Le Quotidien du 31 janvier 2022

Le Quotidien

Droit pénal général

[Brèves] Responsabilité pénale et sécurité intérieure : la loi est publiée

Réf. : Loi n° 2022-52, du 24 janvier 2022, relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure N° Lexbase : L7812MAL

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par Adélaïde Léon

Le 26 Avril 2022

► La limitation de l’irresponsabilité pénale en cas de trouble mental résultant d’une intoxication volontaire, l’augmentation de la répression des atteintes commises contre les forces de sécurité intérieure, la création de la réserve de la police nationale, la modification des cadres juridiques relatifs à la captation d’images par certains services de l’État, et l’amélioration des procédures de jugement des mineurs sont autant de sujets que l’on retrouve dans la loi du 24 janvier 2022 ; un premier aperçu des apports de ce texte-fleuve.

À paraître. Retrouvez, dans le numéro de février de la Revue Lexbase Pénal, un commentaire de la loi n° 2022-52, du 24 janvier 2022, relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure par V. Tellier-Cayrol, Maître de conférences HDR à l’Université de Tours.

Exclusion de l’irresponsabilité pénale et consommation volontaire de substances psychoactives

L’article 122-1 du Code pénal N° Lexbase : L9867I3T prévoit l’irresponsabilité pénale (alinéa 1) ainsi que la diminution de peine (alinéa 2) des personnes qui étaient atteintes, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli leur discernement ou le contrôle de leurs actes.

En réaction à l’affaire « Halimi » (Cass. crim., 14 avril 2020, n° 20-80.135, FS-P+I N° Lexbase : A25434PU), la loi n° 2022-52 du 24 janvier vient ajouter, à la suite de l'article 122-1 :

  • un article 122-1-1 du Code pénal N° Lexbase : L8057MAN écartant l’irresponsabilité pénale prévue par l’alinéa 1er de l’article 122-1 du Code pénal lorsque l’abolition temporaire du discernement de la personne ou du contrôle de ses actes au moment de la commission d’un crime ou d’un délit résulte d’une consommation volontaire de substances psychoactives dans le dessein de commettre une infraction ou d’en faciliter la commission ;
  • un article 122-1-2 du Code pénal prévoyant que la réduction de peine prévue par l’alinéa 2 de l’article 122-1 du Code pénal n’est pas applicable lorsque l’altération du discernement ou du contrôle des actes au moment de la commission de l’infraction résulte d’une consommation volontaire, illicite ou manifestement excessive, de substances psychoactives.

Un second alinéa est ajouté à l’article 706-120 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L8116MAT afin de prévoir qu’au moment du règlement de l’information, si le juge d’instruction estime que l’abolition de discernement du mis en examen résulte au moins partiellement de son fait que s‘il existe une expertise concluant que le discernement était seulement altéré, il renvoie l’intéressé devant la juridiction de jugement compétente qui statue à huis clos sur l’application de l’article 122-1 du Code pénal.

Création d’infractions autonomes d’intoxication volontaire

La loi crée deux infractions punissant le fait pour une personne d'avoir consommé volontairement, de façon illicite ou manifestement excessive, des substances psychoactives en ayant connaissance du fait que cette consommation est susceptible de la conduire à mettre délibérément autrui en danger, lorsque cette consommation a entraîné un trouble psychique ou neuropsychique temporaire sous l'empire duquel elle a commis un homicide volontaire (C. pén., art. 221-5-6 N° Lexbase : L8087MAR) ou des tortures, actes de barbarie ou violences (C. pén., art. 222-18-4 N° Lexbase : L8094MAZ) dont elle est déclarée pénalement responsable en application du premier alinéa de l’article 122-1 du Code pénal.

Les peines prévues pour ces deux infractions sont aggravées lorsque l'infraction a été commise par une personne qui a été précédemment déclarée pénalement irresponsable d'un homicide volontaire en application du premier alinéa de l'article 122-1 en raison d'une abolition de son discernement ou du contrôle de ses actes résultant d'un trouble psychique ou neuropsychique temporaire provoqué par la même consommation volontaire de substances psychoactives.

Renforcement de la répression des atteintes commises contre les forces de sécurité intérieure, professionnels de justice et autres agents de l’État

Un nouvel article 222-14-5 du Code pénal N° Lexbase : L8093MAY crée un délit de violences volontaires commises contre les forces de sécurité intérieure. Les peines prévues pour la répression de cette infraction sont plus importantes que pour le droit commun. Il peut s’agir de violence contre l’agent dans l'exercice ou du fait de ses fonctions mais également lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l'auteur.

D'autres agents de l’État (magistrats, jurés, avocats, officiers publics ou ministériels, membres ou un agents de la Cour pénale internationale, personnes dépositaires de l'autorité publique autres que celles mentionnées à l'article 222-14-5, gardiens) sont également ajoutés à la liste des professionnels. La peine est augmentée lorsqu’ils sont victimes de violences ayant entraîné une ITT de plus de huit jours dans l'exercice ou du fait de ses fonctions, lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l'auteur.

La loi prévoit également le retrait du bénéfice des réductions de peines pour les personnes condamnées à une peine privative de liberté pour une ou plusieurs infractions mentionnées aux articles 221-3 N° Lexbase : L3256IQN, 221-4 N° Lexbase : L8086MAQ, 222-3 N° Lexbase : L6229LLB, 222-8 N° Lexbase : L8060MAR, 222-10 N° Lexbase : L8062MAT, 222-12 N° Lexbase : L8092MAX, 222-14-1 N° Lexbase : L6308L4E , 222-14-5 N° Lexbase : L8093MAY et 222-15-1 N° Lexbase : L6309L4G du Code pénal.

