La lettre juridique n°865 du 20 mai 2021 : Droit pénal général

[Jurisprudence] Trouble mental, usage de stupéfiants et irresponsabilité pénale : la raison et l’émotion

Réf. : Cass. crim., 14 avril 2021, n° 20-80.135, FS-P+I (N° Lexbase : A25434PU)

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par Jean-Christophe Saint-Pau, Professeur à l’Université de Bordeaux (ISCJ), Doyen de la faculté de droit et science politique, Président de l’Association française de droit pénal, Président de la conférence des doyens

le 19 Mai 2021


Mots-clés : trouble psychique • non-imputabilité • non-culpabilité • défense d'aliénation mentale • défense d'intoxication • droit pénal canadien • origine fautive • stupéfiants • intention • imprudence • discernement • abolition • expertise médicale

Selon la Cour de cassation, l’article 122-1 du Code pénal ne distingue pas selon l’origine du trouble ayant aboli le discernement. Il s’en suit que le texte vise indifféremment le trouble pathologique et toxicologique, alors qu’il serait possible, à l’instar du droit canadien, de distinguer une maladie mentale et une intoxication, et ainsi une cause de non-imputabilité excluant tout procès et une cause de non-culpabilité supposant une discussion contradictoire devant une juridiction de jugement. L’irresponsabilité pénale fondée sur un trouble toxicologique s’étend certainement aux infractions intentionnelles qui ne peuvent être caractérisées en raison de la faute antérieure de l’agent, mais la responsabilté pénale pour une infraction non intentionnelle, et en particulier l’homicide involontaire, reste envisageable sur le fondement de l’intoxication volontaire qui peut constituer une faute délibérée ou caractérisée ayant contribué à créer une situation ayant permis la réalisation du dommage.

L’indifférence de l’origine toxicologique et fautive du trouble s’explique par la prépondérance de l’abolition du discernement au moment des faits. La responsabilité pénale suppose, au-delà de la simple perception du réel, la capacité de discerner le bien du mal, et ainsi une conscience infractionnelle. C’est cette aptitude morale qui justifie l’irresponsabilité de l’agent qui, pourtant, a bien eu conscience de la matérialité de ses actes, et de la religion de sa victime, sans toutefois y donner un sens rationnel. L’abolition de cette aptitude, qui doit être démontrée par la personne poursuivie, est appréciée souverainement par les juges du fond qui doivent se livrer à une analyse concrète. La conviction du juge ne peut résulter de la simple appartenance d’une pathologie à un classement médical, et n’est pas liée par un rapport d’expertise. C’est au regard de la convergence des rapports des sept experts, concluant à une bouffée délirante de l’agent au moment des faits, que l’irresponsabilité pénale est constatée, en même temps que la commission des faits, présentant la figure d’un meurtre antisémite. Cette rationalité juridique, qui heurte l’émotion, invite à une réflexion visant à envisager distinctement l’intoxication volontaire pour permettre un débat judiciaire.


 

Alors même que les faits de cette affaire médiatisée sont connus, et repris dans les savants et volumineux rapports et avis annexés à la décision et les premiers commentaires [1], leur relation précise est nécessaire pour prendre toute la mesure d’un arrêt se fondant sur la raison, au-delà de l’émotion.

Fumeur régulier de cannabis depuis l’âge de 16 ans, et ayant consommé une dizaine de joints la veille des faits, un individu de confession musulmane (Kobili Traoré), qui a oublié ses clefs, sonne à la porte d’un voisin qui, le reconnaissant, lui ouvre sa porte dans la nuit du 3 au 4 avril 2017. S’engouffrant alors dans l’appartement, il verrouille la porte, conserve la clef et crie en Arabe que « Satan soit banni », puis récite le Coran pendant une vingtaine de minutes. Effrayée, la famille se réfugie dans une chambre, et appelle la police. L’individu décide alors d’aller sur le balcon et de l’enjamber sans savoir chez qui il allait se retrouver. Marchant dans ce second appartement, il y aperçoit une Torah et un chandelier, qui selon ses dires l’ont oppressé, ainsi qu’une femme de confession juive de 65 ans, Sarah Halimi, qu’il connaissait depuis de nombreuses années et à laquelle il demande d’abord d’appeler la police au motif d’un danger d’agression. Puis, en désaccord sur l’adresse des lieux et voyant dans cette victime le « Sheitan » (le diable), il se mit à la frapper avec le téléphone, et avec ses poings, avant de la soulever et de la jeter par la fenêtre en criant « tu vas fermer ta gueule, grosse pute, salope, tu vas payer », ainsi que « Allah Akbar » et « que dieu m’en soit témoin », et enfin « tu vas payer, c’est pour venger mon frère ». Des passants entendirent enfin l’individu dire « appelez la police, elle s’est suicidée ».

L’individu s’en retourna ensuite dans le premier appartement où il fut interpellé par la police judiciaire, alors qu’il hurlait et récitait des versets du Coran. Ne pouvant être entendu en garde à vue, il fut dirigé dans un hôpital pour des examens médicaux ou une expertise toxicologique indiqua qu’il était sous l’influence de l’effet psychotrope du cannabis au moment du prélèvement, c’est-à-dire le jour des faits, sans toutefois qu’il soit scientifiquement possible d’estimer de façon raisonnable le niveau de consommation.

Une information judiciaire est ouverte le 14 avril 2017 des chefs d’homicide volontaire et de séquestration avec absence de libération volontaire avant le septième jour. En raison de son état de santé mentale incompatible avec une audition, l’auteur des faits n’est mis en examen que le 10 juillet 2017. Lors de son premier interrogatoire, réalisé dans l’enceinte de l’hôpital, l’individu déclara qu’il ne sentait pas bien deux jours avant les faits, et qu’il était comme possédé, marabouté et craignait l’entourage. Il avait fumé une dizaine de joints la veille des faits, était allé à la mosquée avec un ami pour calmer ses angoisses, avait regardé un film violent (The punisher), avant de se rendre sur le lieu des crimes vers 3 heures 30 du matin.

Le 20 septembre 2017, le parquet prenait des réquisitions supplétives aux fins de mise en examen de l’individu du chef d’homicide volontaire avec cette circonstance que les faits ont été commis à raison d’une appartenance vraie ou supposée de la victime à une race ou une religion déterminée. Interrogé le 27 février 2018 par les juges d’instruction, en présence de personnels hospitaliers, l’individu ne savait pas si les paroles qu’il avait prononcées telles que « Dieu m’en soit témoin Allah Akbar », entendues par les témoins, étaient liées aux démons qui le poursuivaient. À l’issue de cet interrogatoire, l’auteur des faits était mis en examen pour homicide volontaire au préjudice de Sarah Halimi avec cette circonstance que les faits ont été commis à raison de l’appartenance vraie ou supposée de la victime à une race ou une religion déterminée.

Trois expertises psychiatriques étaient diligentées alors que l’individu était hospitalisé sans son consentement dans une unité pour malade difficile.

Le premier expert formule, en septembre 2017, deux séries de conclusions. D’une part, il évoque « une bouffée délirante aiguë » […)], trouble psychotique induit par l’augmentation de la consommation de cannabis », en ajoutant que « la bouffée délirante aiguë n’est pas l’ivresse cannabique », mais la réaction psychique à un moment donné, à la consommation habituelle du sujet. Dépassant la seule analyse médicale, il déclare : « En dépit du caractère indiscutable du trouble mental aliénant, son discernement ne peut être considéré comme ayant été aboli au sens de l’article 122-1, alinéa 1, du Code pénal (N° Lexbase : L9867I3T), du fait de la consommation volontaire et régulière de cannabis, de surcroit récemment augmentée ». D’autre part, ce premier expert estime que « l’existence avérée d’une bouffée délirante aiguë n’est pas incompatible avec une dimension antisémite » : « un crime peut être délirant et antisémite ». Mais il note que rien ne confirme chez le sujet un antisémitisme habituel, concluant que la victime « n’avait peut-être pas été recherchée et tuée parce que juive », son « entrée dans l’appartement s’étant télescopé avec la thématique délirante l’associant immédiatement au diable ».

