Lexbase Social n°623 du 3 septembre 2015

Lexbase Social - Édition n°623

Social général

Cette semaine dans Lexbase Hebdo - édition sociale... Numéro spécial loi "Macron"

Réf. : Loi n° 2015-990 du 6 août 2015, pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC)

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N8738BU8

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par Blanche Chaumet, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition sociale
Sous la Direction de Christophe Radé, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux

Le 03 Septembre 2015

Présenté en Conseil des ministres le 10 décembre 2014, il aura fallu des mois de controverses avant de finalement boucler la saga "Macron" le 5 août 2015 avec la décision du Conseil constitutionnel n° 2015-715 DC du 5 août 2015 (N° Lexbase : A1083NNG). Le loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC) a en effet été l'objet de débats houleux chez les parlementaires avant d'être définitivement adopté par l'Assemblée nationale le 10 juillet 2015, non sans que le Gouvernement ait engagé sa responsabilité à plusieurs reprises pendant le processus législatif, et pour finalement être déclaré partiellement conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel le 5 août 2015.
Construit autour de trois piliers : libérer, investir et travailler, la loi "Macron" vise à agir sur tous les leviers pour favoriser la relance de la croissance, de l'investissement et de l'emploi, abordant, par là même, une grande diversité de thèmes, notamment concernant le droit du travail. Présentée en Conseil des ministres le 10 décembre 2014, il aura fallu des mois de controverses avant de finalement boucler la saga "Macron" le 5 août 2015 avec la décision du Conseil constitutionnel n° 2015-715 DC du 5 août 2015 (N° Lexbase : A1083NNG). Le loi n° 2015-990 du 6 août 2015, pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC) a en effet été l'objet de débats houleux chez les parlementaires avant d'être définitivement adoptée par l'Assemblée nationale le 10 juillet 2015, non sans que le Gouvernement ait engagé sa responsabilité à plusieurs reprises pendant le processus législatif, et pour finalement être déclarée partiellement conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel le 5 août 2015.

Construit autour de trois piliers : libérer, investir et travailler, la loi "Macron" vise à agir sur tous les leviers pour favoriser la relance de la croissance, de l'investissement et de l'emploi, abordant, par là même, une grande diversité de thèmes, notamment concernant le droit du travail.


I - Les modifications relatives à l'épargne salariale

La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques opère des réformes conséquentes concernant le Perco et les autres dispositifs d'épargne salariale. Dorénavant la mise en place d'un Perco est alignée sur le régime des accords de participation. La contribution sur les abondements des employeurs aux plans d'épargne pour la retraite collectifs est supprimée, à compter du 1er janvier 2016. Quant au taux du forfait social relatif aux versements sur un plan d'épargne pour la retraite collectif orienté vers le financement de l'économie, il est abaissé à 16 %.

Enfin, il est possible pour l'employeur d'abonder le Perco même en l'absence de contribution du salarié. Concernant les autres dispositifs d'épargne salariale, on retiendra, entre autres, le blocage par défaut des sommes issues de l'intéressement sur un plan d'épargne entreprise en cas d'absence de choix du salarié et l'harmonisation de la date de versement des primes d'intéressement et de participation.

Mais comme le relève le Professeur Gilles Auzero dans son commentaire sur ces nouvelles dispositions "On ne saurait dire que la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques apporte, en la matière, de profonds bouleversements. Comme souvent par le passé, le législateur a, principalement, souhaité inciter à la mise en place et au développement des dispositifs composant l'épargne salariale qui, on peut le regretter, restent d'une redoutable complexité technique" (lire N° Lexbase : N8673BUR).

II - Les modifications relatives à l'indemnisation des licenciements injustifiés

La loi "Macron" a été conçue, on le sait, dans un contexte économique difficile où la lutte contre le chômage est devenue la priorité du Gouvernement. Afin de garantir une meilleure prévisibilité des indemnités en cas de licenciement injustifiés et lutter ainsi contre la frilosité des employeurs à embaucher, la réforme a introduit un référentiel indicatif fixant, après avis du Conseil supérieur de la prud'homie et selon les modalités prévues par décret en Conseil d'Etat, le montant des dommages-intérêts susceptibles d'être alloués en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, en prenant en compte l'ancienneté, l'âge et la situation du demandeur par rapport à l'emploi. A destination des juges et des parties, ce référentiel a surtout pour objectif affiché de guider les juges dans leur décision. Cependant, comme le souligne le Professeur Alexandre Fabre, si ce référentiel n'a qu'un pouvoir indicatif et que les juges n'y sont nullement soumis, comment être certain que ces derniers le suivront (lire N° Lexbase : N8672BUQ) ?

Afin de lever les incertitudes liées au contentieux des licenciements, la loi "Macron" a également tenté, sans succès, d'instaurer des planchers et des plafonds d'indemnisations pour les licenciements injustifiés en fonction de l'ancienneté du salarié et des effectifs de l'entreprise. A la différence du référentiel, la grille de dommages-intérêts fixée par le législateur devait s'imposer au juge. Si l'on peut y voir une marque de défiance à l'égard du pouvoir judiciaire, il n'en demeure pas moins que les Sages ont retoqué, de façon assez prévisible, cette dernière mesure, jugeant qu'elle violait le principe d'égalité devant la loi en instaurant une différence de traitement injustifiée entre les salariés en fonction de la taille de l'entreprise (Cons. const., décision n° 2015-715 DC, du 5 août 2015 N° Lexbase : A1083NNG). Cette décision était fortement attendue mais certains regrettent un raisonnement jugé laconique et une motivation qui aurait mérité davantage de précisions.

La question se concentre aujourd'hui sur l'article L. 1235-5 (N° Lexbase : L1347H9R) dont la constitutionnalité pourrait très prochainement être remise en cause par QPC puisque ce dernier fait lui-même varier l'indemnisation due en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse en fonction de l'ancienneté des salariés et des effectifs de l'entreprise...

III - Les modifications relatives au repos dominical et en soirée

La loi "Macron" est venue réformer en partie les dérogations au travail dominical et en soirée qui étaient également attendues depuis longtemps.

S'agissant des dérogations municipales, le maire est en mesure d'accorder non plus cinq mais douze dimanches d'ouverture aux établissements situés sur le territoire de la commune.

S'agissant des dérogations préfectorales, leur durée maximale est fixée par la loi à trois ans tandis que la procédure d'autorisation est légèrement remaniée. La modification la plus importante réside probablement dans la suppression de l'avis, normalement donné avant l'octroie de l'autorisation, en cas d'urgence dûment justifiée et lorsque la dérogation n'excède pas trois dimanches. En outre, la loi prévoit qu'à la demande des organisations représentatives d'une zone géographique concernée, le préfet est tenu d'abroger l'arrêté de fermeture des établissements de la profession ou de la zone géographique concernée pendant la durée du repos hebdomadaire lorsque la majorité des membres de la profession l'exige.

La loi ajoute de nouvelles dérogations sur un fondement géographique, créant ainsi des zones touristiques internationales (ZTI), des zones touristiques (ZT), des zones commerciales (ZC) ou encore des zones d'emprise d'une gare à grande affluence. Chaque zone comporte son lot de particularités, les modalités définissant et délimitant ces zones variant peu ou proue en fonction de leur vocation respective. Selon certaines conditions, le travail en soirée de 21 heure à minuit est ouvert dans les ZTI à certains établissements, et des règles particulières sont également réservées aux commerces de détail alimentaire qui bénéficient de plein droit de la possibilité de donner le repos dominical à partir de 13 heures le dimanche dans les ZTI et les gares à forte affluence.

La majorité des dérogations temporaires au travail dominical et en soirée se cristallise, d'une part, autour d'un accord collectif garantissant un certain nombre de droits aux salariés, notamment les contreparties qui leur sont dues, et, d'autre part, sur le volontariat (ZTI, ZT, ZC, gare à grande affluence). Quoiqu'il en soit, le Professeur Sébastien Tournaux constate que de manière générale, "la loi semble en permanence chercher un équilibre entre l'assouplissement des conditions des dérogations d'une part, et le développement de contreparties pour les salariés concernés d'autre part" (lire N° Lexbase : N8671BUP).

IV - Les modifications relatives au licenciement pour motif économique et à la sécurisation de l'emploi

C'est à la marge que la loi "Macron" est venue modifier les règles relatives aux licenciements pour motif économique.

En allongeant la durée maximale de deux à cinq ans des accords de maintien de l'emploi, en accordant la possibilité aux partenaires sociaux de prévoir, dans le cadre de cet accord, les conditions et les modalités selon lesquelles celui-ci peut être suspendu en cas d'amélioration ou d'aggravation de la situation économique de l'entreprise, et en précisant les modalités d'acceptation ou de refus par le salarié de l'application de l'accord à son contrat, la loi "Macron" s'attaque au régime même des accords de maintien de l'emploi. Depuis cette loi, lorsque le salarié s'oppose à l'accord de maintien de l'emploi, l'employeur est exonéré de l'obligation individuelle de reclassement préalable à son licenciement. Sur ce point, si Magali Gadrat, Maître de conférences, rappelle que le régime des licenciements consécutifs au refus de plusieurs salariés de se voir appliquer un accord de maintien de l'emploi tel qu'issu de la loi du 14 juin 2013 était déjà contraire au droit européen relatif aux licenciements collectifs, il est encore plus regrettable qu'il soit devenu de surcroît contraire à de nombreuses normes supranationales relatives au droit fondamental des salariés de contester le bien-fondé de la rupture de leur contrat de travail... (lire N° Lexbase : N8682BU4).

De même, si la loi vient alléger l'obligation de reclassement hors du territoire national dans les entreprises ou groupes internationaux en la conditionnant strictement à la demande expresse du salarié menacé de licenciement, la loi reste cependant laconique sur les modalités de cette demande.

En revanche, on ne peut que se féliciter, d'une part, des précisions ajoutées par la loi "Macron" sur la fixation conventionnelle ou unilatérale du périmètre d'application des critères de l'ordre des licenciements en cas de grand licenciement collectif dans les entreprises d'au moins cinquante salariés qui mettent fin aux incertitudes en la matière, et d'autre part, de la suppression de la référence au contrôle administratif des petits licenciements collectifs dans les entreprises d'au moins cinquante salariés.

Enfin, la loi "Macron" supprime le rôle de la DIRECCTE s'agissant du prononcé des grands licenciements collectifs dans les entreprises soumises à une procédure collective employant au moins cinquante salariés, puisqu'elle n'est plus tenue de s'assurer de la proportionnalité du contenu du PSE aux moyens dont dispose le groupe. Elle précise, en revanche, son rôle, dans les entreprises in bonis, lorsque la décision d'homologation/validation administrative du projet de grand licenciement collectif est annulée en raison d'une insuffisance de motivation.

Le nouveau régime du contrat de sécurisation professionnelle intègre, quant à lui, les modifications de la Convention Unedic du 26 janvier 2015 et de l'ANI du 8 décembre 2014 pour notamment allonger la durée du CSP en cas de reprise d'une activité salariée dans le cadre de ce dispositif, et obliger les OPCA à participer aux actions de formation prévues dans le cadre du CSP.

V - Les modifications relatives à la justice prud'homale

Avec la lenteur des jugements et l'accroissement des contentieux en droit du travail, la réforme de la justice prud'homale s'inscrit dans l'ère du temps et est toujours à l'ordre du jour. Si la loi "Macron" a le mérite de lancer le mouvement de la réforme, elle demeure une ébauche qui devra être complétée par la suite puisque, comme le souligne Vincent Orif, Maître de conférences, il est actuellement difficile de trouver une cohérence globale (lire N° Lexbase : N8676BUU et N° Lexbase : N8694BUK).

Au demeurant, la loi est tout de même venue préciser les obligations des conseillers prud'hommes en mettant l'accent sur la volonté d'améliorer leur intégration dans le corps judiciaire et en prévoyant des obligations similaires à celles des magistrats (indépendance, impartialité, dignité, probité, secret des délibérés, prohibition des mandats impératifs avant et après l'entrée en fonction...). En outre, la formation des conseillers prud'hommes est renforcée, chaque conseiller devant suivre une formation initiale de cinq jours avant sa prise de fonction qui s'ajoute à la formation continue.

La loi "Macron" créé également un nouveau statut du défenseur syndical dans l'entreprise, lequel devient un salarié protégé et voit ses absences pour exercer sa mission rémunérées.

La principale innovation réside surtout dans l'instauration d'un nouveau droit disciplinaire des conseillers prud'hommes dont la procédure se rapproche, dorénavant, de celle des magistrats de carrières, malgré quelques spécificités. En outre, une nouvelle définition de la faute disciplinaire est prévue par la loi et les sanctions sont modifiées, puisque, si la suspension pour une durée de six mois est maintenue, en revanche la censure est remplacée par le blâme, et deux catégories de déchéance (l'une provisoire, l'autre définitive) sont assorties de l'interdiction d'exercer les fonctions de conseiller prud'homme.

Afin de lutter contre les difficultés susceptibles de se présenter lors de la constitution ou lors du fonctionnement du conseil de prud'homme, la loi "Macron" a également encadré la possibilité de transférer les affaires dans ces deux cas de figures tout en précisant la procédure alors applicable.

Sur le terrain procédural, alors que le bureau de conciliation devient le bureau de conciliation et d'orientation (BCO), la loi en profite pour simplifier la présentation de la composition de chacune des formations du conseil de prud'hommes et réaffirme la mission du BCO de concilier les parties. Plus généralement, la loi précise les étapes de la procédure prud'homale en l'absence de conciliation ou de conciliation partielle et ouvre la médiation conventionnelle ainsi que la convention de procédure participative à tous les contrats de travail, laissant ainsi la part belle aux solutions amiables avant la saisine du juge.

Enfin, la loi précise que toutes les juridictions de l'ordre judiciaire peuvent désormais solliciter l'avis de la Cour de cassation avant de statuer sur l'interprétation d'une convention ou d'un accord collectif lorsqu'il existe une difficulté sérieuse se posant dans de nombreux litiges.

VI - Les modifications relatives à l'emploi et à la formation et à la lutte contre la prestation de services internationale illégale

L'aspect "emploi et formation", s'il apporte quelques modifications en matière sociale reste un sujet traité à la marge dans la loi "Macron". D'ailleurs, qu'il s'agisse des périodes de mise en situation professionnelle, de la prise en compte des stages de découverte des élèves de troisième dans l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés, de la suppression de dix-neuf articles du Code du travail relatifs aux emplois jeunes jugés obsolètes, des stages de préparation à l'installation par les organisations professionnelles et les chambres de métiers et de l'artisanat ou encore de la prise en charge de la rémunération des salariés des TPE en formation par les OPCA, le moins que l'on puisse dire, c'est que la loi "Macron" s'est montrée, comme le constate le Professeur Christophe Willmann, très "disparate" quant aux aspects abordés (lire N° Lexbase : N8733BUY), sans oublier le traitement du dispositif des adultes-relais à Mayotte et le remplacement du contrat d'accès à l'emploi par le contrat initiative emploi.

L'un des objectifs affichés de la loi concernait également la lutte contre les prestations de services internationales illégales. C'est pourquoi, dans ce domaine, la loi "Macron" s'est efforcée de renforcer les dispositifs déjà existant et de mettre en place de nouveaux outils. Dorénavant, la DIRECCTE peut ainsi ordonner la suspension de l'activité d'un prestataire étranger qui a détaché des salariés en cas de manquement grave à l'ordre public social, et en cas de non respect de cette décision, prononcer une amende administrative pouvant aller jusqu'à 100 000 euros par salarié.

La lutte contre les infractions à la législation sur les travailleurs détachés sur le territoire national est également renforcée avec l'obligation, pour l'employeur, de présenter les documents à l'inspection du travail garantissant le respect des règles relatives au détachement.

En outre, la responsabilité du donneur d'ordre ou du maître d'ouvrage à l'égard du cocontractant qui détache des travailleurs est renforcée, et le plafond des sanctions administratives en matière de détachement transnational de travailleurs salariés est modifié, passant de 10 000 à 500 000 euros.

Par ailleurs, la loi "Macron" rend obligatoire pour l'ensemble des entreprises établies en France ou à l'étranger la délivrance d'une carte d'identification professionnelle des salariés du bâtiment et des travaux publics et met en place une procédure dématérialisée de déclaration préalable de détachement des salariés.

VII - Conclusion générale

Forte de ses 306 articles et de ses 116 pages publiées au Journal officiel du 7 août 2015, la loi "Macron" est tout sauf une loi simple et homogène. Si elle avait comme objectif de clarifier le droit du travail, on est loin de la simplification attendue initialement puisque, pour reprendre l'expression du Professeur Christophe Radé, on se retrouve face à "un législateur schizophrène, complexifiant d'une main et simplifiant de l'autre" (lire N° Lexbase : N8714BUB). Pour autant, la simplification du droit du travail s'avère aujourd'hui une nécessité que l'on ne peut plus indéfiniment reporter, et si la loi "Macron" n'y est pas parvenue, le législateur sera bientôt contraint de se mettre au travail...

newsid:448738

Congés

[Brèves] Droit au congé parental en Grèce : le père fonctionnaire ne peut être privé de ce droit en cas d'inactivité de son épouse

Réf. : CJUE, 16 juillet 2015, aff. C-222/14 (N° Lexbase : A8963NMW)

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N8675BUT

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Le 03 Septembre 2015

Une législation nationale ne peut pas priver un fonctionnaire masculin du droit au congé parental au motif que son épouse ne travaille pas ou n'exerce aucune profession. Tel est l'apport de l'arrêt rendu par la Cour de justice de l'Union européenne le 16 juillet 2015 (CJUE, 16 juillet 2015, aff. C-222/14 N° Lexbase : A8963NMW).
Dans les faits, un magistrat grec s'est vu refuser le droit à un congé parental au motif que le père magistrat ne peut bénéficier de ce congé si son épouse ne travaille ou n'exerce aucune profession. La juridiction de renvoi, le Symvoulio tis Epikrateias (Conseil d'Etat hellénique), auprès de laquelle la contestation de la décision du ministre grec de la Justice, de la Transparence et des Droits de l'Homme (l'Ypourgos Dikaiosynis, Diafaneias kai Anthropinon Dikaiomaton) a été portée par le magistrat, demande, en substance, si les dispositions des Directives 96/34 (N° Lexbase : L7828AUH) et 2006/54 (N° Lexbase : L4210HK7), relatives pour la première au congé parental et pour la seconde à l'égalité de traitement en matière d'emploi, doivent être interprétées en ce sens qu'elles s'opposent à une réglementation nationale selon laquelle un fonctionnaire est privé du droit à un congé parental dans la situation où son épouse ne travaille pas ou n'exerce aucune profession, à moins que, en raison d'une maladie grave ou d'un handicap, elle ne soit jugée comme étant dans l'incapacité de faire face aux besoins liés à l'éducation d'un enfant.
La CJUE énonce la solution susvisée. Elle rappelle en effet que, selon la Directive sur le congé parental, chacun des parents est titulaire, individuellement, du droit au congé parental. Il s'agit là d'une prescription minimale à laquelle les Etats membres ne peuvent pas déroger dans leur législation ou dans les conventions collectives. Il s'ensuit qu'un parent ne peut pas être privé du droit à un congé parental, la situation professionnelle du conjoint ne pouvant donc pas faire échec à l'exercice de ce droit (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E0180ETT).

newsid:448675

Contrat de travail

[Brèves] Publication au Journal officiel du décret définissant la procédure de reconnaissance de la qualité de groupement d'employeurs pour l'insertion et la qualification

Réf. : Décret n° 2015-998 du 17 août 2015, relatif aux groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification (N° Lexbase : L2614KGW)

Lecture: 1 min

N8716BUD

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Le 03 Septembre 2015

Publié au Journal officiel du 18 août 2015, le décret n° 2015-998 du 17 août 2015, relatif aux groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification (N° Lexbase : L2614KGW), pris pour l'application de l'article 20 de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014, relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale (N° Lexbase : L6066IZP), définit la procédure de reconnaissance de la qualité de groupement d'employeurs pour l'insertion et la qualification (GEIQ) en application de l'article L. 1253-1 du Code du travail (N° Lexbase : L6527IZR).
Cette reconnaissance est attribuée par la Fédération française des GEIQ, sur le fondement d'un cahier des charges approuvé par le ministre chargé de l'emploi et sur avis conforme d'une commission mixte nationale composée de représentants de cette fédération et de représentants du ministre chargé de l'Emploi, présidée par une personnalité qualifiée.
Le texte entre en vigueur le 1er janvier 2016 .

newsid:448716

Contrat de travail

[Brèves] Projet de loi ratifiant l'ordonnance de 2015, relative au portage salarial : le Conseil d'Etat rend un avis favorable

Réf. : Projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2015-380 du 2 avril 2015, relative au portage salarial et portant diverses dispositions pénales ; avis du Conseil d'Etat relatif au projet de loi

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N8677BUW

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Le 10 Septembre 2015

Dans un avis délibéré et adopté par la section sociale du Conseil d'Etat dans sa séance du mardi 28 juillet 2015, le Conseil d'Etat a estimé que le projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2015-380 du 2 avril 2015, relative au portage salarial (N° Lexbase : L3084I8Q), qui a été déposé le 19 août 2015 devant l'Assemblée nationale, n'appelait pas d'observations particulières de nature juridique. Les dispositions pénales du texte ne méconnaissent ni le principe de légalité des délits et des peines découlant de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 (N° Lexbase : L1372A9P), ni même si des dispositifs de sanctions administratives auraient été mieux adaptés dans certains cas, le principe de nécessité des peines découlant des articles 5 (N° Lexbase : L1369A9L) et 8 (N° Lexbase : L1372A9P) du même texte.
Pour rappel, le Conseil d'Etat a été saisi le 23 juin 2015 de ce projet de ratification. Cette ordonnance a été édictée sur le fondement de l'article 4 de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 (N° Lexbase : L0720I7S) qui a autorisé le Gouvernement, dans les conditions de l'article 38 de la Constitution (N° Lexbase : L1298A9X), à prendre par ordonnance toute mesure législative visant à déterminer les conditions essentielles de l'exercice du portage salarial.
Ce projet de loi ratifie l'ordonnance dans son article 1er. Son article 3 complète le dispositif créé par l'ordonnance en instaurant des sanctions pénales en cas de non-respect d'un certain nombre de règles fixées par l'ordonnance.
En énonçant l'avis susvisé, le Conseil d'Etat a estimé, dans son avis du 28 juillet 2015, que ce projet de loi n'appelait pas d'observations particulières de nature juridique (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E7619ESY).

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Cotisations sociales

[Brèves] Publication d'un décret supprimant les dispositions relatives au taux forfaitaire de la cotisation accidents du travail et maladies professionnelles pour les détenus

Réf. : Décret n° 2015-1014 du 18 août 2015 supprimant les dispositions relatives au taux forfaitaire de la cotisation accidents du travail et maladies professionnelles pour les détenus (N° Lexbase : L2849KGM)

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N8690BUE

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Le 03 Septembre 2015

Le décret n° 2015-1014 du 18 août 2015 (N° Lexbase : L2849KGM) a été publié au Journal officiel du 20 août 2015. Il a pour objet les modalités de fixation des taux de la cotisation accidents du travail-maladies professionnelles des détenus exécutant un travail dans les locaux des établissements pénitentiaires. Les taux forfaitaires de la cotisation accidents du travail et maladies professionnelles sont ainsi supprimés. Désormais, le taux de cette cotisation sera calculé annuellement selon la sinistralité de l'activité des détenus, quelle que soit l'activité exercée. Ce décret entrera en vigueur le 1er janvier 2016.

newsid:448690

Cotisations sociales

[Brèves] Publication d'un décret relatif au recouvrement des contributions pharmaceutiques par l'URSSAF

Réf. : Décret n° 2015-1058 du 24 août 2015, relatif aux modalités de recouvrement applicables aux contributions mentionnées à l'article L. 138-20 du CSS et aux modalités de dépôt de la déclaration prévue à l'article L. 165-5 (N° Lexbase : L6646KGA)

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N8693BUI

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Le 03 Septembre 2015

Le décret n° 2015-1058 du 24 août 2015, relatif aux modalités de recouvrement applicables aux contributions mentionnées à l'article L. 138-20 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L1228I7M) et aux modalités de dépôt de la déclaration prévue à l'article L. 165-5 du même code (N° Lexbase : L1270I78) (N° Lexbase : L6646KGA), a été publié au Journal officiel du 26 août 2015. Il a pour objet la dématérialisation de la déclaration et du paiement des contributions pharmaceutiques recouvrées par les URSSAF et pénalités applicables en cas de manquement. Il est pris en application de l'article 15 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la Sécurité sociale pour 2015 (N° Lexbase : L1120I7M). Cet article a prévu le transfert aux URSSAF du recouvrement de la taxe sur les premières ventes de dispositifs médicaux. Le présent décret précise les conditions et modalités de la transmission par l'ACOSS à l'ANSM des données collectées à partir des déclarations des redevables.
L'article 15 impose également la dématérialisation obligatoire des déclarations et versements des contributions pharmaceutiques recouvrées par les URSSAF.
L'article 15 a enfin prévu la dématérialisation obligatoire de la déclaration effectuée auprès de l'ANSM par les fabricants ou distributeurs de dispositifs médicaux. Ce décret entrera en vigueur le 1er janvier 2016 (cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E5337E7S).

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Licenciement

[Textes] Loi "Macron" : dispositions relatives au licenciement pour motif économique et à la sécurisation de l'emploi (art. 287 et s.)

Réf. : Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, art. 287 à 293 (N° Lexbase : L4876KEC)

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N8682BU4

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par Magali Gadrat, Maître de conférences à l'Université Paris XIII

Le 03 Septembre 2015

La section VI du chapitre II du Titre III de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC), dite loi "Macron", relative à l'amélioration du dispositif de sécurisation de l'emploi, modifie à la marge l'encadrement des licenciements pour motif économique et des accords de maintien de l'emploi. L'article 287 réforme le régime juridique des accords de maintien de l'emploi, qu'il s'agisse d'allonger leur durée maximale de deux à cinq ans ou de modifier les modalités de licenciement des salariés refusant l'application de l'accord (I). L'article 288 met fin, pour sa part, au doute relatif à l'adaptation conventionnelle ou unilatérale du périmètre d'application des critères de l'ordre des licenciements en cas de grand licenciement collectif dans une entreprise employant au moins cinquante salariés (II). L'article 289 corrige (enfin) l'erreur introduite par la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU), s'agissant du contrôle administratif des procédures de petit licenciement collectif dans les entreprises d'au moins cinquante salariés (III). L'article 290 allège l'obligation de reclassement dans les entreprises ayant des établissements à l'étranger ou appartenant à un groupe implanté hors de l'Hexagone (IV). L'article 291 réforme l'encadrement du prononcé des grands licenciements collectifs dans les entreprises soumises à une procédure collective employant au moins cinquante salariés : désormais la DIRECCTE n'est plus tenue de prendre en considération les moyens du groupe auquel appartient l'entreprise pour homologuer le document unilatéral support du plan de sauvegarde de l'emploi (V). Par ailleurs, cet article, à l'instar de l'article 292 pour les entreprises in bonis, encadre les conséquences de l'annulation d'une décision d'homologation/validation administrative d'un document unilatéral/accord majoritaire relatif au projet de grand licenciement collectif lorsque cette annulation est fondée sur l'insuffisance de motivation de la décision administrative (VI). Les articles 293 et 294 réforment, quant à eux, le régime du contrat de sécurisation professionnelle notamment pour tenir compte des modifications apportées au contrat de sécurisation professionnelle dans le cadre de la convention UNEDIC du 26 janvier 2015 (VII). Commentaire

I - Réforme du régime des accords de maintien de l'emploi

Allongement de la durée maximale d'application d'un accord de maintien de l'emploi. Conformément aux stipulations de l'ANI du 11 janvier 2013 (N° Lexbase : L9638IUI), la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 prévoyait que la durée d'un accord de maintien de l'emploi ne pouvait excéder deux ans, ce qui semblait logique, dans la mesure où les sacrifices imposés aux salariés sont censés permettre à l'entreprise de faire face à de graves difficultés économiques conjoncturelles. Cependant, depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, dite loi "Macron", l'article L. 5125-1 du Code du travail (N° Lexbase : L2145KGK) autorise les partenaires sociaux à décider que l'accord de maintien de l'emploi s'appliquera pour une durée maximale de cinq ans.

Réalisation d'un bilan de l'application de l'accord deux ans après son entrée en vigueur. L'article 287 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 impose aux signataires d'un accord de maintien de l'emploi de réaliser un bilan de son application deux ans après son entrée en vigueur (art. L. 5125-1, al. 1er, in fine).

Suspension de l'accord fondée sur l'évolution de la situation économique de l'entreprise. Un accord de maintien de l'emploi peut être conclu en cas de graves difficultés économiques conjoncturelles. Or, les efforts "imposés" aux salariés par l'accord de maintien de l'emploi peuvent permettre à l'entreprise de surmonter les difficultés conjoncturelles auxquelles elle est confrontée et assurer l'amélioration de sa situation économique, ou, au contraire, se révéler insuffisants pour y faire face, la situation économique de l'entreprise continuant à se dégrader en dépit des "sacrifices" consentis par les salariés. Dans de telles hypothèses, la loi de sécurisation de l'emploi prévoyait déjà la possibilité que l'application de l'accord soit suspendue par le juge des référés à la demande de l'une des parties signataires. L'article 287 de la loi "Macron" du 6 août 2014 offre, désormais, aux partenaires sociaux, la faculté de prévoir, dans le cadre de l'accord de maintien de l'emploi, les conditions et modalités selon lesquelles il peut, sans préjudice de l'article L. 5125-5 du Code du travail (N° Lexbase : L2143KGH), relatif à la suspension judiciaire, être suspendu pour une durée, au plus, égale à la durée restant à courir à la date de la suspension en cas d'amélioration ou d'aggravation de la situation économique de l'entreprise. Les partenaires sociaux pourront ainsi stipuler que, en cas de nette amélioration de la situation de l'entreprise -ou à l'inverse, en cas d'aggravation- constatée conjointement, l'accord sera suspendu sans qu'il soit nécessaire de saisir le juge. Dans cette hypothèse, l'accord devra prévoir les conséquences de cette suspension sur les droits contractuels des salariés affectés par l'entrée en vigueur de l'accord ainsi que sur l'engament conventionnel de maintien de l'emploi.

Encadrement des modalités d'information des salariés sur leur droit de refuser le bénéfice de l'accord. Sous l'empire des dispositions de la loi de sécurisation de l'emploi, l'article L. 5121-5 du Code du travail (N° Lexbase : L2036H9B) comportait un IV, en vertu duquel "l'accord détermine le délai et les modalités de l'acceptation ou du refus par le salarié de l'application des stipulations de l'accord à son contrat de travail. A défaut, l'article L. 1222-6 (N° Lexbase : L7361IZN) s'applique", c'est-à-dire la procédure applicable en cas de proposition de modification du contrat de travail pour un motif économique. Si la loi du 6 août 2015 abroge cet alinéa, elle prévoit un dispositif analogue, relatif aux modalités d'acceptation ou de refus, par le salarié, de l'application de l'accord à son contrat. En effet, la loi modifie l'article L. 5125-2 du Code du travail (N° Lexbase : L2144KGI) dont le premier alinéa dispose, désormais, que les partenaires sociaux doivent déterminer les modalités selon lesquelles chaque salarié est informé de son droit d'accepter ou de refuser l'application des stipulations de l'accord à son contrat de travail. A défaut, un dispositif extrêmement proche de celui applicable en cas de modification du contrat de travail pour motif économique s'applique. Ainsi, il est prévu qu'en l'absence de stipulation conventionnelle, cette information est faite par l'employeur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception précisant que le salarié dispose d'un délai d'un mois à compter de sa réception pour faire connaître son refus. En l'absence de réponse dans ce délai, le salarié est réputé avoir accepté l'application de l'accord à son contrat de travail. Si l'application des stipulations conventionnelles relatives aux modalités d'information du salarié sur son droit de refuser le bénéfice de l'accord de maintien de l'emploi soulève une difficulté, les partenaires sociaux pourront saisir le tribunal de grande instance qui devra alors statuer en la forme des référés (C. trav., art. L. 5125-5).

Conséquences du refus d'application de l'accord de maintien de l'emploi. Si le salarié refuse de se soumettre aux stipulations de l'accord de maintien de l'emploi, il sera licencié par son employeur selon les modalités prévues à l'article L. 5125-2 du Code du travail, qui ont évolué avec l'entrée en vigueur de la loi "Macron". La loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 a créé un nouveau type de licenciement pour motif économique, sans pour autant modifier l'article L. 1233-3 du Code du travail (N° Lexbase : L8772IA7). Le motif du licenciement du salarié ne saurait se résumer au refus du salarié de se soumettre à l'accord de maintien de l'emploi, qui n'est pas fautif. Il réside, en réalité, dans la cause de la "proposition d'application de l'accord", id est l'existence des "graves difficultés économiques conjoncturelles" ayant permis la conclusion de l'accord (C. trav., art. L. 5125-1). Jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, l'employeur ne pouvait licencier un salarié s'opposant à l'accord de maintien de l'emploi qu'après avoir mis en oeuvre l'obligation de reclassement préalable à tout licenciement pour motif économique, en application des articles L. 1233-4 (N° Lexbase : L2149KGP) et L. 1233-4-1 (N° Lexbase : L2148KGN) du Code du travail. Désormais, tel n'est plus le cas, l'employeur étant exonéré de l'obligation individuelle de reclassement fondée sur ces textes.

Contrariété des dispositions de l'article L. 5125-2 au droit supranational dans sa rédaction issue de la loi "Macron". Non seulement le régime des licenciements consécutifs au refus de plusieurs salariés de se voir appliquer un accord de maintien de l'emploi tel qu'issu de la loi du 14 juin 2013 est contraire au droit européen relatif aux licenciements collectifs (1), mais désormais, il est aussi contraire à de nombreuses normes supranationales relatives au droit fondamental des salariés de contester le bien-fondé de la rupture de leur contrat de travail. De surcroît, la rédaction de l'article L. 5125-2 du Code du travail, issue de la loi "Macron", est contraire à de nombreux textes supranationaux, en ce qu'elle prévoit que le licenciement du salarié consécutif à son refus de se voir appliquer l'accord de maintien de l'emploi "repose sur une cause réelle et sérieuse", le privant, ainsi, de la faculté de contester le bien-fondé de la rupture de son contrat devant le conseil de prud'hommes. Cependant, l'article 8 § 1 de la Convention n° 158 de l'OIT (N° Lexbase : L4795I3Y), l'article 24 de la Charte sociale européenne (N° Lexbase : L8088KGN) ou encore les articles 30 et 47 de la Charte des droits européens fondamentaux de l'Union européenne (N° Lexbase : L8117ANX) assurent une protection contre le risque de licenciement injustifié en garantissant au salarié un droit de recours contre une telle mesure devant un organe impartial tel qu'un tribunal. Or, le premier de ces textes est d'application directe (c'est sur son fondement que la Cour de cassation a écarté les dispositions légales relatives au CNE) et devrait donc, en application de l'article 55 de notre Constitution (N° Lexbase : L1320A9R), autoriser les salariés, licenciés suite à leur refus de se voir appliquer un accord de maintien de l'emploi, à saisir le conseil de prud'hommes pour contester le bien-fondé de la rupture de leur contrat. Il convient, tout de même, d'attendre une décision en ce sens de la Cour de cassation.

II - Le doute sur la fixation conventionnelle ou unilatérale du périmètre d'application des critères de l'ordre des licenciements en cas de projet de grand licenciement collectif dans une entreprise de cinquante salariés au moins (presque) levé

Si, en principe, le périmètre d'application des critères de l'ordre des licenciements est l'entreprise, la jurisprudence antérieure à la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 a admis la possibilité qu'un accord d'entreprise ou de niveau supérieur conclu selon le droit commun, déroge à ce principe en prévoyant, par exemple, que les critères ne seront appliqués qu'aux seuls salariés de l'établissement concerné par le projet de réduction des effectifs (2). L'article L. 1233-24-2 du Code du travail (N° Lexbase : L0631IXN) issu de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 prévoit, pour sa part, qu'un accord majoritaire relatif au plan de sauvegarde de l'emploi peut également porter sur la pondération et le périmètre d'application des critères de l'ordre des licenciements, sans pour autant exclure la faculté de fixer par un accord de droit commun le périmètre de l'ordre des licenciements, laissant planer un doute sur l'existence de cette possibilité lorsqu'est projeté un grand licenciement collectif dans une entreprise de cinquante salariés au moins. L'article 288 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 précise expressément que, lorsque l'entreprise est soumise à l'obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi, le périmètre d'application des critères de l'ordre des licenciements peut être fixé par l'accord majoritaire conclu sur le plan, en application de l'article L. 1233-24-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0630IXM). Il semble donc désormais exclu, lorsque l'entreprise doit élaborer un plan de sauvegarde de l'emploi, que le périmètre d'application des critères de l'ordre des licenciements puisse être fixé par un accord collectif "de droit commun". Il convient, toutefois, d'attendre une prise de position de la jurisprudence en ce sens. En revanche, il semble que, si l'entreprise n'est pas soumise à l'obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi, soit qu'elle compte moins de cinquante salariés, soit qu'elle n'envisage pas un grand licenciement collectif (id est qu'elle projette de licencier moins de dix salariés sur une période de trente jours), un accord collectif de droit commun puisse adapter le périmètre d'application des critères de l'ordre des licenciements. Là encore, il faudra attendre une confirmation jurisprudentielle pour lever tout doute à cet égard.

Par ailleurs, après l'entrée en vigueur de la loi du 14 juin 2013, un doute existait sur la faculté, pour l'employeur, de procéder seul à une adaptation du périmètre d'application des critères de l'ordre des licenciements dans le cadre du document unilatéral établi après la consultation des représentants du personnel sur un projet de grand licenciement collectif donnant lieu à l'élaboration d'un plan de sauvegarde de l'emploi. En effet, l'article L. 1233-24-4 du Code du travail (N° Lexbase : L0633IXQ), relatif au contenu du document unilatéral, renvoie expressément à l'article L. 1233-24-2, 2° dudit Code (N° Lexbase : L0631IXN) autorisant l'accord majoritaire à adapter le périmètre de l'ordre des licenciements, laissant à penser que l'employeur pourrait aménager unilatéralement le champ d'application des critères après avoir consulté le comité d'entreprise. Toutefois, l'article L. 1233-24-4 du Code du travail prend le soin de préciser que le document unilatéral doit s'inscrire "dans le cadre des dispositions légales et conventionnelles en vigueur". Or, à l'exception du renvoi à l'article L. 1233-24-2, 2° du Code du travail (la technique du renvoi étant, en général, critiquable, en ce qu'elle nuit à l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi), aucune disposition légale n'autorisait expressément l'employeur à déroger unilatéralement au périmètre de l'ordre des licenciements qui s'applique au niveau de l'entreprise. De surcroît, alors que la loi de sécurisation de l'emploi avait pris le soin de modifier l'article L. 1233-5 du Code du travail (N° Lexbase : L2146KGL) pour y inscrire la faculté, pour l'employeur, de pondérer unilatéralement les critères de l'ordre des licenciements, le législateur n'a pas choisi d'évoquer la possibilité, après consultation des représentants du personnel, de modifier unilatéralement leur champ d'application... Il convient donc d'attendre une prise de position claire de la jurisprudence sur l'existence ou non d'une telle faculté sous l'empire de la loi du 14 juin 2013 (3).

L'article 288 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 a modifié l'article L. 1233-5 du Code du travail qui précise, désormais, expressément que l'employeur peut, dans le cadre du document unilatéral élaboré à l'issue de la consultation des représentants du personnel sur le projet de grand licenciement collectif, fixer le périmètre d'application des critères de l'ordre des licenciements. Toutefois, le périmètre fixé unilatéralement ne saurait être inférieur à celui de chaque zone d'emploi dans laquelle sont situés le ou les établissement(s) concerné(s) par le projet de suppressions d'emplois. Si l'expression "zone d'emploi" est relativement floue, un décret doit être adopté pour préciser les modalités d'adaptation du périmètre d'application des critères de l'ordre des licenciements dans le cadre du document unilatéral, décret qui devrait à tout le moins définir la notion de "zone d'emploi". Dans l'attente de sa parution prévue pour le mois de décembre 2015 selon l'échéancier publié sur le site de Légifrance, il semble que l'avant dernier alinéa de l'article L. 1233-5 du Code du travail doive être interprété comme interdisant à l'employeur de réduire le périmètre d'application des critères de l'ordre des licenciements à un niveau inférieur à l'établissement concerné par le projet de suppressions d'emplois.

III - Correction de l'erreur relative au contrôle administratif de la procédure de petit licenciement collectif dans les entreprises de cinquante salariés au moins

L'article 289 de la loi du 6 août 2015 rectifie une erreur qui s'était glissée à l'article L. 1233-53 du Code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 de sécurisation de l'emploi. La maladresse du législateur était double : non seulement il avait introduit le contrôle administratif des petits licenciements collectifs dans une section consacrée aux grands licenciements collectifs, mais il avait, de surcroît, omis de modifier les dispositions relatives à l'intervention de l'administration du travail dans les procédures de petit licenciement collectif, créant ainsi un imbroglio juridique qui nuisait à l'intelligibilité de l'ensemble. L'article L. 1233-53 (N° Lexbase : L0715IXR), dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, prévoyait, ainsi, que l'administration du travail devait vérifier que la procédure d'information/consultation des représentants du personnel sur le projet de petit licenciement collectif avait bien été respectée. Pour procéder à cette vérification, elle disposait d'un délai de vingt et un jours "à compter de la date de notification du projet de licenciement". Or, la loi de 2013 n'avait pas modifié l'article L. 1233-19 du Code du travail (N° Lexbase : L1141H97) relatif au rôle de l'administration dans les petits licenciements collectifs pour motif économique, et l'employeur n'était donc astreint qu'à une obligation d'information postérieure aux licenciements... La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 modifie l'article L. 1233-53 (N° Lexbase : L2147KGM) en supprimant la référence erronée au contrôle administratif des petits licenciements collectifs, mettant ainsi fin à l'incohérence de cet article.

