Le Quotidien du 3 juin 2021

Le Quotidien

Actes administratifs

[Brèves] Attribution d'une subvention par une personne publique : caractère d’acte créateur de droits

Réf. : CE 1° et 4° ch.-r., 27 mai 2021, n° 433660, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A16354TQ)

Lecture: 2 min

N7751BYQ

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par Yann Le Foll

Le 02 Juin 2021

► L’attribution d'une subvention par une personne publique a le caractère d’un acte créateur de droit, dans la mesure où le bénéficiaire respecte les conditions mises à son octroi, lesquelles doivent être fixées au plus tard à la date à laquelle cette subvention est octroyée.

Principe. Une décision qui a pour objet l'attribution d'une subvention constitue un acte unilatéral qui crée des droits au profit de son bénéficiaire.

Toutefois, de tels droits ne sont ainsi créés que dans la mesure où le bénéficiaire de la subvention respecte les conditions mises à son octroi, que ces conditions découlent des normes qui la régissent, qu'elles aient été fixées par la personne publique dans sa décision d'octroi, qu'elles aient fait l'objet d'une convention signée avec le bénéficiaire, ou encore qu'elles découlent implicitement mais nécessairement de l'objet même de la subvention (principe déjà énoncé par CE 3° et 8° ch.-r., 29 mai 2019, n° 428040, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A1456ZDB ; CE 3° et 8° s-s-r., 5 juillet 2010, n° 308615, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A1308E49).

Il en résulte que les conditions mises à l'octroi d'une subvention sont fixées par la personne publique au plus tard à la date à laquelle cette subvention est octroyée.

Faits. Par décision du 6 juin 2015, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) a accordé au requérant le financement qu'il avait sollicité au titre du troisième plan cancer pour un projet post-doctoral, sans subordonner cette aide au respect d'une condition relative à l'impossibilité de cumuler plusieurs allocations ou bourses, quelles qu'elles soient.

Position du CE-censure CAA. La cour administrative d'appel de Paris (CAA Paris, 25 juin 2019, n° 18PA01807 N° Lexbase : A9287ZG3) a, en conséquence, commis une erreur de droit en se fondant sur un courriel du 18 juin 2015 de l'Inserm informant l’intéressé de l'impossibilité de cumuler l'allocation que cet établissement lui avait attribuée au titre du plan cancer avec la bourse Marie Sklodowska-Curie, qu’il avait par ailleurs obtenue pour son projet, dès lors que cette condition n'avait pas été posée lors de l'attribution de la subvention et alors qu'il n'était pas même soutenu devant les juges du fond qu'elle découlerait implicitement mais nécessairement de son objet. 

newsid:477751

Actualité judiciaire

[A la une] Procès Bygmalion : Éric Cesari « Il y a un fantasme autour de moi, je suis chargé, Corse, au ministère de l’Intérieur, Pasqua, ça fait beaucoup ».

Lecture: 6 min

N7779BYR

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par Adélaïde Léon

Le 03 Juin 2021

Ce mercredi 2 juin 2021, Éric Cesari, ancien directeur général de l’UMP et prévenu dans « l’affaire Bygmalion » était interrogé sur son rôle dans le mécanisme de financement de la campagne présidentielle de 2012. Renvoyé pour usage de faux (C. pén., art. 441-1 N° Lexbase : L2006AMA), abus de confiance (C. pén., art. 314-1 N° Lexbase : L5515LZB), complicité de financement illégal de campagne électorale (C. électoral, art. L. 113-1, 3° N° Lexbase : L7424LG3) et complicité d'escroquerie (C. pén., art. 313-1 N° Lexbase : L2012AMH), l’intéressé affirme avoir tout ignoré du processus.

« Je viens à l’UMP pour y exercer des fonctions politiques »

Après un retour sur les déclarations de la veille et la confrontation entre Fabienne Liadze, directrice des finances de l’UMP au moment des faits, et les allégations de Pierre Chassat, ancien directeur de communication du parti, c’est au tour d’Éric Cesari d’être appelé à la barre. Comme ceux qui l’ont précédé au cours des derniers jours, il est invité à présenter son parcours, tant académique que professionnel. Après une carrière de délégué commercial, ce militant engagé au RPR depuis qu’il a 19 ans intègre le cabinet du ministre de l’Intérieur, puis l’équipe de Balladur, le conseil général des Hautes Seines puis l’UMP. Cesari achève sa présentation en concluant : « Ces fonctions politiques ne me préparent pas, pas plus que mon autre parcours, à être gestionnaire d’une administration et à piloter une structure. Je viens à l’UMP pour y exercer des fonctions politiques ».

« Il y a une espèce de fantasme autour de moi ».