La deuxième expertise est confiée à un groupe de trois experts qui conclut en juin 2018 que « l’infraction reprochée est en lien avec le trouble psychotique bref, dont il était atteint au moment des faits. Cette bouffée délirante s’est avérée inaugurale d’une psychose chronique, probablement schizophrénique ». En désaccord avec le premier expert, ils concluent que « ce trouble psychotique a aboli son discernement au sens de l’article 122-1 du Code pénal », estimant que la consommation de cannabis « n’a fait qu’aggraver le processus psychotique déjà amorcé », et que l’agent avait peu conscience de la dangerosité du produit dont il était dépendant : il était consommateur chronique depuis l’entrée dans l’adolescence et c’est au moment des faits qu’il a pour la première fois déliré ».

Une troisième expertise, sollicitée par les parties civiles, réalisée par un collège de trois experts le 18 mars 2019, conclut que « L’infraction reprochée ne peut être mise en relation avec une pathologie mentale chronique ; mais apparaît en lien direct avec une bouffée délirante aiguë d’origine exotoxique » [… ] orientant classiquement vers une abolition discernement au sens de l’article 122-1, alinéa 1, du Code pénal : compte tenu qu’au moment des faits son libre arbitre était nul et qu’il n’avait jamais présenté de tels troubles antérieurement ».

Alors que le procureur de la République requérait la mise en accusation devant la cour d’assises de Paris pour homicide volontaire aggravé par le mobile religieux et pour séquestration arbitraire, les juges d’instruction estimèrent qu’il existait des raisons plausibles d’appliquer le premier alinéa de l’article 122-1 du Code pénal, écartèrent la circonstance aggravante, et qualifièrent les faits d’homicide (simple) et de séquestration. Sur appel des parties civiles et du parquet, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris jugea : d’une part qu’il existait des charges suffisantes contre l’auteur d’avoir volontairement donné la mort à la victime avec la circonstance aggravante d’antisémitisme et d’avoir séquestré une famille ; d’autre part que l’individu était irresponsable pénalement en raison d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes au moment des faits. L’hospitalisation complète de l’auteur fut ordonnée, ainsi que l’interdiction d’entrer en contact avec les parties civiles pendant une durée de vingt ans.

Les pourvois en cassation développent plusieurs moyens, analysés dans le rapport et l’avis annexés à la décision, et qui critiquent l’application de l’article 122-1 du Code pénal. Parmi le flot d’arguments développés, il est essentiellement soutenu que la consommation de stupéfiants n’est pas un trouble mental au sens du texte ci-dessus, qu’elle est constitutive d’un délit et d’une circonstance aggravante, et ainsi d’une faute antérieure à l’abolition du discernement qui neutralise l’article 122-1 du Code pénal. Une contradiction résiderait par ailleurs dans la qualification pénale retenue d’homicide aggravé par un mobile antisémite, impliquant une perception du réel, et la constatation d’un trouble mental ayant aboli le discernement.

Rejetant les pourvois, la Cour de cassation estime d’abord que les énonciations des juges du fond, fondées sur les témoignages et expertises, permettent de justifier la qualification pénale retenue d’homicide aggravé, et notamment le mobile antisémite et religieux. C’est bien en considération de la religion juive que l’auteur a donné la mort à la victime qu’il a associée au diable. Ces faits ne peuvent cependant être imputés moralement à l’auteur en application de l’article 122-1 du Code pénal qui se révèle applicable car « il ne distingue pas selon l’origine du trouble psychique ayant conduit à l’abolition du discernement ». Or les juges du fond, s’appuyant sur les conclusions unanimes des experts qui concluent à une « bouffée délirante » au moment des faits, et constatant qu’il n’était pas établi que la consommation de cannabis ait été effectuée avec la conscience que cet usage puisse entrainer un trouble, ont conclu qu’il n’existe pas de doute sur l’existence chez l’individu, au moment des faits d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes.

Cette décision déclare ainsi que l’irresponsabilité pénale ne dépend pas de l’origine du trouble mental, qui est ainsi indifférente (I), mais de ses effets sur le discernement, qui sont ainsi prépondérants (II).

I. Indifférence de l’origine du trouble psychique ou neuropsychique

Selon la Cour de cassation, « les dispositions de l’article 122-1, alinéa 1, du Code pénal, ne distinguent pas selon l’origine du trouble psychique ayant conduit à l’abolition du discernement ». Le trouble peut donc avoir une origine toxicologique et illicite.

A. L’indifférence de l’origine toxicologique du trouble psychique ou neuropsychique

1) Distinction du trouble pathologique et toxicologique

La règle signifie en premier lieu que le champ d’application du texte n’est pas limité au regard de la nature pathologique du trouble, ainsi que le prétendait l’un des moyens au pourvoi. Il était en effet soutenu que les articles 706-119 (N° Lexbase : L7475LPK) et suivants du Code de procédure pénale renvoient à la notion de trouble mental et au Code de la santé publique qui distingue la « lutte contre les maladies mentales » (CSP, art. L. 3211-1 N° Lexbase : L4891LW3 à L. 3251-6 N° Lexbase : L7021IQ4) de « la lutte contre l’alcoolisme » (CSP, art. L. 3311-1 N° Lexbase : L2895DKG à L. 3355-8 N° Lexbase : L3302DLU) et de la « lutte contre la toxicomanie » (CSP, art. L. 3411-1 N° Lexbase : L6808IGA à L. 3425-2 N° Lexbase : L7677LPZ).

Selon l’avis substantiel de l’avocate générale annexée à la décision [2], cette restriction ne correspond pas à la conception doctrinale classique qui envisageait, au titre des causes non-imputabilité, non seulement la démence visée à l’article 64 de l’ancien Code pénal, mais également les états qualifiés de voisins, tels que les troubles du système nerveux (hystérie, somnambulisme), ou encore l’ivresse [3]. La Cour de cassation admet ainsi classiquement que « l’aliénation mentale consécutive à l’ivresse est souverainement appréciée par la juridiction de jugement » [4]. Cette conception extensive se retrouve dans la doctrine moderne, estimant que l’article 122-1 du Code pénal reprend les solutions acquises sous l’empire de l’article 64 de l’ancien Code pénal [5], et vise les troubles pathologiques et « non pathologiques » [6], et ainsi toxicologues [7]. En d’autres termes, la formule empirique « trouble psychique ou neuropsychique » n’entend pas seulement renvoyer à la maladie mentale, mais aussi à d’autres facteurs pouvant provoquer une perte de discernement tel le sommeil, l’ivresse, l’hypnose ou le somnambulisme naturel [8].  

