en septembre 2008, il a saisi le même tribunal d'une demande de suppression de cette pension.

Pour réduire la pension à la somme mensuelle de 150 euros, la cour d'appel a relevé, qu'en application de l'article 4 de la Convention de La Haye du 2 octobre 1973, la demande devait être examinée au regard des dispositions de l'article 276-3 du Code civil (N° Lexbase : L2844DZD). La pension alimentaire due par l'époux, fondée sur la loi marocaine, s'analysait au regard du droit français, seul applicable en une prestation compensatoire. Cependant, la Cour de cassation a cassé cet arrêt. Elle a estimé que la cour d'appel avait violé l'article 8 de la Convention de la Haye et que la demande de révision de la pension était soumise au droit marocain.

Selon la Convention de la Haye du 2 octobre 1973, sur la loi applicable aux obligations alimentaires :

- les obligations alimentaires découlant de relations de famille, de parenté, de mariage ou d'alliance, y compris les obligations alimentaires envers un enfant non légitime, sont régies par la loi interne de la résidence habituelle du créancier d'aliments (art. 4) ;
- lorsque le créancier ne peut obtenir d'aliments du débiteur en vertu de la loi visée à l'article 4, la loi nationale commune s'applique (art. 5) ;
- lorsque le créancier ne peut obtenir d'aliments du débiteur en vertu des lois visées aux articles 4 et 5, la loi interne de l'autorité saisie s'applique (art. 6) ;
- par dérogation aux articles 4 à 6, la loi appliquée au divorce régit, dans l'Etat contractant où celui-ci est prononcé ou reconnu, les obligations alimentaires entre époux divorcés et la révision des décisions relatives à ces obligations (art. 8, al. 1er).

Dans l'affaire examinée, c'était donc la loi appliquée au divorce qui devait régir les conséquences pécuniaires (pension alimentaire) du divorce, conformément à l'article 8 de la Convention de La Haye sur les obligations alimentaires. La Cour de cassation a strictement appliqué le droit. La solution, qui n'est pas nouvelle (16), était prévisible.

En appliquant la loi française, la cour d'appel a violé l'article 8 de la Convention de La Haye du 2 octobre 1973. Elle aurait dû rechercher si la loi marocaine, sur le fondement de laquelle le jugement de divorce avait été rendu, ne contenait pas de dispositions relatives à la question de la révision de la pension attribuée. Cependant, et cela explique peut-être la décision des magistrats, la loi marocaine ne semble rien prévoir sur la révision des pensions alimentaires accordées aux épouses à la suite d'un divorce...


(1) Cass. civ. 1, 28 octobre 2009, n° 08-17.609 FS-P+B+I (N° Lexbase : A6083EMA), Bull. civ. I, n° 214.
(2) Cass. civ. 1, 20 septembre 2006, n° 04-17.803 (N° Lexbase : A2974DRL).
(3) Cass. civ. 1, 16 mars 2004, n° 02-12.786 (N° Lexbase : A5981DB7) ; Cass. civ. 1, 25 avril 2006, F-P+B (N° Lexbase : A2165DPU), Bull. civ. I, n° 203.
(4) Cass. civ. 1, 3 décembre 2008, n° 07-14.609, F-P+B (N° Lexbase : A5157EBM), Bull. civ. I, n° 278.
(5) Cass. civ. 2, 5 novembre 1986, n° 85-12.860 (N° Lexbase : A5739AAS), Bull. civ. II, n° 159.
(6) Cass. civ. 2, 14 janvier 1999, n° 96-22.150 (N° Lexbase : A3886CHE), Bull. civ. II, n° 10.
(7) Cass. civ. 1, 20 février 2007, n° 06-10.763, FS-P+B (N° Lexbase : A3036DUY), Bull. civ. I, n° 69.
(8) Cass. civ. 2, 10 mai 2001, n° 99-17.255 (N° Lexbase : A4303ATK), Bull. civ. II, n° 93.
(9) Cass. civ. 1, 25 mai 2004, n° 02-12.922, FS-P+B (N° Lexbase : A2708DCB), Bull. civ. I, n° 148.
(10) Remplacé depuis le 1er juin 2009 par le RSA : Revenu de solidarité active ; Cass. civ. 1, 9 mars 2011, n° 10-11.053, F-P+B+I (N° Lexbase : A3240G77).
(11) Cass. civ. 1, 6 octobre 2010, n° 09-10.989 (N° Lexbase : A2205GBB). Voir déjà, sous l'empire de la législation antérieure: Cass. civ. 1, 21 septembre 2005, n° 04-13.977, FS-P+B+I (N° Lexbase : A4773DMQ) Bull. civ. I, n° 339 ; Cass. civ. 1, 3 octobre 2006, n° 04-20.601 (N° Lexbase : A4962DR9).
(12) Cass. civ. 1, 6 octobre 2010, n° 09-15.346 (N° Lexbase : A2212GBK). Voir déjà : Cass. civ. 1, 23 mai 2006, n° 05-17.856, F-D (N° Lexbase : A6809DPU).
(13) Cass. civ. 1, 6 octobre 2010, n° 09-12.718 (N° Lexbase : A2208GBE). Voir déjà: Cass. civ. 2, 26 septembre 2002, n° 00-21.914, FS-P+B (N° Lexbase : A4916AZ4), Bull. civ. 2002, II, n° 186 ; Cass. civ. 1, 12 mai 2004, n° 03-10.249, F-P (N° Lexbase : A1696DCS) Bull. civ. I, n° 133.
(14) Voir supra, note 3 et 4.
(15) Tout manquement à l'une des conditions stipulées dans l'acte de mariage est considéré comme un préjudice justifiant la demande du divorce judiciaire.
Est considéré comme un préjudice justifiant la demande du divorce judiciaire, tout acte ou comportement infamant ou contraire aux bonnes moeurs, émanant de l'époux portant un dommage matériel ou moral à l'épouse, la mettant dans l'incapacité de maintenir les liens conjugaux.
(16) Cass. civ. 1, 16 juillet 1992, n° 91-11.262 (N° Lexbase : A5790AHW), Bull. civ. I, n° 229, et Cass. civ. 1, 7 novembre 1995, n° 94-10.447 (N° Lexbase : A8017ABK), Bull. civ. 1, n° 391.