Captation d’images

Tirant les conséquences de la censure du Conseil constitutionnel (Cons. const., décision n° 2021-817 DC, du 20 mai 2021 N° Lexbase : A25374SR), la loi du 24 janvier modifie le cadre juridique de l’utilisation par certains services de l’État dans l’exercice de leurs missions de dispositifs de captation d’images. Sont notamment concernés par ces modifications les dispositifs suivants :

  • les systèmes de vidéosurveillance dans les cellules de garde à vue et de retenue douanière (CSI, art. L. 256-1 N° Lexbase : L8166MAP et s.) ;
  • les caméras aéroportées utilisées par certains services de l’État (CSI, art. L. 242-1 N° Lexbase : L8132MAG et s.). Saisi par les parlementaires, le Conseil constitutionnel avait notamment, dans une décision n° 2021-834 DC, du 20 janvier 2022 N° Lexbase : A83077II, partiellement censuré les dispositions relatives au recours aux drones dans le cadre de la police administrative ;
  • les caméras embarquées dans les véhicules des agents de la police nationale, agents des douanes, militaires de la gendarmerie nationale, sapeurs-pompiers professionnels et volontaires des services d'incendie et de secours ainsi que des personnels des services de l'État et des militaires des unités investis à titre permanent de missions de sécurité civile (CSI, art. L. 243-1 N° Lexbase : L8161MAI et s.).

Amélioration des procédures de jugement des mineurs

Un nouvel article 397-2-1 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L8065MAX fixe les modalités du maintien à disposition de la justice des personnes présentées devant une juridiction qui se déclarerait incompétente du fait de son âge, dans l’attente de leur comparution devant la juridiction compétente.

Recueil d’empreintes et photographie sans le consentement de l’intéressé

Lorsque ces procédés constituent l’unique moyen d’identifier une personne qui est entendue pour un crime ou un délit puni d’au moins trois ans d’emprisonnement et refuse de justifier de son identité ou qui fournit des éléments manifestement inexacts, ces opérations peuvent être effectuées sans le consentement de cette personne, sur autorisation écrite du procureur de la République saisi d’une demande motivée par l’officier de police judiciaire (C. proc. pén., art. 55-1 N° Lexbase : L8169MAS). Le recours à la contrainte doit demeurer strictement nécessaire et proportionné en tenant compte de la vulnérabilité de l’intéressé. La loi prévoit également les modalités des relevés signalétiques concernant les mineurs (CJPM, art. L. 413-16 N° Lexbase : L8188MAI).

On trouvera également les apports suivants :

  • renforcement de la répression en cas de refus d’obtempérer (C. route, art., L. 233-1 N° Lexbase : L8140MAQ et L. 233-1-1 N° Lexbase : L8141MAR) ;
  • création d’une réserve opérationnelle de la police nationale (CSI, art. L. 411-7 N° Lexbase : L0852I7P et s.) ;
  • renforcement du contrôle de l’acquisition et de la détention d’armes notamment par l’autorisation d’une interconnexion entre le casier judiciaire national automatisé et le fichier national des interdits d’acquisition et de détention d’armes (CSI, art. L. 312-3 N° Lexbase : L8097MA7 et s.) ;
  • application, dans certaines circonstances, de l’amende forfaitaire délictuelle au vol portant sur une chose dont la valeur est inférieure ou égale à 300 euros (C. pén., art. 311-3-1 N° Lexbase : L8063MAU) ;
  • renforcement de la répression des rodéos motorisés (C. route, art. L. 321-1-1 N° Lexbase : L6042IAZ).

Pour aller plus loin :

  • J.-C. Saint-Pau, Trouble mental, usage de stupéfiants et irresponsabilité pénale : la raison et l’émotion, Lexbase Pénal, mai 2021 N° Lexbase : N7512BYU ;
  • S. Fucini, L’abolition du discernement par le fait de l’agent : l’actio libera in causa, une alternative à l’irresponsabilité pénale ?, Lexbase Pénal, juillet 2021 N° Lexbase : N8287BYL ;
  • A. Léon, La loi sécurité globale à l’épreuve de la Constitution : censure du célèbre « article 24 » et autres dispositifs controversés, Lexbase Pénal, juin 2021 N° Lexbase : N7602BY9.

newsid:480246

Avocats/Institutions représentatives

[Brèves] Le CNB a qualité à agir en recouvrement de ses propres cotisations

Réf. : Cass. civ. 1, 19 janvier 2022, n° 19-25.772, F-B N° Lexbase : A77147IK

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par Marie Le Guerroué

Le 28 Janvier 2022

Le CNB a qualité à agir en recouvrement des cotisations professionnelles des avocats.

Faits et procédure. Le Conseil national des barreaux avait saisi un tribunal d'instance aux fins de condamnation d’un avocat, à lui payer la somme de 1 590 euros au titre des cotisations dues pour les années 2013 à 2017. L’avocat fait grief au jugement de déclarer recevable l'action formée par le CNB et d'accueillir la demande en paiement, alors que seul le conseil de l'Ordre a qualité à agir en recouvrement des cotisations professionnelles des avocats relevant de ce conseil de l'Ordre. En déclarant recevable l'action du Conseil national des barreaux en recouvrement de cotisations dues par l’avocat, le tribunal a, selon lui, violé les articles 17 et 21-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 N° Lexbase : L6343AGZ, dans leur rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 31 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1169H43.

Réponse de la Cour. C'est à bon droit que le tribunal a retenu que, si le conseil de l'Ordre était, selon l'article 17, 10° de la loi du 31 décembre 1971, chargé d'assurer dans son ressort l'exécution des décisions prises par le CNB, celui-ci avait qualité pour agir en recouvrement de ses propres cotisations. La Cour rejette, par conséquent, le pourvoi.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Le rôle et les missions du Conseil national des barreaux, La représentation de la profession d'avocatin La profession d’avocat, (dir. H. Bornstein), Lexbase N° Lexbase : E34173RY.

newsid:480241

Construction

[Brèves] Contrat de maîtrise d'oeuvre : validité des clauses d’exclusion de solidarité (rappel)

Réf. : Cass. civ. 3, 19 janvier 2022, n° 20-15.376, FS-B+R N° Lexbase : A77127IH

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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC et Paris Saclay, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

Le 28 Janvier 2022

► La clause limitative de responsabilité de droit commun dans un contrat de maîtrise d’œuvre est valide, dès lors qu’elle n’a pas pour effet de priver le maître d’ouvrage de son droit à réparation ;
► la clause d’exclusion n’est privée d’effet qu’en cas de faute lourde.