Face à la présidente Caroline Viguier, qui lui présente les déclarations et témoignages tendant, au contraire, à attribuer au directeur général de l’UMP un réel pouvoir de décision et une présence plus importante que ce que l’intéressé voudra bien reconnaître, aux réunions liées à l’organisation de la campagne, Éric Cesari ne cesse d’affirmer, s’agissant de ses fonctions de directeur général de l’UMP, qu’il n’avait en réalité qu’un titre honorifique.

Le problème, et la présidente ne manquera pas de le lui rappeler, c’est que de nombreuses déclarations disent le contraire. Dominique Dord d’abord, ancien trésorier de l’UMP, avait déclaré qu’Éric Cesari et Jérôme Lavrilleux étaient à la fois à l’UMP et dans l’équipe de campagne, ils supervisaient cette équipe et rendaient compte à Nicolas Sarkozy et Jean-François Copé notamment. Devant le tribunal Éric Cesari conteste une telle implication et dégaine un argument de défense qui reviendra au cours de l’audience « il y a un fantasme autour de moi ». À l’affirmation d’Adiba Redragui, chargée d’évènementiel à l’UMP, selon laquelle « Cesari était au courant de tous les moindres mouvements, faits et gestes, de tout ce qui se passait entre les murs de l’UMP » l’intéressé répond « bien sûr que non » la présidente comprend « bien sûr que oui », il comprend qu’elle n’a pas compris, elle dit ce qu’elle a compris, il rectifie. Rires dans la salle, l’interrogatoire reprend.

Il conteste également sa participation à des réunions charnières s’agissant du montant et de l’imputation des dépenses de campagne.

« Vous avez raison, il y a des divergences. Mais il y a une sorte de constante, c’est les protagonistes qui ont été autour de cette réunion de ventilation. »

Aux déclarations de Guillaume Lambert, alors directeur de campagne, selon lesquelles Éric Cesari aurait lui-même proposé la société Events pour la campagne présidentielle de 2012 l’ancien directeur général de l’UMP répond « je suis présent mais je ne propose pas Events, je ne les connais pas […] et je n’ai aucune compétence pour juger de la qualité des prestations dans l’événementiel ». Éric Cesari a-t-il participé à une réunion évoquant le coût exorbitant des premiers meetings de campagne et la recherche d’une solution ? Contestant les déclarations en ce sens de Guillaume Lambert, Éric Cesari affirme être passé par hasard et affirme que s’il avait assisté à une réunion évoquant des problèmes de plafond il s’en serait rappelé. Interrogé à nouveau sur le fait d’avoir participé à une réunion sur les questions du coût des premiers meetings de campagne il répond « je serai incapable de me rappeler de la teneur puisque je ne me souviens pas avoir été participant. ». À la question de savoir s’il a participé à une réunion durant laquelle le système de ventilation aurait été évoqué, Éric Cesari rétorque qu’il constate qu’il existe beaucoup d’incertitude quant à sa présence.

« Est-ce que je faisais le budget ? Non. Est ce que j’avais ce pouvoir ? Non. Il y a des éléments factuels. »

On en vient au réel pouvoir d’Éric Cesari. Celui-ci affirme « Je valide le fait que ça a été vu par un directeur dans sa compétence, par la directrice des ressources qui assume que c’est normalement dans le budget et je le fais passer au directeur de cabinet, décideur final ».

Interrogé sur son contrôle des engagements de dépenses et sur les devis qu’il signe et confronté à l’incohérence de l’existence de plusieurs devis à une même date, Éric Cesari se défausse « au moment où ça se passe, j’ai la tête ailleurs, je suis dans la campagne. Je ne suis pas dans la conscience que je participe à un système qui s’est élaboré ». Et la présidente Viguier de répondre « la difficulté c’est qu’on a votre signature sur ces devis et on a aussi votre signature sur les engagements de dépenses accompagnés de factures. Votre signature est sur une partie non négligeable des documents. On pourrait avoir l’impression que vous êtes au cœur de ce processus d’engament des dépenses ». L’ancien directeur général de l’UMP répond « j’ai fait ça dans un processus que je croyais classique, mais désorganisé à cause de la campagne ».

Et ni Caroline Viguier, ni le ministère public – qui n’aura pas épargné le prévenu en contredisant chacune de ses réponses par la lecture d’un mail témoignant d’un réel pouvoir de décision – ni les avocats des parties ne parviendront à obtenir d’Éric Cesari un quelconque aveu une quelconque concession. Les interrogatoires semblent se suivre et se ressembler.

Ce jeudi, c’est au tour de Jérôme Lavrilleux, directeur adjoint de la campagne, de se présenter à la barre. Reste à savoir si la présidente de la 11ème chambre du tribunal parviendra à éclaircir le brouillard qui règne autour de cette affaire.