newsid:429014

Divorce

[Brèves] Le juge français du divorce doit rechercher si une loi étrangère se reconnaît compétente

Réf. : Cass. civ. 1, 23 novembre 2011, n° 10-25.206, FS-P+B+I (N° Lexbase : A9912HZ7)

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N9055BS8

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Le 01 Décembre 2011

Dans un arrêt du 23 novembre 2011, la première chambre civile de la Cour de cassation déclare, d'une part, qu'en vertu de l'article 3 du Code civil (N° Lexbase : L2228AB7), il incombe au juge français, s'agissant de droits dont les parties n'ont pas la libre disposition, de mettre en oeuvre, même d'office, la règle de conflit de lois et de rechercher, au besoin avec le concours des parties, la teneur du droit étranger applicable ; d'autre part, la Cour rappelle que selon l'article 309 du même code (N° Lexbase : L8850G9N), lorsque l'un et l'autre époux ne sont pas de nationalité française ou domiciliés en France et que les tribunaux français sont compétents pour connaître du divorce, celui-ci n'est régi par la loi française que lorsqu'aucune loi étrangère ne se reconnaît compétente (Cass. civ. 1, 23 novembre 2011, n° 10-25.206, FS-P+B+I N° Lexbase : A9912HZ7). En l'espèce, pour prononcer le divorce et condamner l'ex-époux au versement d'une prestation compensatoire, la cour d'appel de Paris a fait application du droit français (CA Paris, 24ème ch., sect. A, 14 janvier 2009, n° 08/06494 N° Lexbase : A2022EDA). La décision est censurée par la Haute juridiction qui relève que, dès lors que les époux étaient, l'un de nationalité américaine, l'autre de nationalité anglaise, et que l'épouse était domiciliée en Angleterre, il incombait aux juges de rechercher si une loi étrangère se reconnaissait compétente.

newsid:429055

Divorce

[Brèves] La convention de divorce homologuée revêt la même force exécutoire que celle d'une décision de justice

Réf. : Cass. civ. 1, 23 novembre 2011, n° 10-26.802 (N° Lexbase : A9913HZ8)

Lecture: 1 min

N9056BS9

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Le 01 Décembre 2011

Après son homologation par le jugement prononçant le divorce, la convention définitive revêt la même force exécutoire que celle d'une décision de justice et ne peut plus être remise en cause hors des cas limitativement prévus par la loi dans lesquels n'entre pas l'action en inopposabilité fondée sur la fraude. Tel est l'enseignement délivré par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 23 novembre 2011 (Cass. civ. 1, 23 novembre 2011, n° 10-26.802 N° Lexbase : A9913HZ8 ; cf. l’Ouvrage "Droit du divorce" N° Lexbase : E7654ETN). En l'espèce, pour déclarer inopposable aux consorts R. la clause d'attribution à Mme S. dans la convention définitive homologuée d'un appartement, la cour d'appel a notamment retenu que leur action était recevable en ce qu'elle était fondée sur le principe général "fraus omnia corrumpit", ce principe ayant particulièrement vocation à s'appliquer lorsqu'il s'agit de dispositions d'ordre public telle la réserve héréditaire (CA Grenoble, 1ère ch., 7 septembre 2010, n° 08/02201 N° Lexbase : A5149E9L). A tort, selon la Haute juridiction, qui relève qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le principe précité et violé l'article 232 du Code civil (N° Lexbase : L2790DZD) dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 (N° Lexbase : L2150DYB).

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Droit de la famille

[Jurisprudence] Délégation-partage de l'autorité parentale : la résistance basque...

Réf. : TGI Bayonne, 26 octobre 2011, n° 11/00950 (N° Lexbase : A9852HZW)

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N9019BST

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par Adeline Gouttenoire, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directrice de l'Institut des Mineurs de Bordeaux

Le 01 Décembre 2011

Largement commenté sur les ondes, le jugement du tribunal de grande instance de Bayonne du 26 octobre 2011, admettant la délégation-partage de l'autorité parentale à la concubine pacsée d'une mère de jumelles, constitue un acte de résistance fort à la jurisprudence limitative de la Cour de cassation sur cette question. Dans un arrêt du 8 juillet 2010 (1), la Cour de cassation avait, en effet, mis un "coup d'arrêt" à la délégation-partage de l'autorité parentale en refusant catégoriquement qu'elle puisse être accordée à la concubine d'une mère en l'absence de circonstances particulières, laissant entendre qu'une telle délégation ne répondait pas aux exigences de l'intérêt de l'enfant. Le juge aux affaires familiales bayonnais prend clairement -et heureusement- le contre-pied de la solution posée par la Haute cour. Il retient, en effet, que la délégation peut être admise en dehors de toute circonstance exceptionnelle (I) et considère que le partage de l'autorité parentale entre les deux femmes qui l'élèvent satisfait l'intérêt de l'enfant (II). I - Le critère inutile des circonstances particulières

