Lexbase Social n°529 du 30 mai 2013

Lexbase Social - Édition n°529

Accident du travail - Maladies professionnelles (AT/MP)

[Brèves] Nullité de l'acte d'appel d'une décision d'attribution d'un taux d'incapacité en l'absence de signature de l'acte d'appel uniquement s'il est justifié d'un grief

Réf. : Cass. civ. 2, 23 mai 2013, n° 12-16.933, F-P+B (N° Lexbase : A9243KDP)

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N7263BT8

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Le 04 Juin 2013

L'absence de signature de l'acte d'appel formé au nom d'une personne identifiée constitue une irrégularité de forme qui ne peut entraîner la nullité de l'acte que s'il est justifié d'un grief. Telle est la solution retenue par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 23 mai 2013 (Cass. civ. 2, 23 mai 2013, n° 12-16.933, F-P+B N° Lexbase : A9243KDP).
Dans cette affaire, un assuré social, victime d'un accident du travail, a saisi un tribunal du contentieux de l'incapacité d'un recours contre une décision de la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle ayant fixé à 10 % le taux de son incapacité permanente partielle puis, après le prononcé du jugement, a adressé au greffe de cette juridiction une déclaration d'appel non signée. L'arrêt rendu le 8 février 2012 par la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail retient pour déclarer irrecevable cet appel que l'acte qui ne comporte pas la signature de son auteur ne vaut pas déclaration d'appel, à moins d'une régularisation intervenue durant le délai d'appel, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. La Haute juridiction casse le jugement reconnaissant que l'acte était, certes, affecté d'un vice de forme mais qu'aucun grief causé par cette irrégularité n'était allégué (sur la saisine du tribunal du contentieux de l'incapacité, cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E9473AD9).

newsid:437263

Cotisations sociales

[Brèves] Rescrit social : demandes relatives au domaine d'application de la réduction "Fillon"

Réf. : Rescrit social du 16 mai 2013

Lecture: 2 min

N7210BT9

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Le 30 Mai 2013

Le rescrit du 16 mai 2013 porte sur des demandes posées auprès de l'URSSAF sur des questions relatives au domaine d'application de la réduction "Fillon". Il convient de rappeler que le rescrit permet aux cotisants ou aux futurs cotisants d'obtenir des URSSAF et CGSS une appréciation formelle de leur situation au regard de la législation relative aux cotisations et contributions sociales et de se prévaloir ultérieurement de cette position en cas de contrôle puisqu'il le prémunie contre un redressement fondé sur une appréciation différente par l'administration pour la période en question. La première demande porte sur la possibilité d'appliquer la réduction dite "Fillon" au titre d'un salarié de plus de 65 ans, titulaire d'un contrat de travail pour lequel l'employeur ne cotise pas au régime d'assurance chômage compte-tenu de son âge. La réduction générale de cotisations instituée par la loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003 (N° Lexbase : L0300A9Y) est dégressive et fonction du niveau de rémunération des salariés y ouvrant droit. Elle s'applique à l'ensemble des salariés dont la rémunération est inférieure à 1,6 SMIC, son montant étant maximal pour les salariés rémunérés au SMIC. La lettre ministérielle du 19 janvier 2004 diffusée par la lettre circulaire ACOSS n° 2004-039 du 4 février 2004 (N° Lexbase : L8304IWH) précise que : "les salariés âgés de plus de 65 ans et titulaires d'un contrat de travail entrent dans le champ de l'assurance chômage, bien que l'employeur soit dispensé de verser les cotisations dues à ce titre. Par suite, l'employeur peut bénéficier de la réduction "Fillon" au titre des rémunérations qui leur sont versées". Par conséquent, les rémunérations de ce salarié ouvrent droit à la réduction générale de cotisations "Fillon". La demande porte sur la possibilité d'appliquer la réduction dite "Fillon" aux rémunérations versées à une associée égalitaire de SARL. En l'espèce, l'entreprise a déposé auprès de l'organisme d'assurance chômage une demande d'étude sur l'obligation de cotiser en qualité d'associée égalitaire bénéficiaire d'un contrat de travail. L'organisme a pris en compte l'étendue des pouvoirs de l'associé égalitaire dans la société et a rejeté l'assujettissement de l'associée salariée au régime d'assurance chômage obligatoire, préalable obligatoire afin de bénéficier de la réduction. Compte-tenu de cet élément de fait et sans qu'il soit besoin d'examiner d'autres pièces que le refus de l'organisme d'assurance chômage, la réduction "Fillon" ne peut être appliquée au titre des rémunérations versées à l'associée égalitaire .

newsid:437210

Cotisations sociales

[Brèves] Les sommes perçues pour le règlement échelonné de la cession d'une entreprise, constituent, un revenu devant être pris en compte pour le calcul de la cotisation CMU

Réf. : Cass. civ. 2, 23 mai 2013, n° 12-10.140, F-P+B (N° Lexbase : A9182KDG)

Lecture: 1 min

N7220BTL

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Le 30 Mai 2013

La cotisation due par les personnes affiliées au régime de la couverture maladie universelle, est fixée en pourcentage du montant des revenus. Servent également au calcul de la cotisation, lorsqu'ils ne sont pas pris en compte, l'ensemble des moyens d'existence et des éléments de train de vie, notamment les avantages en nature et les revenus procurés par les biens mobiliers et immobiliers, dont le bénéficiaire de la couverture maladie universelle a disposé. Les sommes perçues mensuellement en règlement d'une vente constitue un revenu nécessitant d'être pris en compte dans le calcul de la cotisation due. Telle est la solution retenue par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 23 mai 2013 (Cass. civ. 2, 23 mai 2013, n° 12-10.140, F-P+B N° Lexbase : A9182KDG).
Dans cette affaire, M. X ayant cessé son activité professionnelle et cédé son entreprise le 31 décembre 2008, son successeur s'acquittant du prix de vente au moyen de versements mensuels, a été affilié au régime de la couverture maladie universelle par la caisse primaire d'assurance maladie. L'intéressé a contesté le montant de la cotisation afférente à son affiliation au motif que celle-ci ne pouvait pas être assise sur le montant des mensualités versées par l'acquéreur de son entreprise en règlement du prix de vente de celle-ci, et saisi à cette fin une juridiction de Sécurité sociale. Pour déclarer que la caisse devra procéder à la révision du montant de la cotisation réclamée, le jugement rendu le 22 septembre 2011 par le TASS retient que le revenu fiscal de référence de 2009, qui a servi au calcul de la cotisation annuelle contestée, est sans application en l'espèce, car la vente d'une entreprise n'est pas un revenu ou une ressource. Or, la Cour de cassation vient infirmer ce jugement et préciser que les sommes perçues périodiquement par la personne affiliée au régime de la couverture maladie universelle pour le règlement échelonné de la cession de son entreprise, constituent, chaque année, un revenu (sur l'assujettissement à la contribution destinée au financement de la CMU, cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E3049A4P).

newsid:437220

Discrimination et harcèlement

[Brèves] Faits de discrimination retenus dans un précédent arrêt de travail : manquement grave de l'employeur

Réf. : Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-12.995, FS-P+B, sur le 4ème moyen (N° Lexbase : A9083KDR)

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N7290BT8

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Le 01 Juin 2013

Des faits de discrimination retenus dans un précédent arrêt de travail constituent un manquement grave de l'employeur à ses obligations, justifiant la résiliation judiciaire, à ses torts, du contrat de travail, peu important qu'ils ne se soient pas poursuivis. Telle est la solution retenue par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 23 mai 2013 (Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-12.995, FS-P+B, sur le 4ème moyen N° Lexbase : A9083KDR).
Dans cette affaire, une salariée a été engagée en qualité d'assistante commerciale puis promue conseiller mutualiste. Elle a été placée en arrêt de travail du 17 juin 2003 au 6 mars 2004 puis du 21 mars au 1er septembre 2005. Le médecin du travail l'a déclarée apte à son poste de conseiller mutualiste, à temps partiel. La mutuelle, son employeur, a maintenu son affectation au siège mais à des fonctions d'accueil et de standard. La salariée ayant en vain réitéré sa demande afin de reprendre son poste initial, conformément à l'avis du médecin du travail, elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes en réparation du préjudice occasionné du fait de la discrimination subie en raison de son état de santé et en rappel de salaire puis, en cours d'instance d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail. Pour rejeter la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et celles à titre de dommages-intérêts et d'indemnité de rupture l'arrêt de la cour d'appel retient, d'une part, que la discrimination invoquée par la salariée porte sur des faits produits à partir du mois de septembre 2005 lorsqu'à l'issue d'un arrêt de travail pour maladie, elle a été affectée à des fonctions d'accueil et de standardiste, différentes des fonctions de conseillère mutualiste qu'elle exerçait précédemment et, d'autre part, qu'aucun élément ne permettant de constater que cette discrimination s'est poursuivie après l'arrêt du 2 septembre 2009, ce manquement ancien de l'employeur ne peut pas, à lui seul, justifier le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat. La Haute juridiction a infirmé les arrêts pour une violation des articles 1134 (N° Lexbase : L1234ABC) et 1184 (N° Lexbase : L1286ABA) du Code civil, L. 1221-1 (N° Lexbase : L0767H9B) et L. 1132-1 du Code du travail (N° Lexbase : L8834ITD) (sur la prohibition des discriminations à l'embauche liées à l'état de santé ou au handicap, cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E2585ETW).

newsid:437290

Emploi

[Brèves] Associations intermédiaires : mise à disposition de personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières

Réf. : Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-10.002, FS-P+B (N° Lexbase : A9151KDB)

Lecture: 2 min

N7289BT7

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Le 26 Septembre 2014

Si les associations intermédiaires ayant conclu avec l'Etat une convention, peuvent engager des personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières afin de faciliter leur insertion professionnelle en les mettant à titre onéreux à la disposition d'employeurs personnes physiques, sans limitation de durée, cette mise à disposition ne peut intervenir que pour des activités ne relevant pas de leurs exercices professionnels, le salarié mis à disposition pouvant, en cas de non-respect de ces dispositions, faire valoir auprès de l'utilisateur les droits tirés d'un contrat à durée indéterminée. Telle est la solution retenue par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 23 mai 2013 (Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-10.002, FS-P+B N° Lexbase : A9151KDB).
Dans cette affaire, Mme B., a été engagée le 8 mars 2004 par une association intermédiaire de service dans le cadre d'une succession de 140 contrats à durée déterminée "d'usage" à temps partiel, en qualité de femme de ménage pour être mise à disposition de M. C., président de l'association intermédiaire, et de Mme G. dont le bureau et le cabinet d'infirmière étaient installés au domicile de ce dernier. Faisant valoir que ses employeurs étaient en réalité M. C. et Mme G. laquelle l'avait congédiée le 1er février 2010, elle a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée à l'égard de M. C. et Mme G. et obtenir la condamnation de ces derniers à lui payer diverses sommes au titre de la rupture ainsi que la condamnation de l'association à lui payer des dommages-intérêts. Pour débouter la salariée de ses demandes dirigées contre les utilisateurs, l'arrêt de la cour d'appel (CA Dijon, 3 novembre 2011, n° 10/00468 N° Lexbase : A9873H33) énonce qu'elle est fondée à faire valoir auprès de l'association, son seul employeur, les droits tirés d'un contrat à durée indéterminée. La Haute juridiction infirme l'arrêt pour une violation des articles L. 5132-7 (N° Lexbase : L2102H9Q), L. 5132-9 (N° Lexbase : L0972ICY) et L. 5132-14 (N° Lexbase : L5800IA3) du Code du travail. En effet, alors qu'elle avait constaté que la salariée avait occupé pendant près de six années, de manière permanente un emploi de femme de ménage au domicile de M. C. et Mme G. où était également installé le cabinet d'infirmière de cette dernière, la cour d'appel a violé les textes susvisés .

newsid:437289

Emploi

[Brèves] Relation de travail liant un travailleur à une association intermédiaire : manquement à l'obligation de rechercher les conditions d'une insertion professionnelle durable

Réf. : Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-14.027, FS-P+B (N° Lexbase : A9067KD8)

Lecture: 2 min

N7293BTB

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Le 31 Mai 2013

Doit être requalifiée en contrat de travail de droit commun à durée indéterminée la relation de travail liant un travailleur à une association intermédiaire lorsque la mission d'assurer l'accueil ainsi que le suivi et l'accompagnement de ses salariés en vue de faciliter leur insertion sociale et de rechercher les conditions d'une insertion professionnelle durable, qui constitue une des conditions nécessaires d'existence de ce dispositif d'insertion par l'activité professionnelle n'est pas respectée. Telle est la solution retenue par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 23 mai 2013 (Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-14.027, FS-P+B N° Lexbase : A9067KD8).
Dans cette affaire, Mme P. a été engagée le 10 septembre 1994 par une association intermédiaire en qualité de femme de ménage pour être mise à disposition de plusieurs utilisateurs de manière régulière et continue. Elle a saisi, en 2009, la juridiction prud'homale de diverses demandes. Pour débouter la salariée de ses demandes tendant à la requalification de ses contrats de travail en contrat à durée indéterminée, l'arrêt de la cour d'appel (CA Nancy, 14 décembre 2011, n° 11/00662 N° Lexbase : A2470H8Y) énonce que les contrats signés avec l'association intermédiaire ne peuvent être qualifiés de contrats à durée déterminée de droit commun avec les conséquences que cette dénomination entraîne et ne sont pas davantage des contrats à durée indéterminée. Pour la cour d'appel, il s'agit de contrats autonomes avec leurs règles propres résultant des dispositions des articles L. 5132-7 (N° Lexbase : L2102H9Q) et suivants du Code du travail. Selon les juges du fonds, l'association a délivré à la salariée un certificat de validation de ses compétences professionnelles qui est de nature à faciliter son engagement par d'autres employeurs et le nombre d'heures travaillées en constante progression depuis 1994 permet d'affirmer que son insertion professionnelle est réalisée. L'augmentation du nombre d'heures travaillées et la délivrance d'un certificat de validation des compétences professionnelles n'étant pas de nature à établir que l'association intermédiaire a accompli sa mission d'assurer l'accompagnement de la salariée en vue de favoriser une réinsertion professionnelle durable, la Haute juridiction infirme l'arrêt pour une violation des articles L. 5132-7 et L. 5132-14 (N° Lexbase : L5800IA3) du Code du travail. Par ailleurs, la Haute juridiction rappelle que la surveillance de la santé des personnes employées par une association intermédiaire, au titre de leur activité est assurée par un examen de médecine préventive et qu'il appartient à l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat à l'égard des salariés, de prendre les mesures propres à assurer l'effectivité et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement .

newsid:437293

Protection sociale

[Brèves] L'attribution d'une rente pour inaptitude constitue une prestation différée lorsque le fait générateur de l'invalidité est survenu au cours de la période de validité du contrat conclu avec le premier assureur

Réf. : CA Aix-en-Provence, 23 mai 2013, n° 12/01209 (N° Lexbase : A7754KDK)