IV - Allègement de l'obligation de reclassement dans les entreprises ou groupes internationaux

Sous l'empire des dispositions antérieures à la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, l'employeur qui projetait un licenciement pour motif économique devait, au préalable, rechercher des postes disponibles dans les entreprises afin de reclasser le salarié, recherche qui devait être étendue aux entreprises du groupe situées à l'étranger, à condition que la législation locale n'empêche pas l'emploi de salariés étrangers. La loi n° 2010-499 du 18 mai 2010 visant à garantir de justes conditions de rémunération aux salariés concernés par une procédure de reclassement (N° Lexbase : L2472IMI) avait, à ce titre, introduit l'article L. 1233-4-1 dans le Code du travail (N° Lexbase : L3134IMZ) qui prévoyait une procédure spécifique au reclassement à l'étranger, validant la pratique des "questionnaires de mobilité" condamnée par la Cour de cassation (4) (validation légale limitée au reclassement international). Depuis, la loi "Macron" a modifié les articles L. 1233-4 (N° Lexbase : L2149KGP) et L. 1233-4-1 (N° Lexbase : L2148KGN) du Code du travail. Désormais, lorsque l'entreprise ou le groupe dont elle fait partie comporte des établissements à l'étranger, l'employeur n'est tenu de rechercher des postes disponibles au reclassement hors du territoire national qu'à la stricte condition que le salarié menacé de licenciement en ait expressément fait la demande. Il semble ainsi, que, bien souvent, les employeurs devraient être exonérés de rechercher des postes de reclassement hors de nos frontières, dans la mesure où la main d'oeuvre française est peu encline à la mobilité géographique (5), particulièrement hors de l'Hexagone. Si le salarié menacé de licenciement pour motif économique désire recevoir des offres de reclassement dans les établissements de l'entreprise ou du groupe situés à l'étranger, il doit en faire la demande à l'employeur, en précisant les restrictions éventuelles à appliquer aux recherches de postes disponibles. Il lui appartient, ainsi, d'indiquer les établissements situés à l'étranger dans lesquels il accepterait d'être reclassé ou les conditions de rémunération susceptibles de l'intéresser. L'employeur peut ainsi cantonner ses recherches de reclassement aux postes correspondant aux voeux ainsi formulés par le salarié. S'il identifie de tels postes, il lui appartient alors de les proposer au salarié en lui adressant des offres écrites et précises. L'article L. 1233-4-1 du Code du travail (N° Lexbase : L2148KGN), dans sa rédaction issue de la loi "Macron", est relativement laconique. Il ne précise pas le moment auquel le salarié menacé de licenciement doit informer l'employeur de son souhait de se voir proposer des postes de reclassement à l'étranger, ni le formalisme de cette demande, pas plus que les conditions dans lesquelles le salarié est informé de la faculté de demander à l'employeur de rechercher des postes de reclassement dans les établissements de l'entreprise ou du groupe situés hors du territoire national. Toutefois, selon l'échéancier, un décret devrait être adopté au cours du mois de décembre 2015 pour pallier ces carences.

V - Appréciation du contenu du plan de sauvegarde de l'emploi unilatéral dans les entreprises soumises à une procédure collective au seul regard des moyens de l'entreprise

Sous l'empire des dispositions de la loi du 14 août 2013, lorsqu'elle était saisie d'une demande d'homologation du document unilatéral siège du plan de sauvegarde de l'emploi, la DIRECCTE devait s'assurer de sa proportionnalité aux moyens de l'entreprise, du groupe ou de l'UES, que l'entreprise soit in bonis ou non. Désormais, en cas de procédure collective, si l'employeur, l'administrateur ou le liquidateur est toujours tenu de tenter de mobiliser les moyens du groupe pour élaborer unilatéralement le plan de sauvegarde de l'emploi, la DIRECCTE n'a, pour sa part, plus à s'assurer de la proportionnalité du contenu du plan aux moyens dont dispose le groupe lorsque l'entreprise est soumise à une procédure collective. Cela devrait renforcer davantage l'ineffectivité de la participation du groupe au PSE de sa filiale en cessation des paiements...

VI - Aménagement des effets de l'annulation de la décision administrative d'homologation/validation du projet de grand licenciement collectif insuffisamment motivée

Jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi "Macron", lorsque la décision d'homologation/validation du projet de grand licenciement collectif était annulée pour un motif autre que l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi, les salariés pouvaient prétendre à une indemnité au moins égale à six mois de salaire (voire solliciter leur réintégration dans les entreprises in bonis), et ce, quel que soit le motif de l'annulation de la décision administrative. Ainsi, si la décision était annulée pour cause de motivation insuffisante, l'employeur "payait" l'erreur des services de la DIRECCTE. C'est pourquoi la loi du 6 août 2015 a modifié les articles L. 1233-58 (N° Lexbase : L2150KGQ) et L. 1235-16 (N° Lexbase : L2151KGR) du Code du travail qui prévoient, désormais, que lorsque la décision d'homologation/validation administrative du projet de grand licenciement collectif est annulée en raison d'une motivation insuffisante, la DIRECCTE prend une nouvelle décision suffisamment motivée, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à l'administration. Cette décision est portée par l'employeur à la connaissance des salariés licenciés à la suite de la première décision de validation ou d'homologation, par tout moyen permettant de conférer une date certaine à cette information. Dans une telle hypothèse, dès lors que l'autorité administrative a édicté cette nouvelle décision, l'annulation pour le seul motif d'insuffisance de motivation de la première décision est sans incidence sur la validité du licenciement et ne donne lieu ni à réintégration, ni au versement d'une indemnité à la charge de l'employeur.

VII - Aménagements du régime du contrat de sécurisation professionnelle (CSP)

Proposition du CSP une fois le projet de licenciement homologué/validé. Jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi du 6 août 2015, lorsque l'employeur projetait un licenciement pour motif économique, il devait proposer le bénéfice du contrat de sécurisation professionnelle au cours de l'entretien préalable ou à l'issue de la dernière réunion des représentants du personnel en cas de grand licenciement collectif, peu important que l'entreprise soit soumise à l'obligation d'élaborer un plan de sauvegarde de l'emploi. Or, en cas de soumission à cette dernière obligation, si l'employeur proposait le bénéfice du CSP avant l'homologation/validation administrative du projet de grand licenciement collectif et que les salariés l'acceptaient, leur contrat était rompu sans que l'employeur ne puisse se prévaloir d'une décision administrative "approuvant" son projet. C'est pour mettre fin à cette situation que la loi "Macron" a modifié l'article L. 1233-66 du Code du travail (N° Lexbase : L2152KGS) qui prévoit, désormais, que lorsque l'entreprise doit élaborer un plan de sauvegarde de l'emploi, l'employeur n'est tenu de proposer le contrat de sécurisation professionnelle qu'une fois l'homologation/validation administrative du projet acquise.

Possibilité d'allonger la durée du CSP en cas de reprise d'une activité salariée dans le cadre du dispositif. Le bénéficiaire d'un contrat de sécurisation professionnelle peut être amené à accomplir un travail salarié dans ce cadre selon des modalités qui ont été modifiées une première fois par l'avenant du 3 février 2012, puis à nouveau par la convention UNEDIC du 26 janvier 2015. Ces périodes de reprise d'une activité salariée, dont le nombre n'est désormais plus limité, sont accomplies dans le cadre de CDD ou de contrats de mission d'une durée minimale de trois jours depuis le 1er février 2015 (date d'entrée en vigueur de la convention UNEDIC du 26 janvier 2015), contre quatorze jours sous le régime antérieur. Depuis, le 1er février 2015, les périodes de travail rémunérées à partir du septième mois du contrat de sécurisation professionnelle permettent de prolonger la durée du dispositif jusqu'à trois mois supplémentaires (soit une durée maximale de quinze mois). C'est pour tenir compte de la faculté de proroger le terme du CSP que la loi du 6 août 2015 a modifié l'article L. 1233-67 du Code du travail (N° Lexbase : L2155KGW) qui interdisait jusqu'alors le dépassement du terme du CSP, en cas de reprise d'une activité salariée dans le cadre de ce dispositif.

Aménagement du financement du contrat de sécurisation professionnelle. Conformément à l'article 15 de l'ANI du 8 décembre 2014 (6), la loi du 6 août 2015 a modifié l'article L. 1233-69 du Code du travail afin d'obliger les organismes collecteurs paritaires agréés (OPCA) à participer aux actions de formation prévues dans le cadre du CSP, ce qui n'était, jusqu'alors, qu'une faculté. Pour ce faire, l'OPCA affecte au financement du CSP une part des ressources collectées au titre du compte personnel de formation et des actions de professionnalisation selon des modalités qui doivent être définies par un décret dont la parution est prévue, selon l'échéancier, pour le mois de décembre prochain. Toutefois, dans les entreprises d'au moins dix salariés ayant conclu un accord relatif au compte personnel de formation, en application de l'article L. 6331-10 du Code du travail (N° Lexbase : L6436IZE), pour financer le CSP, l'employeur reverse à l'OPCA tout ou partie de la contribution due au titre du compte personnel de formation (0,2 % des rémunérations versées pendant l'année (7)).


(1) En effet, conformément aux voeux des partenaires sociaux, la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU) a prévu la mise à l'écart du droit des licenciements collectifs lorsque plusieurs salariés refusent l'application d'un accord de maintien de l'emploi. Cependant, cette exclusion est contraire aux dispositions de la directive n° 98/59/CE du 20 juillet 1998 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux licenciements collectifs (N° Lexbase : L9997AUS) qui définit ces derniers comme ceux "effectués par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne des travailleurs" (Directive 98/59/CE du 20 juillet 1998, préc., art. 1er, 1, a).
(2) Cass. soc. 15 mai 2013, n° 11-27.458, FS-P+B (N° Lexbase : A5297KDK) ; Bull. civ. V, n° 121, RDT, 2013, 559, obs. Fabre ; SSL, 2013, n° 1585, p. 5, obs. Champeaux; JSL, 2013, n° 346-5, obs. Hautefort.
(3) A ce titre, conformément à l'instruction DGEFP/DGT du 19 juillet 2013, dépourvue de portée normative, qui indique que le document unilatéral peut, en l'absence d'accord majoritaire sur ce point, fixer la pondération et le périmètre d'application des critères de l'ordre des licenciements, certaines DIRECCTE ont homologué des documents unilatéraux adaptant le périmètre de l'application des critères de l'ordre des licenciements (Instr. DGEFP/DGT n° 2013/13 du 19 juillet 2013, relative à la mise en oeuvre de la procédure de licenciement économique collectif). Saisi d'une demande d'annulation de l'homologation d'un projet de licenciement collectif, un tribunal administratif a décidé que, si le document unilatéral homologué pouvait adapter le périmètre d'application des critères de l'ordre des licenciements, la décision d'homologation du projet devait, toutefois, être annulée en ce que l'adaptation unilatérale de ce périmètre n'était pas pertinente (TA Cergy-Pontoise, 11 juillet 2014, req. n° 140270). Une confirmation de cette position par le Conseil d'État semble envisageable bien que la cour administrative d'appel de Versailles l'ait invalidée (CAA Versailles, 22 octobre 2014, n° 14VE02579).
(4) Cass. soc., 18 mai 2011, n° 10-16.486, F-D (N° Lexbase : A2707HS3) ; JCP éd. S, 2011, comm. 145, F. Taquet ; en ce sens, v. aussi, Cass. soc., 4 mars 2009, n° 07-42.381, FS-P+B+R (N° Lexbase : A6328EDQ) ; JCP éd. E, 2009, 1516, note S. Beal.
(5) J.-E. Ray, La loi de cohésion sociale : continuité et contournement, Dr. soc., 2005, p. 359.
(6) ANI du 8 décembre 2014, relatif au contrat de sécurisation professionnelle, art. 15 ([LXB=l8695I78]).
(7) C. trav., art. L. 6331-10 (N° Lexbase : L6436IZE).

newsid:448682

Licenciement

[Brèves] Publication au Journal officiel de la loi "Macron" : le Conseil constitutionnel retoque préalablement l'encadrement du montant de l'indemnité prononcée par le conseil de prud'hommes en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse

Réf. : Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC) ; Cons. const., décision n° 2015-715 DC du 5 août 2015 (N° Lexbase : A1083NNG)

Lecture: 2 min

N8662BUD

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Le 03 Septembre 2015

Publiée au Journal officiel du 7 août 2015, la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC), dite loi "Macron" est entrée en vigueur après que le Conseil constitutionnel se soit pronnoncé sur sa conformité à la Constitution.
Concernant le droit du travail, seul l'article 266 de la loi "Macron" instituant un dispositif d'encadrement de l'indemnité octroyée par le juge au salarié licencié sans cause réelle et sérieuse en fonction des critères d'ancienneté du salarié dans l'entreprise et des effectifs de l'entreprise a été déclaré non-conforme à la Constitution dans une décision rendue le 5 août 2015 par le Conseil constitutionnel (Cons. const., décision n° 2015-715 DC du 5 août 2015 N° Lexbase : A1083NNG).
Pour rappel, l'article 266 de la loi "Macron" était relatif à l'encadrement du montant de l'indemnité prononcée par le conseil de prud'hommes en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le 1° du paragraphe I de l'article 266 modifiait l'article L. 1235-3 du Code du travail (N° Lexbase : L1342H9L) pour encadrer l'indemnité octroyée par le juge au salarié licencié sans cause réelle et sérieuse en réparation de la seule absence de cause réelle et sérieuse. Il prévoyait des minima et maxima d'indemnisation, exprimés en mois de salaires, qui varient en fonction, d'une part, de l'ancienneté du salarié dans l'entreprise et, d'autre part, des effectifs de l'entreprise. A cet égard, le législateur avait distingué entre les entreprises selon qu'elles emploient moins de vingt salariés, de vingt à deux cent quatre-vingt-dix-neuf salariés, ou trois cents salariés et plus.
Les députés requérants soutenaient que ces dispositions instituaient, en méconnaissance du principe d'égalité devant la loi, une différence de traitement injustifiée entre les salariés licenciés sans cause réelle et sérieuse en fonction de la taille de l'entreprise.
Le Conseil constitutionnel a précisé que si le législateur pouvait, afin de favoriser l'emploi en levant les freins à l'embauche, plafonner l'indemnité due au salarié licencié sans cause réelle et sérieuse, il devait retenir des critères présentant un lien avec le préjudice subi par le salarié. Si le critère de l'ancienneté dans l'entreprise est ainsi en adéquation avec l'objet de la loi, tel n'était pas le cas du critère des effectifs de l'entreprise, de sorte que le Conseil constitutionnel a, en conséquence, censuré l'article 266 pour méconnaissance du principe d'égalité devant la loi (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E2820ETM).

newsid:448662

Licenciement

[Brèves] Procédure d'approbation des plans de sauvegarde de l'emploi : le Conseil d'Etat apporte des précisions

Réf. : CE contentieux, 22 juillet 2015, trois arrêts, n° 383481 (N° Lexbase : A9293NM7) ; n° 385668 (N° Lexbase : A9294NM8) et n° 385816 (N° Lexbase : A9295NM9).

Lecture: 2 min

N8637BUG

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Le 15 Septembre 2015

Par trois décisions rendues le 22 juillet 2015 (CE contentieux, 22 juillet 2015, trois arrêts, n° 383481 N° Lexbase : A9293NM7 ; n° 385668 N° Lexbase : A9294NM8 et n° 385816 N° Lexbase : A9295NM9), le Conseil d'Etat précise les modalités d'application de la procédure d'approbation administrative des plans de sauvegarde de l'emploi (PSE) instituée par la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi, sur la prescription (N° Lexbase : L0394IXU).
En l'espèce, trois licenciements économiques étaient en cause dans ces affaires. Pour confirmer l'annulation des décisions d'approbation des PSE de deux sociétés élaborés unilatéralement par l'employeur et homologués par l'administration et approuver une décision de la cour administrative d'appel d'avoir rejeté le recours dirigé contre la décision d'homologation du PSE d'une troisième société, le Conseil d'Etat précise, d'une part, que lorsque le plan fait l'objet d'un accord d'entreprise, l'administration doit contrôler son caractère majoritaire et la qualité des signataires pour engager leurs syndicats. A ce titre, lorsque le plan fait l'objet d'un accord collectif, l'administration doit vérifier que ce plan a été signé par des organisations syndicales qui ont recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés lors du premier tour des élections professionnelles. Cela implique de s'assurer que la personne physique qui a signé l'accord au nom d'un syndicat avait bien qualité pour ce faire.
Il ajoute, d'autre part, que si le juge judiciaire est seul compétent pour se prononcer sur le motif économique justifiant les licenciements, l'administration doit, sous le contrôle du juge administratif, s'assurer que le comité d'entreprise a été correctement informé du plan et de la situation économique de l'entreprise. Lorsque l'employeur restreint sa présentation de la situation économique de l'entreprise au niveau d'un secteur d'activité qu'il définit, il doit justifier ce choix.
Par ailleurs, le Conseil d'Etat déclare que l'administration doit s'assurer que le contenu du plan est conforme aux objectifs fixés par le législateur de maintien dans l'emploi et de reclassement des salariés compte tenu, d'une part, des efforts de formation et d'adaptation déjà réalisés par l'employeur et, d'autre part, des moyens dont dispose l'entreprise. A ce titre, un plan de reclassement doit être intégré au PSE et doit identifier l'ensemble des possibilités de reclassement des salariés dans l'entreprise ou dans le groupe.
Enfin, le Conseil d'Etat a rappelé que toute personne attaquant une décision approuvant un PSE doit justifier d'un intérêt à exercer ce recours. Cette décision peut, en particulier, être attaquée par le comité d'entreprise, par les syndicats présents dans l'entreprise, par une union de syndicats justifiant d'un tel intérêt et par les salariés qui sont affectés par ce plan (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E9334ESI).

newsid:448637

Licenciement

[Brèves] Fautes déontologiques : le contrôle de l'inspection du travail limité par le contrat de travail prévoyant une procédure disciplinaire spécifique

Réf. : CE 4° et 5° s-s-r., 22 juillet 2015, n° 369223, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A9786NME)

Lecture: 1 min

N8659BUA

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Le 03 Septembre 2015

Dès lors qu'elles prévoient que tout litige portant sur des questions purement professionnelles relève de la juridiction disciplinaire de l'Ordre des chirurgiens-dentistes, les stipulations du contrat de travail, qui ne méconnaissent pas les dispositions de l'article L. 2411-5 du Code du travail (N° Lexbase : L0150H9G), imposent, lorsque l'employeur invoque des manquements du salarié protégé à des obligations déontologiques, que la juridiction disciplinaire non seulement ait été saisie mais ait statué sur ces manquements avant qu'une procédure de licenciement pour un tel motif disciplinaire ne puisse être engagée. Telle est la solution dégagée par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 22 juillet 2015 (CE 4° et 5° s-s-r., 22 juillet 2015, n° 369223, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A9786NME).
En l'espèce, le directeur du Grand conseil de la mutualité a demandé à l'inspection du travail des Bouches-du-Rhône l'autorisation de licencier pour faute M. X, chirurgien-dentiste exerçant en tant que salarié au sein de cet organisme et titulaire d'un mandat de délégué du personnel.
Après avoir relevé que le Grand conseil de la mutualité avait saisi le conseil départemental de l'Ordre des chirurgiens-dentistes du cas de M. X, l'inspectrice du travail a accordé l'autorisation sollicitée par une décision du 12 mars 2010. La cour administrative d'appel (CAA Marseille, 9 avril 2013, n° 12MA00395 N° Lexbase : A8471MQS) ayant confirmé l'annulation de cette décision prononcée par le tribunal administratif, le Grand conseil de la mutualité demande au Conseil d'Etat l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel.
En énonçant la règle susvisée, le Conseil d'Etat rejette le pourvoi du Grand conseil de la mutualité en considérant qu'il n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E3617ET7).

newsid:448659

Retraite

[Brèves] Publication de deux ordonnances portant réforme du régime d'assurance vieillesse applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte

Lecture: 2 min

N8684BU8

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Le 03 Septembre 2015

Deux ordonnances n° 2015-896 et n° 2015-897 du 23 juillet 2015, portant réforme du régime d'assurance vieillesse, la première à Saint-Pierre-et-Miquelon (N° Lexbase : L9246KB3), la seconde à Mayotte (N° Lexbase : L9244KBY), ont été publiées au Journal officiel du 24 juillet 2015. La collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon est dotée d'un régime de Sécurité sociale spécifique depuis l'ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 ; la couverture du risque vieillesse assurée par ce régime étant définie par la loi n° 87-563 du 17 juillet 1987, portant réforme du régime d'assurance vieillesse (N° Lexbase : L8090KGQ). Cette loi avait pour objectif de rapprocher du régime général métropolitain le régime de retraite de base de Saint-Pierre-et-Miquelon. Le régime s'étant progressivement éloigné du droit commun métropolitain, et, dans le but d'harmoniser ce droit à celui de la métropole, le législateur a donc permis au Gouvernement, au travers de l'article 52 de la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 (N° Lexbase : L2496IZH), de rapprocher l'ensembles des règles régissant le système de retraite. Les principales mesures portent sur l'âge minimal de départ à la retraite (60 à 62 ans), sur la durée d'assurance de référence et sur le calcul. L'ensemble des dispositions de l'ordonnance entreront en vigueur selon une date fixée par décret et au plus tard le 1er juillet 2016.
Quant à l'ordonnance pour la communauté de Mayotte, elle a été prise dans le but de poursuivre la transposition à Mayotte des dernières réformes intervenues en matière de retraite. L'ordonnance n° 2011-1923 du 22 décembre 2011, relative à l'évolution de la Sécurité sociale à Mayotte (N° Lexbase : L5025IRK), avait initié un processus de convergence. Le projet d'ordonnance, en son article premier, étend les évolutions du droit intervenues depuis 2011 en métropole (majoration de durée d'assurance pour les aidants familiaux, évolution du cumul emploi retraite, droit à l'information par exemple). Par ailleurs, poursuivant le même objet de convergence générale avec le droit métropolitain, ce projet prévoit également l'extension de dispositifs applicables en métropole avant l'intervention de l'ordonnance du 22 décembre 2011 et qui n'avaient pas encore été transposés. Il s'agit, d'une part, du versement pour la retraite dit rachat "Fillon", ainsi que ses déclinaisons spécifiques (tarif préférentiel pour les années d'études, les apprentis et les stagiaires notamment) et, d'autre part, du dispositif d'affiliation volontaire à l'assurance vieillesse. Les situations donnant lieu à validation gratuite de trimestres (périodes assimilées) sont également complétées (périodes de détention provisoire, périodes de volontariat civil, périodes de stage de la formation professionnelle, sportifs de haut niveau). L'ordonnance entre en vigueur le 1er janvier 2016 à l'exception de la mesure relative au cumul emploi retraite qui prend effet au 1er janvier 2018.

newsid:448684

Retraite

[Brèves] Publication d'un décret relatif à l'attribution d'un complément différentiel de points de retraite complémentaire obligatoire aux chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole

Réf. : Décret n° 2015-1107 du 31 août 2015, relatif à l'attribution d'un complément différentiel de points de retraite complémentaire obligatoire aux chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole (N° Lexbase : L0499KHX)

Lecture: 1 min

N8774BUI

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Le 08 Septembre 2015

Le décret n° 2015-1107 du 31 août 2015, relatif à l'attribution d'un complément différentiel de points de retraite complémentaire obligatoire aux chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole (N° Lexbase : L0499KHX), a été publié au Journal officiel du 2 septembre 2015. Il concerne les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole percevant des pensions de retraite, de base et complémentaire, servies par le régime non salarié agricole, dont le montant est inférieur à 75 % du salaire minimum de croissance (SMIC) net.
En effet, afin de garantir aux chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole justifiant d'une carrière complète en cette qualité des droits à retraite, de base et complémentaire, au moins égaux à 75 % du SMIC net, le décret précise les conditions d'ouverture du droit et les modalités d'attribution du complément différentiel de points de retraite complémentaire obligatoire. Ainsi, les intéressés peuvent bénéficier d'un complément différentiel de points de retraite à condition de justifier, à la date d'effet de leur pension de retraite de base, d'au moins dix-sept années et demie d'assurance accomplies en qualité de chef d'exploitation ou d'entreprise agricole. Le décret précise le montant du complément différentiel et son calcul.
Le décret est pris pour l'application de l'article L. 732-63 du Code rural et de la pêche maritime (N° Lexbase : L2618IZY) dans sa rédaction résultant de l'article 35 de la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014, garantissant l'avenir et la justice du système de retraites (N° Lexbase : L2496IZH). Ce décret est applicable aux pensions dues à compter du 1er janvier 2015.

newsid:448774

Retraite

[Brèves] Publication d'un décret relatif au délai de versement des pensions de retraite

Réf. : Décret n° 2015-1015 du 19 août 2015, relatif au délai de versement d'une pension de retraite (N° Lexbase : L2846KGI)

Lecture: 1 min

N8691BUG

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Le 09 Septembre 2015

Le décret n° 2015-1015 du 19 août 2015, relatif au délai de versement d'une pension de retraite (N° Lexbase : L2846KGI), a été publié au Journal officiel du 20 août 2015. A la suite de nombreux retards dans le paiement du premier mois de la pension de retraite suivant le départ en retraite, la ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes a décidé d'instaurer un "droit opposable à la retraite". Le décret instaure ainsi la garantie de versement d'une pension de retraite le mois suivant l'entrée en jouissance des droits aux assurés présentant une demande de pension de vieillesse complète au moins quatre mois avant la date prévue de départ en retraite.
Le texte entre en vigueur pour les demandes de pensions de retraite relevant du régime général à compter du 1er septembre 2015.
Pour les demandes de pensions de retraite relevant du régime des salariés agricoles et du régime social des indépendants, le texte entre en vigueur pour les pensions prenant effet à compter de l'entrée en vigueur de la liquidation unique des pensions de retraite de base des régimes alignés, soit au plus tard le 1er janvier 2017 (cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E9319ABR).

newsid:448691

Retraite

[Brèves] Publication d'une circulaire relative à la validation de la première période de chômage non indemnisé

Réf. : Circ. CNAV, n° 2015/38, du 5 août 2015, Première période de chômage non indemnisé (N° Lexbase : L4879KEG)

Lecture: 1 min

N8689BUD

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Le 03 Septembre 2015

La circulaire CNAV n° 2015/38 du 5 août 2015, relative à la première période de chômage non indemnisé (N° Lexbase : L4879KEG), a été publiée. Elle présente les modalités de validation de la première période de chômage non indemnisé en tant que période assimilée à compter du 1er janvier 2011. Par une mesure du décret n° 2011-934 du 1er août 2011 (N° Lexbase : L8999IQD), la durée de la première période de chômage involontaire non indemnisée a été allongée, passant de un an à un an et demi. La circulaire rappelle ainsi le dispositif du chômage non indemnisé et détaille les nouvelles modalités de validation de la première période de chômage non indemnisé (cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E8818AB9).

newsid:448689

Procédure prud'homale

[Textes] Loi "Macron" : dispositions relatives à la justice prud'homale (art. 258) (première partie)

Réf. : Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, art. 287 à 293 (N° Lexbase : L4876KEC)

Lecture: 19 min

N8676BUU

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par Vincent Orif, Maître de conférences à l'Université de Caen Basse-Normandie - Institut Demolombe - EA 967

Le 10 Septembre 2015

La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC), dite loi "Macron", contient plusieurs dispositions qui intéressent la justice prud'homale. La première partie du commentaire se concentre sur les acteurs de la justice prud'homale et les questions d'institutions juridictionnelles ; et la seconde partie analyse les évolutions portant sur les questions de procédure prud'homale (N° Lexbase : N8694BUK).
Commentaire

I - Le contexte

1. L'inspiration de rapports sur la justice. Les dernières réformes d'ampleur de la justice prud'homale remontent à la fin des années 1970 (1). Depuis, les juridictions prud'homales ne semblaient plus entrer dans les préoccupations des pouvoirs publics. Cependant, récemment, la Garde des Sceaux a commandé plusieurs rapports pour améliorer le fonctionnement du service public de la justice. Deux d'entre eux, dont un qui est spécialement consacré aux juridictions prud'homales, contiennent des interrogations et des propositions pour améliorer la situation des juridictions prud'homales. Il s'agit des rapports "Marshall" (2) et "Lacabarats" (3). Ces propositions concernent tant des questions d'institutions juridictionnelles que de la procédure prud'homale. Plusieurs des propositions du rapport "Lacabarats" ont inspiré le législateur au moment de l'élaboration de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (4). Il convient de relever que le projet de loi, contenant des dispositions relatives aux juridictions prud'homales, a été porté par le ministère de l'Economie alors que les juridictions prud'homales, et plus particulièrement le conseil de prud'hommes, sont traditionnellement rattachés au ministère de la Justice et à celui du Travail.

2. La reprise par le ministère de l'Economie de projets initialement élaborés par le ministère de la Justice et le ministère du Travail. Les conseils de prud'hommes sont des juridictions qui ont pour particularité d'appartenir à deux mondes. D'un côté, puisqu'il s'agit d'une juridiction, le conseil de prud'hommes est chargé de dire le droit pour trancher des litiges. Dès lors, il appartient au monde judiciaire. D'un autre côté, cette juridiction est également rattachée au monde du travail, tant par la nature de litiges que par sa composition. En effet, elle tranche les litiges individuels du travail. De plus, elle est composée de manière paritaire, par des juges anciennement élus et prochainement désignés (5). La justice du travail se situe alors dans une position ambivalente (6). Ceci explique que des projets de réforme ayant des incidences sur les juridictions prud'homales puissent être élaborés aussi bien par le ministère de la Justice que par le ministère du Travail (7). D'ailleurs, initialement, le ministère de la Justice avait élaboré un projet de loi centré sur les réformes de la justice prud'homale. Quant au ministère du Travail, il s'était intéressé à la formation des conseillers prud'hommes et au statut du défenseur syndical. Finalement, le ministère de l'Economie a repris ces projets. Puis, il les a intégrés et complétés dans son projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (8). Pour justifier son intervention, le ministère de l'Economie reprend un postulat critiquable selon lequel les rigidités du droit du licenciement constitueraient un frein à l'embauche (9). En outre, il a également tenté de procéder à une analyse économique du traitement des litiges en droit du travail (10). Cependant, il ressort d'une étude récente que les procès prud'homaux n'augmentent pas le taux de chômage. A l'inverse, l'augmentation du nombre de chômeurs emporte une augmentation des saisines du juge prud'homal (11). Ce constat est logique. Devant les conseils de prud'hommes, en 2013, 94,5 % des demandes étaient formées par des salariés et 92,8 % des demandes étaient liées à la rupture du contrat de travail. Depuis 2010, l'intensification du recours à la rupture conventionnelle du contrat de travail implique une diminution des demandes pour des licenciements n'ayant pas un motif économique. Toutefois, les demandes engagées sont davantage contestées (12).

3. Le choix d'une réforme de la justice prud'homale par étapes. La loi "Macron" comporte deux articles relatifs à la justice prud'homale. Le second, l'article 259, ne concerne que des dispositions relatives à l'application de la loi dans le temps. Le premier, l'article 258, comporte un patchwork de dispositions variées. Il est difficile de trouver une cohérence d'ensemble. Cependant, c'est compréhensible. En effet, les questions de procédure relèvent du domaine du règlement et non de celui de la loi (13). Dans ces conditions, il aurait pu être possible d'avancer que les solutions proposées ne permettent pas de régler tous les problèmes et qu'une réforme d'ampleur aurait été préférable. Toutefois, le risque de la méthode globale était de ne jamais aboutir. Par ailleurs, même si certains aspects de la méthode législative utilisée peuvent être discutés, cette loi a un mérite indéniable. Elle a lancé le mouvement de la réforme de la justice prud'homale. Celle-ci doit être complétée. Il ne faut pas omettre de s'intéresser aux autres juridictions statuant en matière prud'homale. Tel est particulièrement le cas des cours d'appel. Par ailleurs, cette méthode peut avoir l'avantage d'expérimenter certaines des mesures prises. A l'issue du processus législatif, si besoin, des ajustements pourront être effectués. Pour les prochaines étapes de la réforme, il est important d'entendre le point de vue de tous les acteurs afin de faire accepter les modifications à venir qui vont soulever des questions sensibles (14).

II - Les acteurs du procès prud'homal

A - Une meilleure intégration des conseillers prud'hommes dans le corps judiciaire

4. Le rappel des obligations des conseillers prud'hommes. La mission des conseillers prud'hommes est de juger des affaires. Même s'ils sont issus du monde du travail, ils sont des juges. A l'image des juges de proximité, l'un des objectifs de la loi "Macron" est d'améliorer l'intégration de ces juges dans le corps judiciaire. Pour autant, ils ne sont pas soumis au même statut que les magistrats. En effet, comme l'a relevé le Conseil constitutionnel, ils n'exercent leurs fonctions qu'à temps partiel et pour une durée déterminée dans une juridiction spécialisée. Ils ne sont donc pas régis par le statut des magistrats pris en application de l'article 64 de la Constitution (N° Lexbase : L1330A97) et ne se trouvent pas dans la même situation qu'eux (15). L'article 258 de la loi "Macron" comporte deux séries de dispositions rattachées aux obligations des conseillers prud'hommes.

D'une part, le nouvel article L. 1421-2 du Code du travail (N° Lexbase : L5368KGW) tend à rapprocher les obligations des conseillers prud'hommes de celles des magistrats (16). D'abord, le premier alinéa dispose, notamment, que les "conseillers prud'hommes exercent leurs fonctions en toute indépendance, impartialité, dignité et probité et se comportent de façon à exclure tout doute légitime à cet égard". Ce rappel semble symbolique puisque c'est une reprise du droit commun (17). Ensuite, le second alinéa prévoit qu'ils sont tenus au secret des délibérés. Cet alinéa n'apporte pas grand chose car le secret des délibérés est déjà imposé dans le serment que les conseillers prud'hommes prêtent (18). Enfin, le dernier alinéa interdit toute action concertée de nature à arrêter ou entraver le fonctionnement des juridictions. Cette interdiction ne pèse que si le renvoi du dossier risque d'entraîner des conséquences irrémédiables ou manifestement excessives pour les droits de l'une des parties. Cette mesure vise à garantir la continuité du service public de la justice. Le rapprochement avec le statut des magistrats est sensible car ces derniers ont, sans condition, l'interdiction de mener toute action concertée de nature à arrêter ou entraver le fonctionnement des juridictions (19). Désormais, les conseillers prud'hommes peuvent plus difficilement refuser de siéger, notamment en invoquant un mouvement de grève (20). Toutefois, à la différence des magistrats, l'interdiction n'est pas absolue. Il reste une question ouverte. La personne susceptible d'apprécier si le renvoi de l'affaire risque d'avoir des conséquences irrémédiables ou excessives pour les droits d'une partie n'est pas précisée.

D'autre part, la loi "Macron" procède à une réécriture de l'article L. 1442-11 du Code du travail (N° Lexbase : L2022H9R) qui concerne la prohibition des mandats impératifs. Il précise que l'interdiction pèse sur un conseiller prud'hommes aussi bien avant qu'après son entrée en fonction (21). Surtout, la sanction évolue. Le conseiller a désormais l'interdiction d'exercer les fonctions de conseillers prud'hommes. Il est curieux que cet article prévoie l'annulation de plein droit de l'élection de l'intéressé si la preuve d'un mandat impératif est rapportée avant l'installation du juge concerné. Les auteurs de la loi auraient-ils oublié que le gouvernement a été autorisé à légiférer par voie d'ordonnance pour remplacer l'élection des conseillers prud'hommes par une désignation reposant sur l'audience électorale (22). L'article L. 1442-11 renvoie à la nouvelle procédure disciplinaire (23) si la preuve du mandat impératif est rapportée ultérieurement.

5. Une volonté d'améliorer la formation des conseillers prud'hommes. Avant l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, les conseillers prud'hommes disposaient d'une formation continue de six semaines par mandat de cinq ans pour apprendre les bases du droit social et des questions de procédure (24). En 1981, il y a eu un abandon de la formation commune de tous les conseillers prud'hommes, contrôlée par les présidents de cours d'appel, au profit d'une formation exclusivement syndicale et militante. Un auteur se demandait s'il n'était pas possible de trouver une solution intermédiaire qui combinerait une formation commune et une formation syndicale. Si la formation aux règles du droit judiciaire n'était pas que militante, les dispositions de la procédure prud'homale pourraient être améliorées (25). Telle semble être l'ambition de la loi nouvelle qui modifie les articles L. 1442-1 (N° Lexbase : L5967KG4) et L.1442-2 du Code du travail (N° Lexbase : L5966KG3), même si plusieurs questions restent en suspens.

Désormais, chaque conseiller doit suivre une formation initiale de cinq jours avant sa prise de fonction. Puis, il dispose toujours de six semaines par mandat au titre de la formation continue (26). Il est précisé que la formation initiale est obligatoire. S'il ne respecte pas cette obligation, le conseiller est réputé démissionnaire. Il est précisé que la formation initiale est commune à tous les conseillers et qu'elle est organisée par l'Etat.

Quelques observations peuvent être formulées puisque ces dispositions doivent être complétées pour pouvoir être mises en oeuvre. D'abord, l'obligation de formation paraît se limiter à la formation initiale. Par ailleurs, les modalités relatives à la sanction de cette obligation restent à déterminer. Ainsi, il est important de connaître la personne susceptible de constater la démission du conseiller prud'homme qui n'a pas suivi de formation initiale (27). Ensuite, il est essentiel de préciser le contenu de cette formation initiale. Le projet serait d'assurer une formation commune aux sujets spécifiquement judiciaires et processuels, comme l'organisation judiciaire, les rôles respectifs des juges et des greffiers, la technique de conciliation, les principes directeurs du procès civil, la rédaction des jugements et la déontologie (28). Il est également envisageable d'inclure une formation minimale des conseillers à la pratique de la présidence d'audience et à celle du délibéré (29). Une formation commune sur ces questions est susceptible de surmonter certains blocages actuels. Par exemple, une connaissance commune des pouvoirs du bureau de conciliation et d'orientation en matière de mise en état est susceptible d'éviter une conception trop restreinte de ceux-ci. Seule l'expérience permettra de mesurer l'influence de cette réforme qui paraît, a priori, positive. Enfin, une question redoutable se pose. Qui devra assurer cette formation commune ? La concurrence est rude entre les différents organismes susceptibles d'assurer cette formation. En l'état, il paraît important de chercher une coordination entre les syndicats de salariés, les organisations patronales, l'Ecole nationale de la magistrature (ENM) et l'Université (30). En tout état de cause, comme il a été proposé par le rapport "Lacabarats" (31), il est envisagé que l'ENM participe à cette formation initiale (32).

B - L'élaboration d'un statut du défenseur syndical

6. Les implications du nouveau statut du défenseur syndical dans l'entreprise. La loi "Macron" crée un nouveau statut du défenseur syndical. Elle se concentre essentiellement sur les conséquences de ce statut sur le fonctionnement de l'entreprise. D'un côté, le défenseur syndical devient un salarié protégé. A ce titre, il est préservé contre les sanctions disciplinaires, le licenciement et contre toutes les formes de rupture des différents contrats de travail (33). D'un autre côté, le défenseur syndical dispose de différents droits. Par exemple, les absences du défenseur syndical pour exercer sa mission en dehors de l'entreprise sont désormais rémunérées par l'employeur qui est remboursé par l'Etat (34).

7. Les incidences du nouveau statut du défenseur syndical en matière processuelle. D'abord, l'article L. 1453-4 du Code du travail (N° Lexbase : L6233ISN), dans sa nouvelle rédaction, prévoit qu'un défenseur syndical exerce des fonctions d'assistance ou de représentation tant devant le conseil de prud'hommes que la cour d'appel (35). A priori, l'évolution paraît minime. Deux questions ne sont pas encore résolues. Ce nouveau statut va-t-il impliquer que la procédure prud'homale sera, au moins devant la cour d'appel, avec représentation obligatoire, comme le laissait entrevoir le projet de loi "Macron" dans sa version initiale ? Néanmoins, plutôt qu'une représentation obligatoire, il faudrait privilégier une assistance obligatoire (36). Par ailleurs, est-ce qu'il va y avoir une restriction de la liste des personnes habilitées à assister ou à représenter les parties devant les juridictions prud'homales (37) ?

Ensuite, les nouvelles dispositions prévoient des obligations minimales de déontologie. En effet, le défenseur syndical est soumis au secret professionnel pour toutes les questions relatives aux procédés de fabrication. Par ailleurs, dans le cadre d'une négociation, le défenseur syndical doit respecter une obligation de discrétion à l'égard des informations présentant un caractère confidentiel et données comme telles par la personne qu'il assiste ou qu'il représente ou par la partie adverse. Le non-respect de ces obligations est sanctionné par la radiation de l'intéressé de la liste des défenseurs syndicaux établie par l'autorité administrative (38).

Enfin, la loi "Macron" a toiletté les dispositions relatives à l'incompatibilité de l'exercice de défenseur syndical pour garantir l'impartialité d'un conseil de prud'hommes. En effet, elle a repris la jurisprudence qui interdit à un conseiller prud'hommes d'assister ou représenter une partie, même au titre de défenseur syndical, devant le conseil de prud'hommes dont il est membre (39). Cette interdiction concerne toutes les formations du conseil de prud'hommes, aussi bien au fond qu'au référé. Peu importe que le défenseur syndical ne soit pas un membre de la section ou de la chambre qui tranche le litige. En revanche, la loi n'a pas étendu cette interdiction à la cour d'appel. Dès lors, un défenseur syndical devrait toujours pouvoir assister une partie devant une cour d'appel, même si le conseil dont il est membre se situe dans le ressort de la cour d'appel (40).

C - Des évolutions minimes du statut du juge départiteur

8. La présence du juge départiteur à l'assemblée générale du conseil de prud'hommes. La loi "Macron" prévoit qu'à sa demande, le juge départiteur assiste à l'assemblée générale du conseil de prud'hommes. Il est précisé qu'il doit faire cette demande au moins une fois par an (41). Certains craignent une ingérence du juge départiteur dans le fonctionnement du conseil de prud'hommes (42). Cependant, cette mesure peut être intéressante. Potentiellement, elle permet d'améliorer la coopération entre les conseillers prud'hommes et le juge départiteur. Actuellement, ce dernier n'intervient que s'il y a un désaccord entre les conseillers prud'hommes au moment de prendre la décision. La présence du juge départiteur est alors subie plus qu'elle n'est voulue. Dès lors, autoriser le juge départiteur à assister au moins une fois par an à l'assemblée générale du conseil de prud'hommes peut être un facteur permettant de sortir de cette logique. En outre, cela montre qu'il est un acteur du conseil de prud'hommes. Il n'en demeure pas moins que le juge départiteur n'a pas de voix délibérative. Il n'est pas non plus certain qu'il pourra prendre la parole dans les débats (43). Sa présence risque de n'être que purement passive. Il faut attendre que cette mesure soit pratiquée pour savoir si elle est utile.