Pour aller plus loin : V. Vantighem, Affaire Bygmalion : Le jour où Jérôme Lavrilleux a dit : « On a un problème... », Quotidien Lexbase, 31 mai 2021 (N° Lexbase : N7698BYR).

newsid:477779

Actualité judiciaire

[A la une] L’expertise psychiatrique qui pourrait faire basculer l’affaire de viols visant Tariq Ramadan

Lecture: 5 min

N7741BYD

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par Vincent Vantighem, Grand Reporter à 20 Minutes

Le 23 Juin 2021

Édit, le 17 juin 2021 à 13 heures 30 : le 17 juin 2021 la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris a prononcé la nullité du rapport d'expertise rédigé par Daniel Zagury. La juridiction d'instruction a estimé que l'expert avait outrepassé les limites de sa mission en procédant à l'examen des plaignantes quand l'ordonnance de commission d'expertises prescrivait la réalisation d'expertises dites « d'examen sur pièces ». L'affaire a été renvoyée au juge d'instruction.

On y parle de « système d’approche et d’installation d’une relation addictive », de « procédés de manipulation », « d’inscription dans un registre de soumission ». « D’emprise », aussi. Et même de « viol moral ». Autant d’expressions que Tariq Ramadan voudrait bien logiquement voir disparaître de la procédure dont il fait l’objet depuis le 20 octobre 2017.

Désormais mis en examen pour des viols sur cinq femmes, l’islamologue suisse va demander à la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris, jeudi 3 juin, l’annulation de l’expertise psychiatrique aujourd’hui au cœur de son dossier d’instruction. Conduite par le psychiatre Daniel Zagury, cette expertise – que Lexbase a pu consulter – conclut au fait que les  accusatrices du théologien étaient au moins en partie « sous [son] emprise » quand elles ont eu des relations avec lui… Un document susceptible d’affaiblir sa défense s’il venait à être jugé devant une cour d’assises pour des faits de « viols ».

Peut-être plus que dans les autres dossiers pénaux, les affaires de mœurs confèrent en effet une importance considérable aux expertises psychiatriques. Sans doute parce qu’ils opposent souvent frontalement la parole des uns (accusés) à celles des autres (victimes). Et qu’il est rare, pour les enquêteurs, de disposer d’autres éléments de preuves leur permettant de se forger une opinion claire.

Deux versions irréconciliables

Dans le dossier constitué autour de la personnalité de Tariq Ramadan, il y a des éléments. Des échanges de SMS. Des photos d’époque. Et même une robe sur laquelle les experts ont isolé « une trace de fluide ». Mais le cœur de l’instruction repose essentiellement sur l’incompatibilité des deux versions. Après avoir longtemps nié avoir un jour rencontré ou simplement côtoyé les femmes qui l’accusent, Tariq Ramadan a fini par avouer avoir entretenu avec elles des « relations consenties ». À l’inverse, celles-ci assurent avoir été abusées et violentées. Elles expliquent avoir cédé devant l’aura du théologien et surtout à cause de l’emprise qu’il était parvenu à tisser autour d’elles.

Les conclusions du Docteur Zagury vont donc plutôt dans le sens des jeunes femmes. Dans son rapport, il avait décrit en quatre étapes la relation instaurée par Tariq Ramadan avec ces femmes : une « vénération » pour « l’intellectuel brillant » rencontré sur les réseaux sociaux, puis des échanges « de plus en plus érotisés avec une coloration sadomasochiste de domination / soumission », suivis d’une rencontre physique « décrite comme un enchaînement soudain et brutal » vers des pratiques sexuelles pas toujours consenties. Avant une quatrième phase de sentiments mêlés : rancœur, culpabilisation, vengeance, admiration…

L’appartenance de Daniel Zagury à l’association Schibboleth

Pour éviter que cette analyse ne vienne nourrir la réflexion de jurés populaires au cours d’un éventuel procès d’assises, les avocats de Tariq Ramadan ont donc décidé d’attaquer ce rapport. Et par tous les moyens possibles. D’abord, c’est la méthode qu’ils ont décidé de réduire en miettes. Dans leurs conclusions, les avocats estiment que le rapport du Docteur Zagury est illégal dans la mesure où il a décidé d’entendre les plaignantes au lieu de se baser uniquement sur le dossier, comme le lui avaient demandé les trois juges chargées de l’instruction du dossier. Au surplus, toujours selon eux, le psychiatre se serait également « substitué » aux juges en se prononçant sur le « consentement » et en ne se limitant pas à « l’emprise » exercée. De cette manière, « cet expert exerce une emprise sur cette instruction qui n’a pas lieu d’être et qu’il convient d’annuler », lâche Philippe Ohayon, l’un de ses avocats.