Lecture: 2 min

N7265BTA

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Le 30 Mai 2013

Dès lors, que le fait générateur de l'invalidité est survenu au cours de la période de validité du contrat conclu avec le premier assureur, qui a réglé des prestations, l'attribution de la rente pour l'inaptitude constitue une prestation différée, relevant de l'exécution de ce contrat. Telle est la solution retenue par la cour d'appel d'Aix-en-Provence dans un arrêt rendu le 23 mai 2013 (CA Aix-en-Provence, 23 mai 2013, n° 12/01209 N° Lexbase : A7754KDK).
Dans cette affaire, l'employeur de Mme. A. a souscrit au bénéfice de ses salariés des contrats d'assurances de groupe successifs garantissant le risque décès, les risques portant atteinte à l'intégrité de la personne et d'incapacité de travail ou d'invalidité. La société a adhéré à un contrat d'assurance collective auprès d'un assureur jusqu'à la résiliation le 31 décembre 2002. La société a ensuite souscrit deux autres contrats successifs avec deux compagnies d'assurance. La salariée a été en arrêt de travail, son incapacité temporaire totale a été prise en charge par le premier assureur jusqu'à la reprise par l'intéressé de son activité professionnelle en mi-temps thérapeutique. Parallèlement, la CPAM a placé Mme A. en invalidité 2ème catégorie puis en 1ère catégorie en raison de la reprise de son activité à mi-temps. La salariée a demandé au premier assureur de prendre en charge son invalidité ; ce dernier l'a informée que "la reprise thérapeutique étant survenue après résiliation et constituant une aptitude au travail à un poste aménagé, il appartient au nouvel assureur, par ailleurs bénéficiaire de cotisations appelées sur le salaire d'activité à temps partiel, de prendre en charge l'invalidité en application de l'article 2 de la loi Evin (loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 N° Lexbase : L5011E4D)". L'intéressée avait saisi le deuxième assureur d'une demande identique qui lui a notifié un refus de garantie. Par jugement rendu le 8 décembre 2011, le TGI a considéré comme prescrite l'action diligentée. Dans le contrat il est prévu que c'est la date de la décision de l'organisme de Sécurité sociale qui constitue l'événement qui donne naissance à l'action. Selon les dispositions de l'article L. 114-1 du Code des assurances (N° Lexbase : L2640HWP) toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui lui donne naissance. En l'occurrence, la salariée a reçu, suivant la mention portée sur son titre de pension, notification de son invalidité 2ème catégorie, le 2 octobre 2007. L'assignation ayant été délivrée le 28 octobre 2009, son action est prescrite en ce qu'elle est dirigée contre le premier assureur. Le deuxième assureur ne subit pas la prescription de l'action mais dénie sa garantie en ce que le fait générateur de l'invalidité se situe à la date du 15 octobre 2002, date de l'intervention chirurgicale, ce qui implique la prise en charge de la rente par le premier assureur au titre des prestations différées.

newsid:437265

Rupture du contrat de travail

[Jurisprudence] La nullité du PSE entraîne celle du départ volontaire pour motif économique inclus dans le PSE

Réf. : Cass. soc., 15 mai 2013, n° 11-26.414, FS+P+B (N° Lexbase : A5018KD9)

Lecture: 10 min

N7262BT7

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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen et Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Droit de la protection sociale"

Le 05 Juin 2013

La nullité du PSE entraîne celle du départ volontaire pour motif économique inclus dans le PSE. Tel un tsunami dont on mesure les effets (dévastateurs) y compris des années plus tard, la jurisprudence "la Samaritaine" (1) continue de susciter débats et controverses (2), ainsi qu'un certain nombre de difficultés tant juridiques (opérationnelles) que contentieuses, résolues progressivement, à hauteur des réponses apportées par la Cour de cassation. Parmi celles-ci, on relèvera :
- en amont, la question des causes de nullité. On pense notamment à l'appréciation du motif du licenciement pour motif économique, susceptible (ou pas, selon les points de vue) de déclencher la nullité du PSE. La Cour de cassation a répondu par la négative dans l'arrêt "Vivéo" du 3 mai 2012 (3) ;
- le sort d'un départ négocié (plan de départ volontaire) (4), non pas préalable au PSE, mais compris dans le cadre des mesures figurant dans le PSE. Si le juge est amené à se prononcer sur le PSE et à le déclarer nul (pour insuffisance ou absence de consultation des IRP, qu'importe, à ce stade), quel sera le sort du contrat de travail rompu, en application de l'accord de départ négocié, tel que prévu au titre du PSE ? La Cour de cassation a tranché la difficulté, par un arrêt rendu le 15 mai 2013 (5). Sans surprise, la Cour retient une solution attendue : la nullité qui affecte un plan de sauvegarde de l'emploi ne répondant pas aux exigences légales, s'étend à tous les actes subséquents ; il en va ainsi de la rupture du contrat de travail consécutive à un départ volontaire, elle-même nulle. Mais deux conditions sont posées : le départ volontaire doit avoir une cause économique et s'inscrire dans un processus de réduction des effectifs donnant lieu à l'établissement de ce plan. L'arrêt rapporté suggère deux réflexions, centrées autour de la question du périmètre de la nullité et des effets de la nullité.
Résumé

La nullité qui affecte un plan de sauvegarde de l'emploi ne répondant pas aux exigences légales, s'étend à tous les actes subséquents. En particulier la rupture du contrat de travail, consécutive à un départ volontaire lorsqu'il a une cause économique et s'inscrit dans un processus de réduction des effectifs donnant lieu à l'établissement de ce plan, est elle-même nulle.


I - Le périmètre de la nullité, en droit du licenciement économique collectif

A - Le PSE et les nullités encourues

1 - L'arrêt "la Samaritaine"

L'arrêt "la Samaritaine" a retenu une règle à l'époque non prévue par le législateur ni codifié, extrêmement audacieuse, selon laquelle la nullité qui affecte le plan social (devenu plan de sauvegarde de l'emploi) s'étend à tous les actes subséquents. En particulier les licenciements prononcés par l'employeur, qui constituent la suite et la conséquence de la procédure de licenciement collectif (suivie par application de l'ancien article L. 321-4-1 du Code du travail N° Lexbase : L3215DC3) sont eux-mêmes nuls. Depuis, la solution a été consacrée par le législateur (C. trav., art. L. 1235-10, al. 1 N° Lexbase : L6214ISX).

2 - Les exclusions

  • Les sociétés en redressement

Les entreprises en redressement ou en liquidation judiciaires sont soumises à l'obligation d'établir un PSE dans les mêmes conditions que les entreprises in bonis. Mais en cas d'insuffisance ou d'absence de PSE, les dispositions du Code du travail prévoyant la nullité des licenciements ne leur sont pas applicables (C. trav., art. L. 1235-10, al. 3). Par sa décision rendue le 28 mars 2013 (6), le Conseil constitutionnel a jugé conformes à la Constitution ces dispositions du Code du travail.

  • Les exclusions légales

Lorsque le salarié compte moins de deux ans d'ancienneté ou travaille dans une entreprise de moins de onze salariés, la sanction prévue par l'article L. 1235-10, en cas d'absence de PSE, ne lui est pas non plus applicable (C. trav., art. L. 1235-14, 1° N° Lexbase : L1363H9D).

3 - La loi de sécurisation de l'emploi

Le projet de loi relatif à la sécurisation de l'emploi (adoptée par le Parlement le 14 mai 2013) (7) a prévu que le tribunal administratif sera compétent en premier ressort pour connaître des litiges relatifs à l'accord collectif ou au document unilatéral, au contenu du PSE, aux décisions de l'administration et à la régularité de la procédure de licenciement collectif. Il faut surtout retenir, à ce stade, de la loi (actuellement en cours d'examen devant le Conseil constitutionnel, saisines les 15 et 16 mai 2013) la création d'un nouveau cas de nullité, en droit des licenciements économiques collectifs, puisqu'un licenciement intervenu en l'absence de toute décision de validation ou d'homologation ou en présence d'une décision négative sera nul.

En cas d'annulation par le juge d'une décision de validation ou d'homologation, en raison d'une absence ou d'une insuffisance de PSE, la procédure de licenciement sera nulle. L'annulation de la décision de l'administration pour un motif autre donnera lieu à la réintégration du salarié, sous réserve de l'accord des parties. A défaut, le salarié aura droit à une indemnité d'au moins six mois de salaires, en plus de son indemnité de licenciement.

B - Périmètres des nullités du PSE et de ses actes subséquents

1 - Solutions acquises

La nullité du PSE implique :

- la remise en cause des versements effectués (indemnités de rupture ou aides de toute nature prévues dans le plan social). Mais encore faut-il que le juge soit saisi d'une demande (de répétition de l'indu), au sujet de ces sommes (8) ;

- en cas de procédure collective, l'AGS ne doit aucune avance de créances si les licenciements sont dépourvus d'effet (9) ;

- l'AGS est fondée à demander que soit constatée la nullité du licenciement et ordonné le remboursement des indemnités de rupture qu'elle avait indûment versées au salarié concerné (10).

2 - Nullité des départs négociés consécutivement à la nullité du PSE

  • La solution

En l'espèce, le contrat de travail d'un salarié a été rompu le 2 septembre 2009 par départ volontaire dans le cadre du PSE. Par arrêt du 23 novembre 2009, la cour d'appel de Grenoble a annulé le plan de sauvegarde de l'emploi. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale et demandé que soit prononcée la nullité de la rupture de son contrat de travail, comme étant consécutive à un PSE déclaré nul. Les juges du fond ont prononcé la nullité de la rupture du contrat de travail et condamné l'employeur à verser différentes indemnités. La Cour de cassation, par l'arrêt rapporté, a rejeté le pourvoi formé par l'employeur. Le départ volontaire du salarié s'inscrivait expressément dans le cadre du projet de PSE, qui incluait un appel aux départs volontaires. Son poste était susceptible d'être supprimé. La cour d'appel a retenu que l'annulation du PSE a eu pour conséquence de priver de toute cause le départ volontaire qui constituait un acte subséquent à celui-ci, a exactement décidé que la nullité du PSE entraînait celle de la rupture qui lui était rattachée.

  • Les conditions

Le départ négocié n'est annulable au titre de l'annulation du PSE qu'à une double condition (arrêt rapporté) :

- le départ volontaire du salarié s'inscrit expressément dans le cadre du projet de PSE, qui incluait un appel aux départs volontaires ;

- le poste du salarié est "susceptible" d'être supprimé, c'est-à-dire, a vocation àêtre supprimé ;

Au-delà de la solution retenue par l'arrêt rapporté, il faudrait préciser que le départ négocié ne doit pas s'inscrire dans le cadre des "ruptures conventionnelles", dont le régime juridique est propre et autonome. Le législateur a, en effet, précisé que les dispositions légales régissant les ruptures conventionnelles ne sont pas applicables aux ruptures de contrats résultant d'un accord de GPEC ou des PSE (C. trav., art. L. 1237-16 N° Lexbase : L8479IAB). En d'autres termes, les départs négociés ou volontaires prévus dans le cadre d'une GPEC ou d'un PSE ne sont pas soumis à la procédure de rupture conventionnelle, et notamment à l'homologation administrative. Réciproquement, les dispositions relatives aux licenciements économiques sont applicables à toute rupture, à l'exclusion de la rupture conventionnelle (C. trav., art. L. 1233-3 N° Lexbase : L8772IA7).

La solution retenue par la Cour de cassation, soumise à deux conditions (supra), est tout à fait cohérente avec la ligne jurisprudentielle mise en place par la Cour de cassation, posant un lien étroit entre plan de départ volontaire et reclassement ; en d'autres termes, avec la nature juridique du plan de départ volontaire. La formule juridique du plan de départ volontaire est différente de celle du départ volontaire compris dans le PSE, il est vrai : la première est antérieure et extérieure au PSE ; la seconde est concomitante et comprise dans le PSE. Mais les solutions retenues par le plan de départ volontaire peuvent être transposée au "départ volontaire" (compris dans le PSE).

En 2010, la Cour de cassation avait admis que, dès lors que le projet de réduction des effectifs n'envisage que des départs volontaires et comporte l'engagement exprès de ne procéder à aucun licenciement, l'employeur est dispensé de son obligation légale d'établir un plan de reclassement interne s'intégrant au PSE (11).

Mais en 2012 (12), la Cour de cassation est revenue sur cette solution. Si l'employeur qui entend supprimer des emplois pour des raisons économiques en concluant avec les salariés des accords de rupture amiable, n'est pas tenu d'établir un plan de reclassement interne lorsque le plan de réduction des effectifs au moyen de départs volontaires exclut tout licenciement pour atteindre des objectifs qui lui sont assignés en terme de suppression d'emplois, il en va autrement lorsque le projet de réduction d'effectifs de l'employeur implique la suppression de l'emploi de salariés qui ne veulent ou ne peuvent quitter l'entreprise dans le cadre du plan de départs volontaires. Le maintien de ces salariés dans l'entreprise supposant nécessairement en ce cas un reclassement dans un autre emploi, un plan de reclassement interne doit alors être intégré au plan de sauvegarde de l'emploi. Il faut comprendre que si le projet de restructuration mis en place par l'employeur se traduit au final par la suppression de l'emploi de salariés, plan de départ volontaire ou PSE, l'employeur doit reclasser.

Par un arrêt du 29 octobre 2012 (13), la Cour de cassation a confirmé la jurisprudence du 25 janvier 2012. Si le plan de départs volontaires n'a pas à intégrer un plan de reclassement interne lorsqu'il exclut tout licenciement pour atteindre les objectifs assignés en termes de suppression d'emplois, tel n'est pas le cas lorsque le projet de réduction d'effectifs implique la suppression d'emploi de salariés qui ne veulent ou ne peuvent quitter l'entreprise dans le cadre du plan de départs volontaires et conduit soit au maintien de ces salariés dans l'entreprise dans un autre emploi, soit à leur licenciement. Dès lors, faute pour la société d'avoir établi un PSE intégrant un plan de reclassement, les licenciements sont nuls. En d'autres termes, en cas de défaut de plan de reclassement interne, la rupture sera jugée nulle si l'emploi est supprimé.

Enfin, la Cour de cassation a confirmé le lien étroit qu'elle entend tisser entre départs volontaires et reclassement (14). En l'espèce, les départs volontaires prévus dans le PSE s'adressaient aux salariés dont le licenciement était envisagé, en raison de la réduction d'effectifs, sans engagement de ne pas les licencier si l'objectif n'était pas atteint au moyen de ruptures amiables des contrats de travail des intéressés. Aussi, l'employeur est tenu, à l'égard de ces salariés, d'exécuter au préalable l'obligation de reclassement prévue dans le plan, en leur proposant des emplois disponibles dans les sociétés du groupe et adaptés à leur situation personnelle.

II - Les effets de la nullité

Lorsque le juge prononce la nullité d'une rupture de contrat de travail, mise en oeuvre par l'employeur au titre de départs négociés prévus par le PSE, se pose alors la question des effets de cette nullité. Les questions sont en grande partie déjà traitées par le législateur ou résolues par la jurisprudence, s'agissant des conséquences indemnitaires et financières ainsi que de la réintégration.

A - Conséquences indemnitaires et financières

1 - Indu

Si le juge prononce la nullité du PSE, il s'ensuit que les sommes perçues par les salariés en vertu du PSE n'ont plus de fondement juridique. Pour la Cour de cassation (15), la nullité du plan oblige les salariés à restituer les sommes perçues en exécution de ce plan, lesquelles viennent en déduction de la créance à titre de dommages-intérêts qui leur est allouée. La solution aurait certainement vocation à s'appliquer, s'agissant de salariés dont la nullité de la rupture du contrat de travail (dans le cadre d'un départ volontaire) résulte de la nullité du PSE (au sens de l'arrêt rapporté).

2 - Non-remboursement des allocations d'assurance chômage par l'employeur ou le salarié

Le remboursement des indemnités de chômage à Pôle Emploi (C. trav., art. L. 1235-4 N° Lexbase : L1345H9P), que le conseil de prud'hommes ordonne lorsqu'il constate qu'un licenciement est sans cause réelle et sérieuse, ne peut être ordonné en cas de nullité du licenciement résultant de la nullité du plan social (16).

Mais parallèlement, la Cour de cassation a admis que la nullité du licenciement n'a pas pour effet de priver rétroactivement un travailleur du droit à l'allocation d'assurance que l'ASSEDIC lui a servie pendant la période comprise entre son licenciement et sa réintégration où il était involontairement privé d'emploi, apte au travail et à la recherche d'un emploi (17).

Pôle Emploi peut à son tour répéter les allocations d'assurance chômage servies au salarié licencié puis réintégré ; le délai de prescription de l'action en restitution ne court qu'à compter du prononcé de la nullité puisque cet organisme payeur est, auparavant, dans l'impossibilité d'agir. Dans un arrêt du 21 septembre 2005 (18), l'ASSEDIC de Lorraine était dans l'impossibilité d'agir en restitution des allocations de chômage en raison de la nullité du licenciement, tant que cette nullité n'avait pas été prononcée.

