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N9077BSY
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par Grégory Singer, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo - édition sociale
Sous la Direction de Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV
Le 16 Novembre 2013
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Question prioritaire de constitutionnalité. L'entrée en vigueur de la procédure de la question prioritaire de constitutionnalité au 1er avril 2010 a considérablement modifié les stratégies des acteurs qui, jusqu'à lors, ne disposaient que de l'exception d'inconventionnalité pour tenter d'échapper à la loi lorsque les conditions d'application de celle-ci étaient réunies. L'examen de la jurisprudence de la Chambre sociale de la Cour de cassation depuis cette date montre que cette dernière entend jouer pleinement son rôle de filtre, encouragée d'ailleurs par le Conseil constitutionnel lui-même qui n'a pour le moment abrogé aucune disposition du Code du travail, laissant au Parlement une large marge d'appréciation pour mettre en oeuvre les droits et libertés des acteurs et les entourer des garanties suffisantes. Quatre décisions en date des 16 et 18 novembre 2011 (Cass. QPC, 16 novembre 2011, n° 11-40.071, F-P+B et Cass. QPC, trois arrêts, 18 novembre 2011, n° 11-40.067, FS-P+B, n° 11-40.068, P+B et n° 11-40.066, FS-P+B) permettent de nouveau de mesurer l'apport réel de la réforme constitutionnelle et de s'interroger, pour Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale, sur la signification des décisions QPC rendues par la Haute juridiction, selon que celle-ci transmet ou non les questions qui lui sont soumises : trois questions ont, en effet, été bloquées, en raison de leur manque de caractère sérieux, une seule ayant été transmise et relative aux modalités d'application dans le temps de la réforme de la démocratie sociale issue de la loi du 20 août 2008, le Conseil constitutionnel étant invité à se prononcer sur l'absence de régime transitoire des nouvelles conditions de représentation par les syndicats de leurs représentants dans les entreprises de 300 salariés et plus. Lire, L'interprétation des décisions QPC de la Chambre sociale de la Cour de cassation (N° Lexbase : N9005BSC). |
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Validité des conventions collectives. Simplifié, dans ses modalités de mise en oeuvre, par la loi du 20 août 2008 (loi n° 2008-78), le "principe majoritaire" a été introduit dans le Code du travail, en tant que condition de validité des conventions et accords collectifs de travail, en 2004 (loi n° 2004-391 du 4 mai 2004). Quelle que soit la loi en cause, cette condition s'apprécie au regard des suffrages obtenus par les syndicats signataires de l'acte juridique, lors des élections professionnelles dans l'entreprise. Toutefois, si la loi de 2008 commande d'opérer le dépouillement du scrutin alors même que le quorum n'est pas atteint au premier tour des élections, il n'en allait pas ainsi avant cette réforme. La Cour de cassation avait par suite décidé qu'en l'absence de quorum, il n'y avait pas lieu à dépouillement et que cette situation devait être assimilée à une hypothèse de carence aux élections, pour laquelle le législateur avait édicté des dispositions spécifiques. Le législateur de 2008 s'est employé à remettre en cause cette jurisprudence aux termes de dispositions transitoires sur lesquelles il a dû revenir en 2009. C'est l'application de ces dispositions qui faisait difficulté dans l'affaire ayant conduit à l'arrêt du 16 novembre 2011 (Cass. soc., 16 novembre 2011, n° 09-68.427, FS-P+B) commenté, cette semaine, par Gilles Auzero, Professeur à l'Université Montesquieu - Bordeaux IV. Lire, Absence de quorum au premier tour des élections professionnelles et mise en oeuvre du "principe majoritaire" (N° Lexbase : N8973BS7). |
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Réf. : CJUE, 22 novembre 2011, aff. C-214/10 (N° Lexbase : A9722HZ4)
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N9008BSG
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Le 13 Décembre 2011
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Réf. : Ordonnance n° 2011-1636 du 24 novembre 2011 (N° Lexbase : L2654IRQ) et n° 2011-1641 du 24 novembre 2011 (N° Lexbase : L2655IRR)
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N9066BSL
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Le 03 Décembre 2011
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Réf. : Circulaire Unedic n° 2011-33 du 7 novembre 2011 (N° Lexbase : L2800IR7)
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N9068BSN
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Le 07 Décembre 2011
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Réf. : CJUE, 17 novembre 2011, aff. C-435/10 (N° Lexbase : A9210HZ7)
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N9048BSW
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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen et Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Protection sociale"
Le 01 Décembre 2011
Résumé
Les articles 3 et 4 de la Directive 80/987/CEE du 20 octobre 1980, relative à la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur (telle que modifiée par la Directive 2002/74/CE du 23 septembre 2002 N° Lexbase : L9629A4E), doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale qui subordonne la possibilité, pour les travailleurs dont l'employeur se trouve en situation d'insolvabilité, de faire valoir intégralement leur droit au paiement des créances salariales impayées, à l'obligation de se faire enregistrer en tant que demandeur d'emploi. |
Précision étant faite que la Directive 80/987/CEE du 20 octobre 1980 a, depuis, été modifiée à deux reprises, par la Directive 2002/74/CE du 23 septembre 2002 et par la Directive 2008/94 du 22 octobre 2008 (3). La Commission européenne a estimé, début 2011, que ce texte n'avait pas besoin d'être révisé. Le rapport a été débattu, le 13 avril 2011, devant les députés de la Commission Emploi et Affaires sociales du Parlement. Dans son projet de rapport, Julie Girling a jugé que la Directive a atteint son objectif en assurant un minimum de protection aux employés en cas d'insolvabilité, tout en ménageant aux Etats membres suffisamment de souplesse : aussi, il n'est pas nécessaire de fixer un montant minimal pour les paiements effectués par l'institution de garantie au niveau européen (4). Klaus-Heiner Lehne a rédigé un rapport, le 17 octobre 2011, contenant des recommandations à la Commission sur les procédures d'insolvabilité dans le cadre du droit européen des sociétés (2011/2006(INI)), précédant la Résolution du Parlement européen du 15 novembre 2011 contenant des recommandations à la Commission sur les procédures d'insolvabilité dans le cadre du droit européen des sociétés (5).
Le rapport de Klaus-Heiner Lehne a pointé notamment le fait que la Directive 2008/94/CE du 22 octobre 2008 a pour objectif d'assurer un minimum de protection aux travailleurs salariés en cas d'insolvabilité, tout en ménageant suffisamment de souplesse aux Etats membres. Mais il existe des différences de mise en oeuvre entre les Etats membres. Aussi, la Directive 2008/94/CE prévoit d'inclure explicitement dans son champ d'application les travailleurs à temps partiel, les travailleurs bénéficiant de contrats à durée déterminée et les travailleurs intérimaires.
De même, le champ d'application de la Directive 2008/94/CE (et en particulier l'interprétation des termes "créances impayées") est trop vaste, plusieurs Etats membres retenant une définition étroite de la rémunération (en excluant, par exemple, les indemnités de licenciement, les primes, les modalités de remboursement, etc.), ce qui peut donner lieu au non-recouvrement d'un nombre important de créances. La définition des termes "salaire" et "rémunération" relève de la compétence des Etats membres, sous réserve qu'ils respectent les principes de l'égalité et de la non-discrimination entre les travailleurs, de sorte que toute situation d'insolvabilité préjudiciable à ces derniers soit prise en compte pour leur indemnisation selon l'objectif social de la Directive 2008/94/CE et des montants minimums à fixer. Compte tenu des contrats de travail existant dans toute l'Union européenne et de la diversité de ces derniers dans les Etats membres, il n'est pas possible actuellement de chercher à définir la notion de "travailleur salarié" au niveau européen.
Enfin, le rapport souligne la nécessité d'éviter autant que possible les exclusions du champ d'application de la Directive 2008/94/CE (considérant Z, AA à AG) : l'arrêt rapporté porte précisément sur ce thème d'exclusion de garantie. Son intérêt est double : la CJUE rappelle la compétence des Etats membres d'édicter des mesures d'application de la Directive 80/987 (2002/74 ou 2008/94) ; mais elle reste vigilante sur le régime adopté par certains Etats, qui peut conduire à des limitations de garanties.
I - Régime de l'insolvabilité : la compétence normative des Etats membres
En l'espèce, M. A. était employé, depuis le 1er août 1985, de l'entreprise F., déclarée en faillite le 28 novembre 2006. M. A. s'est inscrit, le 15 mai 2007, auprès de la "CWI" et a introduit, le 20 mai 2007, une demande d'indemnité de chômage. Mais il ne s'est enregistré en tant que demandeur d'emploi que le 29 mai 2007. Le 7 juin 2007, il a introduit une demande d'"indemnité d'insolvabilité" auprès de l'"UWV". Par décision du 11 septembre 2007, l'"UWV" a accordé à M. A. une indemnité d'insolvabilité pour des créances impayées pour la période allant du 29 novembre 2006 au 12 février 2007 : cette période correspond au délai de préavis (visé à l'article 64 § 1-b de la "WW"). L'"UWV" a réduit cette somme de 20 %, en application du chapitre IV de la "WW", sanctionnant ainsi le fait que M. A. ne s'est pas fait enregistrer dans le délai requis en tant que demandeur d'emploi. La réclamation de M. A. a été rejetée par l'"UWV" par décision du 18 décembre 2007, au motif que la "WW" imposait l'obligation de se faire enregistrer en tant que demandeur d'emploi auprès de la "CWI" et de faire proroger cet enregistrement. Le recours formé contre cette décision par M. A. devant le Rechtbank a été également jugé non fondé pour le même motif. Il s'est pourvu en appel devant le Centrale Raad van Beroep.
La juridiction de renvoi considère que les articles 4, 5 et 10 de la Directive 80/987 permettent aux Etats membres, non seulement de fixer les modalités de l'organisation, du financement et du fonctionnement des institutions de garantie, mais aussi de limiter la protection que cette Directive vise à garantir aux travailleurs (6).
A - Principe général
La compétence envisagée ici est normative (au sens de la capacité d'un Etat à produire des normes en la matière) et non géographique (dans l'hypothèse des faillites transfrontalières, posant un problème de détermination de l'institution de garantie compétente (7)).
Cette compétence est prévue par la Directive 80/987 (en son article 3-1), dans la mesure où les Etats membres prennent les mesures nécessaires afin que des institutions de garantie assurent le paiement des créances impayées des travailleurs salariés résultant de contrats de travail ou de relations de travail et portant sur la rémunération afférente à la période qui se situe avant une date déterminée.
Ce sont également les Etats membres qui choisissent la date (supra) ; soit celle de la survenance de l'insolvabilité de l'employeur ; soit celle du préavis de licenciement du travailleur salarié concerné, donné en raison de l'insolvabilité de l'employeur ; soit enfin celle de la survenance de l'insolvabilité de l'employeur ou celle de la cessation du contrat de travail ou de la relation de travail du travailleur salarié concerné, intervenue en raison de l'insolvabilité de l'employeur.
De même, les Etats membres ont la faculté de limiter l'obligation de paiement des institutions de garantie (Directive 80/987, art. 4).
B - Mesures d'application
L'article 3 de la Directive 80/987 impose aux Etats membres de prendre les mesures nécessaires afin que les institutions de garantie assurent, sous réserve de l'art. 4 de la Directive, le paiement des créances impayées des travailleurs salariés. La Directive 2002/74 a repris, quasiment en termes identiques, ces mêmes articles 3 et 4. La même observation vaut pour la Directive 2008/94 (même numérotation, art. 3 et 4).
Ainsi, la CJCE a jugé, en 2009 (8), que :
- les articles 3 et 4 de la Directive 80/987/CEE du 20 octobre 1980 ne s'opposent pas à une réglementation nationale qui permet de qualifier de "prestations de Sécurité sociale" les créances impayées des travailleurs lorsque celles-ci sont payées par une institution de garantie ;
- la Directive 80/987 ne s'oppose pas à une réglementation nationale qui utilise comme simple terme de comparaison la créance salariale initiale du travailleur salarié pour déterminer la prestation à garantir par l'intervention d'un fonds de garantie ;
- dans le cadre d'une demande par un travailleur salarié visant à obtenir d'un fonds de garantie le paiement des créances de rémunération impayées, la Directive 80/987 ne s'oppose pas à l'application d'un délai de prescription d'un an (principe d'équivalence). Néanmoins, il appartient au juge national d'examiner si son aménagement ne rend pas pratiquement impossible ou excessivement difficile l'exercice des droits reconnus par l'ordre juridique communautaire (principe d'effectivité).