Mais c’est aussi et surtout la personne même de Daniel Zagury que les avocats ont décidé d’attaquer bille en tête. Dans leurs conclusions, ils avancent ainsi que le psychiatre est membre du conseil scientifique de l’association Schibboleth qui a pris des positions contre Tariq Ramadan. Autrement dit qu’il est de parti pris et qu’il ne peut pas réaliser d’expertises dans ce dossier.

D’après ses statuts, Schibboleth est une « association internationale et interuniversitaire qui propose des éléments pour penser notre époque et trouver comment y agir ». Les avocats de Tariq Ramadan ont donc fourni la liste des prises de position des membres de l’association contre leur client. Daniel Zagury, lui, a refusé de réagir à la polémique. Mais il a fait savoir qu’il n’avait participé aux travaux de cette association qu’à deux reprises. Lors d’une conférence sur les néonaticides après un déni de grossesse et une autre sur la « banalité psychique du mal ». C’était en 2014 et 2016. Soit bien avant que Tariq Ramadan ne soit visé par la première plainte…

Peu importe pour son équipe de défense qui sait bien que c’est sans doute la première étape du possible procès à venir qui se joue ici. Et qu’il faut tout faire pour que ce rapport ne figure pas aux débats et qu’une contre-expertise soit ordonnée. « Après chaque échéance judiciaire, Tariq Ramadan et ses avocats multiplient les recours pour faire durer cette instruction qui touche pourtant à sa fin », déplore ainsi Eric Morain, avocat de plusieurs plaignantes. La chambre de l’instruction devrait prendre le temps d’examiner leur demande. Sa décision devrait ensuite être mise en délibéré.

newsid:477741

Arbitrage

[Brèves] À la différence de la sentence arbitrale rendue à l’étranger elle-même, la décision lui accordant l’exequatur est susceptible de tierce opposition

Réf. : Cass. civ. 1, 26 mai 2021, n° 19-23.996, FS-P (N° Lexbase : A88524SN)

Lecture: 3 min

N7720BYL

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par Lalaina Chuk Hen Shun, Docteur en droit, élève avocat

Le 02 Juin 2021

► Le tiers à l’instance arbitrale, susceptible de subir les effets d’une sentence rendue à l’étranger, est recevable à former tierce opposition à l’encontre de la décision accordant l’exequatur de cette sentence.

Faits et procédure. Sur le fondement d’un traité multilatéral de protection des investissements et par sentence rendue le 22 mars 2013 au Caire, un tribunal arbitral condamne l’État libyen à payer à un investisseur koweïtien la somme de 935 millions de dollars à l’issue d’un arbitrage sous l’égide du Cairo Regional Center for International Commercial Arbitration (CRCICA). Le 13 mai 2013, la sentence reçoit l’exequatur par ordonnance du président du tribunal de grande instance de Paris (TGI Paris, 13 mai 2013, 13/01671), confirmée par la cour d’appel de Paris par arrêt en date du 28 octobre 2014 (CA Paris, 28 octobre 2014, 13/18811 N° Lexbase : A8236M4S).

En vertu de la sentence revêtue de la formule exécutoire, le 11 mars 2016, l’investisseur a fait procéder à la saisie-attribution des sommes détenues par le Crédit Agricole pour l’État libyen et d’autres structures, y compris la Central Bank of Libya. Cette dernière a formé tierce opposition contre l’arrêt du 28 octobre 2014 en faisant notamment valoir qu’elle n’avait pas été condamnée par la sentence et qu’elle n’était pas une émanation de l’État libyen.

La cour d’appel déclare la tierce opposition irrecevable au motif que « le seul recours ouvert contre l’ordonnance d’exequatur d’une sentence rendue à l’étranger est l’appel prévu par l’article 1525 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L2180IPG), dans les cas d’ouverture énumérés par l’article 1520 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L2175IPA) qui visent la sentence elle-même et non l’ordonnance d’exequatur qui n’est donc en tant que telle, susceptible d’aucun recours ». Partant, elle ajoute qu’« aucun recours n’est ouvert aux tiers contre la sentence rendue à l’étranger » (CA Paris, 1, 1, 28 mai 2019, n° 16/21946 N° Lexbase : A7987ZCS).

Pourvoi. C’est à l’encontre de cet arrêt que la Central Bank of Libya forme un pourvoi en soutenant, d’une part, que tout jugement est susceptible de tierce opposition si la loi n’en dispose autrement et, d’autre part, que le tiers à l’instance, susceptible de subir les effets d’une sentence arbitrale rendue à l’étranger, doit être recevable à former tierce opposition à l’encontre de la décision prononçant l’exequatur de cette sentence.