Cour de cassation. Dès le premier arrêt, en date du 24 février 2006, relatif à la délégation-partage de l'autorité parentale (2), confirmé par l'arrêt du 8 juillet 2010, la Cour de cassation exigeait que la délégation-partage de l'article 377-1 du Code civil (N° Lexbase : L2925ABX), soit subordonnée, comme la délégation-transfert de l'article 377 (N° Lexbase : L7193IMD), à des circonstances particulières. Il s'agissait de démontrer que le parent de l'enfant, qui exerce l'autorité parentale, pourrait être empêché d'exercer l'autorité parentale. Tel était le cas dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt du 24 février 2006, la mère étant contrainte, du fait de sa profession, à effectuer de nombreux déplacements, mais pas dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt du 8 juillet 2010, ce qui a conduit, dans ce dernier cas, la Cour de cassation à refuser la délégation. La Cour de cassation refusait, ainsi, de manière regrettable, de faire du partage de l'exercice de l'autorité parentale une délégation de l'autorité parentale autonome, distincte de la délégation classique ; cette dernière suppose pourtant une difficulté pour le (ou les) parent(s) à prendre en charge leur enfant alors que la délégation-partage de l'autorité parentale mise en place par le législateur de 2002 paraissait davantage destinée à faciliter la prise en charge quotidienne de l'enfant dans le cadre d'une famille recomposée.

Consécration d'une situation de fait. Comme plusieurs juges du fond avant lui (3), mais à notre connaissance, pour la première fois depuis l'arrêt de la Cour de cassation du 8 juillet 2010, le juge aux affaires familiales de Bayonne adopte une conception beaucoup plus souple, et sans doute plus conforme aux voeux du législateur, de la délégation-partage. La décision du 26 octobre 2011 ne contient en effet aucune référence à des circonstances particulières, susceptibles d'empêcher la mère des enfants d'exercer l'autorité parentale. A l'inverse, le jugement décrit une situation simple, de deux femmes prenant en charge les deux filles de l'une d'entre elles, qui mérite de recevoir une consécration juridique. Le jugement exprime formellement cette idée en affirmant que "cette autorité parentale [...] étant exercée déjà de fait conjointement, cette situation soit juridiquement consacrée". Le raisonnement de la juridiction bayonnaise va donc clairement à l'encontre de la solution posée par la Cour de cassation en détachant la délégation-partage de la délégation-transfert de l'autorité parentale. Alors que la première doit répondre à une défaillance du parent, la seconde poursuit seulement le but de permettre la reconnaissance juridique du rôle d'un tiers dans la prise en charge de l'enfant, ce qui, selon les juges bayonnais, est conforme à l'intérêt de ce dernier.

II - Le critère suffisant de l'intérêt de l'enfant

Critère essentiel. Conformément à l'article 3 § 1 de la Convention internationale des droits de l'enfant (N° Lexbase : L6807BHL), le juge aux affaires familiales de Bayonne fait de l'intérêt de l'enfant le critère essentiel de la décision relative au partage de l'exercice de l'autorité parentale. Il considère que "vu les attestations multiples versées aux débats, confirmant que les requérantes forment un couple uni, bien intégré dans leur milieu familial et social, et dont les qualités éducatives et affectives à l'égard des deux enfants sont reconnues, iI est de l'intérêt des deux mineurs que les deux adultes présents au foyer partagent cette autorité parentale".

Critère suffisant. Cette affirmation, ajoutée à l'absence de référence à des circonstances particulières justifiant la délégation, permet de considérer, qu'aux yeux du juge de Bayonne, l'intérêt de l'enfant est suffisant pour prononcer la délégation-partage de l'autorité parentale. Ce faisant, il s'oppose sur ce point encore à la Cour de cassation qui, à l'inverse, dans son arrêt du 8 juillet 2010 avait estimé, dans une situation similaire, que les deux concubines "ne démontraient en quoi l'intérêt supérieur des enfants exigeait que l'exercice de l'autorité parentale soit partagé entre elles et permettrait aux enfants d'avoir de meilleures conditions de vie ou une meilleure protection quand les attestations établissaient que les enfants étaient épanouis", refusant de considérer que le partage de l'autorité parentale entre les deux femmes qui prennent en charge les enfants au quotidien est présumé conforme à l'intérêt supérieur de l'enfant. C'est la présomption inverse que le juge de Bayonne semble vouloir consacrer, sans aucun doute à juste titre.

Situation de fait/situation de droit. Les deux décisions s'opposent également sur la nécessité de faire correspondre la situation familiale de fait et la situation familiale de droit. Alors que la Cour de cassation note, avec une certaine dose de cynisme, que les enfants sont très épanouis sans cette délégation et que la famille fonctionne parfaitement dans les faits, sans qu'il paraisse nécessaire de consacrer juridiquement cette situation, le juge de Bayonne considère, au contraire, qu'il est opportun de reconnaître juridiquement le partage de fait de l'autorité parentale entre les deux concubines et il est difficile de ne pas l'approuver.