Enfin, la Directive 80/987 a prévu (art. 5) que les Etats membres fixent les modalités de l'organisation, du financement et du fonctionnement des institutions de garantie. Mais dans un cadre général, dont les bornes sont :
- le patrimoine des institutions doit être indépendant du capital d'exploitation des employeurs et être constitué de telle façon qu'il ne puisse être saisi au cours d'une procédure en cas d'insolvabilité ;
- les employeurs doivent contribuer au financement, à moins que celui-ci ne soit assuré intégralement par les pouvoirs publics ;
- l'obligation de paiement des institutions existe indépendamment de l'exécution des obligations de contribuer au financement.
La compétence des Etats membres est enfin assurée aux articles 9 (faculté des Etats membres d'appliquer ou d'introduire des dispositions législatives, réglementaires ou administratives plus favorables aux travailleurs salariés) et 10 (faculté des Etats membres de prendre les mesures nécessaires en vue d'éviter des abus ; de refuser ou de réduire l'obligation de paiement ou l'obligation de garantie s'il apparaît que l'exécution de l'obligation ne se justifie pas en raison de l'existence de liens particuliers entre le travailleur salarié et l'employeur et d'intérêts communs concrétisés par une collusion entre ceux-ci) de la Directive 80/987.
II - Limitations du droit de paiement de créances salariales
A - Les limitations de garanties
En l'espèce, M. A. s'est vu refuser l'intégralité du paiement du salaire afférent au délai de préavis (art. 64 § 1-b) de la "WW" parce qu'il s'est inscrit tardivement en tant que demandeur d'emploi. Selon l'"UWV", conformément à l'article 65 de la "WW", sont entièrement déduits de l'indemnité les revenus du travail effectué pendant la période de référence. L'obligation d'enregistrement en tant que demandeur d'emploi viserait à augmenter les chances que le travailleur obtienne un emploi pendant cette période et à minimiser les charges du fonds de garantie.
Certaines limitations de garanties ont été soumises à l'appréciation de la CJCE/CJUE : limitation portant sur le délai de préavis ; limitation sur la nature des indemnités prises en charge (indemnité transactionnelle) ; limitation pour les personnes ayant détenu, dans les six mois précédant le dépôt de la demande de mise en faillite, une part essentielle de la société et y ayant exercé une influence.
En 2003 (9), la CJUE a décidé que la Directive 80/987/CEE ne s'oppose pas à l'application d'un délai de forclusion prévu en droit national pour l'introduction de la demande d'un travailleur salarié visant à obtenir le paiement d'une indemnité compensatrice de créances salariales impayées pour cause d'insolvabilité de l'employeur, à condition qu'un tel délai ne soit pas moins favorable que ceux concernant des demandes semblables de nature interne (principe d'équivalence) et ne soit pas aménagé de manière à rendre en pratique impossible l'exercice des droits reconnus par l'ordre juridique communautaire (principe d'effectivité). La juridiction nationale doit, si elle constate que la disposition nationale qui prévoit le délai de forclusion n'est pas conforme aux exigences du droit communautaire et que, de plus, aucune interprétation conforme de cette disposition n'est possible, refuser d'appliquer celle-ci.
Dans le même sens, en 2009 (10), la CJCE a jugé que dans le cadre d'une demande par un travailleur salarié visant à obtenir d'un fonds de garantie le paiement des créances de rémunération impayées, la Directive 80/987 ne s'oppose pas à l'application d'un délai de prescription d'un an (principe d'équivalence). Néanmoins, il appartient au juge national d'examiner si son aménagement ne rend pas pratiquement impossible ou excessivement difficile l'exercice des droits reconnus par l'ordre juridique communautaire (principe d'effectivité).
Les juges doivent justifier des restrictions à la garantie des salaires et indemnités de rupture en cas de risque d'abus : la CJCE s'est prononcée, en ce sens, en 2008 (11). Une salariée espagnole ayant été licenciée a assigné son ancien employeur en conciliation extrajudiciaire (comme le permet le droit du travail espagnol) afin que l'employeur reconnaisse le caractère irrégulier du licenciement et qu'ils s'entendent sur le montant des indemnités de rupture. N'ayant pu obtenir de jugement exécutoire de l'accord de conciliation en raison de l'insolvabilité judiciairement constatée de son débiteur, la salariée s'est tournée vers le Fogasa (institution de garantie des salaires) pour obtenir le paiement des prestations convenues. Le Fogasa a cependant rejeté cette demande, au motif que l'indemnité de licenciement n'avait été reconnue par aucun jugement ni aucune décision administrative, ainsi que l'exige la loi espagnole qui exclut, a contrario, les indemnités reconnues par accord de conciliation extrajudiciaire. La CJCE s'était prononcée, en ce sens, en 2006 (12).
L'article 12-c de la Directive 2008/94 ne s'oppose pas à une disposition du droit national qui exclut un travailleur salarié du bénéfice de la garantie de paiement des créances impayées des travailleurs salariés au motif qu'il détenait, seul ou conjointement avec des parents proches, une part essentielle de l'entreprise concernée et a exercé une influence considérable sur les activités de celle-ci dans les six mois précédant la demande de mise en liquidation de cette entreprise (CJUE, 10 février 2011, aff. C-30/10 N° Lexbase : A1169GUT).
En effet, pour la CJUE, la Directive 2008/94 instaure (art. 3) une obligation de paiement des créances impayées des travailleurs salariés, alors que son article 12-c permet aux Etats de refuser ou de réduire cette obligation dans les cas où le travailleur salarié possédait, seul ou conjointement avec ses parents proches, une partie essentielle de l'entreprise ou de l'établissement de l'employeur et exerçait une influence considérable sur ses activités (13).
Pour la Cour, ni l'objectif de l'article 12, ni la finalité sociale de la Directive ne sont compromis par une disposition nationale qui limite la catégorie de travailleurs exclus du bénéfice de la garantie de paiement des créances impayées à celle des travailleurs qui détenaient une part essentielle de l'entreprise concernée et ont exercé une influence considérable sur les activités de celle-ci pendant la période de six mois précédant la demande de mise en liquidation de cette entreprise. En effet, le travailleur, se voyant refuser le bénéfice de la garantie, pourrait être considéré comme responsable de l'insolvabilité de l'entreprise en cause.
En ce sens, la CJCE avait déjà jugé, en 2002 (14), que les Etats membres peuvent exclure du droit à la garantie les créances de certaines catégories de salariés en raison de la nature particulière du contrat de travail ou en raison de l'existence d'autres formes équivalentes de garantie. Un Etat membre peut, pour éviter des abus, refuser à un salarié un droit à la garantie des créances nées après la date à laquelle un travailleur n'ayant pas le statut d'associé aurait quitté ses fonctions pour non paiement de sa rémunération, à moins que l'absence d'abus ne soit établie. En revanche, un Etat membre ne peut présumer qu'un travailleur n'ayant pas le statut d'associé a quitté ses fonctions pour non-paiement de sa rémunération avant que la rémunération impayée porte sur plus de 3 mois.
B - Limitation aux limitations : la finalité sociale de la Directive 80/987
1 - Les limitations de garanties sont encadrées
En l'espèce (§ 30), le recours de M. A. au fonds de garantie est bel et bien fondé sur l'existence d'une créance non contestée et reconnue par la réglementation nationale néerlandaise (en son article 64 § 1-b de la "WW"). Le paiement d'une telle créance, objectivement due par l'employeur ayant fait faillite, relève de l'article 3 de la Directive 80/987 et est garanti par celle ci. La CJUE souligne, à juste titre, que ce n'est que par voie d'exception que les Etats membres ont la faculté (Directive 80/987, art. 4) de limiter l'obligation de paiement : une telle limitation est envisageable tant en ce qui concerne la durée de la période donnant lieu au paiement (art. 4 § 2) qu'en ce qui concerne le plafond d'un tel paiement, (art. 4 § 3).
La CJUE estime, en l'espèce, que :
- la législation hollandaise ne prévoit pas de plafond de remboursement et ne relève donc pas de la faculté prévue à l'article 4 § 3, de la Directive 80/987 (§ 33) ;
- que l'article 4 de la Directive 80/987 doit être interprété de façon restrictive et conforme à sa finalité sociale, qui est d'assurer un minimum de protection à tous les travailleurs (15). À cet effet, les cas dans lesquels il est permis de circonscrire l'obligation de paiement des institutions de garantie sont énumérés limitativement par la Directive 80/987 et les dispositions concernées doivent faire l'objet d'une interprétation stricte, eu égard à leur caractère dérogatoire et à l'objectif de cette Directive.
2 - Finalité sociale
La finalité sociale de la Directive 80/987 consiste à garantir à tous les travailleurs salariés un minimum de protection au niveau de l'Union européenne en cas d'insolvabilité de l'employeur par le paiement des créances impayées résultant de contrats ou de relations de travail et portant sur la rémunération afférente à une période déterminée (16).
Pour la CJUE, il serait contraire à la finalité de la Directive 80/987 de l'interpréter de façon à ce qu'un travailleur, soit soumis, en raison du non respect de l'obligation d'enregistrement en tant que demandeur d'emploi dans un délai donné prévue par la règle nationale à une diminution forfaitaire et automatique du remboursement de ses créances salariales et ne puisse donc pas bénéficier de la garantie pour les pertes de salaires qu'il a effectivement subies pendant la période de référence (§ 35).
En effet, une obligation d'enregistrement en tant que demandeur d'emploi dans un délai déterminé et dont le non respect se traduit par une diminution de l'indemnité d'insolvabilité versée n'est pas de nature comparable avec un délai de forclusion ou de prescription pour l'introduction d'une demande d'indemnité d'insolvabilité. Il ne s'agit pas du versement de sommes allant au-delà de la finalité sociale de la Directive 80/987, versement que l'article 4 de cette Directive autorise les Etats membres à limiter (17). Bref, la CJUE conclut qu'une règle nationale qui réduit le montant du remboursement de créances salariales de manière forfaitaire et automatique porte directement atteinte au minimum de protection poursuivi par la Directive 80/987 en cas d'insolvabilité de l'employeur (§ 37).
D'ailleurs, si l'article 10 de la Directive 80/987 permet aux Etats membres de prendre les mesures nécessaires en vue d'éviter des abus, l'obligation d'enregistrement auprès des services de l'emploi n'a manifestement pas pour objet de prévenir. L'"UWV" a reconnu que la justification de cette obligation ne reposait aucunement sur l'article 10.
(1) Raad van bestuur van het Uitvoeringsinstituut werknemersverzekeringen, abréviation "UWV".
(2) Centrale organisatie voor Werk en Inkomen, abréviation "CWI".
(3) Avis du Comité économique et social européen sur la "Proposition de Directive du Parlement européen et du Conseil relative à la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur (version codifiée)" COM(2006) 657 final - 2006/0220 COD ; F. Kessler et J.-P. Lhernould (dir.), Code annoté européen du travail, Groupe revue fiduciaire, 2010, p. 1065 s. ; S. Henion-Moreau, M. Le Barbier le Bris et M. Del Sol, Droit social européen et international, PUF, 2010, coll. Thémis, p. 454 s. ; P. Rodière, Traité de droit social de l'Union européenne, LGDJ, 2008, n° 501 à 507 ; J.-M. Servais, Droit social de l'Union européenne, Bruylant 2008 ; B. Teyssié, Droit européen du travail, Litec, coll. Manuel, 3ème édition, n° 568.
(4) Liaisons Sociales Europe, n° 276 du 21 avril 2011, Rubrique "15 jours dans l'Union" ; L. Peltzer et J.-P. Lacomble, La fermeture de l'entreprise et l'insolvabilité de l'employeur, éditions Kluwer, 2004.
(5) Mais ces références portent essentiellement sur le règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000, relatif aux procédures d'insolvabilité et à titre accessoire, sur la protection des salariés en cas de redressement de l'employeur (N° Lexbase : L6914AUM) (Directives 80/987/CEE du 20 octobre 1980, 2002/74/CE du 23 septembre 2002 et 2008/94 du 22 octobre 2008).
(6) CJCE, 18 septembre 2003, aff. C-125/01 (N° Lexbase : A5823C9K), Rec. p. I 9375, D. Simon, Délais de forclusion applicable à l'indemnisation des salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur, Europe, novembre 2003, comm. nº 342, p.17 ; CJCE, 16 juillet 2009, aff. C-69/08 (N° Lexbase : A9801EIT), Rec. p. I 6741, E. Jeansen, Garantie des créances salariales : normes communautaires, JCP éd. S, 2009, nº 1477 p. 27-28 ; L. Driguez, Garantie des créances salariales contre l'insolvabilité de l'employeur, Europe, octobre 2009, comm. nº 363 p.16. Selon la Cour, les articles 3 et 4 de la Directive 80/987 du 20 oct. 1980 ne s'opposent pas à une réglementation nationale qui permet de qualifier de "prestations de Sécurité sociale" les créances impayées des travailleurs, lorsque celles-ci sont payées par une institution de garantie.
