Lexbase Droit privé n°608 du 9 avril 2015 : Procédure civile

[Evénement] L'accord : rédaction, homologation, exécution - Compte-rendu de la Commission "Modes amiables de résolution des différends" du barreau de Paris du 12 février 2015

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[Evénement] L'accord : rédaction, homologation, exécution - Compte-rendu de la Commission "Modes amiables de résolution des différends" du barreau de Paris du 12 février 2015. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/24073101-evenement-laccord-redaction-homologation-execution-compterendu-de-la-b-commission-i-modes-amiables-d
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par Aziber Seid Algadi, Docteur en droit, Rédacteur en chef Droit pénal et Droit processuel

le 09 Avril 2015

La Commission ouverte "Modes amiables de résolution des différends" du barreau de Paris tenait, sous la responsabilité de Maître Martine Bourry d'Antin, Avocat à la cour, ancien membre du conseil de l'Ordre, co-responsable de l'Ecole internationale des Modes alternatifs de règlement des litiges (EIMA), une conférence sur le thème "l'accord : rédaction, homologation, exécution", à laquelle intervenaient Madame Natalie Fricero, Professeur à l'Université de Nice Sophia - Antipolis et Directrice de l'IEJ, Madame Isabelle Rohar-Messager, Vice-président de la 18ème chambre, 1ère section du tribunal de grande instance de Paris, Monsieur Fabrice Vert, Conseiller à la cour d'appel de Paris, Coordinateur de l'activité des médiateurs et des conciliateurs de justice du ressort de la cour d'appel de Paris et, enfin, Maître Charlotte Butruille-Cardew, docteur en droit et Avocat au barreau de Paris.
Présentes à cette occasion, les éditions juridiques Lexbase vous proposent un compte-rendu de la réunion. Propos introductifs, par Maître Matine Bourry d'Antin

Plusieurs questions reviennent sans cesse à propos l'accord de médiation : comment s'élabore l'accord issu d'une médiation judiciaire ou conventionnelle, d'un processus de droit collaboratif ou d'une procédure participative ? Qui rédige, quelle est sa forme juridique, dans quels cas et conditions solliciter l'homologation de l'accord ? Quelle est la procédure d'homologation et quels sont les pouvoirs du juge homologateur ? Quelle est la portée d'un accord issu d'un processus de résolution amiable des litiges ? Peut-on contester un tel accord et à quelles conditions ? Qu'en est-il du cas particulier d'un accord de médiation conventionnel, lors d'une instance en cours ? Quelle est la particularité des accords transfrontaliers ? Quelles sont les éventuelles difficultés d'exécution et comment les éviter ?

I - L'approche théorique, par Madame Natalie Fricero

L'accord marque l'issue d'un processus amiable et nécessite un traitement sous tous les angles (accord participatif, conventionnel...) car il y a une accumulation de processus et de dispositions spéciales que l'on retrouve dans le Code civil et le Code de procédure civile. Mais les spécialistes du droit processuel, qui font des modes amiables, deviennent des spécialistes du droit des contrats dans la mesure où la justice est contractualisée, et l'on retrouve, par conséquent, des problématiques du droit des contrats. Les dispositions du Code civil constituent en ce qui concerne le régime juridique du contrat et donc de l'accord, une base capitale. Il convient de rappeler que le Parlement a habilité le Gouvernement à préparer une ordonnance sur le droit des contrats et des obligations à droit constant, même s'il est vrai que "le droit constant a des variables".

Le mode amiable est conçu par les juristes comme un mode de résolution des différends. Le non-accord n'est pas sans incidence positive, car les parties ont au moins pu commencer à discuter. Il y a une conséquence pour les avocats qui peuvent donc ajuster leur stratégie en fonction des personnes, de ce qu'ils ont entendu, du contexte, du litige.