Cette position peut cependant être nuancée. Si les auteurs classiques évoquaient, d’un côté, la démence, expressément visée à l’article 64 de l’ancien Code pénal, et, d’un autre côté, les « états voisins » de la démence, c’est précisément que la première notion n’englobait pas nécessairement les secondes. Le rapprochement s’opérait par leur effet commun, l’irresponsabilité, en indiquant que son fondement pouvait être différent. Pierre Bouzat et Jean Pinatel déclarent ainsi, à propos des états voisins de la démence : « Si l’on s’accorde à reconnaître que ces états entrainent l’irresponsabilité, tout comme la démence proprement dite, on se demande comment la justifier. Les juges doivent-ils viser, comme s’il s’agissait de la démence, l’article 64 du Code pénal, ou, au contraire, se contenter de recourir au principe général que sous-tend la loi française, d’après lequel il n’y a pas de responsabilité sans faute ? Le mieux est d’adopter l’une ou l’autre solution, suivant qu’il s’agit d’états plus ou moins rapprochés de la démence » [9]. Plus anciennement, Faustin Hélie [10], d’ailleurs cité au soutien d’une position contraire [11], admettait l’irresponsabilité pénale en cas d’ivresse complète, en observant que nous sommes tout à fait dans l’esprit de l’article 64, et quoiqu’il n’y ait pas démence dans le sens technique du mot, c’est-à-dire quoiqu’il n’y ait pas état durable, permanent, habituel, il est clair qu’il n’y ait pas eu intelligence, sentiment, conscience de l’acte… ». Et d’ajouter : « Quel jurisconsulte, par exemple, oserait déclarer coupable de meurtre, c’est-à-dire coupable d’homicide commis volontairement, un homme dans un état d’ivresse… ». Il y aura, si l’on veut, négligence, imprudence, imputabilité civile ; mais où il n’y a pas d’intention de crime, volonté de tuer, volonté d’agir en connaissance de cause, il y aura impossibilité de déclarer l’accusé coupable… ». C’est encore la position de Garçon qui déclare si « l’ivresse n’est pas une excuse légale […] le jury a incontestablement le droit de répondre négativement à la question de culpabilité s’il lui parait que l’ivresse a aboli la responsabilité de l’accusé » [12].  

2) Distinction des causes de non-imputabilité et de non-culpabilité

De là, on aperçoit qu’il conviendrait de distinguer l’irresponsabilité fondée sur la démence, donc sur l’article 64 de l’ancien Code pénal, et l’irresponsabilité fondée sur d’autres troubles s’expliquant par le principe que toute responsabilité pénale est fondée sur libre arbitre, c’est-à-dire que toute infraction suppose « intelligence et volonté » [13]. Là où il n’y a pas de discernement, il ne peut y avoir de volonté coupable, et ainsi d’intention ou d’imprévoyance. La démence est une cause de non-imputabilité alors que les troubles non pathologiques, et en particulier le trouble d’origine toxicologique, sont une cause de non-culpabilité d’un agent qui, ordinairement, est imputable.

Cette distinction peut encore se retrouver dans l’article 122-1 du Code pénal. « On peut comprendre, également, que l’expression légale, visant la cause plutôt que l’effet, désigne uniquement une affection mentale, d’origine physique ou neuropsychique » [14]. Ce n’est pas dire que les autres troubles ne puissent abolir le discernement, mais c’est alors sous un autre angle, et selon un régime différent que l’irresponsabilité pénale serait éventuellement prononcée.

Une chose est de se prononcer sur une cause non-imputabilité, en l’occurrence le trouble psychique ou neuropsychique, qui empêche la réalisation d’un procès et ne peut conduire qu’à une déclaration d’irresponsabilité pénale selon la procédure prévue aux articles 706-119 et s. du Code de procédure pénale, autre chose est d’envisager une cause de non-culpabilité, en l’occurrence la psychose toxique provoquée par l’ivresse, et d’apprécier si elle empêche de qualifier l’intention criminelle. Cette analyse peut conduire à ce qu’une juridiction de jugement soit saisie des faits, et qu’elle apprécie concrètement si le trouble toxicologique a empêché de caractériser la culpabilité morale requise par le texte d’incrimination. Cette démarche n’est pas ignorée par la Cour de cassation qui a anciennement admis la condamnation pour homicide involontaire, d’un conducteur en état d’ivresse, en se retranchant derrière l’appréciation souveraine des juges du fond [15]. Le besoin de procès, invoqué par les victimes, est ainsi satisfait, sans remettre en cause le principe essentiel que toute responsabilité pénale suppose le discernement au moment des faits, et qu’une procédure pénale ne peut être diligentée contre une personne qui n’est pas à même de se défendre.

Le trouble pathologique correspond à un état structurel, qui empêche à la fois l’imputation morale de l’infraction, la réalisation d’une procédure de jugement, et l’accessibilité à la sanction. Le trouble toxicologique, qui ponctuellement, empêche la caractérisation d’une infraction, n’exclut pas nécessairement une procédure ultérieure, et une accessibilité à la peine, dès lors que la personne serait imputable.

3) Défense d’aliénation mentale et défense d’intoxication en droit pénal canadien

Cette dissociation fondée sur la nature et l’origine des troubles se retrouve clairement en droit pénal canadien où « l’intoxication et l’aliénation mentale demeurent deux concepts juridiques distincts » [16]. L’article 16 (1) du Code criminel canadien dispose ainsi que « La responsabilité criminelle d’une personne n’est pas engagée à l’égard d’un acte ou d’une omission de sa part survenue alors qu’elle était atteinte de troubles mentaux qui la rendait incapable de juger de la nature et de la qualité de l’acte ou de l’omission, ou de savoir que l’acte ou l’omission était mauvais ». Pour appliquer ce texte, la Cour suprême du Canada définit la maladie mentale comme « toute maladie, tout trouble ou tout état anormal qui affecte la raison humaine et son fonctionnement à l’exclusion toutefois, des états volontairement provoqués par l’alcool ou les stupéfiants, et des états mentaux transitoires comme l’hystérie ou la commotion » [17]. En cas d’intoxication volontaire, l’agent peut invoquer, pour sa défense et en application de l’article 33 (1) du Code criminel canadien, qu’il n’avait pas l’intention générale ou la volonté requise pour la perpétration de l’infraction sauf, en cas d’atteinte à l’intégrité physique, lorsqu’il s’est écarté de façon marquée de la norme de diligence raisonnablement généralement acceptée dans la société canadienne [18].

En application de ces principes, la Cour suprême du Canada a admis, dans l’arrêt « R. c/ Bouchard-Lebrun » du 30 novembre 2011, la condamnation pénale d’un individu qui s’était rendu coupable d’une agression physique sur deux victimes au motif que l’une d’elles portait une croix à l’envers, délire religieux provoqué par la consommation préalable de différentes drogues. Alors que les psychiatres avaient conclu qu’il était atteint d’une sévère psychose toxique le rendant inapte à juger la distinction entre le bien et le mal, la Cour estima que cette intoxication volontaire ne constituait pas un trouble mental, permettant d’invoquer l’irresponsabilité pénale sur le fondement de l’article 16 (1) du Code criminel.

Certes, il est d’abord rappelé que : « une règle traditionnelle de common law subordonne l’imputabilité en matière pénale à la commission d’un acte volontaire par l’accusé » (§ 45), « qu’un comportement humain n’entraine la responsabilité pénale que lorsqu’il représente le produit d’un « choix véritable » ou du « libre arbitre » de son auteur » (§ 48), ou encore que « la responsabilité criminelle n’est appropriée que lorsque l’agent est une personne douée de discernement moral, capable de choisir entre le bien et le mal » (§49).

Toutefois, et au regard de l’article 16 (1) du Code criminel, l’incapacité doit découler d’une maladie de l’esprit, qu’il appartient au juge de qualifier, en toute indépendance par rapport aux expertises médicales. « Le juge du procès n’est pas lié par la preuve médicale puisque celle-ci ne prend pas en considération les éléments d’ordre public qui font partie de l’analyse requise » (§ 62). La qualification ne peut donc dépendre d’un seul diagnostic médical, car cette position conférerait aux experts en psychiatrie le soin de déterminer la portée de la défense de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux.

Partant, est développée une méthode de qualification du trouble mental reposant sur deux critères, lesquels peuvent s’appuyer sur l’expertise médicale. Le premier, dit « facteur de la cause interne » consiste en une comparaison entre l’accusé et une personne normale. « Dans la mesure où une personne normale aurait également été susceptible de développer une psychose toxique à la suite de la consommation de stupéfiants, les tribunaux pourront plus facilement considérer que le désordre psychique dont a souffert l’accusé avait une origine purement externe, et ne constituait pas une maladie mentale au sens du Code criminel » (§ 72).