Réponse de la Cour. La première chambre civile abonde dans le sens de la Central Bank of Libya en distinguant la sentence arbitrale de l’ordonnance d’exequatur y relative. La Cour de cassation reproche à la cour d’appel d’avoir procédé à la démarche inverse en écartant la recevabilité de la tierce opposition contre l’ordonnance d’exequatur en l’assimilant à un recours contre la sentence elle-même. La Cour de cassation précise que la tierce opposition contre l’arrêt ayant accordé l’exequatur constitue une voie de recours de droit commun à l’encontre, non de la sentence arbitrale, mais de la seule décision d’exequatur de la sentence rendue à l’étranger.

Solution. La Cour de cassation casse et annule l’arrêt du 28 mai 2019 et renvoie les parties devant la cour d’appel de Paris. 

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : L’arbitrage, Les voies de recours de la sentence arbitrale internationale, in Procédure civile, (dir. E. Vergès), Lexbase (N° Lexbase : E7343ET7).

 

newsid:477720

Avocats/Honoraires

[Brèves] Fixation d’honoraires : la décision du Bâtonnier devenue irrévocable ne peut faire l’objet d’une mesure d’exécution forcée qu’après avoir été rendue exécutoire par le président du TJ

Réf. : Cass. civ. 2, 27 mai 2021, n° 17-11.220, F-P (N° Lexbase : A09134TY)

Lecture: 6 min

N7703BYX

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par Marie Le Guerroué

Le 03 Juin 2021

► La décision prise par le Bâtonnier d’un Ordre d’avocats sur une contestation en matière d’honoraires, fût-elle devenue irrévocable par suite de l’irrecevabilité du recours formé devant le premier président de la cour d’appel, ne constitue pas une décision à laquelle la loi attache les effets d’un jugement, de sorte qu’elle ne peut faire l’objet d’une mesure d’exécution forcée qu’après avoir été rendue exécutoire par ordonnance du président du tribunal judiciaire, seul habilité à cet effet.

Faits et procédure. Un avocat avait défendu jusqu’au mois d’octobre 1996 les intérêts d’un client et des sociétés que celui-ci dirigeait. Par décision du 1er août 2002, le Bâtonnier de son Ordre avait fixé à une certaine somme le montant des honoraires que ces derniers restaient lui devoir et, par ordonnance du 3 décembre 2003, devenue irrévocable par suite de la déchéance du pourvoi en cassation introduit par ces derniers, le premier président de la cour d’appel avait déclaré irrecevable le recours formé contre la décision ordinale, au motif que son auteur n’était ni identifiable, ni expressément mandaté par un pouvoir spécial. À la suite du décès du dirigeant, le 16 avril 2012, l’avocat poursuivant le recouvrement de sa créance à l’encontre des ayants droit du défunt avait fait signifier une opposition à partage auprès du notaire chargé du règlement de la succession et inscrire une hypothèque judiciaire sur divers immeubles appartenant aux intéressées ou dépendant de la succession. Les ayants droit soutenant que l’avocat ne disposait pas d’un titre exécutoire, l’ont fait assigner devant un tribunal en vue d’obtenir la mainlevée des inscriptions d’hypothèque et l’annulation de l’opposition à partage.

En cause d’appel. Pour dire que l’avocat dispose d’un titre exécutoire pour le recouvrement de sa créance d’honoraires fixée par la décision du Bâtonnier de son Ordre, l’arrêt rendu par la cour d’appel d’Aix-en-Provence (CA Aix-en-Provence, 24 novembre 2016, n° 16/02975 N° Lexbase : A9098SIS) relève que cette décision a fait l’objet d’un recours devant le premier président de la cour d’appel qui, par une ordonnance devenue irrévocable, l’a déclaré irrecevable. Il retient ensuite qu’il importe peu que le premier président ne se soit pas prononcé sur le montant des honoraires de l’avocat, dès lors que la décision du Bâtonnier lui ayant été déférée, l’ordonnance, par laquelle ce magistrat a déclaré le recours irrecevable, a eu pour effet, après déchéance du pourvoi en cassation dont elle a été frappée, de rendre exécutoire la décision déférée, sans que l’avocat eût à saisir, à cet effet, le président du tribunal de grande instance. Il énonce, à cet égard, que l’article 178 du décret du 27 novembre 1991 ne confère au président du tribunal judiciaire le pouvoir de donner force exécutoire à la décision du Bâtonnier qu’en l’absence de recours formé devant le premier président de la cour d’appel et que, lorsqu’un tel recours a été introduit, il n’y a pas lieu d’opérer une distinction, que le texte ne prévoit pas, selon que ce recours est jugé recevable ou non, et, dans la négative, d’imposer à l’avocat de saisir le président du tribunal en vue d’obtenir un titre exécutoire, au motif que l’ordonnance du premier président ne vaudrait elle-même titre qu’en cas d’examen au fond de la contestation.