(7) Cass. soc., 21 septembre 2011, n° 08-41.512, FS-P+B (N° Lexbase : A9597HXQ), Quelle est l'institution de garantie des salaires compétente pour les travailleurs migrants ?, Lettre d'actualité des Procédures collectives civiles et commerciales, n° 16, octobre 2011, alerte 252 ; v. les obs. de J.-P. Laborde, Institution de garantie des créances de salaires compétente au cas d'exercice habituel de l'activité salariée dans un Etat membre de l'Union européenne autre que celui du siège de l'entreprise mise en liquidation, Lexbase Hebdo n° 457 du 13 octobre 2011 - édition sociale (N° Lexbase : N8136BS7) ; v. aussi CJUE, 10 mars 2011, aff. C-477/09 (N° Lexbase : A3228G7P). Voir E. Jeansen, Détermination de l'institution de garantie compétente dans l'Union européenne, JCP éd. S, n° 22, 31 mai 2011, 1275 ; V. également nos obs., Insolvabilité de l'employeur en droit européen : conditions d'application de la Directive 80/987, sous CJCE, 16 octobre 2008, aff. C-310/07 (N° Lexbase : A7396EA8), Lexbase Hebdo n° 329 du 4 décembre 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N9097BHE) ; v. nos obs., Actualité de la garantie de créances salariales en cas de faillite transfrontalière, sous CJCE, 27 septembre 2007, aff. C-9/07 (N° Lexbase : A5707DYZ), Lexbase Hebdo n° 279 du 31 octobre 2007 - édition sociale (N° Lexbase : N9595BCD).
(8) CJCE, 16 juillet 2009, aff. C-69/08, préc..
(9) CJCE, 18 septembre 2003, aff. C-125/01, Rec. p. I 9375, préc..
(10) CJCE, 16 juillet 2009, aff. C-69/08, préc..
(11) CJCE, 21 février 2008, aff. C-498/06 (N° Lexbase : A0008D7G), Protection des travailleurs contre l'insolvabilité de leur employeur, Europe, n° 4, avril 2008, comm. 122 ; v. nos obs., Directives 80/97/CEE et 2002/74/CE : conditions de l'exclusion de garanties par un fonds de garantie salariale, Lexbase Hebdo n° 295 du 6 mars 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N3629BE7) ; H. Tissandier, La protection contre l'insolvabilité s'étend elle aux indemnités transactionnelles ?, Liaisons Sociales Europe n° 197 du 20 mars 2008.
(12) CJCE, 7 septembre 2006, aff. C-81/05 (N° Lexbase : A9492DQM), s'agissant de l'interprétation de la Directive 80/987/CEE. Le litige oppose un ressortissant espagnol au Fonds de garantie salariale de son pays qui refuse de lui verser une indemnité pour cessation du contrat de travail au motif que celle-ci a été reconnue dans un acte de conciliation, et non dans un jugement ou une décision administrative. La CJCE apporte trois réponses aux questions préjudicielles posées. Lorsqu'un Etat reconnaissait dans son droit interne, avant l'entrée en vigueur de la Directive, le droit pour le travailleur d'obtenir la protection de l'institution de garantie en cas d'insolvabilité de l'employeur, l'application de cette législation dans les cas où l'insolvabilité de l'employeur est intervenue après son entrée en vigueur entre dans son champ d'application. Lorsqu'une réglementation nationale prévoit que des indemnités légales, reconnues par un jugement, sont à la charge de l'institution de garantie en cas d'insolvabilité de l'employeur, des indemnités de même nature, reconnues dans un accord conclu en présence du juge et entériné par lui, doivent être traitées de la même façon. Le juge national doit laisser inappliquée une réglementation interne qui, en violation du principe d'égalité, exclut la prise en charge, par l'institution de garantie, des indemnités reconnues dans un tel accord.
(13) Si la disposition litigieuse ne mentionne aucun délai pendant lequel la possession d'une partie essentielle de l'entreprise concernée et une influence considérable sur les activités de celle-ci doivent avoir été effectives, il découle du septième considérant et de l'article 12-a à c, de la Directive que le législateur ne souhaitait pas porter atteinte à la faculté des Etats de fixer des limites à la responsabilité des institutions de garantie dans certains cas, y compris dans ceux décrits à l'article 12-c. Ce dernier repose, notamment, sur une présomption implicite selon laquelle un travailleur salarié qui, simultanément, détenait une participation essentielle dans l'entreprise concernée et exerçait une influence considérable sur les activités de celle-ci peut, par là même, être en partie responsable de l'insolvabilité de cette entreprise. Toutefois, cette faculté doit être appréciée à la lumière de la finalité sociale de la Directive qui consiste à garantir à tous les travailleurs salariés une protection minimale dans l'Union européenne en cas d'insolvabilité de l'employeur.
(14) CJCE, 11 septembre 2003, aff. C-201/01 (N° Lexbase : A5277C9C).
(15) CJUE, 14 juillet 1998, aff. C-125/97 (N° Lexbase : A0479AWN), Rec. p. I-4493, point 20.
(16) CJCE, 4 mars 2004, aff. C-19/01, C-50/01 et C-84/01 (N° Lexbase : A4308DB8), Rec. p. I-2005, L. Idot, Politique sociale. Des précisions sur le calcul du plafond d'indemnisation prévu par l'article 4 § 3 de la Directive sur la protection des salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur, Europe, mai 2004, comm. nº 135 p.22 ; H. Tissandier, L'actualité de la jurisprudence communautaire et internationale, RJS, 2004, p. 593-594 ; V. point 35 : cette finalité sociale consiste à garantir à tous les travailleurs salariés un minimum communautaire de protection en cas d'insolvabilité de l'employeur par le paiement des créances impayées résultant de contrats ou de relations de travail et portant sur la rémunération afférente à une période déterminée (CJCE, 10 juillet 1997, aff. C-373/95 N° Lexbase : A1924AW8, point 56 ; CJCE, 14 juillet 1998, aff. C-125/97 N° Lexbase : A0479AWN, Rec. p. I-4493, point 20 ; CJCE, 18 octobre 2001, aff. C-441/99 N° Lexbase : A5844AXQ, Rec. p. I 7687, point 26 ; CJCE, 11 septembre 2003, aff. C-201/01 N° Lexbase : A5277C9C, non encore publié au Recueil, point 38 ; CJCE, 16 juil. 2009, Visciano, C-69/08, préc., point 27 : la finalité sociale de la Directive 80/987 consiste à garantir à tous les travailleurs salariés un minimum communautaire de protection en cas d'insolvabilité de l'employeur par le paiement des créances impayées résultant de contrats ou de relations de travail et portant sur la rémunération afférente à une période déterminée (CJCE, 4 mars 2004, aff. C-19/01, C-50/01 et C-84/01, préc., point 35 et jurisprudence citée).
(17) CJCE, 4 mars 2004, C-19/01, C-50/01 et C-84/01, préc., point 34 : l'article 4 § 3, alinéa 1er de la Directive prévoit la faculté pour les Etats membres de fixer un plafond pour la garantie de paiement des créances impayées des travailleurs salariés afin d'éviter le versement de sommes allant au-delà de la finalité sociale de cette Directive.
Décision
CJUE, 17 novembre 2011, aff. C-435/10 (N° Lexbase : A9210HZ7) Textes concernés : Directive 80/987/CEE du Conseil du 20 octobre 1980 (N° Lexbase : L9435AUY), telle que modifiée par la Directive 2002/74/CE du 23 septembre 2002 (N° Lexbase : L9629A4E), art. 4, 5 et 10 Mots-clés : Directive 80/987/CEE, protection des travailleurs en cas d'insolvabilité de l'employeur, indemnité d'insolvabilité, paiement subordonné à la condition d'enregistrement en tant que demandeur d'emploi Liens base : (N° Lexbase : E1266ET3) |
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Réf. : T. confl., 14 novembre 2011, n° 3804 (N° Lexbase : A9970HZB)
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N9064BSI
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Le 01 Décembre 2011
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Réf. : Décret n° 2011-1644 du 25 novembre 2011, relatif au régime des prestations complémentaires de vieillesse des médecins libéraux prévu à l'article L. 645-1 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L2743IRZ)
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Le 01 Décembre 2011
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Réf. : Cass. QPC, 16 novembre 2011, n° 11-40.071, F-P+B (N° Lexbase : A9406HZE), Cass. QPC, trois arrêts, 18 novembre 2011, n° 11-40.067, FS-P+B (N° Lexbase : A9518HZK), n° 11-40.068, P+B (N° Lexbase : A9519HZL) et n° 11-40.066, FS-P+B (N° Lexbase : A9520HZM)
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N9005BSC
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par Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale
Le 01 Décembre 2011
Résumés
Cass. soc., 16 novembre 2011, n° 11-40.071, F-P+B : dans une série d'arrêts rendus le 18 janvier 2011 (Cass. soc., 18 janvier 2011, n° 09-69.199, FS-P+B+R N° Lexbase : A2851GQN, n° 09-42.451, FS-D N° Lexbase : A2800GQR, n° 09-70.310, FS-D N° Lexbase : A2865GQ8, n°09-70.661, FS-D N° Lexbase : A2871GQE, n° 09-70.662, FS-D N° Lexbase : A2872GQG) et faisant application de l'article L. 1233-3 du Code du travail (N° Lexbase : L8772IA7), la Cour de cassation n'a pas entendu priver l'employeur du seul fait de son appartenance à un groupe de sociétés de la possibilité de licencier son personnel pour motif économique lorsqu'il cesse son activité, et ne lui imposant pas, pour cette seule raison, de justifier d'une autre cause de licenciement, hors situation de coemploi. Cass. soc., 18 novembre 2011, n° 11-40.067, FS-P+B : le droit reconnu au salarié protégé, dont le licenciement a été autorisé par l'inspecteur du travail, d'être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent lorsque le ministre, sur recours hiérarchique, ou le juge administratif, saisi d'un recours pour excès de pouvoir, annule cette autorisation, répondent à des exigences constitutionnelles visant à assurer l'effectivité du droit syndical et du principe de participation justifiant que les représentants du personnel bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle dont la mise en oeuvre est entourée de garanties procédurales et de fond suffisantes. Cass. soc., 18 novembre 2011, n° 11-40.068, P+B : les dispositions combinées des articles L. 2324-2 (N° Lexbase : L3724IBK), L. 2324-14 (N° Lexbase : L9758H8W) et L. 2324-15 (N° Lexbase : L9759H8X) du Code du travail font obstacle à ce qu'une organisation syndicale remplissant les conditions pour nommer un représentant au sein du comité d'entreprise, désigne, pour assurer ce mandat, un salarié de l'entreprise ayant fait l'objet d'une interdiction, déchéance ou incapacité relatives à ses droits civiques, deuxièmement que la désignation frauduleuse encourt la nullité et enfin que la mise en oeuvre de la protection dont bénéficie le salarié désigné comme représentant syndical est assortie de garanties procédurales et de fond suffisantes. Cass. QPC, 18 novembre 2011, n° 11-40.066, FS-P+B : la question de la conformité de l'article L. 2324-2 du Code du travail, qui conditionne la désignation d'un représentant syndical au comité d'entreprise à l'obtention, par le syndicat à l'origine de la désignation, d'élus au sein de ce comité, aux dispositions constitutionnelles en ce qu'il ne prévoit pas de régime transitoire, présente un caractère sérieux en ce que la disposition subordonne la désignation d'un représentant syndical au comité d'entreprise par tout syndicat, quand bien même serait-il représentatif, à la condition pour le syndicat d'y avoir des élus, alors qu'aucune disposition transitoire n'a été prévue dans l'attente du résultat des premières élections professionnelles organisées sous l'empire de la nouvelle loi. |
Commentaire
I - De l'interprétation des refus de transmission
A - Contexte constitutionnel
Décisions QPC et langage constitutionnel de la Cour de cassation. Comme cela a été souligné à des nombreuses reprises, le pouvoir de filtrage des QPC conféré par la réforme constitutionnelle de 2008 à la Cour de cassation et au Conseil d'Etat, au travers du critère du caractère "sérieux" des questions qui détermine leur transmissibilité au Conseil constitutionnel, induit nécessairement que ces derniers se livrent à un pré-contrôle de constitutionnalité des dispositions litigieuses, même s'il ne s'agit que d'un contrôle de la "constitutionnalité manifeste", ou, plus exactement, d'un contrôle de "l'absence d'inconstitutionnalité manifeste". La mise en oeuvre de cette procédure impose de distinguer deux hypothèses, selon que la question est transmise ou non, car la signification des décisions diffère alors logiquement selon le cas de figure.