Ministère public. La prise de position clairement résistante du juge de Bayonne a été soutenue par le ministère public qui ne s'est pas opposé à la délégation-partage de l'autorité parentale demandée par les deux concubines. On peut penser qu'il n'interjettera donc pas appel de la décision qui devrait donc être mise en oeuvre sans que la Cour de cassation n'ait son mot à dire. On peut cependant espérer qu'elle en tiendra compte la prochaine fois qu'elle sera saisie de la question et qu'elle modifiera sa position, qui apparaît, à la lumière de la décision du 26 octobre 2011, proprement intenable...


(1) Cass. civ. 1, 8 juillet 2010, n° 08-21.740, FP-P+B+R+I (N° Lexbase : A1235E4I), nos obs., Le rattachement d'un enfant à la compagne de sa mère : la Cour de cassation inverse la tendance..., Lexbase Hebdo n° 404 du 21 juillet 2010 - édition privée (N° Lexbase : N6436BP3).
(2) Cass. civ. 1, 24 février 2006, n° 04-17.090, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A1782DNC), AJ fam., 2006, p. 159, obs. F. Chénedé ; Dr. fam., 2006, comm. n° 89, obs. P. Murat ; RTDCiv., 2006 p. 297, obs. J. Hauser ; D., 2006, p. 897, note D. Vigneau, p. 876, Point de vue, H. Fulchiron.
(3) TGI Lille, 11 décembre 2007, n° 06-05918, AJ Famille, 2008, p. 119 ; RTDCiv., 2008, p. 290, obs. J. Hauser ; Lamy, Droit civil, 2008, p. 41 ; CA Paris, 5 mai 2006, AJ fam., 2006, 333 ; TGI Nice, 8 juillet 2003, 7 avril 2004, 30 juin 2004, AJFamille, 2004 p. 453, obs. F. Chénédé ; TGI Grenoble, 28 janvier 2008, AJ fam., 2008.

newsid:429019

Droit de la famille

[Brèves] Autorité parentale : fixation par le juge des modalités d'exercice du droit de visite de l'autre parent

Réf. : Cass. civ. 1, 23 novembre 2011, n° 10-23.391, F-P+B+I (N° Lexbase : A9911HZ4)

Lecture: 1 min

N8971BS3

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Le 01 Décembre 2011

Par un arrêt rendu le 23 novembre 2011, la première chambre civile de la Cour de cassation retient, au visa de l'article 373-2-9, alinéa 3, du Code civil (N° Lexbase : L7189IM9), l'obligation, pour le juge aux affaires familiales, lorsque la résidence de l'enfant est établie au domicile de l'un des parents, de fixer, en l'absence de constatation d'un commun accord des parents, les modalités d'exercice du droit de visite de l'autre parent (Cass. civ. 1, 23 novembre 2011, n° 10-23.391, F-P+B+I N° Lexbase : A9911HZ4). En l'espèce, M. Y et Mme X vivant à La Réunion avec leurs trois enfants nés en 1992, 1997 et 2001, se sont séparés en 2005 ; un jugement a confié aux deux parents l'exercice conjoint de l'autorité parentale et fixé la résidence de l'aîné chez le père et des deux plus jeunes chez la mère ; après le départ de Mme X en Guyane, M. Y a demandé que les trois enfants résident avec lui. Après avoir fixé la résidence des trois enfants chez leur père à La Réunion, la cour d'appel, constatant que Mme X n'avait fait aucune demande tendant à l'organisation de son droit de visite à l'égard de ceux-ci, s'est bornée à rappeler aux parents que ce droit s'exercerait d'un commun accord entre eux. La décision est censurée par la Cour suprême qui retient que, faute de constatation de la teneur d'un tel accord, il incombait aux juges du fond de fixer les modalités d'exercice du droit de visite de Mme X à l'égard de ses enfants, après avoir invité les parties à présenter leurs observations.

newsid:428971

État civil

[Brèves] Du relèvement d'un nom afin d'éviter son extinction

Réf. : CE 2° et 7° s-s-r., 23 novembre 2011, n° 343068, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A9954HZP)

Lecture: 1 min

N9060BSD

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Le 07 Décembre 2011

Le relèvement d'un nom afin d'éviter son extinction ne saurait s'appliquer à un nom d'usage mais suppose qu'il soit établi que le nom en cause a été légalement porté par un ascendant de celui qui demande à changer de nom ou par un collatéral jusqu'au quatrième degré. Tel est l'enseignement délivré par le Conseil d'Etat dans un arrêt du 23 novembre 2011 (CE 2° et 7° s-s-r., 23 novembre 2011, n° 343068, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A9954HZP). En l'espèce, le nom "Bovagnet des Garets" est porté à titre d'usage par des membres de la famille des requérants ; le ministre n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que cette circonstance, s'agissant d'un nom qui n'a jamais été porté à titre d'usage par les requérants eux-mêmes, ne leur permettait pas de se prévaloir d'un intérêt légitime, au sens du premier alinéa de l'article 61 du Code civil (N° Lexbase : L3182ABH), justifiant qu'ils soient autorisés à changer de nom. En conséquence, c'est à tort que la cour administrative d'appel de Paris a confirmé le jugement du tribunal administratif de Paris qui avait annulé ses décisions refusant d'autoriser MM. C. et B. à changer de nom ainsi que les décisions rejetant leur recours gracieux (CAA Paris, 1ère ch., 1er juillet 2010, n° 09PA03005 N° Lexbase : A2090E8W).