B - Réintégration

Depuis la loi de programmation pour la cohésion sociale n° 2005 32 du 18 janvier 2005 (N° Lexbase : L6384G49) validée par le Conseil constitutionnel sur ce point (19) (C. trav., art. L. 1235-11 N° Lexbase : L1357H97), le juge peut soit ordonner la poursuite du contrat de travail, soit prononcer la nullité du licenciement et ordonner la réintégration du salarié à la demande de ce dernier, sauf si cette réintégration est devenue impossible, notamment du fait de la fermeture de l'établissement ou du site ou de l'absence d'emploi disponible.

Puisque la rupture du contrat de travail, consécutive à un départ volontaire lorsqu'il a une cause économique et s'inscrit dans un processus de réduction des effectifs donnant lieu à l'établissement de ce plan, est elle-même nulle (arrêt rapporté), faut-il en déduire que l'article L. 1235-11 du Code du travail s'applique, et que les salariés peuvent se prévaloir du droit à réintégration ? Stricto sensu, les dispositions codifiées ne mentionnent pas la rupture du contrat de travail consécutive à un départ négocié, dans le cadre d'un PSE, mais seulement le licenciement ("le juge constate que le licenciement est intervenu alors que la procédure de licenciement est nulle, il peut ordonner la poursuite du contrat de travail [...]"). Mais l'article L. 1235-11 du Code du travail a vocation à s'appliquer, dans la mesure où la rupture du contrat de travail consécutive à un départ volontaire lorsqu'il a une cause économique et s'inscrit dans un processus de réduction des effectifs donnant lieu à l'établissement d'un PSE. Cette rupture est donc assimilable à un licenciement, au sens de l'article L. 1235-11 du Code du travail.

Dans la mesure où le droit de la réintégration aurait vocation à s'appliquer à des salariés dont le contrat de travail a été rompu en application d'un départ volontaire au titre d'un PSE, et dans l'hypothèse où le PSE serait annulé, ces salariés pourraient se prévaloir des solutions connues, en matière de réintégration :

- appréciation de la matérialité de la possibilité d'une réintégration. En 2005 (20), la Cour de cassation a développé une jurisprudence permettant de mieux saisir le sens de l'obligation de réintégration. En l'espèce, la société avait cessé définitivement son activité, ses actifs industriels avaient été vendus. L'entreprise ayant disparu, les juges du fond ont pu en déduire que la réintégration, demandée dans les seuls emplois que les salariés occupaient dans cette entreprise avant leurs licenciements, était devenue matériellement impossible ;

- périmètre de la réintégration. L'obligation de réintégration résultant de la poursuite alors ordonnée du contrat de travail ne s'étend pas au groupe auquel appartient l'employeur (21). Si l'établissement dans lequel travaillaient les salariés irrégulièrement licenciés a fermé, ceux-ci doivent être réintégrés dans des postes équivalents situés dans d'autres établissements (22).


(1) Cass. soc., 13 février 1997, n° 95-16.648, publié (N° Lexbase : A1924ACA) ; D., 1997, p. 171, note A. Lyon-Caen ; Dr. soc., 1997, p. 254, concl. avocat général P. de Caigny ; Dr. ouvr., 1997, p. 96, note P. Moussy ; JCP, 1997, p. 22843 ; P. H. Antonmattéi, La nullité du licenciement pour motif économique consécutive à la nullité du plan social, RJS, 1997, p. 155 et s. ; G. Couturier et J. Pélissier, Nullité du plan social, SSL, 3 mars 1997, n° 829 ; B. Teyssié, Propos iconoclastes sur le droit du licenciement pour motif économique, JCP éd. S, 1996, p. 3902 ; L'entreprise et le droit du travail, Archives Phil. dr., 1997, p. 355.
(2) Par ex., v. C. Berchon, Actualité jurisprudentielle des cas de nullités en droit du travail, JSL, n° 343, 14 mai 2013 ; Entretien croisé avec G. Couturier, P. Lokiec, Y. Tarasewicz et P. Masanovic, SSL, n° 1571, supplément du 11 février 2013.
(3) Cass. soc., 3 mai 2012, n° 11-20.741, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A5065IKS) ; JCP éd. S, 2012, p. 1241, comm. F. Favennec-Héry ; V. J. Grangé, Au-delà de l'arrêt Vivéo : les incertitudes du droit du licenciement économique, JCP éd. S, 2012, p. 1242 ; R. Chiss, Affaire Leader Price : premier acte de résistance à l'arrêt Vivéo, JCP éd. S, 2012, p. 1246 ; J. Martinez, H. Lovells, J.-L. Guitera et K. Martelet, Le motif économique de licenciement est-il économiquement rationnel ?, Cahiers de droit de l'entreprise, n° 5, septembre 2012, dossier 24 ; P. Morvan, La jurisprudence virale - libres propos, JCP éd. G, 2013, p. 2 ; CA Paris, 12 mai 2011, n° 11/01547, (N° Lexbase : A5778HRG) ; SSL, 2011, n°1493.
(4) F. Géa, Rompre (Réflexions sur la volonté du salarié de rompre son contrat), in T. Sachs (dir.), La volonté du salarié, coll. Thèmes et commentaires, Actes, Dalloz, 2012.
(5) SSL, 2013, n° 1586 ; LSQ, n° 16349, 23 mai 2013.
(6) Cass. soc., 9 janvier 2013, n° 12-40.085, FS-P+B (N° Lexbase : A7899IZL) ; LSQ, n° 16261, 11 janvier 2013 ; Cons. const., décision n° 2013-299 QPC, 28 mars 2013 (N° Lexbase : A0763KBU) ; LSQ, n° 16318, 3 avril 2013.
(7) LSQ, n° 16345, 16 mai 2013.
(8) Cass. soc., 28 mars 2000, n° 98-40.228, publié (N° Lexbase : A6305AGM) et n° 99-41.717, publié (N° Lexbase : A5239AG7), Bull. civ. V, n° 132
(9) Cass. soc., 5 novembre 2003, n° 01-45.161, F-D (N° Lexbase : A0679DAE). Mais l'hypothèse visée par l'arrêt n'est pas celle d'une nullité des licenciements induite par une nullité du PSE.
(10) Cass. soc., 15 décembre 1998, n° 96-44.233, publié (N° Lexbase : A8092AGS), Bull. civ. 1998, V, n° 549. Là aussi, l'hypothèse d'une nullité du licenciement consécutive à une nullité du plan social n'est pas en cause. En l'espèce, la société cessionnaire a acquis les éléments corporels et incorporels de l'entité économique anciennement exploitée et en a poursuivi l'activité ; la société a repris vingt-cinq contrats de travail, dont celui de l'intéressée. Le licenciement prononcé par l'administrateur judiciaire était donc sans effet ; les versements effectués par l'ASSEDIC étaient sans cause. La Cour de cassation en déduit que, conformément à l'article 1235 du Code civil (N° Lexbase : L1348ABK), tout paiement suppose une dette et ce qui a été payé sans être dû est sujet à répétition. L'ASSEDIC était donc fondée à demander que soit constatée la nullité du licenciement et ordonné le remboursement des indemnités de rupture qu'elle avait indûment versées.
(11) Cass. soc., 26 octobre 2010, n° 09-15.187, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A6142GCH) ; JCP éd. G, 2010, p. 1089 ; SSL, n° 1465, p. 10, rapp. P. Bailly, p. 8, note E. Dockès, p. 11 ; Dr. ouvr., 2011, note I. Meyrat ; JCP éd. S, 2010, 1483, obs. G. Loiseau ; F. Favennec-Héry, PDV, PSE, PDR : un plan chasse l'autre, Dr. soc., 2010, p. 1164 ; F. Géa, La Chambre sociale et le volontariat. A propos de l'arrêt Renault, RDT, 2010, p. 704.
(12) Cass. soc., 25 janvier 2012, n° 10-23.516, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A4422IBE) ; SSL, n° 1524, p. 11, précédé de l'étude de P. Lokiec, p. 8 ; RDT, 2012, p. 152, obs. F. Géa ; RJS, avril 2012, n° 328, et l'étude de G. Couturier, p. 243 ; F. Favennec-Héry, Plan de départs volontaires : le jeu des distinctions, Dr. soc., 2012, p. 351 ; JCP éd. G, 2012, p. 136 ; J. Krivine, Suppression d'emplois et suppression de postes : une confusion volontaire? Réflexions libres sur les dérives comportementales visant à échapper aux contraintes du plan de sauvegarde de l'emploi à l'occasion de l'arrêt du 25 janvier 2012, SSL, n° 1550, supplément du 10 septembre 2012.
(13) Cass. soc., 29 octobre 2012, n° 11-23.142, FS-P+B (N° Lexbase : A3532IUD) ; JCP éd. G, 2012, p. 1178, obs. C. Lefranc-Hamoniaux ; JCP éd. S, 2012, p. 1497, obs. L. Cailloux-Meurice, ; LSQ, n° 16202, 15 octobre 2012 ; F. Géa, L'art de la différenciation - à propos de l'arrêt "Air France KLM", SSL, n° 1571, supplément du 11 février 2013.
(14) Cass. soc., 23 avril 2013, n° 12-15.221, FS-P+B (N° Lexbase : A6832KCZ).
(15) Cass. soc., 28 mars 2012, n° 11-30.034, FS-P+B (N° Lexbase : A9998IGE).
(16) Cass. soc., 24 janvier 2006, n° 04-41.341, F-D (N° Lexbase : A5580DMM) ; RJS, 2006, n° 418.
(17) Cass. soc., 11 mars 2009, n° 07-41.867, F-D (N° Lexbase : A7081EDM) ; JCP éd. S, 2009, 1319.
(18) Cass. soc., 21 septembre 2005, n° 03-45.024, F-P+B (N° Lexbase : A5083DKH) ; RJS, 2005, n° 1198.
(19) Cons. const., 13 janvier 2005 n° 2004-509 DC, loi de programmation pour la cohésion sociale (N° Lexbase : A9528DEM) ; sur la réforme, G. Couturier, L'impossibilité de réintégrer (sur l'article 77, V, de la loi de programmation sociale), Dr. soc., 2005, p. 403.
(20) Cass. soc., 15 juin 2005, n° 03-48.094, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A6829DIR) ; JCP éd. S, 2005, p. 1035, note P.-Y. Verkindt ; v. les obs. de Ch. Radé, Affaire "Wolber" : à l'impossible nul n'est tenu !, Lexbase Hebdo n° 173 du 22 juin 2005 - édition sociale (N° Lexbase : N5701AIY).
(21) Cass. soc., 15 février 2006, n° 04-43.282, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A8880DMT) ; JCP éd. S, 2006, p. 1180 et JCP éd. E, 2006, p. 1735, notes P. Morvan.
(22) Cass. soc., 30 mars 1999, no 97-41.013, publié (N° Lexbase : A4729AGA).

Décision

Cass. soc., 15 mai 2013, n° 11-26.414, FS+P+B (N° Lexbase : A5018KD9)

Rejet, CA Grenoble, 23 novembre 2009, n° 09/03601 (N° Lexbase : A1715E4B)

Textes concernés : C. trav., art. L. 1235-10 (N° Lexbase : L6214ISX) et L. 1235-11 (N° Lexbase : L1357H97)

Mots-clés : PSE, nullité, effets de la nullité, actes subséquents, plan de départ volontaire compris dans le PSE, annulation du plan de départ volontaire.

Liens base : (N° Lexbase : E9340ESQ)

newsid:437262

Rémunération

[Brèves] Nouveaux barèmes de saisie et cession des allocations d'assurance chômage

Réf. : Circulaire UNEDIC, n° 2013-09, du 27 mai 2013 (N° Lexbase : L8510IW4)

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N7268BTD

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Le 30 Mai 2013

La circulaire UNEDIC, n° 2013-09, du 27 mai 2013 (N° Lexbase : L8510IW4) a pour objet la transmission des tableaux fixant les barèmes 2013 de saisie et de cession des allocations d'assurance chômage selon la tranche de rémunération et le nombre d'enfants à charge. Le barème fixant les proportions selon lesquelles les salaires sont saisissables et cessibles a été modifié à compter du 1er février 2013 (décret n° 2013-44 du 14 janvier 2013, révisant le barème des saisies et cessions des rémunérations N° Lexbase : L9793IUA). Il s'applique aux allocations d'assurance chômage versées par Pôle emploi pour le compte de l'Unédic, dont le régime de saisissabilité et de cessibilité est aligné sur celui des salaires par l'article L. 5428-1 du Code du travail (N° Lexbase : L8812IQG). Le montant du RSA, correspondant à la somme qui doit être laissée dans tous les cas à la disposition de l'allocataire saisi, est fixé à 483,24 euros depuis le 1er janvier 2013 (décret n° 2012-1488 du 28 décembre 2012, portant revalorisation du montant forfaitaire du revenu de solidarité active N° Lexbase : L7924IUZ) (sur les seuils de saisissabilité du salaire, cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E1238ETZ).

newsid:437268

Rupture du contrat de travail

[Jurisprudence] Prise d'acte et départ à la retraite

Réf. : Cass. soc., 15 mai 2013, n° 11-26.784 et 11-26.930, FP-P+B, 1er moyen du pourvoi de l employeur (N° Lexbase : A5125KD8)

Lecture: 10 min

N7207BT4

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par Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale

Le 30 Mai 2013

La consécration de la prise d'acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail a certes permis de donner un nom et un régime à une réalité professionnelle, mais elle a aussi suscité des difficultés nouvelles, notamment dans les hypothèses, en pratique fréquentes, où dans le même laps de temps le contrat de travail se trouve rompu par d'autres moyens. Les difficultés d'articulation de ces différents modes de rupture, qui concernaient hier le licenciement ou la résiliation judiciaire, se rencontrent, dans un arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation en date du 15 mai 2013, à propos du départ à la retraite du salarié dans un contexte conflictuel. La Cour de cassation décide de faire une application cumulative des deux régimes (I), mais uniquement de manière partielle car la reconnaissance des torts de l'employeur antérieurs au départ à la retraite ne produit que les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et non pas d'un licenciement nul (II).
Résumé

Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de son départ à la retraite, remet en cause celui-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de son départ qu'à la date à laquelle il a été décidé, celui-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'un départ volontaire à la retraite.

Commentaire

I - L'application du régime de la prise d'acte

Contexte juridique. La Cour de cassation a consacré, depuis dix ans (1), la prise d'acte comme un mode de rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié qui produira soit les effets d'une démission, si les griefs formulés à l'encontre de l'employeur ne sont pas suffisamment graves, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, s'ils le sont, voire d'un licenciement nul si on se situe dans le champ d'une nullité.

La Haute juridiction a été amenée à préciser l'articulation de ce mode de rupture, à l'initiative du salarié, avec la démission, dont la prise d'acte est très proche puisqu'il s'agit, dans les deux hypothèses, d'une rupture à l'initiative du salarié. Lorsque le salarié prétend qu'il a volontairement quitté l'entreprise en prenant acte, la discussion s'engagera sur la gravité des faits reprochés à l'employeur (2). Mais lorsque le salarié prétendra avoir été conduit à quitter l'entreprise, alors qu'il ne le souhaitait pas, soit qu'il ait été trompé, soit qu'il y ait été contraint, alors le juge devra s'intéresser à l'intégrité du consentement du salarié et déterminer s'il a été victime d'une erreur, d'un dol ou d'une violence (3).

Intérêt de la décision. Restait à préciser l'articulation du régime de la prise d'acte avec celui d'un autre mode de rupture du contrat de travail, également à l'initiative du salarié, celui du départ à la retraite qui constitue une forme atypique de démission soumise à un régime particulier (4). C'est tout l'intérêt de cette décision.

L'affaire. Un VRP salarié avait notifié à son employeur, le 26 décembre 2007, son départ à la retraite par une lettre énonçant des griefs envers ce dernier, notamment une modification unilatérale des taux de commissions depuis 2004.

Il avait, ensuite, saisi la juridiction prud'homale d'une demande de requalification de cette rupture en une prise d'acte de rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que de demandes en paiement des indemnités de rupture et de divers rappels de salaire sur commissions et autres frais relatifs à l'exécution du contrat de travail.

La condamnation de l'employeur à des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse se trouve confirmée ici par le rejet du pourvoi sur ce point.

Pour justifier cette qualification, la Haute juridiction précise le cadre juridique applicable.