Signification des décisions de non-transmission. Lorsque la Cour de cassation refuse de transmettre une question en raison de son caractère non sérieux, celle-ci considère nécessairement que le texte litigieux n'est pas manifestement contraire aux droits et libertés que la Constitution garantit (1).
On sait que ce jugement peut être nourri par la propre jurisprudence de la Cour qui peut avoir été déjà saisie de la question de la conventionnalité de ces mêmes dispositions et souhaiter promouvoir une interprétation uniforme des instruments protecteurs des droits et libertés, qu'ils soient constitutionnels ou conventionnels (2). On sait également que la Cour de cassation s'inspire directement de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, à laquelle il est désormais clair qu'elle emprunte ses méthodes et son langage, et se comporte alors comme une véritable "chambre des requêtes" constitutionnelles en refusant de lui transmettre des questions dont il lui semble évident qu'elles n'ont aucune chance d'aboutir (3).
Critique. Le zèle manifesté par la Cour de cassation dans l'exercice de son rôle de filtre peut être diversement apprécié.
Pour certains, la Haute juridiction va bien au-delà du rôle que le Constituant a entendu lui confier et s'accapare ainsi un pouvoir qui n'est pas le sien, seul le Conseil constitutionnel pouvant décider de la constitutionnalité des dispositions légales litigieuses.
Pour d'autres, il est nécessaire de soulager le Conseil constitutionnel, sauf à le laisser se noyer dans un contentieux pléthorique, en ne lui transmettant que les questions les plus pertinentes, quitte à laisser les juges "dialoguer", selon des modalités variables, pour que le Conseil fasse savoir à la Cour de cassation que sur telle ou telle question il envisage de modifier sa jurisprudence et qu'il attend qu'on lui transmette la question qui le lui permettrait.
Quelle que soit l'opinion que l'on peut avoir sur la question, les deux sentiments n'étant d'ailleurs pas exclusifs l'un de l'autre et pouvant conduire à une sorte de fatalisme teinté d'une certaine résignation devant l'évolution inéluctable de ce type de contrôle, il est toujours intéressant d'observer les questions que la Chambre sociale de la Cour de cassation a refusé de transmettre, et de tenter de comprendre pourquoi.
B - De la possibilité de contester la constitutionnalité d'une interprétation jurisprudentielle
Remise en cause de la jurisprudence "Société Jungheinrich finances holding" de 2011. Dans cette affaire qui a donné lieu à un arrêt rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation le 18 janvier 2011, la Haute juridiction avait, en effet, retenu, à la suite d'une cour d'appel, une situation de coemploi entre deux entreprises appartenant à un même groupe et ce pour permettre aux salariés licenciés par l'une des deux entreprises d'obtenir la condamnation de l'autre en paiement des indemnités liées à leur licenciement (4).
Confrontée à un risque de qualification identique, une entreprise avait imaginé poser une QPC sur la conformité de l'article L. 1233-3 du Code du travail (N° Lexbase : L8772IA7), tel qu'interprété par la Cour de cassation dans cette affaire, au principe de la liberté d'entreprendre et d'égalité entre les entreprises appartenant à une même filiale.
Plus exactement, la question transmise était ainsi rédigée :
"- en interdisant aux sociétés filiales de licencier leur personnel pour le seul motif de leur cessation d'activité, les dispositions de I'article L. 1233-3 du Code du travail sont-elles inconstitutionnelles comme portant atteinte au principe à valeur constitutionnelle de la liberté d'entreprendre garanti par I'article 4 de la Déclaration universelle des droits de I'Homme et du citoyen (N° Lexbase : L1368A9K) ?
- en soumettant les licenciements pour cessation d'activité notifiés par les sociétés filiales de groupe, à un régime juridique distinct de celui applicable aux licenciements pour le même motif pratiqués par des employeurs autres que des filiales, I'article L. 1233-3 du Code du travail porte-t-il atteinte au principe à valeur constitutionnelle d'égalité devant la loi garanti par I'article 6 de la Déclaration universelle des droits de I'Homme et du citoyen (N° Lexbase : L1370A9M) ?".
La question, ainsi formulée, présentait un double intérêt.
Intérêt de la question posée au regard de la procédure de QPC. La Cour de cassation était invitée à mettre en oeuvre la possibilité offerte par le Conseil constitutionnel, depuis une décision du 6 octobre 2010, de contester devant lui la conformité d'une interprétation jurisprudentielle (5) ; le Conseil considère, en effet, désormais "qu'en posant une question prioritaire de constitutionnalité, tout justiciable a le droit de contester la constitutionnalité de la portée effective qu'une interprétation jurisprudentielle constante confère à cette disposition". Le Conseil a depuis précisé qu'il devait bien s'agir d'une solution issue de la jurisprudence de la Cour de cassation ou du Conseil d'Etat, ce qui s'oppose à toute question portant sur une interprétation qui n'aurait pas été soumise aux Hautes juridictions (6). La Cour de cassation, elle-même, a fait application de cette nouvelle possibilité, sa première chambre civile précisant toutefois que le demandeur devait préciser "le texte législatif dont la portée serait, en application de cette règle, de nature à porter atteinte au principe constitutionnel" en cause (7).
Jusqu'à présent, la Chambre sociale de la Cour de cassation n'avait pas fait une application effective de cette possibilité, bien au contraire. Elle avait, en septembre 2010, écarté le grief tiré d'un prétendu manque de clarté et d'intelligibilité de la loi en relevant que l'interprétation du texte litigieux avait été rendue suffisamment claire par l'interprétation qu'elle en avait faite (8), puis refusé en mai 2011 de transmettre une première question après avoir relevé que celle-ci "ne conteste pas la portée effective d'une interprétation jurisprudentielle constante [...] des articles [litigieux] mais l'interprétation prêtée par le demandeur d'un jugement [...] d'instance" (9).
Cette nouvelle question n'aura pas plus de chance que les précédentes car la Cour de cassation considère, en substance, que le grief manque en fait dans la mesure où le demandeur donne de la jurisprudence qu'il conteste une interprétation erronée, ce qui justifie pleinement le refus de transmission.
Intérêt de la décision au regard de la jurisprudence contestée. Le refus de transmission présente également un intérêt dans la mesure où il permet à la Cour de cassation de préciser la signification et la portée de l'arrêt rendu le 18 janvier 2011, ce qui n'est pas banal puisque par le biais de la procédure de QPC c'est bien la normativité de la solution jurisprudentielle qui se trouve confirmée, ce qui nous semble d'ailleurs parfaitement justifié (10).
Pour refuser de transmettre la double question qui lui était posée, la Cour de cassation a, en effet, considéré que celle-ci "repose sur une interprétation erronée d'arrêts rendus le 18 janvier 2011 par la Cour de cassation et faisant application de l'article L. 1233-3 du Code du travail, ces décisions ne privant pas l'employeur du seul fait de son appartenance à un groupe de sociétés de la possibilité de licencier son personnel pour motif économique lorsqu'il cesse son activité, et ne lui imposant pas, pour cette seule raison, de justifier d'une autre cause de licenciement, hors situation de coemploi".
Cette affirmation est parfaitement justifiée dans la mesure où la situation de coemploi ne modifie en rien le régime juridique applicable au licenciement, ni d'ailleurs à aucune règle du Code du travail, car il s'agit simplement d'étendre l'obligation aux dettes d'une entreprise à une autre après avoir constaté "une confusion d'intérêts, d'activités et de direction".
Dans ce cas de figure, le défaut de caractère sérieux de la question posée était patent par la compétence exclusive de la Cour de cassation ; ce refus de transmission ne postulait d'ailleurs aucun pré contrôle de constitutionnalité car il ne portait sur la pertinence intrinsèque de l'interprétation de la "norme" soumise au contrôle, et nullement sur la norme constitutionnelle elle-même.
C - De la constitutionnalité de la protection exceptionnelle et exorbitante conférée aux salariés protégés
Question posée. Dans cette affaire, la Cour de cassation était interrogée sur la conformité des "dispositions de l'article L. 2422-1 du Code du travail [...] aux dispositions de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 et de l'article 11 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ?".
Réponse. Pour la Haute juridiction, "la question posée ne présente pas un caractère sérieux dès lors que les dispositions critiquées, qui reconnaissent au salarié protégé, dont le licenciement a été autorisé par l'inspecteur du travail, le droit d'être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent lorsque le ministre, sur recours hiérarchique, ou le juge administratif, saisi d'un recours pour excès de pouvoir, annule cette autorisation, répondent à des exigences constitutionnelles visant à assurer l'effectivité du droit syndical et du principe de participation justifiant que les représentants du personnel bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle dont la mise en oeuvre est entourée de garanties procédurales et de fond suffisantes".
Appréciation. Sur le fond, la solution n'appelle pas de remarques particulières car on peut parfaitement admettre que les atteintes portées par le statut exorbitant des représentants du personnel sont à la fois justifiées par la nécessité de garantir l'effectivité de la liberté syndicale et du principe de participation, et proportionnées au but recherché puisque le licenciement n'est pas interdit, mais juste surveillé, et que les atteintes réalisées à la liberté d'entreprendre et de choisir ses collaborateurs sont de ce fait justifiées, proportionnées au but recherché et entourées de garanties tant administratives que juridictionnelles.
Reste que la question posée portait directement sur les atteintes réalisées par la procédure de l'autorisation administrative de licenciement et qu'à notre connaissance le Conseil constitutionnel n'a jamais eu l'occasion de se prononcer précisément sur la question, même s'il a indiqué en 1982, à propos de la mise en cause de la responsabilité civile des représentants syndicaux à l'occasion des grèves, qu'"il appartient au législateur, dans le respect du droit de grève et du droit syndical ainsi que des autres droits et libertés ayant également valeur constitutionnelle, de définir les conditions d'exercice du droit de grève et du droit syndical et, ainsi, de tracer avec précision la limite séparant les actes et comportement licites des actes et comportements fautifs, de telle sorte que l'exercice de ces droits ne puisse être entravé par des actions en justice abusives" (11), et visé, en 1988, que "l'exercice des fonctions de représentant élu du personnel ou de responsable syndical dont la protection découle d'exigences constitutionnelles" (12).
Dans ces conditions, et même si au final, il était probable que ces dispositions seraient confirmées par le Conseil constitutionnel, on peut regretter que la Cour de cassation le prive de la possibilité de prendre position sur ces questions et d'étoffer ainsi sa propre jurisprudence en matière de mise en oeuvre et de protection des droits sociaux.
D - De la moralité du représentant syndical au comité d'entreprise
Question. La Chambre sociale de la Cour de cassation était saisie d'une question ainsi rédigée : "les dispositions des articles L. 2324-2 et L. 2324-15 du Code du travail portent-elles une atteinte manifestement disproportionnée à la liberté d'entreprendre constitutionnellement garantie, dans la mesure où un syndicat peut désigner comme représentant au comité d'entreprise un salarié ayant été condamné pénalement pour avoir nui à ladite entreprise ? Les dispositions de l'article L. 2324-15 auxquelles renvoie l'article L. 2324-2 permettent-elles en toutes circonstances un exercice serein par les salariés de leur droit à participation, par l'intermédiaire de leurs représentants, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises ?".
Réponse. Pour la Cour de cassation, "la question posée ne présente pas un caractère sérieux en ce que, premièrement, les dispositions combinées des articles L. 2324-2, L. 2324-14 et L. 2324-15 du Code du travail font obstacle à ce qu'une organisation syndicale remplissant les conditions pour nommer un représentant au sein du comité d'entreprise, désigne, pour assurer ce mandat, un salarié de l'entreprise ayant fait l'objet d'une interdiction, déchéance ou incapacité relatives à ses droits civiques, deuxièmement que la désignation frauduleuse encourt la nullité et enfin que la mise en oeuvre de la protection dont bénéficie le salarié désigné comme représentant syndical est assortie de garanties procédurales et de fond suffisantes".
Appréciation. Le refus de transmission de cette question est ici pleinement justifié, tant pour des raisons de fond qu'au regard de l'exigence de caractère "sérieux".