Il est notable que, dans le cadre du recours entre coobligés à la dette, la jurisprudence se montre bien plus souple dans l’appréciation de la validité de la clause limitative de responsabilité que lorsque le maître d’ouvrage agit contre le constructeur. Par exemple, dans un arrêt rendu le 7 mars 2019 (Cass. civ. 3, 7 mars 2019, n° 18-11.995, F-D N° Lexbase : A0155Y37), la Cour de cassation a clairement dit que la clause, en l’espèce stipulée dans un contrat de maîtrise d’œuvre, excluant l’in solidum avant réception, n’était pas abusive.

Il se trouve que les contentieux relatifs au contrat de maîtrise d’œuvre ont servi d’occasion à la Cour de cassation pour venir préciser la validité des clauses limitatives de responsabilité. Les clauses du contrat de maîtrise d’œuvre type, disponible sur le site de l’Ordre des architectes, excluant les conséquences de la responsabilité solidaire et in solidum sont, en effet, valides dès lors que la responsabilité du maître d’œuvre est recherchée sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun a rappelé la troisième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt rendu ce 14 février 2019 (Cass. civ. 3, 14 février 2019, n° 17-26.403, FS-P+B+I N° Lexbase : A0321YX8). La jurisprudence a déjà pu consacrer ce principe (Cass. civ. 3, 19 mars 2013, n° 11-25.266 N° Lexbase : A6031KAM et Cass. civ. 3, 17 octobre 2019, n° 18-17.058, F-D N° Lexbase : A9277ZRZ).

Les clauses d’exclusion d’in solidum et de solidarité sont donc valides. Bien entendu, cette clause ne s’applique que lorsque la responsabilité de l’architecte est recherchée sur le fondement du droit commun de l’action en contribution à la dette exercée par les locateurs d’ouvrage les uns contre les autres. La position de la Haute juridiction a été confirmée les 7 mars 2019 (Cass. civ. 3, 7 mars 2019, n° 18-11.995, F-D N° Lexbase : A0155Y37) et le 17 octobre 2019 (Cass. civ. 3, 17 octobre 2019, préc.).

La présente décision n’est donc pas une surprise.

Le contrat de maîtrise d’œuvre stipule, en l’espèce, une clause prévoyant que l’architecte ne pourra être tenu responsable ni solidairement ni in solidum des fautes commises par d’autres intervenants à l’opération de construction.

La Haute juridiction rappelle que cette clause :

- ne limite pas la responsabilité de l’architecte tenu de réparer les conséquences de sa propre faute ;

- ne prive pas le maître d’ouvrage de son droit à réparation.

Il faut, toutefois, voir dans cette décision une occasion manquée de la Haute juridiction de se prononcer sur la validité de cette clause au regard des dispositions relatives aux clauses abusives.

Avis aux plaideurs… (V. sur la question, J. Mel, Vie et mort de la clause limitative de responsabilité du constructeur, Lexbase, Hebdo Droit privé, n° 808, 9 janvier 2020 N° Lexbase : N1766BY3).

newsid:480214

Droit rural

[Textes] Régulation du foncier agricole au travers de structures sociétaires

Réf. : Loi n° 2021-1756, du 23 décembre 2021, portant mesures d’urgence pour assurer la régulation au foncier agricole au travers de structures sociétaires N° Lexbase : L0864MAA

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N0225BZD

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par Christine Lebel, Maître de conférences HDR en Droit privé, Université de Bourgogne Franche-Comté, CRJFC, F-25000, Besançon, France

Le 28 Janvier 2022

Mots-clés : SAFER • droit de préemption • société • cession de droits sociaux • immeuble à usage agricole

La loi du 23 décembre 2021 vise à réguler l’accès au foncier à travers les sociétés d’exploitation et les sociétés foncières. Le législateur crée un nouveau dispositif de régulation au moyen de l’obtention d’une autorisation administrative délivrée au cessionnaire de droits sociaux lorsque l’opération projetée risque une concentration excessive de biens immobiliers agricoles ou à usage agricole. Ce dispositif est coordonné avec le contrôle des structures et la demande initiale est instruite par la SAFER puis transmise au préfet compétent territorialement.  Toute opération faite en contravention avec le dispositif encourt la nullité.


 

Le modèle de l’exploitation agricole de type familial sur lequel a été construit l’essentiel des règles spécifiques du droit rural est train d’évoluer profondément. Le monde agricole connaît depuis plusieurs années un changement de paradigme. Selon les sociologues, « on souligne de plus en plus nettement la diversité des exploitations, et la pénétration du capitalisme dans la sphère agricole est relevée. Mais le caractère familial de l’activité elle-même demeure un référent constant : les statistiques le confirment, le discours syndical le revendique et les politiques publiques le consacrent » [1]. En outre, dans les dix années à venir, environ un tiers des exploitants agricoles vont partir en retraite et ne seront pas remplacés par des jeunes agricoles. Ainsi, selon les travaux parlementaires [2], se produit un accaparement [3] des terres agricoles au détriment des candidats à l’installation. Un tel phénomène provoque une forme de concurrence déséquilibrée pour l’accès à la terre. La concentration excessive des exploitations conduit souvent à la monoculture et à des pratiques agricoles qui appauvrissent les sols. La diversité des productions, la souveraineté alimentaire en sont affectées, avec des conséquences non négligeables sur la biodiversité. Enfin, le Parlement européen, dans une résolution du 27 avril 2017 « demande que les surfaces agricoles bénéficient d’une protection particulière afin que les États membres, en coordination avec les autorités locales et les organisations d’agriculteurs, puissent réglementer la vente, l’utilisation et la location des terres agricoles afin de garantir la sécurité alimentaire dans le respect des traités ».