9. L'occasion manquée d'aller vers une véritable spécialisation du juge départiteur. Actuellement, le juge départiteur est un juge du tribunal d'instance. Or, il exerce d'autres fonctions nécessitant des compétences variées dans des matières diverses. Par ailleurs, il n'a reçu aucune formation spécifique en droit social ou pour le délibéré prud'homal, alors qu'il est censé résoudre des litiges individuels du travail (44). Le rapport "Lacabarats" a bien souligné les inconvénients de ce manque de spécialisation. Il proposait donc qu'un vice-président du tribunal de grande instance (TGI) soit chargé de tous les litiges de droit du travail. Le rapport précisait qu'il faudrait alors assurer une formation en droit du travail de ces magistrats. Cette formation devrait également être suivie par les conseillers des chambres sociales des cours d'appel (45). Cette proposition n'est pas anodine lorsqu'il apparaît qu'à la cour d'appel de Versailles de nombreux nouveaux présidents des chambres sociales n'avaient jamais traité auparavant d'affaires sociales (46). Pour autant, la reprise de ces propositions par la loi "Macron" sont décevantes. La loi se contente de préciser que la formation de départage sera désormais présidée par un juge du TGI et que le président du TGI désignera ce juge, notamment en fonction de ses aptitudes et connaissances particulières (47). Cette évolution n'implique nullement une spécialisation du juge départiteur qui pourra toujours avoir d'autres fonctions et tâches (48). Pourtant, cette spécialisation est indispensable pour améliorer la qualité des décisions rendues et pour renforcer l'utilité des magistrats professionnels chargés de trancher des litiges en droit du travail.

III - Une nouveau droit disciplinaire des conseillers prud'hommes

10. Une ancienne procédure disciplinaire problématique. Avant la réforme opérée par la loi "Macron", la procédure disciplinaire pouvant être engagée contre les conseillers prud'hommes soulevait deux séries de difficultés. D'abord, si un conseiller prud'homme commettait un manquement grave à ses devoirs dans l'exercice de ses fonctions, la procédure disciplinaire était engagée à l'initiative du président du conseil de prud'hommes ou du procureur de la République. Le conseiller était alors appelé devant la section ou la chambre pour s'expliquer (49). Cette procédure interne soulevait donc des interrogations au regard de l'impartialité des juges (50). Par ailleurs, cette procédure était peu usitée, ce qui peut faire douter de son effectivité. Ainsi, entre 2005 et 2014, il n'y a eu que 85 signalement reçus qui ont abouti à deux arrêtés de censure, six arrêtés de suspension provisoire et six décrets de déchéance (51). Ensuite, la procédure disciplinaire n'était pas compatible avec le principe d'indépendance des juges (52). En effet, les sanctions prononcées à l'encontre des conseillers prud'hommes résultaient d'un arrêté ministériel ou d'un décret pris par le Garde des sceaux (53). Dès lors, des juges de l'ordre judiciaire étaient sanctionnés par un membre du pouvoir exécutif. Ce seul élément justifie une évolution de la situation. Le choix a été effectué de rapprocher la procédure disciplinaire des conseillers prud'hommes de celles des magistrats de carrière. Il y a une volonté de mieux intégrer ces juges dans la hiérarchie judiciaire (54). Il n'en demeure pas moins que la nouvelle procédure disciplinaire doit conserver certaines spécificités. Il est effectivement difficile d'avoir un droit disciplinaire identique pour des juges non professionnels et des magistrats professionnels qui ont un droit à carrière (55).

11. Une évolution de la notion de faute disciplinaire et des sanctions encourues. D'une part, la loi analysée donne une nouvelle définition de la faute disciplinaire. Désormais, "tout manquement à ses devoirs dans l'exercice de ses fonctions par un conseiller prud'homme est susceptible de constituer une faute disciplinaire" (56). Cette nouvelle définition n'exige plus un manquement grave au devoir. Il y a donc un accroissement de la responsabilité des conseillers prud'hommes. D'autre part, le législateur a aussi choisi de modifier les sanctions encourues par un conseiller prud'homme à l'issue d'une procédure disciplinaire. Auparavant, les sanctions étaient la censure, la suspension pour une durée maximale de six mois, et la déchéance (57). Avec la loi nouvelle, la censure est remplacée par le blâme. La suspension pour une durée maximale de six mois est maintenue. Par ailleurs, il y a deux catégories de déchéance assorties de l'interdiction d'exercer les fonctions de conseiller prud'homme. Tantôt, la déchéance est provisoire pour une durée maximale de six mois. Tantôt, la déchéance est définitive (58).

12. L'instauration d'un rappel des obligations par le premier président. En dehors de tout action disciplinaire, un premier président de cour d'appel peut rappeler aux conseillers prud'hommes, situés dans le ressort de sa cour, les obligations qu'ils doivent respecter (59). Cette nouvelle faculté s'inspire de l'avertissement pouvant être prononcé à l'encontre d'un magistrat de carrière en dehors de toute procédure disciplinaire (60). Pour autant, ce rappel peut-il être constitutif d'une sanction mineure comme un avertissement (61). Ou ce rappel a-t-il une simple valeur informative pour sensibiliser les conseiller prud'hommes ? A priori, un premier président de cour d'appel pourrait utiliser ce rappel au lieu de déclencher une procédure disciplinaire. Pour éviter toute confusion avec un avertissement, il est préférable que ce rappel soit oral (62).

13. L'exercice du pouvoir disciplinaire par une Commission nationale de discipline. L'un des apports principaux de la réforme est la constitution d'une Commission nationale de discipline qui exerce le pouvoir de discipline (63). Parmi les différentes solutions envisagées par le rapport "Lacabarats" (64), le choix a été fait d'instaurer une commission ad hoc. Concernant la composition de cette Commission nationale de discipline, certaines critiques risquent d'être émises. En effet, elle est composée presque exclusivement des magistrats et des juges de l'ordre judiciaire (65). Comme le montre les débats sur la composition du conseil supérieur de la magistrature (66), il aurait été préférable d'intégrer des personnalités extérieures pour éviter la critique du corporatisme. Ainsi, outre le membre du Conseil d'Etat, il aurait fallu intégrer au moins un avocat.

14. La présence de dispositions procédurales. Même si les dispositions procédurales seront complétées ultérieurement par décret (67), la loi examinée comporte des dispositions relatives à la procédure disciplinaire.

D'abord, la saisine de la Commission nationale de discipline peut être effectuée par le ministre de la Justice ou par le premier président de la cour d'appel. Il convient de souligner que le premier président de la cour d'appel doit auditionner préalablement le conseiller prud'homme concerné (68). Cette audition peut éventuellement être l'occasion de rappeler au conseiller prud'homme ses obligations, plutôt que de mettre en oeuvre la procédure disciplinaire. En revanche, à la différence du CSM, un justiciable n'a pas la possibilité de saisir directement la Commission nationale de discipline (69). Si un jour cette saisine directe était envisagée, il serait important d'assurer une procédure de filtre (70). Il faut éviter que les parties mécontentes se servent de cette faculté pour faire pression sur des juges non professionnels. Il est important de préserver l'indépendance des juges par rapport aux parties.

Ensuite, concernant le prononcé de la décision, un quorum minimum est requis. La Commission ne peut délibérer que si au moins quatre de ses membres, dont le président, sont présents. En cas de partage des voix, celle du président est prépondérante (71). Il est curieux de prévoir que la Commission puisse statuer alors que tous ses membres ne sont pas présents. Il peut en découler des difficultés sur l'équilibre de la composition de la Commission si celle-ci varie pour chaque procédure disciplinaire. Selon les membres présents, ne risque-t-il pas d'y avoir des appréciations distinctes pour des situations similaires ? Il aurait été préférable d'exiger la présence de tous les membres. Il est également prévu que les décisions de la Commission nationale et celles de son président soient motivées (72). C'est indispensable puisque des décisions sont rendues en matière disciplinaire.

Enfin, lorsqu'il existe des faits de nature à entraîner une sanction disciplinaire, des dispositions sont prises pour suspendre l'intéressé. Cette suspension ne peut être demandée au président de la Commission nationale de discipline que par le ministre de la Justice ou le premier président de la cour d'appel. Là encore, le premier président de la cour d'appel doit préalablement auditionner le conseiller prud'homme concerné. Doit-il s'agir de la même audition ou doit-elle être différente de l'audition prévue avant d'engager une procédure disciplinaire ? A priori, rien ne s'oppose à ce qu'il s'agisse de la même audition. Toutefois, pour préserver les droits du conseiller prud'homme, il faudrait l'informer qu'une suspension peut éventuellement être envisagée à l'issue de cette audition. Cette suspension prononcée par le président de la Commission ne peut pas excéder six mois. Une prolongation, également d'une durée ne pouvant excéder six mois, peut être prononcée. Cependant, la prolongation relève de la compétence de la Commission nationale de discipline. Pour être complet, il faut relever qu'en cas de poursuites pénales engagées contre le conseiller prud'homme mis en cause, le président de la Commission nationale peut ordonner une suspension jusqu'à l'intervention de la décision pénale définitive.

IV - Le transfert des affaires

15. Le transfert des affaires en cas de difficultés de constitution d'un conseil de prud'hommes. La loi étudiée modifie les dispositions de l'article L. 1423-8 du Code du travail (N° Lexbase : L5972KGB). Dorénavant, cet article ne concerne que les difficultés de constitution d'un conseil de prud'hommes. Le premier président de la cour d'appel ne peut intervenir que s'il est saisi sur requête du procureur général. Il peut décider de transférer les affaires, soit à un autre conseil de prud'hommes, soit désigner un ou plusieurs juges du ressort de la cour d'appel. Auparavant, l'autre alternative était la désignation d'un tribunal d'instance. Cette évolution semble offrir une plus grande souplesse pour répartir les affaires dans l'attente du fonctionnement du conseil de prud'hommes normalement compétent (73).

16. Le transfert des affaires en cas de difficultés de fonctionnement d'un conseil de prud'hommes. La loi analysée accroît les pouvoirs du premier président de la cour d'appel en adoptant des règles spécifiques pour répondre aux difficultés de fonctionnement d'un conseil de prud'hommes (74). Il ressort des nouvelles dispositions que le premier président de la cour d'appel peut agir d'office. Il n'a plus à être saisi par une requête du procureur général. La loi nouvelle précise les difficultés de fonctionnement. Il peut s'agir d'une interruption du fonctionnement ou de difficultés graves rendant ce fonctionnement impossible dans des conditions normales. Les termes utilisés invitent à une interprétation stricte de ces textes pour que le transfert des affaires reste exceptionnel. S'il décide que les conditions sont réunies, le premier président de la cour d'appel désigne un ou plusieurs juges du ressort de la cour d'appel. Certes, cette proposition évite de surcharger un autre conseil de prud'hommes qui pourrait se retrouver confronté à des difficultés de fonctionnement en raison de ce transfert (75). Cependant, elle doit être utilisée avec prudence car elle porte atteinte à la compétence exclusive du conseil de prud'hommes pour traiter des litiges individuels du travail (76). S'il use de cette faculté, le premier président de la cour d'appel doit fixer la date à compter de laquelle les affaires sont provisoirement soumises aux juges désignés. Réciproquement, lorsqu'il constate que le conseil de prud'hommes est de nouveau en mesure de fonctionner, il fixe la date à laquelle les affaires seront portées devant cette juridiction.


(1) Il s'agit de la réforme de la procédure prud'homale par le décret n° 74-783 du 12 septembre 1974, modifiant les dispositions réglementaires du titre 1er du Livre V du Code du travail relatives à la procédure en matière prud'homale (N° Lexbase : L7807KGA), et de la généralisation des conseils de prud'hommes par la loi n° 79-44 du 18 janvier 1979 du 18 janvier 1979, portant modification des dispositions du titre 1er du livre V du Code du travail, relatives aux conseils de prud'hommes (N° Lexbase : L9593CAK).
(2) Rapport du groupe de travail présidé par Didier Marshall, Les juridictions du XXIème siècle, remis à Madame la Garde des Sceaux, ministre de la Justice, décembre 2013, spéc. p. 46-56 et p. 109-113.
(3) Rapport du groupe de travail présidé par Alain Lacabarats, L'avenir des juridictions du travail : vers un tribunal prud'homal du XXIème siècle, remis à Madame la Garde des Sceaux, ministre de la Justice, juillet 2014.
(4) Etude d'impact du projet de loi pour la croissance et l'économie, Tome 3, p. 22. Cependant, il n'y a pas eu une reprise à l'identique des propositions du rapport "Lacabarats". En outre, la loi a ajouté des mesures non prévues par ledit rapport. Pour un tableau comparatif permettant d'identifier les différences entre le rapport et la loi, voir Les propositions du rapport "Lacabarats", Que sont-elles devenues ? Qu'en pense la CFDT, in Prud'hommes : les défis de demain, Action juridique, n° 221, p. 14-38
(5) Cons. const., décision n° 2014-704 DC, du 11 décembre 2014 (N° Lexbase : A2168M7G) et les obs. de F. Guiomard, Les conseils de prud'hommes, de l'élection à la désignation : un contrôle constitutionnel léger ; RDT, 2015, p. 164-169 ; nos obs., L'adieu aux élections prud'homales, Lexbase Hebdo n° 596 du 8 janvier 2015 - édition sociale (N° Lexbase : N5314BUD).
(6) Y. Desdevises, Le particularisme de la procédure prud'homale, Justices, 1997, n° 8, p. 23-31, spéc. p. 24.
(7) La troisième proposition du rapport "Lacabarats" consiste à clarifier les domaines d'intervention de chacun de ces ministères.
(8) F. Champeaux et S. Izard, Les prud'hommes à l'Economie, SSL, 2014, n° 1653, p. 2.
(9) P. Henriot, Du rapport "Lacabarats" au projet de loi "Macron" : comment neutraliser la prud'homie, SSL, 2014, n° 1653, p. 3-5, spéc. p. 3.
(10) K. Yazidi et C. Darmaillacq, Le traitement des litiges en droit du travail : constats et perspectives économiques, Trésor-Eco, octobre 2014, n° 137.
(11) S. Schulze-Marmeling, Les conseils de prud'hommes : un frein à l'embauche ?, Connaissance de l'emploi, n° 111, mars 2014, Centre d'étude de l'emploi, p. 2-3.
(12) E. Serverin, Agir aux prud'hommes, hier et aujourd'hui, Dr. ouvr., 2014, n° 796, p. 699-706, spéc. p. 701-702.
(13) Sur cette répartition, voir infra la deuxième partie, n° 17 (N° Lexbase : N8694BUK).
(14) Les organisations syndicales et patronales sont sensibilisées aux questions de la réforme de la justice prud'homale. Voir par exemple, le dossier de la CFDT, Prud'hommes : les défis de demain, Action juridique, n° 221, p. 8-109 ; Vers un ordre juridictionnel social, Dr. ouvr., 2014, n° 796, p. 689-784 ; Questions-Réponses sur les dispositions du projet de loi "Macron" sur la Justice prud'homale, MEDEF ; Analyses, décembre 2014, UIMM, spéc. p. 7-10.
(15) Cons. const., décision n° 2006-545 DC du 28 décembre 2006 (N° Lexbase : A1487DTA).
(16) Pour une présentation des droits et devoirs des magistrats, voir, par exemple, R. Perrot, Institutions judiciaires, Montchrestien, 15ème éd., 2012, p. 313-322 ; S. Guinchard, G. Montagnier, A. Varinard, T. Debard, Institutions juridictionnelles, D., Précis, 12ème éd., 2013, p. 825-832.
(17) Voir en ce sens, F. Guiomard et M. Grévy, "Réforme" de la juridiction prud'homale : du rapport "Lacabarats" au projet de loi "Macron", RDT, 2015, p. 58-63, soc., p. 60.
(18) C. trav., art. D. 1442-13 (N° Lexbase : L1004IAG).
(19) Ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature (N° Lexbase : L5336AGQ), art. 10.
(20) A. Bugada, Vers un nouveau droit prud'homal, JCP éd. S, 2015, n° 26, 1247, p. 66-70, spéc. p. 68.
(21) L'expression antérieurement prévue par l'article L. 1442-11 du Code du travail (N° Lexbase : L2022H9R) était "à quelque époque que ce soit".
(22) V. Orif, L'adieu aux élections prud'homales, préc..
(23) Sur la nouvelle procédure disciplinaire, voir infra.
(24) S. Mess, Un juge prud'homal actif, Dr. ouvr., 2014, n° 796, p. 768-772.
(25) A. Supiot, L'impossible réforme des juridictions sociales, Revue française des affaires sociales, 1993, n° 1, p. 97-117, spéc. p. 107-108.
(26) Un auteur souligne que, techniquement, il s'agit d'une formation de prise de mandat et d'une formation réalisée dans l'exercice du mandat, les deux relevant du domaine de la formation professionnelle continue. Voir N. Maggi-Germain, Les enjeux de la réforme de la formation des conseillers prud'hommes, Dr. soc., 2015, p. 547-550, spéc. p. 549.
(27) D. Boulmier, Le volet prud'homal du projet de loi "Macron" : en "coup de force" mais sans "coup de jeune", Dr. soc., 2015, p. 430-441, spéc. p. 431.
(28) Etude d'impact du projet de loi pour la croissance et l'économie, préc., p. 31.
(29) J.-L. Cioffi ; Libres propos sur le juge départiteur, Dr. soc., 2014, p. 161-164, spéc. p. 163.
(30) M. Keller Lyon-Caen, Pour une meilleure pratique de la règle de l'unicité de l'instance prud'homale (en attendant la juridiction sociale du XXIème siècle, Dr. ouvr., 2014, p. 515-541, spéc. p. 540-541.
(31) Rapport du groupe de travail présidé par Alain Lacabarats, L'avenir des juridictions du travail : vers un tribunal prud'homal du XXIème siècle, préc. p. 31.
(32) Etude d'impact du projet de loi pour la croissance et l'économie, préc., p. 31.
(33) Voir les articles nouveaux et ceux qui sont modifiés du Code du travail : art. L. 1453-9 (N° Lexbase : L5381KGE), art. L. 2411-1, 19° (N° Lexbase : L5959KGS), art. L. 2411-24 (N° Lexbase : L5382KGG), art. L. 2412-1, 15° (N° Lexbase : L5979KGK), art. L. 2412-15 (N° Lexbase : L5383KGH), art. L. 2413-1, 15° (N° Lexbase : L5978KGI), art. L. 2414-1 12° (N° Lexbase : L5976KGG), art. L. 2421-2, 6° (N° Lexbase : L5977KGH), art. L. 2439-1 (N° Lexbase : L5384KGI).
(34) C. trav., art. L. 1453-6, nouveau (N° Lexbase : L5378KGB).
(35) Le second alinéa de l'article L. 1453-4 du Code du travail (N° Lexbase : L5961KGU) concerne les conditions d'inscription sur une liste arrêtée par l'autorité administrative.
(36) V. Orif, La règle de l'unicité de l'instance, Coll. "Bibliothèque de droit social", tome 56, LGDJ, 2012, préface de S. Amrani-Mekki, p. 441-456.
(37) C. trav., art. R. 1453-2 (N° Lexbase : L0387ITI). Par exemple, actuellement, un justiciable peut se faire assister par son conjoint, par un salarié ou un employeur appartenant à la même branche d'activité, etc..
(38) C. trav., art. L. 1453-8, nouveau (N° Lexbase : L5380KGD)
(39) Voir par exemple, Cass. soc., 2 février 2005, n° 03-40.271, F-P+B (N° Lexbase : A6384DGK) ; Bull. civ. V, n° 44.
(40) Nos obs., L'impartialité d'une cour d'appel ne s'apprécie pas comme celle d'un conseil de prud'hommes, note sous Cass. soc., 10 janvier 2012, n° 10-28.027, FS-P+B (N° Lexbase : A5285IAY), Gaz. Pal., Rec., 2012, n° 147, jur. p. 1534-1535.
(41) C. trav., art. L. 1423-3, modifié (N° Lexbase : L5973KGC).
(42) Analyses, décembre 2014, préc. p. 9.
(43) D. Boulmier, Le volet prud'homal du projet de loi "Macron" : en "coup de force" mais sans "coup de jeune", préc., spéc. p. 434.
(44) J.-L. Cioffi ; Libres propos sur le juge départiteur, préc., spéc. p. 161 et 162.
(45) Rapport du groupe de travail présidé par Alain Lacabarats, L'avenir des juridictions du travail : vers un tribunal prud'homal du XXIème siècle, préc. p. 52-54.
(46) D. Lottin, Résorber un contentieux hors nomes, SSL, 2015, n° 1685, p. 6-7.
(47) C. trav., art. L. 1454-2, modifié (N° Lexbase : L5958KGR).
(48) S. Hunter-Flack, Le juge départiteur, cet inconnu..., in S. Hunter-Flack et D. Boulmier, Quel statut pour le juge départiteur ?, RDT, 2015, p. 10-16, spéc. p. 12-13.
(49) C. trav., art. L. 1442-13, ancien (N° Lexbase : L2026H9W).
(50) Rapport du groupe de travail présidé par Alain Lacabarats, L'avenir des juridictions du travail : vers un tribunal prud'homal du XXIème siècle, préc., p. 43.
(51) Etude d'impact du projet de loi pour la croissance et l'économie, préc., p. 25.
(52) Le législateur a d'ailleurs pris en considération ce principe d'indépendance. Etude d'impact du projet de loi pour la croissance et l'économie, préc., p. 25-26.
(53) C. trav., art. L. 1442-14, ancien (N° Lexbase : L2028H9Y) et art. D. 1442-22 (N° Lexbase : L0980IAK).
(54) A. Bugada, Vers un nouveau droit prud'homal, préc., spéc. p. 69.
(55) F. Guiomard et M. Grévy, "Réforme" de la juridiction prud'homale : du rapport "Lacabarats" au projet de loi "Macron", préc., spéc. p. 61.
(56) C. trav., art. L. 1442-13, nouveau (N° Lexbase : L5964KGY).
(57) C. trav., art. L. 1442-14, ancien (N° Lexbase : L2028H9Y).
(58) C. trav., art. L. 1442-14, nouveau (N° Lexbase : L5963KGX).
(59) C. trav., art. L. 1442-13-1, nouveau (N° Lexbase : L5373KG4).
(60) Etude d'impact du projet de loi pour la croissance et l'économie, préc., p. 23.
(61) Pour les magistrats de carrière, l'avertissement est aussi pris en dehors de toute procédure disciplinaire et il est inscrit à leur dossier. Cette inscription est effacée automatiquement au bout de trois ans si aucun nouvel avertissement ou si aucune procédure disciplinaire n'est intervenue, voir l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958, art. 44, préc..
(62) D. Boulmier, Le volet prud'homal du projet de loi "Macron" : en "coup de force" mais sans "coup de jeune", préc., spéc. p. 433.
(63) C. trav., art. L. 1442-13-2 (N° Lexbase : L5385KGK).
(64) Rapport du groupe de travail présidé par Alain Lacabarats, L'avenir des juridictions du travail : vers un tribunal prud'homal du XXIème siècle, préc., p. 43-52.
(65) Un auteur s'interroge sur la possibilité d'avoir d'anciens conseillers prud'hommes dans la commission alors qu'il y a de nombreux conseillers prud'homme en exercice. Voir D. Boulmier, Le volet prud'homal du projet de loi "Macron" : en "coup de force" mais sans "coup de jeune", préc., spéc. p. 433.
(66) La composition du CSM qui comprend des juges et des personnalités désignées par des organes politique est l'objet de vifs débats. L'équilibre à trouver entre le corporatisme et l'indépendance des juges est difficile à trouver. Voir R. Perrot, Institutions judiciaires, préc., p. 48-52, S. Guinchard, G. Montagnier, A. Varinard, T. Debard, Institutions juridictionnelles, préc., p. 174-177.
(67) Etude d'impact du projet de loi pour la croissance et l'économie, préc., p. 36.
(68) C. trav., art. L. 1442-13-3, nouveau (N° Lexbase : L5374KG7).
(69) Sur la saisine directe du CSM par les justiciables, voir S. Guinchard, G. Montagnier, A. Varinard, T. Debard, Institutions juridictionnelles, préc., p. 836.
(70) Rapport du groupe de travail présidé par Alain Lacabarats, L'avenir des juridictions du travail : vers un tribunal prud'homal du XXIème siècle, préc., p. 51.
(71) C. trav., art. L. 1442-16-1, nouveau (N° Lexbase : L5375KG8).
(72) C. trav., art. L. 1442-16-2, nouveau (N° Lexbase : L5376KG9).
(73) Aux termes de l'article L. 1423-9 du Code du travail (N° Lexbase : L5971KGA), la situation est censée être provisoire. La loi examinée a également fait évoluer les termes de cet article pour l'adapter aux modifications de l'article L. 1423-8 du Code du travail (N° Lexbase : L5972KGB).
(74) C. trav., art. L. 1423-10-1, nouveau (N° Lexbase : L5369KGX).
(75) Les propositions du rapport Lacabarats, Que sont-elles devenues ? Qu'en pense la CFDT, in Prud'hommes : les défis de demain, spéc. p. 37.
(76) F. Guiomard et M. Grévy, "Réforme" de la juridiction prud'homale : du rapport "Lacabarats" au projet de loi "Macron", spéc. p. 62.

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Procédure prud'homale

[Textes] Loi "Macron" : dispositions relatives à la justice prud'homale (art. 258) (seconde partie)

Réf. : Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC)

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par Vincent Orif, Maître de conférences à l'Université de Caen Basse-Normandie - Institut Demolombe - EA 967

Le 10 Septembre 2015

Après une première partie traitant des acteurs de la justice prud'homale et des questions d'institutions juridictionnelles (N° Lexbase : N8676BUU), la seconde partie du commentaire des dispositions consacrées à la justice prud'homale de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC) se concentre sur les évolutions portant sur les questions de procédure prud'homale.

17. Un empiétement du domaine réglementaire. Depuis l'entrée en vigueur de la Constitution du 4 octobre 1958, la répartition entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif est régie par ses articles 34 (N° Lexbase : L1294A9S) et 37 (N° Lexbase : L1297A9W). Or, l'article 34 énonce limitativement le domaine de la loi. Selon cet article, la loi détermine les principes fondamentaux du droit du travail, du droit syndical et de la Sécurité sociale. Elle fixe également les règles, en matière de procédure pénale, de la création de nouveaux ordres de juridiction et pour le statut des magistrats. Il résulte de cette répartition que les règles de procédure civile, dont celles de la procédure prud'homale, relèvent du pouvoir réglementaire. Ce choix a été effectué par les constituants pour permettre de réformer la procédure civile en évitant une éventuelle obstruction des assemblées (1). Cette répartition explique que la loi "Macron" concerne principalement des questions liées au statut des conseillers prud'hommes et à la procédure disciplinaire. Cette loi ne pouvait pas élaborer les règles de procédure susceptibles d'apporter les meilleures réponses pour résoudre les difficultés principales de la procédure prud'homale. Néanmoins, un examen attentif de certaines dispositions de la loi étudiée montre qu'elles sont relatives à la procédure prud'homale. Toutefois, si une loi comporte des dispositions à caractère réglementaire, cela ne constitue plus en soi un motif d'inconstitutionnalité (2). Le cas échéant, il appartiendra au Gouvernement de saisir le Conseil constitutionnel pour faire déclasser ces dispositions afin de pouvoir les modifier par décret (3). Il reste à étudier les règles procédurales contenues dans la loi "Macron".

Commentaire

I - Les prérogatives du bureau de conciliation et d'orientation modifiées

18. Du bureau de conciliation au bureau de conciliation et d'orientation. Le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes connaît plusieurs modifications. La première est un changement de nom. Il devient le bureau de conciliation et d'orientation (BCO). La loi analysée en profite pour simplifier la présentation de la composition de chacune des formations du conseil de prud'hommes (4). Ce changement de dénomination est lié aux nouvelles missions conférées à ce bureau qui peut, désormais, orienter l'affaire vers différentes formations pour qu'elle soit jugée. Cette évolution montre que les missions de ce bureau ne se limitent pas à la tentative obligatoire de conciliation. Néanmoins, ce nouveau nom masque toujours les autres missions du BCO, comme le prononcé de mesures provisoires ou de mesures d'instruction (5).

19. La réaffirmation de la tentative de conciliation par le bureau de conciliation et d'orientation. La loi examinée prévoit que le BCO est chargé de concilier les parties (6). Sur ce point, l'apport de la loi est faible (7). Cette disposition est présentée comme une réaffirmation solennelle de la mission de conciliation (8). La loi poursuit en prévoyant que, dans le cadre de sa mission, le BCO peut entendre chacune des parties séparément. Sans autres précisions, il semble que cette faculté puisse être exercée d'office ou à la demande des parties. Même si les deux parties le demandent, le juge ne paraît pas obligé de l'accepter. Le choix de cette audition séparée des parties proviendrait de l'observation des techniques de médiation (9). En outre, cette audition séparée, comme le reste de la tentative de conciliation (10), est marquée par la confidentialité. Cette confidentialité est l'une des garanties des modes alternatifs de règlement des conflits (11). La confidentialité vise à favoriser l'échange des informations et la sincérité des discussions. Pour participer en toute confiance à la tentative de conciliation, les parties ne doivent pas craindre que les informations et propositions communiquées pendant cette étape se retournent contre elles en cas d'échec de la conciliation. Dès lors, cette confidentialité ne devrait pas empêcher une discussion sur les différents points abordés lors des auditions séparées des parties. A l'image de la procédure de divorce (12), si le juge prud'homal souhaite user de cette faculté, après avoir entendu les parties de manière séparée, il devrait les réunir devant lui pour trouver la solution au litige. Dans l'ensemble ces évolutions paraissent minimes. Il faut attendre les nouvelles dispositions réglementaires pour savoir si les outils nécessaires sont donnés pour améliorer la conciliation par le BCO.

20. Le possible renvoi devant la formation restreinte du bureau de jugement. En l'absence de conciliation ou en cas de conciliation partielle, l'affaire est renvoyée devant le bureau de jugement si elle est en l'état d'être jugée (13). La loi "Macron" offre une nouvelle possibilité si le litige porte sur un licenciement ou une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail. Le BCO peut renvoyer l'affaire devant la formation restreinte du bureau de jugement qui est censée statuer dans un délai de trois mois (14). Cette formation restreinte est composée d'un conseiller prud'homme employeur et d'un conseiller prud'homme salarié (15). Ce renvoi nécessite l'accord des deux parties.

Plusieurs observations peuvent être formulées à propos de cette nouvelle faculté offerte au BCO. D'abord, un rapprochement peut être effectué avec le débat relatif au choix entre une formation collégiale et le juge unique (16). Cette évolution peut être perçue comme un moyen d'augmenter le nombre d'affaires traitées par la juridiction sans augmenter le nombre de juges. Une volonté de gérer les flux d'affaires, à moindre coût, apparaît alors ici. Cette remarque se vérifie d'autant plus que 78,1 % des demandes sont relatives à un licenciement pour motif personnel (17). Néanmoins, à l'instar de remarques effectuées pour le juge unique, ce système ne peut fonctionner correctement que si deux conditions sont réunies. D'un côté, le juge doit avoir une formation professionnelle importante et une expérience suffisante pour statuer sur des problèmes complexes. D'un autre côté, ce système implique un grand respect pour la justice et les juges de la part des citoyens (18). En dépit de l'implication des conseillers prud'hommes, le respect de ces deux conditions n'est pas acquis. La tentation de critiquer ces juges peut être grande. Il sera plus difficile de résister s'il n'y a plus que deux conseillers.

Ensuite, s'agissant du délai de trois mois pour statuer, il est illusoire. En effet, il existe plusieurs textes qui imposent de statuer dans un délai déterminé, comme pour les demandes de prises d'acte de rupture du contrat de travail. Toutefois, peu de conseils de prud'hommes arrivent à respecter ces divers délais imposés par la loi (19). Le gain de temps recherché par le législateur ne devrait alors pas être obtenu.

Par ailleurs, initialement, le projet de loi prévoyait que la formation restreinte du bureau de jugement pouvait renvoyer l'affaire devant la formation présidée par le juge départiteur s'il estimait que l'affaire ne relevait pas de la formation restreinte ou en cas de partage sur cette question. Les débats parlementaires ont, heureusement, permis de supprimer cette possibilité qui aurait pu rallonger inutilement la durée de la procédure. Si l'affaire est renvoyée devant la formation restreinte, celle-ci doit trancher le litige.

Enfin, ce renvoi devant la formation restreinte est une mesure d'administration judiciaire. Aucun recours n'est alors possible. Cependant, puisque l'accord des deux parties est nécessaire, la décision n'est pas véritablement discrétionnaire. Sans cet accord, des questions auraient pu se poser au regard du principe d'égalité devant la justice. La nécessité de cet accord invite également à se demander si cette faculté sera utilisée par les justiciables. Il est permis d'en douter puisque recourir à la formation restreinte du bureau de jugement ne paraît présenter qu'un intérêt limité pour les parties.

21. Le possible renvoi direct devant la formation présidée par le juge départiteur. Dans le cadre des pouvoirs d'orientation de l'affaire, la loi analysée offre une autre possibilité, fort discutée, au BCO (20). En cas d'échec de la conciliation, les deux conseillers peuvent renvoyer directement l'affaire devant la formation présidée par le juge départiteur. Cette faculté est offerte dans deux hypothèses. Soit, les parties le demandent au BCO, soit ce dernier le décide d'office, si la "nature du litige le justifie". De plus, à la différence du renvoi devant cette formation en cas de partage des voix, le juge départiteur ne peut pas statuer seul si des conseillers prud'hommes sont absents. Plusieurs remarques doivent être faites.

En premier lieu, il y a un changement de perspective sur l'intervention du magistrat professionnel pour juger les affaires. Traditionnellement, le juge départiteur intervient en cas de partage des voix des conseillers prud'hommes (21). L'intervention du juge départiteur est alors subie lorsque les conseillers prud'hommes n'arrivent pas à se mettre d'accord pour la solution du litige. Pour sortir de cette logique de conflit, le rapport "Lacabarats" a proposé une intervention voulue du magistrat professionnel. Cette possibilité est offerte rapidement aux conseillers prud'hommes pour éviter un rallongement excessif de la durée de la procédure (22). Cette intervention voulue du magistrat professionnel peut constituer une véritable révolution culturelle. Néanmoins, techniquement, il ne s'agit plus d'un départage, car il y a un accord des conseillers prud'hommes pour ce renvoi. En réalité, cette faculté constitue une introduction de l'échevinage dans le conseil de prud'hommes (23). D'ailleurs, les pouvoirs publics ne s'en cachent pas. Il semble s'agir d'une expérimentation pour voir si les justiciables vont préférer cette formation pour trancher leur litige (24). Or, la question de l'échevinage est une question particulièrement passionnée, qui mérite des débats en profondeur pour déterminer s'il est souhaitable de l'instaurer devant les juridictions prud'homales, y compris en appel (25). Elle nécessite une discussion avec les partenaires sociaux et tous les acteurs de la justice prud'homale pour vérifier qu'il s'agit d'une solution susceptible d'améliorer effectivement la qualité du service rendu aux justiciables (26).

En deuxième lieu, deux dispositions très critiquables du projet de loi ont été retirées. D'un côté, il était prévu que le renvoi devant la formation présidée par le magistrat professionnel soit de droit s'il était demandé par les parties. D'un autre côté, il était également précisé que le litige serait transmis à cette formation en cas de désaccord entre les membres du BCO. Dans ces deux hypothèses, il n'y aurait plus eu de concertation entre les conseillers prud'hommes pour décider de renvoi. Ceci ne correspondait pas à la philosophie de la proposition. En outre, il existait un risque important de stratégies pouvant aboutir au contournement du bureau de jugement (27). Désormais, si les membres du BCO sont en désaccord, le litige est jugé par le bureau de jugement dans sa formation traditionnelle (28).

En dernier lieu, il existe un risque d'inconstitutionnalité de cette disposition. Originairement, ce renvoi direct à la formation présidée par le magistrat professionnel devait se limiter aux affaires sérielles et aux litiges posant des questions de droit nouvelles (29). Cependant, le législateur a préféré retenir le critère de la nature du litige. Or, ce critère très flou soulève des difficultés au regard du principe d'égalité devant la justice (30). Certes, ce principe n'interdit pas une diversification des juridictions en fonction de la nature des litiges. Il est respecté lorsque toutes les personnes placées dans la même situation relèvent de la même juridiction (31). En revanche, il faut se demander si ce principe impose également une composition identique de la formation de jugement au sein de la juridiction compétente. Cette question s'est déjà posée dans le cadre du débat de la répartition des affaires entre le juge unique et la formation collégiale (32). Or, en matière de procédure pénale, il a été jugé que la loi méconnaît le principe d'égalité devant la justice, inclus dans le principe d'égalité devant la loi, lorsque la répartition des affaires entre la formation collégiale et le juge unique dépend de la décision du juge (33). Inversement, ce principe est respecté lorsque la répartition des affaires est effectuée par le pouvoir législatif ou réglementaire en fonction de critères objectifs. Ceci a été admis aussi bien pour la procédure pénale (34) que le contentieux administratif (35). Un raisonnement par analogie semble possible. Le choix de renvoyer l'affaire devant la formation présidée par le juge départiteur est une mesure d'administration judiciaire c'est-à-dire une décision non susceptible de recours (36). Or, si le renvoi direct est décidé d'office par les juges du BCO en fonction de la nature de l'affaire, il est possible que des personnes situées dans des situations semblables ne soient pas jugées par des juridictions composées de manière identique. Il existe alors un risque d'atteinte au principe d'égalité devant la justice.

22. Un renvoi global de l'affaire. Le choix effectué par le BCO est important puisqu'il implique un renvoi global du litige. En effet, il est indiqué que "la formation saisie connaît de l'ensemble des demandes des parties, y compris des demandes additionnelles ou reconventionnelles". Dès lors, quelle que soit la formation désignée par le BCO, elle devra trancher l'entier litige. Cette disposition est à mettre en perspective avec la règle de l'unicité de l'instance et la recevabilité des demandes nouvelles dans la procédure prud'homale (37). Les parties devront former toutes leurs demandes liées au même contrat de travail devant la formation désignée. Il ne pourra pas y avoir de répartition du litige entre différentes formations du conseil de prud'hommes. Ce choix est celui de la cohérence. Pour autant, il amplifie la possibilité d'évitement du bureau de jugement du conseil de prud'hommes.

23. Des précisions minimales sur la mise en état. Traditionnellement, le BCO ne devrait renvoyer l'affaire que si elle est en état d'être jugée (38). Il dispose également du pouvoir d'ordonner des mesures d'instruction (39). Il peut aussi fixer un calendrier d'échanges des pièces et notes des parties produites à l'appui de leurs prétentions (40). Le bureau de jugement et le BCO peuvent désigner des conseillers rapporteurs pour procéder à la mise en état de l'affaire (41). Concernant la mise en état, la loi "Macron" ne fait, pour l'essentiel, que reprendre des dispositions réglementaires existantes. En effet, elle précise que le BCO assure la mise en état des affaires (42). Si l'affaire n'est pas en l'état d'être jugée, la mise en état est effectuée par le bureau de jugement (43). Eventuellement, un ou deux conseillers rapporteurs peuvent être désignés pour procéder à la mise en état de l'affaire en prescrivant toute mesure nécessaire (44). Par ailleurs, le nouveau texte se contente d'un simple toilettage, pour l'adapter aux nouvelles dispositions concernant les renseignements et documents qui peuvent être demandés par le BCO à certains agents de l'administration (45). Ces précisions législatives ne sont pas en mesure de résoudre les difficultés liées à la durée des procédures (46). Il faut espérer que ce rappel législatif donnera conscience aux conseillers prud'hommes, spécialement ceux du BCO, qu'ils disposent des prérogatives pour mettre l'affaire en état d'être jugée. Il n'en demeure pas moins qu'il faut attendre les futures dispositions réglementaires pour savoir si des règles permettront d'améliorer la mise en état de l'affaire ainsi que les délais devant les juridictions prud'homales.

24. Le jugement de l'affaire par le bureau de conciliation et d'orientation. En principe, les parties ont l'obligation de comparaître personnellement devant le conseil de prud'hommes (47). Ceci s'explique car la procédure est orale (48). Cette obligation de comparution personnelle des parties est également requise devant le BCO pour procéder à la tentative de conciliation. Cette présence est d'autant plus souhaitable qu'il est plus facile de trouver une solution amiable au litige si les parties sont présentes personnellement. Or, l'une des difficultés est le défaut de comparution des défendeurs (49). S'agissant des sanctions, si le demandeur ne comparaît pas sans motif légitime et qu'il n'est pas représenté, il s'expose à la caducité de la citation et de la demande (50). En revanche, pour le défendeur, la sanction prévue n'est pas dissuasive. Le défendeur s'expose simplement, dans le pire des cas, à l'exercice d'éventuelles mesures provisoires ou d'instruction avant que l'affaire soit renvoyée devant le bureau de jugement (51). Pour remédier à cette situation, la loi examinée dispose que : "si, sauf motif légitime, une partie ne comparaît pas, personnellement ou représentée, le bureau de conciliation et d'orientation peut juger l'affaire en l'état des pièces et moyens que la partie comparante a contradictoirement communiqués" (52). Si le BCO exerce cette faculté, il jugera l'affaire en tant que formation restreinte du bureau de jugement (53). Cette nouvelle disposition appelle quelques remarques.

D'abord, elle permet de faire peser une menace sur le défendeur s'il ne fait l'effort ni de comparaître personnellement, ni d'être représenté en justifiant d'un motif légitime d'absence. Comme en droit commun procédural, le défendeur s'expose à être jugé au regard des seuls éléments fournis contradictoirement par le demandeur. Ceci n'implique pas que le juge accueille nécessairement les demandes, puisqu'il doit vérifier que les demandes sont régulières, recevables et bien fondées (54).

Ensuite, ce nouveau texte incite le demandeur à communiquer ses pièces avant la première audience devant le BCO, dans la perspective du jugement de l'affaire par celui-ci. Inversement, puisque le BCO ne tranche le litige qu'au regard des pièces communiquées par le demandeur, le défendeur n'est toujours pas sanctionné s'il ne communique pas ses pièces à l'avance. Pourtant, cette communication préalable des pièces par les deux parties est importante pour faciliter le travail du BCO, spécialement pour trouver une solution amiable au litige.

Enfin, ce nouveau texte soulève des interrogations. Le jugement immédiat de l'affaire n'est qu'une faculté offerte au BCO. En l'absence de précisions dans le texte, il existe donc un risque d'un partage de voix sur cette question. L'affaire serait alors renvoyée à la formation de départage. Celle-ci jugera-t-elle l'affaire ? Ce qui implique encore un évitement du bureau de jugement, ou, au contraire, la formation de départage se contentera-t-elle de se prononcer sur la seule question de la possibilité pour le BCO de juger lui-même l'affaire ? Dans cette hypothèse, le temps perdu se ferait au détriment du délai raisonnable, qui est l'un des objectifs principaux de la réforme. Par ailleurs, le BCO doit vérifier que les pièces ont été communiquées contradictoirement par le demandeur. Si tel n'est pas le cas, la seule possibilité semble être un renvoi de l'affaire à une prochaine audience. Que se passera-t-il si le défendeur y comparaît ? Le BCO jugera-t-il l'affaire ou procédera-t-il à la tentative de conciliation ?