Le second outil analytique vise le « facteur du risque subsistant », qui tente d’évaluer la probabilité de récurrence d’un danger pour autrui. « Un état qui comporte un risque vraisemblable de récurrence d’un tel danger se trouve davantage susceptible d’être assimilé à une maladie mentale » (§ 74). « Lorsque la condition préexistante de l’accusé ne nécessite aucun traitement particulier et qu’elle ne constitue pas une menace pour autrui, les tribunaux devraient arriver plus facilement à la conclusion que l’accusé n’était pas malade mentalement au moment des faits » (§ 75). En application de cette méthode de qualification, il est alors jugé que la consommation d’une drogue, en l’espèce un comprimé de poire bleue, représente un facteur spécifiquement externe et qu’une personne normale semble effectivement susceptible de développer une psychose toxique à la suite de la consommation d’un tel comprimé. Ce constat suggère que l’individu ne souffrait pas, au sens juridique, d’un trouble mental au moment des faits. Sous l’angle du second facteur, il apparaît que les symptômes psychotiques de l’auteur se sont estompés, quelques jours après l’agression, et que la condition mentale de l’accusé ne présente pas un quelconque niveau de dangerosité inhérente. La Cour suprême conclut donc : « Les déséquilibres mentaux développés exclusivement en raison d’une intoxication volontaire ne peuvent être considérés comme une maladie mentale au sens juridique, puisqu’ils ne sont pas le produit de la constitution psychique inhérente d’un individu. Il en est ainsi malgré le fait que la science médicale puisse volontiers considérer de tels états comme des maladies mentales » (§ 85).

4) Refus de la distinction des troubles pathologiques et toxicologues

Cette position tranche avec la conclusion péremptoire de l’avocate générale française déclarant : « il ne peut être valablement soutenu que la notion de trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli le discernement ou le contrôle de ses actes devrait s’entendre dans un sens restrictif, excluant par principe toute cause d’abolition distincte d’une pathologie psychiatrique, une telle assertion étant contraire à la lettre et à l’esprit du texte, aux conditions historiques de sa production et à son application jurisprudentielle » [19]. Et cette position se retrouve dans la formule de la Cour de cassation jugeant que les dispositions de l’article 122-1, alinéa 1, ne distinguent pas selon l’origine du trouble psychique ayant conduit à l’abolition du discernement ».

Ces affirmations sont assurément excessives. D’abord parce que les références aux auteurs classiques mériteraient de préciser que c’est au regard de leur conséquence commune, l’abolition du discernement, que les états voisins de la démence étaient présentés comme des causes de non-imputabilité, ce qui ne signifie pas qu’ils s’incorporent à la notion juridique de démence. Les états voisins peuvent en effet être compris, comme des causes de non-culpabilité.

Mais c’est surtout la lettre du texte de l’article 122-1 du Code pénal qui invite clairement à qualifier d’abord un trouble psychique ou neuropsychique puis l’abolition ou l’altération du discernement. Ces deux qualifications sont bien distinctes puisque, d’un côté, un trouble physique, par exemple un accident vasculaire cérébral pourrait provoquer une perte de conscience et, d’un autre côté, un trouble psychique ou neuropsychique, peut ne pas provoquer d’abolition, et même d’altération du discernement, parce que le trouble est maitrisé par l’individu (par exemple une personne atteinte de bipolarité, dont l’humeur est canalisée par un traitement, reste une personne dotée de son discernement).

Si les deux notions sont distinctes, il entre dans l’office du juge pénal de les interpréter, l’une et l’autre, sans abandonner la qualification à la science médicale, car une notion juridique dépend également de facteurs philosophiques, moraux et sociaux qui peuvent conduire, comme en droit pénal canadien, à juger que la psychose toxique abolissant le discernement n’est pas toujours un trouble psychique ou neuropsychique au sens de la loi pénale dès lors qu’elle trouve son origine dans une cause externe à la constitution psychique du sujet dont l’état délirant est temporaire. L’imputabilité morale de l’infraction est alors concevable. Ce n’est pas la position de la Cour de cassation qui ne distingue pas en fonction de la cause interne ou externe du trouble, et partant, juge également que son origine illicite est indifférente.

B. L’indifférence de l’origine fautive du trouble psychique ou neuropsychique

Le principe selon lequel l’article 122-1 du Code pénal ne distingue pas quant à l’origine du trouble ayant aboli le discernement conduit, en second lieu, à exclure la prise en considération de la faute antérieure de l’agent consistant dans la consommation volontaire de stupéfiants, incriminée par la loi pénale, position qui est ordinairement soutenue par une importante doctrine [20]. La portée de cette règle suppose cependant de distinguer les infractions intentionnelles et non intentionnelles [21].

1) L’usage de stupéfiants et la qualification de l’intention (meurtre)

Si l’usage de stupéfiants est assurément un délit (CSP, art. L. 3421-1 N° Lexbase : L0676L4S), cette faute pénale est distincte de l’intention requise pour qualifier un meurtre au sens de l’article 222-1 du Code pénal (N° Lexbase : L2177AML) qui vise le fait de donner volontairement la mort à autrui, c’est-à-dire une intention de tuer. Or celui qui a l’intention de s’enivrer n’a pas l’intention de tuer sauf si l’enivrement constitue une préméditation de l’acte d’homicide qui devient alors un assassinat (boire pour se donner du courage) [22]. En l’espèce, la chambre de l’instruction avait expressément relevé : « Aucun élément du dossier n’indique que cet homicide volontaire ait été prémédité par H….Z… et qu’il se soit rendu dans l’appartement de Madame X…avec l’intention de tuer ».

Certes, l’enivrement volontaire crée ou contribue à créer une situation potentiellement dangereuse, dont l’agent aurait dû avoir conscience ou dont il a pu avoir conscience. Mais cette prévisibilité abstraite ou concrète du résultat n’est pas une intention : il n’y a qu’une imprudence consciente, voire une faute délibérée. La motivation de la chambre de l’instruction, qui est reproduite par la Cour de cassation (§ 26) laisse cependant entendre que la consommation antérieure de cannabis pourrait entrainer la responsabilité d’un meurtre consécutif si elle a été effectuée avec la conscience que cet usage de stupéfiants puisse entrainer une telle manifestation. La porte serait donc ouverte à l’admission exceptionnelle de la faute antérieure consciente [23].

Mais envisager la condamnation pour meurtre d’une personne qui commet une faute contributive d’un homicide accompli dans un état inconscient revient à imputer une infraction intentionnelle à une personne qui n’a commis qu’une faute d’imprudence, dont le caractère délibéré n’en transforme pas la nature. L’imputation d’une faute antérieure d’imprudence, même consciente, pour qualifier un meurtre est ainsi contraire à la lettre de l’article 222-1 du Code pénal, en même temps qu’à l’article 122-1 qui rappelle un principe général du droit exprimant que tous les éléments constitutifs d’une infraction doivent être caractérisés au moment des faits [24]. Qu’un individu soit conscient d’une imprudence avant les faits, n’empêche pas de constater qu’il est inconscient au moment des faits, et ainsi incapable de vouloir la mort d’autrui en accordant un sens moral à cet acte.

La position de la Cour de cassation est ainsi rationnelle et conforme au droit positif. L’examen minutieux de l’ensemble de la jurisprudence par l’avocate générale montre en effet qu’il n’existe aucune véritable jurisprudence, et surtout aucun arrêt de la Cour de cassation, qui aurait fait application de la théorie de la faute antérieure pour exclure l’irresponsabilité pénale d’un auteur d’infraction intentionnelle dont le discernement aurait été aboli ; une partie de la doctrine [25] ne procédant que par analogie de solutions classiques admises en matière d’état de nécessité [26] et de contrainte [27], et survalorisant une décision d’un simple tribunal correctionnel [28].