Dans ce contexte, une proposition de loi portant mesures d’urgence pour assurer la régulation de l’accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires [4] , déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale[5], a été définitivement adoptée le 13 décembre 2021 et publiée le 23 décembre suivant. L’article premier de la loi n° 2021-1756, du 23 décembre 2021 N° Lexbase : L0864MAA complète le Titre III au Livre III du Code rural et de la pêche maritime en y ajoutant un chapitre III composé des articles L. 333-1 à 333-5 (art 1er), elle abroge l’article L. 143-15-1 de ce code issu de la loi n° 2017-348, du 20 mars 2017 relative à la lutte contre l’accaparement des terres agricoles N° Lexbase : L3062LDR (art. 2) et comporte diverses mesures d’adaptation en matière de droit de préemption de la SAFER et du contrôle des structures. Son entrée en vigueur nécessite la rédaction d’un décret dont la parution sera opérée au plus tard le 1er juillet 2022.

Finalité. Le nouveau dispositif « vise à favoriser l'installation d'agriculteurs, la consolidation d'exploitations agricoles et le renouvellement des générations agricoles en luttant contre la concentration excessive des terres et leur accaparement. Il contribue à la souveraineté alimentaire de la France et tend à faciliter l'accès au foncier, notamment en contrôlant le respect des prix du marché foncier local » [6].

Cession de droits sociaux soumise à autorisation administrative.  La prise de contrôle d'une société possédant ou exploitant des biens immobiliers à usage ou à vocation agricole, au sens de l'article L. 143-1 du Code rural et de la pêche maritime N° Lexbase : L0611LZN [7], réalisée par une personne physique ou morale qui détient déjà, dans les conditions prévues au III du présent article, directement ou indirectement, en propriété ou en jouissance, des biens de même nature dont la superficie totale excède un seuil d'agrandissement significatif ou qui, une fois réalisée la prise de contrôle, détiendrait une superficie totale excédant ce seuil, est soumise à l'autorisation préalable du représentant de l'État dans le département [8].

Autrement dit, un contrôle administratif préalable est réalisé pour toutes les opérations portant sur le capital social d’une société exploitante ou d’une société foncière dès que celles-ci auront pour effet de conférer au titulaire des parts ou au cessionnaire, directement ou indirectement, en propriété ou en jouissance des immeubles agricoles ou à vocation agricole dépassant un certain seuil qualifié par le législateur de « seuil d’agrandissement excessif ».

On relèvera que le texte nouveau n’exige pas que la société cible ait un objet social exclusivement d’exploitation agricole ou de propriété foncière agricole. Il ne sera pas nécessaire également que les immeubles agricoles soient prépondérants dans le patrimoine social. On soulignera sur ce point, le fait que le législateur a également modifié l’article L. 141-1, II, 3° du Code rural et de la pêche maritime N° Lexbase : L1663MAT [9], élargissant ainsi le domaine des missions de la SAFER. De même, la forme juridique de la société importe peu (société agricole, société civile ou société de forme commerciale).

Notion de seuil d’agrandissement significatif. Le seuil d’agrandissement significatif constitue la frontière entre les cessions de droits sociaux pour lesquelles aucune autorisation administrative ne sera nécessaire, et celles pour lesquelles, l’autorisation sera indispensable. Ainsi, dans le premier cas, l’agrandissement de la surface exploitée sera positif, dans le second, il sera très probablement excessif, et dans le doute, un contrôle administratif sera diligenté par la SAFER qui traitera la demande au nom et pour le compte de l’État dans le département [10] avant de la transmettre à l’autorité administrative.

Cette notion est précisée à l’article L. 333-2, II et III du Code rural et de la pêche maritime N° Lexbase : L1659MAP. Ainsi, ce seuil est fixé en hectares par le préfet de région. Il est fixé par région naturelle ou par territoire présentant une cohérence en matière agricole [11]. Il est compris entre une fois et demie et trois fois la surface agricole utile régionale moyenne fixée dans le schéma directeur régional des exploitations agricoles [12]. En outre, le seuil d'agrandissement significatif applicable est celui fixé par le représentant de l'État dans la région du lieu où se trouve la plus grande superficie de terres détenues ou exploitées par la société faisant l'objet de la prise de contrôle.

Le seuil d'agrandissement significatif est apprécié en additionnant la superficie de tous les biens immobiliers à usage ou à vocation agricole, toutes productions confondues, que la personne physique exploite ou possède, directement ou indirectement par l'interposition d'une ou de plusieurs personnes morales qu'elle contrôle au sens de ce dispositif. De plus, lorsque des biens immobiliers à usage ou à vocation agricole se caractérisent par des natures de culture différentes, les équivalences prévues par le schéma directeur régional des exploitations agricoles pour le calcul du seuil d'agrandissement significatif doivent être respectées.

Lorsque le cessionnaire est une personne morale, sa situation est appréciée à l'égard de toutes les personnes physiques qui la contrôlent, au sens des articles L. 233-3 N° Lexbase : L5817KTM et L. 233-4 du Code de commerce N° Lexbase : L6307AIG. En cas d'interposition d'une ou de plusieurs personnes morales, la situation est appréciée à l'égard de toutes les personnes physiques qui contrôlent en dernier lieu, directement ou indirectement, la personne morale acquéreur. Lorsque le cessionnaire est une personne physique, on prend en compte la superficie de la totalité des biens immobiliers, sans tenir compte de son régime matrimonial ni du fait qu'il ne détient que des droits indivis ou démembrés sur les immeubles faisant l'objet du calcul.

Toutefois, pour déterminer le seuil d’agrandissement, ne sont pas comptabilisés les biens immobiliers classés en nature de bois et forêts au cadastre à moins qu’ils ne servent de support d'une activité agricole au sens de l'article L. 311-1 du Code rural et de la pêche maritime N° Lexbase : L3233LQS ou bien qu’ils aient fait l'objet d'une autorisation de défrichement liée à des activités agricoles.