II - La recherche de solutions amiables avant la saisine du juge

25. L'extension critiquable de la médiation conventionnelle. Le Code de procédure civile définit la médiation conventionnelle comme un processus structuré par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord, en dehors de toute procédure judiciaire, en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l'aide d'un tiers choisi par elles (55). Il s'agit d'une procédure confidentielle (56) disposant d'un encadrement minimum (57). La procédure de médiation est essentiellement fixée par les clauses de médiation contenues dans le contrat. Or, ces clauses aménagent le droit d'agir en justice car les parties y renoncent temporairement (58). En effet, le non-respect de ces clauses est sanctionné par une fin de non-recevoir qui entraîne l'irrecevabilité des demandes si une partie saisit le juge avant de mettre en oeuvre la clause de médiation conventionnelle (59). Pour éviter une restriction excessive du droit au juge, il est prévu que la mise en oeuvre d'une médiation conventionnelle suspend le cours de la prescription (60). Toutefois, la matière prud'homale était exclue du domaine de la médiation conventionnelle. Récemment, la Cour de cassation l'a rappelé (61). Les réserves émises contre les clauses de médiation conventionnelle dans un contrat de travail peuvent s'expliquer, comme en droit de la consommation, par le déséquilibre entre les parties. De plus, le contrat de travail étant souvent rédigé par l'employeur, il est possible que le consentement du salarié, pour renoncer temporairement à son droit au juge, ne soit ni libre ni éclairé. Néanmoins, la loi "Macron" a choisi d'étendre la médiation conventionnelle à tous les contrats de travail (62).

26. Les interrogations soulevées par l'extension de la convention de procédure participative. Dans le cadre d'une convention de procédure participative, "les parties à un différend qui n'a pas encore donné lieu à la saisine d'un juge [...] s'engagent à oeuvrer conjointement et de bonne foi à la résolution amiable de leur différend" (63). Cette convention est conclue pour une durée déterminée. Les parties doivent également indiquer l'objet du différend, les pièces et informations nécessaires à la résolution du différend ainsi que les modalités de leur échange (64). Dès lors, la convention de procédure participative est nécessairement conclue après la naissance du différend qui oppose les parties. Là encore, les parties renoncent temporairement à leur droit au juge puisque, en principe, elle rend irrecevable tout recours au juge tant qu'elle est en cours (65). Pour éviter toute difficulté, le délai de prescription est suspendu à compter de la conclusion d'une convention de procédure participative (66). Néanmoins, auparavant, il était interdit de conclure une telle convention pour les différends s'élevant à l'occasion de tout contrat de travail (67). Ce traitement différencié du contrat de travail a pu être discuté, aux motifs que la présence des avocats aux côtés des parties permet de garantir l'égalité des armes (68). En effet, le consentement des parties est ici mieux garanti, puisqu'elles sont assistées de leurs avocats au moment de la signature de la convention.

La loi "Macron" a abrogé le second alinéa de l'article 2064 du Code civil (N° Lexbase : L9824IN8) qui excluait les litiges individuels du travail du domaine de la convention de procédure participative. Cette évolution est-elle positive ? D'un autre côté, il peut être envisagé que l'apport est minime puisque les parties, assistées d'un avocat ou d'un défenseur syndical, ont l'habitude de chercher une solution amiable même si le juge prud'homal est saisi. Par ailleurs, il peut être avancé qu'il y a une nouvelle remise en cause de l'office du BCO. En effet, en l'absence d'accord au terme de la convention, si les parties soumettent leur litige au juge, elles sont dispensées de la conciliation prévue (69). Ceci pourrait être perçu comme une étrange façon de renforcer la place du BCO. D'un autre côté, il peut être soutenu que la convention de procédure participative permet d'organiser la phase de négociation entre les parties. De plus, l'organisation de l'échange des pièces permet d'améliorer la connaissance des parties sur le litige. Ceci est aussi un moyen d'effectuer une pré-mise en état de l'affaire (70) qui devrait permettre de faire gagner du temps si les parties ne parviennent pas à un accord total (71).

Se pose alors une première question pour la matière prud'homale. Est-ce le BCO qui devra s'assurer que l'affaire est en état d'être jugée ? En effet, même s'il n'aura pas à procéder à la tentative de conciliation obligatoire, ses autres missions restent d'actualité. Ainsi, c'est lui qui est censé renvoyé l'affaire devant le bureau de jugement s'il estime l'affaire en l'état d'être jugée (72). En outre, il peut aussi décider de renvoyer l'affaire devant la formation restreinte ou devant celle présidée par le juge départiteur (73). Si cette solution est retenue, le gain de temps pour les justiciables paraît illusoire. Inversement, il pourrait être envisagé que l'affaire soit directement portée devant le bureau de jugement. Toutefois, si le litige n'est pas en l'état d'être jugé, la situation devant le bureau de jugement risque de ne pas être meilleure qu'actuellement, concernant la durée des procédures au cours de cette étape.

Par ailleurs, une lecture des textes relatifs à la convention de procédure participative soulève une réserve. Le législateur s'est contenté de supprimer un alinéa du Code civil, sans chercher à adapter la convention de procédure participative aux spécificités de la procédure prud'homale. Or, les avocats disposent d'un monopole pour mener ce mode amiable de résolution des conflits (74). En conséquence, les défenseurs syndicaux ne peuvent pas assister les parties au cours d'une procédure participative. Ceci risque d'accroître le déclin de l'assistance des parties par un défenseur syndical. En 2012, il n'y avait plus que 16 % des justiciables qui étaient assistés par un défenseur syndical (75).

III - L'extension de la saisine pour avis

27. L'extension de la saisine pour avis, pour les questions d'interprétation d'une convention ou d'un accord collectif. Actuellement, lorsqu'il existe une difficulté sur l'interprétation d'une convention ou d'un accord collectif, certaines institutions peuvent émettre un avis sur l'interprétation à donner. Tel est le cas de la Commission nationale de la négociation collective (76). Les partenaires sociaux peuvent également décider d'instaurer une commission paritaire d'interprétation (77). Il n'en demeure pas moins que des juges du fond peuvent être confrontés à une question d'interprétation d'une convention ou d'un accord collectif. Il y a alors un risque de décisions contradictoires. Cette question existe également pour l'interprétation d'autres normes, comme la loi. L'un des moyens d'y remédier est d'utiliser la demande d'avis à la Cour de cassation. Il a donc été proposé de l'étendre pour les questions d'interprétation d'une convention ou d'un accord collectif (78). La loi "Macron" a suivi cette recommandation (79). Désormais, toutes les juridictions de l'ordre judiciaire peuvent solliciter l'avis de la Cour de cassation avant de statuer sur l'interprétation d'une convention ou d'un accord collectif. Comme pour les questions de droit nouvelles, il faut que l'interprétation sollicitée soulève une difficulté sérieuse et se posant dans de nombreux litiges. Ceci limite le domaine de l'avis (80).

Cette évolution peut être positive. Néanmoins, quelques questions pratiques pourront surgir. Comment concilier l'interprétation retenue par un avis de la Cour de cassation et celle prévue par une commission paritaire d'interprétation ? Il est donc possible d'être confronté à une complexification de certains contentieux (81). Par ailleurs, est-il possible de solliciter un avis lorsque la Cour de cassation s'est déjà prononcée ? Cette question se pose puisque la demande d'avis ne se limite pas aux questions de droit nouvelles liées à l'interprétation d'une convention ou d'un accord collectif.

IV - Le juge potentiellement lié par les parties, concernant le nouveau référentiel pour les indemnités de licenciement

28. Un recours référentiel imposé au juge par les parties. La loi "Macron" prévoit que le juge peut fixer les indemnités de licenciement par la prise en considération d'un référentiel qui est présenté comme étant simplement indicatif (82). Cette disposition suscite plusieurs interrogations en droit substantiel, au regard des droits des parties (83). Elle implique également deux observations en droit processuel. D'abord, le nouveau texte précise que : "si les parties en font conjointement la demande, l'indemnité est fixée par la seule application de ce référentiel". En procédure civile, les parties peuvent imposer au juge le choix des règles applicables. Tel est le cas lorsqu'elles lui demandent de trancher le litige en amiable composition (84). Le juge est alors affranchi des règles de droit pour statuer en équité (85). Avec cette nouvelle disposition, l'application du référentiel devient obligatoire pour le juge prud'homal ce qui questionne sur son office. Il perd le pouvoir de trancher le litige pour la question de l'évaluation des indemnités de licenciement. Ensuite, cette nouveauté invite à s'interroger sur les incidences de la mise en oeuvre de ce référentiel lorsqu'un appel est interjeté sur le montant des indemnités de licenciement. Par exemple, le salarié peut-il solliciter des indemnités plus importantes, alors qu'il a donné son accord pour la mise en oeuvre de ce référentiel (86) ?

En définitive, l'analyse de la loi "Macron" montre une intention louable de faire évoluer la justice prud'homale. Cependant, la réforme étant incomplète, il est difficile d'apprécier sa cohérence globale. Pour le moment, les règles modifiées ou nouvelles ne sont pas en mesure de résoudre les difficultés rencontrées par les juridictions prud'homales. Il faut espérer que les nouvelles dispositions réglementaires seront connues prochainement.


(1) J. Foyer, "Préface", in Le Nouveau Code de Procédure Civile (1975-2005), J. Foyer et C. Puigelier (Sous Dir.), Economica, Collection Etudes Juridiques, 2006, p. 13 à 22., spéc. p. 14 et 15.
(2) Cons. constit, décision n° 82-143 DC du 30 juillet 1982 (N° Lexbase : A8045ACX).
(3) J. Gicquel et J.-E. Gicquel, Droit constitutionnel et institutions politiques, Montchrestien, 28ème éd., 2014, p. 711. Si la question lui avait été posée avant la promulgation de la loi, le Conseil constitutionnel aurait pu constater le caractère réglementaire des dispositions concernées. Voir Cons. const., décision n° 2005-512 DC du 21 avril 2005 (N° Lexbase : A9487DHT).
(4) C. trav., art. L. 1423-12 (N° Lexbase : L1916H9T) et L. 1423-13 (N° Lexbase : L1918H9W), modifiés.
(5) C. trav., art. R. 1454-14 (N° Lexbase : L0881IAU).
(6) C. trav., art. L. 1454-1, al. 1 (N° Lexbase : L5968KG7).
(7) L'article R. 1454-10 du Code du travail (N° Lexbase : L0891IAA) prévoit déjà que le "bureau de conciliation entend les explications des parties et s'efforce de les concilier".
(8) Etude d'impact du projet de loi pour la croissance et l'économie, tome 3, p. 22 et 31.
(9) D. Boulmier, Le volet prud'homal du projet de loi "Macron" : en "coup de force" mais sans "coup de jeune", Dr. soc., 2015, p. 430-441, spéc. p. 436.
(10) C. trav., art. R. 1454-8 (N° Lexbase : L7109IAK).
(11) L. Cadiet, J. Normand et S. Amrani-Mekki, Théorie générale du procès, PUF, Thémis, 2ème éd., 2013, p. 230.
(12) C. civ., art. 252-1 (N° Lexbase : L2812DZ8).
(13) C. trav., art. R. 1454-17 (N° Lexbase : L0387IBX).
(14) C. trav., art. L. 1454-1-1, 1°, nouveau (N° Lexbase : L5370KGY).
(15) C. trav., art. L. 1423-13, nouveau (N° Lexbase : L5969KG8).
(16) Sur ce débat, voir R. Perrot, Institutions judiciaires, Montchrestien, 15ème éd., 2012, préc., p. 385-392 ; S. Guinchard, G. Montagnier, A. Varinard, T. Debard, Institutions juridictionnelles, D., Précis, 12ème éd., 2013, p. 219-223.
(17) E. Serverin, Agir aux prud'hommes, hier et aujourd'hui, Dr. ouvr., 2014, n° 796, p. 699-706, spéc. p. 701-702.
(18) R. Perrot, Institutions judiciaires, préc., p. 388.
(19) D. Métin, Conciliation prud'homale et mise en état : osons une vraie réforme, SSL, 2014, n° 1653, p. 5-7, spéc. p. 6.
(20) C. trav., art. L. 1454-1-1, 2° (N° Lexbase : L5370KGY).
(21) C. trav., art. L. 1454-2 (N° Lexbase : L5958KGR).
(22) Rapport du groupe de travail présidé par Alain Lacabarats, L'avenir des juridictions du travail : vers un tribunal prud'homal du XXIème siècle, remis à Madame la Garde des sceaux, ministre de la Justice, juillet 2014, p. 71.
(23) D. Boulmier, Le volet prud'homal du projet de loi "Macron" : en "coup de force" mais sans "coup de jeune", préc., spéc. p. 437-438 ; F. Guiomard et M. Grévy, "Réforme" de la juridiction prud'homale : du rapport "Lacabarats" au projet de loi "Macron", RDT, 2015, p. 58-63, spéc. p. 62.
(24) Etude d'impact du projet de loi pour la croissance et l'économie, préc., p. 38.
(25) V. Orif, La règle de l'unicité de l'instance, Coll. "Bibliothèque de droit social", tome 56, LGDJ, 2012, préface de S. Amrani-Mekki, p. 526-533. La généralisation de l'échevinage, y compris en appel, a été proposée par le rapport "Marshall". Voir le rapport du groupe de travail présidé par Didier Marshall, Les juridictions du XXIème siècle, remis à Madame la Garde des sceaux, ministre de la Justice en décembre 2013, p. 41, 48, 54 et 71.
(26) K. Yazidi et C. Darmaillacq, Le traitement des litiges en droit du travail : constats et perspectives économiques, Trésor-Eco, octobre 2014, n° 137, p. 9.
(27) P. Henriot, Du rapport "Lacabarats" au projet de loi "Macron" : comment neutraliser la prud'homie, SSL, 2014, n° 1653, p. 3-5, spéc. p. 4.
(28) Il en va de même si les conseillers du bureau de conciliation ne sont pas d'accord pour renvoyer l'affaire devant la formation restreinte du bureau de jugement. Sur ce renvoi, voir supra, n° 20.
(29) Rapport du groupe de travail présidé par Alain Lacabarats, L'avenir des juridictions du travail : vers un tribunal prud'homal du XXIème siècle, p. 71.
(30) Questions-Réponses sur les dispositions du projet de loi "Macron" sur la Justice prud'homale, préc., spéc. p. 4.
(31) R. Perrot, Institutions judiciaires, préc., p. 69-72.
(32) F. Kernaleguen, Institutions judiciaires, LexisNexis, 5ème éd., 2012, p. 64-65.
(33) Cons. const., décision n° 75-56 DC du 23 juillet 1975 (N° Lexbase : A7914AC4).
(34) Cons. const., décision n° 2009-590 DC du 22 octobre 2009 (N° Lexbase : A2401EMU).
(35) Cons. const., décision n° 2010-54 QPC du 14 octobre 2010 (N° Lexbase : A7698GBQ).
(36) C. pr. civ., art. 537 (N° Lexbase : L6687H7S).
(37) C. trav., art. R. 1452-6 (N° Lexbase : L0932IAR) et R. 1452-7 (N° Lexbase : L0929IAN).
(38) C. trav., art. R. 1454-17 (N° Lexbase : L0387IBX).
(39) C. trav., art. R. 1454-14 (N° Lexbase : L0881IAU).
(40) C. trav., art. R. 1454-18 (N° Lexbase : L0869IAG).
(41) C. trav., art. L. 1454-1, ancien (N° Lexbase : L9982IQR) et C. trav., art. R. 1454-1 (N° Lexbase : L0915IA7) à R. 1454-6.
(42) C. trav., art. L. 1454-1-2, al. 1, nouveau (N° Lexbase : L5371KGZ).
(43) C. trav. art. L. 1454-1-2, al. 2, nouveau, préc..
(44) C. trav., art. L. 1454-1-2, al. 3, nouveau, préc..
(45) C. trav., art. L. 1454-1-2, al. 4, nouveau, préc..
(46) Ces difficultés sont très souvent dénoncées, tant par les praticiens que la doctrine. Voir, par exemple, D. Boulmier, Le juge technique et départiteur prud'homal : un statut intégré, d'appui technique et de départage, in S. Hunter-Flack et D. Boulmier, Quel statut pour le juge départiteur ?, RDT, 2015, p. 10-16, spéc. p. 15 ; J.-L. Cioffi, Libres propos sur le juge départiteur, Dr. soc., 2014, p. 161-164, spéc., p. 164 ; A. Supiot, L'impossible réforme des juridictions sociales, Revue française des affaires sociales, 1993, n° 1, p. 97-117, spéc. p. 107 ; C. Vigneau, L'inéquitable procès prud'homal, RJS, 2013, n° 6, p. 363-368, spéc. p. 365-366.
(47) C. trav., art. R. 1453-1 (N° Lexbase : L0925IAI).
(48) C. trav., art. R. 1453-3 (N° Lexbase : L0919IAB).
(49) J. Tesson, L'obligation de tenter la conciliation, in Prud'hommes : les défis de demain, Action juridique, n° 221, p. 78-83, spéc. p. 80.
(50) C. trav., art. R. 1454-12 (N° Lexbase : L0399IBE).
(51) C. trav., art. R. 1454-13 (N° Lexbase : L0474IB8).
(52) C. trav., art. L. 1454-1-3, al. 1, nouveau (N° Lexbase : L5372KG3).
(53) C. trav.. art. L. 1454-1-3, al. 2, nouveau, préc..
(54) C. pr. civ., art. 472 (N° Lexbase : L6584H7Y).
(55) C. pr. civ., art. 1530 (N° Lexbase : L8345IRI).
(56) C. pr. civ., art. 1531 (N° Lexbase : L8346IRK).
(57) C. pr. civ., art. 1532 (N° Lexbase : L8347IRL) à 1535.
(58) Pour une présentation de la médiation conventionnelle, voir, par exemple, S. Amrani-Mekki et Y. Strickler, Procédure civile, PUF, Thémis, 2014, p. 265-272.
(59) Cass. mixte, 14 février 2003, n° 00-19.423, P (N° Lexbase : A1830A7W) ; Bull. chbre. mixte n° 1.
(60) C. civ., art. 2238 (N° Lexbase : L2011KGL).
(61) Cass. soc., 5 décembre 2012, n° 11-20.004, FP-P+B+R (N° Lexbase : A5778IYN) ; Bull. civ. V, n° 326. Pour une présentation rapide des questions soulevées par les clauses de médiation conventionnelle dans le contrat de travail, voir S. Amrani-Mekki et Y. Strickler, Procédure civile, préc., p. 268-269 et p. 305-308.
(62) La loi abroge l'article 24 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995, relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative (N° Lexbase : L1139ATD), qui limitait le domaine de la médiation conventionnelle aux seuls contrats de travail transfrontaliers.
(63) C. civ., art. 2062, al. 1 (N° Lexbase : L9826INA). La convention de procédure participative est régie par les articles 2062 à 2068 du Code civil ainsi que par les articles 1542 (N° Lexbase : L8357IRX) à 1567 du Code de procédure civile.
(64) C. civ., art. 2062 al. 2, préc., et art. 2063 (N° Lexbase : L9825IN9).
(65) C. civ., art. 2065 (N° Lexbase : L9823IN7).
(66) C. civ., art. 2238, al. 2 (N° Lexbase : L2011KGL).
(67) C. civ., art. 2064, al. 2 (N° Lexbase : L5982KGN).
(68) S. Amrani-Mekki et Y. Strickler, Procédure civile, PUF, Thémis, 2014, p. 276.
(69) C. civ., art. 2066, al. 2 (N° Lexbase : L5981KGM).
(70) L'article 1545, alinéa 2 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L8360IR3) énonce que "la communication des écritures et pièces entre les parties se fait par l'intermédiaire de leurs avocats selon les modalités prévues par la convention ; ceux-ci les portent à la connaissance des intéressés par tous moyens appropriés. Un bordereau est établi lorsqu'une pièce est communiquée".
(71) S. Amrani-Mekki et Y. Strickler, Procédure civile, préc., p. 273-280, spéc. p. 280.
(72) C. trav., art. R. 1454-17 (N° Lexbase : L0387IBX).
(73) Voir supra nos 20-21.
(74) L'article 4, alinéa 3 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ) dispose que "nul ne peut, s'il n'est avocat, assister une partie dans une procédure participative prévue par le Code civil".
(75) Sur ce déclin, voir A. Supiot, L'impossible réforme des juridictions sociales, préc., spéc. p. 104 ; E. Serverin, Agir aux prud'hommes, hier et aujourd'hui, préc., spéc. p. 700.
(76) C. trav., art. L. 2271-1, 4° (N° Lexbase : L0787IC7).
(77) Voir par exemple, accord du 16 décembre 2009, relatif à la commission paritaire d'interprétation, de conciliation et de validation, pris en application de la Convention collective de l'édition phonographique (N° Lexbase : X2076AK4).
(78) Rapport du groupe de travail présidé par Alain Lacabarats, L'avenir des juridictions du travail : vers un tribunal prud'homal du XXIème siècle, p. 58.
(79) C. org. jud., art. L. 441-1, modifié (N° Lexbase : L5980KGL).
(80) Initialement, le projet de loi ne permettait qu'à certaines juridictions de demander un avis à la Cour de cassation. Il s'agissait du conseil de prud'hommes, du tribunal d'instance et de la cour d'appel statuant en matière prud'homale. Le TGI se trouvait exclu de manière surprenante, alors qu'il peut être confronté à une question d'interprétation d'une convention ou d'un accord collectif à l'occasion d'un litige collectif du travail.
(81) F. Guiomard et M. Grévy, "Réforme" de la juridiction prud'homale : du rapport "Lacabarats" au projet de loi "Macron", préc. p. 69.
(82) C. trav., art. L. 1235-1, modifié (N° Lexbase : L5974KGD).
(83) Sur ces questions, voir A. Fabre, Loi "Macron" : barème référentiel, grille - l'indemnisation des licenciements injustifiés en quête de prévisibilité, Lexbase Hebdo n° 623 du 3 septembre 2015 - éditions sociales (N° Lexbase : N8672BUQ).
(84) C. pr. civ., art. 12, al. 4 (N° Lexbase : L1127H4I).
(85) L. Cadiet et E. Jeuland, Droit judiciaire privé, LexisNexis, 8ème éd., 2013, p. 437-438.
(86) D. Boulmier, Le volet prud'homal du projet de loi "Macron" : en "coup de force" mais sans "coup de jeune", spéc. p. 439.

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Procédure prud'homale

[Textes] Loi "Macron" : barème, référentiel, grille - l'indemnisation des licenciements injustifiés en quête de prévisibilité

Réf. : Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC) ; Cons. const., décision n° 2015-715 DC, du 5 août 2015 (N° Lexbase : A1083NNG)

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N8672BUQ

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par Alexandre Fabre, Professeur à l'Université d'Artois, faculté de droit de Douai

Le 07 Septembre 2015

Depuis plusieurs décennies, la France est malade de son chômage. Différents traitement ont été administrés, mais rien n'y fait ; le mal persiste. Dans le scepticisme général, une nouvelle catégorie d'experts pense avoir trouvé la solution : et si les problèmes d'emploi trouvaient leur cause dans le droit du travail lui-même ? Trop rigide, trop complexe, trop imprévisible, trop coûteux, il dissuaderait les employeurs d'embaucher. Le droit du travail ressemblerait à ce médicament que l'on cesse de prescrire parce que ses effets indésirables sont plus importants que les gains escomptés sur la santé du patient. Un tel diagnostic n'est pas nouveau. Ce qui l'est, en revanche, c'est qu'il gagne désormais le camp d'en face. Pour filer la métaphore médicale, c'est comme si les tenants les plus convaincus des bienfaits d'un vaccin venaient aujourd'hui à douter de son intérêt, voire à décommander son usage. Avec ici des hommes et des femmes politiques de gauche dans le rôle des "convertis".
Dans les réformes récentes, c'est sans doute le volet prud'homal de la loi "Macron" du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC) qui incarne le mieux cette doxa anti-droit du travail (1). Le législateur se veut (se croit ?) psychologue ; il entend lutter contre la peur de licencier, qui serait le moteur d'une autre peur, celle d'embaucher. Afin d'améliorer la prévisibilité des dommages-intérêts dus en cas de licenciement injustifié (et ainsi réduire leur "volatilité" (2) qui constituerait un important frein à l'embauche), deux dispositions ont été successivement introduites au cours des débats parlementaires. Il a d'abord été prévu de créer un référentiel indicatif à destination du juge et des parties (I). Puis, quelques semaines plus tard, un pas de plus a été franchi avec l'instauration d'une grille de planchers et de plafonds impératifs d'indemnisation (II). Des deux dispositions, seule la première devrait trouver à s'appliquer, la seconde ayant été censurée par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2015-715 DC du 5 août 2015 (N° Lexbase : A1083NNG).
I - Le référentiel indicatif de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Introduite par un amendement gouvernemental (n° 3290) lors de la discussion du projet de loi devant l'Assemblée nationale, la disposition prévue à l'article 258, I, 4° de la loi se situe dans le prolongement de celle ayant institué, deux ans plus tôt, un barème d'indemnisation au stade de la conciliation. Si l'idée est bien, dans les deux cas, d'harmoniser le montant des dommages-intérêts, les deux dispositifs ne se confondent pas complètement. Aussi, pour mieux cerner l'originalité du référentiel (B), il n'est sans doute pas inutile de commencer par rappeler les règles relatives au barème (A).

A - Le précédent : le barème du bureau de conciliation

Pour faciliter les accords de conciliation, l'ANI du 11 janvier 2013 (N° Lexbase : L9638IUI) a prévu que leur conclusion devait donner lieu, en contrepartie, au versement d'une indemnité forfaitaire fixée par barème (art. 25). Ce dispositif a été transposé par la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 (N° Lexbase : L0394IXU) à l'article L. 1235-1, al. 1 et 2, du Code du travail (N° Lexbase : L0733IXG) (3).

C. trav., art. L. 1235-1, al. 1 et 2, tel que modifié par la loi de sécurisation de l'emploi (LSE) du 14 juin 2013 : le barème

En cas de litige, lors de la conciliation prévue à l'article L. 1411-1 du Code du travail (N° Lexbase : L1878H9G), l'employeur et le salarié peuvent convenir ou le bureau de conciliation proposer d'y mettre un terme par accord. Cet accord prévoit le versement par l'employeur au salarié d'une indemnité forfaitaire dont le montant est déterminé, sans préjudice des indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles, en référence à un barème fixé par décret en fonction de l'ancienneté du salarié.

Le procès-verbal constatant l'accord vaut renonciation des parties à toutes réclamations et indemnités relatives à la rupture du contrat de travail prévues au présent chapitre.

Plusieurs éléments caractérisent ce barème d'indemnisation. D'abord, il ne joue qu'au stade de la conciliation prud'homale et suppose la conclusion d'un accord du même nom. Ensuite, les montants adoptés par les partenaires sociaux, lesquels ont été scrupuleusement repris par le pouvoir réglementaire (C. trav., D. 1235-21 N° Lexbase : L6720IX8 ; décret n° 2013-721 du 2 août 2013 N° Lexbase : L6611IX7), sont forfaitaires et dépendent uniquement de l'ancienneté des salariés. L'indemnité de conciliation est donc progressive : elle va de deux mois de salaire pour moins de deux ans d'ancienneté à quatorze mois de salaire au-delà de vingt-cinq ans d'ancienneté. Enfin, le barème s'applique quels que soient les manquements possibles de l'employeur : irrégularité de procédure, absence de justification, licenciement discriminatoire, atteinte à la dignité, violation des droits fondamentaux. Autrement dit, tous les licenciements se valent (4).

Ce dispositif est fortement critiqué. Pour de nombreux observateurs, les montants choisis sont trop bas pour constituer une base équilibrée de négociation, certains n'hésitant pas à condamner cette indemnisation "au rabais" au motif qu'elle favoriserait "un alignement par le bas" (5). La rigidité du système est également dénoncée. Les parties ne semblent pas pouvoir concilier en dehors du barème, qui présente les traits d'un tarif imposé (6). Quant aux conseillers prud'homaux, leur office en matière de conciliation parait nul (7). Avec un tel barème, il est en effet à craindre qu'ils ne jouent plus un rôle actif en vérifiant que les parties connaissent leurs droits respectifs, comme ils devraient le faire en principe selon la Cour de cassation (8).

Pour autant, les dangers du barème ne doivent pas être surestimés. A dire vrai, ils sont plus symboliques que réels. Car si cette réforme a introduit l'idée que l'indemnisation des licenciements peut faire l'objet d'une tarification, sa mise en oeuvre reste limitée à la phase de conciliation et conditionnée par la conclusion d'un accord entre les parties. C'est précisément ces limites que la loi "Macron" vient ôter en instaurant un référentiel indicatif au stade, cette fois, du bureau de jugement.

B - La nouveauté : le référentiel du bureau de jugement

Alors que le projet de loi initial ne comportait pas de dispositions à ce propos, un amendement gouvernemental a été déposé le 14 février 2015 pour mettre en place un référentiel indicatif relatif au montant des dommages-intérêts dus en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse (9). Ce nouveau dispositif figure désormais à l'article L. 1235-1, alinéas 5 à 7, du Code du travail (10).

C. trav., art. L. 1235-1, al. 5 à 7 du Code du travail tel que modifié par la loi "Macron" du 6 août 2015 : le référentiel indicatif

Le juge peut prendre en compte un référentiel indicatif établi, après avis du Conseil supérieur de la prud'homie, selon les modalités prévues par décret en Conseil d'État.

Ce référentiel fixe le montant de l'indemnité susceptible d'être allouée, en fonction notamment de l'ancienneté, de l'âge et de la situation du demandeur par rapport à l'emploi, sans préjudice des indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles.

Si les parties en font conjointement la demande, l'indemnité est fixée par la seule application de ce référentiel.

Selon le ministre de l'Economie, le référentiel partage la même philosophie que le barème créé en 2013 : il s'agit de "donner toutes les chances aux parties de trouver plus facilement un accord" (11). Cela étant, le nouveau dispositif ne se confond pas avec son prédécesseur. Déjà -pour le Gouvernement, c'est une différence de taille-, il s'agit d'un référentiel et non d'un barème ; il n'est donc prévu aucune indemnisation forfaitaire. Sa source est également différente. Tandis que le second a été négocié par les partenaires sociaux, le premier sera établi après avis du Conseil de la prud'homie par décret en Conseil d'Etat. Ce processus devrait permettre au référentiel d'être élaboré à partir d'un certain nombre de données pratiques : décisions de justice, procès-verbaux de conciliation, accords transactionnels (12). De plus, la démarche n'est pas la même. Le barème est rigide : il établit une correspondance entre des durées d'ancienneté et des montants de dommages-intérêts. Le référentiel, quant à lui, est plus souple : il devrait permettre une indemnisation personnalisée en intégrant d'autres critères que l'ancienneté du salarié, "notamment l'âge et la situation du demandeur par rapport à l'emploi". Autre élément distinctif, le référentiel ne joue que devant le bureau de jugement pour déterminer les dommages-intérêts dus en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Son spectre est donc beaucoup plus étroit que le barème qui, lui, fixe l'indemnité versée au salarié peu important que son licenciement soit potentiellement injustifié, irrégulier ou nul. Dernière différence, le référentiel s'adresse plus aux juges qu'aux parties. Ce n'est que lorsque l'employeur et le salarié en demandent l'application exclusive que le barème s'impose. En l'absence d'un tel accord, le juge est entièrement libre de s'y référer ou non.

Il reste que, même facultative, la mise à disposition d'un référentiel, autrement dit d'un "ensemble auquel doivent appartenir tous les éléments, les solutions d'un problème posé" (Larousse), devrait progressivement orienter, guider, influencer les juges dans leur prise de décision. C'est d'ailleurs l'un des objectifs avoués de la réforme. Selon l'un des rapporteurs thématiques à l'Assemblée nationale, le référentiel "servira aux juridictions à harmoniser leurs décisions et constitue en cela une aide à l'égalité de traitement des justiciables" (13). Il s'agit donc d'une méthode douce : l'ambition est d'amener progressivement les conseils de prud'hommes à faire converger leurs indemnisations, sans les forcer, juste en leur donnant quelques indications chiffrées associées à certains critères. C'est là cependant que réside le principal défaut du système. Si l'idée est d'améliorer la prévisibilité du coût des licenciements sans cause réelle et sérieuse en évitant de trop grandes disparités, comment être sûr du résultat si les juges peuvent faire comme bon leur semble. Pour atteindre le résultat escompté, il faut nécessairement "aller plus loin" (14) en encadrant plus strictement les indemnisations allouées. Aussi, avec du recul, on peut se demander si l'objectif de cette réforme n'était pas au fond de préparer les esprits au changement plus radical proposé quelques mois plus tard consistant dans la mise en place d'une grille d'indemnisation obligatoire (15).

II - La grille impérative de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

La mesure trouve son origine dans le plan "Tout pour l'emploi dans les TPE et PME" présenté par le Premier ministre le 9 juin 2015 (16). Le mot d'ordre est cette fois clairement explicite : il faut lever l'incertitude liée au contentieux des licenciements. Comment ? En imposant, comme en Italie (17), des planchers et des plafonds d'indemnisation pour les licenciements injustifiés (A). Ce système a toutefois été censuré par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2015-715 DC du 5 août 2015 (B).

A - Le système envisagé

Des minima et maxima d'indemnisation en fonction de l'ancienneté du salarié et des effectifs de l'entreprise. La grille est issue d'un amendement gouvernemental présenté à la commission spéciale le 11 juin 2015. Elle a sensiblement évolué à la faveur de plusieurs amendements déposés par le rapporteur thématique, Denys Robiliard. Dans sa forme définitive (codifiée à l'article 266 de la loi), elle comprenait deux entrées principales, elles-mêmes subdivisées en trois niveaux : l'ancienneté du salarié (moins de deux ans, de deux à moins de dix ans et dix ans et plus) et l'effectif de l'entreprise (moins de vingt, entre vingt et deux cent quatre-vingt-dix-neuf et à partir de trois cents). Prenant le risque de créer une complexité bien inutile, le législateur avait toutefois maintenu les deux anciens seuils (salarié de moins de deux ans d'ancienneté et entreprise de moins de onze) relativement à l'indemnisation des irrégularités de procédure et au remboursement des allocations de l'assurance chômage (l'article L. 1235-5 du Code du travail N° Lexbase : L1347H9R restant inchangé). Ce sont donc deux séries de seuils qu'il allait donc falloir combiner selon la nature de l'indemnité en cause. Si l'objectif était d'aider les entreprises à y voir plus clair, il était loin d'être atteint de cette façon.

Autre innovation, de loin la plus importante : alors que jusque-là la seule limite venait de l'existence d'un plancher (correspondant aux six derniers mois de salaire) au profit des salariés ayant au moins deux ans d'ancienneté dans les entreprises de onze salariés et plus, il était désormais prévu d'encadrer plus strictement l'indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse en fixant plusieurs limites hautes et basses. Quant aux minima et maxima choisis, leur montant a, semble-t-il, été arrêté sur la base d'une étude réalisée par la Chancellerie à partir des arrêts rendus par les chambres sociales des cours d'appel au mois d'octobre 2014 (18).

Effectif de l'entreprise
Moins de 20 salariés Entre 20 et 299 salariés A partir de 300 salariés
Ancienneté du salarié dans l'entreprise Moins de 2 ans Maximum :

3 mois

Maximum :

4 mois

Maximum :

4 mois

De 2 ans à moins de 10 ans Minimum :

2 mois

Maximum :

6 mois

Minimum :

4 mois

Maximum :

10 mois

Minimum :

6 mois

Maximum :

12 mois

10 ans et plus Minimum :

2 mois

Maximum :

12 mois

Minimum :

4 mois

Maximum :

20 mois

Minimum :

6 mois

Maximum :

27 mois

De l'avis du même rapporteur thématique, la nouvelle grille devait permettre une plus grande progressivité en prenant mieux en compte les différences d'ancienneté et d'effectif. Il reste que l'étirement de la grille s'est manifestement fait au détriment des salariés ayant plus de deux ans d'ancienneté. Alors qu'auparavant, ceux-ci étaient certains d'obtenir une indemnisation équivalant aux six derniers mois de salaire dans les entreprises de plus de onze salariés, ce minimum n'était dorénavant garanti qu'à ceux travaillant dans les entreprises de plus de trois cents salariés. Pire, les six mois de salaire devenaient un maximum (au lieu d'un minimum) pour les salariés ayant entre deux et dix ans d'ancienneté dans les entreprises de moins de vingt salariés. En d'autres termes, la catégorie des salariés ayant plus de deux ans d'ancienneté dans les entreprises employant entre onze et vingt salariés allait clairement perdre au change.

Une grille applicable à la seule indemnisation des licenciements injustifiés. Le dispositif visait à encadrer l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, laissant ainsi subsister le bénéfice des indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles de licenciement (C. trav., L. 1235-3 N° Lexbase : L1342H9L in fine). Sauf faute grave ou lourde, tout salarié licencié conservait ainsi le droit d'être dédommagé par l'employeur de la perte de son emploi.

Si la grille indemnitaire concernait en premier chef les licenciements sans cause réelle et sérieuse, elle devait aussi s'appliquer aux prises d'acte et aux résiliations judiciaires imputables à un manquement suffisamment grave de l'employeur (C. trav., L. 1235-3-1). Cette extension répondait à un souci bien compréhensible d'harmonisation avec la jurisprudence de la Cour de cassation. Dès lors que la prise d'acte et la résiliation judiciaire produisent "les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse" lorsque les faits invoqués par les salariés les justifient, le législateur se devait de soumettre ces hypothèses aux nouvelles règles prévues.

A la différence du référentiel, seulement indicatif, le nouveau dispositif d'indemnisation devait s'imposer au juge, ce dernier ne pouvant indemniser les salariés en dehors des limites minimales et maximales fixées. Comment ne pas y voir une importante marque de défiance à l'égard du pouvoir judiciaire ? Pour comprendre cette évolution, il faut se rappeler l'objectif de la réforme : rendre plus prévisible le contentieux des licenciements en évitant "la dispersion des dommages-intérêts" (19). Par un étrange renversement des rôles, les juges sont donc devenus aussi nuisibles à l'emploi que les employeurs procédant à des licenciements injustifiés. En 1973, ils étaient mis en première ligne contre l'arbitraire patronale, en 2015, les voilà présentés comme une source d'incertitude dont il faut protéger le monde économique (20).

Pour limiter les effets pervers du dispositif, plusieurs exclusions avaient toutefois été prévues. D'abord, les plafonds ne devaient pas s'appliquer en cas de "faute d'une particulière gravité" de l'employeur (C. trav., L. 1235-3-2, al. 1), cette formule étant suivie d'une liste de situations dans lesquelles le licenciement est généralement sanctionné par la nullité (discrimination, harcèlement, statut protecteur, maternité, accident du travail et maladie professionnelle). Au-delà des cas énumérés, on peut penser que cette exclusion a été inspirée par la décision constitutionnelle du 18 juin 2010 (21) qui, à travers sa réserve d'interprétation, a clairement laissé entendre que "l'ampleur de la faute revêt un seuil interdisant qu'on limite par trop l'indemnisation des victimes" (22). En cas de faute d'une particulière gravité de l'employeur, les juges recouvraient donc une totale liberté de fixation des dommages-intérêts. Ensuite, le législateur avait prévu que la grille ne s'appliquerait pas dans plusieurs hypothèses où des montants spécifiques d'indemnités ont été fixés : par exemple, en cas de nullité du licenciement pour motif économique, de non-respect des procédures d'information et de consultation, de non-respect de la priorité de réembauche, etc. (C. trav., L. 1235-3-2, al. 2). Dans ces situations, le salarié devait pouvoir prétendre à l'indemnisation prévue, sans risque de se voir imposer les plafonds ("sans préjudice").

Voilà, en substance, le dispositif envisagé dans la loi "Macron" que le Conseil constitutionnel a censuré dans sa décision n° 2015-715 du 5 août 2015.

B - La censure du Conseil constitutionnel

Atteinte au principe de la réparation intégrale. Même si le droit antérieur écornait déjà le principe de la réparation intégrale en fixant un plancher (les six derniers mois de salaire) pour l'indemnisation de certains salariés licenciés sans cause réelle et sérieuse (23), la loi "Macron" allait résolument plus loin en faisant dépendre cette indemnisation de critères, objectifs certes, mais ô combien éloignés de l'évaluation du préjudice : l'ancienneté des salariés et l'effectif des entreprises. Les victimes étant ainsi privées d'une réparation intégrale, il aurait été possible de saisir le Conseil constitutionnel de la question. Les députés requérants ne l'ont pas fait, conscients sans doute des maigres chances de succès d'un tel recours. Car si le principe de réparation intégrale est assurément une règle cardinale du droit de la responsabilité civile, il n'a pas valeur constitutionnelle (24). Seul existe un droit constitutionnel à réparation tiré de l'article 1382 du Code civil (N° Lexbase : L1488ABQ) selon lequel "tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer" (25). Le Conseil a déduit de ce droit que les victimes doivent obtenir réparation de l'intégralité des préjudices subis. Il s'est toujours refusé en revanche à garantir la réparation intégrale de chaque préjudice. En somme, il existe bien un droit à réparation de tous les préjudices mais pas de tout le préjudice. Ainsi qu'il l'a affirmé dans sa décision QPC du 18 juin 2010 (Cons. const., 18 juin 2010, n° 2010-8 QPC N° Lexbase : A9572EZK) (26), le droit constitutionnel à réparation "ne fait pas obstacle à ce que le législateur aménage, pour un motif d'intérêt général, les conditions dans lesquelles la responsabilité peut être engagée ; qu'il peut ainsi, pour un tel motif, apporter à ce principe des exclusions ou des limitations à condition qu'il n'en résulte pas une atteinte disproportionnée aux droits des victimes d'actes fautifs ainsi qu'au droit à un recours juridictionnel qui découle de l'article 16 de la Constitution". Or, compte tenu des nombreuses exclusions prévues par le législateur, dont l'une était directement inspirée par la jurisprudence du Conseil ("faute d'une particulière gravité"), il était peu probable de voir dans l'article 266 de la loi "Macron" une atteinte disproportionnée au droit constitutionnel à réparation (27).