Sur le fond, en effet, le demandeur semblait faire fi de l'ensemble des dispositions du Code du travail qui restreignent la possibilité pour un salarié d'être désigné comme représentant du personnel, dispositions qui lui sont fort opportunément rappelées par la Cour.
Sur le plan procédural, ensuite, le refus de transmettre la QPC ne repose pas sur un préjugé favorable à la constitutionnalité de la disposition litigieuse mais uniquement sur l'appréciation des dispositions légales au regard des griefs formulés par le demandeur. Cette solution se rapproche donc de celles qui rejettent les questions qui reposent sur une interprétation erronée d'une solution jurisprudentielle, car dans toutes ces hypothèses le moyen soulevé par le demandeur manque en réalité en fait, ce qui justifie pleinement le contrôle exercé par la Cour.
II - De l'interprétation des décisions de transmission : l'exemple du régime transitoire de la loi du 20 août 2008 dans son volet "démocratie sociale"
Question posée. Dans cette affaire, le demandeur avait posé la question suivante : "l'article L. 2324-2 du Code du travail, qui conditionne désormais la désignation d'un représentant syndical au comité d'entreprise à l'obtention, par le syndicat à l'origine de la désignation, d'élus au sein de ce comité, est-il contraire aux dispositions constitutionnelles en ce qu'il ne prévoit pas de régime transitoire ?".
Réponse favorable à la transmission. La question est donc transmise car la Cour de cassation estime que "la disposition subordonne la désignation d'un représentant syndical au comité d'entreprise par tout syndicat, quand bien même serait-il représentatif, à la condition pour le syndicat d'y avoir des élus, et qu'aucune disposition transitoire n'a été prévue dans l'attente du résultat des premières élections professionnelles organisées sous l'empire de la nouvelle loi".
Rappel. La loi du 20 août 2008 a, entre autres dispositions destinées à revivifier le droit syndical, modifié les critères de désignation des représentants des syndicats au comité d'entreprise dans les entreprises dont l'effectif est de 300 salariés et plus en subordonnant cette désignation non plus à la représentativité du syndicat, comme c'était le cas auparavant, mais au fait d'y avoir des élus (C. trav., art. L. 2324-2).
On sait que ces dispositions ont passé avec succès le baptême du feu conventionnel (13) et constitutionnel (14) ; c'était sans compter avec les difficultés du régime transitoire qui donneront au Conseil constitutionnel l'occasion de se prononcer.
Régime transitoire issu de la loi du 20 août 2008. La loi du 20 août 2008 a en effet souhaité mettre en place un régime transitoire pour favoriser le passage de l'ancien régime au nouveau, régime dont on sait qu'il était particulièrement lacunaire. S'agissant ainsi des critères de la représentativité dans l'attente des résultats des premières élections, et donc d'une première mesure pertinente de l'audience électorale des syndicats de l'entreprise, la loi n'a, en effet, prévu, dans son article 11-IV, que de figer les représentativités établies à la date d'entrée en vigueur de la loi, oubliant totalement de prévoir la possibilité pour de nouveaux syndicats de le devenir pendant la période transitoire, et ce alors que celle-ci pourrait durer longtemps. La Cour de cassation a donc été amenée à "bricoler" une solution transitoire, fondée sur la nécessité de protéger l'effectivité de la liberté syndicale et du principe de participation, en ajoutant la possibilité d'une affiliation confédérale intervenue en cours de période ainsi que la possibilité de prouver positivement sa représentativité, pour les syndicats non affiliés, tout en les dispensant de rapporter la preuve de leur audience puisque, par hypothèse, les nouvelles élections n'ont pas encore eu lieu (15).
L'affaire. Dans cette affaire, c'est, comme dans celle qui intéressait la représentativité syndicale, le traitement de la période transitoire qui fait difficulté.
Si, pendant la période transitoire, aucun nouveau syndicat ne se constitue dans l'entreprise, le comité demeurera en l'état jusqu'aux prochaines élections. Mais si des syndicats frappent à la porte du comité, comment faire et au regard de quels critères ?
Le nouvel article L. 2324-2 du Code du travail est, en effet, d'application immédiate ; seuls les syndicats ayant des élus au comité devraient donc pouvoir y désigner un représentant. Certains syndicats représentatifs n'ayant pas eu d'élus au comité lors des dernières élections (cette condition est, en effet, nouvelle) et se constituant, par application des arrêts du 10 mars 2010, en cours de la période transitoire, ne pourront donc pas avoir de représentants au comité tant que de nouvelles élections, où ils présenteront des candidats, n'auront pas été organisées.
Doutes sur la recevabilité de la QPC. Reste à déterminer si cet état de fait, résultant de l'absence de régime transitoire, est susceptible de justifier une QPC.
On remarquera, tout d'abord, que la question transmise ne précisait pas de quels droits ou libertés il pourrait s'agir (16), de telle sorte qu'on pouvait s'interroger sur la recevabilité de la question devant le juge judiciaire, et que la question pourrait bien se reposer devant le Conseil constitutionnel prochainement.
On remarquera, ensuite, que la question porte non pas sur la conformité d'un texte en particulier mais sur l'absence de dispositions transitoires accompagnant par ailleurs l'application dans le temps de l'article L. 2324-2 du Code du travail, ce qui est différent ; or, la première chambre civile de la Cour de cassation a, pour sa part, refusé d'examiner une question dans une configuration identique après avoir relevé que le demandeur "ne conteste non pas la conformité à la Constitution d'une disposition législative mais celle d'une absence de disposition" (17), en l'occurrence l'absence de texte garantissant la possibilité d'un pourvoi en cassation contre une décision du Conseil supérieur de la magistrature siégeant en formation disciplinaire.
Ces dernier argument pourrait toutefois être contourné en considérant que la question porte en réalité sur la constitutionnalité de l'article L. 2324-2 du Code du travail en ce qu'il s'applique pendant la période transitoire, ce qui permettrait éventuellement au Conseil de formuler une réserve d'interprétation différant son application aux premiers résultats électoraux dans l'entreprise. C'est d'ailleurs ainsi que le Conseil constitutionnel a enregistré la question.
Spéculations sur le devenir constitutionnel de l'article L. 2324-2 du Code du travail. Il sera intéressant d'observer ici la décision du Conseil au regard des propres analyses de la Cour de cassation sur les insuffisances du régime transitoires des articles 11 à 13 de la loi du 20 août 2008 (18). On se rappellera, en effet, que la Cour de cassation n'avait pas hésité à fonder ses décisions sur une interprétation des dispositions légales "interprétées à la lumière des articles 6 et 8 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (N° Lexbase : L1356A94)" pour considérer que les articles 11 et 13 " n'excluent pas qu'un syndicat qui ne bénéficie pas de cette présomption puisse établir sa représentativité, soit par affiliation postérieure à l'une des organisations syndicales représentatives au niveau national ou interprofessionnel, soit en apportant la preuve qu'il remplit les critères énoncés à l'article L. 2121-1 du Code du travail dans sa rédaction issue de cette loi, à la seule exception de l'obtention d'un score électoral de 10 %, auquel il devra satisfaire dès les premières élections professionnelles organisées dans l'entreprise".
Certes, dans cette affaire, ce n'est pas la représentativité syndicale qui est en cause mais "seulement" la désignation des représentants des syndicaux dans les comités d'entreprises de 300 salariés et plus. Le Conseil constitutionnel devra par conséquent déterminer si le législateur pouvait restreindre ainsi la possibilité pour les syndicats de désigner leurs représentants pendant la période transitoire, sachant que cette question ne met pas en cause directement le principe de participation, puisque les salariés ont élu leurs représentants lors des dernières élections, ni la possibilité pour les syndicats de prouver leur représentativité, et donc de désigner un délégué. Alors si l'atteinte est indéniable, on peut douter qu'elle soit d'une importance telle qu'elle conduise le Conseil constitutionnel à décider d'une réserve sur l'interprétation de l'article L. 2324-2 du Code du travail qui neutraliserait le changement de critère intervenu en 2008 pendant la période transitoire dans le cadre de l'article 5-VII de la loi (qui n'est d'ailleurs pas visé par la QPC).
(1) Nous ne raisonnerons pas sur l'hypothèse, exceptionnelle en pratique, du caractère "nouveau" de la question qui mobiliserait un argument constitutionnel inédit dans la jurisprudence du Conseil, car non seulement celle-ci est très peu fréquente, et ne s'est jamais rencontrée en matière sociale, mais de surcroît elle n'implique aucune appréciation de conformité de la part de la Cour.
(2) Ainsi de la conformité de la loi du 20 août 2008 (Cass. QPC, 18 juin 2010, 4 arrêts, n° 10-40.005 N° Lexbase : A4056E3M, n° 10-40.006 N° Lexbase : A4057E3N, n° 10-40.007 N° Lexbase : A4058E3P et n° 10-14.749 N° Lexbase : A4055E3L et nos obs. La Cour de cassation, juge constitutionnel ?, Lexbase Hebdo n° 403 du 13 juillet 2010 - édition sociale N° Lexbase : N6300BPZ)
(3) Sur cette démonstration notre chron., La Chambre sociale de la Cour de cassation, chambre des requêtes constitutionnelles, Lexbase Hebdo n° 458 du 19 octobre 2011 - édition sociale (N° Lexbase : N8247BSA).
(4) Cass. soc., 18 janvier 2011, n° 09-69.199, FS-P+B+R (N° Lexbase : A2851GQN) et les obs. de G. Auzero, Coemployeurs : qualification et effets sur la validité des licenciements économiques, Lexbase Hebdo n° 426 du 2 février 2011 - édition sociale (N° Lexbase : N3365BR3).
(5) Cons. constit., 6 octobre 2010, n° 2010-39 QPC (N° Lexbase : A9923GAR), JCP éd. G, 2010, p. 1145, note A. Gouttenoire et Ch. Radé ; Cons. constit., 14 octobre 2010, n° 2010-52 QPC (N° Lexbase : A7696GBN), Cons. constit., 4 février 2011, n° 2010-96 QPC (N° Lexbase : A1689GRY, Zone des 50 pas géométriques), Cons. constit., 6 mai 2011, n° 2011-127 QPC (N° Lexbase : A7886HPR Faute inexcusable de l'employeur : régime spécial des accidents du travail des marins), cons. 5.
(6) Cons. constit., 8 avril 2011, n° 2011-120 QPC (N° Lexbase : A5889HM3).
(7) Cass. QPC, 27 septembre 2011, n° 11-13.488, F-P+B+I N° Lexbase : A9987HX8).
(8) Cass. QPC, 28 septembre 2010, n° 10-40.027 (N° Lexbase : A1250GBW) et n° 10-40.028 (N° Lexbase : A1251GBX) : la question n'était pas sérieuse "dès lors que les termes 'presque exclusivement' contenus dans l'article L. 7321-2 du Code du travail (N° Lexbase : L1885IEK), tels qu'interprétés à de nombreuses reprises par la Cour de cassation, ne sont ni imprécis ni équivoques et ne peuvent porter atteinte aux objectifs à valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi ni, en conséquence, aux droits et libertés visés dans la question".
(9) Cass. QPC, 31 mai 2011, n° 11-13.256, F-D (N° Lexbase : A3444HTQ), à propos des articles L. 2314-16 (N° Lexbase : L2618H9T) et L. 2324-15 (N° Lexbase : L9759H8X) du Code du travail. Ce jugement de Lunéville, frappé de pourvoi, avait retenu que les salariés bénéficiaires d'une convention de forfait en jours sur l'année n'étaient pas des salariés travaillant à temps partiel, seuls concernés par les dispositions contestées.
(10) Sur cette question au coeur du débat sur la modulation de l'application dans le temps des revirements de jurisprudence, notre étude La Chambre sociale de la Cour de cassation et la modulation dans le temps des effets des revirements de jurisprudence, Dr. soc., 2010, pp. 1150-1159.
(11) Cons. const., 22 octobre 1982, n° 82-144 DC, Loi relative au développement des institutions représentatives du personnel (N° Lexbase : A8046ACY).
(12) Cons. const., 20 juillet 1988, n° 88-244 DC, Loi portant amnistie (N° Lexbase : A8180ACX), cons. 24.
(13) Cass. soc. 14 avril 2010, n° 09-60.426, FS-P+B+R (N° Lexbase : A9981EU9), D., 2010. Actu. 1150, obs. B. Ines ; RDT, 2010. 276, Rapp. J.-M. Béraud ; ibid., 2010, p. 374, obs. Akandji-Kombé ; Dr. soc., 2010. 647, note L. Pécaut-Rivolier; JCP éd. S, 2010, p. 1259, obs. B. Gauriau.