Cessionnaire devant obtenir l’autorisation administrative. Quant à la qualité de la personne devant obtenir l’autorisation administrative, il s’agit d’un cessionnaire des droits sociaux qui va prendre le contrôle de la société grâce à l’acquisition de ces droits sociaux, ou le renforcera. Sur ce point, le législateur s’est référé aux articles L. 233-3 N° Lexbase : L5817KTM  et L. 233-4 du Code de commerce N° Lexbase : L6307AIG, selon lequel une personne contrôle une société dès lors qu’elle détient plus de 40 % des droits de vote et qu’aucun autre associé ne détient directement ou indirectement une fraction supérieure (C. rur., art. L.333-2, IV N° Lexbase : L1659MAP).

Toutefois, certaines opérations sont formellement exclues [13] :

- les opérations d'acquisition et de rétrocession, par cession ou substitution, réalisées à l'amiable par les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural dans le cadre de leurs missions légales ou lors de l'exercice de leur droit de préemption en application des articles L. 143-1 à L. 143-16 [14] du Code rural et de la pêche maritime ;

- les opérations réalisées à titre gratuit ;

- les cessions de parts sociales ou d'actions entre époux, personnes liées par un pacte civil de solidarité, parents ou alliés jusqu'au quatrième degré inclus, à condition que le cessionnaire s'engage soit à participer effectivement à l'exploitation des biens immobiliers détenus ou exploités par la société, dans les conditions prévues à l'article L. 411-59 du Code rural et de la pêche maritime N° Lexbase : L0866HPR, et à conserver la totalité des titres sociaux acquis pour une durée d'au moins neuf ans à compter de la date de la cession, soit à mettre à bail lesdits biens immobiliers au profit d'un locataire s'engageant à participer effectivement, dans les conditions prévues au même article L. 411-59, à l'exploitation de ces biens pendant une durée d'au moins neuf ans ;

- les cessions entre associés ou actionnaires détenant, depuis au moins neuf ans, des titres sociaux dans la société faisant l'objet de la prise de participation complémentaire et participant effectivement, au sens dudit article L. 411-59, à l'exploitation des immeubles que ladite société met en valeur. Lorsque la cession des titres sociaux fait suite à une maladie ou à un accident entraînant une invalidité totale et définitive, le cessionnaire est exempté de la condition d'ancienneté dans la société, dans des conditions définies par le décret prévu à l'article L. 333-5 N° Lexbase : L1662MAS, dont la parution doit intervenir au cours du second semestre 2022.

Formalités relatives à la demande d’autorisation administrative. Elles seront essentiellement précisées dans le décret devant être publié au plus tard au 1er juillet 2022. D’ores et déjà le législateur a prévu que la demande d’autorisation doit être fusionnée avec l’obligation de déclaration préalable (DIA) qui existe déjà. Afin de faciliter la transmission des informations, l’obligation déclarative et la demande d’autorisation ne pourront être réalisées que par voie électronique. La demande est traitée par la SAFER, au nom et pour le compte du représentant de l'État dans le département, qui après avoir vérifié la régularité et le caractère complet de la demande, en accuse réception au demandeur et la transmet au préfet. Les frais de dossier doivent être fixés par un arrêté du ministre chargé de l’Agriculture, non paru à ce jour : il s’agit d’un tarif national devant s’appliquer identiquement sur l’ensemble du territoire national.

Sanctions de la cession opérée sans autorisation administrative. Toute opération réalisée en violation du nouveau dispositif est nulle. L'action en nullité peut être exercée par le préfet, d'office ou à la demande de la SAFER à laquelle la demande d'autorisation devait être adressée. Elle se prescrit par douze mois à compter du jour où l'opération est connue de l'autorité administrative compétente.

De plus, le préfet peut, d'office ou à la demande de toute personne y ayant intérêt, prononcer une amende administrative égale au moins au montant fixé à l'article 131-13 du Code pénal N° Lexbase : L0781G8G pour les contraventions de la cinquième classe et au plus à 2 % du montant de la transaction concernée. Dans ce cas, l'autorité administrative compétente doit préalablement aviser l'auteur du manquement des faits relevés à son encontre, des dispositions qu'il a enfreintes et des sanctions qu'il encourt. Elle lui fait connaître le délai dont il dispose pour faire valoir ses observations écrites et, le cas échéant, les modalités selon lesquelles il peut être entendu s'il en fait la demande. Elle l'informe de son droit à être assisté du conseil de son choix. La décision de sanction ne peut être prise plus d'un an après la constatation des faits [15].

Après avoir mis en avant des objectifs vertueux, le législateur a mis en place un dispositif très complexe. Dans l’attente des dispositions réglementaires nécessaires pour appréhender la totalité de ce dernier, on relèvera que les opérations intrafamiliales sont envisagées de façon restrictive, à l’heure où les groupements fonciers agricole constitués dans les années 1970 sont en phase de remise en cause, les descendants des fondateurs de la société souhaitant se retirer : quatre degrés de parenté est un critère étroit. En outre, n’est-il pas illusoire de penser que la délivrance d’une autorisation administrative permettra de rendre plus attractive la profession agricole ? La problématique du renouvellement des générations chez les exploitants agricoles ne peut se résumer à la seule question de l’accès au foncier et il aurait été plus judicieux de porter le contrôle sur un véritable projet d’entreprise agricole [16], afin de vérifier la pérennité de l’exploitation à l’occasion d’un changement d’exploitant et éviter le plus possible le risque de défaillance financière.

 

[1] B. Hervieu, « Préface », in Fr. Purseigle et al., Le nouveau capitalisme agricole, Presses de Sciences Po, « Académique », 2017, pp. 9-12.

[2] Rapport fait au nom de la commission des affaires économiques sur la PPL par J.B. Sempastous, n° 4151.