Rupture d'égalité entre les salariés. La censure est finalement venue d'un autre grief. Selon les députés requérants, les dispositions attaquées violaient le principe d'égalité devant la loi en instituant une différence de traitement injustifiée entre les salariés en fonction de la taille de l'entreprise. Si le Conseil constitutionnel leur a donné raison, sa motivation est pour le moins laconique. Compte tenu du nombre de griefs soulevés et de l'examen antérieur de certaines dispositions sous l'angle du principe d'égalité, on comprend que le Conseil se soit abstenu de rappeler sa jurisprudence habituelle en matière d'égalité (il l'a déjà fait plus haut dans son considérant 68) : "en application de l'article 6 de la Déclaration de 1789, le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un ou l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit". Il reste, qu'à des fins pédagogiques, il eut été préférable que le Conseil précise davantage son raisonnement. Ainsi, il n'aurait pas été superflu d'affirmer que, de son point de vue, tous les salariés licenciés sans cause réelle et sérieuse sont placés dans une situation identique : quelle que soit leur ancienneté et la taille de leur entreprise, ils souffrent en principe du même préjudice lié à la perte injustifiée de leur emploi. L'affirmation manque cruellement car c'est seulement la suite de la décision qui autorise à penser que c'est bien cette analyse que fait le Conseil.

Lorsque le législateur traite différemment des personnes placées dans une situation identique (comme c'est le cas, on vient de le dire, des salariés licenciés sans cause réelle et sérieuse), il n'est admis à déroger au principe d'égalité que pour des raisons d'intérêt général. Sur ce point, le Conseil constitutionnel ne trouve rien à redire à la finalité poursuivie par le législateur : "assurer une plus grande sécurité juridique et favoriser l'emploi en levant les freins à l'embauche" constitue "des buts d'intérêt général" (cons. 151). Au regard de sa jurisprudence antérieure, il ne fallait pas s'attendre à ce que le Conseil condamne un tel postulat. On rappellera que ce dernier a jugé le CPE conforme au principe d'égalité devant la loi en retenant que "le législateur pouvait, compte tenu de la précarité de la situation des jeunes sur le marché du travail, et notamment des jeunes les moins qualifiés, créer un nouveau contrat de travail ayant pour objet de faciliter leur insertion professionnelle" (28). Implicitement, c'était déjà admettre que le droit " commun " du licenciement (et toute l'incertitude qu'il draine lorsqu'il s'applique) peut constituer un frein à l'embauche de sorte qu'il peut être nécessaire d'y déroger pour remédier à la précarité de certaines catégories de travailleurs. La présente décision ne fait que confirmer ce raisonnement, en le généralisant toutefois : ce dernier n'est pas réservé ici aux difficultés d'emploi d'une classe d'âge en particulier, mais bel et bien étendu à une règle applicable à tous les salariés injustement privés de leur emploi. En apparence anodine, la formule du Conseil constitutionnel en dit long sur la manière dont est conçu le droit du travail aujourd'hui : moins comme une source de protection, plus comme un facteur de nuisance.

Si le législateur peut déroger au principe d'égalité pour des raisons d'intérêt général, encore faut-il que la différence de traitement soit en rapport direct avec la loi. Pour cela, il faut identifier l'objet de la loi à l'origine de la différence de traitement (objet de la loi qu'il ne faut pas confondre avec la finalité poursuivie par le législateur). Le Conseil constitutionnel se montre, là encore, laconique. Selon lui, il convient de vérifier que les critères sur lesquels le législateur entend se fonder pour différencier le traitement des salariés sont en lien direct avec le préjudice subi par le salarié. Il faut en déduire que, pour le Conseil, l'article L. 1235-3 du Code du travail a essentiellement pour objet d'assurer l'indemnisation du préjudice subi par les salariés victimes d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Or, si le critère de l'ancienneté est en lien direct avec ledit préjudice (plus l'on compte d'années de présence dans une entreprise, plus l'on peut être affecté par le prononcé d'un licenciement injustifié) (29), tel n'est pas le cas du critère des effectifs de l'entreprise. Difficile de ne pas souscrire à la critique. En effet, en quoi la taille de l'entreprise influe-t-elle sur le préjudice du salarié ? A l'évidence, en rien. Le préjudice pour perte d'emploi (même injustifiée) ne varie pas selon que l'entreprise emploie dix, cent ou mille salariés. Il en irait différemment si l'objet de la loi était de prévoir l'échelle des peines infligées aux employeurs fautifs (30). Dans un tel système, l'on pourrait tenir compte de la capacité contributive de l'entreprise en indexant le montant de la pénalité sur le nombre de ses salariés, sa masse salariale ou son chiffre d'affaire. Mais ce n'est pas, en l'état, l'objet de l'article L. 1235-3 du Code du travail. Celui-ci ayant trait à l'indemnisation du préjudice subi par les salariés licenciés sans cause réelle et sérieuse, le législateur ne pouvait pas prévoir des montants variables de dommages-intérêts en fonction des effectifs de l'entreprise, ce critère n'étant pas en lien direct avec la loi. En se fondant sur ce critère, l'article 266 a donc méconnu le principe d'égalité.

La solution tranche avec celle rendue quelques mois plus tôt par la Cour de cassation. Dans une décision du 10 octobre 2014 (31), cette dernière avait en effet refusé de renvoyer au Conseil constitutionnel une QPC portant précisément sur l'article L. 1235-5 du Code du travail (qui, pour rappel, a pour objet d'écarter certaines règles -dont celle relative au plancher d'indemnisation des six derniers mois de salaires en cas de licenciement injustifié- aux salariés ayant moins de deux ans d'ancienneté ainsi qu'à ceux appartenant à des entreprises employant moins de onze salariés). Alors que le requérant soutenait que cette disposition était contraire au principe d'égalité devant la loi, la Cour de cassation a refusé de renvoyer la question au motif, notamment, que "la disposition se fonde, pour établir la différence de traitement discutée, sur des critères objectifs et rationnels d'ancienneté du salarié et d'effectifs de l'entreprise, critères qui sont en lien direct avec son objet". En affirmant le contraire s'agissant du critère des effectifs de l'entreprise, la décision du 5 août 2015 sonne comme un sérieux désaveu de la Cour de cassation ; elle vient surtout conforter la thèse de ceux qui reprochent à la Chambre sociale d'opérer un filtrage excessivement serré en anticipant que trop les réponses du Conseil constitutionnel (32).

Et maintenant ? La censure de l'article 266 de la loi "Macron" soulève dans l'immédiat deux séries d'interrogations. La première porte sur l'article L. 1235-5 dont la modification n'était pas envisagée, mais dont la constitutionnalité est pour le moins douteuse aujourd'hui. Ce texte qui, du fait de la censure de l'article L. 1235-3, retrouve une place centrale, fait varier l'indemnisation due en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse en fonction de l'ancienneté des salariés et des effectifs de l'entreprise. Or, comme le Conseil constitutionnel vient de l'affirmer, ce dernier critère n'est pas en lien direct avec l'objet de la loi. Si une QPC devait de nouveau être transmise à la Cour de cassation à son sujet, on voit mal comment cette dernière pourrait cette fois-ci refuser de la transmettre. D'où la seconde interrogation : la grille d'indemnisation prévue par la loi "Macron" ayant été censurée, et le régime actuel autour de l'article L. 1235-3 ne présentant aucun gage de sécurité, comment le Gouvernement va-t-il réagir ? A moins qu'il ne décide de faire machine arrière en renonçant à l'établissement de nouveaux plafonds et planchers (ce qui est peu probable), il y a fort à parier qu'il va revoir sa copie en reprenant le critère validé par le Conseil constitutionnel (l'ancienneté), éventuellement en y ajoutant ceux envisagés pour le référentiel indicatif : l'âge du salarié et sa situation par rapport à l'emploi. On a cependant hâte de voir comment se présentera ce fameux référentiel. Car c'est seulement quand on en connaîtra son contenu que l'on pourra savoir si (et comment) il peut servir de modèle à une nouvelle grille.


(1) V. not. à ce propos les résultats de la commission d'étude des effets de la loi pour la croissance et l'activité (janvier 2015), disponibles sur le site de France stratégie. La réforme de la justice prud'homale est exclusivement analysée sous un prisme économique, édifiant.
(2) Selon les mots du ministre de l'Economie, E. Macron, devant le Sénat, séance publique du 1er juillet 2015.
(3) Sur ce dispositif, v. not. D. Boulmier, Faciliter la conciliation prud'homale...mais pour qui ?, Dr. soc., 2013, p. 837 ; M. Grévy et P. Henriot, Le juge, ce gêneur..., RDT, 2013, p. 173.
(4) En ce sens, D. Boulmier, préc.
(5) Ibid.
(6) Ibid.
(7) Pour certains commentateurs, ce système réduit le juge "à une simple fonction d'enregistrement d'une solution automatisée", M. Grévy et P. Henriot, préc.
(8) Cass. soc., 28 mars 2000, n° 97-42.419 (N° Lexbase : A6373AG7), Bull. civ. V, n° 135.
(9) Hasard ou coïncidence, la mesure rappelle étrangement l'une des propositions formulées par le Club des juristes au sein d'un rapport intitulé "Sécurité juridique et initiative économique" (mai 2015). Proposition n° 59 "Elaborer un référentiel indicatif national, statistique et évolutif qui serve à la fixation des diverses indemnités en cas de rupture du contrat de travail et puisse être utilisé aussi bien pour la conciliation que pour le contentieux de la rupture du contrat".
(10) Sur l'ensemble de la réforme, et sur ce dispositif en particulier v. D. Boulmier, Le volet prud'homal du projet de loi "Macron" : un coup de force, mais sans coup de jeune, Dr. soc., 2015, p. 430.
(11) Assemblée nationale, séance publique du 14 février 2015.
(12) V. les explications en ce sens du député D. Robiliard, rapporteur thématique, Assemblée nationale, séance publique du 14 février 2015.
(13) Mme C. Untermaier, Assemblée nationale, séance publique du 14 février 2015.
(14) Selon les termes du Premier ministre employés lors de la présentation du Plan "Tout pour l'emploi des TPE et des PME", 9 juin 2015.
(15) C'était, du reste, l'analyse d'un des commentateurs du projet de loi "Macron" avant que ce dernier n'intègre cette fameuse grille (D. Boulmier, préc.).
(16) Notons toutefois que c'est une revendication patronale relativement ancienne puisqu'elle figurait déjà dans l'une des premières versions de l'ANI de 2013. Ainsi, l'article 22 du projet suggérait une "barémisation" des indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse, consistant en un plafonnement de la réparation de tous les préjudices en fonction de la seule ancienneté du salarié.
(17) La loi n°183 du 10 décembre 2014 (loi sur l'emploi) a prévu un système similaire : les salariés ayant fait l'objet d'un licenciement injustifié ont droit à une indemnité s'élevant à deux mois de salaire pour chaque année d'ancienneté, avec un minimum de quatre mois et un maximum de 24 mois. Pour une présentation détaillée de cette loi, v. F. Martelloni, Le Jobs act : le chemin italien vers la sécurisation de l'entreprise (et de ses abus), RDT, 2015, p. 304.
(18) En ce sens, D. Robiliard, devant la Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, séance du 11 juin.
(19) E. Macron, devant la Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, séance du 11 juin.
(20) A ce sujet, v. les critiques développées par le Syndicat de la magistrature et le syndicat des avocats de France, Indemnisation des licenciements abusifs : de la flexi-sécurité à la flexi-impunité, Le Monde du 15 juin 2015.
(21) Cons. const., 18 juin 2010, n° 2010-8 QPC (N° Lexbase : A9572EZK) ; D. 2011, p. 35, obs. P. Brun et O. Gout ; Dr. soc. 2011, p. 1208, note X. Prétot ; Constitutions 2010, p. 413, obs. Ch. Radé.
(22) P. Deumier et O. Gout, La constitutionnalisation de la responsabilité civile, Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 31, mars 2011.
(23) Sur les limites de ce principe au-delà du seul thème de la rupture, v. not. Ch. Radé, Préjudices et indemnisation : à la croisée des disciplines (heurs et malheurs du principe de la réparation intégrale en droit du travail), Dr. ouv., 2015, p.441.
(24) C. Radé, Liberté, égalité, responsabilité dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel, Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 16, juin 2004, n° 28 et s.
(25) Le Conseil constitutionnel a consacré un "principe de responsabilité" (Cons. constit., décision n° 82-144 DC du 22 octobre 1982 N° Lexbase : A8046ACY) qu'il a rattaché à l'article 4 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen (N° Lexbase : L6813BHS) (Cons. constit., décision n° 99-419 du 9 novembre 1999 N° Lexbase : A8783ACB).
(26) D. 2011, p. 35, obs. P. Brun et O. Gout ; Dr. soc. 2011, p. 1208, note X. Prétot ; Constitutions 2010, p. 413, obs. Ch. Radé.
(27) Faute de trouver dans la Constitution une protection suffisante, les salariés auraient pu se tourner vers d'autres textes posant plus fermement le principe d'une réparation intégrale. C'est le cas notamment de la Convention n° 158 de l'OIT (N° Lexbase : L4795I3Y) qui, dans son article 10, fonde les juges à "ordonner le versement d'une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée". A la faveur d'un contrôle de conventionalité de la loi, un juge aurait pu trouver là le moyen de se soustraire au plancher d'indemnisation prévu par la loi "Macron".
(28) Cons. constit., décision n° 2006-535 DC du 30 mars 2006, cons. 17 (N° Lexbase : A8313DN9).
(29)V. déjà à propos du critère de l'ancienneté la décision QPC du 13 avril 2012 (Cons. const., décision n° 2012-232 QPC du 13 avril 2012 N° Lexbase : A5139II8, Constitutions 2012, p. 334, obs. Ch. Radé). La question transmise par la Cour de cassation (Cass. QPC., 1er février 2012, n° 11-40.092, FS-P+B N° Lexbase : A8891IBW) portait sur l'article L. 1235-14 1° du Code du travail (N° Lexbase : L1363H9D) qui n'a d'autre objet que d'écarter la sanction de la nullité du licenciement (prévue en cas de nullité du PSE) lorsque le salarié compte moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise. Pour le requérant, cette disposition méconnaissait, entre autres, le principe d'égalité devant la loi. Dans sa décision du 13 avril 2012, le Conseil a décidé "qu'en retenant un critère d'ancienneté du salarié dans l'entreprise, le législateur s'était fondé sur un critère objectif et rationnel en lien direct avec l'objet de la loi".
(30) L'assertion mériterait sans doute d'être nuancée dans la mesure où le plancher d'indemnisation des six derniers mois de salaires peut être analysé comme une peine privée... Sur cette analyse du système d'indemnisation, v. C. Wolmark, Réparer la perte d'emploi - A propos des indemnités de licenciement, Dr. ouv., 2015, p. 450.
(31) Cass. QPC., 10 octobre 2014, n° 14-40037, FS-P+B (N° Lexbase : A2012MY8), Constitutions, 2015, p. 80, obs. D. Baugard ; Cahiers sociaux, 2014, p. 641, obs. J. Icard.
(32) Sur cette question, Ch. Radé, QPC et droit du travail : l'occasion manquée ?, Dr. soc., 2015, p. 497, l'auteur regrettant que la Chambre sociale se substitue trop au Conseil constitutionnel en préjugeant de la constitutionnalité d'un texte. V. égal. J.-F. Akandji-Kombé et M.-F. Mazars, QPC : la Cour de cassation filtre-t-elle trop ?, RDT, 2010, p. 622.

newsid:448672

Rel. individuelles de travail

[Brèves] Publication au Journal officiel du décret relatif aux modalités de dépôt du contrat de professionnalisation

Réf. : Décret n° 2015-1093 du 28 août 2015, relatif aux modalités de dépôt du contrat de professionnalisation (N° Lexbase : L8758KGH)

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N8717BUE

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Le 03 Septembre 2015

Publié au Journal officiel du 30 août 2015, le décret n° 2015-1093 du 28 août 2015, relatif aux modalités de dépôt du contrat de professionnalisation (N° Lexbase : L8758KGH), pris en application de l'article 4 de la loi n° 2011-893 du 28 juillet 2011, pour le développement de l'alternance et la sécurisation des parcours professionnels (N° Lexbase : L8283IQT), fixe les nouvelles modalités simplifiées selon lesquelles les entreprises devront se libérer de l'obligation légale de dépôt des contrats de professionnalisation auprès des OPCA fixée à l'article L. 6325-5 du Code du travail (N° Lexbase : L3705H94).
Les entreprises doivent déposer de manière dématérialisée leur contrat de professionnalisation auprès des OPCA par le biais du portail de l'alternance (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E1398ETX).

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Rémunération

[Textes] Loi "Macron" : dispositions relatives à l'épargne salariale (art. 148 et s.)

Réf. : Loi n° 2015-990 du 6 août 2015, pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC)

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N8673BUR

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par Gilles Auzero, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux

Le 07 Septembre 2015

L'épargne salariale constitue l'un des rares sujets permettant un dépassement des clivages politiques et génère, de ce fait, un certain consensus. On ne saurait dire que la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (1) (N° Lexbase : L4876KEC) apporte, en la matière, de profonds bouleversements. Comme souvent par le passé, le législateur a, principalement, souhaité inciter à la mise en place et au développement des dispositifs composant l'épargne salariale qui, on peut le regretter, restent d'une redoutable complexité technique.
I - Les plans d'épargne pour la retraite collectifs

Le plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco) est un dispositif qui permet au salarié de se constituer une épargne, accessible au moment de la retraite sous forme de rente ou, si l'accord collectif le prévoit, sous forme de capital. En application de l'article L. 3334-2 du Code du travail (N° Lexbase : L1956KGK), un Perco peut être mis en place "à l'initiative de l'entreprise ou par accord collectif de travail". En d'autres termes, si la voie de l'accord est empruntée, l'entreprise doit se conformer aux dispositions de droit commun prévues au livre II de la deuxième partie du Code du travail, portant sur la négociation collective, les conventions et les accords collectifs de travail (C. trav., art. L. 2211-1 N° Lexbase : L5925IAP à L. 2283-2). Cela étant, et de manière quelque peu curieuse, le dernier alinéa de l'article L. 3334-2 dispose que, lorsque l'entreprise compte au moins un délégué syndical ou est dotée d'un comité d'entreprise, le Perco est négocié dans les conditions prévues à l'article L. 3322-6 du Code du travail (N° Lexbase : L1150H9H), c'est-à-dire selon les règles intéressant les accords de participation, qui n'obligent pas à passer par un accord collectif de droit commun.

Par l'effet de la loi "Macron", l'article L. 3334-2 dispose désormais que la mise en place du Perco doit suivre les mêmes règles que les accords de participation. Ce faisant, il semble que le législateur ait souhaité que la mise en oeuvre de ces règles ne soit plus conditionnée à l'existence d'un délégué syndical ou d'un comité d'entreprise (2). Pourtant, le second alinéa n'a pas été modifié en conséquence. En revanche, celui-ci précise que si la négociation échoue, un procès-verbal de désaccord est établi dans lequel sont consignées en leur dernier état les propositions respectives des parties et les mesures que l'employeur entend "soumettre à la ratification du personnel dans les conditions prévues au 4° de même article L. 3322-6 ou que l'employeur entend appliquer unilatéralement".

1 - Suppression de la contribution sur les abondements des employeurs aux plans d'épargne pour la retraite collectifs

Instauré par la loi du 22 juillet 1993 (N° Lexbase : L8411INT), le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) est un établissement public à caractère administratif dont la mission est de financer, au moyen de recettes qui lui sont affectées, divers avantages vieillesse à caractère non contributif relevant de la solidarité nationale, servis par les régimes vieillesse de la Sécurité sociale (CSS, art. L. 135-1 N° Lexbase : L0692G9I). Le FSV finance ainsi le minimum vieillesse, certains avantages familiaux et diverses cotisations afférentes à des périodes non travaillées.

L'article L. 135-3 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L9691I3C) définit les ressources dont bénéficie le FSV.

Parmi celles-ci figure, au 10° sexies, le produit de la contribution sur les abondements des employeurs aux plans d'épargne pour la retraite collectifs, instituée à l'article L. 137-5 du même code (N° Lexbase : L4340IR8). Acquittée par les employeurs et affectée exclusivement au FSV, cette contribution est égale à 8,2 % de la fraction de l'abondement de l'employeur au Perco qui excède la somme de 2 300 euros par an et par bénéficiaire.

L'article 151 de la loi "Macron" supprime, à compter du 1er janvier 2016, le 10° sexies de l'article L. 135-3 du Code de la Sécurité sociale, et abroge en conséquence la section 2 du chapitre VII du titre III du livre Ier de ce code, qui est consacrée à la contribution précitée et comprend uniquement l'article L. 137-5.

Cette disposition fait naître un sentiment partagé. Sans doute est-elle de nature à lever un frein au développement des Perco. Pour autant, elle n'est, à l'évidence, pas de nature à corriger la situation financière dégradée du FSV (3).

2 - Abaissement du taux du forfait social relatif aux versements sur un plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco) orienté vers le financement de l'économie

Instauré en 2009 et défini à l'article L. 137-15 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L1894KGA), le forfait social est une contribution patronale qui s'applique, sauf exceptions, aux éléments de rémunération ou de gain non soumis aux cotisations sociales mais assujettis à la contribution sociale généralisée (CSG). Depuis sa création, son taux a été relevé presque chaque année, passant de 2 % en 2009, à 4 % en 2010, 6 % en 2011, 8 % au 1er janvier 2012 puis 20 % depuis le 1er août de la même année (4).

Depuis 2009, le forfait social porte sur toutes les rémunérations issues de l'épargne salariale au sens large (régimes d'intéressement, de participation, plans d'épargne d'entreprise ou interentreprises, Perco) ainsi que sur certaines prestations de retraite supplémentaire. Si ce forfait constitue une source de financement intéressante pour les comptes sociaux (5), il conduit aussi à aligner, dans une certaine mesure, la fiscalité des sommes issues des dispositifs d'épargne salariale, sur celle des salaires (6).

En application de l'article 151 de la loi commentée (7), le taux de ce forfait social est fixé à 16 % pour les versements des sommes issues de l'intéressement et de la participation ainsi que pour les contributions des entreprises mentionnées au premier alinéa de l'article L. 3334-6 du Code du travail (N° Lexbase : L1945KG7) et versées sur un Perco dont le règlement respecte les conditions suivantes :

-les sommes recueillies sont affectées par défaut, dans les conditions prévues au second alinéa de l'article L. 3334-11 (N° Lexbase : L1478IZR) ;

-l'allocation de l'épargne est affectée à l'acquisition de parts de fonds, dans des conditions fixées par décret, qui comportent au moins 7 % de titres susceptibles d'être employés dans un plan d'épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire.

Le produit de la contribution précitée est versé, pour une fraction correspondant à 80 %, à la Caisse nationale d'assurance vieillesse et, pour la fraction restante, au FSV (CSS, art. L. 137-17, nouv. N° Lexbase : L1941KGY).

Par souci de coordination juridique, la loi "Macron" modifie l'article L. 214-164 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L1937KGT), qui définit les règles de fonctionnement des fonds communs de placement d'entreprise. Le droit en vigueur prévoit que les fonds qui peuvent être souscrits dans le cadre d'un Perco ne peuvent détenir, pour des raisons de liquidité, plus de 5 % de titres non cotés, ou plus de 5 % de titres de l'entreprise qui a mis en place le Perco. La loi porte ces deux taux à 10 %.

3 - Possibilité pour l'employeur d'abonder le Perco même en l'absence de contribution du salarié

Le second alinéa de l'article L. 3334-6 du Code du travail dispose actuellement que si le règlement du Perco le prévoit, les entreprises peuvent effectuer un versement initial, dans la limite d'un plafond fixé par décret, même en l'absence de contribution du salarié. Ce versement est alors soumis au même régime social et fiscal que celui qui s'applique aux contributions des entreprises aux régimes de participation et d'intéressement.

L'article 152 de la loi "Macron" modifie la rédaction de cet alinéa, afin d'assouplir les conditions imposées aux versements unilatéraux de l'employeur sur le Perco.

Désormais, si le règlement du plan le prévoit, les entreprises peuvent, même en l'absence de contribution du salarié :

- effectuer un versement initial sur ce plan ;

- effectuer des versements périodiques sur ce plan, sous réserve d'une attribution uniforme à l'ensemble des salariés ; la périodicité de ces versements étant précisée dans le règlement du plan.

Les plafonds de versement annuel seront fixés par décret et ces versements sont soumis au même régime social et fiscal que les contributions des entreprises mentionnées au premier alinéa du même article.

Pour rester sur la question de l'alimentation du Perco, le législateur étend de cinq à dix le nombre de jours de repos pouvant être versés sur le plan ou, plus exactement, les sommes correspondantes (C. trav., art. L. 3334-8, al. 2, modif. N° Lexbase : L1958KGM) (8).

II - Les autres dispositifs d'épargne salariale

1 - Blocage par défaut des sommes issues de l'intéressement sur un plan d'épargne entreprise en cas d'absence de choix du salarié

Lorsqu'un dispositif d'intéressement a été mis en place dans l'entreprise et que des sommes sont dégagées en application de celui-ci au profit des salariés, elles leur sont immédiatement versées. Toutefois, le salarié bénéficiaire peut décider d'affecter les sommes issues de l'intéressement à un plan d'épargne entreprise (C. trav, art. L. 3315-2 N° Lexbase : L1942KGZ). Ce même texte prévoit que, dans ce cas, les sommes sont exonérées d'impôt sur le revenu dans la limite d'un certain montant. On aura donc compris qu'il y a une incitation au blocage des sommes issues de l'intéressement, dépendant toutefois d'une manifestation de volonté du salarié bénéficiaire.

On remarquera que la situation est quelque peu différente pour les sommes issues de la participation. En effet, si celles-ci sont aujourd'hui aussi immédiatement disponibles, il faut que le salarié bénéficiaire en demande expressément le versement. A défaut, ces sommes sont placées de droit dans des plans d'épargne salariaux (C. trav., art. L. 3324-12 N° Lexbase : L3166INL) (9).

La loi "Macron" vient, sur ce point précis et dans une certaine mesure, aligner le régime juridique des sommes issues de l'intéressement sur celles issues de la participation. L'alinéa 2, nouveau, de l'article L. 3315-2 du Code du travail dispose que, lorsque le salarié (10) ne demande pas "le versement, en tout ou partie, des sommes qui leur sont attribuées au titre de l'intéressement, ni leur affectation au plan prévue au premier alinéa du présent article leur quote-part d'intéressement y est affectée dans les conditions prévues par l'accord mentionné à l'article L. 3312-5. Cet accord précise les modalités d'information du salarié sur cette affectation" (11).

A la différence de la participation, seul le PEE semble pouvoir être le réceptacle des sommes issues de l'intéressement, à l'exclusion du Perco (12).

Ces dispositions sont applicables aux droits d'intéressement attribués à compter du 1er janvier 2016. Toutefois, le III de l'article 150 de la loi (non codifié) prévoit que pour les droits à intéressement attribués entre la date précitée et le 31 décembre 2017, le salarié peut demander le déblocage de son intéressement dans un délai de trois mois à compter de la notification de son affectation sur un plan d'épargne salariale dans les conditions précédemment évoquées.

2 - Harmonisation de la date de versement des primes d'intéressement et de participation

Antérieurement à la réforme examinée, la date limite de versement aux salariés des sommes dues au titre de l'intéressement et celle des sommes dues au titre de la participation était différente. De même, le taux d'intérêt de retard à la charge de l'employeur en cas de dépassement de cette date variait selon le dispositif en jeu.

Pour ce qui concerne l'intéressement, l'article L. 3314-9 du Code du travail (N° Lexbase : L1946KG8) fixait la date limite de versement au dernier jour du septième mois suivant l'exercice de calcul. Les sommes versées au-delà de cette date produisaient des intérêts calculés au taux légal. S'agissant de la participation, l'article D. 3324-21-2 du même code (N° Lexbase : L9050IDK) dispose que le versement doit intervenir avant le premier jour du cinquième mois suivant la clôture de l'exercice au titre duquel la participation est attribuée. Au-delà de cette date, les entreprises complètent le versement prévu au premier alinéa par un intérêt de retard égal à 1,33 fois le taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées publié par le ministre chargé de l'Economie.

La loi "Macron" modifie l'article L. 3314-9 du Code du travail afin d'harmoniser la date limite de versement des primes d'intéressement et de participation. Ce texte dispose désormais que "toute somme versée aux bénéficiaires en application de l'accord d'intéressement au-delà du dernier jour du cinquième mois suivant la clôture de l'exercice produit un intérêt de retard égal à 1,33 fois le taux fixé à l'article 14 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération (N° Lexbase : L4471DIG)".

Il faut ajouter que la loi fixe au premier jour du sixième mois suivant l'exercice au titre duquel les droits sont nés la date de départ du délai de cinq ans durant lequel les sommes dont le versement n'a pas été demandé par le salarié sont indisponibles (C. trav., art. L. 3324-10, al. 1er, modif. N° Lexbase : L1947KG9).

Ces modifications sont applicables aux droits à intéressement et à participation des salariés aux résultats de l'entreprise attribués au titre des exercices clos après la publication de la loi.

3 - Mise en oeuvre d'un régime de participation et d'intéressement

Négociation obligatoire d'un régime de participation et d'intéressement par les branches professionnelles. En application de l'article L. 3322-9 du Code du travail (N° Lexbase : L1948KGA), un régime de participation devait être négocié par branche au plus tard le 30 décembre 2009. A défaut d'initiative de la partie patronale au plus tard le 31 décembre 2007, la négociation s'engageait dans les quinze jours suivant la demande d'une organisation représentative. La loi "Macron" actualise ces dispositions en portant les dates précitées au 30 décembre 2017 et au 31 décembre 2016.

Si les entreprises de la branche légalement tenues de mettre en place la participation peuvent toujours opter pour l'application de l'accord ainsi négocié, cette même option est désormais offerte aux entreprises de moins de cinquante salariés.

Non sans une certaine cohérence, la loi "Macron" crée un article L. 3312-9 (N° Lexbase : L1606KGL) imposant, avec les mêmes délais, une négociation au niveau des branches en matière d'intéressement. Ce régime d'intéressement devra être adapté aux spécificités des entreprises employant moins de cinquante salariés au sein de la branche.

Neutralisation provisoire du seuil de cinquante salariés. Lorsqu'une entreprise ayant conclu un accord d'intéressement vient à employer au moins cinquante salariés, les obligations prévues en matière de participation ne s'appliquent qu'au troisième exercice clos après le franchissement du seuil d'assujettissement à la participation, si l'accord est appliqué sans discontinuité pendant cette période (C. trav., art. L. 3322-3, al. 1er, nouv. N° Lexbase : L1951KGD).

On notera que la loi "Macron" vient modifier l'article L. 3322-2 du Code du travail (N° Lexbase : L1953KGG), qui précisera, désormais, que le seuil précité de cinquante salariés doit être atteint pendant douze mois, consécutifs ou non, au cours des trois derniers exercices. La Cour de cassation avait, pour sa part, décidé que le calcul de l'effectif à partir duquel la participation est obligatoire doit être effectué mois par mois au cours des douze mois précédents (13).

Tacite reconduction d'un accord d'intéressement. En application de l'article L. 3312-5 du Code du travail (N° Lexbase : L1962KGR), les accords d'intéressement sont conclus pour une durée de trois ans selon les modalités énumérées par ce même texte. Si aucune des parties habilitées à négocier ou à ratifier un accord d'intéressement dans ces conditions ne demande de renégociation dans les trois mois précédant la date d'échéance de l'accord (14), ce dernier est renouvelé par tacite reconduction, si l'accord d'origine en prévoit la possibilité. Tout en laissant subsister cette possibilité de tacite reconduction, la loi du 6 août 2015 vient préciser qu'elle intervient pour une durée de trois ans.

Abaissement du forfait social dans les entreprises dont l'effectif est inférieur à cinquante salariés. Ainsi qu'il a été vu précédemment, l'employeur doit s'acquitter d'un forfait social sur les sommes versées au titre de la participation et de l'intéressement. Rappelons aussi que, sous réserve de ce qui a été dit à propos du Perco, l'article L. 137-16 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L1940KGX) prévoit, en son premier alinéa, que le taux du forfait social est fixé à 20 %.

La loi "Macron" modifie le texte précité afin de prévoir que ce taux est réduit à 8 % pour les entreprises qui ne sont pas soumises à l'obligation de mettre en place un dispositif de participation des salariés aux résultats de l'entreprise (15) et qui concluent pour la première fois un accord de participation ou d'intéressement ou qui n'ont pas conclu d'accord au cours d'une période de cinq ans avant la date d'effet de l'accord (16).

Ce taux réduit s'applique pendant une durée de six ans à compte de la date d'effet de l'accord. Les entreprises qui, en raison de l'accroissement de leur effectif, atteignent ou dépassent l'effectif de cinquante salariés au cours de cette période continuent de bénéficier de ce taux jusqu'au terme de la période de six ans. Il en va différemment si le franchissement du seuil de cinquante salariés résulte "de la fusion ou de l'absorption d'une entreprise ou d'un groupe" (17). En outre, dans les cas de scission ou de cession à une entreprise d'au moins cinquante salariés ou de fusion ou absorption donnant lieu à la création d'une entreprise ou d'un groupe d'au moins cinquante salariés au cours de cette même période, la nouvelle entité juridique est redevable, à compter de sa création, de la contribution au taux de 20 %.

4 - Fonctionnement des plans d'épargne interentreprises

Aux termes de l'article L. 3333-3 du Code du travail (N° Lexbase : L1308H9C), le règlement d'un plan d'épargne interentreprises "détermine notamment :

1° Les entreprises signataires ou le champ d'application professionnel et géographique ;

2° La nature des sommes qui peuvent être versées ;

3° Les différentes possibilités d'affectation des sommes recueillies, en particulier le nombre, l'orientation de gestion et le profil de risque des fonds utilisés ;

4° Les conditions dans lesquelles les frais de tenue de compte sont pris en charge par les employeurs ;

5° La liste de différents taux et plafonds d'abondement parmi lesquels les entreprises souhaitant effectuer des versements complémentaires à ceux de leurs salariés pourront opter ;

6° Les conditions dans lesquelles sont désignés les membres des conseils de surveillance des fonds communs de placement prévus par le règlement du plan et les modalités de fonctionnement des conseils".

L'article L. 3333-7 du même code (N° Lexbase : L1955KGI) dispose que le règlement d'un PEI "peut prévoir qu'un avenant relatif aux 2°, 3° et 5° du règlement de ce plan peut être valablement conclu s'il est ratifié par une majorité des entreprises parties prenantes au plan". Il prévoit cependant une facilité lorsqu'il s'agit d'intégrer les modifications rendues nécessaires par des dispositions législatives ou réglementaires postérieures à l'institution du plan. Dans ce cas, la modification du règlement "s'applique à condition que la majorité des entreprises parties prenantes ne s'y oppose pas dans un délai d'un mois à compter de la date d'envoi de l'information".

Modifié par la loi "Macron", l'article L. 3333-7 se borne désormais à indiquer que le règlement du plan peut "valablement être modifié pour intégrer les dispositions législatives ou règlementaires postérieures à l'institution du plan ou de nouvelles dispositions relatives aux 2°, 3° et 5° du règlement de ce plan conformément à l'article L. 3333-3 si cette modification fait l'objet d'une information des entreprises parties prenantes au plan". Si la condition relative à la ratification par une majorité de ces entreprises disparaît, il est toutefois prévu désormais que la modification précitée s'applique à condition que la majorité des entreprises parties prenantes ne s'y oppose pas dans un délai d'un mois à compter de la date d'envoi de l'information et, pour chaque entreprise, à compter du premier exercice suivant la date de l'information. On passe ainsi d'une majorité "d'engagement" à une majorité "d'opposition".

III - Information des salariés sur les dispositifs d'épargne salariale

1 - Livret d'épargne salariale

Jusqu'à la loi "Macron", l'article L. 3341-6 du Code du travail (N° Lexbase : L1959KGN) disposait que "tout salarié d'une entreprise proposant un dispositif d'intéressement, de participation, un plan d'épargne entreprise, un plan d'épargne interentreprises ou un plan d'épargne pour la retraite collectif reçoit, lors de la conclusion de son contrat de travail, un livret d'épargne salariale présentant l'ensemble de ces dispositifs". Désormais, ne seront présentés que "les dispositifs mis en place au sein de l'entreprise". On avouera ne pas bien saisir où se situe le changement, étant observé que la formule nouvelle est fort proche de l'ancienne... (18). Ce livret sera désormais également porté à la connaissance des "représentants du personnel", le cas échéant en tant qu'élément de la base de données économiques et sociales. On remarquera que la loi ne se limite pas au seul comité d'entreprise, la catégorie "représentants du personnel" englobant, en outre, les délégués syndicaux, les délégués du personnel et le CHSCT.

2 - Communication au salarié quittant l'entreprise sur les dispositifs d'épargne salariale

Tout salarié bénéficiaire d'un dispositif d'épargne salariale qui vient à quitter l'entreprise reçoit, en application de l'article L. 3341-7 (N° Lexbase : L1960KGP), un état récapitulatif de l'ensemble des sommes et valeurs mobilières épargnées ou transférées au sein de l'entreprise dans le cadre des dispositifs de participation et de plans d'épargne salariale. Il prévoit également que cet état distingue les actifs disponibles, et ceux qui sont affectés au plan d'épargne pour la retraite collectif.

Désormais, cet état récapitulatif devra informer le bénéficiaire que les frais de tenue de compte-conservation sont pris en charge soit par l'entreprise, soit par prélèvements sur les avoirs.


(1) Dite loi "Macron".
(2) V. en ce sens le rapport fait au nom de la commission spéciale du Sénat (n° 370).
(3) Ainsi qu'il est relevé dans le rapport fait au nom de la commission spéciale du Sénat (n° 370), "malgré des ressources de 21,4 milliards d'euros en 2013, son déficit s'est élevé à 2,9 milliards d'euros. Il devrait malheureusement être du même ordre cette année selon les prévisions du Gouvernement retenues dans la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2015". Il est toutefois souligné que la contribution en cause procure une "recette limitée" pour les finances publiques (7 millions d'euros par an).
(4) Un taux réduit de 8 % s'applique néanmoins aux contributions des employeurs destinées au financement de la prévoyance complémentaire des salariés et aux sommes affectées à la participation dans les sociétés coopératives ouvrières de production.
(5) Selon le rapport précité, le rendement du forfait social est passé de 300 millions d'euros en 2009 à 4,6 milliards d'euros en 2013. Les deux tiers de l'augmentation observée entre ces deux dates s'expliquent par l'augmentation du taux, environ 30 % par l'élargissement de l'assiette, et les 5 % restants reflètent l'évolution spontanée de l'assiette.
(6) Il s'agit de conduire les employeurs à ne pas trop privilégier l'épargne salariale par rapport aux augmentations de salaire.
(7) Modifiant l'article L. 137-16 du Code de la Sécurité sociale.
(8) Notons aussi que la loi modifie l'article L. 3332-10 du Code du travail (N° Lexbase : L1957KGL) afin de préciser que le montant des sommes correspondant à des jours de repos non pris, inscrit dans un CET, est sans incidence sur le calcul du plafond légal relatif aux versements annuels d'un salarié ou d'un ancien salarié sur son PEE.
(9) La quote-part de la réserve spéciale de participation est, en ce cas, affectée pour moitié dans un Perco. La loi "Macron" modifie l'article L. 3324-12 (N° Lexbase : L3166INL) afin de prévoir que cette fraction de la quote-part est investie conformément au second alinéa de l'article L. 3334-11, lui-même modifié. Cette disposition s'applique aux versements effectués sur un Perco à compter du 1er janvier 2016.
(10) Est aussi visé le bénéficiaire mentionné au 1° de l'article L. 3312-3 (N° Lexbase : L6027ISZ).
(11) A défaut de précision dans l'accord, ces conditions et ces modalités sont déterminées par décret.
(12) L'incertitude reste toutefois de mise car les dispositions transitoires du III de l'article 150 visent, quant à elles, "un plan d'épargne salariale" ; ce qui englobe le PEE, mais aussi le Perco et le PEI...
(13) Cass. soc., 8 décembre 2010, n° 09-65.380, FS-P+B (N° Lexbase : A9114GMI) : JCP éd. S, 2011, 1064, obs. R. Vatinet.
(14) La loi "Macron" permet ainsi aux salariés de demander la renégociation d'un accord d'intéressement proposé par l'employeur et approuvé par un référendum interne à l'entreprise ; ce qui n'était antérieurement pas possible. Il semble que cette renégociation doive être demandée par les deux tiers du personnel, le texte continuant de faire référence aux parties habilitées à ratifier l'accord d'intéressement.
(15) C'est-à-dire les entreprises employant moins de cinquante salariés.
(16) Ce taux réduit est applicable aux sommes versées à compter du 1er janvier 2016. Peu importe, donc et semble-t-il, la date de conclusion de l'accord.
(17) On peine à imaginer qu'un groupe de sociétés puisse être l'objet d'une fusion ou d'une absorption...
(18) Les dispositifs proposés par une entreprise sont-ils différents des dispositifs mis en place au sein de l'entreprise ? On peut, à la limite, considérer que les seconds excluent les dispositifs mis en place au niveau de la branche.

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Social général

Cette semaine dans Lexbase Hebdo - édition sociale... Numéro spécial loi "Macron"

Réf. : Loi n° 2015-990 du 6 août 2015, pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC)

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N8738BU8

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par Blanche Chaumet, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition sociale
Sous la Direction de Christophe Radé, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux

Le 03 Septembre 2015

Présenté en Conseil des ministres le 10 décembre 2014, il aura fallu des mois de controverses avant de finalement boucler la saga "Macron" le 5 août 2015 avec la décision du Conseil constitutionnel n° 2015-715 DC du 5 août 2015 (N° Lexbase : A1083NNG). Le loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC) a en effet été l'objet de débats houleux chez les parlementaires avant d'être définitivement adopté par l'Assemblée nationale le 10 juillet 2015, non sans que le Gouvernement ait engagé sa responsabilité à plusieurs reprises pendant le processus législatif, et pour finalement être déclaré partiellement conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel le 5 août 2015.
Construit autour de trois piliers : libérer, investir et travailler, la loi "Macron" vise à agir sur tous les leviers pour favoriser la relance de la croissance, de l'investissement et de l'emploi, abordant, par là même, une grande diversité de thèmes, notamment concernant le droit du travail. Présentée en Conseil des ministres le 10 décembre 2014, il aura fallu des mois de controverses avant de finalement boucler la saga "Macron" le 5 août 2015 avec la décision du Conseil constitutionnel n° 2015-715 DC du 5 août 2015 (N° Lexbase : A1083NNG). Le loi n° 2015-990 du 6 août 2015, pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC) a en effet été l'objet de débats houleux chez les parlementaires avant d'être définitivement adoptée par l'Assemblée nationale le 10 juillet 2015, non sans que le Gouvernement ait engagé sa responsabilité à plusieurs reprises pendant le processus législatif, et pour finalement être déclarée partiellement conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel le 5 août 2015.