Réponse de la Cour de cassation. La Cour rend sa décision au visa des articles L. 111-2 (N° Lexbase : L5790IRU) et L. 111-3, 1° et 6° (N° Lexbase : L5301LUU) du Code des procédures civiles d’exécution, 502 du Code de procédure civile et 178 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat (N° Lexbase : Z44140RS). Selon le deuxième de ces textes, ne constituent des titres exécutoires dont un créancier peut, en application du premier, poursuivre l’exécution forcée sur les biens de son débiteur, que, notamment, les décisions des juridictions de l’ordre judiciaire lorsqu’elles ont force exécutoire et les décisions auxquelles la loi attache les effets d’un jugement. Aux termes du troisième, nul jugement, nul acte ne peut être mis à exécution que sur présentation d’une expédition revêtue de la formule exécutoire, à moins que la loi n’en dispose autrement. Il résulte du dernier que la décision prise par le Bâtonnier d’un Ordre d’avocats sur une contestation en matière d’honoraires ne peut être rendue exécutoire que par ordonnance du président du tribunal judiciaire. Pour la Cour, en statuant ainsi, alors que la décision prise par le Bâtonnier d’un Ordre d’avocats sur une contestation en matière d’honoraires, fût-elle devenue irrévocable par suite de l’irrecevabilité du recours formé devant le premier président de la cour d’appel, ne constitue pas une décision à laquelle la loi attache les effets d’un jugement, de sorte qu’elle ne peut faire l’objet d’une mesure d’exécution forcée qu’après avoir été rendue exécutoire par ordonnance du président du tribunal judiciaire, seul habilité à cet effet, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

Cassation. La Cour censure, par conséquent, l’arrêt rendu par la cour d’appel d’Aix-en-Provence le 24 novembre 2016.

 

Pour rappel : si le Bâtonnier est investi d'une véritable fonction juridictionnelle, ses décisions ne sont jamais exécutoires par elles-mêmes (Cass. civ. 2, 30 janvier 2014, n° 12-29.246, F-P+B N° Lexbase : A4417MDX).

 

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les honoraires, émoluments, débours et modes de paiement des honorairesL'absence de force exécutoire de la décision du Bâtonnier en matière de contentieux des honoraires de l'avocat, in La profession d'avocat, (dir. H. Bornstein), Lexbase (N° Lexbase : E37983R4).

 

newsid:477703

Divorce

[Brèves] Procédure de partage post-divorce : attention à ne rien oublier (notamment les créances nées avant le mariage), après c’est trop tard !

Réf. : Cass. civ. 1, 26 mai 2021, n° 19-23.723, FS-P (N° Lexbase : A88504SL)

Lecture: 3 min

N7764BY9

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 02 Juin 2021

► Lorsque la liquidation des intérêts pécuniaires d'époux a été ordonnée par une décision de divorce passée en force de chose jugée, la liquidation à laquelle il est procédé englobe tous les rapports pécuniaires entre les parties, y compris les créances nées avant le mariage ;
il appartient dès lors à l'époux qui se prétend créancier de l'autre de faire valoir sa créance contre son conjoint lors de l'établissement des comptes s'y rapportant, sous peine d’irrecevabilité de toute demande distincte postérieure au partage.

Cette solution s’inscrit dans la lignée d’une solution désormais bien acquise qui amène à considérer, selon l’expression consacrée de Jérôme Casey, que la procédure de partage est une sorte de « voiture-balai » qui englobe toutes les questions patrimoniales entre les époux, et donc toutes leurs demandes financières (Cass. civ. 1, 13 mai 2020, n° 19-11.308, F-D N° Lexbase : A06883MG ; Cass. civ. 1, 30 janvier 2019, n° 18-14.150, F-P+B N° Lexbase : A9716YUE ; J. Casey, obs. n° 11, in Sommaires de droit des régimes matrimoniaux (janvier 2020 - août 2020), Lexbase Droit privé, septembre 2020, n° 836 N° Lexbase : N4543BYW).

Dans ces précédentes décisions, la Cour de cassation était amenée à sanctionner le juge du partage qui, saisi d’une action en compte liquidation et partage post-divorce, déclinait sa compétence s’agissant du règlement de créances entre époux, et notamment de créances antérieures au mariage ; la Haute juridiction avait ainsi pu énoncer que : 1° « Le juge aux affaires familiales connaît de la liquidation et du partage des intérêts patrimoniaux des époux, des personnes liées par un pacte civil de solidarité et des concubins » ; 2° « la liquidation à laquelle il est procédé en cas de divorce englobe tous les rapports pécuniaires entre les parties et qu'il appartient à l'époux qui se prétend créancier de l'autre de faire valoir sa créance selon les règles applicables à la liquidation de leur régime matrimonial lors de l'établissement des comptes s'y rapportant » (Cass. civ. 1, 30 janvier 2019, n° 18-14.150, préc.).