[3] La signification ancienne de l’accaparement « renvoie à l’idée d’appropriation excessive d’un bien de consommation afin de renchérir le prix de celui-ci » (guide de l’agriculture et de la forêt sous dir.  H. Bosse-Platière et de B. Grimonprez, LexisNexis 2018-2019.

[4] PPL n° 3853.

[5] Déposée le 12 mai 2021.

[6] C. rur., art. L. 333-1 N° Lexbase : L1658MAN.

[7] Il s’agit des biens immobiliers à usage agricole et des biens mobiliers qui leur sont attachés ou de terrains nus à vocation agricole ainsi que les bâtiments d'habitation faisant partie d'une exploitation agricole principalement. Globalement ce sont tous les biens sur lesquels la SAFER peut exercer son droit de préemption.

[8] C. rur., art. L. 333-2, I N° Lexbase : L1659MAP.

[9] Loi n° 2021-1756, du 23 décembre 2021, portant mesures d’urgences pour assurer la régulation de l’accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires N° Lexbase : L0864MAA, art. 3 ; cf. Ch. Gourgues, Faute de grives.., Edito Solution Notaire Hebdo 20 janvier 2022, n° 2.

[10] C. rur., art. L. 333-3, I N° Lexbase : L1660MAQ.

[11] Conformément à l’article L. 333-5 du Code rural et de la pêche maritime N° Lexbase : L1662MAS.

[12] C. rur., art. L. 312-1, II N° Lexbase : L1665MAW.

[13] C. rur., art. L. 333-2, V N° Lexbase : L1659MAP.

[14] Avec l'accord préalable exprès des commissaires du Gouvernement. Il s’agit des opérations dont le montant est supérieur à 180 000 euros (C. rur., art. R. 141-10 N° Lexbase : L5003AEZ et arrêté du 17 novembre 2021, modifiant l' arrêté du 16 juin 1962 portant application du décret n° 61-610 du 14 juin 1961 relatif aux SAFER N° Lexbase : L4089L9C.

[15] C. rur., art. L. 333-2, I N° Lexbase : L1659MAP.

[16] En ce sens, Ch. Gourgues, précité.

newsid:480225

Durée du travail

[Brèves] Réparation d’un préjudice né du dépassement de la durée maximale de travail

Réf. : Cass. soc., 26 janvier 2022, n° 20-21.636, FS-B N° Lexbase : A53037KM

Lecture: 2 min

N0242BZY

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par Lisa Poinsot

Le 28 Janvier 2022

Le seul fait de constater le dépassement de la durée maximale de travail ouvre droit à réparation, c’est-à-dire au versement de dommages-intérêts, sans que le salarié ait besoin de rapporter la preuve d’un préjudice.

Faits et procédure. Un salarié, engagé en qualité de chauffeur-livreur, voit sa période d’essai rompue par l’employeur en raison d’une insuffisance de résultats. L’employeur saisit la juridiction prud’homale aux fins de demander le remboursement de salaire trop-perçu par le salarié. Ce dernier demande le versement de dommages-intérêts pour violation de la durée maximale du travail.

La cour d’appel (CA Bastia, 27 mars 2019, n° 17/00373 N° Lexbase : A3756Y7A) déboute le salarié de sa demande aux motifs que ce dernier n’a pas suffisamment démontré l’existence d’un préjudice né du dépassement de la durée maximale de travail.

Le salarié forme alors un pourvoi en cassation.

La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation censure le raisonnement de la cour d’appel en appliquant l’article L. 3121-35, alinéa 1er du Code du travail N° Lexbase : L6878K9M dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 N° Lexbase : L8436K9C et interprété à la lumière de la Directive n° 2003/88 du 4 novembre 2003 N° Lexbase : L5806DLM selon laquelle le dépassement de la durée moyenne maximale de travail hebdomadaire cause nécessairement un préjudice au salarié puisqu’il porte atteinte à la santé et la sécurité de ce dernier.

Pour aller plus loin :

  • la CJUE s’est auparavant penchée sur cette question. Elle affirme que la preuve d’un préjudice causé par le dépassement de la durée moyenne maximale de travail n’est pas nécessaire puisque ce dépassement prive le salarié de la prise d’un repos suffisant (CJUE, 14 octobre 2010, aff. C-243/09 N° Lexbase : A7318GBN). Le mode de calcul de cette réparation est fixé par le droit interne tout comme le mode de réparation du préjudice (CJUE, 25 novembre 2010, aff. C-429/09 N° Lexbase : A3327GLS, Durée maximale hebdomadaire de travail : réparation du dommage causé, Lexbase Social, décembre 2010, n° 419 N° Lexbase : N7031BQH) ;
  •  v. ÉTUDE : Les durées hebdomadaire et quotidienne de travail, La durée maximale hebdomadaire, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E0333ETI.

newsid:480242

Élections professionnelles

[Brèves] Précisions sur les modalités des opérations de vérification des urnes électroniques lors de élections professionnelles du CSE

Réf. : Cass. soc., 19 janvier 2022, n° 20-17.076, FS-B N° Lexbase : A77077IB

Lecture: 2 min

N0189BZZ

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par Lisa Poinsot

Le 26 Janvier 2022

Les opérations de test et de vérification préalable au scellement du système de vote des représentants du personnel du CSE n’ont pas à être réalisées immédiatement avant l’ouverture du scrutin, publiquement et en présence des représentants des listes.

Faits et procédure. Le premier tour des élections des représentants du personnel du CSE au sein d’une entreprise s’est déroulé par vote électronique. Le tribunal d’instance a été saisi par requête du syndicat CGT en annulation de ce premier tour.

Le tribunal judiciaire (TJ Bordeaux, 25 juin 2020) a annulé le premier tour de ces élections au motif que les opérations de vérification des urnes électroniques devraient être réalisées publiquement, en présence des représentants de liste ou ceux-ci dûment invités et immédiatement avant l’ouverture du scrutin.