Construit autour de trois piliers : libérer, investir et travailler, la loi "Macron" vise à agir sur tous les leviers pour favoriser la relance de la croissance, de l'investissement et de l'emploi, abordant, par là même, une grande diversité de thèmes, notamment concernant le droit du travail.


I - Les modifications relatives à l'épargne salariale

La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques opère des réformes conséquentes concernant le Perco et les autres dispositifs d'épargne salariale. Dorénavant la mise en place d'un Perco est alignée sur le régime des accords de participation. La contribution sur les abondements des employeurs aux plans d'épargne pour la retraite collectifs est supprimée, à compter du 1er janvier 2016. Quant au taux du forfait social relatif aux versements sur un plan d'épargne pour la retraite collectif orienté vers le financement de l'économie, il est abaissé à 16 %.

Enfin, il est possible pour l'employeur d'abonder le Perco même en l'absence de contribution du salarié. Concernant les autres dispositifs d'épargne salariale, on retiendra, entre autres, le blocage par défaut des sommes issues de l'intéressement sur un plan d'épargne entreprise en cas d'absence de choix du salarié et l'harmonisation de la date de versement des primes d'intéressement et de participation.

Mais comme le relève le Professeur Gilles Auzero dans son commentaire sur ces nouvelles dispositions "On ne saurait dire que la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques apporte, en la matière, de profonds bouleversements. Comme souvent par le passé, le législateur a, principalement, souhaité inciter à la mise en place et au développement des dispositifs composant l'épargne salariale qui, on peut le regretter, restent d'une redoutable complexité technique" (lire N° Lexbase : N8673BUR).

II - Les modifications relatives à l'indemnisation des licenciements injustifiés

La loi "Macron" a été conçue, on le sait, dans un contexte économique difficile où la lutte contre le chômage est devenue la priorité du Gouvernement. Afin de garantir une meilleure prévisibilité des indemnités en cas de licenciement injustifiés et lutter ainsi contre la frilosité des employeurs à embaucher, la réforme a introduit un référentiel indicatif fixant, après avis du Conseil supérieur de la prud'homie et selon les modalités prévues par décret en Conseil d'Etat, le montant des dommages-intérêts susceptibles d'être alloués en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, en prenant en compte l'ancienneté, l'âge et la situation du demandeur par rapport à l'emploi. A destination des juges et des parties, ce référentiel a surtout pour objectif affiché de guider les juges dans leur décision. Cependant, comme le souligne le Professeur Alexandre Fabre, si ce référentiel n'a qu'un pouvoir indicatif et que les juges n'y sont nullement soumis, comment être certain que ces derniers le suivront (lire N° Lexbase : N8672BUQ) ?

Afin de lever les incertitudes liées au contentieux des licenciements, la loi "Macron" a également tenté, sans succès, d'instaurer des planchers et des plafonds d'indemnisations pour les licenciements injustifiés en fonction de l'ancienneté du salarié et des effectifs de l'entreprise. A la différence du référentiel, la grille de dommages-intérêts fixée par le législateur devait s'imposer au juge. Si l'on peut y voir une marque de défiance à l'égard du pouvoir judiciaire, il n'en demeure pas moins que les Sages ont retoqué, de façon assez prévisible, cette dernière mesure, jugeant qu'elle violait le principe d'égalité devant la loi en instaurant une différence de traitement injustifiée entre les salariés en fonction de la taille de l'entreprise (Cons. const., décision n° 2015-715 DC, du 5 août 2015 N° Lexbase : A1083NNG). Cette décision était fortement attendue mais certains regrettent un raisonnement jugé laconique et une motivation qui aurait mérité davantage de précisions.

La question se concentre aujourd'hui sur l'article L. 1235-5 (N° Lexbase : L1347H9R) dont la constitutionnalité pourrait très prochainement être remise en cause par QPC puisque ce dernier fait lui-même varier l'indemnisation due en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse en fonction de l'ancienneté des salariés et des effectifs de l'entreprise...

III - Les modifications relatives au repos dominical et en soirée

La loi "Macron" est venue réformer en partie les dérogations au travail dominical et en soirée qui étaient également attendues depuis longtemps.

S'agissant des dérogations municipales, le maire est en mesure d'accorder non plus cinq mais douze dimanches d'ouverture aux établissements situés sur le territoire de la commune.

S'agissant des dérogations préfectorales, leur durée maximale est fixée par la loi à trois ans tandis que la procédure d'autorisation est légèrement remaniée. La modification la plus importante réside probablement dans la suppression de l'avis, normalement donné avant l'octroie de l'autorisation, en cas d'urgence dûment justifiée et lorsque la dérogation n'excède pas trois dimanches. En outre, la loi prévoit qu'à la demande des organisations représentatives d'une zone géographique concernée, le préfet est tenu d'abroger l'arrêté de fermeture des établissements de la profession ou de la zone géographique concernée pendant la durée du repos hebdomadaire lorsque la majorité des membres de la profession l'exige.

La loi ajoute de nouvelles dérogations sur un fondement géographique, créant ainsi des zones touristiques internationales (ZTI), des zones touristiques (ZT), des zones commerciales (ZC) ou encore des zones d'emprise d'une gare à grande affluence. Chaque zone comporte son lot de particularités, les modalités définissant et délimitant ces zones variant peu ou proue en fonction de leur vocation respective. Selon certaines conditions, le travail en soirée de 21 heure à minuit est ouvert dans les ZTI à certains établissements, et des règles particulières sont également réservées aux commerces de détail alimentaire qui bénéficient de plein droit de la possibilité de donner le repos dominical à partir de 13 heures le dimanche dans les ZTI et les gares à forte affluence.

La majorité des dérogations temporaires au travail dominical et en soirée se cristallise, d'une part, autour d'un accord collectif garantissant un certain nombre de droits aux salariés, notamment les contreparties qui leur sont dues, et, d'autre part, sur le volontariat (ZTI, ZT, ZC, gare à grande affluence). Quoiqu'il en soit, le Professeur Sébastien Tournaux constate que de manière générale, "la loi semble en permanence chercher un équilibre entre l'assouplissement des conditions des dérogations d'une part, et le développement de contreparties pour les salariés concernés d'autre part" (lire N° Lexbase : N8671BUP).

IV - Les modifications relatives au licenciement pour motif économique et à la sécurisation de l'emploi

C'est à la marge que la loi "Macron" est venue modifier les règles relatives aux licenciements pour motif économique.

En allongeant la durée maximale de deux à cinq ans des accords de maintien de l'emploi, en accordant la possibilité aux partenaires sociaux de prévoir, dans le cadre de cet accord, les conditions et les modalités selon lesquelles celui-ci peut être suspendu en cas d'amélioration ou d'aggravation de la situation économique de l'entreprise, et en précisant les modalités d'acceptation ou de refus par le salarié de l'application de l'accord à son contrat, la loi "Macron" s'attaque au régime même des accords de maintien de l'emploi. Depuis cette loi, lorsque le salarié s'oppose à l'accord de maintien de l'emploi, l'employeur est exonéré de l'obligation individuelle de reclassement préalable à son licenciement. Sur ce point, si Magali Gadrat, Maître de conférences, rappelle que le régime des licenciements consécutifs au refus de plusieurs salariés de se voir appliquer un accord de maintien de l'emploi tel qu'issu de la loi du 14 juin 2013 était déjà contraire au droit européen relatif aux licenciements collectifs, il est encore plus regrettable qu'il soit devenu de surcroît contraire à de nombreuses normes supranationales relatives au droit fondamental des salariés de contester le bien-fondé de la rupture de leur contrat de travail... (lire N° Lexbase : N8682BU4).

De même, si la loi vient alléger l'obligation de reclassement hors du territoire national dans les entreprises ou groupes internationaux en la conditionnant strictement à la demande expresse du salarié menacé de licenciement, la loi reste cependant laconique sur les modalités de cette demande.

En revanche, on ne peut que se féliciter, d'une part, des précisions ajoutées par la loi "Macron" sur la fixation conventionnelle ou unilatérale du périmètre d'application des critères de l'ordre des licenciements en cas de grand licenciement collectif dans les entreprises d'au moins cinquante salariés qui mettent fin aux incertitudes en la matière, et d'autre part, de la suppression de la référence au contrôle administratif des petits licenciements collectifs dans les entreprises d'au moins cinquante salariés.

Enfin, la loi "Macron" supprime le rôle de la DIRECCTE s'agissant du prononcé des grands licenciements collectifs dans les entreprises soumises à une procédure collective employant au moins cinquante salariés, puisqu'elle n'est plus tenue de s'assurer de la proportionnalité du contenu du PSE aux moyens dont dispose le groupe. Elle précise, en revanche, son rôle, dans les entreprises in bonis, lorsque la décision d'homologation/validation administrative du projet de grand licenciement collectif est annulée en raison d'une insuffisance de motivation.

Le nouveau régime du contrat de sécurisation professionnelle intègre, quant à lui, les modifications de la Convention Unedic du 26 janvier 2015 et de l'ANI du 8 décembre 2014 pour notamment allonger la durée du CSP en cas de reprise d'une activité salariée dans le cadre de ce dispositif, et obliger les OPCA à participer aux actions de formation prévues dans le cadre du CSP.

V - Les modifications relatives à la justice prud'homale

Avec la lenteur des jugements et l'accroissement des contentieux en droit du travail, la réforme de la justice prud'homale s'inscrit dans l'ère du temps et est toujours à l'ordre du jour. Si la loi "Macron" a le mérite de lancer le mouvement de la réforme, elle demeure une ébauche qui devra être complétée par la suite puisque, comme le souligne Vincent Orif, Maître de conférences, il est actuellement difficile de trouver une cohérence globale (lire N° Lexbase : N8676BUU et N° Lexbase : N8694BUK).

Au demeurant, la loi est tout de même venue préciser les obligations des conseillers prud'hommes en mettant l'accent sur la volonté d'améliorer leur intégration dans le corps judiciaire et en prévoyant des obligations similaires à celles des magistrats (indépendance, impartialité, dignité, probité, secret des délibérés, prohibition des mandats impératifs avant et après l'entrée en fonction...). En outre, la formation des conseillers prud'hommes est renforcée, chaque conseiller devant suivre une formation initiale de cinq jours avant sa prise de fonction qui s'ajoute à la formation continue.

La loi "Macron" créé également un nouveau statut du défenseur syndical dans l'entreprise, lequel devient un salarié protégé et voit ses absences pour exercer sa mission rémunérées.

La principale innovation réside surtout dans l'instauration d'un nouveau droit disciplinaire des conseillers prud'hommes dont la procédure se rapproche, dorénavant, de celle des magistrats de carrières, malgré quelques spécificités. En outre, une nouvelle définition de la faute disciplinaire est prévue par la loi et les sanctions sont modifiées, puisque, si la suspension pour une durée de six mois est maintenue, en revanche la censure est remplacée par le blâme, et deux catégories de déchéance (l'une provisoire, l'autre définitive) sont assorties de l'interdiction d'exercer les fonctions de conseiller prud'homme.

Afin de lutter contre les difficultés susceptibles de se présenter lors de la constitution ou lors du fonctionnement du conseil de prud'homme, la loi "Macron" a également encadré la possibilité de transférer les affaires dans ces deux cas de figures tout en précisant la procédure alors applicable.

Sur le terrain procédural, alors que le bureau de conciliation devient le bureau de conciliation et d'orientation (BCO), la loi en profite pour simplifier la présentation de la composition de chacune des formations du conseil de prud'hommes et réaffirme la mission du BCO de concilier les parties. Plus généralement, la loi précise les étapes de la procédure prud'homale en l'absence de conciliation ou de conciliation partielle et ouvre la médiation conventionnelle ainsi que la convention de procédure participative à tous les contrats de travail, laissant ainsi la part belle aux solutions amiables avant la saisine du juge.

Enfin, la loi précise que toutes les juridictions de l'ordre judiciaire peuvent désormais solliciter l'avis de la Cour de cassation avant de statuer sur l'interprétation d'une convention ou d'un accord collectif lorsqu'il existe une difficulté sérieuse se posant dans de nombreux litiges.

VI - Les modifications relatives à l'emploi et à la formation et à la lutte contre la prestation de services internationale illégale

L'aspect "emploi et formation", s'il apporte quelques modifications en matière sociale reste un sujet traité à la marge dans la loi "Macron". D'ailleurs, qu'il s'agisse des périodes de mise en situation professionnelle, de la prise en compte des stages de découverte des élèves de troisième dans l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés, de la suppression de dix-neuf articles du Code du travail relatifs aux emplois jeunes jugés obsolètes, des stages de préparation à l'installation par les organisations professionnelles et les chambres de métiers et de l'artisanat ou encore de la prise en charge de la rémunération des salariés des TPE en formation par les OPCA, le moins que l'on puisse dire, c'est que la loi "Macron" s'est montrée, comme le constate le Professeur Christophe Willmann, très "disparate" quant aux aspects abordés (lire N° Lexbase : N8733BUY), sans oublier le traitement du dispositif des adultes-relais à Mayotte et le remplacement du contrat d'accès à l'emploi par le contrat initiative emploi.

L'un des objectifs affichés de la loi concernait également la lutte contre les prestations de services internationales illégales. C'est pourquoi, dans ce domaine, la loi "Macron" s'est efforcée de renforcer les dispositifs déjà existant et de mettre en place de nouveaux outils. Dorénavant, la DIRECCTE peut ainsi ordonner la suspension de l'activité d'un prestataire étranger qui a détaché des salariés en cas de manquement grave à l'ordre public social, et en cas de non respect de cette décision, prononcer une amende administrative pouvant aller jusqu'à 100 000 euros par salarié.

La lutte contre les infractions à la législation sur les travailleurs détachés sur le territoire national est également renforcée avec l'obligation, pour l'employeur, de présenter les documents à l'inspection du travail garantissant le respect des règles relatives au détachement.

En outre, la responsabilité du donneur d'ordre ou du maître d'ouvrage à l'égard du cocontractant qui détache des travailleurs est renforcée, et le plafond des sanctions administratives en matière de détachement transnational de travailleurs salariés est modifié, passant de 10 000 à 500 000 euros.

Par ailleurs, la loi "Macron" rend obligatoire pour l'ensemble des entreprises établies en France ou à l'étranger la délivrance d'une carte d'identification professionnelle des salariés du bâtiment et des travaux publics et met en place une procédure dématérialisée de déclaration préalable de détachement des salariés.

VII - Conclusion générale

Forte de ses 306 articles et de ses 116 pages publiées au Journal officiel du 7 août 2015, la loi "Macron" est tout sauf une loi simple et homogène. Si elle avait comme objectif de clarifier le droit du travail, on est loin de la simplification attendue initialement puisque, pour reprendre l'expression du Professeur Christophe Radé, on se retrouve face à "un législateur schizophrène, complexifiant d'une main et simplifiant de l'autre" (lire N° Lexbase : N8714BUB). Pour autant, la simplification du droit du travail s'avère aujourd'hui une nécessité que l'on ne peut plus indéfiniment reporter, et si la loi "Macron" n'y est pas parvenue, le législateur sera bientôt contraint de se mettre au travail...

newsid:448738

Social général

[Textes] Loi "Macron" : dispositions relatives à l'emploi et à la formation et à la lutte contre la prestation de services internationale illégale (art. 273 à 284 ; art. 298 et 299)

Réf. : Loi n° 2015-990 du 6 août 2015, pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC)

Lecture: 11 min

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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen et Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Droit de la protection sociale"

Le 10 Septembre 2015

La loi n° 2015-990 du 6 août 2015, pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (1) (N° Lexbase : L4876KEC), ne s'intéresse aux questions sociales qu'à la marge, qu'en tant que champ dans lequel le législateur a cru pouvoir intervenir, afin, plus généralement, d'"assurer la confiance, [...] simplifier les règles qui entravent l'activité économique et [...] renforcer les capacités de créer, d'innover et de produire" (exposé des motifs).
Le troisième volet de la loi porte sur le développement de l'emploi et du dialogue social, c'est-à-dire, en l'espèce, la législation sur les dérogations à l'interdiction de l'ouverture dominicale et en soirée du commerce de détail (objectif : répondre aux enjeux du développement du territoire dans les zones d'attractivité économique et touristique), l'amélioration du fonctionnement de la justice prud'homale (objectifs : réduire les délais de jugement et les taux d'appel excessivement élevés). Aussi, dans l'esprit du législateur, seules deux questions, fondamentalement, méritaient l'attention : le travail le dimanche et en soirée et le fonctionnement des conseils des prud'hommes.
L'esprit général évoque le rapport "Attali" (2), qui prônait, pratiquement dans les mêmes termes, "[de] faciliter la concurrence, la création et la croissance des entreprises, par la mise en place de moyens modernes de financement, la réduction du coût du travail et la simplification des règles de l'emploi".
Réduire la loi "Macron" à ces deux aspects, fussent-ils importants pour les employeurs et les salariés et couverts si largement par les médias, serait trop réducteur et scientifiquement incomplet. D'autres points sont traités par cette dernière : simplification pour les entreprises des dispositions relatives au handicap (art. 272 à 278) ; renforcement de la lutte contre le travail illégal (fraudes au détachement, art. 279 et 280 ; carte d'identification professionnelle pour les salariés intervenant sur un chantier du bâtiment ou de travaux publics, art. 282) ; assouplissement de la loi relative à la sécurisation de l'emploi (art. 287 à 295).
I - Dimension "emploi et formation" de la loi "Macron", en France métropolitaine et d'outre-mer

A - Emploi et formation, en France métropolitaine

Ces questions, traitées par la loi "Macron" aux articles 273 à 278, portent sur des aspects très disparates : les périodes de mises en situation en milieu professionnel ; la prise en compte des stages de découverte des élèves de troisième dans l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés ; la suppression de dispositions obsolètes du Code du travail (spéc., les emplois jeunes) ; les stages de préparation à l'installation par les organisations professionnelles et les chambres de métiers et de l'artisanat ; enfin, la prise en charge de la rémunération des salariés des très petites entreprises (TPE) en formation.

1 - Périodes de mises en situation en milieu professionnel

La loi "Macron" (art. 273 ; C. trav., art. L. 5212-7-1 N° Lexbase : L1649KG8) (3) fait une modalité d'acquittement partiel de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés, au même titre que pour les stages (prévus à l'article L. 5212-7 du Code du travail N° Lexbase : L2117KGI). La loi du 6 août 2015 intervient peu de temps après loi du 5 mars 2014 (loi n° 2014-288 du 5 mars 2014, relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale N° Lexbase : L6066IZP), laquelle avait créé la période de mise en situation en milieu professionnel, nouveau dispositif d'insertion dans l'emploi, ouvert à la fois aux travailleurs et aux demandeurs d'emploi, et leur permettant de jouir d'une expérience professionnelle (C. trav., art. L. 5135-1 N° Lexbase : L6510IZ7).

Pour éviter d'éventuels abus, le législateur a prévu que l'employeur ne puisse s'acquitter de son obligation d'emploi des personnes handicapées en les accueillant en stage ou dans le cadre de périodes de mise en situation professionnelle que dans la limite de 2 % de l'effectif total des salariés de l'entreprise.

2 - Prise en compte des stages de découverte des élèves de troisième dans l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés

La loi "Macron" (art. 274 ; C. trav., art. L. 5212-7) inclut dans les bénéficiaires de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés, les élèves handicapés de moins de seize ans accueillis en entreprise dans le cadre de stages de découverte. En effet, les élèves handicapés rencontrent de grandes difficultés pour réaliser leurs stages de découverte en entreprise, et le législateur a entendu les y aider.

Certains parlementaires avaient craint que certaines entreprises tentent de s'acquitter de leur obligation d'emploi des travailleurs handicapés en ayant massivement recours aux stages des élèves de l'enseignement secondaire, au détriment du recrutement d'adultes handicapés. L'argument n'a donc pas convaincu, d'autant plus que la portée du dispositif est modeste (4) : un stage d'une semaine d'un élève de troisième, par exemple, comptera pour 0,02 bénéficiaire.

Cette mesure n'a pas fait l'unanimité : elle a été critiquée (5), en tant que moyen d'assouplir l'obligation pesant sur les entreprises en matière d'emploi des personnes handicapées, sans que la contrepartie soit réelle en matière de création d'emplois pour les personnes handicapées.

3 - Suppression de dispositions obsolètes du Code du travail

La loi "Macron" (art. 276 ; C. trav., art. L. 5134-1 N° Lexbase : L2138H93 à L. 5134-19) (6) a retiré du Code du travail des articles relatifs aux emplois jeunes (soit dix-neuf articles du Code du travail) devenus obsolètes depuis que le dispositif des emplois jeunes institué par la loi n° 97-940 du 16 octobre 1997 (N° Lexbase : L7749A8I) s'est définitivement éteint au début des années 2010.

4 - Stage de préparation à l'installation par les organisations professionnelles et les chambres de métiers et de l'artisanat

La loi "Macron" (art. 278 ; art. 2 de la loi n° 82-1091 du 23 décembre 1982 N° Lexbase : L9231KGY) permet aux chambres de métiers et de l'artisanat d'organiser le stage de préparation à l'installation destiné aux futurs chefs d'entreprise artisanale en y associant désormais les organisations professionnelles "intéressées" (au sens de l'ordonnance du 18 décembre 2003 portant création du fonds d'assurance formation des artisans N° Lexbase : L9710DL9) au lieu des organisations professionnelles "représentatives". En effet, jusqu'à présent, les chambres opéraient un choix entre différentes organisations professionnelles, interprétant la notion d'organisation professionnelle représentative.

5 - Prise en charge de la rémunération des salariés des TPE en formation

Le législateur (loi "Macron", art. 277 ; C. trav., art. art. L. 6332-6 N° Lexbase : L2123KGQ) (7) autorise les organismes collecteurs paritaires agréés (OPCA) à prendre en charge la rémunération des salariés des entreprises de moins de dix salariés effectuant une formation.

L'ANI du 14 décembre 2013 (N° Lexbase : L7503IZW) (art. 39) permet aux OPCA de prendre en charge la rémunération des salariés des entreprises de moins de dix salariés qui suivent une formation inscrite dans le plan de formation, si un accord de branche le prévoit et dans la limite du smic horaire. La loi du 5 mars 2014 a transposé un certain nombre de dispositions de l'ANI dans la loi, mais n'a pas fait figurer explicitement dans le Code du travail la possibilité pour les OPCA de prendre à leur charge le salaire des salariés des TPE en formation.

Le décret n° 2014-1240 du 24 octobre 2014 (N° Lexbase : L5444I4E) sur les OPCA n'offrait pas non plus la possibilité aux OPCA de prendre en charge la rémunération des salariés des TPE partis en formation. La loi "Macron" a donc corrigé cette imprécision.

B - Emploi ultra marin

Les apports de la loi "Macron" sont modestes. Ils se résument à ces deux points : dispositif des adultes-relais à Mayotte ; remplacement du contrat d'accès à l'emploi par le contrat initiative emploi et abrogation du contrat d'insertion par l'activité.

1 - Dispositif des adultes-relais à Mayotte

La loi "Macron" (art. 298 ; C. trav. Mayotte, art. L. 323-1 N° Lexbase : L1664KGQ à L. 323-10) insère dans le Code du travail applicable à Mayotte les dispositions du Code du travail concernant les contrats relatifs aux activités d'adultes-relais. Elle les adapte aux nécessités locales, afin d'autoriser la signature des conventions de recrutement et d'assurer leur financement. En effet, depuis 2011 (8), les objectifs de mise en place des CAE-DOM ne sont plus atteints. En 2013, seuls 3 916 contrats ont été signés au lieu des 5 806 programmés.

Pourtant, les besoins du département de Mayotte en la matière sont très importants : les dix-sept communes de Mayotte ont toutes au moins un quartier prioritaire relevant de la politique de la ville ; elles connaissent un contexte de croissance démographique dynamique.

2 - Remplacement du contrat d'accès à l'emploi par le contrat initiative emploi et abrogation du contrat d'insertion par l'activité

La loi "Macron" habilite le Gouvernement à prendre, par ordonnance, des mesures pour remplacer, outre-mer, le contrat d'accès à l'emploi (spécifique à l'outre-mer) par le contrat initiative emploi et pour abroger le contrat d'insertion par l'activité, abandonné en tout état de cause depuis 2012 (art. 275) (9).

II - Lutte contre la prestation de services internationale illégale

Le détachement de travailleurs en France donne lieu à des infractions graves particulièrement en matière de droit du travail (salaire minimum légal, durée du travail et hébergement de travailleurs). La loi "Macron" (art. 279 à 284) intervient dans ce contexte de prise de conscience et de volonté des pouvoirs publics, de renforcer les dispositifs existants et de mise en place de nouveaux outils.

1 - Prestataire étranger qui détache des salariés

Dans le prolongement de la loi du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale (loi n° 2014-790 du 10 juillet 2014 N° Lexbase : L7015I39) et de la Directive 2014/67 du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014, relative au détachement de travailleurs (N° Lexbase : L2739I3T) (renforçant les moyens à la disposition des agents en charge de la lutte contre le travail illégal et les fraudes aux prestations de services internationales), la loi "Macron" (art. 280 ; C. trav., art. L. 1263-3 N° Lexbase : L1650KG9 à L. 1263-6) autorise la DIRECCTE à ordonner la suspension de l'activité d'un prestataire étranger qui a détaché des salariés en cas de manquement grave à l'ordre public social et en cas de non-respect de cette décision et à prononcer une amende administrative d'un montant maximal de 10 000 euros par salarié. Le contexte est celui du développement du détachement illégal de salariés, spécialement dans les secteurs du bâtiment et des transports.

Les travailleurs détachés doivent être distingués de trois autres types de travailleurs exerçant leur profession à l'étranger : les travailleurs migrants (ils résident et travaillent dans un ou plusieurs Etats et résident et travaillent dans le dernier de ces Etats) ; les travailleurs transfrontaliers (ils exercent une profession dans un Etat membre, Etat d'emploi, mais résident dans un autre Etat membre, Etat de résidence) ; enfin, les travailleurs "plurinationaux" (ils exercent simultanément et de manière permanente dans plusieurs Etats différents).

Les travaux parlementaires (10) ont montré les lacunes de la Directive du 15 mai 2014, les insuffisances du dispositif de coopération et de contrôle entre les Etats membres et l'impuissance des règles de contrôle face à la sophistication des fraudes, des abus et des contournements (par ex., affaire du chantier du réacteur nucléaire EPR de Flamanville et le travail dissimulé de 460 ouvriers polonais et roumains).

- Renforcement de la lutte contre les infractions à la législation sur les travailleurs détachés

Désormais, tout employeur détachant temporairement des salariés sur le territoire national doit présenter à l'inspection du travail les documents, traduits en français, permettant de vérifier le respect des dispositions relatives au détachement de salariés. Le manquement à cette obligation et la transmission d'informations délibérément erronées sont ajoutés à la liste des manquements susceptibles d'entraîner une suspension des activités par décision de la DIRECCTE (C. trav., art. L. 1263-7 N° Lexbase : L1654KGD).

- Critères du détachement

Un employeur ne peut se prévaloir des dispositions applicables au détachement de salariés lorsqu'il n'exerce que des activités relevant de la gestion interne ou administrative dans le pays dans lequel il est établi, ou lorsque son activité en France est réalisée de manière habituelle, stable et continue (C. trav., art. L. 1262-3).

- Accessoires du salaire

Les accessoires du salaire, tels que les primes, indemnités et majorations de toutes natures doivent être payés par les employeurs établis hors de France qui détachent des salariés sur le territoire national (C. trav., art. L. 1262-4, 8° N° Lexbase : L2129KGX).

- Obligations pour le donneur d'ordre ou le maître d'ouvrage

Le législateur a entendu renforcer la responsabilité du donneur d'ordre ou du maître d'ouvrage à l'égard du cocontractant qui détache des travailleurs :

- s'il ne s'est pas fait remettre par son cocontractant une copie de la déclaration de détachement (prévue par l'article L. 1262-2-1 N° Lexbase : L7356I3T), le maître d'ouvrage ou le donneur d'ordre doit lui-même adresser à l'inspection du travail, sous quarante-huit heures, une déclaration dont le contenu sera précisé par voie réglementaire (C. trav., art. L. 1262-4-1 N° Lexbase : L2128KGW) ;

- lorsqu'il est informé par l'inspection du travail du non-paiement du salaire minimal par son cocontractant, le donneur d'ordre ou le maître d'ouvrage doit lui enjoindre de faire cesser cette situation. Si l'infraction persiste et qu'il ne dénonce pas le contrat, il devra payer les rémunérations dues solidairement avec l'employeur (C. trav., art. L. 1262-4-3 N° Lexbase : L1655KGE).

- Accès au répertoire commun de la protection sociale

Enfin, le législateur (CSS, art. L. 114-12-1 N° Lexbase : L2131KGZ) rend possible l'accès au répertoire national commun de la protection sociale à l'association en charge de la mise en oeuvre du régime de garantie des salaires (AGS). Cette disposition a pour objet de lutter contre la fraude en permettant des échanges plus rapides entre l'AGS et les organismes sociaux.

2 - Sanctions administratives en matière de détachement transnational de travailleurs salariés

La loi "Macron" (art. 279 ; C. trav., art. L. 1264-3 N° Lexbase : L2124KGR) s'inscrit dans le prolongement de la loi du 10 juillet 2014, laquelle avait consacré l'obligation, pour toute entreprise non établie en France qui souhaite fournir des prestations de services sur le territoire national en détachant ses salariés, de déposer une déclaration préalable de détachement et de désigner un représentant de son entreprise en France ; la loi du 10 juillet 2014 avait instauré des sanctions administratives en cas de non-respect (C. trav., art. L. 1264-1 N° Lexbase : L2126KGT à L. 1264-3).

L'amende administrative est prononcée par l'autorité administrative compétente ; son montant maximal était de 2 000 euros par salarié détaché ; de 4 000 euros en cas de récidive dans un délai d'un an à compter du jour de la notification de la première amende ; le montant total de l'amende ne pouvait être supérieur à 10 000 euros. Ce plafond de 10 000 euros est apparu comme trop faible pour être dissuasif compte tenu de l'ampleur des fraudes parfois constatées : c'est pourquoi la loi "Macron" l'a fait passer à 500 000 euros.

3 - Lutte contre la concurrence sociale déloyale, domaine des transports

La loi "Macron" (art. 281 ; C. transport, art. L. 1331-1 N° Lexbase : L2133KG4 à L. 1331-3) (11) a pris des dispositions relatives à la lutte contre la concurrence sociale déloyale spécifiquement dans le secteur des transports, dans le prolongement de la loi du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale.

Ainsi, désormais, pour l'application des articles L. 1262-4-1 (obligation de vigilance), L. 1264-2 (N° Lexbase : L2125KGS) (sanction administrative), L. 3245-2 (N° Lexbase : L7728I3M) (maître d'ouvrage ou le donneur d'ordre sont financièrement solidaire de la rémunération des salariés du prestataire étranger), L. 4231-1 (N° Lexbase : L7726I3K) (conditions d'hébergement collectif incompatibles avec la dignité humaine) et L. 8281-1 du Code du travail (N° Lexbase : L7727I3L) (devoir d'alerte en cas de non-respect du "noyau dur" des droits des salariés d'un sous-traitant), le destinataire d'un contrat de transport est assimilé au donneur d'ordre.

4 - Carte d'identification professionnelle des salariés du bâtiment et des travaux publics

La loi "Macron" rend obligatoire la délivrance d'une carte d'identification professionnelle à chaque salarié effectuant des travaux de bâtiment ou de travaux publics, quel que soit le lieu d'établissement de son entreprise et renforce la lutte contre le travail illégal en matière de fermeture administrative d'établissement (art. 282 ; C. trav., art. L. 8224-3 N° Lexbase : L2137KGA, L. 8234-1 N° Lexbase : L2135KG8, L. 8256-3 N° Lexbase : L2136KG9, L. 8272-2 N° Lexbase : L2138KGB et L. 8291-1 N° Lexbase : L1662KGN à L. 8291-3) (12).

En 2007, a été créée une carte d'identification ("carte d'identification professionnelle") des salariés des entreprises du secteur du bâtiment afin de lutter contre le travail illégal. Cette carte BTP d'identification professionnelle était destinée à tous les salariés du bâtiment et des travaux publics, quel que soit l'effectif ou l'activité de l'entreprise. L'employeur doit la demander à sa caisse de congés, lors de toute nouvelle embauche, celle-ci étant établie gratuitement après la déclaration unique d'embauche du salarié.

Mais l'inconvénient de cet outil est qu'il repose sur une adhésion volontaire des employeurs ; il s'applique aux seules entreprises établies en France qui relèvent du régime particulier des congés payés ; il ignore les salariés intérimaires. C'est pourquoi la loi "Macron" rend obligatoire pour l'ensemble des entreprises, établies en France ou à l'étranger, occupant ou faisant travailler des salariés, y compris les salariés intérimaires, le cas échéant détachés en France, sur un chantier de bâtiment ou de travaux publics, un dispositif d'identification professionnelle.

5 - Déclaration préalable de détachement de salariés

Le législateur a mis en place une procédure dématérialisée de déclaration préalable de détachement de salariés (art. 283 ; C. trav., art. L. 1262-2-2 N° Lexbase : L1659KGK) (13). Cette procédure dématérialisée a été étendue par la loi "Macron" à l'attestation de détachement (C. transport, art. L. 1331-1 N° Lexbase : L2133KG4) qui se substitue, pour les entreprises de transport routier et fluvial, à la déclaration de détachement de droit commun (prévue par l'article L. 1262-2-1 du Code du travail).


(1) Travaux parlementaires : C. Deroche, D. Estrosi Sassone et F. Pillet, Rapport Sénat n° 541 (2014-2015), 23 juin 2015 ; C. Deroche, D. Estrosi Sassone et F. Pillet, Rapport Sénat n° 370 (2014-2015), 25 mars 2015 ; R. Ferrand, C. Castaner, L. Grandguillaume, D. Robiliard, G. Savary, A. Tourret, S. Travert, C. Untermaier et C. Valter, Rapport Assemblée Nationale n° 2498, Tome I, vol. II, 19 janvier 2015 ; R. Ferrand, C. Castaner, L. Grandguillaume, D. Robiliard, G. Savary, A. Tourret, S. Travert, C. Untermaier et C. Valter, Rapport Assemblée Nationale n° 2866, Tome I, Vol. II, 11 juin 2015.
(2) Rapport de la Commission pour la libération de la croissance française, XO Éditions, La Documentation française, 2008 : "il est nécessaire de créer les conditions d'une mobilité sociale, géographique et concurrentielle. De permettre à chacun de travailler mieux et plus, de changer plus facilement d'emploi, en toute sécurité. Nécessaire aussi d'ouvrir le pays aux idées et aux hommes venus d'ailleurs", introduction du Rapport, p. 13. V. également, p. 17, "Ambition 5 Supprimer les rentes, réduire les privilèges et favoriser les mobilités [...] Décision fondamentale 14 Ouvrir très largement les professions réglementées à la concurrence sans nuire à la qualité des services rendus".
(3) R. Ferrand et alii, Rapport Assemblée Nationale n° 2866, Tome I, Vol. II, 11 juin 2015, préc.
(4) C. Deroche et alii, Rapport Sénat n° 541 (2014-2015), 23 juin 2015, préc. ;
(5) R. Ferrand et alii, Rapport Assemblée Nationale n° 2866, Tome I, Vol. II, 11 juin 2015, préc.
(6) C. Deroche et alii, Rapport Sénat n° 541 (2014-2015), 23 juin 2015, préc. ;
(7) C. Deroche, D. Estrosi-sassone et F. Pillet, Rapport Sénat n° 370 (2014-2015), 25 mars 2015, préc.
(8) En 2011, la mise en oeuvre du contrat unique d'insertion (CUI) s'est traduite, en Outre-mer, par la mise en oeuvre du même contrat qu'en métropole dans le secteur non-marchand, le contrat d'accompagnement dans l'emploi (CUI-CAE). Mais dans le secteur marchand, le contrat d'accès à l'emploi (CAE-DOM) a été maintenu, bien qu'adapté. En France métropolitaine, le contrat en vigueur est le contrat initiative emploi (CUI-CIE).
(9) R. Ferrand et alii, Rapport Assemblée Nationale n° 2498, Tome I, vol. II, 19 janvier 2015, préc.
(10) R. Ferrand et alii, Rapport Assemblée Nationale n° 2498, Tome I, vol. II, 19 janvier 2015, selon lequel, qu'en douze ans, le nombre de salariés officiellement détachés a été multiplié par plus de vingt en France, passant de 7 495 en 2000 à 169 613 en 2012, et devrait atteindre près de 210 000 en 2013. Selon l'étude d'impact, en 2013 on dénombrait 67 000 déclarations et 212 000 salariés détachés ; les 67 000 déclarations effectuées équivalent à plus de 7,4 millions de jours de détachement, soit plus de 32 000 équivalents temps plein. Le nombre de déclaration a progressé de 12 % par rapport à 2012 et le nombre de jours détachés de 30 %.
(11) C. Deroche, et alii, Rapport Sénat n° 541 (2014-2015), 23 juin 2015, préc.
(12) C. Deroche et alii, Rapport Sénat n° 541 (2014-2015), 23 juin 2015, préc.
(13) C. Deroche et alii, Rapport Sénat n° 541 (2014-2015), 23 juin 2015, préc.

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Social général

[Doctrine] Simplifier le droit du travail - ou comment vider le tonneau des Danaïdes

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N8714BUB

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par Christophe Radé, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale

Le 07 Septembre 2015

L'été 2015 aura livré aux juristes du travail deux textes très attendus, censés redonner de la vigueur aux entreprises étouffées par un droit du travail devenu illisible, inefficace et injuste : la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC), dite loi "Macron", et la loi n° 2015-994 du 17 août 2015, relative au dialogue social et à l'emploi (N° Lexbase : L2618KG3), dite loi "Rebsamen". Un premier constat s'impose à la lecture de ces deux textes : leur volume ! 308 articles et 116 pages de Journal officiel, pour la loi "Macron", 62 articles et 45 pages pour la loi "Rebsamen". Une seconde observation saute aux yeux, comme un paradoxe, un défi à l'entendement : ces deux textes sont censés simplifier le droit du travail ! Les images se bousculent alors, celle d'un législateur schizophrène, complexifiant d'une main et simplifiant de l'autre, ou celle d'une malédiction frappant les Danaïdes jugées et précipitées dans le Tartare, et condamnées à remplir éternellement des jarres percées... La complexité serait-elle, dès lors, inhérente au droit du travail, et la simplicité impossible à réaliser ? Sans doute pas. Aujourd'hui, et c'est la condition première pour qu'une véritable entreprise de simplification du droit du travail puisse opérer, la nécessité de simplifier semble généralement admise (I). Même si la mise en oeuvre pêche, les voies de cette simplification semblent également se dessiner (II).
I - La simplification du droit du travail comme nécessité

Un objectif affiché. La lecture de l'exposé des motifs des deux textes adoptés pendant l'été (les lois "Macron" et "Rebsamen") montre à quel point le Gouvernement s'inscrit dans la recherche actuelle de simplification du droit, démarche dont il est aisé de mesurer la portée symbolique en observant l'intitulé des douze lois et sept ordonnances publiées ces dernières années visant explicitement cet objectif (1).

La simplification dans la loi "Macron". S'agissant de la loi "Macron", la complexité du droit est visée dès la première phrase de l'exposé des motifs comme l'ennemi à abattre : "pour renouer avec une croissance durable, l'économie française doit être modernisée et les freins à l'activité levés. Pour atteindre ces objectifs, la loi pour l'activité et la croissance vise à assurer la confiance, à simplifier les règles qui entravent l'activité économique et à renforcer les capacités de créer, d'innover et de produire des Français et en particulier de la jeunesse". Et c'est logiquement que la simplicité constitue la mère des vertus législatives : c'est la "levée des obstacles réglementaires qui limitent l'offre de logements neufs intermédiaires" qui pourra "favoriser la mobilité" et fluidifier le marché immobilier ; c'est l'adoption "des mesures de simplification réduisant les délais d'attribution des permis de construire et des projets d'aménagement" qui va relancer le secteur du bâtiment ; c'est en simplifiant encore et en accélérant "les procédures applicables aux projets industriels et [en rendant] [...] plus lisible et plus stable l'environnement législatif" que l'on va "stimuler l'innovation et l'investissement". La loi se propose également de "simplifier" les conditions d'ouverture de bureaux secondaires des avocats ; le recours au salariat dans les offices publics et ministériels ; le dispositif des ventes judiciaires de meubles ; les domaines d'intervention du professionnel de l'expertise comptable en matière administrative, économique, fiscale et sociale des entreprises ou des particuliers ; la création de structures associant des professionnels du droit et de l'expertise-comptable ; les règles relatives à la société d'exercice libéral et à la société de participations financières de professions libérales ; l'harmonisation des conditions de dispense de recours à l'architecte et le fait de donner cette possibilité à toutes les exploitations agricoles, quelle que soit leur forme de société ; la procédure d'autorisation pour l'implantation de la fibre optique dans les parties communes d'un immeuble ; la procédure d'établissement des servitudes radioélectriques prévues par le CPCE ; les modalités d'imposition du gain d'acquisition des actions gratuites, égal à la valeur des actions gratuites au jour de leur acquisition, afin d'augmenter l'attractivité de ce dispositif ; le cadre juridique de l'intervention de l'Etat actionnaire ; les relations entre locataires et bailleurs ; l'architecture de la commande publique ; les procédures devant l'Autorité de la concurrence et l'amélioration de leur efficacité.

Le droit du travail ne pouvait, bien entendu, pas demeurer étranger à ce mouvement, et la loi "Macron" vise également à simplifier les dispositifs existants de l'épargne salariale ; les dispositions relatives au handicap, notamment la manière dont l'employeur peut s'acquitter partiellement de l'obligation d'emploi en accueillant des personnes handicapées pour des périodes de mise en situation en milieu professionnel ; des processus, notamment pour le reclassement à l'international ou le périmètre d'application de l'ordre des licenciements.

La simplification dans la loi "Rebsamen". Quoi que principalement destinée à améliorer la qualité du dialogue social, singulièrement dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux, la loi "Rebsamen" n'échappe pas non plus à l'exigence de simplification, celle-ci étant un gage d'une meilleure efficacité du dialogue social qui doit ainsi "gagner en densité et en richesse". Succombe également à la mode de la simplification le revenu de solidarité active, le fonctionnement des institutions représentatives du personnel, les obligations d'information de l'employeur, ou encore la prime d'activité.