Après avoir indiqué que "le départ à la retraite du salarié est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail", la Cour précise l'articulation avec le régime de la prise d'acte : "lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de son départ à la retraite, remet en cause celui-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de son départ qu'à la date à laquelle il a été décidé, celui-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'un départ volontaire à la retraite".

Or, "ayant constaté que l'employeur avait appliqué des taux de commission inférieurs au taux convenu, sans justifier de l'accord du salarié sur cette modification, et qu'il avait réduit unilatéralement le montant des avances sur commissions jusqu'alors appliqué, dans des conditions qui étaient de nature à faire obstacle à l'exécution de la mission du salarié, la cour d'appel a pu en déduire que le départ à la retraite s'analysait en une prise d' acte qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse".

Précédents. Jusqu'à présent, la Cour de cassation n'avait jamais eu clairement à se prononcer dans l'hypothèse d'un salarié ayant tout à la fois informé son employeur de son intention de partir à la retraite, tout en formulant à son encontre des griefs comme s'il s'agissait d'une prise d'acte.

Dans les quelques affaires traitées par la Cour, les circonstances n'étaient en effet pas exactement les mêmes. Ainsi, dans une décision inédite rendue en 2009, un salarié avait démissionné, en formulant des griefs contre son employeur, puis pris sa retraite ; la Haute juridiction avait alors initié la formule que l'on retrouve, presque à l'identique, dans ce nouvel arrêt en date du 15 mai 20013, selon laquelle "la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission" (5). Dans une précédente décision où un salarié, parti à la retraite, avait demandé des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la Cour de cassation avait rejeté ses prétentions après avoir observé, à l'instar de la cour d'appel, que les griefs formulés par le salarié (modification du contrat de travail) n'étaient pas avérés (6). Dans d'autres, la Cour avait vérifié "le caractère non équivoque de sa volonté de partir à la retraite" (7), ou encore que le salarié avait "manifesté sa volonté claire et non équivoque de partir à la retraite" (8). La Cour avait également eu à statuer sur le cas d'un salarié ayant pris acte de la rupture de son contrat de travail avant de prendre sa retraite ; dans la mesure où les griefs formulés à l'encontre de son employeur n'étaient pas fondés, la Cour a rejeté les demandes indemnitaires du salarié (9).

Une solution inspirée des principes d'articulation entre démission et prise d'acte. La solution retenue dans cet arrêt (application de la qualification de licenciement sans cause réelle et sérieuse après que le juge a constaté que le salarié avait volontairement pris sa retraite) s'inspire, à l'évidence, des principes dégagés en cas de démission, et notamment du caractère alternatif des deux hypothèses rencontrées selon que le salarié a ou non voulu quitter l'entreprise, et que le juge doit apprécier la situation soit objectivement (examen des griefs si le salarié a voulu partir), soit subjectivement (analyse de son consentement en cas de vice du consentement) (10).

C'est la solution qui se dégage en filigrane dans cet arrêt où la Cour relève que le salarié n'invoquait pas "un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de son départ à la retraite". Dans cette hypothèse, la rupture fondée sur l'âge du salarié aurait certainement produit les effets d'un licenciement nul puisqu'elle aurait été en réalité voulue par l'employeur pour un motif illicite, à savoir l'âge du salarié ; il se serait alors agi d'une sorte de mise à la retraite qui ne disait pas son nom et ne respectait d'ailleurs pas son régime, méritant alors d'évidence la sanction la plus radicale (11).

II - Une application adaptée à la spécificité du départ à la retraite

Une analogie imparfaite. La solution finalement retenue (départ à la retraite produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse) n'est pas exactement celle qui devrait prévaloir par application des règles jusque là dégagées en matière de prise d'acte.

On sait, en effet, que la prise d'acte, lorsqu'elle est fondée sur des griefs suffisamment graves pour justifier la rupture, s'inscrit dans le régime du licenciement injustifié et produira soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, dans les cas ordinaires, soit ceux d'un licenciement nul dès lors qu'on se situe dans un régime spécial prévoyant la nullité comme sanction de la violation, par l'employeur, des règles de rupture du contrat de travail.

Dans des hypothèses de démissions requalifiées en prise d'acte, c'est-à-dire lorsque le salarié a délibérément rompu son contrat de travail tout en en imputant la responsabilité à son employeur , la Cour de cassation a, en effet, qualifié la rupture de licenciement nul dès lors que cette sanction avait été prévue par le Code du travail en cas de licenciement, qu'il s'agisse du salarié protégé contraint de quitter l'entreprise par hypothèse sans autorisation administrative préalable (12), ou du salarié qui a accepté un départ volontaire dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi qui ne comportait pas de plan de reclassement (13).

Si cette logique avait été respectée, alors la sanction du départ à la retraite aurait dû être non pas la requalification de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais bien celle de licenciement nul puisqu'il s'agissait d'une rupture, assimilée à un licenciement, et fondée sur l'âge du salarié en dehors du régime de la mise à la retraite.

Une solution justifiée par le particularisme des modes de rupture du contrat de travail liés à la retraite. Ce n'est pas la première fois que la Cour de cassation consacre la spécificité des ruptures liées à la retraite. On se rappellera ainsi que si, en principe, la demande de résiliation judiciaire déposée par un salarié avant son licenciement impose au juge prud'homal de statuer d'abord dans le cadre de la résiliation judiciaire, avant de s'interroger, en cas de rejet, sur le bien-fondé du licenciement (14), cette solution ne prévaut pas si le salarié a été mis à la retraite après l'introduction de la demande judiciaire de résiliation judiciaire, car c'est alors la mise à la retraite qui rompt le contrat, le salarié ne pouvant plus que demander des dommages et intérêts en réparation des manquements de l'employeur (15). La rupture liée à la retraite s'impose alors de manière absolue et ne peut être remise en cause dans son principe, une fois celle-ci liquidée.

Voilà qui pourrait expliquer pourquoi ici la Cour de cassation n'applique "que" le régime indemnitaire du licenciement sans cause réelle et sérieuse dès lors que c'est bien le départ à la retraite qui avait entraîné ici la rupture du contrat de travail, et non la prise d'acte.

L'analyse de la Cour semble toutefois avoir évolué depuis 2005. Dans la précédente décision la Cour de cassation avait, en effet, seulement maintenu au salarié mis à la retraite la possibilité de demander des dommages et intérêts, on peut le supposer par application des règles du droit commun (C. civ., art. 1382 N° Lexbase : L1488ABQ), alors que dans cette affaire la Haute juridiction ouvre droit aux indemnités afférentes à la qualification de licenciement, ce qui est plus avantageux pour le salarié qui bénéficiera, en plus des indemnités de licenciement et de préavis, d'une indemnité sanctionnant l'absence de cause réelle et sérieuse au moins égale aux salaires des six derniers mois s'il remplit la double condition d'ancienneté et d'effectif.

Une solution liée aux demandes du salarié ? On observera également que le salarié n'avait pas ici demandé à bénéficier du régime de la nullité qui d'ailleurs ne lui aurait rien apporté de plus sur le plan indemnitaire, et ce dans la mesure où il ne souhaitait pas revenir dans l'entreprise. La formulation retenue, et qui vise comme sanction l'absence de cause réelle et sérieuse, pourrait bien n'être alors que le reflet des prétentions du salarié, et non celui d'une quelconque volonté de la Cour de cassation d'exclure la nullité.

Un cumul critiquable. La solution, évidemment très favorable au salarié et de nature à dissuader les employeurs de modifier unilatéralement le contrat de travail des travailleurs en fin de carrière, ne nous semble pas très rigoureuse sur le plan technique.

Si, en effet, on comprend parfaitement pourquoi il convient de requalifier le départ à la retraite en licenciement si le salarié n'avait pas la volonté de quitter l'entreprise (hypothèse d'un vice du consentement, non vérifiée en l'espèce), l'application du régime du licenciement semble des plus discutables lorsque le salarié a volontairement pris sa retraite. Dans cette hypothèse, il semblerait en effet plus logique de lui permettre d'obtenir réparation du préjudice consécutif aux fautes commises, comme cela avait été affirmé en 2005, sans toutefois faire application d'un régime qui suppose que la décision de rompre le contrat ait été prise par l'employeur, ce qui, par hypothèse, n'est pas le cas lorsque le consentement du salarié n'a pas été vicié.

La remarque vaut d'ailleurs plus largement lorsque le salarié a démissionné de sa propre volonté, car, dans cette hypothèse aussi, l'employeur est traité comme s'il avait contraint le salarié à partir, ce qui n'est, par hypothèse, pas le cas.

Proposition. A terme, il nous semblerait donc plus satisfaisant de réserver l'application du régime indemnitaire du licenciement aux seules hypothèses où le salarié a été contraint de quitter l'entreprise, par la faute de l'employeur, et de laisser au droit commun de la responsabilité civile le soin de régir les hypothèses où le salarié a choisi de partir, sans y être obligé.


(1) Cass. soc., 25 juin 2003, n° 01-42.335, FP-P+B+R+I (N° Lexbase : A8976C8X) ; Cass. soc., 25 juin 2003, n° 01-42.679, FP-P+B+R+I (N° Lexbase : A8977C8Y) ; Cass. soc., 25 juin 2003, n° 01-43.578, FP-P+B+R+I (N° Lexbase : A8978C8Z).
(2) Cass. soc., 9 mai 2007, 4 arrêts, n° 05-40.315 (N° Lexbase : A0908DWK) ; n° 05-40.518 (N° Lexbase : A0909DWL) ; n° 05-41.324 (N° Lexbase : A0910DWM) et n° 05-42.301, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A0925DW8), v. nos obs., Clarifications (?) sur la distinction entre prise d'acte et démission, Lexbase Hebdo n° 260 du 17 mai 2007 - édition sociale (N° Lexbase : N0691BB9).
(3) Mêmes décisions.
(4) C. trav., art. L. 1237-9 (N° Lexbase : L1407H9Y) et L. 1237-10 (N° Lexbase : L1412H98).
(5) Cass. soc., 4 février 2009, n° 07-40.336, F-D (N° Lexbase : A9543ECG).
(6) Cass. soc., 5 décembre 2012, n° 11-18.220, F-D (N° Lexbase : A5552IYB).
(7) Cass. soc., 12 janvier 2011, n° 09-42.108, F-D (N° Lexbase : A9680GP9).
(8) Cass. soc., 3 novembre 2011, n° 10-11.063, FS-D (N° Lexbase : A5293HZ3).
(9) Cass. soc., 24 septembre 2008, n° 07-40.098, F-P+B (N° Lexbase : A4971EAD), Bull. civ. V, n° 176.
(10) Cass. soc., 17 mars 2010, n° 09-40.465, F-P+B (N° Lexbase : A8273ETL) : "le salarié ne peut tout à la fois invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission et demander que cet acte de démission soit analysé en une prise d'acte, par lui, de la rupture de son contrat de travail en raison de faits et manquements imputables à l'employeur" ; Cass. soc., 7 mars 2012, n° 09-73.050, F-P+B (N° Lexbase : A3730IEU), v. les obs. de S. Tournaux, Pas de fongibilité des vices de la démission, Lexbase Hebdo n° 478 du 22 mars 2012 - édition sociale (N° Lexbase : N0895BTC).
(11) Sur la nullité de la mise à la retraite lorsque le salarié ne remplit pas les conditions pour "partir à taux plein" : Cass. soc., 21 décembre 2006, n° 05-12.816, FP-P+B+R+I (N° Lexbase : A3624DTE), RDT, 2007, p. 238, note I. Desbarrats.
(12) Cass. soc., 21 janvier 2003, n° 00-44.502, publié (N° Lexbase : A7345A4S) ; Cass. soc., 5 juillet 2006, n° 04-46.009, FS-P+B (N° Lexbase : A3701DQ7) ; Cass. soc., 17 novembre 2011, n° 10-16.353, F-D (N° Lexbase : A9505HZ3).
(13) Cass. soc., 25 janvier 2012, n° 10-23.516, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A4422IBE).
(14) Cass. soc., 31 octobre 2006, n° 05-42.158, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A0483DSP), v. les obs. de G. Auzero, La prise d'acte de la rupture par le salarié rend sans objet la demande de résiliation judiciaire introduite auparavant, Lexbase Hebdo n° 236 du 16 novembre 2006 - édition sociale (N° Lexbase : N5061ALZ).
(15) Cass. soc., 12 avril 2005, n° 02-45.923, F-P+B (N° Lexbase : A8628DHZ), v. les obs. de N. Mingant, Résiliation judiciaire et mise à la retraite en cours d'instance d'appel, Lexbase Hebdo n°165 du 28 avril 2005 - édition sociale (N° Lexbase : N3694AIN).

Décision

Cass. soc., 15 mai 2013, n° 11-26.784 et 11-26.930, FP-P+B, 1er moyen du pourvoi de l'employeur (N° Lexbase : A5125KD8)

Cassation partielle, CA Paris, Pôle 6, 5ème ch., 22 septembre 2011, n° 09/09370 (N° Lexbase : A5300HYX)

Textes visés : C. trav., art. L. 1237-9 (N° Lexbase : L1407H9Y)

Mots-clés : départ à la retraite, prise d'acte, licenciement sans cause réelle et sérieuse

Liens base : (N° Lexbase : E9674ES4)

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Rupture du contrat de travail

[Jurisprudence] La nullité du PSE entraîne celle du départ volontaire pour motif économique inclus dans le PSE

Réf. : Cass. soc., 15 mai 2013, n° 11-26.414, FS+P+B (N° Lexbase : A5018KD9)

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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen et Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Droit de la protection sociale"

Le 05 Juin 2013

La nullité du PSE entraîne celle du départ volontaire pour motif économique inclus dans le PSE. Tel un tsunami dont on mesure les effets (dévastateurs) y compris des années plus tard, la jurisprudence "la Samaritaine" (1) continue de susciter débats et controverses (2), ainsi qu'un certain nombre de difficultés tant juridiques (opérationnelles) que contentieuses, résolues progressivement, à hauteur des réponses apportées par la Cour de cassation. Parmi celles-ci, on relèvera :
- en amont, la question des causes de nullité. On pense notamment à l'appréciation du motif du licenciement pour motif économique, susceptible (ou pas, selon les points de vue) de déclencher la nullité du PSE. La Cour de cassation a répondu par la négative dans l'arrêt "Vivéo" du 3 mai 2012 (3) ;
- le sort d'un départ négocié (plan de départ volontaire) (4), non pas préalable au PSE, mais compris dans le cadre des mesures figurant dans le PSE. Si le juge est amené à se prononcer sur le PSE et à le déclarer nul (pour insuffisance ou absence de consultation des IRP, qu'importe, à ce stade), quel sera le sort du contrat de travail rompu, en application de l'accord de départ négocié, tel que prévu au titre du PSE ? La Cour de cassation a tranché la difficulté, par un arrêt rendu le 15 mai 2013 (5). Sans surprise, la Cour retient une solution attendue : la nullité qui affecte un plan de sauvegarde de l'emploi ne répondant pas aux exigences légales, s'étend à tous les actes subséquents ; il en va ainsi de la rupture du contrat de travail consécutive à un départ volontaire, elle-même nulle. Mais deux conditions sont posées : le départ volontaire doit avoir une cause économique et s'inscrire dans un processus de réduction des effectifs donnant lieu à l'établissement de ce plan. L'arrêt rapporté suggère deux réflexions, centrées autour de la question du périmètre de la nullité et des effets de la nullité.
Résumé

La nullité qui affecte un plan de sauvegarde de l'emploi ne répondant pas aux exigences légales, s'étend à tous les actes subséquents. En particulier la rupture du contrat de travail, consécutive à un départ volontaire lorsqu'il a une cause économique et s'inscrit dans un processus de réduction des effectifs donnant lieu à l'établissement de ce plan, est elle-même nulle.


