Jurisprudence : Cons. const., décision n° 2013-299 QPC, du 28-03-2013

Cons. const., décision n° 2013-299 QPC, du 28-03-2013

A0763KBU

Référence

Cons. const., décision n° 2013-299 QPC, du 28-03-2013. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/8049636-cons-const-decision-n-2013299-qpc-du-28032013
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Abstract

Comme on pouvait le penser, le Conseil constitutionnel, dans une décision en date du 28 mars 2013, a validé l'exclusion des entreprises soumises à une procédure de redressement ou de liquidation judiciaires du champ d'application de l'article L. 1235-10 du Code du travail qui prévoit la nullité des licenciements pour motif économique en l'absence d'un plan de reclassement suffisant (I). Le troisième alinéa de l'article L. 1235-10 du Code du travail, limitant les droits des salariés des entreprises en redressement ou en liquidation judiciaires lorsque la procédure de licenciement est nulle du fait de l'absence de présentation aux représentants du personnel du plan de reclassement des salariés, n'est pas contraire au principe d'égalité devant la loi.



Décision n° 2013-299 QPC

du 28 mars 2013

Mme Maïtena VERA

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 9 janvier 2013 par la Cour de cassation (chambre sociale, arrêt n° 159 du 9 janvier 2013), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par Mme Maïtena VERA, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du troisième alinéa de l'article L. 1235-10 du code du travail.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de commerce ;

Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;

Vu les observations produites pour la SCP Brouard-Daudé, mandataire judiciaire agissant en qualité de mandataire-liquidateur de la société Stim sécurité, par la SCP Waquet-Farge-Hazan, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées les 1er et 18 février 2013 ;

Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 1er février 2013 ;

Vu les observations produites pour Mme Maïtena VERA, par la SCP Peignot-Garreau-Bauer Violas, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation et la SELARL OBP, avocat au barreau de Paris, enregistrées le 15 février 2013 ;

Vu les observations produites pour l'UNEDIC Délégation AGS CGEA IDF Ouest par la SELARL Lafarge associés le 18 février 2013 ;

Vu les pièces produites et jointes au dossier ;

Me Bongrand pour la requérante, Me Claire Waquet pour la SCP Brouard-Daudé, Me Arnaud Clerc, avocat au barreau de Paris pour l'UNEDIC Délégation AGS IDF Ouest et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 19 mars 2013 ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant que le premier alinéa de l'article L. 1235-10 du code du travail prévoit que dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciements concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, la procédure de licenciement est nulle tant que le plan de reclassement des salariés prévu à l'article L. 1233-61 et s'intégrant au plan de sauvegarde de l'emploi n'est pas présenté par l'employeur aux représentants du personnel, qui doivent être réunis, informés et consultés ; qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 1235-10 : " Le premier alinéa n'est pas applicable aux entreprises en redressement ou liquidation judiciaires " ;

2. Considérant que, selon la requérante, en privant certains salariés licenciés dans le cadre d'une procédure collective, quelle que soit leur ancienneté, du bénéfice de l'application des conséquences de la nullité de la procédure de licenciement résultant de l'absence de présentation aux représentants du personnel du plan de reclassement prévu par l'article L. 1233-61 du code du travail, les dispositions du troisième alinéa de l'article L. 1235-10 du même code créent une discrimination entre salariés et portent atteinte au principe d'égalité devant la loi ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : " La loi... doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse " ; que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ;

4. Considérant que l'article L. 1235-11 du code du travail prévoit que l'absence de respect des exigences relatives au plan de reclassement des salariés mentionnés à l'article L. 1235-10 en cas de procédure de licenciement pour motif économique a pour conséquences une poursuite du contrat de travail ou une nullité du licenciement des salariés et une réintégration de ceux-ci à leur demande, sauf si cette réintégration est devenue impossible ; qu'en vertu des dispositions du second alinéa de ce même article, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de son contrat de travail ou lorsque la réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité à la charge de l'employeur qui ne peut être inférieure aux salaires des douze derniers mois ; qu'en application des dispositions contestées, les salariés des entreprises placées en redressement ou en liquidation judiciaires ne peuvent bénéficier de ces dispositions en cas de nullité de la procédure de licenciement en raison de l'absence de présentation aux représentants du personnel du plan de reclassement prévu par l'article L. 1233-61 du code du travail ; qu'en vertu des dispositions de l'article L. 1235-3 du même code, et sans préjudice le cas échéant de l'indemnité de licenciement prévue à son article L. 1234-9, ces salariés peuvent obtenir, à défaut de réintégration dans l'entreprise, une indemnité pour licenciement survenu pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse ; que cette indemnité, à la charge de l'employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois ; qu'en outre, en vertu des dispositions de l'article L. 1235-12 du même code, en cas de non-respect par l'employeur des procédures de consultation des représentants du personnel ou d'information de l'autorité administrative, le juge accorde une indemnité au salarié compris dans un licenciement collectif pour motif économique ; que cette indemnité, à la charge de l'employeur, est calculée en fonction du préjudice subi ;

5. Considérant qu'en limitant les droits des salariés des entreprises visées à l'article L. 1235-10 du code du travail en cas de nullité de la procédure de licenciement du fait de l'absence de présentation aux représentants du personnel du plan de reclassement des salariés prévu à l'article L. 1233-61 du code du travail, lorsque ces entreprises sont en redressement ou en liquidation judiciaires, le législateur a entendu tenir compte de la situation économique particulière de ces entreprises en cessation des paiements ; qu'il a confié au tribunal de commerce le soin de constater cette situation, de prononcer l'ouverture des procédures de redressement et de liquidation judiciaires et d'autoriser les licenciements dans le cadre de celles-ci ; que le législateur s'est fondé sur un critère objectif et rationnel en lien direct avec l'objet des dispositions contestées ; qu'il n'a, dès lors, pas méconnu le principe d'égalité devant la loi ;

6. Considérant que les dispositions contestées ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit ; que, par suite, elles doivent être déclarées conformes à la Constitution,

DÉCIDE :

Article 1er

Le troisième alinéa de l'article L. 1235-10 du code du travail est conforme à la Constitution.

Article 2

La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 28 mars 2013, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI.

Rendu public le 28 mars 2013.

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