newsid:429060

Pénal

[Brèves] Homologation des dispositifs d'antidémarrage par éthylotest électronique

Réf. : Décret n° 2011-1661 du 28 novembre 2011 relatif aux dispositifs d'antidémarrage par éthylotest électronique (N° Lexbase : L2793IRU)

Lecture: 1 min

N9054BS7

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Le 01 Décembre 2011

Afin de réduire le risque de récidive, la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011, d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (N° Lexbase : L5066IPC), a créé une peine complémentaire d'interdiction de conduire un véhicule qui ne soit pas équipé, par un professionnel agréé ou par construction, d'un dispositif homologué d'antidémarrage par éthylotest électronique. Cette peine, d'une durée maximale de cinq ans, peut être prononcée à l'occasion d'une condamnation pour délit de conduite en état alcoolique ainsi que pour les délits d'homicide ou de blessures involontaires par conducteur sous l'empire d'un état alcoolique. L'installation d'un éthylotest antidémarreur peut aussi constituer une mesure de composition pénale proposée par le procureur de la République. Un décret publié au Journal officiel du 30 novembre 2011 précise, dans ce cadre, les conditions d'homologation des dispositifs d'antidémarrage par éthylotest électronique ainsi que les modalités d'agrément des professionnels chargés de les installer (décret n° 2011-1661 du 28 novembre 2011 relatif aux dispositifs d'antidémarrage par éthylotest électronique N° Lexbase : L2793IRU). Il confie au préfet le soin d'agréer ces derniers, en leur imposant notamment une condition d'honorabilité. Le décret prévoit l'agrément de chaque établissement éventuel de l'installateur, après obtention d'une qualification auprès d'un organisme désigné par le ministre chargé des Transports. Il instaure une procédure annuelle de vérification de conformité des dispositifs d'antidémarrage.

newsid:429054

Pénal

[Brèves] Projet de loi de programmation relatif à l'exécution des peines

Réf. : Projet de loi de programmation relatif à l'exécution des peines, déposé le 23 novembre 2011 à l'Assemblée nationale

Lecture: 1 min

N8963BSR

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Le 01 Décembre 2011

Lors du conseil des ministres du 23 novembre 2011, le Garde des Sceaux, ministre de la Justice et des Libertés, a présenté un projet de loi de programmation relatif à l'exécution des peines. Ce projet de loi, qui fixe les objectifs de la politique d'exécution des peines pour la période 2013-2017, fait suite aux annonces du Président de la République lors de son discours de Réau (Seine-et-Marne) le 13 septembre 2011. Il comporte trois axes. Le premier axe vise à garantir l'effectivité de l'exécution des peines en réduisant le nombre de peines en attente d'exécution. A cette fin, le nombre de places de prison sera porté à 80 000 d'ici fin 2017. En outre, pour mieux adapter le parc pénitentiaire à la diversité des profils pris en charge, le texte prévoit l'ouverture d'établissements et de quartiers "courtes peines". Par ailleurs, les services de l'aménagement et de l'exécution des peines seront renforcés avec la création de 120 postes de magistrats et 89 de greffiers. Le deuxième axe a pour objet de renforcer les dispositifs de prévention de la récidive grâce à la mise en place d'outils visant à mieux évaluer le profil des personnes condamnées, au développement de pratiques innovantes de prise en charge des délinquants ainsi qu'à la réorganisation et au renforcement des services pénitentiaires d'insertion et de probation. La lutte contre la récidive criminelle passe également par une meilleure évaluation, au début et en cours d'exécution de la peine, des personnes condamnées à une longue peine ; le projet de loi prévoit ainsi la création de trois centres nationaux d'évaluation pluridisciplinaire supplémentaires. En troisième lieu, le texte vise à améliorer la prise en charge des mineurs délinquants en réduisant à cinq jours le délai de mise en oeuvre des mesures prononcées par les juridictions. La capacité d'accueil des centres éducatifs fermés (CEF) sera également renforcée avec la création de 20 établissements supplémentaires. Le projet de loi prévoit, en outre, que le dispositif de suivi pédopsychiatrique, dont bénéficient déjà 13 CEF, soit étendu à 25 centres supplémentaires.

newsid:428963

Procédure civile

[Brèves] Dissimulation d'informations et intérêt à agir en appel de la partie qui a obtenu satisfaction en première instance

Réf. : Cass. civ. 1, 23 novembre 2011, n° 10-19.839, FS-P+B+I (N° Lexbase : A9910HZ3)