(14) Cass. QPC, 18 juin 2010, n° 10-14.749, P+B (N° Lexbase : A4055E3L), D., 2010. Actu. 1720 ; Dalloz actualité, 8 juillet 2010, obs. Ines; RJS, 2010, p. 703, n° 780.
(15) Cass. soc., 10 mars 2010, n° 09-60.282, (N° Lexbase : A1867ETC) (prouvée) et n° 09-60.065, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A9741ESL) (présumée par affiliation), v. les obs. de G. Auzero, Portée des dispositions transitoires de la loi du 20 août 2008 relativement à l'établissement de la représentativité syndicale, Lexbase Hebdo n° 388 du 26 mars 2010 - édition sociale (N° Lexbase : N6056BNM) ; RDT, 2010, p. 308, obs. G. Borenfreund ; Dr. soc., 2010, p. 548, note M.-L. Morin ; JCP éd. S, 2010, p. 1204, note B. Gauriau.
(16) La Cour de cassation ne pouvait d'ailleurs pas pallier cette carence car "si la question posée peut être "reformulée" par le juge à l'effet de la rendre plus claire ou de lui restituer son exacte qualification, il n'appartient pas au juge de la modifier" : Cass. soc., QPC, 14 décembre 2010, n° 10-40.050, FS-D (N° Lexbase : A4114GNP) ; Ass. plén., 20 mai 2011, n° 11-90.033, P+B+R+I (N° Lexbase : A2729HSU) ; Cass. QPC, 28 juin 2011, n° 11-40.019, FS-D (N° Lexbase : A9079HUS) ; Cass. QPC, 7 juillet 2011, n° 11-40.037, F-D (N° Lexbase : A9813HUY) ; Cass. QPC, 13 juillet 2011, n° 11-40.026, F-P+B (N° Lexbase : A0502HWI); Cass. QPC, 5 octobre 2011, n° 11-40.052, FS-P+B (N° Lexbase : A6052HYS).
(17) Cass. QPC, 16 novembre 2010, n° 10-60.366, FP-D (N° Lexbase : A6619GKD).
(18) Cass. soc.,10 mars 2010, préc..
Décisions
Cass. QPC, 16 novembre 2011, n° 11-40.071, F-P+B (N° Lexbase : A9406HZE) Non-lieu àrenvoi Disposition concernée : C. trav., art. L. 1233-3 (N° Lexbase : L8772IA7) tel qu'interprété par la Cour de cassation (Cass. soc., 18 janvier 2011, n° 09-69.199, FS-P+B+R N° Lexbase : A2851GQN) Mots-clés : QPC, licenciement pour motif économique, groupe, coemploi Liens base : Cass. QPC, 18 novembre 2011, n° 11-40.067, FS-P+B (N° Lexbase : A9518HZK) Non-lieu à renvoi Disposition concernée : C. trav., art. L. 2422-1 (N° Lexbase : L9775IAB) Mots-clés : salariés protégés, licenciement, autorisation administrative préalable, nullité, réintégration Liens base : (N° Lexbase : E9592ES3) Cass. QPC, 18 novembre 2011, n° 11-40.068, P+B (N° Lexbase : A9519HZL) Non-lieu à renvoi Dispositions concernées : C. trav., art. L. 2324-2 (N° Lexbase : L3724IBK) et L. 2324-15 (N° Lexbase : L9759H8X) Mots-clés : comité d'entreprise, représentant syndical, moralité Liens base : (N° Lexbase : E1918ET9) Cass. QPC, 18 novembre 2011, n° 11-40.066, FS-P+B (N° Lexbase : A9520HZM) Transmission Dispositions contestées : C. trav., art. L. 2324-2 (N° Lexbase : L3724IBK) Mots-clés : comité d'entreprise, représentant syndical, régime transitoire Liens base : (N° Lexbase : E1918ET9) |
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Réf. : Circ. DGT, n° 2011/08 du 28 octobre 2011, relative aux accords et plans d'action en faveur de la prévention de la pénibilité prévus à l'article L. 138-29 du Code de Sécurité sociale (N° Lexbase : L2613IR9)
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N9063BSH
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Le 06 Décembre 2011
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Réf. : Circulaire CNAV n° 2011/83 du 18 novembre 2011 (N° Lexbase : L2611IR7)
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N9069BSP
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Le 01 Décembre 2011
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Réf. : Cass. soc., 16 novembre 2011, n° 09-68.427, FS-P+B (N° Lexbase : A9404HZC)
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N8973BS7
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par Gilles Auzero, Professeur à l'Université Montesquieu - Bordeaux IV
Le 01 Décembre 2011
Résumé
En cas d'absence de quorum au premier tour des élections professionnelles en entreprise antérieurement au 21 août 2008, la validité des accords collectifs d'entreprise ou d'établissement n'est subordonnée à l'approbation des salariés que lorsque le scrutin n'a pas donné lieu à dépouillement. |
Observations
I - Le principe majoritaire
On doit à la loi du 4 mai 2004, relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, d'avoir subordonné la validité des conventions et accords collectifs de travail à ce l'on qualifie, faute de mieux mais de manière évocatrice, de "principe majoritaire". La loi du 20 août 2008, portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, a maintenu ce principe, mais en simplifiant grandement les modalités de sa mise en oeuvre.
S'agissant des accords collectifs d'entreprise ou d'établissement qui, seuls, nous intéressent ici, il résulte de l'article L. 2232-12 du Code du travail (N° Lexbase : L3770IBA) que leur validité "est subordonnée à [leur] signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli au moins 30 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, et à l'absence d'opposition d'une ou de plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés à ces mêmes élections, quel que soit le nombre de votants".
Ainsi que le précise l'article 12 II de la loi du 20 août 2008 (1), ces règles nouvelles ne sont applicables qu'à compter du 1er janvier 2009. Par suite, le législateur a édicté certaines dispositions transitoires qui ont dû, par la suite, être elles-mêmes modifiées.
Tel qu'issu de la loi du 20 août 2008, le texte précité stipulait que jusqu'au 1er janvier 2009, "la validité d'un accord d'entreprise est subordonnée au respect des conditions posées par les articles L. 2232-12 et L. 2232-15 (N° Lexbase : L2297H9X) du Code du travail dans leur rédaction antérieure à la présente loi, les suffrages mentionnés dans ces articles étant pris en compte quel que soit le nombre de votants".
Il faut ici se souvenir que jusqu'à la loi du 20 août 2008, l'article L. 2232-12 du Code du travail renvoyait à une convention de branche le soin de fixer les conditions de validité des conventions et accords collectifs d'entreprise. Plus précisément, les négociateurs de branche pouvaient opter entre deux possibilités : soit exiger que la convention ou l'accord d'entreprise soit signé par une ou des organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli au moins la moitié des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections professionnelles dans l'entreprise (2) ; soit subordonner la validité de la convention ou de l'accord d'entreprise à l'absence d'opposition d'une ou de plusieurs organisations syndicales ayant recueilli la moitié des suffrages exprimés au premier tour de ces mêmes élections (3). Le même texte précisait encore qu'en cas de carence d'élections professionnelles mais de présence d'un délégué syndical, l'accord signé par lui devait être soumis à l'approbation des salariés par referendum.
Précisant la portée de ces dispositions, la Cour de cassation avait décidé, dans un important arrêt rendu le 20 décembre 2006, que lorsque le quorum n'est pas atteint au premier tour des élections professionnelles, il n'y a pas lieu de décompter les suffrages exprimés en faveur de chacune des listes syndicales, de sorte qu'il y a carence au sens de l'article L. 2232-12 du Code du travail (4). On comprend ainsi mieux pourquoi l'article 12 II de la loi de 2008 précisait que les suffrages mentionnés dans ces articles étaient pris en compte quel que soit le nombre de votants (i e. même si le quorum n'était pas atteint).
Le législateur avait toutefois oublié le cas des entreprises ayant organisé des élections entre l'arrêt de la Cour de cassation et l'adoption de la loi du 20 août 2008, élections pour lesquelles le quorum n'avait pas été atteint. Consécutivement à la prise de position de la Chambre sociale, les suffrages pouvaient ne pas avoir été décomptés. Certes, jusqu'au 1er janvier 2009, il était possible, dans ce cas, de faire application des dispositions de l'article L. 2232-12 du Code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi de 2008. Mais, postérieurement au 21 août 2008, s'appliquaient les dispositions nouvelles. Or, faute de décompte des suffrages, et dans l'attente des élections nouvelles (5), il était de fait impossible de signer la moindre convention collective dans l'entreprise.
Ayant, avec retard, pris conscience de cette difficulté, le législateur a modifié l'article 12 II de la loi du 20 août 2008, par une loi du 12 mai 2009 (loi n° 2009-526 N° Lexbase : L1612IEG). Il lui a ajouté l'alinéa suivant : "jusqu'aux résultats des premières élections professionnelles dans l'entreprise ou l'établissement, pour lesquelles la date fixée pour la première réunion de la négociation du protocole d'accord préélectoral est postérieure au 21 août 2008, en cas de carence au premier tour des élections professionnelles ou d'absence de dépouillement du premier tour des élections professionnelles, la validité de l'accord d'entreprise ou d'établissement négocié et conclu avec un ou plusieurs délégués syndicaux est subordonnée à son approbation par les salariés à la majorité des suffrages exprimés". C'est précisément l'application et l'interprétation de ce texte qui était en cause dans l'arrêt rapporté.
II - La mise à l'écart du principe majoritaire en application du droit transitoire
La société T., divisée en deux établissements distincts, l'établissement de Malakoff et l'établissement de Cergy-Pontoise, avait organisé, les 13 et 19 décembre 2006, les élections professionnelles au sein de ces établissements. Le quorum n'avait toutefois pas été atteint au sein de l'établissement de Malakoff.
Le 21 mars 2007, l'employeur avait conclu avec des syndicats un avenant à l'accord d'entreprise du 24 novembre 2005 et à son avenant du 13 juin 2006 relatif au temps de travail des ingénieurs et cadres. Contestant la validité de cet avenant au motif qu'il aurait dû être soumis à l'approbation de la majorité des salariés, le syndicat CGT, non signataire de l'accord et de ses avenants, avait saisi la juridiction prud'homale d'une demande en annulation.
Pour déclarer non écrit l'avenant de révision de l'accord collectif du 21 mars 2007 relatif au temps de travail, l'arrêt attaqué avait énoncé qu'à défaut de quorum au premier tour des élections professionnelles, la loi n'impose pas de dépouillement, et que dans de telles circonstances, face à l'impossibilité de justifier d'un caractère majoritaire, nécessaire à la légitimité d'une opposition, à l'encontre d'un accord engageant une communauté de travailleurs, il convient de juger qu'un défaut de quorum doit être assimilé à une carence, au sens de l'article L. 2232-14 du Code du travail (N° Lexbase : L3774IBE), de sorte que la validité de l'accord signé par le délégué syndical, de l'entreprise ou de l'établissement, doit être subordonnée à l'approbation de la majorité des salariés.
Après avoir visé l'article 12 II de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 tel qu'issu de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 et affirmé "qu'il résulte de ce texte qu'en cas d'absence de quorum au premier tour des élections professionnelles en entreprise antérieurement au 21 août 2008, la validité des accords collectifs d'entreprise ou d'établissement n'est subordonnée à l'approbation des salariés que lorsque le scrutin n'a pas donné lieu à dépouillement", la Cour de cassation décide "qu'en se déterminant ainsi, alors qu'il n'y avait pas eu carence au premier tour des élections organisées au sein de l'établissement de Malakoff le 19 décembre 2006 et qu'il lui appartenait de rechercher si le scrutin avait donné lieu à dépouillement et, dans l'affirmative, si l'avenant signé le 21 mars 2007 remplissait les conditions de validité au regard des suffrages obtenus par les syndicats signataires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale".
L'interprétation que la Cour de cassation donne de l'article 12 II de la loi du 20 août 2008 tel qu'issu de la loi du 12 mai 2009 nous paraît tout à fait justifiée. L'absence de quorum ne saurait, par définition, être assimilée à une carence au premier tour des élections et le texte en cause distingue d'ailleurs bien les deux hypothèses. Par voie de conséquence, ce n'est pas parce qu'il n'est pas obligatoire de procéder au dépouillement, lorsque le quorum n'est pas atteint (6), qu'une telle opération n'a pas eu lieu. Le juge ne saurait donc s'en tenir au constat du défaut de quorum. Il se doit d'abord de vérifier si, nonobstant ce fait, un dépouillement n'a pas eu lieu. Si tel est le cas, des résultats sont disponibles et le principe majoritaire trouve à s'appliquer.