Dans sa décision rendue le 26 mai 2021, la Cour de cassation énonce dans les mêmes termes cette dernière règle (2°) ; mais la question ne portait pas ici sur la compétence du juge du partage, mais sur l’obligation pour les époux de faire valoir toute créance sur l’autre à l’occasion de l’action précitée, sous peine d’irrecevabilité de toute demande distincte postérieure au partage.

En l’espèce, un jugement du 20 janvier 2000 avait prononcé le divorce des époux et ordonné le partage de leurs intérêts patrimoniaux. Le 9 avril 2008, le notaire désigné avait dressé un procès-verbal de difficultés. Le juge commis avait constaté la non-conciliation des parties et les avait renvoyées devant le tribunal qui, par un jugement du 6 avril 2010, avait statué sur les désaccords persistants. Le 24 septembre 2010, les parties avaient signé l’acte de partage établi par le notaire.

Le 27 octobre 2015, l’ex-époux avait assigné son ex-épouse aux fins d’obtenir une indemnité sur le fondement de l'enrichissement sans cause, pour avoir financé, avant le mariage, la maison dont celle-ci était seule propriétaire.

Les juges du fond ont déclaré la demande irrecevable, après avoir relevé que le jugement de divorce du 20 janvier 2000 avait fait application de l’article 264-1 du Code civil, alors en vigueur (N° Lexbase : L2648ABP).

La solution est approuvée par la Haute juridiction, qui relève que la cour d'appel en avait exactement déduit que l’ex-époux n’était plus recevable à agir postérieurement au jugement du 6 avril 2010 et à l’acte de partage.

newsid:477764

Droit disciplinaire

[Brèves] Impact d’un guide RH interne sur la validité d’une procédure de licenciement disciplinaire

Réf. : Cass. soc., 27 mai 2021, n° 19-16.117, FS-P (N° Lexbase : A16284TH)

Lecture: 2 min

N7757BYX

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par Charlotte Moronval

Le 02 Juin 2021

► L’absence d’indication des fautes reprochées dans la lettre de convocation à l’entretien préalable au licenciement, en méconnaissance du point 221 du guide mémento des règles de gestion RH PX 10 de La Poste, n’est pas de nature à affecter la validité de ladite mesure ;

En effet, le guide mémento des règles de gestion RH PX 10 de La Poste constitue un document interne à cette entreprise se bornant à expliciter les règles de droit, à destination des délégataires du pouvoir disciplinaire en charge de les appliquer, sans imposer à l’employeur de préciser la ou les fautes reprochées au salarié dans la lettre de convocation à l’entretien préalable.

Faits et procédure. Une salariée est mise à pied à titre conservatoire et convoquée à un entretien préalable prévu le 22 juillet 2015. Le 20 août 2015, elle est invitée à se présenter le 1er septembre devant la commission consultative paritaire de La Poste, puis est licenciée pour faute grave le 4 septembre 2015.

Contestant son licenciement, elle saisit la juridiction prud’homale. La cour d’appel (CA Limoges, 11 mars 2019, n° 18/00475 N° Lexbase : A4072Y39) la déboute de ses demandes. Elle forme alors un pourvoi en cassation.

La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale rejette le pourvoi. 

D'abord, la cour d'appel a constaté que l'employeur n'avait eu connaissance des faits reprochés à la salariée que le 1er juillet 2015. Elle en a exactement déduit que les poursuites, engagées le 10 juillet 2015, par la convocation à l'entretien préalable au licenciement, l'avaient été dans le délai de deux mois prévu à l'article L. 1332-4 du Code du travail (N° Lexbase : L1867H9Z).

Ensuite, le guide mémento des règles de gestion RH PX 10 de La Poste constitue un document interne à cette entreprise se bornant à expliciter les règles de droit, à destination des délégataires du pouvoir disciplinaire en charge de les appliquer. La cour d’appel a dès lors retenu à bon droit que l’absence d’indication des fautes reprochées dans la lettre de convocation à l’entretien préalable au licenciement, en méconnaissance du point 221 du guide mémento précité, n’était pas de nature à affecter la validité de ladite mesure.

Pour en savoir plus : v. ÉTUDE : Les spécificités du licenciement disciplinaire, Les garanties conventionnelles contre le licenciement, in Droit du travail, Lexbase (N° Lexbase : E9232ESQ).