Pour le juge, c'est aussi intéressant, même en cas d'échec, car les parties arrivent devant lui un peu plus sereines et apaisées car ayant pu communiquer et les aspects psychologiques ont pu être résolus. Il y a tout de même une mise en état conventionnelle. L'on aura pu avoir recours à un expert et même, en l'absence d'accord, on aura l'occasion de profiter de cette phase.

Lorsqu'il y a accord, il s'agit d'un contrat, d'une convention. Il y a, à cet effet, deux catégories de contrats : soit, et dans la majorité des cas, ce sont des contrats nommés -constat d'accord (pour le conciliateur de justice), procès verbal de conciliation (lorsque c'est un juge qui le rédige), voire une conciliation transactionnelle (lorsque le bureau de conciliation insère dans son procès-verbal de conciliation une transaction) ou encore la transaction relevant des articles 2044 et suivants du Code civil (N° Lexbase : L2289ABE) ; soit il s'agit de contrats innommés, non règlementés par le Code civil (accord de médiation, accord intervenant à l'issue d'une conciliation, d'un avis donné par un conciliateur ou un médiateur).

- En procédure participative assistée par avocat, l'auteur de l'acte est bien entendu l'avocat. Selon le Code civil, chaque partie doit être assistée par un avocat dans ce cadre. La commission "Guinchard" a consacré une procédure précise en conférant à l'avocat un monopole de l'assistance des parties.

- En médiation judiciaire, la situation est plus complexe car aucune disposition n'est prévue dans le Code et, donc, toutes les pratiques sont possibles. Certains médiateurs refusent de rédiger les accords et de les mettre en forme pour deux raisons : d'une part, ils ne sont pas juristes et, d'autre part, ils n'ont pas d'assurance de responsabilité professionnelle adéquate. Dans ce cas, ce sont les avocats qui vont mettre en forme l'accord tel que négocié devant le médiateur. Il convient, toutefois, de rappeler qu'il y a des accords rédigés par des médiateurs familiaux sur les pensions alimentaires ou les prestations compensatoires qui posaient problèmes même si ceci n'est pas très grave car tous les accords sont obligatoirement homologués par le juge. En effet, on est dans l'ordre public parce que des conventions internationales ont été signées. L'autorité parentale ne saurait être totalement déjudiciarisée ; quant au divorce, il s'agit aussi du domaine de l'ordre public, impliquant l'homologation obligatoire du juge. Toutefois, des problèmes pourraient survenir lorsqu'il s'agit de droits disponibles (hors famille et domaines d'ordre public), lorsque l'accord pour départir des droits est rédigé par un médiateur non juriste, ce qui n'est pas interdit par le Code civil.

Si la médiation judiciaire doit se développer, il est indispensable que des discussions soient menées par les ordres, les bâtonniers et les barreaux à l'échelle locale et formalisées ou non par des protocoles.

Dans ces conditions, il est nécessaire de définir la place de chacun (médiateurs et avocats pour la rédaction desdits accords). En revanche, dans les procédures sans représentation obligatoire, le médiateur pourrait suggérer l'assistance par un avocat du justiciable pour la rédaction de l'accord.

- En matière de médiation conventionnelle, il n'y a aucune réglementation, même si, là encore, la présence des avocats serait nécessaire si la procédure est appelée à se développer.

En matière de conciliation déléguée par un juge, les parties peuvent se faire assister par les mêmes personnes que devant la juridiction qui délègue. La présence de l'avocat est donc prévue par le Code. Les conciliateurs ont également un rôle actif car ils rédigent les accords lorsque l'appel à un avocat peut engendrer d'énormes frais.

- Dans de cadre de la conciliation par le juge (circuit de conciliation), celui-ci ne rédige pas d'accord, contrairement à ce que prévoit le Code de procédure civile, à travers les articles 130 (N° Lexbase : L1443I8X) et 131 (N° Lexbase : L1444I8Y). En réalité les juges consulaires ne le font pas et ce sont les avocats qui le rédigent.