I - Le périmètre de la nullité, en droit du licenciement économique collectif

A - Le PSE et les nullités encourues

1 - L'arrêt "la Samaritaine"

L'arrêt "la Samaritaine" a retenu une règle à l'époque non prévue par le législateur ni codifié, extrêmement audacieuse, selon laquelle la nullité qui affecte le plan social (devenu plan de sauvegarde de l'emploi) s'étend à tous les actes subséquents. En particulier les licenciements prononcés par l'employeur, qui constituent la suite et la conséquence de la procédure de licenciement collectif (suivie par application de l'ancien article L. 321-4-1 du Code du travail N° Lexbase : L3215DC3) sont eux-mêmes nuls. Depuis, la solution a été consacrée par le législateur (C. trav., art. L. 1235-10, al. 1 N° Lexbase : L6214ISX).

2 - Les exclusions

  • Les sociétés en redressement

Les entreprises en redressement ou en liquidation judiciaires sont soumises à l'obligation d'établir un PSE dans les mêmes conditions que les entreprises in bonis. Mais en cas d'insuffisance ou d'absence de PSE, les dispositions du Code du travail prévoyant la nullité des licenciements ne leur sont pas applicables (C. trav., art. L. 1235-10, al. 3). Par sa décision rendue le 28 mars 2013 (6), le Conseil constitutionnel a jugé conformes à la Constitution ces dispositions du Code du travail.

  • Les exclusions légales

Lorsque le salarié compte moins de deux ans d'ancienneté ou travaille dans une entreprise de moins de onze salariés, la sanction prévue par l'article L. 1235-10, en cas d'absence de PSE, ne lui est pas non plus applicable (C. trav., art. L. 1235-14, 1° N° Lexbase : L1363H9D).

3 - La loi de sécurisation de l'emploi

Le projet de loi relatif à la sécurisation de l'emploi (adoptée par le Parlement le 14 mai 2013) (7) a prévu que le tribunal administratif sera compétent en premier ressort pour connaître des litiges relatifs à l'accord collectif ou au document unilatéral, au contenu du PSE, aux décisions de l'administration et à la régularité de la procédure de licenciement collectif. Il faut surtout retenir, à ce stade, de la loi (actuellement en cours d'examen devant le Conseil constitutionnel, saisines les 15 et 16 mai 2013) la création d'un nouveau cas de nullité, en droit des licenciements économiques collectifs, puisqu'un licenciement intervenu en l'absence de toute décision de validation ou d'homologation ou en présence d'une décision négative sera nul.

En cas d'annulation par le juge d'une décision de validation ou d'homologation, en raison d'une absence ou d'une insuffisance de PSE, la procédure de licenciement sera nulle. L'annulation de la décision de l'administration pour un motif autre donnera lieu à la réintégration du salarié, sous réserve de l'accord des parties. A défaut, le salarié aura droit à une indemnité d'au moins six mois de salaires, en plus de son indemnité de licenciement.

B - Périmètres des nullités du PSE et de ses actes subséquents

1 - Solutions acquises

La nullité du PSE implique :

- la remise en cause des versements effectués (indemnités de rupture ou aides de toute nature prévues dans le plan social). Mais encore faut-il que le juge soit saisi d'une demande (de répétition de l'indu), au sujet de ces sommes (8) ;

- en cas de procédure collective, l'AGS ne doit aucune avance de créances si les licenciements sont dépourvus d'effet (9) ;

- l'AGS est fondée à demander que soit constatée la nullité du licenciement et ordonné le remboursement des indemnités de rupture qu'elle avait indûment versées au salarié concerné (10).

2 - Nullité des départs négociés consécutivement à la nullité du PSE

  • La solution

En l'espèce, le contrat de travail d'un salarié a été rompu le 2 septembre 2009 par départ volontaire dans le cadre du PSE. Par arrêt du 23 novembre 2009, la cour d'appel de Grenoble a annulé le plan de sauvegarde de l'emploi. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale et demandé que soit prononcée la nullité de la rupture de son contrat de travail, comme étant consécutive à un PSE déclaré nul. Les juges du fond ont prononcé la nullité de la rupture du contrat de travail et condamné l'employeur à verser différentes indemnités. La Cour de cassation, par l'arrêt rapporté, a rejeté le pourvoi formé par l'employeur. Le départ volontaire du salarié s'inscrivait expressément dans le cadre du projet de PSE, qui incluait un appel aux départs volontaires. Son poste était susceptible d'être supprimé. La cour d'appel a retenu que l'annulation du PSE a eu pour conséquence de priver de toute cause le départ volontaire qui constituait un acte subséquent à celui-ci, a exactement décidé que la nullité du PSE entraînait celle de la rupture qui lui était rattachée.

  • Les conditions

Le départ négocié n'est annulable au titre de l'annulation du PSE qu'à une double condition (arrêt rapporté) :

- le départ volontaire du salarié s'inscrit expressément dans le cadre du projet de PSE, qui incluait un appel aux départs volontaires ;

- le poste du salarié est "susceptible" d'être supprimé, c'est-à-dire, a vocation àêtre supprimé ;

Au-delà de la solution retenue par l'arrêt rapporté, il faudrait préciser que le départ négocié ne doit pas s'inscrire dans le cadre des "ruptures conventionnelles", dont le régime juridique est propre et autonome. Le législateur a, en effet, précisé que les dispositions légales régissant les ruptures conventionnelles ne sont pas applicables aux ruptures de contrats résultant d'un accord de GPEC ou des PSE (C. trav., art. L. 1237-16 N° Lexbase : L8479IAB). En d'autres termes, les départs négociés ou volontaires prévus dans le cadre d'une GPEC ou d'un PSE ne sont pas soumis à la procédure de rupture conventionnelle, et notamment à l'homologation administrative. Réciproquement, les dispositions relatives aux licenciements économiques sont applicables à toute rupture, à l'exclusion de la rupture conventionnelle (C. trav., art. L. 1233-3 N° Lexbase : L8772IA7).

La solution retenue par la Cour de cassation, soumise à deux conditions (supra), est tout à fait cohérente avec la ligne jurisprudentielle mise en place par la Cour de cassation, posant un lien étroit entre plan de départ volontaire et reclassement ; en d'autres termes, avec la nature juridique du plan de départ volontaire. La formule juridique du plan de départ volontaire est différente de celle du départ volontaire compris dans le PSE, il est vrai : la première est antérieure et extérieure au PSE ; la seconde est concomitante et comprise dans le PSE. Mais les solutions retenues par le plan de départ volontaire peuvent être transposée au "départ volontaire" (compris dans le PSE).

En 2010, la Cour de cassation avait admis que, dès lors que le projet de réduction des effectifs n'envisage que des départs volontaires et comporte l'engagement exprès de ne procéder à aucun licenciement, l'employeur est dispensé de son obligation légale d'établir un plan de reclassement interne s'intégrant au PSE (11).

Mais en 2012 (12), la Cour de cassation est revenue sur cette solution. Si l'employeur qui entend supprimer des emplois pour des raisons économiques en concluant avec les salariés des accords de rupture amiable, n'est pas tenu d'établir un plan de reclassement interne lorsque le plan de réduction des effectifs au moyen de départs volontaires exclut tout licenciement pour atteindre des objectifs qui lui sont assignés en terme de suppression d'emplois, il en va autrement lorsque le projet de réduction d'effectifs de l'employeur implique la suppression de l'emploi de salariés qui ne veulent ou ne peuvent quitter l'entreprise dans le cadre du plan de départs volontaires. Le maintien de ces salariés dans l'entreprise supposant nécessairement en ce cas un reclassement dans un autre emploi, un plan de reclassement interne doit alors être intégré au plan de sauvegarde de l'emploi. Il faut comprendre que si le projet de restructuration mis en place par l'employeur se traduit au final par la suppression de l'emploi de salariés, plan de départ volontaire ou PSE, l'employeur doit reclasser.

Par un arrêt du 29 octobre 2012 (13), la Cour de cassation a confirmé la jurisprudence du 25 janvier 2012. Si le plan de départs volontaires n'a pas à intégrer un plan de reclassement interne lorsqu'il exclut tout licenciement pour atteindre les objectifs assignés en termes de suppression d'emplois, tel n'est pas le cas lorsque le projet de réduction d'effectifs implique la suppression d'emploi de salariés qui ne veulent ou ne peuvent quitter l'entreprise dans le cadre du plan de départs volontaires et conduit soit au maintien de ces salariés dans l'entreprise dans un autre emploi, soit à leur licenciement. Dès lors, faute pour la société d'avoir établi un PSE intégrant un plan de reclassement, les licenciements sont nuls. En d'autres termes, en cas de défaut de plan de reclassement interne, la rupture sera jugée nulle si l'emploi est supprimé.

Enfin, la Cour de cassation a confirmé le lien étroit qu'elle entend tisser entre départs volontaires et reclassement (14). En l'espèce, les départs volontaires prévus dans le PSE s'adressaient aux salariés dont le licenciement était envisagé, en raison de la réduction d'effectifs, sans engagement de ne pas les licencier si l'objectif n'était pas atteint au moyen de ruptures amiables des contrats de travail des intéressés. Aussi, l'employeur est tenu, à l'égard de ces salariés, d'exécuter au préalable l'obligation de reclassement prévue dans le plan, en leur proposant des emplois disponibles dans les sociétés du groupe et adaptés à leur situation personnelle.

II - Les effets de la nullité

Lorsque le juge prononce la nullité d'une rupture de contrat de travail, mise en oeuvre par l'employeur au titre de départs négociés prévus par le PSE, se pose alors la question des effets de cette nullité. Les questions sont en grande partie déjà traitées par le législateur ou résolues par la jurisprudence, s'agissant des conséquences indemnitaires et financières ainsi que de la réintégration.

A - Conséquences indemnitaires et financières

1 - Indu

Si le juge prononce la nullité du PSE, il s'ensuit que les sommes perçues par les salariés en vertu du PSE n'ont plus de fondement juridique. Pour la Cour de cassation (15), la nullité du plan oblige les salariés à restituer les sommes perçues en exécution de ce plan, lesquelles viennent en déduction de la créance à titre de dommages-intérêts qui leur est allouée. La solution aurait certainement vocation à s'appliquer, s'agissant de salariés dont la nullité de la rupture du contrat de travail (dans le cadre d'un départ volontaire) résulte de la nullité du PSE (au sens de l'arrêt rapporté).

2 - Non-remboursement des allocations d'assurance chômage par l'employeur ou le salarié

Le remboursement des indemnités de chômage à Pôle Emploi (C. trav., art. L. 1235-4 N° Lexbase : L1345H9P), que le conseil de prud'hommes ordonne lorsqu'il constate qu'un licenciement est sans cause réelle et sérieuse, ne peut être ordonné en cas de nullité du licenciement résultant de la nullité du plan social (16).

Mais parallèlement, la Cour de cassation a admis que la nullité du licenciement n'a pas pour effet de priver rétroactivement un travailleur du droit à l'allocation d'assurance que l'ASSEDIC lui a servie pendant la période comprise entre son licenciement et sa réintégration où il était involontairement privé d'emploi, apte au travail et à la recherche d'un emploi (17).

Pôle Emploi peut à son tour répéter les allocations d'assurance chômage servies au salarié licencié puis réintégré ; le délai de prescription de l'action en restitution ne court qu'à compter du prononcé de la nullité puisque cet organisme payeur est, auparavant, dans l'impossibilité d'agir. Dans un arrêt du 21 septembre 2005 (18), l'ASSEDIC de Lorraine était dans l'impossibilité d'agir en restitution des allocations de chômage en raison de la nullité du licenciement, tant que cette nullité n'avait pas été prononcée.

B - Réintégration

Depuis la loi de programmation pour la cohésion sociale n° 2005 32 du 18 janvier 2005 (N° Lexbase : L6384G49) validée par le Conseil constitutionnel sur ce point (19) (C. trav., art. L. 1235-11 N° Lexbase : L1357H97), le juge peut soit ordonner la poursuite du contrat de travail, soit prononcer la nullité du licenciement et ordonner la réintégration du salarié à la demande de ce dernier, sauf si cette réintégration est devenue impossible, notamment du fait de la fermeture de l'établissement ou du site ou de l'absence d'emploi disponible.

Puisque la rupture du contrat de travail, consécutive à un départ volontaire lorsqu'il a une cause économique et s'inscrit dans un processus de réduction des effectifs donnant lieu à l'établissement de ce plan, est elle-même nulle (arrêt rapporté), faut-il en déduire que l'article L. 1235-11 du Code du travail s'applique, et que les salariés peuvent se prévaloir du droit à réintégration ? Stricto sensu, les dispositions codifiées ne mentionnent pas la rupture du contrat de travail consécutive à un départ négocié, dans le cadre d'un PSE, mais seulement le licenciement ("le juge constate que le licenciement est intervenu alors que la procédure de licenciement est nulle, il peut ordonner la poursuite du contrat de travail [...]"). Mais l'article L. 1235-11 du Code du travail a vocation à s'appliquer, dans la mesure où la rupture du contrat de travail consécutive à un départ volontaire lorsqu'il a une cause économique et s'inscrit dans un processus de réduction des effectifs donnant lieu à l'établissement d'un PSE. Cette rupture est donc assimilable à un licenciement, au sens de l'article L. 1235-11 du Code du travail.

Dans la mesure où le droit de la réintégration aurait vocation à s'appliquer à des salariés dont le contrat de travail a été rompu en application d'un départ volontaire au titre d'un PSE, et dans l'hypothèse où le PSE serait annulé, ces salariés pourraient se prévaloir des solutions connues, en matière de réintégration :

- appréciation de la matérialité de la possibilité d'une réintégration. En 2005 (20), la Cour de cassation a développé une jurisprudence permettant de mieux saisir le sens de l'obligation de réintégration. En l'espèce, la société avait cessé définitivement son activité, ses actifs industriels avaient été vendus. L'entreprise ayant disparu, les juges du fond ont pu en déduire que la réintégration, demandée dans les seuls emplois que les salariés occupaient dans cette entreprise avant leurs licenciements, était devenue matériellement impossible ;

- périmètre de la réintégration. L'obligation de réintégration résultant de la poursuite alors ordonnée du contrat de travail ne s'étend pas au groupe auquel appartient l'employeur (21). Si l'établissement dans lequel travaillaient les salariés irrégulièrement licenciés a fermé, ceux-ci doivent être réintégrés dans des postes équivalents situés dans d'autres établissements (22).