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N9010BSI

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Le 03 Décembre 2011

L'article 546 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L6697H78) relatif au droit d'appel dispose que toute partie qui y a intérêt a le droit, si elle n'y a pas renoncé, de former appel de la décision rendue en première instance. La Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 23 novembre 2011 considère que l'intérêt à former appel de la partie qui a obtenu satisfaction en première instance est caractérisé dès lors que l'information dissimulée est de nature à affecter la teneur des prétentions des parties ainsi que l'appréciation de celles-ci par le premier juge (Cass. civ. 1, 23 novembre 2011, n°10-19.839, FS-P+B+I N° Lexbase : A9910HZ3). En l'espèce, le divorce des époux G. est prononcé, par jugement le 17 novembre 2008, aux torts exclusifs du mari. Les demandes de l'épouse, Mme B., ont toutes été accueillies, notamment le versement d'une prestation compensatoire. Or, postérieurement aux débats tenus à l'audience du 7 juillet 2008, la publication des comptes annuels de la société dont M. G. est le gérant révèle, le 30 septembre de la même année, que ses revenus sont supérieurs à ceux mentionnés dans l'attestation sur l'honneur qu'il a souscrite. L'ex-épouse de M. G. interjette appel du jugement du 17 novembre 2008. La cour d'appel de Poitiers, dans un arrêt en date du 17 mars 2010 (CA Poitiers, 17 mars 2010, n°09/00939 N° Lexbase : A2428EUH), estime que l'ignorance d'une telle information était de nature à affecter tant la teneur des prétentions de Mme B. que leur appréciation par le premier juge. M. G. forme alors un pourvoi en cassation au motif que son ex-épouse serait dépourvue d'intérêt à agir en appel puisqu'elle a obtenu entière satisfaction en première instance et ajoute que la voie de l'appel n'est pas la voie de recours appropriée en l'espèce. La Haute juridiction confirme l'arrêt rendu par la cour d'appel de Poitiers en admettant l'existence, pour la partie qui n'a pas succombé en première instance, d'un intérêt à former appel lorsqu'elle s'est vu dissimuler une information de nature à affecter la teneur de ses prétentions ainsi que l'appréciation de celles-ci par les premiers juges.

newsid:429010

Procédure pénale

[Brèves] Réduction de peine et état de récidive

Réf. : Cass. crim., 23 novembre 2011, n° 11-81.088, F+P+B (N° Lexbase : A0076H39)

Lecture: 2 min

N9011BSK

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Le 01 Décembre 2011

Il résulte de la combinaison des articles 721-1, alinéa 2, et D. 150-2 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L6256H9L et N° Lexbase : L8063G7R), que les règles spécifiques applicables à l'état de récidive relatives à l'octroi des réductions supplémentaires de peine, qui ne peuvent excéder deux mois par an ou quatre jours par mois, sont applicables à l'ensemble des peines exécutées au cours de la période de détention prise en compte, à la seule condition que l'une d'entre elles ait été prononcée en retenant cette circonstance aggravante, indépendamment de la date à laquelle le juge statue. Tel est le principe rappelé par la Cour de cassation dans un arrêt du 23 novembre 2011 (Cass. crim., 23 novembre 2011, n° 11-81.088, F+P+B N° Lexbase : A0076H39). En l'espèce, M. Z a été incarcéré le 24 juin 2010 pour exécuter une peine de six mois d'emprisonnement pour des faits de vol aggravé en récidive ainsi qu'une peine de trois mois d'emprisonnement pour des faits d'émission de chèque en violation d'une interdiction bancaire. L'ordonnance du 14 décembre 2010 rendue par le juge d'application des peines accorde quarante-neuf jours de réduction de peine supplémentaire à M. Z pour la période du 24 juin 2010 au 3 février 2011, soit plus de sept jours par mois de détention. Le procureur de la République interjette appel de cette ordonnance devant le président de la chambre de l'application des peines. Ce dernier annule ladite ordonnance mais accorde la même réduction de peine sans tenir compte des règles spécifiques à l'état de récidive, au motif que la peine prononcée pour les faits commis avec cette circonstance aggravante avait été exécutée depuis le 24 novembre 2010, lorsque le juge d'application des peines avait statué, et que M. Z avait été remis en liberté le 28 décembre 2010, jour de l'ordonnance ayant bénéficié d'une réduction supplémentaire de peine de trente sept jours. La Haute juridiction considère qu'en prononçant ainsi, alors que la peine prononcée pour les faits commis en récidive avait été exécutée au cours de la période prise en compte pour le calcul de la réduction supplémentaire de peine, le président de la chambre de l'application des peines a méconnu les textes susvisés et le principe d'égalité des citoyens (Cass. crim., 23 novembre 2011, n° 11-81.088, F+P+B N° Lexbase : A0076H39).

newsid:429011

Procédure pénale

[Brèves] Défaut de comparution et de représentation : quelle valeur pour les écritures de la défense ?

Réf. : Cass. crim., 23 novembre 2011, n° 11-82.826, F+P+B (N° Lexbase : A0011H3S)

Lecture: 1 min

N9012BSL

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Le 01 Décembre 2011

La Chambre criminelle de la Haute juridiction considère, dans un arrêt rendu le 23 novembre 2011, qu'une prévenue ne peut se faire grief d'une insuffisance ou d'un défaut de réponse à conclusions, dès lors que les écrits, qu'elle aurait adressés à la juridiction, ne sauraient valoir conclusions, régulièrement déposées au sens de l'article 459 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3863AZ4), faute pour elle d'avoir comparu à l'audience ou d'y avoir été représentée (Cass. crim., 23 novembre 2011, n° 11-82.826, F+P+B N° Lexbase : A0011H3S). Mme X a été poursuivie pour ne pas avoir observé au volant de son véhicule l'arrêt qu'imposait un feu rouge. Elle a donc été citée à comparaître devant la juridiction de proximité de Grenoble et aurait saisi l'officier du ministère public près ladite juridiction d'une demande de communication des pièces du dossier. En l'absence de réponse de l'officier, Mme X a informé le président de la juridiction de proximité puis soulevé, par voie de conséquence, un incident de procédure pour non-respect du principe du contradictoire, ses écritures valant, selon elle, conclusions au sens des dispositions de l'article 459 du Code de procédure pénale. Elle n'a pas comparu à l'audience du 5 janvier 2011 et ne s'y est pas faite représenter. La Cour de cassation a donc, dans son arrêt du 23 novembre 2011, rejeté le pourvoi de Mme X au motif que les écritures de la défense n'avaient pas valeur de conclusions régulièrement déposées auxquelles le tribunal a l'obligation légale de répondre, puisqu'elle n'a pas comparu à l'audience et ne s'y est pas faite représenter.