Certes, la Cour de cassation a pu déclarer que l’ivresse « ne constitue pas, en soi, une cause d’irresponsabilité pénale » [29], mais cette affirmation signifie que seule l’ivresse complète, c’est-à-dire abolissant le discernement, est une cause de non-imputabilité de l’infraction. Elle n’empêche donc pas la condamnation pour homicide involontaire, dès lors que les juges apprécient souverainement « les diverses circonstances » dans lesquelles le délit est commis [30]. En cas d’ivresse incomplète, l’agent reste au moins partiellement conscient de ces actes, et ainsi pénalement responsable.

C’est cette distinction qui permet de comprendre l’articulation, parfois jugée à tort illisible [31], entre l’ivresse constitutive d’une cause d’irresponsabilité pénale et d’une circonstance aggravante. Lorsque l’ivresse est complète, et qu’elle provoque une psychose toxique abolissant le discernement, l’article 122-1 du Code pénal commande l’irresponsabilité pénale qui exclut alors la caractérisation d’une infraction, et de sa circonstance aggravante : cette exclusion vaut, quelle que soit la qualification pénale [32]. Lorsque, en revanche, l’ivresse est incomplète, et que le discernement n’est qu’altéré, l’article 122-1, alinéa 2, du Code pénal n’exclut pas la responsabilité pénale de l’agent. L’enivrement volontaire est alors une circonstance, atténuante ou aggravante, que le juge peut prendre en considération. Et il s’agira forcément d’une circonstance aggravante s’il est établi que l’ivresse n’a même pas altéré le discernement [33]. On comprend alors la motivation de certains juges du fond, qui apprécient souverainement le caractère complet ou incomplet de l’ivresse et peuvent ainsi valablement juger que « l’ivresse manifeste ne constitue pas une cause d’irresponsabilité pénale ou d’atténuation de la responsabilité pénale, mais au contraire une circonstance aggravante » [34]. L’ivresse incomplète n’exclut donc pas la responsabilité d’une infraction intentionnelle [35] ; l’ivresse complète, qui abolit le discernement au moment des faits, est incompatible avec l’intention, mais peut permettre la qualification d’imprudence.

2) L’usage de stupéfiants et la qualification de l’imprudence (homicide involontaire)

Si l’article 122-1 du Code pénal s’applique également aux infractions non intentionnelles, il reste qu’une dissociation temporelle est concevable entre l’acte causal de la mort et l’imprudence [36]. La rédaction de l’article 221-6 du Code pénal (N° Lexbase : L3402IQ3), qui incrimine l’homicide involontaire, permet ainsi d’appréhender la faute qui selon les termes de l’article 121-3 du Code pénal (N° Lexbase : L2053AMY), crée ou contribue à créer une situation dommageable.

Cette dissociation conduit à adapter l’appréciation du discernement dont on sait qu’elle doit se réaliser « au moment des faits » selon les termes de l’article 122-1 du Code pénal. « Les capacités volitives et cognitives de l’auteur s’apprécient alors au moment de la faute d’imprudence (à savoir l’intoxication) et non au moment de la survenance du dommage » [37]. L’article 122-1 du Code pénal devient alors inapplicable à la faute antérieure ou, plus exactement, contributive dès lors que le discernement de l’agent n’était pas aboli, ni même altéré, au moment de la commission volontaire de cette imprudence. En application de ce principe, est condamné pour homicide involontaire l’auteur d’un accident mortel de la circulation, qui fait usage de son véhicule, alors qu’il sait qu’il est susceptible de perdre à tout moment le contrôle de lui-même en raison de crises d’épilepsie [38]. Plus anciennement, la Cour de cassation admet la condamnation pour homicide involontaire d’un conducteur en état d’ivresse « dès lors que les juges du fond ayant régulièrement constaté les imprudences, maladresses et inobservations des règlements imputables au prévenu, il leur appartenait d’apprécier souverainement le montant de la peine, dans les limites fixées par la loi, compte tenu des diverses circonstances dans lesquelles le délit a été commis » [39].

Certes, la qualification supposerait aujourd’hui d’intégrer que la faute antérieure, ou plutôt « contributive » n’est qu’une cause indirecte de la mort, alors même qu’elle en serait une cause certaine [40]. Il conviendrait alors de prouver, en application de l’article 121-3 du Code pénal une faute délibérée ou une faute caractérisée.

Dans l’affaire commentée, il ne fait aucun doute que la consommation régulière de cannabis est à la fois source d’une imprévoyance en ce que l’agent n’a pas appréhendé les risques d’une consommation excessive et d’indiscipline sociale puisqu’il a agi consciemment en violation de la loi pénale qui incrimine la consommation de stupéfiants (CSP, art. L3421-1).

Il pourrait s’agir d’une faute caractérisée qui expose autrui à un risque d’une particulière gravité que l’auteur ne pouvait ignorer. Certes, la chambre de l’instruction relève « qu’aucun élément du dossier d’information n’indique que la consommation de cannabis par l’intéressé ait été effectuée avec la conscience que cet usage de stupéfiants puisse entrainer une telle manifestation », et l’on pourrait en conclure à une difficulté de qualification [41]. Mais si cette inconscience de l’acte criminel permet d’exclure la faute antérieure pour qualifier un meurtre au sens de l’article 221-1 du Code pénal, elle n’empêche pas d’observer que l’agent ait pu, au sens de l’article 121-3 du Code pénal, avoir conscience d’un risque d’une particulière gravité résultant de la consommation excessive de cannabis. Cette conscience peut être déduite de ce qu’une personne raisonnable, et a fortiori un consommateur régulier, connait nécessairement les effets d’une drogue, et en particulier les risques de perte de contrôle de ses actes, pouvant conduire à des violences.

La responsabilité pénale pourrait également être engagée pour une faute délibérée, qui consiste bien dans la violation d’une obligation légale de prudence et de sécurité dont le caractère particulier peut résulter de son objet spécifique (CSP, art. L. 3421-1) [42], et qui a été la cause de bouffée délirante aiguë qui, selon l’avis des experts, est la cause exclusive du passage à l’acte mortel. Au moment de cette faute, l’individu était conscient de ces actes, et capable d’en prévoir les conséquences : l’article 122-1 du Code pénal est alors inapplicable ; une condamnation pour homicide involontaire (C. pén., art. 221-6) devrait s’imposer, en observant que l’usage de stupéfiants n’est envisagé comme circonstance aggravante que si la mort a été provoquée par le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur (C. pén., art. 221-6-1, 3° N° Lexbase : L9678KXQ), mais que le caractère délibéré de la faute permet d’envisager l’aggravation prévue à l’article 221-6 alinéa 2 du Code pénal (ce que ne permet pas la constatation d’une faute caractérisée). Il n’est pas certain cependant que cette qualification de secours corresponde au besoin de procès des victimes et à la fonction expressive du droit pénal.

II. La prépondérance de l’abolition du discernement

Dès lors que la Cour de cassation estime que l’article 122-1 du Code pénal ne distingue pas selon l’origine du trouble psychique ou neuropsychique, le critère de l’irresponsabilité pénale se résume à la constatation de l’abolition, au moment des faits, du discernement ou du contrôle des actes. Ces termes méritent donc d’être précisés.

A. Le discernement

La notion de discernement, visée à la fois à l’article 122-1 et à l’article 122-8 (N° Lexbase : L2057AM7) du Code pénal, exprime une condition fondamentale de la responsabilité pénale qui comprend deux dimensions.