(1) Cass. soc., 13 février 1997, n° 95-16.648, publié (N° Lexbase : A1924ACA) ; D., 1997, p. 171, note A. Lyon-Caen ; Dr. soc., 1997, p. 254, concl. avocat général P. de Caigny ; Dr. ouvr., 1997, p. 96, note P. Moussy ; JCP, 1997, p. 22843 ; P. H. Antonmattéi, La nullité du licenciement pour motif économique consécutive à la nullité du plan social, RJS, 1997, p. 155 et s. ; G. Couturier et J. Pélissier, Nullité du plan social, SSL, 3 mars 1997, n° 829 ; B. Teyssié, Propos iconoclastes sur le droit du licenciement pour motif économique, JCP éd. S, 1996, p. 3902 ; L'entreprise et le droit du travail, Archives Phil. dr., 1997, p. 355.
(2) Par ex., v. C. Berchon, Actualité jurisprudentielle des cas de nullités en droit du travail, JSL, n° 343, 14 mai 2013 ; Entretien croisé avec G. Couturier, P. Lokiec, Y. Tarasewicz et P. Masanovic, SSL, n° 1571, supplément du 11 février 2013.
(3) Cass. soc., 3 mai 2012, n° 11-20.741, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A5065IKS) ; JCP éd. S, 2012, p. 1241, comm. F. Favennec-Héry ; V. J. Grangé, Au-delà de l'arrêt Vivéo : les incertitudes du droit du licenciement économique, JCP éd. S, 2012, p. 1242 ; R. Chiss, Affaire Leader Price : premier acte de résistance à l'arrêt Vivéo, JCP éd. S, 2012, p. 1246 ; J. Martinez, H. Lovells, J.-L. Guitera et K. Martelet, Le motif économique de licenciement est-il économiquement rationnel ?, Cahiers de droit de l'entreprise, n° 5, septembre 2012, dossier 24 ; P. Morvan, La jurisprudence virale - libres propos, JCP éd. G, 2013, p. 2 ; CA Paris, 12 mai 2011, n° 11/01547, (N° Lexbase : A5778HRG) ; SSL, 2011, n°1493.
(4) F. Géa, Rompre (Réflexions sur la volonté du salarié de rompre son contrat), in T. Sachs (dir.), La volonté du salarié, coll. Thèmes et commentaires, Actes, Dalloz, 2012.
(5) SSL, 2013, n° 1586 ; LSQ, n° 16349, 23 mai 2013.
(6) Cass. soc., 9 janvier 2013, n° 12-40.085, FS-P+B (N° Lexbase : A7899IZL) ; LSQ, n° 16261, 11 janvier 2013 ; Cons. const., décision n° 2013-299 QPC, 28 mars 2013 (N° Lexbase : A0763KBU) ; LSQ, n° 16318, 3 avril 2013.
(7) LSQ, n° 16345, 16 mai 2013.
(8) Cass. soc., 28 mars 2000, n° 98-40.228, publié (N° Lexbase : A6305AGM) et n° 99-41.717, publié (N° Lexbase : A5239AG7), Bull. civ. V, n° 132
(9) Cass. soc., 5 novembre 2003, n° 01-45.161, F-D (N° Lexbase : A0679DAE). Mais l'hypothèse visée par l'arrêt n'est pas celle d'une nullité des licenciements induite par une nullité du PSE.
(10) Cass. soc., 15 décembre 1998, n° 96-44.233, publié (N° Lexbase : A8092AGS), Bull. civ. 1998, V, n° 549. Là aussi, l'hypothèse d'une nullité du licenciement consécutive à une nullité du plan social n'est pas en cause. En l'espèce, la société cessionnaire a acquis les éléments corporels et incorporels de l'entité économique anciennement exploitée et en a poursuivi l'activité ; la société a repris vingt-cinq contrats de travail, dont celui de l'intéressée. Le licenciement prononcé par l'administrateur judiciaire était donc sans effet ; les versements effectués par l'ASSEDIC étaient sans cause. La Cour de cassation en déduit que, conformément à l'article 1235 du Code civil (N° Lexbase : L1348ABK), tout paiement suppose une dette et ce qui a été payé sans être dû est sujet à répétition. L'ASSEDIC était donc fondée à demander que soit constatée la nullité du licenciement et ordonné le remboursement des indemnités de rupture qu'elle avait indûment versées.
(11) Cass. soc., 26 octobre 2010, n° 09-15.187, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A6142GCH) ; JCP éd. G, 2010, p. 1089 ; SSL, n° 1465, p. 10, rapp. P. Bailly, p. 8, note E. Dockès, p. 11 ; Dr. ouvr., 2011, note I. Meyrat ; JCP éd. S, 2010, 1483, obs. G. Loiseau ; F. Favennec-Héry, PDV, PSE, PDR : un plan chasse l'autre, Dr. soc., 2010, p. 1164 ; F. Géa, La Chambre sociale et le volontariat. A propos de l'arrêt Renault, RDT, 2010, p. 704.
(12) Cass. soc., 25 janvier 2012, n° 10-23.516, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A4422IBE) ; SSL, n° 1524, p. 11, précédé de l'étude de P. Lokiec, p. 8 ; RDT, 2012, p. 152, obs. F. Géa ; RJS, avril 2012, n° 328, et l'étude de G. Couturier, p. 243 ; F. Favennec-Héry, Plan de départs volontaires : le jeu des distinctions, Dr. soc., 2012, p. 351 ; JCP éd. G, 2012, p. 136 ; J. Krivine, Suppression d'emplois et suppression de postes : une confusion volontaire? Réflexions libres sur les dérives comportementales visant à échapper aux contraintes du plan de sauvegarde de l'emploi à l'occasion de l'arrêt du 25 janvier 2012, SSL, n° 1550, supplément du 10 septembre 2012.
(13) Cass. soc., 29 octobre 2012, n° 11-23.142, FS-P+B (N° Lexbase : A3532IUD) ; JCP éd. G, 2012, p. 1178, obs. C. Lefranc-Hamoniaux ; JCP éd. S, 2012, p. 1497, obs. L. Cailloux-Meurice, ; LSQ, n° 16202, 15 octobre 2012 ; F. Géa, L'art de la différenciation - à propos de l'arrêt "Air France KLM", SSL, n° 1571, supplément du 11 février 2013.
(14) Cass. soc., 23 avril 2013, n° 12-15.221, FS-P+B (N° Lexbase : A6832KCZ).
(15) Cass. soc., 28 mars 2012, n° 11-30.034, FS-P+B (N° Lexbase : A9998IGE).
(16) Cass. soc., 24 janvier 2006, n° 04-41.341, F-D (N° Lexbase : A5580DMM) ; RJS, 2006, n° 418.
(17) Cass. soc., 11 mars 2009, n° 07-41.867, F-D (N° Lexbase : A7081EDM) ; JCP éd. S, 2009, 1319.
(18) Cass. soc., 21 septembre 2005, n° 03-45.024, F-P+B (N° Lexbase : A5083DKH) ; RJS, 2005, n° 1198.
(19) Cons. const., 13 janvier 2005 n° 2004-509 DC, loi de programmation pour la cohésion sociale (N° Lexbase : A9528DEM) ; sur la réforme, G. Couturier, L'impossibilité de réintégrer (sur l'article 77, V, de la loi de programmation sociale), Dr. soc., 2005, p. 403.
(20) Cass. soc., 15 juin 2005, n° 03-48.094, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A6829DIR) ; JCP éd. S, 2005, p. 1035, note P.-Y. Verkindt ; v. les obs. de Ch. Radé, Affaire "Wolber" : à l'impossible nul n'est tenu !, Lexbase Hebdo n° 173 du 22 juin 2005 - édition sociale (N° Lexbase : N5701AIY).
(21) Cass. soc., 15 février 2006, n° 04-43.282, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A8880DMT) ; JCP éd. S, 2006, p. 1180 et JCP éd. E, 2006, p. 1735, notes P. Morvan.
(22) Cass. soc., 30 mars 1999, no 97-41.013, publié (N° Lexbase : A4729AGA).

Décision

Cass. soc., 15 mai 2013, n° 11-26.414, FS+P+B (N° Lexbase : A5018KD9)

Rejet, CA Grenoble, 23 novembre 2009, n° 09/03601 (N° Lexbase : A1715E4B)

Textes concernés : C. trav., art. L. 1235-10 (N° Lexbase : L6214ISX) et L. 1235-11 (N° Lexbase : L1357H97)

Mots-clés : PSE, nullité, effets de la nullité, actes subséquents, plan de départ volontaire compris dans le PSE, annulation du plan de départ volontaire.

Liens base : (N° Lexbase : E9340ESQ)

newsid:437262

Rupture du contrat de travail

[Brèves] Rupture conventionnelle : l'existence d'un différend entre les parties, au moment de sa conclusion, n'affecte pas sa validité

Réf. : Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-13.865, FS-P+B+R, sur le premier moyen du pourvoi principal (N° Lexbase : A9246KDS)

Lecture: 2 min

N7260BT3

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Le 30 Mai 2013

Si l'existence, au moment de sa conclusion, d'un différend entre les parties au contrat de travail n'affecte pas par elle-même la validité de la convention de rupture conclue en application de l'article L. 1237-11 du Code du travail (N° Lexbase : L8512IAI), la rupture conventionnelle ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties. Telle est la solution retenue par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 23 mai 2013 (Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-13.865, FS-P+B+R, sur le premier moyen du pourvoi principal N° Lexbase : A9246KDS).
Dans cette affaire, Mme C., avocate, et le cabinet qui l'emploie ont conclu, le 17 juin 2009, une convention de rupture du contrat de travail. Cette convention a été homologuée par l'autorité administrative le 6 juillet 2009. La salariée a saisi le Bâtonnier de l'Ordre des avocats de demandes tendant à la requalification de la rupture conventionnelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse et au paiement de diverses sommes. Le Syndicat des avocats de France est intervenu à l'instance. L'employeur fait grief à l'arrêt de la cour d'appel (CA Versailles, 15 décembre 2011, n° 10/06409 N° Lexbase : A3098H8A) d'accueillir les demandes de la salariée alors que la violence exercée sur le consentement de celui qui s'oblige n'entraîne la nullité de l'acte que si elle est illégitime et que sauf abus, la menace de l'exercice d'un droit n'est pas illégitime. L'employeur estime également que si la conclusion d'un accord de rupture d'un commun accord du contrat de travail suppose l'absence d'un litige sur la rupture du contrat de travail, elle peut valablement intervenir en présence d'un litige portant sur l'exécution du contrat de travail. Selon la Haute juridiction, après avoir relevé que l'employeur avait menacé la salariée de voir ternir la poursuite de son parcours professionnel en raison des erreurs et manquements de sa part justifiant un licenciement et l'avait incitée, par une pression, à choisir la voie de la rupture conventionnelle, la cour d'appel qui a fait ressortir que le consentement de la salariée avait été vicié, a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision .

newsid:437260

Rupture du contrat de travail

[Brèves] Rupture conventionnelle : remise par l'employeur de la convocation à l'entretien en vue de l'établissement de la convention le même jour que la sollicitation par le salarié de cette rupture

Réf. : CA Angers, 21 mai 2013, n° 11/00690 (N° Lexbase : A7035KDW)

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N7312BTY

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Le 30 Mai 2013

Le fait que la remise par l'employeur de la convocation à l'entretien en vue de l'établissement de la convention de rupture conventionnelle intervient le même jour que celui où le salarié sollicite cette rupture, et qu'il n'y ait qu'un entretien et que, de fait, les délais soient brefs entre la convocation à l'entretien et l'établissement de la convention de rupture ne rend pas nul ladite rupture. Telle est la solution retenue par la cour d'appel d'Angers dans un arrêt du 21 mai 2013 (CA Angers, 21 mai 2013, n° 11/00690 N° Lexbase : A7035KDW).
Dans cette affaire, un salarié estime que son consentement a été vicié lors de la conclusion de sa rupture conventionnelle. Il estime que sa lettre du 22 septembre 2008, par laquelle il a sollicité de sa société la conclusion d'une rupture conventionnelle, aurait été rédigée sous la contrainte de son employeur, qui la lui aurait dictée, arguant de ce que cela ressort et du caractère manuscrit de cet écrit alors qu'il dactylographie toujours les courriers qu'il adresse à la société, et du fait que, le même jour, cette dernière lui a remis une convocation dactylographiée quant à elle, pour un entretien en vue de cette rupture conventionnelle, ensemble de signes qui démontre que l'employeur avait déjà préparé cette convocation ce qui conforte l'absence de caractère spontané de son propre courrier. Il ajoute que les délais très courts entre l'engagement de la procédure et l'établissement de la convention de rupture, le fait qu'il n'y ait eu qu'un seul entretien, caractérisent une conclusion hâtive de la dite convention. Pour la cour d'appel, si le salarié évoque une contrainte, et non une violence d'ailleurs, de son employeur sur sa personne, les circonstances qu'il décrit, sont déjà non déterminantes d'une quelconque contrainte. En effet, si la loi prévoit que plusieurs entretiens puissent être menés, elle n'impose la tenue que d'au moins un entretien, de même qu'elle ne détermine pas de délai entre le moment où le salarié est convoqué en entretien et le moment où la convention de rupture est formalisée. La cour d'appel n'annule donc pas la rupture conventionnelle .

newsid:437312

Rupture du contrat de travail

[Brèves] Rupture conventionnelle : vice du consentement

Réf. : CA Rennes, 22 mai 2013, n° 11/08556 (N° Lexbase : A6652KDQ)

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N7314BT3

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Le 30 Mai 2013

Caractérise une violence le refus d'un employeur de répondre à des demandes légitimes d'un salarié autrement que par la notification d'un avertissement, sur les conditions de travail qui lui étaient imposées, viciant la conclusion de la rupture conventionnelle. Telle est la solution retenue par la cour d'appel de Rennes dans un arrêt du 22 mai 2013 (CA Rennes, 22 mai 2013, n° 11/08556 N° Lexbase : A6652KDQ).
Dans cette affaire, il résulte des documents versés aux débats que le salarié avait interpellé son employeur soit directement, soit par le biais de l'inspection du travail, sur les conditions d'exercice de son activité, notamment sur les horaires de travail. Ainsi, dans un courrier adressé à son employeur le 26 juin 2008, il avait part de son mécontentement. L'employeur n'a pas répondu à ce courrier dont copie avait été adressé à l'inspection du travail. Néanmoins, dans un courrier daté du 11 juin 2008 mais notifié en fait par courrier recommandé du 22 juillet suivant, il infligeait un avertissement au salarié, avertissement immédiatement contesté par courrier recommandé du 25 juillet. L'employeur admettait en réponse s'être mal exprimé dans la formulation des reproches, mais maintenait cependant son avertissement par courrier recommandé du 31 août. Pour la cour d'appel, il résulte de cette chronologie et des éléments figurant dans les différents courriers échangés, qu'existait entre les parties, un litige relatif à l'exécution du contrat de travail, qu'ainsi le consentement du salarié à la rupture amiable, même s'il est formalisé par sa signature, et si la convention a été homologuée de manière implicite, a été obtenu par violence. Il sera fait droit à la demande d'annulation de la rupture conventionnelle .

newsid:437314

Sécurité sociale

[Brèves] Liste des pièces justificatives à fournir pour bénéficier de l'indemnisation du congé de paternité et d'accueil de l'enfant

Réf. : Arrêté du 3 mai 2013 fixant la liste des pièces justificatives à fournir pour bénéficier de l'indemnisation du congé de paternité et d'accueil de l'enfant (N° Lexbase : L8183IWY)

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N7266BTB

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Le 30 Mai 2013

L'arrêté du 3 mai 2013 fixant la liste des pièces justificatives à fournir pour bénéficier de l'indemnisation du congé de paternité et d'accueil de l'enfant (N° Lexbase : L8183IWY) a été publié au Journal officiel du 23 mai 2013. Pour le bénéfice de l'indemnisation de son congé de paternité ou d'accueil de l'enfant, en application des articles D. 331-4 (N° Lexbase : L5410H9A) et D. 613-10 (N° Lexbase : L5411H9B) du Code de la Sécurité sociale, l'assuré doit adresser à l'organisme de Sécurité sociale dont il relève une ou plusieurs pièces justificatives figurant dans cet arrêté. Par conséquent, l'arrêté du 9 janvier 2008 fixant la liste des pièces justificatives à fournir pour bénéficier de l'indemnisation du congé de paternité est abrogé (N° Lexbase : L7478H3D).

newsid:437266

Sécurité sociale

[Brèves] La date d'ouverture des droits aux prestations familiales pour l'allocataire étranger est celle où la carte de séjour temporaire a été délivrée

Réf. : Cass. civ. 2, 23 mai 2013, n° 12-17.238, F-P+B (N° Lexbase : A9231KDA)

Lecture: 2 min

N7264BT9

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Le 05 Juin 2013

Il résulte de l'article L. 512-2 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L5049IQ3) que les étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération helvétique bénéficient des prestations familiales pour les enfants dont ils ont la charge dès lors qu'ils sont titulaires de l'un des titres ou documents dont la liste est fixée par l'article D. 512-1 du même code (N° Lexbase : L5049IQ3). Telle est la solution retenue par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 23 mai 2013 (Cass. civ. 2, 23 mai 2013, n° 12-17.238, F-P+B N° Lexbase : A9231KDA).
Dans cette affaire, la caisse d'allocations familiales de Montpellier a demandé à M. B. le remboursement de prestations qu'elle lui avait versées à une époque où il n'était pas titulaire d'un titre de séjour, puis a saisi une juridiction de Sécurité sociale. Au cours de l'instance, l'intéressé qui avait obtenu une carte de séjour temporaire, a demandé une compensation entre la créance de la caisse et les prestations dont celle-ci était redevable à son égard depuis la date à laquelle sa situation administrative avait été régularisée. M. B. fait grief à l'arrêt de la cour d'appel (CA Montpellier, 9 juin 2010, n° 09/05759 N° Lexbase : A7251IIE) de dire que la date d'ouverture des droits à prestations devait être fixée à la date à laquelle lui avait été délivrée sa carte de séjour temporaire, et de le condamner à payer une somme à la caisse d'allocations familiales, après compensation partielle. L'intéressé fait valoir que l'étranger bénéficie de plein droit de prestations sociales dès qu'il remplit la condition de régularité de séjour, peu important la date de la délivrance du titre correspondant, si bien qu'en fixant la date d'ouverture des droits aux prestations et allocations aux adultes handicapés à celle de délivrance effective de la carte de séjour temporaire de M. B., quand devait être retenue celle du courrier du préfet de l'Hérault, indiquant que la régularisation de l'intéressé avait été décidée, la cour d'appel a, selon M. B violé les articles L. 512-1 (N° Lexbase : L3421HWM), L. 512-2 et D. 512-1 du Code de la Sécurité sociale. La Haute juridiction ne retient pas l'argumentaire et confirme le jugement estimant que la cour d'appel en a exactement déduit que la date d'ouverture de ses droits aux prestations ne pouvait être fixée qu'à cette date où la carte de séjour temporaire avait été délivrée .