Quant au contenu de l'accord, c'est la liberté contractuelle qui prévaut. Ceci implique que l'avocat qui rédige un accord de médiation connaisse la matière faisant l'objet d'accord, car sa responsabilité professionnelle pourrait être engagée. Cela étant, il faut veiller à ne pas violer l'ordre public parce qu'il est nécessaire que les parties puissent disposer de leurs droits. L'ordre public n'est pas défini par le rapport de la Cour de cassation (2013) qui donne beaucoup d'exemples. Toutefois, il n'y a pas de critères pour déterminer le caractère d'ordre public.

Quelle serait la sanction d'un accord violant l'ordre public ? D'une part, il peut s'agir d'un refus d'homologation par le juge et d'autre part, d'une nullité prévue par le Code civil ; l'homologation ne couvrant pas l'atteinte à l'ordre public.

L'accord doit être exécutable. Il ne faut pas y omettre certains éléments : en cas de paiement, il convient de prévoir des échéances, pénalités, clauses de déchéance etc.. Dès lors qu'il comporte des termes juridiques ambigus, on fait recours au pouvoir d'interprétation souverain du juge (C. civ., art. 1156 N° Lexbase : L1258AB9 et suivants). Quand on sait que l'amiable, c'est aussi pour éviter l'aléa judiciaire, ce dernier est donc retrouvé dans le pouvoir d'interprétation du juge.

Les termes doivent être clairs et précis car ils lient le juge qui ne peut pas les dénaturer. Dans un arrêt du 27 février 2014 de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation (Cass. civ. 2, 27 février 2014, n° 12-35.294, FS-P+B [LXB=A0904MGL ]), concernant une saisie des rémunérations, le tribunal d'instance avait procédé à une conciliation. Il a donc rédigé un procès verbal de conciliation, reproduisant l'accord des parties, qui indique que le débiteur pouvait se libérer de sa dette par des versements périodiques. Le débiteur a donc arrêté de payer et il a été poursuivi par le créancier, qui a inscrit un nantissement sur les parts sociales du débiteur. Ce dernier, contestant la validité de cette mesure d'exécution, a invoqué la transaction par laquelle il y avait renonciation à toute action en justice contre le débiteur. Or, cette renonciation n'était pas formellement exprimée dans le procès-verbal de conciliation qui reproduisait cette transaction.

La Cour de cassation a approuvé la cour d'appel et retenu que le procès-verbal de conciliation ne contenait pas une renonciation claire et non équivoque du créancier à la mise en oeuvre d'une autre procédure d'exécution à l'égard du débiteur dans le procès. Le JEX a, à l'occasion d'une mesure d'exécution, quant à lui, interprété souverainement la transaction, jugeant que selon la commune intention des parties, il n'y avait pas une renonciation à toute voie d'exécution. Il convient d'être vigilant à ce sujet (1).

A partir du moment où les parties n'ont pas limité les instances, dont la recevabilité était subordonnée à la réalisation d'un mode amiable, la procédure de saisie immobilière ne peut pas être diligentée sans conciliation préalable.

Désormais les clauses sont très bien rédigées par les notaires.

Faut-il rédiger un écrit ?

C'est le principe du consensualisme. En principe, l'écrit n'est pas exigé car, comme le dit Loisel "on lie les boeufs par les cornes et les hommes par les paroles". L'écrit rentre dans le champ probatoire (C. civ. art., 1315 et s. [LXB=L5828ICT ]).

On a toujours besoin de trouver un accord pour différentes raisons. Lorsqu'on subordonne l'accord à l'aval du conseil d'administration, par exemple, il convient de faire attention, car à défaut, l'accord peut être réputé non avenu. Les conditions suspensives ou résolutoires doivent être insérées avec lucidité et anticipation.