Le discernement est d’abord matériel en ce que l’agent doit être conscient du monde environnant. Sous réserve d’être en état d’inconscience physique (coma, évanouissement), tout homme dispose d’un minimum de conscience de son comportement, et il en est également ainsi des jeunes enfants ou personnes atteintes d’un trouble mental qui disposent bien d’une perception du réel, tout comme les animaux. C’est « la conscience matérielle » [43]. Ainsi un malade mental qui commet un vol ou qui accomplit un homicide n’agit pas nécessairement dans tous les cas avec une totale inconscience [44]. Dans l’affaire commentée, il ne fait ainsi aucun doute que l’agent a bien voulu défenestrer la victime, en ayant conscience de lui donner la mort, volonté au surplus animée par un mobile religieux établi par ses déclarations : « Allah Akbar, c’est le sheitan, je vais la tuer » puis « j’ai tué le sheitan » et « j’ai tué un démon ». Et cette conscience était invoquée par l’un des moyens du pourvoi estimant contradictoire de relever un mobile antisémite et l’abolition du discernement.

Mais ce discernement matériel des actes, et de leurs motivations, ne suffit pas à imputer, à mettre au compte, une infraction car cette opération suppose un reproche moral, une réprobation sociale qui suppose une conscience morale, philosophique et sociale, donc lucide. Le discernement est alors social, moral, intellectuel. Il devient l’aptitude à distinguer le bien du mal, le permis de l’interdit, le licite de l’illicite [45] ; il suppose une « intelligence de l’acte » [46] : c’est la « conscience infractionnelle » [47]. C’est le sens de la jurisprudence traditionnelle évoquant que toute infraction suppose « intelligence et volonté » [48]. C’est ce défaut de discernement qui « prive la responsabilité de son support moral et rend donc inadapté le recours à la répression, puisque le prévenu ou l’accusé est étranger à sa propre action, n’ayant pu en percevoir le caractère nuisible » [49] ; « tout désengagement moral ne peut que réduire la personne à une entité de laboratoire, et rejeter la part de mystère inhérente à la nature humaine » [50]. Lorsque le libre arbitre fait défaut, « la sanction pénale est inconcevable car lui seul confère à la culpabilité de l’agent la pleine signification morale qui appelle le blâme et justifie le reproche » [51]. On peut y voir une conséquence du principe de la légalité : celui-ci n’aurait aucun sens si les destinataires de la norme n’étaient pas en mesure de la comprendre et d’éviter, en connaissance de cause, de la violer [52]. La loi s’adresse à des hommes et non à des entités de laboratoire.

Cette distinction est fondamentale dans l’affaire commentée. On comprend ainsi avec le premier expert qu’un « un crime peut être délirant et antisémite », et ainsi que la conscience peut être suffisante pour appréhender une réalité purement matérielle et identifier une motivation religieuse délirante associant une personne juive à un démon, sans toutefois que cette conscience confère à l’individu l’intelligence morale de son action mortelle et de cette motivation antisémite. « Il n’est pas aberrant qu’une personnalité antisémite, lorsqu’elle est atteinte d’un trouble psychique ou neuropsychique, commette un acte qui présente un tel caractère. Mais on ne saurait en déduire que cet acte a été voulu comme tel et qu’il est donc l’expression d’un antisémitisme assumé. Il n’est plus que la conséquence d’un réflexe antisémite [53] ». Il n’y a qu’une conscience matérielle, mais pas une conscience infractionnelle.

C’est cette même distinction qui permet de dépasser un autre argument soulevé dans l’un des pourvois exprimant que l’auteur de l’homicide présentait des intervalles de lucidité, notamment en ce qu’il aurait élaboré une stratégie de défense en affirmant que la victime s’était suicidée. Mais l’une des expertises médicales déclare : « aussi profonds soient les désordres psychiatriques, il demeure toujours une part d’appréciation du réel ». Et le médecin ajoute que l’individu, « lors de son passage à l’acte criminel, dans le contexte de la bouffée délirante aiguë, peut très bien avoir entrevu fugacement les conséquences possibles de son crime et avoir à le présenter comme un suicide ». La chambre de l’instruction en conclut : « le fait que [l’agent] ait hurlé que la [victime] allait se suicider avant de la faire basculer par-dessus la rambarde ne saurait être considéré comme un élément stratégique, la réalité d’une bouffée délirante aiguë traduisant un sujet habité, et non raisonnant ». Quel est alors le critère de l’abolition du discernement moral ?

B. L’abolition du discernement

En distinguant l’abolition et l’altération du discernement, et ainsi une cause d’irresponsabilité et une cause d’atténuation de la peine, l’article 122-1 du Code pénal impose de qualifier l’effet du trouble psychique ou neuropsychique. Seul le trouble privant totalement de discernement l’auteur engendre son irresponsabilité pénale.

1) L’abolition du discernement et la qualification médicale du trouble

Cet effet neutralisant du trouble ne dépend pas d’un classement abstrait des pathologies, mais d’une certitude concrète que les faits et l’état d’esprit de l’auteur permettent d’établir et qui emporte la conviction du juge. « Autrement dit, il n’est pas, en droit, de trouble en eux-mêmes générateurs d’irresponsabilité : quelle que soit leur appartenance scientifique, quelles que soient leurs propriétés reconnues ou développées sur un plan psychiatrique, l’autorité judiciaire ne doit en juger que par rapport à des certitudes établies, et donc en relation exclusive avec l’infraction et la personnalité de son auteur » [54].

Ce principe apparaît relatif à la lecture de l’avis de l’avocate générale qui veut démontrer que, « sur le plan clinique, l’existence d’une bouffée délirante aiguë entraine en principe une abolition du discernement et du contrôle de ses actes » [55]. Cette affirmation est étayée par des études psychiatriques et sociologiques, concluant qu’il existe « un noyau irréductible de cas répondant à l’abolition du discernement », au sein desquels figurent « les bouffées délirantes aiguës ». Ces analyses sont reprises par la Haute autorité de santé qui propose de définir un corpus restreint d’états mentaux entrainant l’abolition du discernement dans lesquels elle range aussi la bouffée délirante aiguë. Selon l’avocate générale, « il ressort ainsi de cette approche épistémologique de la question que d’un point de vue médico-légal, la bouffée délirante aiguë constitue en principe une cause d’abolition du discernement » [56].

Il faut donc en conclure que le classement d’un état mental dans la catégorie des cas abolissant le discernement est un indice permettant au juge d’asseoir sa conviction, sans toutefois que le magistrat soit lié par cette analyse abstraite. Il faut en effet convenir, avec la Cour suprême du Canada,  que « la science médicale ne cerne pas toujours les causes de la psychose toxique avec le niveau de précision requis en droit » et que « nombre de facteurs semblent susceptibles de contribuer au déclenchement d’un trouble psychotique induit par une substance » tels que les symptômes actifs d’un trouble de la personnalité paranoïaque au moment de consommer des stupéfiants, l’effet combiné d’une exposition à des vapeurs toxiques et d’une période de stress intense, la dépendance à certaines drogues telles que la cocaïne, une consommation excessive de drogues au cours des jours et des heures précédant la perpétration du crime, ainsi qu’un sevrage suivant une période de consommation excessive d’alcool [57].

2) La preuve de l’abolition du discernement

S’agissant d’une cause d’irresponsabilité, la charge de la preuve de l’abolition du discernement incombe à la personne poursuivie, mais cette donnée est relativisée par le caractère inquisitoire de la procédure qui confère pratiquement au juge d’instruction le pouvoir d’ordonner une ou plusieurs expertises dès lors que le défaut de discernement est allégué. 

Lorsque l’abolition du discernement n’est pas certaine, la responsabilité pénale est envisageable, et il convient de renvoyer la personne poursuivie devant une juridiction de jugement [58]. Le risque de la preuve pèse ainsi naturellement sur le prévenu ou l’accusé car l’article 122-1 du Code pénal, qui n’envisage qu’une cause exceptionnelle d’irresponsabilité pénale, postule que les hommes sont naturellement dotés d’intelligence et de volonté, sauf à démontrer leur absence de discernement au moment des faits. Il existe ainsi une présomption de discernement qu’il appartient à la personne poursuivie de renverser, position que l’on retrouve par exemple en droit pénal canadien [59]. De là, son refus de se soumettre à une expertise peut empêcher le renversement de cette présomption de discernement [60].