newsid:437264

Sécurité sociale

[Brèves] L'URSSAF invoquant la prescription d'un remboursement d'indu doit apporter la preuve de l'absence d'impossibilité d'agir pour l'employeur avant l'expiration du délai de prescription

Réf. : CA Angers, 21 mai 2013, n° 11/02897 (N° Lexbase : A6587KDC)

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N7294BTC

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Le 30 Mai 2013

Il appartient à l'URSSAF, dès lors qu'elle invoque la prescription de la demande de remboursement, de rapporter la preuve que l'employeur n'a pas été dans l'impossibilité d'agir avant l'expiration du délai de prescription. Telle est la décision retenue par la cour d'appel d'Angers, dans un arrêt du 21 mai 2013 (CA Angers, 21 mai 2013, n° 11/02897 N° Lexbase : A6587KDC).
Dans cette affaire, la CPAM a retenu l'inopposabilité à un employeur des dépenses liées à trois maladies professionnelles subies par sa salariée. La caisse régionale d'assurance maladie (devenue la CARSAT) a notifié à l'employeur des taux de cotisations modifiés à la baisse, au titre des années 2003 à 2006. Cette nouvelle notification de taux de cotisations à la baisse se traduisant par un trop versé de cotisations sur les mêmes années, la société en a demandé le remboursement auprès de l'URSSAF laquelle lui a déclaré que la demande était prescrite. La cour d'appel rappelle le principe selon lequel l'employeur n'est pas dans l'impossibilité d'agir dans le délai de la prescription triennale instituée par l'article L. 243-6 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L9558INC) dès lors qu'aucun obstacle ne lui interdisait de contester avant l'expiration de ce délai la détermination et le montant des cotisations et de réclamer la restitution des sommes qu'il estimait avoir indûment acquittées. La cour constate que l'URSSAF ne produit aucune notification faite à la société des taux accidents du travail et lui oppose que cette notification est le fait de la CARSAT. Ainsi, selon la cour d'appel l'URSSAF n'établit pas que la société ait eu notification des modalités et délais des voies de recours en contestation des dits taux et ne rapporte donc pas la preuve que l'appelante était en mesure de poursuivre, à compter de leur versement, et dans la limite du délai de prescription de l'action en répétition, le remboursement des cotisations qu'elle estimait avoir indûment payées, le défaut de notification des modalités et délais des voies de recours ayant, au contraire, fait obstacle à l'exercice de cette action (sur la prescription de l'action en répétition de l'indu, cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E4357AUW).

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Social général

[Evénement] Les évolutions du droit social en Chine - Compte-rendu de la réunion de la commission Chine du 24 avril 2013

Lecture: 6 min

N7208BT7

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par Grégory Singer, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo - édition sociale

Le 30 Mai 2013

La commission Chine organisait, le 24 avril 2013, sous la responsabilité de Jacques Sagot, avocat à la cour, une réunion présentant les dernières évolutions du droit social en Chine où intervenait Jin Banggi, Professeur de l'Université Aix-Marseille et directeur de l'Institut de recherches Europe Asie. Présentes à cette occasion, les éditions juridiques Lexbase vous proposent de retrouver le compte-rendu de cette réunion. L'introduction de la notion de droit social en Chine est relativement récente, les travaux préparatoires du Code du travail ayant commencé dans les années 80. Auparavant, le droit social était partagé entre droit économique, droit civil et droit commercial. Désormais, le droit social fait partie des sept branches autonomes du droit : le droit constitutionnel, le droit administratif, le droit civil et commercial, le droit pénal, le droit économique, le droit procédural judiciaire et extra-judiciaire et donc le droit social.

L'introduction et le développement d'un droit social en Chine s'appuient sur des considérations économiques, politiques et sociales.

Economiques car la croissance chinoise s'appuie très largement sur son exportation. Mais depuis 2008, la croissance ne peut plus seulement s'appuyer sur celle-ci et doit développer sa consommation intérieure. Malheureusement, le manque de couverture sociale pour les chinois non-salariés et les salariés agricoles n'incitent pas à leur consommation, ces derniers préférant épargner. L'introduction d'une Sécurité sociale permet donc de développer cette consommation.

Le droit social a été également développé pour des raisons politiques. En effet, pour renforcer la légitimité du Parti communiste, ses dirigeants ont souhaité faire bénéficier les populations les plus pauvres de droits sociaux.

Il est cependant impossible pour le Gouvernement chinois d'assurer une protection sociale similaire à la France, souligne Jin Banggi, la Chine étant peuplé d'1 milliard 300 millions de personnes. "C'est une protection faible mais compréhensible" pour notre intervenant.

La législation est de plus en plus perfectionnée mais son application reste très préoccupante. Par exemple, la législation sur les congés payés annuels a été introduite en 1994 au sein du Code du travail mais il a fallu quatorze ans pour que le Gouvernement publie son règlement d'application. En 2001, seulement 48 % des salariés ont pu bénéficier des congés payés.

L'absence de cotisations par les entreprises individuelles est également un problème. Mais Jin Banggi indique cependant que la Chine assiste à une évolution encourageante voire révolutionnaire des hausses de ces cotisations. Chaque année, le Gouvernement constate une augmentation de 30 % de ses recettes fiscales.

L'extension de l'assurance vieillesse à la totalité de la population y compris les travailleurs agricoles est également révolutionnaire. Auparavant, l'assurance ne concernait que la population salariée urbaine.

Par cette extension, la Chine a adopté un modèle social européen (assurance vieillesse, maladie) mais l'introduction de mécanismes de contrôle de l'application des règles semble indispensable pour obtenir une véritable protection sociale.

I - La législation

Par le passage des entreprises publiques à des entreprises privées, le droit était marqué par une liberté de gestion des entreprises. L'élaboration du Code du travail en 1994 a été ainsi imprégnée par un esprit libéral : l'employeur pouvait donc avoir le droit de recruter, le droit de licencier, le droit de fixer le salaire alors que le salarié avait seulement le droit de démissionner.

Les textes de base ont fixé un cadre législatif pour le contrat de travail, le contrat collectif, les conditions de travail, les assurances sociales obligatoires (vieillesse, maladie, chômage, accident du travail, maternité).

Le non-respect du Code du travail par les employeurs chinois et étrangers provoque cependant de graves problèmes dans la pratique (absence de contrat de travail, période d'essai trop longue, durée du travail trop importante, non-paiement des heures supplémentaires, absence de cotisations) et a attiré l'attention du législateur. En 2005 a été publié un rapport sur l'application du Code du travail qui a soulevé :

- un taux très faible de signature de contrat de travail ;

- de nombreux contrats de courte durée ;

- une absence de respect du régime du salaire minimum ;

- de nombreuses heures non-payées ;

- un problème de règlement de cotisations sociales.

Le législateur a ainsi élaboré une nouvelle loi, le 27 juin 2007, sur les contrats de travail. Cette loi a été sujette à de nombreuses controverses soulevées par les députés représentant les entreprises. Par exemple, ce texte prévoyait qu'après dix ans d'ancienneté dans une même entreprise, le salarié devait obtenir obligatoirement un contrat à durée indéterminée. Le salarié ayant deux CDD successifs devait également obtenir un CDI.

Etait aussi instauré un régime de la période d'essai. Pour un contrat durant moins d'un an, la période d'essai ne peut pas dépasser un mois. Elle ne doit pas être supérieure à une durée de deux mois pour un contrat de moins de trois ans. Enfin, pour les contrats supérieurs à trois ans, la période d'essai est fixée à six mois. Une seule période d'essai est prévue pour le salarié et doit être incluse dans le contrat de travail.

Un régime de la clause de non-concurrences est également introduit dans le Code du travail (durée de la clause, rémunération, espace géographique d'application)

II - Les assurances sociales

La loi du 28 octobre 2010 organisant un cadre général de protection sociale, dont le travail de préparation a commencé en 1993, a été difficile à mettre en oeuvre. Elle énonce un cadre général, un objectif final et une mise en place progressive.

Le cadre général prévoit l'application de la loi à l'ensemble de la population sans distinction : urbaine, rurale, salariale et non-salariale.

La loi énonce également un cadre général de protection pour les trois systèmes distincts d'assurance vieillesse et d'assurance maladie : un système pour les salariés urbains, un autre pour les non-salariés urbains et un dernier pour la population rurale.

Il ne s'agit pas d'une mutualisation nationale mais d'une mutualisation régionale, municipale. Chaque province a son propre fonds qui varie malheureusement en fonction de sa richesse. Il est important de préciser qu'une province moyenne comporte environ 70 millions d'habitants, soit l'équivalent de la population française.

L'objectif final du Gouvernement est le souhait d'une mutualisation nationale.

La loi de 2010 a également instauré un nouveau dispositif social. Chaque assuré dispose désormais d'un numéro de Sécurité sociale et d'une carte unique. Est également prévue la possibilité de transférer le dossier social, transfert très important en cas de mobilité entre province.

Depuis le 15 novembre 2011, les salariés étrangers ont l'obligation d'adhérer aux assurances sociales chinoises. Des conventions bilatérales (par exemple, avec la Corée du Sud ou l'Allemagne) peuvent être signées afin d'éviter la double cotisation. La France a débuté les négociations avec la Chine sur cette question.

  • L'assurance vieillesse

Comme énoncé précédemment, l'assurance vieillesse comprend trois systèmes distincts. Mais au coeur même de ces systèmes, des sous-distinctions existent. La catégorie des salariés urbains est, par exemple, composée des salariés des entreprises, des fonctionnaires (dont le système est pris en charge complètement par l'Etat) et du personnel des établissements publics (université, recherche).

Pour les salariés des entreprises, les cotisations patronales sont fixées à 20 % du total des salaires et les cotisations salariales à 8 %. Les cotisations patronales sont reversées vers un fonds commun et les cotisations salariales vont vers un compte personnel propre au salarié.

La pension de retraite versée aux salariés est issue des deux fonds.

Il est à noter que les fonctionnaires ont une pension 2,1 fois plus importante que celle des salariés.

Depuis 2012, il y a une couverture totale de la population rurale. Pour les régions les plus développées, 50 % de la pension provient d'une subvention nationale tandis que pour les régions les moins développées, l'ensemble de la pension provient de cette même subvention du Gouvernement central.

  • L'assurance maladie

A l'instar de l'assurance vieillesse, il existe les trois systèmes distincts. Pour les salariés des entreprises, les cotisations patronales sont fixées entre 6 % et 8 %, les cotisations sociales à 2 % versées également sur deux fonds différents. Une partie de la population rurale bénéficie également d'une assurance maladie.

Le remboursement des soins et des médicaments dépend du plafond fixé par chaque province. Le taux de remboursement varie également en fonction du niveau de l'hôpital ou du centre de santé.

III - La difficile application de la loi

Jin Banggi souligne qu'un grand nombre d'entreprises privées ne signe pas de contrat de travail. Il n'existe malheureusement pas de contrôle spécifique. Ce contrôle n'est effectué qu'en présence d'un litige devant les juridictions. L'absence de signature d'un contrat entraîne l'absence de versement des cotisations sociales.

Ce problème n'existe pas seulement pour les entreprises chinoises mais touchent également les entreprises étrangères.

Jin Banggi précise, enfin, qu'il n'existe pas de tribunaux du travail en Chine. En 2007 a été publiée une loi, portant sur la médiation et l'arbitrage en droit du travail. Ces étapes sont obligatoires avant la saisine du tribunal, la sentence arbitrale pouvant même, dans certains cas, être définitive et ne pas être contestable. Il est à souligner que les commissions de médiation sont constituées au sein même des entreprises. Les commissions arbitrales sont présentes au niveau des municipalités et des districts. Les commissions sont tripartites (représentant de l'employeur, représentant du syndicat et représentant de l'administration du travail).

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Social général

[Panorama] Panorama des arrêts inédits rendus par la Cour de cassation - Semaine du 20 au 24 mai 2013

Lecture: 2 min

N7249BTN

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Le 30 Mai 2013

Retrouvez, chaque semaine, une sélection des arrêts inédits de la Cour de cassation, les plus pertinents, classés par thème.
  • Changement du lieu d'affectation du salarié/Pas de modification du contrat de travail

- Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-15.461, F-D (N° Lexbase : A9161KDN) : le changement du lieu d'affectation du salarié de Forbach à Marly, distants d'environ soixante-dix kilomètres, se situe dans le même bassin d'emploi et dans le même département, et ne constitue pas une modification du contrat de travail du salarié (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E8935ESQ).

  • Retrait d'agrément/Motivation de la lettre de licenciement

- Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-10.062, F-D (N° Lexbase : A9209KDG) : selon l'article L. 423-8 du Code de l'action sociale et de la famille (N° Lexbase : L4178H8A), en cas de retrait d'agrément, l'employeur est tenu de procéder au licenciement par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; est suffisamment motivée au regard de l'article L. 1232-6 du Code du travail (N° Lexbase : L1084H9Z) la lettre de licenciement qui se réfère à un tel retrait (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E9094ESM).

  • Licenciement/Insuffisance professionnelle

- Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-12.914, F-D (N° Lexbase : A9175KD8) : est caractérisée l'insuffisance professionnelle lorsque la lettre de licenciement vise une somme d'éléments objectifs caractérisant une insuffisance professionnelle reposant sur une absence de maîtrise des coûts et une gestion défaillante, une gestion irrationnelle et coûteuse du dossier informatique, des carences dans la gestion du personnel (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E9124ESQ).

  • Prise d'acte/Manquement à l'obligation de sécurité

- Cass. soc., 23 mai 2013, n° 11-12.029, F-D (N° Lexbase : A9213KDL) : est justifiée la prise d'acte lorsque le petit-fils de l'employeur a jeté à terre à deux reprises la nourriture préparée par la salariée et proféré des injures racistes à son égard au domicile de cette dernière .

  • Prise d'acte/Départ volontaire d'une salariée

- Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-13.845, F-D (N° Lexbase : A9218KDR) : la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite du contrat de travail, tel n'est pas le cas lorsque l'employeur, qui connaissait dès l'origine le projet de départ volontaire de la salariée dans le cadre du PSE et la nécessité stratégique, compte tenu des fonctions de celle-ci de le tenir confidentiel, et qui s'était engagé, au moins tacitement, à y donner suite lorsque les circonstances le permettraient, avait, dans un premier temps, atermoyé, puis refusé le départ volontaire de la salariée, pour enfin, l'accepté (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E5829ET3).

  • Prise d'acte/Manquement de l'employeur

- Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-15.574, F-D (N° Lexbase : A9204KDA) : est justifiée la prise d'acte lorsque l'employeur n'a délivré de bulletins de salaires conformes que sous la contrainte d'une procédure en référé et n'a pas affilié la salariée à une caisse de retraite et de prévoyance, lui occasionnant une perte de droit du fait de l'absence de cotisation (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E8935ESQ).

  • Arrêt de travail/Régime d'indemnisation

- Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-15.461, F-D (N° Lexbase : A9122KD9) : il appartient à la cour d'appel de rechercher, par une appréciation globale avantage par avantage, le régime d'indemnisation, en cas d'arrêt de travail pour cause de maladie le plus favorable au salarié (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E3100ETY).