newsid:429012

Procédure pénale

[Brèves] "Nemo auditur propriam turpitudinem allegans" et accès au dossier pénal

Réf. : Cass. crim., 23 novembre 2011, n° 11-86.496, F+P+B (N° Lexbase : A9971HZC)

Lecture: 1 min

N9013BSM

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Nemo auditur propriam turpitudinem allegans" et accès au dossier pénal - ">

Le 08 Décembre 2011

Dans un arrêt en date du 23 novembre 2011, la Haute juridiction énonce que le demandeur ne saurait se faire grief du défaut de réponse à l'articulation de son mémoire demandant de constater une prétendue violation des dispositions de l'article 197, alinéa 3, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3707IGE) et des droits de la défense du fait que son avocat n'avait pas eu accès, avant l'audience de la chambre de l'instruction, à un cédérom placé sous scellé, dès lors que les scellés déposés au greffe à titre de pièces à conviction ne font pas partie du dossier au sens de ce texte et que la personne mise en examen n'a pas demandé à la chambre de l'instruction d'ordonner l'apport des pièces à conviction ainsi qu'elle en a le pouvoir, en application de l'article 199 dudit code (N° Lexbase : L8652HWD) (Cass. crim., 23 novembre 2011, n° 11-86.496, F+P+B N° Lexbase : A9971HZC). En l'espèce, la cour d'appel de Douai a, le 27 mai 2011, confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention rejetant la demande de remise en liberté de M. C. mis en examen pour des faits de recel en bande organisée et délits connexes. M. C. forme alors un pourvoi en cassation aux motifs que la cour d'appel n'a pas répondu aux demandes contenues dans le mémoire présenté par son avocat et que ce dernier n'a pas eu accès à une pièce placée sous scellé. La Chambre criminelle de la Cour de cassation juge régulier l'arrêt rendu par la cour d'appel et rejette en conséquence le pourvoi de M. C. en rappelant qu'il incombe à la personne mise en examen de demander à la chambre de l'instruction d'ordonner l'apport des pièces à conviction, ces dernières ne faisant pas partie du dossier au sens de l'article 197 du Code de procédure pénale.

newsid:429013

Procédure pénale

[Brèves] De la nécessaire motivation de l'urgence en matière d'expertise

Réf. : Cass. crim., 23 novembre 2011, n° 11-84.314, F+P+B (N° Lexbase : A0010H3R)

Lecture: 1 min

N9015BSP

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Le 30 Novembre 2011

Aux termes de l'article 161-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2039IEA), le juge d'instruction est tenu d'adresser sans délai au procureur de la République et aux avocats des parties, copie de la décision ordonnant une expertise. Ces derniers disposent d'un délai de dix jours pour apporter des compléments ou modifications quant aux questions posées à l'expert ainsi que de la possibilité de lui adjoindre un expert choisi ; il ne peut être dérogé à cette obligation que lorsque les opérations d'expertise et le dépôt des conclusions par l'expert doivent intervenir en urgence et ne peuvent être différés pendant le délai de dix jours susvisé. De plus, l'article 593 dudit code (N° Lexbase : L3977AZC) dispose que tout jugement doit comporter les motifs propres à justifier la décision, ainsi l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. En l'espèce, M. Y fait l'objet d'une information concernant des faits de viols et agressions sexuelles aggravés, corruption de mineurs de quinze ans et détention d'images de mineurs à caractère pornographique. La cour d'appel de Paris a, dans un arrêt du 29 avril 2011, rejeté sa requête en annulation de pièces de la procédure ; elle relève, en effet, que le visa de l'urgence figurant sur les décisions ne saurait être réduit à une mention purement formelle, dès lors que le juge d'instruction fait expressément référence à la situation de détenu du mis en examen et qu'il est effectif que le magistrat instructeur a fait preuve de célérité dès le placement de M. Y en détention provisoire. Cependant, les juges du droit estiment, dans un arrêt du 23 novembre 2011 (Cass. crim., 23 novembre 2011, n° 11-84.314, F+P+B (N° Lexbase : A0010H3R), que la cour d'appel n'a pas justifié sa décision, les motifs énoncés étant insuffisants à établir pour chacune des ordonnances critiquées, qu'existait, au moment ou elle a été rendue, l'impossibilité de différer, pendant le délai de dix jours, les opérations d'expertise et le dépôt des conclusions des experts.

newsid:429015

Procédure pénale

[Brèves] Stupéfiants : les nécessités de l'enquête au dessus du respect de la vie privée des mis en examen ?