L’appréciation de la certitude de l’abolition du discernement relève du pouvoir souverain des juges du fond dont la conviction s’appuie pratiquement sur des expertises qui, en droit, ne lient pas le juge. Cette liberté d’appréciation se vérifie pratiquement lorsque des expertises sont contradictoires, et que le juge pénal doit ainsi arbitrer, par exemple entre une expertise concluant à l’abolition et l’autre à l’altération du discernement [61]. Elle parait moins réelle lorsque les expertises sont convergentes, d’autant que la Cour de cassation admet que la mission d’expertise psychiatrique peut conduire l’expert à examiner les faits, envisager la culpabilité de la personne mise en examen et à apprécier son accessibilité à la sanction pénale [62].

Dans l’affaire commentée, la Cour de cassation insiste ainsi sur l’unanimité des conclusions des trois expertises (formulées par sept experts) décrivant une « bouffée délirante ». Elle rappelle cependant que « seul le premier expert saisi a estimé qu’en dépit du caractère indiscutable du trouble mental aliénant, le discernement de M. Z…ne pouvait être considéré comme aboli au sens de l’article 122-1, alinéa 1er du Code pénal, du fait de la consommation volontaire et régulière de cannabis ».

Mais cette divergence ne suffit pas à remettre en cause l’appréciation souveraine de la chambre de l’instruction. Il est en effet constant que les conclusions d’un rapport d’expertise, quelles qu’elles soient, ne lient pas le juge [63]  qui peut se forger sa propre opinion, en particulier lorsque l’expert évoque à la fois l’altération et l’abolition du discernement [64]. C’est en définitive le principe de l’intime conviction (C. proc. pén., art. 427 N° Lexbase : C65447LX) qui permet au juge d’apprécier la valeur probante d’une expertise.

Il est ensuite relevé que la première expertise ne conclut à l’altération du discernement qu’au regard de l’origine exotoxique de la bouffée délirante, ce qui revient à intégrer une dimension morale et sociale, et ainsi juridique, dans une analyse médicale. Ainsi que le relève l’avis de l’avocate générale, « ce n’est pas parce qu’il aurait considéré, par exemple, que l’envahissement de la conscience par ce trouble n’aurait pas été total qu’il a conclu à une simple altération du discernement, mais uniquement parce que ce trouble psychotique aigu a été induit par l’augmentation de la consommation de cannabis » [65]. En définitive, le premier expert concluait bien à l’existence d’une bouffée délirante dont il ne minimisait l’effet qu’au regard de la faute antérieure de l’agent, glissant de l’analyse médicale, vers une analyse juridique qui ne relève pas de sa compétence, l’expert n’étant sollicité que pour donner un avis technique au sens de l’article 156 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L0946DYP). On aperçoit ainsi toute la relativité des expertises dès lors « qu’il existe inéluctablement une zone d’indétermination dans laquelle l’interprétation médicale atteint ses limites et se trouve contaminée par des considérations philosophiques ou morales quand ne s’y engouffrent pas des positions dogmatiques ou idéologiques » [66].

Quoi qu’il en soit, la constatation unanime d’une bouffée délirante, animée par un mobile religieux, au moment des faits permet de caractériser un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli le discernement au sens de l’article 122-1 du Code pénal, ouvrant alors la procédure de déclaration d’irresponsabilité pénale prévue par les articles 706-119 et suivants du Code de procédure pénale, sur laquelle l’arrêt ne se prononce pas. Il sera simplement observé que, en vertu de l’article 706-125 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L5029K8R), la chambre de l’instruction est compétente pour rendre un arrêt déclarant à la fois qu’il existe des charges suffisantes contre la personne d’avoir commis les faits reprochés et qu’elle est pénalement irresponsable en raison d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes au moment des faits.

La première déclaration conduit nécessairement la juridiction à envisager les faits tels qu’ils pourraient être pénalement qualifiés, c’est-à-dire au regard des éléments constitutifs du meurtre et de ses circonstances aggravantes. La chambre de l’instruction constate ainsi que Kobili Traoré avait « volontairement » précipité la victime de son balcon et avait agi « en conscience du judaïsme » de Sarah Halimi. Tous les éléments d’un meurtre aggravé par un mobile antisémite étaient réunis pour envisager une infraction qui, cependant, n’est pas imputable à son auteur privé de son discernement moral. On retrouve encore la distinction entre une perception du réel qui permet de qualifier objectivement une intention et un mobile, et une absence d’intelligence de l’acte, une inconscience morale de l’acte et de son motif en raison de la psychose toxique. Il y a ainsi une figure d’infraction qui ne peut être imputée, ce qui montre que ces deux concepts sont bien distincts [67].

La réponse à cet événement épouvantable n’est plus pénale, mais médicale : l’hospitalisation sous contrainte.

Si la raison commande une telle conclusion, l’émotion suscitée par l’affaire pourrait inviter à une réflexion qui, sans remettre en cause le principe essentiel que toute responsabilité pénale est fondée sur le libre arbitre, devrait permettre de distinguer les causes de l’abolition du discernement, et en particulier d’isoler la psychose toxique provoquée par l’usage de stupéfiants ou l’alcool, à l’instar du droit pénal canadien évoqué plus haut, ou encore du droit espagnol qui prévoit clairement l’hypothèse d’un trouble mental provoqué par une intoxication en écartant l’irresponsabilité pénale si l’enivrement est recherché volontairement (Code pénal espagnol, art. 20) [68].

Plutôt que d’envisager une déclaration d’irresponsabilité pénale privant les victimes et la société d’un débat judiciaire, et fondé sur des expertises dont le caractère relatif est suspecté, il conviendrait de confier à la cour d’assises, qui a plénitude de juridiction, d’envisager si l’agent, ordinairement discernant, a bien eu l’intention coupable de tuer au moment des faits, voire l’intention de commettre des violences sans intention de tuer [69]. Dans la négative, il serait possible de retenir la qualification d’homicide involontaire aggravé par de l’usage délibéré de stupéfiants, dès lors que, au moment de la faute antérieure, l’individu était lucide [70]. Cette réponse judiciaire est non seulement nécessaire pour les victimes, mais également pour l’auteur dont on observe que, retrouvant son discernement, il a parfois besoin d’être jugé [71]. Voilà une piste pour le projet de loi annoncé par le Garde des Sceaux…qui ne peut, à peine d’inconstitutionnalité, exclure par principe la défense d’intoxication ayant provoqué une psychose.

 

[1] Rapport de M. Guery, Conseiller [en ligne] ; Avis de Mme Zientara, Avocate générale [en ligne] ; F. Rousseau, De l’abolition du discernement consécutif à la consommation de produits stupéfiants, JCP G, 2021, 521 ; E. Dreyer, La folie, quelle qu’en soit la cause, fait toujours obstacle à la responsabilité pénale, JCP G, 2021, 522 ; Y. Mayaud, L’affaire Halimi : retour sur les principes de responsabilité et d’irresponsabilité pénale, D., 2021, p. 875.

[2] Avis de Mme Zientata, Avocate générale, p. 21 s. [en ligne].

[3] C. Robaczewski, Le rôle de la faute antérieure en matière de responsabilité pénale, A. Prothais (dir.), Thèse Lille II, 2002, n° 160 s. et tous les auteurs classiques cités. Par exemple, R. Garraud, Traité théorique et pratique du droit pénal français, T1, n° 329. 

[4] Cass. crim., 11 mars 1958, Bull. crim. n° 238.

[5] R. Merle et A. Vitu, Traité de droit criminel, Cujas, 7e éd. 1997, n° 625.

[6] F. Desportes et F. Legunehec, Droit pénal général, Economica, 16e éd., 2009, p. 607.

[7] X. Pin, Droit pénal général, Dalloz, 12e éd. 2020, n° 297.