Un désir de simplification très largement partagé. L'un des phénomènes marquant de ces derniers mois est certainement la conversion d'une partie de la doctrine travailliste aux vertus de la simplification (2).

Certes, il subsiste toujours une partie non négligeable de la population des juristes du travail, historiquement d'ailleurs pionnière dans la quête de simplification (3), qui voit dans la simplification du droit du travail le meilleur moyen de se débarrasser des contraintes normatives pesant sur les entreprises, confondant ainsi, à dessein, simplification et libéralisation (4), c'est-à-dire qui souhaitent un recul de l'ordre public au profit d'une plus grande liberté normative des partenaires sociaux et des contractants (5), voire qui rêvent de jeter le Code du travail au bûcher (6), ou aux orties (7).

Mais un constat semble aujourd'hui s'imposer, y compris à ceux qui considèrent que le droit du travail doit accorder aux salariés un haut niveau de protection : c'est celui d'un Code du travail devenu illisible, opaque (8), qui finit par se retourner contre ceux-là même qu'il est censé protéger (9). La simplification devient alors le gage d'une meilleure efficacité d'un droit du travail véritablement protecteur de ses destinataires naturels, une qualité recherchée de la norme quelle qu'elle soit.

Certes, il est impossible, et pour tout dire, illusoire, de prétendre que le droit du travail pourrait se résumer en quelques grands principes dont l'application pourrait être laissée à la sagesse du juge (10), renouant ainsi avec l'utopie codificatrice des années postrévolutionnaires lorsque Cambacérès travaillait à un Code civil minimaliste (11). Même les auteurs qui militent aujourd'hui pour un Code simplifié renvoient au pouvoir réglementaire, ou aux partenaires sociaux, pour le détail de règles (12). La complexité de l'activité économique, les spécificités des branches, des entreprises, des traditions locales, imposent, en effet, de nombreuses distinctions et exceptions aux principes, qui ne peuvent être négligées, sauf à se contenter de normes tellement générales qu'elles en deviendraient impuissantes à saisir le réel, laissant au juge le soin d'en préciser le contenu concret, ce qui conduirait à la pire des situations en termes de prévisibilité, d'absence de contrôle démocratique et d'égalité devant la norme (13).

Des efforts jusque-là vains. La recherche de simplification implique des efforts à tous les niveaux, de la conception de la norme à son application. Or, le moins que l'on puisse observer est que les lois actuelles, qui ont pourtant fait de la simplification leur étendard, sont bien loin de satisfaire à leurs propres exigences. Pour ne prendre l'exemple que des deux derniers textes mis en circulation, qu'observe-t-on ?

Sur un plan simplement quantitatif tout d'abord, ces textes, censés dénoncer la complexité du droit positif pour y trouver remède, semblent totalement incapables de remplacer l'existant, a minima : 116 pages au Journal officiel pour la loi "Macron", 45 pages pour la loi "Rebsamen".

En entrant un peu plus dans le détail des textes, et pour ne s'intéresser qu'aux aspects relatifs au droit du travail, les dispositions ajoutent la plupart du temps à l'existant, sans substituer de nouveaux régimes plus simples ; il suffira, pour s'en convaincre, d'observer les modifications apportées aux nombreuses dispositions concernant l'épargne salariale ou au travail de nuit ou dominical, le texte ajoutant de nouvelles couches au mille-feuilles législatif en créant un travail en soirée, aux côtés du travail de nuit, ou en créant de nouvelles zones de dérogations au principe du repos dominical, qu'il s'agisse des zones de tourisme international, ou des gares.

L'examen de la loi "Rebsamen" ne nous enseigne pas autre chose. Après l'échec notable des élections organisées dans les branches, dont la moitié, au moins, des entreprises comprennent un effectif inférieur à onze salariés (14), le Gouvernement persiste et signe avec la mise en place de "commissions paritaires régionales interprofessionnelles pour les salariés et les employeurs des entreprises de moins de onze salariés", dans le cadre d'un titre XI, ajouté au livre III de la deuxième partie du Code du travail, créant, ainsi, une numérotation des articles à 5 chiffres, sans compter les sous-sections et autres paragraphes... L'examen des attributions de ces nouvelles instances laisse perplexe : il s'agit, selon les propres termes de l'article L. 23-113-1 du Code du travail (N° Lexbase : L5386KGL) d'informer et de conseiller, de débattre, de rendre des avis, de faciliter la résolution des conflits individuels ou collectifs, ou de faire des propositions... Et voici qu'apparaissent de nouveaux salariés protégés, dont le licenciement devra être autorisé par l'autorité administrative, une nouvelle infraction pénale, la rupture sans autorisation, des nouveaux droits à remboursement... Et que dire des dispositions sur la carrière des élus et des représentants syndicaux ...

Sur un plan qualitatif, maintenant, on pouvait croire que la simplification allait passer par la mise en oeuvre de dispositifs simples, commandés par des notions explicites et compréhensibles pour des justiciables et non sujettes aux interprétations les plus variables et inattendues. Or, le législateur semble prendre un malin plaisir à créer de nouvelles "notions juridiques" aux contours toujours aussi flous et qui prétendent rendre compte d'une pseudo réalité économique ou sociale, comme les anciennes PUCE ou les nouvelles "zones touristiques internationales", définies légalement par le "rayonnement international de ces zones, [...] l'affluence exceptionnelle de touristes résidant hors de France et l'importance de leurs achats" (15).

La simplification serait-elle alors un voeu pieu, une ligne d'horizon que le juriste du travail serait condamné à ne jamais pouvoir atteindre ? Espérons tout le contraire et envisageons quelques pistes.

II - La simplification du droit du travail comme réalité

Légiférer moins souvent. La première, et non la moindre, des solutions consiste à légiférer moins, et moins souvent. Les acteurs ont besoin de temps pour s'approprier les réformes, pour les comprendre, les mettre en oeuvre, ajuster les pratiques, et des changements incessants dans l'état du droit créent un sentiment d'insécurité peu compatible avec le besoin de stabilité. Si l'on prend l'exemple du dialogue social dans l'entreprise, et singulièrement celui de la négociation dans les entreprises dépourvues de délégué syndical, la succession des réformes est édifiante et les changements opérés par le législateur à la marge. La loi n° 2008-789 du 20 août 2008, portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail (N° Lexbase : L7392IAZ) permettait de négocier avec des représentants élus du personnel sous condition d'un effectif de moins de 200 salariés. Cette condition étant supprimée par la loi "Rebsamen" du 17 août 2015 ; il n'y a donc eu aucun changement pour 99 % des entreprises françaises déjà visées par le dispositif. La loi du 20 août 2008 permettait la négociation avec des représentants élus, portant sur des droits dont la mise en oeuvre était légalement subordonnée à la conclusion d'un accord collectif : c'est toujours le cas. Elle imposait la validation par une commission paritaire de branche : c'est toujours le cas ; seul change le sens du silence conservé par la commission, qui vaut désormais rejet. Elle permettait la négociation par des salariés mandatés par des organisations syndicales représentatives dans la branche. C'est toujours le cas, même si cette possibilité passe en tête des modalités dérogatoires, en remplacement de l'ancienne hypothèse du mandatement. La loi impose simplement que ce mandatement soit accordé à des salariés élus, émane des syndicats représentatifs dans la branche, ce qui était en pratique le cas dans la plupart des hypothèses auparavant, et ouvre la négociation à toutes les questions (16). Ces changements sont, on en conviendra, purement techniques, la loi permettant aux salariés élus de négocier, sous contrôle syndical, selon des modalités qui ne sont que faiblement différentes. Fallait-il, dans ces conditions, réformer la négociation d'entreprise sans délégué syndical ? Ne fallait-il pas plutôt simplifier le dispositif en ouvrant sans condition la négociation aux délégués du personnel, sous le contrôle de la branche ?

Prenons un autre exemple, tiré du travail de nuit et du repos dominical. La loi du 20 août 2008, dans son autre volet, avait fixé une période de travail de nuit, à laquelle la loi "Macron" du 6 août 2015 apporte de simples correctifs, sans véritable réforme de fond, sans véritable projet de société différent, c'est-à-dire sans avoir véritablement tranché la question politique. La loi prévoyait quatre types de dérogations au principe du repos dominical (permanentes de droit, conventionnelles, préfectorales et municipales), ce qui était déjà assez complexe à comprendre pour le citoyen moyen ; le Code du travail en prévoit désormais cinq, et ajoute les dérogations sur un fondement géographique, dont le régime est d'une complexité accrue (17), sans compter la multiplication des dimanches objet de dérogations municipales. Le régime est désormais totalement opaque pour le public qui ne comprend plus si, en France, aujourd'hui, le dimanche est un jour où l'on peut ou non, travailler... Mais le législateur le sait-il encore lui-même ?

Limiter le rôle de la loi aux principes fondamentaux. L'article 34 de la Constitution (N° Lexbase : L1294A9S) a choisi, s'agissant du droit du travail, de confier au législateur le soin d'en déterminer les principes fondamentaux, et au Gouvernement de fixer le détail des règles. Malheureusement, ce principe de répartition des compétences n'est pas sanctionné par le Conseil constitutionnel qui permet au Parlement de se répandre en réformes pléthoriques, bien au-delà de sa compétence constitutionnelle, sous prétexte que le Premier ministre peut toujours utiliser la procédure du déclassement s'il veut reprendre la main sur des terres indûment occupées par le législateur. Un retour aux sources constitutionnelles du droit du travail s'impose donc, ce qui se traduirait, par la force des choses, par une simplification des lois, de retour dans leur berceau (18).

Autolimiter le travail parlementaire. L'examen des conditions dans lesquelles la loi "Macron" a été adoptée montre à quel point le travail parlementaire peut être perverti par des querelles partisanes et l'intervention des lobbies. Comment ne pas songer à cet amendement ajouté à la va-vite au projet de loi le 9 juillet dernier, alors que le Gouvernement s'apprêtait à faire voter le texte sans vote, dans le cadre du "49-3" utilisé à trois reprises, d'ailleurs, durant la procédure, à l'initiative du sénateur de Moselle, Gérard Longuet, autorisant le projet d'enfouissement des déchets radioactifs CIGEO (Centre industriel de stockage géologique) situé à Bure (Meuse). Fort heureusement, et comme on pouvait s'y attendre, ce cavalier parlementaire a été censuré, avec 16 autres articles de la loi, par le Conseil constitutionnel, en raison de la violation de l'article 45 de la Constitution (N° Lexbase : L1306A9A) qui subordonne la recevabilité des amendements à l'existence d'un "lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis" (19). Il serait donc souhaitable que les parlementaires eux-mêmes acceptent de se concentrer sur la discussion des principes fondamentaux des réformes, loin des milliers d'amendements déposés pour faire barrage aux réformes et qui encombrent la procédure législative et qui, lorsqu'ils sont adoptés, défigurent les textes et contribuent à les rendre illisibles.

Améliorer la qualité juridique des textes. En ramenant les textes à l'énoncé des principes fondamentaux qui structurent les réformes, le législateur devrait, logiquement, s'en tenir à des notions bien connues du droit, et devrait, en toute hypothèse s'appuyer sur des définitions déjà bien éprouvées. Le retour à des standards permettrait également aux destinataires des normes, salariés et employeurs, mais également à tous ceux qui sont chargés de son application, administration du travail comme tribunaux, de mieux comprendre les objectifs poursuivis par le législateur, et sans doute d'interpréter les textes en fonction de ces objectifs. La loi devrait également faire l'économie des précisions inutiles, des régimes inutilement alambiqués.

Reprenons le cas des modifications apportées par la loi "Macron" au régime du travail de nuit et du dimanche qui nous semble typique. Le Code du travail prévoit, en effet, une faculté de dérogation préfectorale "lorsqu'il est établi que le repos simultané, le dimanche, de tous les salariés d'un établissement serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de cet établissement". La condition de fond pour la dérogation est exprimée clairement, l'objectif poursuivi (intérêt de l'entreprise ou du public) clairement établi. Jusqu'à présent, l'article L. 3132-21, ancien, du Code du travail (N° Lexbase : L0474H9G) disposait simplement que les dérogations devaient être accordées pour une durée limitée, sans autre précision. La loi "Macron" modifie le texte et ajoute une procédure bien plus complexe, qui devra être renouvelée au moins tous les trois ans, et qui suppose, désormais, l'avis de six acteurs locaux (20). Le texte prévoit également une dérogation à la procédure en cas d'urgence et lorsque les dérogations ne concernent pas plus de trois dimanches par année...

La loi crée une cinquième catégorie de dérogations, "sur un fondement géographique", et vise ainsi une nouvelle ère, la "zone touristique internationale"... Pourquoi internationale ? A partir de quel taux d''étrangers la zone sera-t-elle internationale ? Le texte de l'article L. 3132-24 vise "l'importance des achats" de ces touristes résidant "hors de France"... Importance absolue (2 000, 3 000 euros par jour ?), relative (plus que les touristes français ?) ? Et pourquoi les touristes français ne devraient pas avoir, en tant que touristes, les mêmes possibilités commerciales le dimanche ? La lecture de ce texte est d'ailleurs trompeuse car l'article suivant, l'article L. 3132-25 (N° Lexbase : L2091KGK), permet la même dérogation, selon les mêmes modalités, pour les mêmes établissements "situés dans les zones touristiques caractérisées par une affluence particulièrement importante de touristes"... Il n'est alors plus question de tourisme international pour déroger au repos dominical... Alors pourquoi distinguer deux types de zones si c'est pour les soumettre au même régime ? La réponse se trouve ailleurs, dans les dispositions relatives au travail de nuit et en soirée, qui ne bénéficieront aux zones de tourisme que si celui-ci est international (21). Tout ceci est-il bien raisonnable ... ?

Donner des consignes d'interprétation aux acteurs. La sobriété qui doit être de mise dans l'exposé des normes, devrait s'accompagner d'indications données aux acteurs sur la meilleure manière d'appliquer ou d'interpréter les normes, ce qui permettrait de rendre la détermination de la portée pratique de ces normes plus prévisible. Ainsi, et pour reprendre l'exemple du régime du repos dominical, les exceptions prévues par la loi devraient d'abord être définies de manière générale, selon les objectifs poursuivis par le législateur, en renvoyant au pouvoir réglementaire et/ou aux partenaires sociaux le soin d'en fixer le détail.


(1) Une recherche dans Légifrance montre que vingt-cinq lois ont fait référence, dans leur intitulé, à l'objectif de simplification, depuis la loi du 11 octobre 1940, relative à la simplification des procédures d'expropriation pour l'exécution d'urgence des travaux destinés à lutter contre le chômage jusqu'à la plus récente, la loi n° 2015-177 du 16 février 2015, relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures (N° Lexbase : L9386I7R).
(2) La plus spectaculaire est certainement celle d'Antoine Lyon-Caen, qui publie avec Robert Badinter un ouvrage commun, intitulé Le travail et la loi, Fayard, 2015, 77 pages, qui s'inscrit résolument dans cette mouvance.
(3) Lire notamment B. Teyssié, Propos autour d'un projet d'autodafé, in faut-il brûler le Code du travail ? ; Montpellier 25 avril 1986, Dr. soc., 1986, p. 559, v., in fine, n° 19, p. 561.
(4) C'est d'ailleurs pour cette raison que l'entreprise de recodification du Code du travail, initiée à partir de la fin de l'année 2004 dans le cadre d'une loi de simplification du droit (loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit N° Lexbase : L4734GUU), a été si mal reçue par toute une frange des juristes qui ont cru voir dans cette initiative la volonté de porter atteinte aux intérêts des travailleurs : lire parmi tant d'attaques, celle d'E. Dockès, La décodification du droit du travail, Dr. soc., 2007, p. 388, et notre réponse, Le nouveau Code du travail et la doctrine : l'art et la manière, Dr. soc., 2007, p. 513.
(5) Dernièrement, B. Teyssié, Droit du travail, droit des affaires, vie des affaires, Dr. soc., 2015, p. 193.
(6) Colloque préc..
(7) J.-Ch. Le Feuvre, Faut-il jeter le Code du travail aux orties ?, Eyrolles, 2012, p. 155.
(8) Lire déjà G. Borenfreund, Le droit du travail en mal de transparence ?, Dr. soc., 1996, p. 461.
(9) En ce sens, les propos de R. Badinter et A. Lyon dans leur ouvrage commun, Le travail et la loi, Fayard, 2015, 77 pages, sp. p. 11 : "Et le droit du travail ainsi mythifié joue contre les travailleurs qu'il est censé protéger".
(10) En ce sens, P. Lokiec, Il faut sauver le droit du travail, O. Jacob, février 2015, 163 p., singulièrement dans son introduction, p. 16-17.
(11) Le premier projet de Cambacérès était constitué de 695 articles, le deuxième de 287, le troisième de 1104.
(12) Ainsi R. Badinter et A. Lyon-Caen, préc..
(13) Il faut écarter la tentation d'un "Code du travail pour les nuls", selon l'expression de Pascal Lokiec.
(14) Elections qui se sont déroulées du 28 novembre au 12 décembre 2012, avec un taux de participation d'environ 10 %.
(15) C. trav., art. L. 3132-24, nouveau (N° Lexbase : L2084KGB).
(16) C. trav., art. L. 2232-21, nouveau (N° Lexbase : L5837IEW).
(17) C. trav., art. L. 3132-24 à L. 3132-25-6, nouveaux.
(18) C'est le sens d'ailleurs de la démarche de Robert Badinter et d'Antoine Lyon-Caen dans leur ouvrage, préc..
(19) On pourrait même se demander dans quelle mesure le Gouvernement n'accepte pas ce genre de pratiques, dans le cadre de petites manoeuvres politiciennes, en sachant pertinemment que ces textes ne passeront pas le cap du contrôle de constitutionnalité, mais uniquement pour s'accorder les bonnes grâces de tel ou tel parlementaire, représentant tel ou tel groupe d'intérêts... ?
(20) Le conseil municipal, l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune est membre, la chambre de commerce et d'industrie, la chambre de métiers et de l'artisanat, les organisations professionnelles d'employeurs et les organisations syndicales de salariés intéressées de la commune !
(21) C. trav., art. L. 3122-29-1 (N° Lexbase : L1647KG4).

newsid:448714

Social général

[Brèves] Publication de la loi "Rebsamen" portant sur le dialogue social et l'emploi après validation par le Conseil constitutionnel

Réf. : Loi n° 2015-994 du 17 août 2015, relative au dialogue social et à l'emploi (N° Lexbase : L2618KG3) ; Cons. const., décision n° 2015-720 DC du 13 août 2015 (N° Lexbase : A2666NN3)

Lecture: 2 min

N8668BUL

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Le 03 Septembre 2015

Publiée au Journal officiel du 18 août 2015, la loi n° 2015-994 du 17 août 2015, relative au dialogue social et à l'emploi (N° Lexbase : L2618KG3), dite loi "Rebsamen", est entrée en vigueur après validation, le 13 août 2015, par le Conseil constitutionnel (Cons. const., décision n° 2015-720 DC du 13 août 2015 N° Lexbase : A2666NN3). Les Sages ont en effet décidé que seul l'article 45 de la loi relatif à la recevabilité des amendements déposés en première lecture était contraire à la Constitution. Organisée en plusieurs volets, la loi prévoit d'importantes mesures sociales. Dans son premier volet, portant sur la modernisation et le renforcement du dialogue social au sein de l'entreprise, elle crée des commissions paritaires régionales et un droit universel à la représentation pour les salariés des très petites entreprises. Ces commissions ont vocation à représenter tous les salariés et les employeurs, en dehors de ceux qui sont ou seront couverts par des commissions créées par accord de branche. Au sein de ce même volet, il est prévu une meilleure protection des représentants du personnel contre plusieurs formes de discrimination ; l'expérience acquise pendant les mandats pourra désormais être reconnue ; et, en matière de rémunération, pour les représentants du personnel dont les heures de délégation dépassent 30 % de leur temps de travail, il est garanti au salarié de bénéficier, au cours de son mandat, d'une augmentation au moins égale à la moyenne des augmentations individuelles perçues pendant cette période par des salariés relevant de la même catégorie professionnelle et dont l'ancienneté est comparable. Le premier volet prévoit aussi une représentation équilibrée des hommes et des femmes sur les listes électorales des élections professionnelles et l'extension de la possible mise en place d'une délégation unique du personnel pour les entreprises de moins de trois cent salariés en y intégrant le CHSCT.
Le deuxième volet est consacré au régime d'assurance chômage des intermittents du spectacle en associant les partenaires sociaux des professions concernées à la négociation de ce régime.
Le troisième volet, portant sur la sécurisation des parcours et du retour à l'emploi, évoque la création d'un compte personnel d'activité au 1er janvier 2017 qui rassemblera les principaux droits sociaux attachés à l'exercice d'une activité. Par ailleurs, il redéfinit et clarifie le rôle de l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) dans le service public de l'emploi. Par ce troisième volet, il est permis une adaptation de la durée du contrat de professionnalisation et de la durée des actions de professionnalisation aux besoins des demandeurs d'emplois de longue durée.
Pour finir, le quatrième volet voit l'instauration d'une nouvelle prestation, la prime d'activité, rassemblant le revenu de solidarité active et la prime pour l'emploi toujours à destination des travailleurs modestes.

newsid:448668

Social général

[Brèves] Publication de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte : les dispositions en droit social

Réf. : Loi n° 2015-992 du 17 août 2015, relative à la transition énergétique pour la croissance verte (N° Lexbase : L2619KG4)

Lecture: 2 min

N8784BUU

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Le 04 Septembre 2015

Publiée au Journal officiel du 18 août 2015 après avoir été partiellement validée par les Sages dans une décision du 13 août 2015 (Cons. const., décision n° 2015-718 DC du 13 août 2015 [LXB=A2664NNY), la loi n° 2015-992 du 17 août 2015, relative à la transition énergétique pour la croissance verte (N° Lexbase : L2619KG4), traite, à la marge de certaines dispositions intéressant le droit du travail (art. 50, 121 et 182 de la loi).
Ainsi, le Code du travail prévoit désormais à l'article L. 3261-3-1 (N° Lexbase : L2942KG3) que l'employeur prend en charge tout ou partie des frais engagés par ses salariés se déplaçant à vélo ou à vélo à assistance électrique entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail, sous la forme d'une indemnité kilométrique vélo, dont le montant est fixé par décret. Le bénéfice de cette prise en charge peut être cumulé, dans des conditions fixées par décret, avec celle prévue à l'article L. 3261-2 (N° Lexbase : L2712ICG) et avec le remboursement de l'abonnement de transport lorsqu'il s'agit d'un trajet de rabattement vers une gare ou une station ou lorsque le salarié réside hors du périmètre de transport urbain. Le Code de la Sécurité sociale précise également à l'article L. 131-4-4 (N° Lexbase : L2943KG4) que la participation de l'employeur aux frais de déplacements de ses salariés entre leur domicile et le lieu de travail réalisés à vélo ou à vélo à assistance électrique est exonérée de cotisations sociales, dans la limite d'un montant défini par décret.
S'agissant des règles de prévention des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs, y compris les travailleurs indépendants et les employeurs, exposés aux rayonnements ionisants la loi prévoit à l'article L. 4451-2 du Code du travail (N° Lexbase : L3278KGI) qu'un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités de suivi médical spécifiques et adaptées pour ces travailleurs, en particulier pour les travailleurs réalisant des travaux dans un établissement par une entreprise extérieure.
La loi ajoute également à l'article L. 6313-1, 14° (N° Lexbase : L3385KGH) une nouvelle catégorie d'actions de formation dans le champ d'application des dispositions relatives à la formation professionnelle continue, à savoir les actions de formation continue relatives au développement durable et à la transition énergétique qui ont pour objet de permettre l'acquisition des compétences nécessaires à la connaissance des techniques de mise en oeuvre et de maintenance des énergies renouvelables, ainsi que des dispositifs d'efficacité énergétique et de recyclage (C. trav., art. L.. 6313-15 N° Lexbase : L3040KGP).
Enfin, elle précise que l'Etat doit élaborer, en concertation avec les organisations syndicales de salariés, les organisations représentatives des employeurs et les collectivités territoriales, un plan de programmation de l'emploi et des compétences tenant compte des orientations fixées par la programmation pluriannuelle de l'énergie.

newsid:448784

Social général

[Brèves] Renvoi d'une QPC devant le Conseil constitutionnel portant sur les établissements concernés par l'habilitation à percevoir la part de la taxe d'apprentissage

Réf. : CE 1° et 6° s-s-r., 22 juillet 2015, n° 387472, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A9299NMD)

Lecture: 2 min

N8639BUI

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Le 22 Octobre 2015

Est renvoyée devant le Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article L. 6241-9 du Code du travail (N° Lexbase : L6506IZY). Telle est la portée de l'arrêt rendu le 22 juillet 2015 par le Conseil d'Etat (CE 1° et 6° s-s-r., 22 juillet 2015, n° 387472, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A9299NMD).
En l'espèce, la Fondation pour l'école a demandé au Conseil d'Etat, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 (N° Lexbase : L0276AI3), et à l'appui de sa requête tendant à l'annulation de la circulaire DGEFP, n° 1/2014 du 14 novembre 2014, relative à l'élaboration des listes des formations technologiques et professionnelles initiales et organismes et services éligibles à la fraction "hors quota" de la taxe d'apprentissage (N° Lexbase : L3805KBK), de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article L. 6241-9 du Code du travail relatif aux établissements concernés par l'habilitation à percevoir la part de la taxe d'apprentissage.
Elle soutient que l'article L. 6241-9 du Code du travail, applicable au litige :
- porte atteinte au principe d'égalité devant la loi, en ce qu'il traite différemment, en premier lieu, les établissements privés d'enseignement secondaire selon qu'ils ont ou non passé un contrat d'association avec l'Etat, en deuxième lieu, les établissements privés hors contrat selon qu'ils sont du second degré ou de l'enseignement supérieur et, enfin, les établissements d'enseignement secondaire qui n'ont pas passé de contrat d'association avec l'Etat et les établissements d'enseignement supérieur gérés par un organisme à but lucratif selon qu'ils dispensent ou non des formations conduisant aux diplômes professionnels délivrés par les ministères chargés de la Santé, des Affaires sociales, de la Jeunesse et des Sports ;
- porte atteinte à la liberté d'enseignement, en ce qu'il prive, sans justification, les établissements d'enseignement secondaire n'ayant pas conclu un contrat d'association avec l'Etat d'une ressource nécessaire à l'exercice de leur mission.
Ayant considéré que l'article L. 6241-9 du Code du travail était applicable au litige ; que ses dispositions n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel ; et que le moyen tiré de ce qu'elles portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment à la liberté d'enseignement et au principe d'égalité, soulève une question présentant un caractère sérieux, le Conseil d'Etat en a déduit qu'il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.

newsid:448639

Protection sociale

[Brèves] Publication d'un décret relatif à la détermination des droits à l'allocation d'assurance chômage

Réf. : Décret n° 2015-922 du 27 juillet 2015, relatif à la détermination des droits à l'allocation d'assurance chômage et pris pour l'application des articles L. 5422-2 et L. 5422-2-1 du Code du travail (N° Lexbase : L6221KCE)

Lecture: 1 min

N8686BUA

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Le 03 Septembre 2015

Le décret n° 2015-922 du 27 juillet 2015, relatif à la détermination des droits à l'allocation d'assurance chômage (N° Lexbase : L6221KCE) et pris pour l'application des articles L. 5422-2 (N° Lexbase : L2738H9B) et L. 5422-2-1 (N° Lexbase : L0623IXD) du Code du travail a été publié au Journal officiel du 29 juillet 2015. Ce décret offre un droit d'option au bénéficiaire de l'allocation d'assurance chômage entre la reprise du versement de son reliquat de droits et le versement de son nouveau droit si le montant de l'allocation journalière de son reliquat est inférieur ou égal à un montant fixé dans l'accord d'assurance chômage ou si le montant de l'allocation journalière qui lui aurait été servi en l'absence de reliquat est supérieur au montant de l'allocation journalière du reliquat d'au moins une fraction fixée dans cet accord. En effet, dans certaines situations, le montant de l'allocation d'aide au retour à l'emploi correspondant au reliquat des droits précédemment ouverts (droits non épuisés) se traduit par un montant d'indemnisation plus faible que celui que le demandeur d'emploi aurait perçu au titre du dernier contrat de travail rompu. Afin de résoudre cette difficulté, l'avenant n° 1 du 25 mars 2015 portant modification du règlement général annexé à la convention du 14 mai 2014, relative à l'indemnisation du chômage instaure un droit d'option. Le décret prend ainsi en compte les adaptations de cette dernière convention (cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E3936EYG).

newsid:448686

Protection sociale

[Brèves] Publication d'une circulaire AGIRC-ARRCO relative aux adhésions des entreprises relevant de plusieurs groupes de protection sociale

Réf. : Circ. AGIRC-ARRCO, n° 2015-7-DRJ, du 16 juillet 2015, Adhésions des entreprises relevant de plusieurs groupes de protection sociale (N° Lexbase : L9482KC8)

Lecture: 1 min

N8687BUB

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Le 03 Septembre 2015

La circulaire n° 2015-7-DRJ du 16 juillet 2015, relative aux adhésions des entreprises relevant de plusieurs groupes de protection sociale (N° Lexbase : L9482KC8) a été publiée. Depuis le 1er janvier 2002, les entreprises nouvelles, qu'elles relèvent du domaine interprofessionnel ou du domaine professionnel, doivent adhérer aux institutions Agirc et Arrco appartenant à un même groupe de protection sociale selon le principe des adhésions jumelées. Reste que certaines entreprises créées avant le 1er janvier 2002 ont des adhésions dispersées au sein de plusieurs groupes de protection sociale. Cette situation étant source de complexité, le groupe de travail paritaire institué par l'article 8 de l'accord national interprofessionnel du 13 mars 2013, relatif aux retraites complémentaires, a adopté, dans le cadre de la rationalisation des coûts de gestion des institutions, une mesure de simplification prévoyant de regrouper à terme le stock des adhésions de ces entreprises relevant de plusieurs groupes de protection sociale.
Les mesures prises par cette circulaire viennent donc simplifier la situation de ces entreprises. Ainsi, au 1er janvier 2016, pour les entreprises de deux cents salariés au plus, les adhésions de chacun des établissements de ces entreprises sont regroupées à titre obligatoire auprès des institutions Agirc et Arrco d'un même groupe de protection sociale. Pour les entreprises de plus de deux cents salariés, le regroupement s'effectuera au 1er janvier 2017. Le choix de l'organisme de protection sociale s'effectue en respectant certains critères énoncés par la circulaire (cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E8826AEM).

newsid:448687

Protection sociale

[Brèves] Publication d'une circulaire relative aux règles de compétence en matière de validation des périodes assimilées chômage indemnisé et non indemnisé entre le régime général et le régime de non-salarié

Réf. : Circ. CNAV, n° 2015/34, du 29 juillet 2015, Qualité d'assuré social / Règles de compétence en matière de validation des périodes assimilées chômage indemnisé et non indemnisé entre le régime général et le régime de non salarié (N° Lexbase : L3518KDN)

Lecture: 1 min

N8688BUC

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Le 03 Septembre 2015

La circulaire n° 2015/34, du 29 juillet 2015 (N° Lexbase : L3518KDN) a été publiée. Elle détermine les règles de compétences en matière de validation de périodes assimilées chômage indemnisé et non indemnisé entre le régime général et les régimes de non salariés, particulièrement le RSI. En effet, en fonction de la période de chômage indemnisé ou non indemnisé, la validation de cette dernière s'effectuera en fonction du dernier statut de l'assuré social soit au régime général ou à un régime de non salariés (cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E8818AB9).

newsid:448688

Protection sociale

[Brèves] Cumul autorisé de la pension d'orphelin de fonctionnaire avec des prestations familiales

Réf. : CE, 27 juillet 2015, n° 375042, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A0790NNL)

Lecture: 2 min

N8739BU9

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Le 03 Septembre 2015

Au regard de l'article L. 40 du Code des pensions civiles et militaires (N° Lexbase : L5406IRN), il est conféré à l'enfant orphelin d'un fonctionnaire décédé un droit à pension ; cette dernière se distingue des droits du conjoint du fonctionnaire décédé et constitue un droit propre de l'enfant. De ce fait, une telle pension d'orphelin ne peut être assimilée ni à un accessoire ni à une majoration de la pension de réversion perçue par le conjoint du fonctionnaire décédé. Ainsi, les dispositions de l'article L. 553-3 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L1127ICQ), selon lesquelles les prestations familiales sont dues par priorité lorsqu'un enfant du fonctionnaire ouvre droit à une majoration de pension et excluent, à due concurrence, lesdites majorations, ne mentionnent pas les pensions d'orphelin, qui ont un objet distinct des prestations familiales comme des majorations de pension pour charges de famille. La pension d'orphelin prévue par l'article L. 40 du Code des pensions civiles et militaires de retraite peut donc être cumulée avec les prestations familiales. Telle est la solution retenue par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 27 juillet 2015 (CE, 27 juillet 2015, n° 375042, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A0790NNL).
Dans les faits, Mme A., épouse de M. A., militaire décédé en décembre 2006, bénéficie d'une pension de réversion et ses trois enfants d'une pension temporaire d'orphelin prévue à l'article 40 du Code des pensions civiles et militaire de retraite. Par décision du 20 décembre 2011, le directeur régional des Finances publiques a refusé à cette dernière le versement d'un complément de pension de réversion, et, par décision du 2 février 2012, le directeur des services de retraite de l'Etat a opposé un refus à sa demande de versement des sommes réclamées au titre de la pension d'orphelin pour ses trois enfants. Le 24 décembre 2013, le tribunal administratif a annulé la décision du 2 février 2012. Le ministre de l'Economie et des Finances forme un pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat en annulation du jugement du tribunal administratif, soutenant que les pensions ne peuvent être cumulées avec les prestations familiales.
En énonçant le principe susvisé, le Conseil d'Etat rejette le pourvoi du ministre de l'Economie et des Finances.

newsid:448739

Sécurité sociale

[Brèves] Publication d'un décret fixant les dispositions applicables pour la détermination des tarifs de soins et d'hébergement

Réf. : Décret n° 2015-1042 du 20 août 2015 fixant les dispositions applicables pour la détermination des tarifs de soins et d'hébergement mentionnés à l'article L. 174-20 du code de la sécurité sociale (N° Lexbase : L3549KGK)

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N8692BUH

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Le 03 Septembre 2015

Le décret n° 2015-1042 (N° Lexbase : L3549KGK) du 20 août 2015, fixant les dispositions applicables pour la détermination des tarifs de soins et d'hébergement mentionnés à l'article L. 174-20 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L4887IRG) a été publié au Journal officiel du 22 août 2015. Le décret détermine les conditions d'application de l'article L. 174-20 du Code de la Sécurité sociale qui prévoit la possibilité pour les établissements de santé, pour les soins programmés ne relevant pas d'une mission de service public, de déterminer les tarifs de soins et d'hébergement facturés aux patients non couverts par un régime d'assurance maladie, à l'exception des patients bénéficiant de l'aide médicale de l'Etat (AME) et des soins urgents et des patients relevant d'une législation de sécurité sociale coordonnée avec la législation française. Les établissements qui appliquent ces dispositions doivent fournir au patient un devis préalablement à la réalisation des soins hospitaliers et une facture lorsque ces soins ont été réalisés. Ces nouvelles dispositions sont d'application immédiate.

newsid:448692

Sécurité sociale

[Brèves] Publication du décret relatif aux règles de facturation et de prise en charge des prestations hospitalières sans hospitalisation

Réf. : Décret n° 2015-887 du 21 juillet 2015 relatif aux règles de facturation et de prise en charge des prestations hospitalières sans hospitalisation (N° Lexbase : L3730KBR)

Lecture: 1 min

N8685BU9

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Le 03 Septembre 2015

Le décret n° 2015-887 du 21 juillet 2015 (N° Lexbase : L3730KBR) a été publié au Journal officiel du 23 juillet 2015. Il modifie plusieurs règles portant sur la facturation et la prise en charge par l'assurance maladie des prestations hospitalières sans hospitalisation (forfaits accueil et traitement des urgences, petit matériel, sécurité et environnement et administration de produits et prestations en environnement hospitalier).
Il ouvre un nouveau délai de deux mois permettant à l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (UNCAM) de prendre une décision concernant le taux de prise en charge par l'assurance maladie des prestations hospitalières sans hospitalisation et des actes et consultations qui leur sont associés, dans des limites définies aux 12° et 13° de l'article R. 322-1 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L7317KBM). En cas d'absence de décision de l'UNCAM dans ce délai de deux mois, le taux de prise en charge applicable sera fixé par arrêté du ministre chargé de la Sécurité sociale.
Le décret a également pour objectif d'harmoniser la réglementation applicable aux établissements de santé publics et privés concernant l'interdiction de facturer des actes infirmiers en sus des prestations hospitalières sans hospitalisation (cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E9404CDN).

newsid:448685

Sécurité sociale

[Brèves] Suppression d'une spécialité pharmaceutique des listes mentionnées aux articles L. 162-17 du Code de la Sécurité sociale et L. 5123-2 du Code de la santé publique en raison du caractère insuffisant du service médical rendu

Réf. : CE, 22 juillet 2015, n° 361962, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A9779NM7)

Lecture: 1 min

N8683BU7

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Le 07 Septembre 2015

Dès lors que la décision de radiation n'est motivée que par l'insuffisance du service médical rendu par la spécialité R. et que pour apprécier le service médical rendu par cette spécialité, la commission de transparence a examiné la gravité de l'affection traitée, la nature du traitement, l'efficacité et les effets indésirables de la spécialité, ainsi que sa place dans la stratégie thérapeutique, notamment au regard des autres thérapies disponibles, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'articles R. 163-3 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L7795G7T) doit être écarté. De plus, la spécialité en cause étant destinée au traitement symptomatique de la rhinopharyngite aiguë, maladie bénigne, et comportant un risque, bien que rare, d'effets indésirables cardiovasculaires graves, il n'apparaît pas que les auteurs des arrêtés aient commis une erreur manifeste d'appréciation. Telle est la solution retenue par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 22 juillet 2015 (CE, 22 juillet 2015, n° 361962, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A9779NM7).
Dans cette affaire, la société Z. demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés portant radiation de la spécialité R. de la liste mentionnée à l'article L. 162-17 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L6906IR9) et de la liste des médicaments agréés à l'usage des collectivités publiques prévue à l'article L. 5123-2 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L0788IZ9) en raison de l'insuffisance du service médical rendu.
En énonçant les principes susvisés, le Conseil d'Etat rejette la requête de la société Z. (cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E8311ABG).

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Temps de travail

[Textes] Loi "Macron" : dispositions relatives au repos dominical et au travail en soirée

Réf. : Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC)

Lecture: 26 min

N8671BUP

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par Sébastien Tournaux, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux

Le 07 Septembre 2015

La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC), apporte de sensibles modifications aux dérogations au repos dominical et, dans une moindre mesure, au régime du travail de nuit. La loi semble en permanence chercher un équilibre entre l'assouplissement des conditions des dérogations d'une part, le développement de contreparties pour les salariés concernés, d'autre part. L'exigence d'un accord collectif préalable prévoyant des contreparties et le volontariat des salariés concernés sont, ainsi, quasiment généralisés aux dérogations temporaires. Dans le même temps, les dérogations géographiques sont simplifiées et le nombre de dimanches concernés par les dérogations municipales est augmenté. A la marge, la loi apporte quelques modifications aux dérogations bénéficiant de droit aux commerces alimentaires et aux procédures préfectorales de dérogation ou de fermeture des établissements le dimanche. Les dispositions législatives apportent des modifications aux dérogations préfectorales (I), aux dérogations accordées sur un fondement géographique (II) et aux dérogations accordées par les municipalités (III).
Commentaire

I - Dérogations préfectorales aux règles relatives au repos dominical ou hebdomadaire

A - Dérogation au repos dominical

1 - Durée de la dérogation

Lorsque le repos simultané de tous les salariés d'un établissement le dimanche est préjudiciable au public ou compromet le fonctionnement normal de l'établissement, le préfet peut, en application de l'article L. 3132-20 du Code du travail (N° Lexbase : L0473H9E), autoriser que le repos soit pris un autre jour que le dimanche, du dimanche midi au lundi à midi, le seul dimanche après-midi avec un repos compensateur d'une journée par quinzaine ou par roulement, à tout ou partie des salariés.

Cette dérogation préfectorale a toujours été considérée comme une dérogation temporaire. L'article L. 3132-21 du Code du travail (N° Lexbase : L0474H9G) disposait, avant la loi du 10 août 2009 (1), que cette dérogation était accordée pour "une durée limitée", limitation que la loi avait déplacé à l'article L. 3132-25-4, alinéa premier (N° Lexbase : L6308IED). En outre, la dérogation préfectorale prenait place dans un paragraphe 3 intitulé "Dérogations temporaires au repos dominical", ce titre étant modifié par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour viser désormais les "autres dérogations au repos dominical".

L'article 241 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 réaffirme clairement le caractère temporaire de la dérogation préfectorale et fixe la durée maximale de celle-ci. L'article L. 3132-21 du Code du travail (N° Lexbase : L2083KGA) prévoit, désormais, que les autorisations ne peuvent être accordées que pour une durée qui ne peut excéder trois ans. La durée de trois années n'a pas été choisie par hasard puisque le Conseil d'Etat avait jugé qu'il s'agissait d'un délai suffisant alors que le texte n'exigeait qu'une durée limitée (2). Le maintien du caractère temporaire de l'autorisation était nécessaire. Il permet, en effet, de mesurer si les conditions exigées par l'article L. 3132-20 du Code du travail (fermeture préjudiciable au public ou au fonctionnement normal de l'établissement) sont toujours réunies après l'écoulement d'un certain temps, ce qui peut parfaitement ne plus être le cas.

2 - Procédure d'autorisation préfectorale

Avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, la procédure préalable à l'arrêté préfectoral d'autorisation était établie par l'article L. 3132-25-4 du Code du travail (N° Lexbase : L6308IED). En particulier, l'autorisation devait être précédée d'un avis du conseil municipal, de la chambre de commerce et d'industrie, de la chambre des métiers et des syndicats d'employeurs et de salariés intéressés de la commune.

Cette procédure n'est que très légèrement remaniée. Par mesure de simplification, le texte qui l'encadre quitte le giron des dispositions relatives aux dérogations de nature géographique pour être placé à l'article L. 3132-21 du Code du travail. Aux différents organismes déjà consultés est ajouté l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunal, à la condition que celui-ci bénéficie d'une fiscalité propre.