On pourra certes relever que, dans son arrêt précité du 20 décembre 2006, la Cour de cassation avait retenu que l'absence de quorum équivalait à une carence aux élections, soit la solution exactement opposée à celle retenue dans la décision présentement commentée. Mais il est vrai que c'était avant l'adoption de la loi du 20 août 2008 et de son article 12 II, venant contredire, avec effet rétroactif, la position de la Chambre sociale.
(1) Article non codifié.
(2) Si les parties signataires ne respectaient pas la condition de majorité, le texte conventionnel pouvait en quelque sorte être "sauvé", en étant soumis aux salariés par la voie du referendum.
(3) En l'absence de choix fait par les partenaires sociaux de la branche, c'est le droit d'opposition qui s'appliquait.
(4) Cass. soc., 20 décembre 2006, n° 05-60.345, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A1160DT7). Lire nos obs., Impossibilité de déterminer les syndicats majoritaires en l'absence de quorum au premier tour des élections professionnelles, Lexbase Hebdo n° 243 du 10 janvier 2007 - édition sociale (N° Lexbase : N7208A9T).
(5) Il faut ici rappeler que les mandats des délégués du personnel et des représentants élus au comité d'entreprise sont en principe de 4 ans.
(6) Ce qui, il faut le rappeler, n'est plus la règle lorsque les dispositions nouvelles de la loi du 20 août 2008 trouvent à s'appliquer.
Décision
Cass. soc., 16 novembre 2011, n° 09-68.427, FS-P+B (N° Lexbase : A9404HZC) Cassation, CA Paris, Pôle 6, 2ème ch., 4 juin 2009, n° 08/10069 (N° Lexbase : A1301EIZ) Texte visé : article 12 II de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 (N° Lexbase : L7392IAZ) tel qu'issu de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 (N° Lexbase : L1612IEG) Mots-clés : accord collectif d'entreprise, conditions de validité, principe majoritaire, appréciation, dispositions transitoires Liens base : (N° Lexbase : E2378ETA) |
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Réf. : Cass. soc., 16 novembre 2011, n° 11-13.256, FS-P+B (N° Lexbase : A9402HZA)
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N9018BSS
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par Sébastien Tournaux, Professeur à l'Université des Antilles et de la Guyane
Le 01 Décembre 2011
Résumé
Lorsque des salariés travaillent simultanément dans plusieurs entreprises, ils doivent, conformément aux articles L. 2314-16 (N° Lexbase : L2618H9T) et L. 2324-15 (N° Lexbase : L9759H8X) du Code du travail, choisir celle dans laquelle ils font acte de candidature. |
Commentaire
I - L'éligibilité des salariés à temps partiel travaillant simultanément dans deux entreprises
Le salarié qui entend se porter candidat aux élections professionnelles dans l'entreprise doit respecter un certain nombre de conditions établies par le Code du travail.
Spécialement, s'agissant des élections des délégués du personnel et du comité d'entreprise, les articles L. 2314-16 et L. 2324-15 du Code du travail imposent que le salarié soit électeur et âgé de dix-huit ans pour être candidat. Le salarié doit disposer d'une ancienneté d'un an dans l'entreprise (1), quand bien même le travail durant cette période aurait été intermittent (2), et quand bien même le contrat de travail du salarié aurait été suspendu durant cette année d'ancienneté (3).
A ces règles s'ajoutent des dispositifs de lutte contre les conflits d'intérêts qui pourraient survenir en cas de trop grande proximité entre le salarié élu et l'employeur. Ainsi, ces textes prévoient également que ne peuvent être élus les "conjoints, partenaires d'un PACS, concubin, ascendants, descendants, frères, soeurs et alliés au même degré de l'employeur". On peut enfin relever que, même si cette question fait parfois débat dans le domaine politique, aucune restriction ne s'oppose à ce qu'un salarié étranger soit candidat aux élections.
L'ensemble de ces conditions d'éligibilité s'apprécie à la date de l'élection (4) faute de quoi le scrutin peut être annulé. Le contentieux relatif à l'électorat est soumis au juge d'instance (5), sachant que, depuis 2009, les décisions du tribunal d'instance en matière d'électorat sont susceptibles de pourvoi en cassation (6).
Certaines conditions plus spécifiques sont cependant applicables lorsque le salarié travaille ou a un lien avec plusieurs entreprises.
Ces règles particulières concernent au premier chef les travailleurs temporaires qui, salariés de l'entreprise de travail temporaire, travaillent effectivement dans une entreprise utilisatrice. La Chambre sociale juge à leur égard qu'étant électeur dans l'entreprise de travail temporaire, ils ne peuvent être électeurs dans l'entreprise utilisatrice alors même que leur mission présenterait un caractère permanent (7). N'étant pas électeurs, ils ne peuvent être éligibles dans l'entreprise utilisatrice.
Des règles particulières encadrent également l'éligibilité des salariés mis à disposition ou détachés dans une entreprise utilisatrice. Pour l'essentiel, le régime de l'électorat et de l'éligibilité des salariés mis à disposition est aujourd'hui établi par les articles L. 2314-18-1 (N° Lexbase : L3815IBW) et L. 2324-17-1 (N° Lexbase : L3756IBQ) du Code du travail. Ces textes imposent une ancienneté de vingt-quatre mois dans l'entreprise pour y être éligible. Surtout, le second alinéa de chacun de ces textes impose au salarié mis à disposition de faire un choix. Le salarié bénéficie d'une véritable option électorale puisqu'il peut choisir, selon des critères et des modalités qui n'ont pas été établies par le texte (8), entre voter dans son entreprise d'origine ou voter dans l'entreprise utilisatrice (9). Là encore, les critères de l'électorat conditionneront les règles d'éligibilité si bien que le salarié ne pourra être élu représentant du personnel que dans l'une des entreprises.
Enfin, une dernière situation particulière a été envisagée par le second alinéa des articles L. 2314-16 et L. 2324-15 du Code du travail. Ces textes disposent, en effet, que "les salariés travaillant à temps partiel simultanément dans plusieurs entreprises ne sont éligibles que dans l'une de ces entreprises. Ils choisissent celle dans laquelle ils font acte de candidature". C'est l'application de cette règle qui faisait débat dans l'affaire sous examen.
Dans cette affaire, deux cadres étaient employés par deux employeurs. Ils avaient, d'une part, conclu un contrat de travail à durée indéterminée avec une société et, d'autre part, été engagés, à nouveau par contrat à durée indéterminée, par une association. Après avoir été élus représentants du personnel au sein de la société, ces salariés s'étaient portés candidats aux élections professionnelles au sein de l'association. L'association introduisit une requête devant les juges d'instance afin de faire annuler ces candidatures.
Le tribunal d'instance débouta l'association de cette demande. En effet, faute de clauses spécifiques dans les contrats de travail, les juges du fond estimèrent que ces contrats ne pouvaient être qualifiés de contrats de travail à temps partiel. Ils relevèrent, en outre, que les bulletins de salaire de ces salariés comportaient la mention de l'existence d'une convention de forfait-jours sur l'année, forfait-jours rendant impossible toute assimilation à une catégorie de travailleur à temps complet ou à temps partiel.
Par un arrêt rendu le 16 novembre 2011, la Chambre sociale de la Cour de cassation casse et annule cette décision au visa des articles L. 2314-16 et L. 2324-15 du Code du travail. Estimant que les juges d'instance avaient justifié leur décision par des "motifs inopérants", la Chambre sociale énonce, de manière très générale, que "lorsque des salariés travaillent simultanément dans plusieurs entreprises, ils doivent, conformément aux articles L. 2314-16 et L. 2324-15 du Code du travail, choisir celle dans laquelle ils font acte de candidature".
Cette solution peut surprendre si l'on s'en tient à une lecture stricte des textes visés. Elle peut cependant s'expliquer par l'analyse de l'esprit de ces textes, analyse qui présente les caractéristiques d'une interprétation réaliste des règles en la matière.
II - L'extension des règles d'éligibilité à tout salarié multi-actif ?
Formellement, la décision rendue par la Chambre sociale de la Cour de cassation peut étonner. En effet, les articles L. 2314-16 et L. 2324-15 du Code du travail sont très clairs et n'appellent, à première vue, aucune interprétation : seuls les salariés engagés à temps partiel doivent choisir entre l'éligibilité dans l'une ou l'autre des entreprises. La qualification de contrat de travail à temps partiel est déterminée avec précision par le Code du travail : est considéré comme travailleur à temps partiel le salarié dont le temps de travail est inférieur à la durée légale de travail, durée calculée le cas échéant sur la semaine, le mois ou l'année (10). Surtout, le contrat de travail à temps partiel doit en principe être écrit et comporter des clauses spécifiques relatives à "la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et [...] la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois" (11).
Manifestement, les salariés concernés n'avaient pas conclu de contrat de travail à temps partiel. Ce sentiment était d'ailleurs renforcé par l'existence de conventions de forfait qui paraissent matériellement inconciliables avec toute idée de décompte du temps. A vrai dire, si l'on comprend que la Chambre sociale ait pu rendre la décision commentée, comme nous le verrons plus loin, il reste difficilement explicable qu'elle ait jugé ce motif "inopérant". Les contrats n'étaient pas des contrats à temps partiel, les règles des articles L. 2314-16 et L. 2324-15 ne pouvaient littéralement trouver à s'appliquer.
S'il s'agit donc incontestablement d'une interprétation extensive de ces textes, la Chambre sociale fait cependant preuve d'un certain réalisme. Cette approche très pragmatique impose cependant de s'interroger sur la portée de la règle invoquée.
Matériellement, lorsque un salarié travaille dans deux entreprises différentes, l'un des contrats est nécessairement conclu à temps partiel, quand bien même les clauses des contrats de travail ne le prévoiraient pas. En effet, si les deux contrats de travail étaient conclus à temps complet, le salarié serait mathématiquement amené à travailler deux fois trente-cinq heures par semaine, soit soixante-dix heures. Or, au-delà du fait qu'une telle quantité de travail ne peut que rarement être effectivement assurée par un travailleur, y compris s'il s'agit d'un travailleur indépendant ou d'un salarié au forfait qui ne sont pas tenus à des limites horaires maximales, le code du travail prévoit, pour les dérogations les plus étendues, qu'en aucun cas un salarié ne peut travailler plus de soixante heures par semaine (12). Nécessairement, en pratique, l'un des contrats au moins était exécuté à temps partiel, ce qui explique que le juge puisse imposer le choix de l'éligibilité dans l'une ou l'autre des entreprises.
La rédaction de la motivation adoptée par la Chambre sociale de la Cour de cassation comporte cependant une généralité un peu gênante. En effet, le motif décisoire reprend, peu ou prou, la rédaction des articles L. 2314-16 et L. 2324-15 du Code du travail, mais omet la mention des travailleurs à temps partiels. Par voie de conséquence, la règle utilisée par la Chambre sociale est nettement plus générale et semble signifier que, du moment qu'un salarié travaille pour le compte de deux entreprises, quelles qu'en soient les conditions, il ne peut être éligible que dans l'une ou l'autre des entreprises. D'une certaine manière, la Chambre sociale semble donc poser un principe général applicable à toute situation de double emploi.
Doit-on cependant s'émouvoir d'une telle extension ? Rien n'est moins sûr. En effet, comme nous l'avons vu, les différentes hypothèses de double emploi ou de double appartenance à plusieurs entreprises que sont le détachement, la mise à disposition, le travail temporaire ou, encore, le travail à temps partiel dans plusieurs entreprises, sont toutes encadrées par le législateur qui, soit interdit l'éligibilité dans l'une des entreprises, soit impose une option au salarié entre l'une ou l'autre des entreprises. Il n'y avait donc qu'un pas à faire pour extraire, par un procédé d'induction amplifiante, une règle générale applicable à toute situation de double emploi.
(1) Sachant qu'une décision appréciait cette ancienneté au niveau du groupe, décision cependant trop ancienne pour qu'il soit certain qu'elle serait aujourd'hui confirmée, v. Cass. soc., 8 juillet 1997, n° 96-60.295, publié (N° Lexbase : A2310ACK).
(2) Cass. soc., 3 décembre 2002, n° 01-60.506, inédit (N° Lexbase : A1759A4W) ; Cass. soc., 3 octobre 2007, n° 06-60.063, F-P+B (N° Lexbase : A6651DYY).
(3) Cass. soc., 26 septembre 2002, n° 01-60.708, publié (N° Lexbase : A5095AZQ).
(4) Cass. soc., 30 octobre 2001, n° 00-60.341, inédit (N° Lexbase : A9903AWP).