[8] E. Bonis, v° Troubles psychiques- malades mentaux, Rép. pén. Dalloz, 2018.

[9] J. Pinatel et P. Bouzat, Traité de droit pénal et de criminologie, T 1, Droit pénal général, Dalloz, 1963, n° 252.

[10] F. Hélie, Leçons de droit criminel, Paris, A. Cotillon et cie, 1880, p. 186.

[11] Avis de l’avocate générale préc., p. 33.

[12] E. Garçon, Code pénal annoté, Sirey 1901, art. 64.

[13] Cass. crim., 13 décembre 1956, n° 55-05.772 (N° Lexbase : A3538CHI) : M. Patin, note, D., 1957, J. 349.

[14] Ph. Conte et P. Maistre du Chambon, Droit pénal général, Armand Colin, 7e éd. 2004, n° 354. Pour la reprise de cette remarque, F. Rousseau, L’imputation dans la responsabilité pénale, NBT, Dalloz, 2009, n° 36

[15] Cass. crim., 5 février 1957, Bull. crim., n° 112.

[16] Cour suprême du Canada, 30 novembre 2011, R c/ Bouchard Lebrun, n° 36 [en ligne].

[17] Ibid, n° 39, renvoyant à l’arrêt « Cooper ».

[18] La cour d’appel de l’Ontario a déclaré cette règle inconstitutionnelle, et l’affaire est pendante devant la Cour suprême du Canada [en ligne].

[19] Avis de Mme Zientara préc. p. 24. Position d’ailleurs suivie par les commentateurs, F. Rousseau, note, op. cit. ; Y. Mayaud, op. cit., avec il est vrai la référence à la circulaire d’application du Code pénal du 14 mai 1993, § 32.

[20] J. Leauté, Le rôle de la faute antérieure dans le fondement de la responsabilité pénale, D., 1981, p. 296 ; Y. Mayaud, Droit pénal général, n° 451 ; J.-H. Robert, Droit pénal général, PUF, 5e éd., 2001, p. 291.

[21] V. également sur cette distinction, F. Desportes et F. Legunehec, Economica, 16e éd. 2009, n° 667 ; J. Pradel, Droit pénal général, Cujas, 22e éd. 2019, n° 540.

[22] Dans le même sens, Avis de Mme Zientara, op. cit., p. 71.

[23] En ce sens, Y. Mayaud, L’affaire Halimi, op. cit.

[24] Ph. Conte et P. Maistre du Chambon, op. cit., n° 356.

[25] Par exemple, V. Tellier-Cayrol, La turpitude du fou : D., 2020, p. 349. – J.-H. Robert, Droit pénal général, op. cit.

[26] Cass. crim., 28 juin 1958, aff. Lesage : MRMP, note, D., 1958, 693.

[27] Cass. crim., 29 janvier 1921, aff. Trémintin : J.-A. Roux, note, S., 1922, 1, 85.

[28] T. corr. Nevers, 30 janvier 1976 : Gaz. Pal., 1976, 2, Somm. 227.

[29] Cass. crim., 21 juin 2017, n° 16-84.158, FS-P+B (N° Lexbase : A7159WLQ).

[30] Cass. crim., 5 février 1957, Bull. crim., n° 112.

[31] M. Daury-Fauveau, La question du discernement (à propos d’un crime antisémite), D., 2020, p. 341.

[32] V. pourtant pour l’affirmation étrange que Kobili Traoré aurait pu être condamné pour violences volontaires aggravées par l’usage de stupéfiant : M. Daury-Fauveau, ibid. Mais si l’abolition du discernement est totale, l’irresponsabilité est totale.

[33] En ce sens, E. Dreyer, note sous Cass. crim., 14 avril 2021, op. cit.

[34] Motivation des juges du fond approuvée par Cass. crim., 2 septembre 2004, n° 13-84.787, F-D (N° Lexbase : A0602MW9).

[35] Amiens, 26 mai 1954 : D. 1954, 579.

[36] Pour la même analyse, Y. Mayaud, l’affaire Halimi, op. cit.

[37] Avis de Mme Zientara, op. cit., p. 76.

[38] Paris, 27 mai 1970, Gaz. Pal., 1972.2. somm. 37 ; Levasseur, obs., RSC, 1971, 119.

[39] Cass. crim., 5 février 1957, Bull. crim., n° 112.

[40] Pour cette observation, F. Rousseau, op. cit.

[41] F. Rousseau, op. cit.

[42] Pour un point de vue différent, F. Rousseau, note préc.

[43] F. Rousseau, thèse op. cit. et note op. cit.

[44] R. Merle et A. Vitu, Traité de droit criminel, op. cit., n° 616.

[45] Par exemple, X. Pin, Droit pénal général, n° 288. 

[46] F. Hélie, Leçon de droit criminel, op. cit., p. 184 ; R. Merle et A. Vitu, op. cit., n° 616 ; E. Dreyer, Droit pénal général, n° 804.

[47] F. Rousseau, thèse op. cit., et note op. cit.

[48] Cass. crim., 13 décembre 1956, op. cit.

[49] Y. Mayaud, Droit pénal général, op. cit., n° 437.

[50] Y. Mayaud, L’affaire Halimi, op. cit.

[51] R. Merle et A. Vitu, op. cit., n° 616.

[52] E. Dreyer, op. cit., n° 803

[53] E. Dreyer, ibid.  

[54] Y. Mayaud, op. cit., n° 447.

[55] Avis de Mme Zientata, Avocate générale, op. cit., p. 25.

[56] Ibid. p. 28.

[57] Cour suprême du Canada, 30 novembre 2011, aff. R. c/ Bouchard-Lebrun, op. cit., §§ 66 et 67.

[58] Cass. crim., 21 mars 2012, n° 12-80.178, F-P+B (N° Lexbase : A6067IIK).

[59] Cour suprême du Canada, 30 novembre 2011, aff. R. c/ Bouchard-Lebrun, op. cit., § 49 : « Toute personne est un être autonome et rationnel dont les actes ou les omissions sont de nature à engager sa responsabilité. Cette présomption n’est toutefois pas absolue ».

[60] Cass. crim., 20 février 2019, n° 18-80.777, FS-P+B+I (N° Lexbase : A8975YY3).

[61] Cass. crim., 12 mai 2004, n° 03-84.592, F-P+F (N° Lexbase : A5251DCH).

[62] Cass. crim., 29 octobre 2003, n° 03-84.617, F-P+F (N° Lexbase : A1403DA9).

[63] Cass. crim., 11 mars 1958, Bull. crim., n° 238, Cass. crim., 6 juin 1979, n° 78-92.860 (N° Lexbase : A3317CGX) ; Cass. crim., 6 janvier 1993, n° 92-83.316 (N° Lexbase : A3233CN3) ; Cass. crim., 2 septembre 2014, n° 13-84.787, F-D (N° Lexbase : A0602MW9).

[64] Cass. crim., 28 mars 2018, n° 17-81.232, FS-P+B (N° Lexbase : A8802XIT) : D., 2018, 723 ; Y. Mayaud, obs., RSC, 2018, 409.

[65] Avis de Mme Zientata, Avocate générale, op. cit., p. 28.

[66] Docteurs G. Rossinelli et J.-C. Penochet, Qui est responsable ?, L’Information psychiatrique 909, n° 3 (2014), 173-76 cité par l’avis de l’avocate générale, op. cit., p. 26.

[67] F. Rousseau, L’imputation dans la responsabilité pénale, thèse, op. cit.

[68] M. Ortubay Fuentes, Addictions et infractions pénales en Espagne, APC, 2009/1, n° 31, p. 195.

[69] V. pour cette proposition, Y. Mayaud, L’affaire Halimi, op. cit.

[70] Dans un sens comparable, Avis de Mme Zientata, Avocate générale, op. cit., p. 77

[71] E. Dreyer, op. Cit., n° 816, note 43.


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