La société forme dès lors un pourvoi en cassation.

La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation censure le raisonnement du tribunal judiciaire en affirmant que si le Code électoral N° Lexbase : L2790AAL prévoit que, dans les bureaux de vote dotés d'une machine à voter, le bureau de vote s'assure publiquement, avant le commencement du scrutin, que la machine fonctionne normalement et que tous les compteurs sont à la graduation zéro, cette disposition n'est pas applicable au vote électronique dans le cadre des élections des représentants du personnel du CSE.

Pour aller plus loin :

  • S. Mraouahi, La démocratie sociale à l’ère numérique : regards croisés autour du vote électronique, Lexbase Social, mai 2019, n°783 N° Lexbase : N8968BXG.
  • v. ETUDE : Le déroulement des élections des membres de la délégation du personnel au comité social et économique, Le recours au vote électronique, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E2092GAQ.

 

newsid:480189

Fonction publique

[Brèves] « Non-Danthonysation » de l’absence de vote du médecin siégeant à la commission de réforme statuant sur l'imputabilité au service d’une maladie contractée par un agent des administrations parisiennes

Réf. : CE 5° et 6° ch.-r., 27 décembre 2021, n° 439296, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A44887HP

Lecture: 3 min

N0182BZR

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par Yann Le Foll

Le 25 Janvier 2022

► La présence, au sein de la commission de réforme appelée à statuer sur l'imputabilité au service de la maladie contractée par un agent des administrations parisiennes d’un médecin spécialiste ne prenant pas part au vote, ne prive pas l’agent d’une garantie, au sens de la jurisprudence « Danthony ».

Rappel. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de cette décision ou s'il a privé les intéressés d'une garantie.

Il résulte de l'article 31 du décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 (N° Lexbase : L0974G8L) et des articles 27 et 30 de l'arrêté du 4 août 2004 (N° Lexbase : C34874XG), que doit être présent, au sein de la commission de réforme appelée à statuer sur l'imputabilité au service de la maladie contractée par un agent des administrations parisiennes, en plus des deux praticiens de médecine générale, un médecin spécialiste de la pathologie invoquée par l'agent qui, s'il participe aux échanges de la commission, ne prend pas part au vote de son avis. 

Principe. La garantie qui résulte de ces dispositions constitue pour l'agent le fait que la commission de réforme soit éclairée par un médecin spécialiste de sa pathologie. Dès lors, dans l'hypothèse où, en dépit de l'absence au sein de la commission d'un médecin spécialiste de la pathologie de l'agent, la commission dispose de plusieurs certificats médicaux rédigés par des médecins psychiatres ainsi que d'un rapport d'expertise récent établi par un psychiatre ayant examiné l'agent, celui-ci ne peut être regardé comme ayant été effectivement privé d'une garantie au sens de la jurisprudence « Danthony » (Cf. CE, Ass., 23 décembre 2011, n° 335033 N° Lexbase : A9048H8M).
En cause d’appel. Pour juger que l'absence de médecin spécialiste en psychiatrie lors de la réunion du 3 mai 2016 au cours de laquelle la commission de réforme a examiné la situation de l’agente n'avait pas privé cette dernière d'une garantie au sens du principe précité, la cour administrative d'appel (CAA Paris, 31 décembre 2019, n° 18PA00087 N° Lexbase : A69043AX) s'est fondée sur ce que la commission disposait de plusieurs certificats médicaux rédigés par des médecins psychiatres, ainsi que d'un rapport d'expertise récent établi par un psychiatre ayant examiné l’intéressée en février 2016.

Solution. En jugeant que la procédure suivie devant la commission de réforme n'avait, compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, pas effectivement privé l’agente de la garantie, qui résulte des textes précités, que constitue pour l'agent le fait que la commission de réforme soit éclairée par un médecin spécialiste de sa pathologie, la cour n'a pas commis d'erreur de droit.

Pour aller plus loin :

  • v. ÉTUDE, Les positions stautaires, Les hypothèses de disponibilité in Droit de la fonction publique (dir. P. Tifine) N° Lexbase : E06623NT.

newsid:480182

Procédure pénale

[Brèves] Révocation du sursis mise à l’épreuve : modalités et preuve de la convocation de l’avocat devant la chambre de l’application des peines

Réf. : Cass. crim., 5 janvier 2022, n° 21-83.378, F-B N° Lexbase : A42247HW

Lecture: 4 min

N0231BZL

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par Adélaïde Léon

Le 27 Janvier 2022

► La chambre de l'application des peines, saisie de l'appel du jugement prononçant la révocation d'un sursis avec mise à l'épreuve, statue par arrêt motivé après un débat contradictoire au cours duquel sont, notamment, entendues les observations de l'avocat du condamné, qui doit être convoqué par lettre recommandée ou par télécopie, au plus tard quinze jours avant ledit débat ; encourt la cassation l’arrêt de la chambre de l’application des peines qui confirme le jugement révoquant une mesure de sursis avec mise à l’épreuve après un débat tenu en l’absence du condamné et de son avocat sans faire mention de la convocation de ce dernier.

Rappel de la procédure. Un individu a été condamné à six mois d’emprisonnement avec sursis et mise à l’épreuve pendant dix-huit mois. Des rapports d’incidents ont mis en évidence que l’intéressé ne respectait pas les obligations qui lui avaient été notifiées.

Après un débat contradictoire tenu en présence du condamné et de son avocat, le juge de l’application des peines (JAP) a ordonné la révocation totale de la mesure de sursis avec mise à l’épreuve.

L’intéressé a relevé appel de ce jugement.

En cause d’appel. La chambre d’application des peines a ordonné la révocation totale du sursis avec mise à l’épreuve devenu sursis probatoire assortissant la peine de six mois d’emprisonnement avec sursis et mise à l’épreuve prononcée contre lui.

Le condamné a formé un pourvoi contre ce dernier arrêt.