Si l'accord porte sur un droit susceptible de publication sur les registres fonciers, on se heurte à l'article 710-1 du Code civil (N° Lexbase : L8867IP4) (3). Pour publier un acte à la publicité foncière, il y a certaines exigences. Ainsi, tout acte ou droit doit, pour donner lieu aux formalités de publicité foncière, résulter d'un acte reçu en la forme authentique par un notaire exerçant en France, d'une décision juridictionnelle ou d'un acte authentique émanant d'une autorité administrative ; ce qui est assez contraignant car on ne peut pas publier l'acte d'un notaire allemand.

Quelle forme juridique pour l'accord ? Il peut prendre la forme d'un acte sous seing privé signé par les parties dans le cadre d'une procédure participative. Le régime juridique de l'acte sous seing privé est particulier, car il n'a pas date certaine et la signature peut être déniée. En revanche, lorsque deux avocats interviennent en contresignant l'acte, les parties ne peuvent plus dénier leurs signatures sans preuve du faux. Aussi, il n'est plus possible de plaider l'erreur de droit car les parties sont présumées avoir été informées des conséquences juridiques de l'acte.

Par ailleurs, il est possible d'archiver l'accord car, si des délais sont prévus, l'acte pourra être retrouvé.

Lorsque l'acte est intitulé transaction ou protocole transactionnel, ce sont les articles 2044 (N° Lexbase : L2289ABE) et suivants du Code civil qui s'appliquent. La Cour de cassation, qui n'a pas changé sa décision depuis un arrêt du 3 janvier 1883, exige, pour la transaction, l'existence de concessions réciproques comme condition de validité (3). En revanche, dans un accord de procédure participative, de médiation, de conciliation, il n'y a pas une telle exigence ; ce qui veut dire que l'on peut renoncer à tout en connaissance de cause, lorsqu'on a été informé.

La transaction, par rapport à l'accord participatif, a également autorité de chose jugée en dernier ressort, précise le Code civil même si la Cour de cassation a considérablement atténué cet effet d'autorité de chose jugée lorsque la transaction est incluse dans un mode amiable. Ainsi, quand il y a une transaction qui porte sur une créance de 10 000 euros, le juge ne peut plus être saisi sur le litige résultant de cette créance.

La valeur juridique d'un accord amiable : l'accord amiable a force obligatoire (C. civ., art. 1134 N° Lexbase : L1234ABC) et effet relatif (C. civ., art. 1165 [LXB=L1832H4M ]). La transaction n'engage pas les tiers : elle est cantonnée aux parties (C. civ., art. 2052 N° Lexbase : L2297ABP).

Pour les protocoles transactionnels, l'autorité de la chose jugée a été atténuée par la Cour de cassation à deux égards : un arrêt du 12 juillet 2012 (Cass. civ. 1, 12 juillet 2012, n° 09-11.582, F-P+B+I N° Lexbase : A7503IQX) a précisé que la transaction n'a autorité de chose jugée que si elle était exécutée (disposition propre à la transaction). A défaut, il est possible de saisir le juge.

L'on s'était demandé si une inexécution partielle privait de l'autorité de la chose jugée. La première chambre civile de la Cour de cassation a, le 10 décembre 2014 (Cass. civ. 1, 10 décembre 2014, n° 13-28.240, F-D N° Lexbase : A6107M7C), statuant sur un protocole transactionnel en matière bancaire inexécuté partiellement, décidé que l'inexécution ne constituait pas un manquement de nature à justifier la résolution du protocole transactionnel et en a justement déduit que l'autorité de la chose jugée, attachée à ce protocole transactionnel, rendait irrecevable l'action en responsabilité contre la banque.

Il y a des degrés d'inexécution pour remettre en cause ou pas le litige devant le juge ; ce qui n'est pas évident car la transaction éteint le droit d'agir (C. proc. civ., art. 384 N° Lexbase : L2272H4W), sauf en cas d'inexécution. Tout est donc question de degré d'inexécution.

Quel est donc le degré admissible ?

L'avocat devrait prendre le parti du client qu'il défend. En effet, il est différent de saisir un juge pour lui demander une exécution forcée de la transaction ou de tout remettre en cause, car, dans ce cas, on agrandit le litige.