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Temps de travail

[Jurisprudence] Temps de trajet domicile/travail : charge de la preuve

Réf. : Cass. soc., 15 mai 2013, n° 11-28.749, FP-P+B (N° Lexbase : A5102KDC)

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N7225BTR

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par Sébastien Tournaux, Professeur à l'Université des Antilles et de la Guyane

Le 30 Mai 2013

Les temps de vie du salarié ne peuvent se résoudre à la seule dichotomie entre temps de travail et temps de repos. En effet, un certain nombre d'autres situations peuvent paraître intermédiaires ou, à tout le moins, atypiques. Si l'hypothèse des astreintes vient immédiatement à l'esprit, d'autres périodes telles que les temps d'habillage ou de déshabillage, les temps de restauration, les temps de pause ou, encore, les temps de trajet du salarié peuvent aussi présenter quelques difficultés de qualification et, par conséquent, de régime juridique (1). Ce sont précisément les temps de trajet entre le domicile et le lieu de travail du salarié qui faisaient difficulté dans l'affaire sous examen. Par un arrêt rendu le 15 mai 2013, la Chambre sociale rappelle que depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2005-32 de cohésion sociale du 18 janvier 2005 (N° Lexbase : L6384G49), par principe, le temps de trajet même inhabituel du salarié ne peut être qualifié de temps de travail effectif (I). Découle de cette règle une application distributive du régime juridique du temps de trajet : avant la loi de 2005, la charge de la preuve est partagée entre les parties alors qu'après 2005, cette charge incombe spécialement au salarié (II).
Résumé

La charge de la preuve du temps de trajet inhabituel n'incombe spécialement au salarié que pour la demande de contrepartie.

Commentaire

I - Qualification des temps de trajet : exclusion par principe du temps de travail effectif

  • Déplacement domicile - lieu de travail : généralités

Bien qu'il ne puisse manifestement plus "vaquer librement à des occupations personnelles" pendant cette période (2), le temps consacré par le salarié pour se déplacer de son domicile à son lieu de travail n'est, par principe, pas considéré comme du temps de travail. Malgré cela, ce temps peut éventuellement donner lieu à certaines contreparties en fonction des situations.

Ainsi se souviendra-t-on, d'abord, que la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 (N° Lexbase : L2678IC8) a généralisé à l'ensemble des entreprises françaises l'obligation de prendre en charge la moitié des frais de transports exposés par le salarié pour se déplacer depuis son domicile à son lieu de travail (3). Il ne s'agit cependant pas là d'une indemnisation du temps consacré au déplacement mais seulement des frais engagés pour celui-ci.

On relèvera surtout que, dans certaines conditions, le temps consacré au trajet du domicile au lieu de travail peut faire l'objet d'une compensation.

Avant la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005, de programmation pour la cohésion sociale, la Chambre sociale de la Cour de cassation jugeait, en effet, que le temps de déplacement dépassant le temps normal de trajet devait être considéré comme du temps de travail effectif et, donc, être rémunéré comme tel (4). Cette règle prétorienne a cependant été remise en cause par la loi précitée si bien que le temps de trajet ne peut désormais plus être considéré comme du temps de travail effectif (5). En effet, l'article L. 3121-4 du Code du travail (N° Lexbase : L0294H9R) dispose désormais que "le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif". Le texte ajoute, cependant, que "s'il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il fait l'objet d'une contrepartie soit sous forme de repos, soit financière". Concrètement, cette contrepartie doit être déterminée par accord collectif de travail ou par décision unilatérale de l'employeur prise sur avis des représentants du personnel.

De récentes précisions ont été apportées par la Chambre sociale de la Cour de cassation depuis l'adoption de ce texte. Ainsi sait-on désormais qu'en cas d'absence d'accord collectif ou de décision unilatérale de l'employeur, le montant de la contrepartie peut être déterminé par le juge judiciaire (6) sans d'ailleurs que soient clairement précisés les critères de détermination de cette contrepartie (7). La question de la charge de la preuve de l'octroi de cette contrepartie restait en revanche à ce jour sans réponse.

  • L'espèce

Dans cette affaire, un salarié avait été licencié pour faute grave à la suite d'un abandon de poste. La cour d'appel saisie de l'affaire jugeait le licenciement justifié malgré l'ancienneté du salarié car, selon la formule classique, les faits qui lui étaient reprochés rendaient impossible le maintien du contrat de travail (8). Une autre question faisait cependant difficulté.

En effet, entre 2003 et 2008, le salarié avait été contraint à des temps de trajet domicile-lieu de travail d'une durée excédant la durée normale car il devait rejoindre les sites de clients de l'entreprise. Le salarié produisait des décomptes, visiblement réalisés par lui-même, de ses déplacements lesquels ne permettaient donc pas, pour les juges d'appel, "de vérifier ni la réalité de ses affectations, ni le nombre d'heures passées dans les déplacements, ni leur prise en compte dans son amplitude horaire de travail". Faute de preuve, la cour d'appel déboutait le salarié de ses demandes de rappel de contrepartie pour temps de déplacement anormaux.

Par un arrêt rendu le 15 mai 2013, la Chambre sociale de la Cour de cassation casse cette décision au visa de l'article L. 212-4 du Code du travail (N° Lexbase : L8959G7X), dans sa rédaction antérieure à la loi de 2005, de l'article L. 3121-4 tel qu'issu de cette loi et de l'article L. 3171-4 du même code (N° Lexbase : L0783H9U).

Un chapeau interne nous permet de comprendre le raisonnement adopté. La décision rappelle la césure opérée par la loi de 2005 et considère que ces temps de trajet anormaux sont qualifiés de temps de travail effectif avant la loi de 2005 et sont seulement soumis à contrepartie après la loi de 2005. Surtout, elle dispose que "la charge de la preuve de ce temps de trajet inhabituel n'incombe spécialement au salarié que pour la demande de contrepartie". Or, la Chambre sociale observe que la société n'a pas répondu aux allégations présentées par le salarié et, plus encore, qu'à compter de 2007, la production de fiche de frais démontrait l'existence d'une durée anormale de temps de trajet entre le domicile et le lieu de travail. En conséquence, elle juge que la cour d'appel n'a pas convenablement appliqué les règles probatoires exposées.

II - Qualification des temps de trajet : application de la loi dans le temps

  • Avant la loi de 2005 : charge de la preuve partagée

Par cette décision, la Chambre sociale semble faire une application distributive du droit dans le temps. Quoique la formule ne soit pas d'une grande clarté, il peut être retenu que la charge de la preuve en la matière est partagée entre l'employeur et le salarié jusqu'à 2005, seulement à la charge du salarié depuis lors.

Ainsi, lorsqu'il s'agit d'établir la preuve que les temps de trajet excessifs doivent être qualifiés de temps de travail, la charge de la preuve est partagée entre l'employeur et le salarié (9). C'est, en tous les cas, le sens qui peut être donné au visa de l'article L. 3171-4 du Code du travail dont le premier alinéa, rappelons-le, dispose qu'"en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié". La Chambre sociale fait implicitement application aux temps de trajet de la règle de preuve prévue par le Code du travail en matière de temps de travail, d'heures de travail accomplis, d'horaires effectivement réalisés. C'est la mobilisation de cette règle de preuve qui explique que la cour d'appel ne pouvait se contenter des seuls éléments fournis par le salarié et devait exiger, en outre, la participation de l'employeur à la recherche de la preuve des horaires.

Ce raisonnement est parfaitement logique. L'utilisation de cette mécanique probatoire est justifiée pour les périodes durant lesquelles la Chambre sociale qualifiait de temps de travail effectif les durées anormales de trajet.

  • Après la loi de 2005 : charge de la preuve supportée par le salarié

Au contraire, s'il s'agit de faire la preuve du caractère anormal de temps de trajet réalisés après l'entrée en vigueur de la loi de 2005, le juge judiciaire ne peut plus invoquer les règles de preuve spécifiques au temps de travail puisque, par définition, ces temps de trajet ne peuvent être qualifiés de temps de travail effectif mais, seulement, donner lieu à contrepartie. La Chambre sociale en déduit que la charge de la preuve du temps de trajet inhabituel incombe spécialement au salarié en cas de demande de contrepartie.

Dès lors, donc, qu'il est question d'apprécier l'existence d'une contrepartie, ce sont les règles de droit commun qui doivent être appliquées. Par conséquent, c'est à celui qui présente la demande et prétend être créancier d'une obligation d'apporter la démonstration de l'existence de temps de trajet anormaux, c'est-à-dire le plus souvent au salarié (10).

  • Appréciation

Conséquence logique de l'exclusion de la qualification de temps de travail effectif intervenue en 2005, la solution peut néanmoins paraître sévère puisqu'il est toujours plus difficile pour le salarié de démontrer que les temps de trajet excessifs l'ont été à la demande de l'employeur et, surtout, de prouver qu'ils ont véritablement eu lieu. Comme le démontre l'espèce sous examen, une telle démonstration n'est pas toujours impossible car on peut penser que le salarié dispose tout de même d'une maîtrise plus grande sur ces temps de trajet que sur les temps de travail effectif durant lesquels il est véritablement placé sous la subordination de l'employeur, subordination qui justifie l'existence de la règle probatoire spéciale en matière de temps de travail.

On remarquera, enfin, que la Chambre sociale fait définitivement le deuil de sa jurisprudence d'origine adoptée avant la loi de 2005. Non seulement elle se plie à la qualification légale -les temps de trajets ne sont jamais des temps de travail effectifs- mais, en outre, elle accepte de faire produire les effets juridiques d'une telle qualification en particulier en matière de preuve. Si, toutefois, elle persiste à appliquer son ancienne jurisprudence aux faits antérieurs à 2005, c'est seulement par respect du principe selon lesquelles les lois en matière civile n'ont pas d'effet rétroactif.


(1) S'agissant des temps de trajet, la confusion est d'ailleurs entretenue par l'existence d'une assimilation en droit de la Sécurité sociale des accidents de trajet aux accidents de travail, assimilation qui cependant n'a jamais été transposée au droit du travail.
(2) Selon la formule définissant le temps de travail effectif issue de l'article L. 3121-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0291H9N).
(3) Sur cette indemnisation, v. récemment Cass. soc., 12 décembre 2012, n° 11-25.089, FS-P+B (N° Lexbase : A1186IZX) et nos obs., Le lieu de résidence du salarié n'est pas une condition de prise en charge de ses frais de transport, Lexbase Hebdo n° 512 du 17 janvier 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N5283BTT).
(4) Cass. soc., 5 mai 2004, n° 01-43.918, FS-P+B (N° Lexbase : A0461DC3) et les obs. de S. Martin-Cuenot, Preuve et portée de la convention de forfait, Lexbase Hebdo n° 121 du 20 mai 2004 - édition sociale (N° Lexbase : N1638ABB) ; Dr. soc., 2004. 899, obs. C. Radé ; RJS juillet 2004, n° 819 ; Cass. soc., 31 mai 2006, n° 04-45.217, FS-P (N° Lexbase : A7492DP8).
(5) Cette réforme a suscité de nombreuses interrogations s'agissant, par exemple, des déplacements durant les horaires de travail ou des déplacements pendant les astreintes. V. P.H. Antonmattéi, Temps de trajet : il ne manquait plus qu'une intervention législative !, Dr. soc., 2005, p. 410 ; M. Morand, Les déplacements professionnels après la loi de cohésion sociale, RJS, 2005, p. 247.
(6) Cass. soc., 14 novembre 2012, n° 11-18.571, FS-P+B (N° Lexbase : A0466IXK) ; RDT, 2013, p. 343, obs. M. Véricel. Une solution similaire avait déjà été adoptée s'agissant des contreparties qui doivent être offertes au salarié soumis à des périodes d'astreinte, v. Cass. soc., 10 mars 2004, n° 01-46.369, publié (N° Lexbase : A4840DBU).
(7) V. M. Véricel, préc..
(8) Ce moyen, qui fait l'objet d'un rejet, ne fera pas l'objet d'autres remarques.
(9) Ce qui paraît plus réaliste que de considérer que la charge de la preuve "n'incombe spécialement à aucune des parties" en ce que cette formule laisse penser que les parties peuvent rester inactives, ce qui n'est évidemment pas le cas. Sur cette formule, v. Cass. soc., 10 novembre 1998, n° 96-42.749, publié (N° Lexbase : A9666CG4) ; Dr. soc., 1999, p. 89, obs. J. Barthélémy.
(10) Ce sont là les règles classiques du droit de la procédure civile (actori incumbit probatio, C. proc. civ., art. 9 N° Lexbase : L1123H4D) et du droit de la preuve des obligations (C. civ., art. 1315, alinéa premier, N° Lexbase : L1426ABG).

Décision

Cass. soc., 15 mai 2013, n° 11-28.749, FP-P+B (N° Lexbase : A5102KDC)

Cassation partielle, CA Lyon, 25 octobre 2011, n° 10/08653 (N° Lexbase : A3817HZE)

Textes visés : C. trav., art. L. 212-4 (N° Lexbase : L8959G7X) dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005, L. 3121-4 (N° Lexbase : L0294H9R) et art. L. 3171-4 (N° Lexbase : L0783H9U)

Mots-clés : temps de trajet, domicile, lieu de travail, contrepartie, charge de la preuve

Liens base : (N° Lexbase : E0291ETX)

newsid:437225

Temps de travail

[Brèves] Durée d'équivalence de la durée légale du travail dans les établissements sociaux et médico-sociaux gérés par des personnes privées à but non lucratif

Réf. : Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-13.875, F-P+B (N° Lexbase : A9154KDE)

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N7291BT9

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Le 30 Mai 2013

Les dispositions relatives à la rémunération du travail effectif dans le cadre du régime d'équivalence du décret n° 2001-1384 du 31 décembre 2001 (N° Lexbase : L0952AW8), qui instituait une durée d'équivalence de la durée légale du travail dans les établissements sociaux et médico-sociaux gérés par des personnes privées à but non lucratif, n'ont pas été affectées par la décision d'annulation partielle du Conseil d'Etat du 28 avril 2006 (CE, 28 avril 2006, 1° et 6° s-s-r., n° 242727 N° Lexbase : A3809DPR) qui ne portent sur les limites dans lesquelles doit être mis en oeuvre le régime d'équivalence qu'il définissait pour garantir le respect de seuils et plafonds communautaires prévus par la Directive 93/104 du 23 novembre 1993 (N° Lexbase : L7793AU8). Telle est la solution retenue par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 23 mai 2013 (Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-13.875, F-P+B N° Lexbase : A9154KDE).
Dans cette affaire, Mme G. a été engagée, à compter du 30 juillet 1994, par une association des parents d'enfants inadaptés. Estimant ne pas avoir été remplie de ses droits au titre des congés trimestriels et du travail en chambre de veille, la salariée a saisi la juridiction prud'homale. Pour condamner l'employeur au paiement d'une certaine somme à titre de rappel de salaire 2004-2006, l'arrêt de la cour d'appel de Paris (CA Paris, Pôle 6, 5ème ch., 1er décembre 2011, n° 10/01102 N° Lexbase : A3945H3I), retient que par arrêt du 28 avril 2006, le Conseil d'Etat a annulé le décret n° 2001-1384 du 31 décembre 2001, en tant qu'il ne fixait pas les limites dans lesquelles doit être mis en oeuvre le régime d'équivalence qu'il définissait pour garantir le respect de seuils et plafonds communautaires prévus par la Directive du 23 novembre 1993. Pour la cour d'appel, ce n'est que par un décret n° 2007-106 du 29 janvier 2007 (N° Lexbase : L2288HUB) que ces garanties seront instituées. Ainsi, la salariée effectuait des nuits de permanence au sein de l'établissement, pendant lesquelles elle devait intervenir immédiatement chaque fois que nécessaire et rester à la disposition permanente de son employeur et des résidents, une chambre de veille étant mise à sa disposition et aucun système d'équivalence ne pouvait lui être valablement opposé pour la période 2004-2006. La Haute juridiction infirme l'arrêt pour une violation des articles L. 3121-9 du Code du travail (N° Lexbase : L0299H9X) et 2 du décret n° 2001-1384 du 31 décembre 2001, devenu l'article R. 314-202 du Code de l'action sociale et des familles (N° Lexbase : L6677G7G) (sur le cas des heures d'équivalence dans les établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées, cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E0300ETB).

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