(5) C. trav., art. L. 2314-25 (N° Lexbase : L2644H9S) et L. 2324-23 (N° Lexbase : L9776H8L).
(6) Cass. soc., 23 septembre 2009, n° 08-60.535, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A2423ELC) et les obs. de G. Auzero, Les litiges préélectoraux désormais soumis à la Cour de cassation, Lexbase Hebdo n° 366 du 8 octobre 2009 - édition sociale (N° Lexbase : N0715BMG) ; Dr. soc., 2010, p. 161, note Petit ; SSL, 2009, n° 1415, p. 7, avis J. Duplat. Les effets du revirement opéré par cet arrêt ont cependant été aménagés par la Chambre sociale, v. Cass. soc., 26 mai 2010, n° 09-60.400, FS-P+B+R (N° Lexbase : A7362EXX) et les obs. de Ch. Radé, L'aménagement des effets d'un revirement de jurisprudence : la Chambre sociale de la Cour de cassation ouvre la voie, Lexbase Hebdo n°409 du 22 septembre 2010 - édition sociale (N° Lexbase : N0948BQ8.
(7) Cass. soc., 28 février 2007, n° 06-60.171, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A4007DUX).
(8) Y. Pagnerre, G. Saincaize, L'intégration des salariés mis à disposition : nouvelles conditions, nouveaux effets, JCP éd. S, 2009, 1368.
(9) La Cour de cassation a eu l'occasion d'apporter une première précision au fonctionnement de ce droit d'option en jugeant que le choix du salarié s'effectue au moment où sont organisées les élections dans l'entreprise utilisatrice, peu important qu'il ait pu voter aux élections précédemment organisées dans son entreprise d'origine. V. Cass. soc., 26 mai 2010, n° 09-60.400, FS-P+B+R, préc..
(10) C. trav., art. L. 3123-1 (N° Lexbase : L0404H9T).
(11) C. trav., art. L. 3123-14 (N° Lexbase : L3882IBE).
(12) En principe, le maxima est fixé à quarante-huit heures par l'article L. 3121-35 du Code du travail (N° Lexbase : L0329H93). Cependant, des exceptions très encadrées peuvent porter cette durée maximale à soixante heures en cas de "circonstance exceptionnelle entraînant temporairement un surcroît extraordinaire de travail" (C. trav., art. L. 3121-35 et R. 3121-23 N° Lexbase : L6129IMX). Quand bien même cette exception serait avancée, elle ne permettrait pas d'atteindre les soixante-dix heures. Surtout, cette exception est nécessairement temporaire si bien qu'elle ne pourrait dans tous les cas justifier que de tels horaires soient permanents.
Décision
Cass. soc., 16 novembre 2011, n° 11-13.256, FS-P+B (N° Lexbase : A9402HZA) Cassation, TI Lunéville, cont. des élections professionnelles, 18 février 2011 Textes visés : C. trav., art. L. 2314-16 (N° Lexbase : L2618H9T) et L. 2324-15 (N° Lexbase : L9759H8X) Mots-clés : élections du personnel, éligibilité, travail à temps partiel, option du salarié, multi-activité Liens base : (N° Lexbase : E1625ETD) |
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Réf. : Arrêté du 29 novembre 2011, relatif au relèvement du salaire minimum de croissance en métropole, dans les départements d'outre-mer et dans les collectivités d'outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon (N° Lexbase : L2786IRM)
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Le 02 Décembre 2011
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Réf. : CA Versailles, 11ème ch., 27 octobre 2011, n° 10/05642 (N° Lexbase : A9204HZW)
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Le 01 Décembre 2011
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Réf. : CA Aix-en-Provence, 1ère ch., sect. B, 17 novembre 2011, n° 11/13288 (N° Lexbase : A9215HZC)
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Le 08 Décembre 2011
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Le 01 Décembre 2011
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-21.031, F-D (N° Lexbase : A0168H3M) : les tâches confiées au salarié, dans le cadre du contrat à durée déterminée, pour mettre en place et organiser un pôle de vente de matériel de vidéosurveillance destiné aux grandes entreprises, relevaient de la réorganisation et du développement de l'activité normale et permanente de la société concevant, fabriquant et installant des équipements de vidéosurveillance, et entraînent ainsi la requalification du contrat en contrat à durée indéterminée .
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-23.406, F-D (N° Lexbase : A0171H3Q) : lorsqu'un second contrat à durée déterminée ne prend effet que postérieurement à l'expiration du premier, il ne s'agit non pas d'un renouvellement mais de deux contrats distincts soumis au délai de carence prévu par l'article L. 1244-3 du Code du travail (N° Lexbase : L1484H9T) .
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-21.089, F-D (N° Lexbase : A0142H3N) : les différentes clauses d'une convention de cession d'actions, prévoyant que le cédant deviendra salarié de la société, étant indivisibles, la clause relative à l'obligation de non-rétablissement et de non-concurrence, étant de nature à s'appliquer au contrat de travail, est nulle du fait notamment de son absence de limitation dans le temps et dans l'espace (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E8699ESY).
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 09-72.642, F-D (N° Lexbase : A0158H3A) : l'activité spécifique de transport frigorifique de son ancien employeur ne plaçait pas la nouvelle entreprise en situation de concurrence directe, le salarié n'exerçant ainsi pas chez cette dernière une activité lui faisant enfreindre sa clause de non-concurrence (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E8738ESG).
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-20.288, F-D (N° Lexbase : A0145H3R) : dans le cadre d'une société par actions simplifiée, aucune disposition n'exige que la délégation du pouvoir de licencier soit donnée par écrit, elle peut être tacite et découler des fonctions du salarié qui conduit la procédure de licenciement (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E2882ETW).
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-26.167, F-D (N° Lexbase : A0148H3U) : lors de difficultés économiques de l'entreprise, peu important leur origine, l'erreur du chef d'entreprise dans l'appréciation du risque inhérent à tout choix de gestion ne caractérise pas à elle seule la légèreté blâmable (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E9278ESG).
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-23.320, F-D (N° Lexbase : A0175H3U) : le non-respect des règles en matière d'indemnisation des temps de déplacement invoqué par le salarié à l'appui de sa prise d'acte de rupture constitue un manquement grave de l'employeur à ses obligations légales, justifiant l'application des effets d'un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E9677ES9).
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 09-72.394, F-D (N° Lexbase : A0157H39) : le désistement résultant d'une transaction ne fait pas obstacle à une nouvelle action ayant pour objet de contester cette transaction. L'allégation de production de pièces nouvelles, non disponibles en février 2006, alors qu'elles existaient antérieurement à cette époque, ne fait pas obstacle à l'application des dispositions de l'article R. 1452-6 du Code du travail (N° Lexbase : L0932IAR), qui ne vise pas l'existence de moyens nouveaux, notamment du fait de nouvelles pièces, mais seulement un nouveau fondement juridique des prétentions (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E3760ETG).
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-11.277, F-D (N° Lexbase : A0160H3C) : dès lors que le salarié et l'employeur s'opposent sur le caractère réel et sérieux de la cause du licenciement prononcé en raison de l'impossibilité de reclassement de l'intéressé déclaré médicalement inapte, l'octroi d'une somme équivalente à la moitié de l'indemnité de préavis à laquelle celui-ci ne peut pas normalement prétendre faute d'être en mesure d'exécuter ce préavis, correspond à une concession réelle et non dérisoire de la part de l'employeur (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E9931ESM).
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 09-70.904, F-D (N° Lexbase : A0179H3Z) : aucun fait fautif ne pouvant donner lieu à double sanction ; le salarié ayant fait l'objet d'un retrait définitif de son habilitation APRS, à titre de sanction disciplinaire, à la suite d'un incident, sa mutation, décidée par l'employeur dans le cadre de la procédure disciplinaire en cours, méconnaît l'article L. 1331-1 du Code du travail (N° Lexbase : L1858H9P) (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E2788ETG).
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-30.833, F-D (N° Lexbase : A0150H3X) : constitue une faute grave rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, le fait qu'un salarié ait négligé ses fonctions en passant le plus clair de son temps de travail, à se connecter à des sites à caractère pornographique et zoophile et ait mis en ligne le numéro de son téléphone mobile professionnel sur de tels sites faisant ainsi courir un risque tangible à l'image de la société (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E2632ETN).
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-24.344, F-D (N° Lexbase : A0147H3T) : le licenciement disciplinaire étant intervenu plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien préalable, la volonté de l'employeur d'accorder un nouveau délai de réflexion à la salariée ne peut avoir pour effet de suspendre ce délai (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E2809ET9).
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-15.644, F-D (N° Lexbase : A0163H3G) : si l'employeur peut tenir compte des absences, même motivées par la grève, pour le paiement d'une prime, c'est à la condition que toutes les absences, hormis celles qui sont légalement assimilées à un temps de travail effectif, entraînent les mêmes conséquences sur son attribution (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E2583ETT).
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-24.279, F-D (N° Lexbase : A0177H3X) : caractérise la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés, permettant à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments, la fourniture par un salarié de notes de service, d'un certificat du directeur et des décomptes (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E0355ETC).
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-21.973, F-D (N° Lexbase : A0132H3B) : il résulte d'un accord d'entreprise, pris en application de l'article L. 3141-19 du Code du travail (N° Lexbase : L0569H9X), que le fractionnement des congés payés en dehors de la période légale à la demande du salarié ne lui ouvre pas droit aux jours de congés supplémentaires prévus par ce texte .
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-17.672, F-D (N° Lexbase : A0165H3I) : une prime d'exploitation, contrairement aux autres éléments de rémunération, dépendant de la qualité du travail de l'intéressé, est liée à l'exécution de la prestation de travail de l'intéressé et entre ainsi dans le calcul du minimum conventionnel (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E0752ETZ).
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-20.326, F-D (N° Lexbase : A0167H3L) : un salarié ne soumet pas au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération lorsqu'il n'apporte aucun élément de comparaison quant à la valeur du travail effectué par le salarié avec lequel il se compare ni aucun élément susceptible d'attester de ce que ses qualités professionnelles auraient justifié la titularisation revendiquée (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E0722ETW).
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-23.178, F-D (N° Lexbase : A0169H3N) : l'employeur ne peut opposer son pouvoir discrétionnaire pour se soustraire à son obligation de justifier, de façon objective et pertinente, une différence de traitement entre des salariés effectuant un même travail ou un travail de valeur égale .
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-20.570, F-D (N° Lexbase : A0174H3T) : le port de chaussures de sécurité s'imposant aux salariés concernés tant en application du règlement intérieur que des règles de sécurité propres aux postes occupés par ces derniers qui devaient les mettre et les retirer dans les locaux de l'entreprise, donne droit à une contrepartie financière correspondant au temps d'habillage et de déshabillage (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E0284ETP).
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-21.158, F-D (N° Lexbase : A0143H3P) : la salariée invoquant le retrait des sièges contrairement aux préconisations du médecin du travail, permettant de présumer un harcèlement moral, il incombait à l'employeur de prouver que ces agissements n'étaient pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision était justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement .
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-18.571, F-D (N° Lexbase : A0134H3D) : un harcèlement moral est caractérisé lorsque sont constatés des agissements répétés de la direction à l'encontre de son cadre responsable du service métré tels que l'oubli de son nom dans l'organigramme, sa mise à l'écart, la diminution de ses responsabilités, la notification d'une sanction injustifiée, l'organisation d'un entretien déstabilisant reconnu à l'origine d'un accident du travail, le peu d'empressement manifesté à la volonté exprimée par son cadre de reprendre le travail ainsi que la dégradation de sa santé physique et mentale .
- Cass. soc., 23 novembre 2011, n° 10-18.834, F-D (N° Lexbase : A0135H3E) : l'employeur établit que les faits reprochés, notamment, l'examen médical lors de l'embauche du salarié, étaient justifiés par des éléments objectifs constitués par les circonstances de l'engagement de l'intéressée, à la suite de la cession de son fonds de commerce de vente à son nouvel employeur, et par l'accord de celle-ci sur les modifications de son temps de travail, étrangers à tout harcèlement moral et exclusifs de mauvaise foi dans l'exécution du contrat de travail .
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Réf. : Décret n° 2011-1601 du 21 novembre 2011, relatif au contenu et aux modalités de délivrance de l'attestation prévue aux articles L. 8222-1 et L. 8222-4 du Code du travail et L. 243-15 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L2617IRD)
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Le 28 Août 2014
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Réf. : Décret n° 2011-1637 du 23 novembre 2011 (N° Lexbase : L2663IR3)
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Le 01 Décembre 2011
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