La plus importante innovation réside dans l'exemption de ces avis en "cas d'urgence dûment justifiée" et lorsque la dérogation n'excède pas trois dimanches. Cette mesure s'ajoute à celle existant déjà en cas d'urgence et qui permet de supprimer temporairement le repos hebdomadaire des salariés d'un établissement (3). L'urgence permet donc, d'une part, de suspendre le repos hebdomadaire pour le personnel concerné, d'autre part de demander au préfet une autorisation de faire travailler le personnel de l'entreprise le dimanche sans que l'autorité administrative soit contrainte de recueillir les avis habituels.

Ces deux mesures sont plus complémentaires que concurrentes. Ainsi, la suspension du repos hebdomadaire répond à des conditions d'urgence plus strictes que l'exemption d'avis permettant au préfet d'autoriser le travail dominical pendant trois dimanches au plus (4). En outre, il convient de bien comprendre que l'urgence ne justifie pas, à elle seule, la dérogation au repos dominical, mais dispense seulement le préfet des habituelles demandes d'avis préalables. Cela a pour effet d'accélérer la procédure mais ne modifie en rien les conditions de fond de l'autorisation préfectorale qui ne peut être délivrée qu'en cas de préjudice au public ou de compromission du fonctionnement normal de l'établissement (5).

B - Arrêtés préfectoraux de fermeture

S'agissant toujours des prérogatives préfectorales en matière de repos hebdomadaire, l'article 255 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 ajoute un nouvel alinéa à l'article L. 3132-29 du Code du travail (N° Lexbase : L2094KGN), relatif aux arrêtés préfectoraux de fermeture hebdomadaire.

Rappelons que ce texte permet au préfet, si un accord est intervenu entre organisations patronales et syndicales, d'ordonner la fermeture au public des établissements de la profession ou de la zone géographique concernée pendant toute la durée du repos hebdomadaire. Le nouvel alinéa prévoit qu'à la demande des organisations syndicales représentatives des salariés ou des employeurs d'une zone géographique concernée, lorsqu'elles expriment la volonté de la majorité des membres de la profession, le préfet abroge l'arrêté de fermeture.

L'ajout de cette faculté d'abrogation à la demande des membres de la profession légalise un procédé qui était déjà admis par la jurisprudence administrative (6). C'est, d'ailleurs, précisément parce que le préfet avait la faculté de réviser ou d'abroger l'arrêté à tout moment et qu'il était contraint de le faire si la majorité des intéressés le lui demandait que le Conseil constitutionnel a considéré que l'atteinte à la liberté d'entreprendre portée par l'article L. 3132-29 du Code du travail restait proportionnée (7).

Le nouveau texte répond surtout à une préoccupation soulevée à l'occasion des travaux parlementaires (8) : il fallait mettre les partenaires sociaux en mesure de revenir sur des accords parfois très anciens et qui ne prenaient, d'ailleurs, généralement pas la forme d'accords collectifs au sens du droit du travail, mais d'accords atypiques moins formalisés (9). On peut, de prime abord, être étonné que les organisations patronales ou les organisations syndicales puissent seules demander l'abrogation d'un arrêté dont la genèse résulte d'une volonté commune. Il devrait, toutefois, être assez rare que l'opinion de ces deux groupes diverge. Si le secteur géographique ou la profession concernée comporte un important effectif salarié, les organisations syndicales pourraient souhaiter le maintien d'un jour de fermeture fixe tandis que les organisations patronales voudraient éviter une distorsion de concurrence entre les entreprises employant des salariés et les autres.

II - Dérogations géographiques aux règles relatives au repos dominical ou au travail de nuit

L'article 242 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 modifie le plan du Code du travail à l'intérieur d'une sous-section 2 consacrée aux dérogations au repos dominical" (10). Le troisième paragraphe s'intitule désormais "autres dérogations au repos dominical" et la loi y intègre un second sous-paragraphe intitulé "dérogations sur un fondement géographique". Cette nouvelle subdivision encadre les dérogations permises dans les zones touristiques internationales (A), dans les zones touristiques (B), dans les zones commerciales (C) et dans les zones d'emprise d'une gare à grande affluence (D).

A - Les zones touristiques internationales (ZTI)

1 - Définition et délimitation des ZTI

La loi crée un nouvel article L. 3132-24 du Code du travail (N° Lexbase : L2084KGB) (11), dont l'objet est d'autoriser les établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services et qui sont situés dans une ZTI à donner le repos hebdomadaire par roulement pour tout ou partie du personnel.

Le II de l'article L. 3132-24 du Code du travail dispose que les ZTI sont délimitées par les ministres chargés du Travail, du Tourisme et du Commerce, après avis du maire, du président de l'établissement public d'intercommunalité et des organisations patronales et syndicales intéressées. Ces zones seront créées "compte tenu du rayonnement international de ces zones, de l'affluence exceptionnelle de touristes résidant hors de France et de l'importance de leurs achats". Compte tenu de la rédaction du texte, ces critères semblent devoir se cumuler. Plusieurs quartiers parisiens devraient naturellement entrer dans cette définition (Champs-Elysées, Boulevard Haussmann, Butte Montmartre, etc.), mais d'autres lieux pourraient être concernés, par exemple, en bord de mer, pour certaines stations balnéaires.

On notera que, contrairement aux communes touristiques ou thermales et aux zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente qui, jusqu'à la loi, permettaient seules des dérogations au repos dominical en raison de l'affluence touristique, la décision de classement et de délimitation d'une ZTI ne relève pas des autorités locales mais bien d'un arrêté ministériel. Malgré les multiples avis requis, on dénote donc une volonté d'arbitrer au plus haut quelles zones pourront bénéficier de ces dérogations poussées au principe du repos dominical mais, aussi, au régime du travail de nuit.

C'est certainement en raison des atteintes importantes à ces principes que le III du nouvel article impose au gouvernement d'établir une évaluation économique et sociale des pratiques d'ouverture des commerces dans la zone créée, trois ans après la délimitation d'une ZTI.

2 - Dérogation au repos dominical

- Etablissements concernés

La dérogation au repos dominical dans les ZTI est donc permise par l'article L. 3132-24, I du Code du travail. Elle concerne les établissements de vente au détail, sans distinction, comme cela était déjà le cas dans les communes ou zones touristiques (12).

La loi précise, toutefois, que les établissements de vente au détail bénéficient de cette dérogation lorsqu'ils "mettent à disposition des biens et des services" (13). La cohabitation, dans cette définition, d'un "établissement de vente au détail" et de la mise à disposition "de services" est ambiguë, d'abord, parce que l'on ne peut vendre un service (14), ensuite, parce que les établissements qui ont principalement pour objet de mettre à disposition des services ne sont pas des établissements de vente au détail. Un établissement bancaire situé dans une zone de grande affluence touristique internationale, par exemple, délivre des services sans être un établissement de vente au détail (15). Enfin, parce que la conjonction "et" peut donner le sentiment que les établissement devront à la fois mettre à disposition des biens et des services pour bénéficier de la dérogation, ce qui ne traduit probablement pas la volonté du législateur. Sans doute aurait-il été préférable de conserver la simple référence aux établissements de vente au détail qui pouvaient déjà, à titre accessoire, fournir quelques services en complément des biens dont ils faisaient commerce.

Des règles particulières sont réservées, par la loi, aux commerces de détail alimentaire visés par l'article L. 3132-13 du Code du travail (N° Lexbase : L2093KGM) et qui bénéficient de plein droit de la possibilité de donner le repos dominical à partir de 13 heures le dimanche. Ainsi, le nouvel article L. 3132-25-5 du Code du travail (N° Lexbase : L2086KGD) prévoit, dans les ZTI et les zones d'emprise des gares visées à l'article L. 3132-25-6 du Code du travail (N° Lexbase : L2085KGC), qu'après 13 heures, les établissements peuvent donner le repos hebdomadaire par roulement pour tout ou partie du personnel selon les modalités prévues aux articles L. 3132-25-3 (N° Lexbase : L2088KGG) et L. 3132-25-4 (N° Lexbase : L2087KGE) (couverture par un accord collectif et volontariat, cf. infra). Cette dérogation ne sera pas ouverte aux commerces alimentaires des nouvelles zones touristiques et zones commerciales qui ne pourront donc ouvrir que jusqu'à 13 heures.

- Obligation de couverture par un accord collectif

Avancée significative au regard du droit antérieur, l'article L. 3132-25, I (N° Lexbase : L2091KGK), in fine, prévoit que le repos hebdomadaire peut être donné par roulement "dans les conditions prévues aux articles L. 3132-25-3 et L. 3132-25-4" du Code du travail. Ces textes, qui imposent la conclusion d'un accord collectif de travail préalable et conditionnent le travail du dimanche au volontariat des salariés, étaient, jusqu'alors, réservés aux dérogations préfectorales et à celles applicables aux périmètres urbains de consommation exceptionnelle (PUCE). Ces protections vont désormais bénéficier aux salariés privés de repos dominical dans les ZTI (16). Les articles 246 et 247 de la loi y apportent, toutefois, quelques aménagements.

Il est d'abord ajouté un II à l'article L. 3132-25-3, qui prévoit que les établissements situés dans les ZTI ne pourront bénéficier de la dérogation qu'à la condition d'être couverts par un accord collectif de branche, de groupe, d'entreprise, d'établissement, d'un accord "conclu au niveau territorial" ou d'un accord conclu dans les conditions mentionnées aux II, III et IV de l'article L. 5125-4 du Code du travail (N° Lexbase : L0649IXC), c'est-à-dire d'un accord conclu en respectant la procédure imposée aux accords de maintien de l'emploi négocié par des élus ou par un salarié mandaté par un syndicat. S'agissant de cette procédure, la lecture de l'exposé des motifs du projet de loi permet de comprendre que le législateur ne souhaitait pas qu'une négociation dérogatoire classique (17), par application des articles L. 2232-21 et suivants du Code du travail (N° Lexbase : L5837IEW), puisse suffire à satisfaire l'obligation de couverture. En cas d'absence de syndicat représentatif dans l'établissement, l'accord conclu par un élu ou par un salarié mandaté devra donc être approuvé, non par une commission paritaire de branche, comme cela est le plus souvent le cas, mais par la majorité des salariés de l'établissement s'exprimant par referendum. La procédure spéciale de conclusion des accords de maintien de l'emploi n'est toutefois pas reprise lorsque l'accord collectif d'entreprise ou d'établissement est conclu par un délégué syndical : une audience de 30 % suffit, il n'est pas nécessaire que les syndicats signataires soient majoritaires.

Il semble possible de déduire du caractère précis de cette liste d'accords collectifs qu'elle soit limitative, cela d'autant que le I de l'article L. 3132-25-3 du Code du travail impose toujours la conclusion d'un "accord collectif", sans autre précision, préalablement à la mise en place d'une dérogation préfectorale. Ainsi, par exemple, un accord d'UES ne devrait pas être en mesure de satisfaire à l'obligation de couverture.

La catégorie des accords conclus "à un niveau territorial" laisse perplexe (18). Il ne s'agit pas, en effet, d'une catégorie juridique clairement identifiée en droit du travail. Des accords de branche sont parfois conclus à des niveaux infra-nationaux, dans une région, un département, voire une ville. Pour autant, les accords de branche étant déjà envisagés par le texte, la référence aux accords "à un niveau territorial" ne devrait pas se confondre avec ceux-ci. Il ne pourrait donc s'agir que d'accords interprofessionnels à des niveaux infra-nationaux dont on ne trouve aujourd'hui illustration que dans les territoires ultramarins (19). Ces accords sont dépourvus d'encadrement juridique, ce qui pourrait en particulier poser difficulté s'agissant de la mesure de la représentativité des syndicats signataires aujourd'hui, des organisations patronales signataires demain. Mesurée dans les entreprises, dans les branches d'activité et au niveau national et interprofessionnel, aucune règle ne prévoit le calcul de la représentativité au niveau local et interprofessionnel. Quel résultat aux élections professionnelles sera considéré comme suffisant ? Le Centre de traitement des élections professionnelles pourra-t-il effectuer ce calcul à partir des données recueillies pour la mesure de la représentativité au plan national ? Ces accords sont-ils susceptibles d'être étendus ? Autant de questions qui permettent de douter que le recours à ce type de négociation puisse s'opérer sans fort risque de contentieux ultérieur.

Quoiqu'il en soit, la négociation de branche devrait être le siège privilégié de l'encadrement des dérogations dans les ZTI puisque l'article 246 II de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 impose aux syndicats et organisations patronales, dans les branches ou au niveau des professions, d'ouvrir, dans les six mois suivant la promulgation de la loi, des négociations sur les thèmes des articles L. 3132-25-3 et L. 3132-25-4 du Code du travail.

Comme cela était le cas pour les accords préalables aux dérogations préfectorales ou aux dérogations dans les PUCE, l'accord collectif devra prévoir les contreparties salariales accordées aux salariés privés de repos dominical, des engagements en termes d'emploi pour les publics en difficulté ou les personnes handicapées, des mesures pour faciliter la conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle et devra fixer des contreparties pour compenser les charges induites par la garde des enfants des salariés qui travailleront le dimanche. Le III de l'article L. 3132-25-3 ajoute que l'accord collectif -ou la décision unilatérale de l'employeur dans le cadre d'une dérogation préfectorale- doit fixer "les conditions dans lesquelles l'employeur prend en compte l'évolution de la situation personnelle des salariés privés du repos dominical". Cette disposition est bien vague, cela d'autant qu'elle semble en partie redondante, avec les dispositions du II qui imposent déjà que les accords prennent en considération ces éléments. On peut imaginer que l'accord devra prévoir une procédure d'évaluation de l'évolution de la situation des salariés, par des entretiens périodiques ou des échanges privilégiés avec les services de santé au travail, par exemple. Le caractère très vague de cette disposition pourrait, toutefois, elle aussi, donner lieu à contentieux sur le modèle des accords encadrant les conventions de forfait en jours dont le contenu, que la loi ne précisait guère, est aujourd'hui étroitement surveillé par la Chambre sociale de la Cour de cassation. On peut ainsi s'attendre à ce que des mesures concrètes et effectives soient exigées afin que le droit au respect de la vie personnelle et familiale soit véritablement garanti.

La faculté de priver les salariés de l'établissement de repos dominical sans accord collectif, déjà prévue, elle aussi, pour les dérogations préfectorales et les anciennes PUCE, est maintenue. Elle est cependant réservée aux établissements comptant moins de onze salariés, ce qui devrait concerner nombre de petits commerces de ces zones touristiques, mais qui n'empiète pas sur les compétences des institutions représentatives du personnel, qui font, dans ce cas, défaut. Le texte impose que les salariés concernés soient consultés sur les mesures et contreparties précédemment évoquées et que le travail dominical soit approuvé par la majorité d'entre eux. Seuls pourront donc s'exprimer, lors du scrutin, les salariés amenés à travailler le dimanche, et non l'ensemble des salariés de l'établissement. Le franchissement du seuil de onze salariés ouvre une période de transition de trois années après laquelle l'établissement devra être couvert par un accord collectif.

- Extension du volontariat

L'article 247 étend, ensuite, l'exigence de volontariat des salariés concernés, lequel n'était, jusqu'ici, requis que pour les dérogations préfectorales et les PUCE. Le modèle existant est repris (pas de prise en considération du refus de travailler le dimanche au moment de l'embauche, pas de mesure discriminatoire en raison de ce refus, pas de faute ou de motif de licenciement), mais le texte ajoute que l'accord collectif ou, dans les entreprises de moins de onze salariés, les mesures prises par l'employeur, doivent prévoir les modalités de prise en compte d'un changement d'avis du salarié privé de repos dominical.

Sur ce point encore, le texte est ambigu. Il ne donne pas clairement un droit au retour au repos dominical pour le salarié, mais impose que les modalités de prise en compte de son changement d'avis soient négociées. Ces mesures pourraient prendre pour modèle celles prévues par le troisième alinéa de l'article L. 3132-25-4 du Code du travail pour les dérogations préfectorales prises sans accord préalable. On pourrait imaginer, par exemple, un droit de retour conditionné à l'absence de désorganisation du fonctionnement de l'entreprise ou qui ne pourrait être refusé après un certain nombre de demandes, tout comme il est parfaitement envisageable d'aller jusqu'à conférer, par un accord, un véritable droit de retour au salarié.

Le dernier alinéa de l'article L. 3132-25-4 prévoit, enfin, que l'employeur doit prendre toute mesure nécessaire pour "permettre aux salariés d'exercer personnellement leur droit de vote au titre des scrutins nationaux et locaux lorsque ceux-ci ont lieu le dimanche".

3 - Travail en soirée

L'article 254 de la loi créée un nouvel article L. 3122-29-1 du Code du travail (N° Lexbase : L1647KG4) en vue de faciliter le travail de nuit dans les zones touristiques internationales et de contrecarrer la position de la Chambre sociale de la Cour de cassation qui avait considéré, dans l'affaire "Sephora", s'agissant des boutiques de cette enseigne situées sur les Champs-Elysées, que le travail de nuit est "exceptionnel", "ne peut pas être le mode d'organisation normal du travail au sein d'une entreprise et ne doit être mis en oeuvre que lorsqu'il est indispensable à son fonctionnement" (20).

Comme l'évoquent l'intitulé du chapitre Ier du titre 3 de la loi du 6 août 2015 et le dernier alinéa du nouvel article L. 3122-29-1 du Code du travail, le texte semble créer une nouvelle catégorie de temps de travail dit "travail en soirée", qui ne serait plus du travail de jour mais dont le régime ne sera pas entièrement aligné sur celui du travail de nuit.

Ainsi, dans les seules ZTI, les établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services peuvent reporter le début de la période de travail de nuit jusqu'à minuit (21). La possibilité de faire travailler des salariés entre 21 heures et minuit dans ces établissements est conditionnée à la couverture de l'établissement par un accord collectif similaire à celui organisant la dérogation au repos dominical et présentant, par conséquent, les mêmes difficultés (22).

La loi est toutefois bien plus dirigiste s'agissant du contenu de l'accord. Les heures de travail en soirée seront obligatoirement majorées et, contrairement au travail dominical, un seuil minimal de majoration est fixé au double de la rémunération normalement due, l'accord pouvant naturellement prévoir une majoration plus importante. A cela s'ajoute, sans qu'il soit nécessaire que l'accord le prévoie, que ces heures de travail donnent lieu à repos compensateur équivalent en temps.

L'accord devra prévoir, pour les salariés employés en soirée, "la mise à disposition d'un moyen de transport pris en charge par l'employeur qui permet au salarié de regagner son lieu de résidence". Cette mesure semble bien plus stricte que la simple prise en charge partielle des frais de transport prévue par l'article L. 3261-2 du Code du travail (N° Lexbase : L2712ICG). L'idée semble être d'éviter que des salariés soient contraints d'utiliser des transports en communs durant la nuit. Concrètement, cette obligation est très contraignante car elle implique que l'employeur mette à disposition du salarié un véhicule de fonction ou qu'il s'acquitte de frais de taxi pour que le salarié soit reconduit jusqu'à son domicile qui, en région parisienne, peut être fort éloigné.

L'accord devra encore prendre des mesures destinées à faciliter la conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle et des mesures de compensation des charges liées à la garde d'enfants. Il devra fixer les conditions de prise en compte de l'évolution de la situation du salarié et de son choix de ne plus travailler en soirée, ce choix produisant un effet immédiat pour les salariées enceintes. Les salariés employés en soirée bénéficieront des dispositions spécifiques au travailleur de nuit en matière de santé au travail (23), à condition, toutefois, de pouvoir être considérés comme travailleur de nuit, c'est-à-dire d'effectuer entre 21 heures et minuit le nombre d'heure minimal fixé par l'article L. 3122-31 du Code du travail (N° Lexbase : L0387H99).

Ces mesures, destinées à permettre la conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle, d'une part, à garantir la protection de la santé des salariés, d'autre part, résultent très directement de la position adoptée par la Conseil constitutionnel qui avait mis en balance ces deux droits fondamentaux avec la liberté d'entreprendre (24). Les partenaires sociaux devront prendre grand soin du contenu des accords collectifs qui seront négociés pour permettre le travail en soirée, au risque de les voir subir une destinée similaire à celles des accords encadrant les forfaits en jours.

Enfin, comme pour la dérogation au repos dominical dans les ZTI, seuls les salariés volontaires, ayant donné leur accord écrit, peuvent travailler entre 21 heures et minuit (25). Cela ne constitue pas un changement important sur le fond, puisque le passage d'un horaire de jour à un horaire de nuit a toujours été considéré comme une modification du contrat de travail qui nécessitait, par conséquent, l'accord du salarié (26). L'évolution est plus significative sur la forme. Le principe demeure celui du consensualisme, tant au stade de la formation du contrat de travail, que de sa modification en cours de relation. L'exigence d'un écrit manifestant l'accord du salarié déroge à ces règles avec l'objectif, difficile à atteindre, d'être certain que le salarié comprenne qu'il a le choix.

Si l'on tire un bilan de ces dispositions, on comprend que le régime institué constitue une nouvelle dérogation au caractère exceptionnel du travail de nuit qui évite pudiquement cette dénomination pour préférer celle de travail en soirée. Les contreparties sont, toutefois, loin d'être négligeables et l'on s'aperçoit assez clairement que le régime de ces heures de travail en soirée est très protecteur des salariés, bien davantage que celui du travail de nuit classique, pour lequel les majorations de salaire ne sont pas fixées par la loi, le volontariat n'est pas formellement requis et la mise à disposition d'un moyen de transport n'est pas prévue. Sous réserve des doutes que le volontariat du salarié inspire toujours, le compromis semble valable car les coûts importants engendrés par le travail en soirée pour les établissements concernés devraient être absorbés par l'activité accrue que ces nouveaux horaires permettront.

B - Les zones touristiques (ZT)

La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 retouche les dispositions applicables au repos dominical dans les zones touristiques. Outre que le dispositif est grandement simplifié dans la forme, d'importants changements de fond sont également apportés.

Les anciennes et complexes références aux communes touristiques, aux communes thermales ou aux zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente disparaissent au profit d'une nouvelle appellation, plus simple, de zone touristique. Le nouvel article L. 3132-25 du Code du travail (N° Lexbase : L2091KGK) prévoit, ainsi, que les établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services, pourront donner le repos hebdomadaire par roulement lorsqu'ils se situeront dans une zone touristique caractérisée "par une affluence importante de touristes". Ce critère semble moins restrictif que celui "d'affluence exceptionnelle" qui permettait, jusqu'ici, de délimiter certaines zones touristiques, ce qui compense la disparition des autres critères antérieurs (référence aux communes thermales ou au zones d'animation culturelle).

Comme pour les ZTI (27), l'article L. 3132-25 renvoie, désormais, aux articles L. 3132-25-3 et L. 3132-25-4 du Code du travail : les dérogations au repos dominical dans les établissements situés dans des ZT devront avoir été prévues et encadrées par un accord collectif ou par des mesures patronales unilatérales dans les établissements de moins de onze salariés. Seuls les salariés volontaires pourront être privés de repos dominical. Il s'agit, en théorie, d'une évolution très importante qui devrait, en pratique, être difficile à mettre en pratique, en particulier s'agissant du volontariat. Un travailleur saisonnier est-il vraiment en position de refuser de travailler le dimanche et, surtout, la protection de son refus (contre le refus d'embauche ou contre les mesures discriminatoires) peut-elle véritablement être effective ?

La délimitation des zones touristiques résultera d'une procédure établie par l'article L. 3132-25-2 (N° Lexbase : L2089KGH) et partagée avec la délimitation des zones commerciales. Le maire d'une commune touristique ou le président de l'établissement public intercommunal, si le territoire concerné dépasse celui d'une commune, présentera une demande de délimitation ou de modification au préfet de région. La demande doit être motivée et comporter une étude d'impact qui permet de justifier l'opportunité de créer ou de modifier la zone. Le préfet de région, avant de procéder à la création ou à la modification d'une ZT, devra recueillir de nombreux avis (28). Ces avis seront réputés avoir été pris dans un délai de deux mois après saisie des organes consultatifs (29) et le préfet de région dispose d'un délai de six mois pour statuer sur la demande de délimitation (30). Cette procédure donne le sentiment d'une grande collégialité et d'une concertation approfondie de l'ensemble des acteurs locaux. Il ne faut toutefois pas s'y tromper, il ne s'agit toujours que de consultations qui ne lient pas le préfet de région, lequel demeure libre d'accepter ou non la demande de délimitation.

La nouvelle procédure pouvait faire craindre une grande remise à plat des zones touristiques telles qu'elles sont aujourd'hui définies. En effet, la liste des communes ou zones touristiques et thermales résultait, jusqu'ici, de décisions préfectorales, au niveau des départements (31). La modification de l'autorité compétente dans la loi aurait dû permettre aux administrés intéressés de demander l'abrogation des arrêtés préfectoraux antérieurs à la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 (32). L'article 257 de la loi vient toutefois opportunément organiser la transition entre l'ancien et le nouveau système.

Ainsi, les communes ou zones touristiques désignées par arrêté préfectoral avant la publication de la loi constituent de plein droit des zones touristiques, au sens du nouvel article L. 3132-25 du Code du travail. L'obligation de couverture par un accord collectif et le volontariat des salariés employés le dimanche ne s'appliquent aux salariés employés des ZT qu'à compter du premier jour du vingt-quatrième mois suivant la publication de la loi, soit au 1er août 2017. Cette date, placée au coeur de la saison estivale, est bien peu judicieuse, si bien qu'il faut espérer que les partenaires sociaux parviendront à s'entendre avant la date ultime.

C - Les zones commerciales (ZC)

La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 retouche l'un des dispositifs innovants qu'avait mis en place la loi n° 2009-974 du 10 août 2009. En effet, la dérogation ouverte dans les périmètres urbains de consommation exceptionnelle par l'ancien article L. 3132-25-1 du Code du travail (N° Lexbase : L6345IEQ) disparaît et est remplacée par une dérogation permise dans les zones commerciales. Ce dispositif, nettement éclipsé par la création des zones touristiques internationales, pourrait toutefois déployer d'importants effets.

Comme pour les ZT et les ZTI, seront concernés les établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et services. Ces établissements pourront donner le repos hebdomadaire par roulement lorsqu'ils se situeront dans une zone commerciale caractérisée par "une offre commerciale et une demande potentielle particulièrement importantes". On ne peut que se féliciter de la suppression de l'ancien critère des PUCE reposant sur l'existence d' "habitudes de consommation dominicale" qui avait clairement pour effet de régulariser des situations de travail dominical illicites. Autre changement, sous réserve des précisions qui seront apportées par les décrets d'application, les zones commerciales ne seront plus nécessairement situées dans des "unités urbaines" de plus d'un million d'habitants. Des ZC devraient donc pouvoir être créées en dehors des agglomérations parisienne, marseillaise et lilloise. Le texte ajoute que la délimitation des ZC devra, le cas échéant, tenir compte de la proximité immédiate d'une zone frontalière.

Les nouvelles zones commerciales seront créées en fonction de deux critères. Le premier est celui de l'existence d'une "offre commerciale [...] particulièrement importante" : seuls les grands ensembles commerciaux devraient donc être concernés, mais la loi reste peu disserte sur la taille de ces ensembles qui devra être mieux définie par décret (33). Le second est l'existence d'une "demande potentielle particulièrement importante" qui vise cette fois la clientèle de ces ensembles et reprend donc un critère déjà existant pour délimiter les PUCE.

En fonction des dispositions réglementaires qui viendront compléter ce dispositif, la création de zones commerciales pourrait donc être beaucoup plus simple que l'ancienne dérogation ouverte dans les PUCE.

La procédure de délimitation ou de modification des ZC est identique à celle applicable aux ZC (34). L'obligation de couverture par un accord collectif et l'exigence que seuls les salariés volontaires soient privés de repos dominical sont également reprises. Des dispositions viennent encore aménager la transition entre les dérogations ouvertes dans les PUCE et celles permises dans les ZC. Les PUCE créés avant la loi constituent de plein droit des ZC. Les accords collectifs ou décisions unilatérales qui devaient impérativement prévoir des contreparties pour les salariés concernés sont maintenus pendant deux ans. Si un accord collectif est conclu au cours de cette période de deux ans, il se substitue à la décision unilatérale antérieure de l'employeur et s'applique à sa place. Quoique le texte ne le précise pas, les accords collectifs en vigueur devront être révisés pour être conformes aux exigences des articles L. 3132-25-3 et L. 3132-25-4 du Code du travail.

D - Les gares à grande affluence

La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 apporte une dernière nouveauté au domaine des dérogations géographiques au repos dominical puisque l'article L. 3132-25-6 du Code du travail (N° Lexbase : L2085KGC) crée une dérogation pour les établissements de vente au détail mettant à disposition des biens et des services "situés dans l'emprise d'une gare qui n'est pas incluse" dans une ZTI "compte tenu de l'affluence exceptionnelle de passagers dans cette gare". Les commerces alimentaires qui bénéficient de la dérogation permanente de droit jusqu'à 13 heures le dimanche pourront, comme dans les ZTI, donner le repos hebdomadaire par roulement.

Les commerces situés à proximité des grandes gares françaises bénéficieront donc désormais d'une dérogation au repos dominical, comme cela est depuis longtemps le cas pour les aéroports (35). La dérogation sera, toutefois, plus difficile à obtenir, puisqu'il ne s'agit pas d'une dérogation permanente de droit. Seules les gares visées par arrêté conjoint des ministres des Transports, du Travail et du Commerce bénéficieront de cette dérogation. Les ministres seront tenus de recueillir de nombreux avis locaux mais (36), surtout, ne pourront cibler que les gares fréquentées par une affluence exceptionnelle de passagers.

Si ce critère reste imprécis et que l'on espère, à nouveau, que les décrets d'application permettront d'identifier ce qu'est une affluence exceptionnelle de passagers, on peut imaginer que seules les gares des grandes métropoles seront concernées par cette dérogation. Les obligations de couverture par un accord collectif et de volontariat des salariés sont, une fois encore, reprises, et s'appliquent donc à l'ensemble des dérogations au repos dominical reposant sur un fondement géographique.

III - Dérogations municipales aux règles relatives au repos dominical

La loi apporte quelques modifications à la dérogation municipale au repos dominical qui permettait, jusqu'ici, au maire d'une commune, d'accorder cinq dimanches d'ouverture aux établissements situés sur le territoire de la commune.

La loi ne va pas aussi loin que ce qu'avait envisagé le gouvernement dans son projet initial. Ainsi, les commerces ne bénéficieront pas de cinq dimanches de droit, dont le nombre aurait pu être porté jusqu'à douze par le maire, ce qui évitera aux mairies qui n'avaient jusqu'ici jamais pris d'arrêté d'ouverture, d'être contraintes de le faire. La loi modifie le nombre maximal de dimanches pour lesquels le maire peut autoriser le travail dominical qui passe de cinq à douze.

La procédure est toutefois renforcée si le nombre de dimanche dépasse cinq. A l'avis du conseil municipal, exigé dans tous les cas, s'ajoute alors celui de l'organe délibérant de l'établissement public intercommunal dont la commune est membre. L'avis devra être "conforme", ce qui confère un véritable droit de véto à l'échelle intercommunale, droit de véto qui devra, toutefois, être exprimé, puisque, faute d'avis donné dans un délai de deux mois, celui-ci sera réputé être favorable. Même si cette mesure pourrait donner lieu à des disputes de basse politique dans certaines agglomérations, il faut toutefois mettre à son crédit la recherche d'une certaine harmonie sur l'ensemble d'un territoire.

La liste des dimanches concernés doit être établie au plus tard le 31 décembre pour l'année suivante. Cette dérogation pourra donc être pleinement utilisée à compter de 2016. Pour l'année 2015, l'article 250 autorise le maire à arrêter des dérogations pour neuf dimanches, sachant qu'il ne reste que quatre mois avant 2016.

L'article 253 de la loi crée un nouvel article L. 3132-27-1 du Code du travail (N° Lexbase : L1646KG3) qui étend à la dérogation municipale l'exigence de volontariat des salariés. L'organisation de contreparties par accord collectif n'est, en revanche, pas exigée, puisque l'article L. 3132-27 (N° Lexbase : L6323IEW) reste inchangé et impose déjà certaines mesures (doublement de la rémunération, repos compensateur, etc.), ce qui n'empêche d'ailleurs pas qu'un accord collectif améliore ces contreparties.

Quelques mesures accessoires viennent s'ajouter à ce nouveau régime. Dans les établissements de commerces de détail alimentaire dont la surface de vente dépasse 400 m², les jours fériés travaillés sont déduits des dimanches municipaux dans la limite de trois (art. 250 I, 2°). Les employeurs des établissements qui bénéficient de la dérogation municipale doivent prendre toute mesure nécessaire pour que les salariés puissent participer aux scrutins nationaux ou locaux organisés au cours d'un dimanche travaillé (art. 252). Enfin, la loi impose aux mairies de soumettre au conseil municipal, lors des débats relatifs à la désignation des dimanches concernés par la dérogation, la question de l'ouverture des bibliothèques de la commune (art. 250, II).


(1) Loi n° 2009-974 du 10 août 2009, réaffirmant le principe du repos dominical et visant à adapter les dérogations à ce principe dans les communes et zones touristiques et thermales ainsi que dans certaines grandes agglomérations (N° Lexbase : L6524IED).
(2) CE 4° et 1° s-s-r., 20 octobre 1993, n° 143024, publié aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A1056ANG).
(3) C. trav., art. L. 3132-4 (N° Lexbase : L0458H9T).
(4) L'article L. 3132-4 du Code du travail permet cette suspension "en cas de travaux urgents dont l'exécution immédiate est nécessaire pour organiser des mesures de sauvetage, pour prévenir des accidents imminents ou pour réparer des accidents survenus au matériel, aux installations ou aux bâtiments de l'établissement" alors que la dispense d'avis se contente d'une "urgence dûment justifiée".
(5) Ces conditions peuvent toutefois rejoindre celles de l'article L. 3132-4 du Code du travail, par exemple, lorsque la dispense d'avis découle du besoin de réaliser des travaux urgents, lesquels sont nécessaires au fonctionnement normal de l'établissement.
(6) Le préfet pouvait déjà être "tenu d'abroger une réglementation fondée sur un accord qui ne répondrait plus à l'opinion de la majorité des commerçants intéressés", CE 4° et 1° s-s-r., 5 mars 1986, n° 41739 , inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A5597AMA).
(7) Cons. const., 21 janvier 2011, n° 2010-89 QPC (N° Lexbase : A1522GQG), cons. 5, et les obs. de Ch. Radé, Repos dominical : le Conseil constitutionnel valide l'article L.3132-29 du Code du travail, Lexbase Hebdo n° 426 du 3 février 2011 - édition sociale (N° Lexbase : N1801BR7).
(8) V. les débats devant la commission spéciale du Sénat.
(9) Pour le juge administratif, cet accord "n'a pas d'effet juridique propre et n'a pas la nature d'un accord collectif", v. CE 1° et 6° s-s-r., 15 mai 2006, n° 277361, publié aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6531DPL).
(10) Sous-section 2 de la section 2 du chapitre 2 du titre III du livre Ier du Code du travail : C. trav., art. L. 3132-12 et s. (N° Lexbase : L0466H97).
(11) L'ancien article L. 3132-24 du Code du travail (N° Lexbase : L0479H9M) avait été abrogé par le Conseil constitutionnel à la suite d'une question prioritaire de constitutionnalité, v. Cons. const., 4 avril 2014, n° 2014-374 QPC (N° Lexbase : A4068MII) et les obs. de Ch. Radé, Sephora et le travail le dimanche : comme un parfum de droits de l'Homme, Lexbase Hebdo n° 567 du 17 avril 2014 - édition sociale (N° Lexbase : N1831BUD) ; RDT, 2014, p. 484, obs. M. Grévy.
(12) La loi n° 2009-974 du 10 août 2009, réaffirmant le principe du repos dominical et visant à adapter les dérogations à ce principe dans les communes et zones touristiques et thermales ainsi que dans certaines grandes agglomérations, avait supprimé, pour les zones et commerces touristiques, la référence aux établissements de vente au détail "qui mettent à disposition du public des biens et des services destinés à faciliter son accueil ou ses activités de détente ou de loisirs d'ordre sportif, récréatif ou culturel". Voir nos obs., Le paradoxe de la loi du 10 août 2009 : réaffirmation du principe du repos dominical et extension des hypothèses dérogatoires, Lexbase Hebdo n° 362 du 10 septembre 2009 - édition sociale (N° Lexbase : N7432BLT).
(13) Cette distinction entre biens et services avait été supprimée par la loi n° 2009-974 du 10 août 2009, ibid..
(14) Sur un plan technique, la définition du Code du travail semble, tout simplement, opérer une confusion -certes classique dans le langage courant- entre contrat de vente et contrat d'entreprise.
(15) Autre qu'un bureau de change qui bénéficie d'une dérogation permanente de droit, v. C. trav., art. R. 3132-5 (N° Lexbase : L6772IZT).
(16) Et d'une manière générale, pour toutes les dérogations sur un fondement géographique, cf. infra.
(17) V. l'étude d'impact, tome 3, p. 12.
(18) Les interrogations soulevées par les parlementaires de la commission spéciale du Sénat n'ont pas été entendues, v. art. 76 du Rapport de la Commission spéciale du Sénat.
(19) En particulier en Nouvelle Calédonie, v. sur la question A. Bugada, Contribution à l'étude de l'interprofession . - A propos de l'accord interprofessionnel de Polynésie française relatif à la prime à l'emploi, JCP éd. S, 2010, 1039. On peut également faire référence à l'accord régional interprofessionnel sur les salaires en Guadeloupe, dit "accord Bino", conclu le 26 février 2009.
(20) Cass. soc., 24 septembre 2014, n° 13-24.851, FS-P+B (N° Lexbase : A3412MXN). Plus généralement sur cette affaire, v. Cons. const. n° 2014-373 QPC du 4 avril 2014 (N° Lexbase : A4067MIH) et les obs. de Ch. Radé, Sephora et le travail le dimanche : comme un parfum de droits de l'Homme, préc.
(21) Si la période de travail de nuit commence au-delà de 22 heures, la période de nuit s'achève à 7 heures, et non à 6 heures, comme le prévoit, par principe, l'article L. 3122-29 du Code du travail (N° Lexbase : L0385H97).
(22) Cf. supra.
(23) C. trav., art. L. 3122-37 (N° Lexbase : L0393H9G), art. L. 3122-39 (N° Lexbase : L0395H9I), art. L. 3122-42 (N° Lexbase : L0398H9M) à L. 3122-45.
(24) Cons. const., n° 2014-373 QPC du 4 avril 2014, préc..
(25) Le refus du salarié de travailler en soirée ne peut être considéré comme une faute, comme un motif de licenciement, donner lieu à un refus d'embauche ou à une mesure discriminatoire.
(26) Cass. soc., 7 avril 2004, n° 02-41.486, FS-P+B (N° Lexbase : A8426DBP).
(27) Cf. supra.
(28) Conseil municipal des communes concernées, organisations syndicales et patronales, organe délibérant de l'établissement public intercommunal, comité départemental du tourisme.
(29) Délai ramené à un mois en cas de simple modification.
(30) Délai ramené à trois mois en cas de simple modification.
(31) Le transfert au préfet de région de cette compétence répond à une tendance d'accroissement des pouvoirs de cette autorité administrative engagée depuis 2010, v. en part. le décret n° 2010-146 (N° Lexbase : L5726IG8) du 16 février 2010 modifiant le décret n° 2004-374 (N° Lexbase : L1781DYM) du 29 avril 2004, relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements.
(32) Sur l'abrogation des actes administratifs unilatéraux en cas de changement de circonstances de droit, v. CE, Ass., 10 janvier 1964, Syndicat national des cadres des bibliothèques, Rec. CE, 1964, p. 17.
(33) Précision programmée par le gouvernement, v. l'étude d'impact du projet de loi, tome 3, p. 11.
(34) Cf. supra. La consultation du comité départemental du tourisme est toutefois remplacée par une consultation de la chambre du commerce et de l'industrie et de la chambre des métiers.
(35) Dérogation permanente de droit, v. C. trav., art. R. 3132-5 (N° Lexbase : L6772IZT).
(36) Avis du maire, du président de l'établissement public intercommunal, des représentants des employeurs et des salariés des établissements concernés, avis réputés pris dans un délai de deux mois suivant la saisine des personnes concernées.

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Droit pénal du travail

[Brèves] Délit de travail dissimulé : conformité à la Constitution de la responsabilité solidaire du donneur d'ordre en paiement des impôts, taxes et cotisations obligatoires ainsi que des pénalités et majorations dus au Trésor public ou aux organismes de protection sociale

Réf. : Cons. const., décision n° 2015-479 QPC, du 31 juillet 2015 (N° Lexbase : A0565NNA)

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N8658BU9

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Le 03 Septembre 2015

Les dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 8222-2 du Code du travail (N° Lexbase : L3605H9E) ne sauraient, sans méconnaître les exigences qui découlent de l'article 16 de la Déclaration de 1789 (N° Lexbase : L1363A9D), interdire au donneur d'ordre de contester la régularité de la procédure, le bien-fondé et l'exigibilité des impôts, taxes et cotisations obligatoires ainsi que des pénalités et majorations y afférentes au paiement solidaire desquels il est tenu. Sous cette réserve, les dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 8222-2 ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit et doivent être déclarées conformes à la Constitution. Telle est la solution dégagée par le Conseil constitutionnel dans une décision rendue le 31 juillet 2015 (Cons. const., décision n° 2015-479 QPC, du 31 juillet 2015 N° Lexbase : A0565NNA).
Le Conseil constitutionnel a été saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur la conformité du deuxième alinéa de l'article L. 8222-2 du Code du travail aux droits et libertés que la Constitution garantit.
Selon la société requérante, en prévoyant que le donneur d'ordre, qui ne procède pas aux vérifications prévues à l'article L. 8222-1 du Code du travail, est tenu solidairement responsable avec celui qui a fait l'objet d'un procès-verbal pour délit de travail dissimulé au paiement des impôts, taxes et cotisations obligatoires ainsi que des pénalités et majorations dus par celui-ci au Trésor public et aux organismes de protection sociale, le législateur a méconnu le droit de propriété. Elle soutient également, avec la société intervenante, que les dispositions contestées méconnaissent les principes de présomption d'innocence, d'individualisation et de proportionnalité des peines, et que, selon la société intervenante, les dispositions contestées méconnaissent également la garantie des droits ainsi que le principe d'égalité devant la justice.
Cependant, en énonçant la réserve susvisée, le Conseil constitutionnel a déclaré le deuxième alinéa de l'article L. 8222-2 du Code du travail conforme à la Constitution (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E7322ESY et l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E4288AUD).

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