Réf. : Cass. crim., 23 novembre 2011, n° 11-84.308, F+P+B (N° Lexbase : A0012H3T)

Lecture: 2 min

N9016BSQ

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Le 01 Décembre 2011

Dans son arrêt en date du 23 novembre 2011, la Chambre criminelle souligne la difficulté pour les requérants, mis en examen dans le cadre d'une affaire de stupéfiants, de caractériser une quelconque atteinte à leur droits notamment leur droit au respect de leur vie privée (Cass. crim., 23 novembre 2011, n° 11-84.308, F+P+B N° Lexbase : A0012H3T). Ces derniers demandent l'annulation de nombreux actes de procédure. Ils invoquent, notamment, l'illégalité de l'obtention d'informations concernant leurs appels auprès d'un opérateur de téléphonie, de la surveillance de leur véhicule à distance, et des écoutes dont ils ont fait l'objet. Dans un premier temps, la Cour de cassation estime que la remise de documents issus d'un système informatique ou d'un traitement de données nominatives détenus par un opérateur de téléphonie relève des dispositions de l'article 77-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7136A43). Dans un deuxième temps, elle ajoute qu'elle est en mesure de s'assurer que l'interception de communications téléphoniques autorisée, à la demande du procureur de la République, par le juge des libertés et de la détention, a pris fin avant la date fixée par ce magistrat pour son exécution. Elle souligne également que dans le même délai, les procès-verbaux en résultant, joints au réquisitoire introductif, ont été soumis au contrôle du juge d'instruction, en sorte que l'irrégularité résultant de la méconnaissance des formalités substantielles prévues par l'article 706-95, alinéa 3, (N° Lexbase : L7518IP7) n'a pas porté atteinte aux intérêts des requérants. De plus, l'article 81 (N° Lexbase : L7148A4I) permet au juge d'instruction de procéder à tous les actes d'information qu'il juge utiles à la manifestation de la vérité, de sorte que la Haute juridiction estime que la surveillance à distance du déplacement d'un véhicule par un dispositif de géolocalisation par satellite s'en trouve justifiée. Elle ajoute que cette surveillance était non seulement proportionnée au but poursuivi mais aussi effectuée sous le contrôle d'un juge constituant ainsi une garantie suffisante contre l'arbitraire. Il n'a donc pas été porté atteinte au droit au respect de la vie privée des requérants. La présente décision de la Cour de cassation démontre la latitude consentie aux officiers de police judiciaire par les magistrats du siège pour le bon accomplissement de leur enquête notamment en matière de lutte contre le trafic de stupéfiants.

newsid:429016

Successions - Libéralités

[Brèves] Réduction de la rémunération du représentant d'une légataire universelle

Réf. : Cass. civ. 1, 23 novembre 2011, n° 10-16.770, FS-P+B+I (N° Lexbase : A9909HZZ)

Lecture: 1 min

N9057BSA

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Le 01 Décembre 2011

Dans un arrêt rendu le 23 novembre 2011, la première chambre civile de la Cour de cassation s'est prononcée sur la réduction de la rémunération du représentant d'une légataire universelle (Cass. civ. 1, 23 novembre 2011, n° 10-16.770, FS-P+B+I N° Lexbase : A9909HZZ). En l'espèce, pour rejeter la demande de Mme L. tendant à la réduction de la rémunération de M. B. qui l'assistait moralement et financièrement au titre des procédures engagées, la cour d'appel de Versailles avait retenu que l'argument tiré de la "proportion" entre l'aide financière apportée et le bénéfice retiré est dépourvu de toute pertinence puisque M. B. a pris le risque de supporter en pure perte des frais de procédure et qu'il s'agit seulement de la réalisation d'un aléa (CA Versailles, 1ère ch., sect. 1, 18 février 2010, n° 08/09716 N° Lexbase : A2283EWH). Mais, selon la Haute juridiction, en se déterminant ainsi, alors que l'aléa exclusivement supporté par M. B. ne faisait pas obstacle à la réduction éventuelle de la rémunération convenue, la cour d'appel, qui n'a pas recherché, comme elle y était invitée, si cette rémunération n'était pas excessive au regard du service rendu, n'a pas donné de base légale à sa décision.

newsid:429057

Vente d'immeubles

[Brèves] Agent immobilier : la signature d'un bon de commission n'équivaut pas à la signature régulière d'un mandat

Réf. : CA Aix-en-Provence, 21 octobre 2011, n° 08/22860 (N° Lexbase : A4512HZ7)

Lecture: 1 min

N9031BSB

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Le 30 Novembre 2011

Les dispositions d'ordre public de l'article 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 (N° Lexbase : L7536AIX) et de l'article 72 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 (N° Lexbase : L8042AIP) exigent, notamment, pour que le mandataire ait droit à une rémunération, qu'un mandat ait été régulièrement signé par les parties, antérieurement à la vente. La signature d'un bon de commission est inopérante ainsi que la référence dans le compromis de vente à un mandat, même précisément dénommé, dès lors que ce mandat n'est pas justifié. Toutefois, l'exécution volontaire du mandant est admise comme palliatif aux formalités ainsi prescrites. Telle est la précision fournie par la cour d'appel d'Aix-en-Provence dans un arrêt du 21 octobre 2011 (CA Aix-en-Provence, 21 octobre 2011, n° 08/22860 N° Lexbase : A4512HZ7). En l'espèce, l'agence immobilière qui, certes, fait état d'un bon de commission daté du 23 septembre 2003 établi aux noms des deux propriétaires indivis pour 13 720 euros, ne produit cependant pas de mandat régulier et elle ne démontre pas, non plus, que le registre des mandats lui a été dérobé ainsi qu'elle l'allègue.

newsid:429031

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