L'équité, ici, génère une insécurité juridique. A partir du moment où la Cour de cassation crée une exception à des textes très précis, des critères devraient sécuriser l'exception.

S'agissant des autres accords (accord de procédure participative, accord de médiation), qui n'ont pas autorité de chose jugée, ils ne font pas disparaître le droit d'agir. L'article 384 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L2272H4W), qui définit les causes d'extinction de l'action (et non de l'instance) souligne qu'"en dehors des cas où cet effet résulte du jugement, l'instance s'éteint accessoirement à l'action par l'effet de la transaction, de l'acquiescement, du désistement d'action ou, dans les actions non transmissibles, par le décès d'une partie".

En conséquence, si, en cours d'instance, il est rédigé un accord de médiation judiciaire, il ne faudrait pas omettre de faire renoncer les parties à leur droit d'agir ou de les amener à se désister de l'instance dans le cadre de la procédure, pour ne pas générer l'incertitude.

A défaut, ce serait regrettable de remettre en cause la totalité des éléments alors que la négociation, en vue d'obtenir un accord, dure depuis plusieurs mois.

Le simple désistement de l'instance ne suffit pas car l'article 385 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L2273H4X) permet aussi de réitérer la demande.

L'on se demande d'ailleurs si l'estoppel ne permet pas d'y remédier.

La force obligatoire de l'accord est limitée car il faut encore l'homologation qui confère la force exécutoire pour faire recours à un huissier de justice afin de procéder à l'exécution forcée à travers une saisie. Seuls les officiers publics peuvent l'accorder : les notaires, les huissiers de justice et le juge.

L'homologation est réglementée par le Code de manière très disparate.

Dans la médiation judiciaire (C. proc. civ., art. 131-12 N° Lexbase : L8416IR7), c'est en principe le juge, ayant désigné le médiateur, qui homologue. Dans la médiation conventionnelle, la conciliation conventionnelle, la procédure participative assistée par avocat, l'article 1565 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L8380IRS) prévoit que c'est le juge compétent pour statuer dans la matière, qui homologue l'accord. Il faut donc déterminer la compétence du juge du fond (en matière commerciale, c'est le président du tribunal de commerce, par exemple). Le juge des référés peut prescrire une médiation (C. proc. civ., art. 131-1 N° Lexbase : L1435H4W) et peut homologuer car l'article 131-12 énonce que le juge homologue et l'article 1565 du même code (N° Lexbase : L8380IRS) lui interdit de modifier la teneur de l'accord mais il peut, en revanche, homologuer une médiation. Dans la mesure où il ne s'agit pas d'une "jurisdiction", on ne saurait exclure l'homologation de son champ de compétence.

Il convient de faire un circuit court pour l'homologation afin de contribuer à son développement.

Y a-t-il un délai pour demander l'homologation ? Il n'y a aucune précision à ce sujet. Peut-on appliquer la prescription extinctive du droit de demander la créance ? Dans la pratique, le problème ne se pose pas car l'homologation se fait assez rapidement.

Lorsqu'on obtient l'homologation et la force exécutoire, l'exécution est possible (Cass. civ. 2, 8 janvier 2015, n° 13-27.377, F-P+B N° Lexbase : A0717M9G). Dans l'arrêt du 8 janvier, il s'agissait d'une transaction homologuée entre deux sociétés. L'une n'ayant pas payé, l'autre société a fait une saisie sur le compte bancaire de la caution, intervenue dans l'acte en qualité de gérant. La caution a alors opposé le principe relatif de la transaction et a obtenu gain de cause. La société devait donc obtenir un titre exécutoire contre la caution.

Peut-on contester ces accords ? Sur ce point, selon la chronique d'un auteur sur le régime juridique des accords homologués (4), l'accord a une double nature : c'est un jugement d'homologation d'un coté et un contrat, de l'autre.