Moyens du pourvoi. Il était reproché à l’arrêt attaqué d’avoir confirmé en toutes ses dispositions le jugement du JAP alors que l’audience s’était tenue hors la présence du condamné et de son avocat, ce dernier n’ayant pas été convoqué, la méconnaissance de cette formalité ayant porté atteinte aux droits de la défense.

Décision. La Chambre criminelle casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt attaqué au visa des articles 712-3 N° Lexbase : L0643LTY et D. 49-42 N° Lexbase : L4777HZX du Code de procédure pénale relatifs à la composition de la chambre de l’application des peines et au déroulement de l’audience.

Reprenant la formule d’un arrêt de 2013 (Cass. crim., du 29 mai 2013, n° 20-85.117, F-P+B N° Lexbase : A5763KGK), la Cour rappelle qu’il résulte de ces dispositions que la chambre de l’application des peines, saisie de l’appel du jugement prononçant la révocation d’un sursis avec mise à l’épreuve, statue par arrêt motivé après un débat contradictoire au cours duquel sont notamment entendues les observations de l’avocat du condamné, qui doit être convoqué par lettre recommandée ou télécopie, au plus tard, quinze jours avant ledit débat.

En l’espèce, la chambre de l’application des peines a confirmé le jugement révoquant la mesure de sursis avec mise à l’épreuve après un débat tenu en l’absence du condamné et de l’avocat qui l’avait assisté en première instance. Or, l’arrêt n’indique pas que cet avocat avait été convoqué à l’audience de la chambre de l’application des peines. Cette dernière a donc méconnu les textes susvisés.

Portée de la cassation. Appliquant l’article 132-52 du Code pénal N° Lexbase : L7633LPE, dans sa rédaction issue de la loi n° 2019-222, du 23 mars 2019 N° Lexbase : L6740LPC, entrée en vigueur le 24 mars 2020, la Cour juge que la cassation interviendra avec renvoi dès lors que le caractère non avenu de la condamnation ne fait pas obstacle à la prolongation ou à la révocation totale ou partielle du sursis probatoire, en cas d'infraction ou de manquement aux obligations commis avant l'expiration du délai de probation, et qu'en l'espèce, plusieurs rapports d'incidents ont été transmis au juge de l'application des peines, entre juin et octobre 2020, avant la fin du délai d'épreuve, le 12 février 2021.

Pour aller plus loin : A. Ponseille, ÉTUDE : La peine privative de liberté, Le cadre général du sursis probatoire, in Droit pénal général, (dir. J.-B. Perrier), Lexbase N° Lexbase : E2969GA9.

newsid:480231

[Brèves] Appréciation de la disproportion du cautionnement : modalités de prise en compte des parts sociales détenues par la caution dans la société cautionnée

Réf. : Cass. com., 19 janvier 2022, n° 20-18.670, F-D (N° Lexbase : A19637KW)

Lecture: 3 min

N0195BZA

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par Vincent Téchené

Le 26 Janvier 2022

► La disproportion manifeste d'un engagement de caution s'infère de la comparaison entre le montant de l'engagement litigieux et les revenus et le patrimoine de la caution, dont les parts sociales détenues par cette dernière, au jour de son engagement dans le capital de la société cautionnée, font partie ;

La valeur des parts sociales dont est titulaire la caution dans la société cautionnée doit prendre en compte l'ensemble des éléments d'actif de cette société, comprenant notamment ceux qui composent le fonds de commerce lui appartenant, et de son passif externe.

Faits et procédure. Une banque a consenti à une société, exploitant un fonds de commerce de pharmacie, un prêt de consolidation de trésorerie, la gérante ayant, par un cautionnement solidaire, garanti le remboursement du prêt. Les échéances du prêt n'étant pas toutes honorées, la banque a prononcé la déchéance du terme du prêt puis a, parmi d'autres, cédé sa créance à un fonds commun de titrisation. Ce dernier, représenté par sa société de gestion, a assigné en paiement la caution qui lui a opposé la disproportion de son engagement.

L'arrêt d’appel ayant retenu le caractère manifestement disproportionné du cautionnement, le fonds commun s’est pourvu en cassation.

Décision. Pour ce faire, l’arrêt d’appel avait retenu que si la caution est propriétaire de la totalité des 750 parts sociales composant le capital de la société cautionnée, il n'y a lieu de prendre en considération, ni la valeur du fonds de commerce exploité par la société, qui n'appartient pas à la caution mais à la société, ni le chiffre d'affaires ou même le résultat net de cette dernière, qui constituent les revenus de la société, ne pouvant se confondre avec ceux de la caution.

La Cour de cassation énonçant la solution précitée, censure l’arrêt d’appel.

Observations. La Cour de cassation a déjà précisé que les parts sociales et la créance inscrite en compte courant d'associé dont est titulaire la caution au sein de la société cautionnée font partie du patrimoine devant être pris en considération pour l'appréciation de ses biens et revenus à la date de la souscription de son engagement (Cass. com., 26 janvier 2016, n° 13-28.378, FS-P+B N° Lexbase : A3420N7S).

En outre, ici, la réforme du droit des sûretés opérée par l’ordonnance du 15 septembre 2021 (ordonnance n° 2021-1192 N° Lexbase : L8997L7D ; v. Dossier spécial « La réforme du droit des sûretés par l'ordonnance du 15 septembre 2021 », Lexbase Affaires, octobre 2021, n° 691 N° Lexbase : N8992BYP) ne modifie en rien la solution (v. not. G. Piette, Réforme du droit des sûretés par l’ordonnance du 15 septembre 2021 : formation et étendue du cautionnement, in « Dossier spécial » préc., Lexbase Affaires, octobre 2021, n° 691 N° Lexbase : N8978BY8).

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Proportionnalité et cautionnement, Les éléments pris en considération pour apprécier la proportionnalité du cautionnement, in Droit des sûretés, (dir. G. Piette), Lexbase N° Lexbase : E2227GAQ.

 

newsid:480195

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