Pour cet auteur, la contestation est donc double :

- on peut contester le refus d'homologation par le juge (C. proc. civ., art. 1566 N° Lexbase : L8381IRT), en faisant appel. La cour d'appel n'abordera donc pas le contenu de l'accord ;

- on peut contester le contrat, conformément au droit commun des contrats.

L'accord doit-il rester confidentiel ? Si le client veut que l'accord reste confidentiel, il ne faut pas l'homologuer et l'exécution sera, dans cette hypothèse, spontanée, et volontaire.

II - Les aspects pratiques

- Au sein de la 18ème chambre, 1ère section du TGI de Paris, par Madame Isabelle Rohar-Messager

La 18ème chambre, 1ère section (spécialisée dans les baux et loyers commerciaux), a institué, en 2014, 123 médiations portant sur des litiges de baux commerciaux et 12 médiations portant sur des litiges en loyers commerciaux. Les dossiers traités par cette chambre sont aisément éligibles à la médiation : en effet, les parties sont liées pendant de nombreuses années par un contrat de bail, essentiel pour l'activité du locataire, et il est donc important que les relations des parties soient apaisées.

Pour vérifier la pertinence de la politique de médiation, la chambre tient des statistiques de médiation actualisées tous les trois mois. Il en résulte un taux d'accord supérieur à 80 % et un coût moyen de 1 770 euros hors taxes.

La 18ème chambre a constaté que la proposition de médiation engendrait une dynamique vers une solution négociée, puisque, même quand les parties n'acceptent pas de recourir à une mesure de médiation, la proposition faite par le juge les amène souvent à rechercher entre elles un rapprochement. De même, en cas d'échec de la médiation, on observe souvent que les parties ont avancé dans leurs positions face au litige. Enfin, il arrive que les parties, au cours de la médiation, parviennent à des accords partiels, qui vont modifier l'objet du litige et qui vont faire cesser l'augmentation du préjudice.

Ladite chambre est très attentive au fait que la médiation ne doit avoir ni pour objet, ni pour effet d'être dilatoire et c'est ainsi qu'en cas d'échec de la médiation, les dossiers sont immédiatement fixés, plaidés en priorité par rapport aux autres.

En cas de succès de la médiation, dans la plupart des cas, les parties se désistent sans solliciter d'homologation, car celle-ci débouche, en général, sur la conclusion d'un nouveau bail. C'est donc une médiation qui construit l'avenir.

Lorsque que les parties sollicitent l'homologation de l'accord, le juge doit alors analyser la nature juridique de cet accord :

- s'il s'agit d'un accord de médiation, le juge doit vérifier sa régularité et l'absence de dispositions contraires à l'ordre public. Par ailleurs, la médiation ne met pas fin à l'instance ; les parties doivent alors rédiger des conclusions de désistement ;

- lorsque l'accord est une transaction, le juge doit vérifier que celle-ci comporte des concessions réciproques. Dans cette hypothèse, la transaction emporte désistement sans qu'il soit nécessaire que les parties la demandent.

- Au sein de la chambre de droit immobilier de la cour d'appel de Paris, par Monsieur Fabrice Vert

Au sein la Chambre commerciale, aucun n'accord n'était homologué parce que les parties se désistent le plus souvent, lorsqu'il y a accord. En revanche, au sein de la Chambre de droit immobilier, plusieurs accords ont été homologués.

Dans les protocoles d'accords transactionnels homologués, les accords font bien référence à l'article 2044 du Code civil (N° Lexbase : L2289ABE), qui expriment bien les concessions réciproques, qui sont bien signées par les parties et l'on trouve également des actes d'avocat contresignés.

Lorsqu'est ordonnée une médiation, il est rappelé que ce soient les avocats qui rédigent l'accord afin de garantir une efficience juridique. Parfois, il y a des désistements d'appel et dans ce cas, le jugement garde tous ses effets, conformément à l'article 403 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L6504H7Z).

Dans le cadre d'homologation qui relève de la matière gracieuse, le dossier est transmis au Parquet général qui donne, dans la plupart des cas, un avis favorable.

Sur la qualification de l'accord, il convient de veiller à la dénomination donnée à l'accord (protocole d'accord transactionnel, transaction) et à la signature.

Tant que la médiation ne sera pas intégrée dans les statistiques des juridictions, son développement restera artisanal et il conviendrait, comme le propose Monsieur le Haut Conseiller Delmas Goyon dans son rapport "le juge du XXIème siècle" de faire de la médiation un indicateur de performance des juridictions.

La médiation est un enrichissement de la réponse judiciaire et revêt davantage un aspect qualitatif que quantitatif. En effet, la proposition de médiation, l'écoute des parties et des avocats, le suivi de la mesure de médiation sont des activités qui devraient être prises en compte. La création récente d'une unité de médiation par la première présidente de la cour d'appel de Paris est un signe favorable quant à l'institutionnalisation de la médiation dans cette cour.

- En matière de médiation en matière familiale, par Maître Charlotte Butruille-Cardew

Dans le cadre des litiges relatifs à l'autorité parentale, les médiations devraient être ordonnées. Il faudrait, pour ce faire, donner au juge un temps d'analyse et de confiance en sachant que ce temps permettra d'éviter un procès à répétition et des difficultés s'étalant sur plusieurs années. Il faut vaincre la réticence des avocats mais aussi leur ignorance.

Si on peut gagner, pourquoi concéder, ont coutume de soutenir les avocats. Pourtant, la capacité du magistrat à intervenir dans une sorte de mise en état, de créer un dialogue avec les parties est importante car ce n'est que de cette façon qu'elle pourrait être effective. Les MARD ne sont pas une "déjudiciarisation" mais plutôt une "alterjudiciarisation" car la médiation est un travail d'équipe. En effet, il y a des médiateurs qui ne sont pas juristes et qui rédigent des accords familiaux mal conçus parce que plusieurs détails sont omis occasionnant des difficultés d'exécution. Il est dès lors important que des juristes mènent les médiations. La place du juge homologateur joue donc un rôle très important. Aussi, le temps de la médiation a un impact considérable pour les parties surtout lorsqu'il s'agit d'un litige où les parties n'ont pas une nationalité commune. Le temps de la médiation peut permettre d'établir, par exemple, la résidence habituelle et de saisir, par conséquent, la juridiction française, grâce au contrôle judiciaire qui est ainsi effectué.

Un contrôle d'ordre judiciaire se révèle indispensable car, à défaut, les risques sont très importants. Ainsi, soit l'on demande que les avocats soient nécessairement présents lorsque les médiateurs ne sont pas juristes, soit on replace le juge au centre de la médiation, comme garant de la sauvegarde des libertés fondamentales.


(1) Cette problématique se retrouve dans les clauses de règlement amiable insérées dans les contrats. Plusieurs arrêts de la Cour de cassation en 2014 ont relevé que lesdites clauses étaient souvent mal rédigées. Les notaires mettent souvent une clause de type "en cas de différends à propos de ce acte notaire, préalablement à toute instance judiciaire, les parties saisiront la chambre des notaires qui désignera un notaire médiateur". Il serait intéressant que les avocats fassent la même chose.
(2) Cass!!!!; mixte, 12 décembre 2014, n° 13-19.684, P+B+R+I (N° Lexbase : A3277M7I).
(3) Il convient de rappeler que cet article a été introduit à la suite de la loi sur l'acte d'avocat de 2011 qui a introduit les actes contresignés par l'avocat. Les notaires ont donc introduit ledit article pour préserver les ventes d'immeubles.
(4) Cf. B. Pons, Contrats de transaction - Solutions transactionnelles 2014-2015, Dalloz, 2013.
(5) Ivan Balensi, L'homologation judiciaire des actes juridiques, RTDCiv., 1978, n° 4, p. 46 ss.

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