 

newsid:477757

Procédure pénale

[Brèves] Requêtes en nullité durant l’instruction : la confrontation désormais considérée comme un interrogatoire permettant de faire courir le délai de six mois

Réf. : Cass. crim., 26 mai 2021, n° 20-86.011, F-P (N° Lexbase : A88464SG)

Lecture: 6 min

N7762BY7

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par Maria Slimani, doctorante contractuelle et chargée de mission d’enseignement à la faculté de droit et science politique d’Aix-en-Provence

Le 23 Juin 2021

Le délai de computation de six mois s’imposant aux mis en examen pour faire état des moyens pris de la nullité des actes accomplis ou notifiés avant leurs interrogatoires, court à compter de chaque interrogatoire et confrontation, à condition qu’ils aient pu en prendre connaissance antérieurement ;

La requête en nullité déposée par le mis en examen dans le délai de six mois suivant sa dernière confrontation est ainsi recevable, d’autant plus qu’il se trouvait également dans le délai de trois mois suivant la délivrance de l’avis de fin d’information (C. proc. pén., art. 175, al. 4).

Rappel des faits et de la procédure. Mis en examen et placé en détention provisoire en janvier 2014, le requérant a fait l’objet d’interrogatoires les 12 mai 2014 et 10 février 2015, ainsi que de confrontations les 12 décembre 2017 et 1er juillet 2020. Après s’être fait délivrer l’avis de fin d’information le 31 juillet 2020, le mis en examen a saisi la chambre de l’instruction le 25 septembre 2020 d’une requête en nullité fondée sur un courriel du 21 octobre 2014, lequel avait été porté à sa connaissance en 2017.  

Motifs de la chambre de l’instruction. La chambre de l’instruction a déclaré irrecevable la requête aux fins d’annulation de la procédure déposée par le mis en examen le 25 septembre 2020 car le délai de six mois, calculé à compter de la date de l’interrogatoire suivant l’acte litigieux, courait selon elle à partir de l’interrogatoire du 12 mai 2014 et non pas de la confrontation du 1er juillet 2020. Selon cette juridiction, la confrontation est insusceptible de constituer le point de départ du délai de six mois en ce que cet acte est différent de l’interrogatoire. Les juges du fond ont ainsi retenu que le délai était expiré lors du dépôt de la requête du mis en examen en septembre 2020.

Le mis en examen a formé un pourvoi en cassation.

Moyens au pourvoi. Le requérant soutenait que l’arrêt lui faisait grief en ce qu’il ne tenait pas compte du fait qu’il n’avait pu soulever la nullité de l’acte litigieux dans le délai de six mois suivant son interrogatoire du 12 mai 2014, faute d’avoir pu en prendre connaissance antérieurement.

Il faisait ensuite valoir qu’une confrontation au cours de laquelle un juge d’instruction interroge un mis en examen sur les derniers actes d’enquête portés à sa connaissance s’apparente à un interrogatoire lequel est susceptible de faire courir le délai de forclusion de six mois au sens de l’article 173-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L5031K8T).

Enfin, le requérant soutenait que même si plus de six mois s’étaient écoulés depuis son dernier interrogatoire, il disposait de la faculté de déposer une requête en annulation puisqu’il se trouvait dans le délai légalement prévu à compter de l’envoi de l’avis d’information, sur le fondement des dispositions de l’alinéa 4 de l’article 175 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7482LPS).

Dès lors, le président de la chambre de l’instruction aurait excédé ses pouvoirs et méconnu les articles 173 (N° Lexbase : L7455LPS), 173-1, 175 et 593 (N° Lexbase : L3977AZC) du Code de procédure pénale ainsi que l’article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme (N° Lexbase : L7558AIR).

Décision. La Chambre criminelle a prononcé l’annulation de l’ordonnance du président de la chambre de l’instruction en toutes ses dispositions, au visa de l’article 173-1 du Code de procédure pénale.

Elle précise en premier lieu que, si l’article 173-1 du Code de procédure pénale fait état d’une computation d’un délai de six mois suivant chaque interrogatoire, la ratio legis du texte permet également de prendre en compte les confrontations car elles constituent, en réalité, un interrogatoire pour la personne mise en examen.

La Haute cour a ensuite rappelé que le délai de forclusion ne courrait qu’à condition que le mis en examen ait eu connaissance des actes litigieux. Or, en l’espèce, il n’a pris connaissance du courriel qu’à l’occasion d’une procédure civile en 2017. Dès lors, le délai de six mois n’a pu courir à partir de l’interrogatoire du 12 mai 2014, d’autant plus que le courriel n’avait pas encore été rédigé à cette date. Il aurait en revanche été possible de faire courir le délai à compter de l’interrogatoire du 10 février 2015 si le mis en examen avait eu connaissance de l’acte. Or, en ayant pris connaissance du courriel en 2017, le délai de six mois ne pouvait courir qu’à compter de la confrontation du 1er juillet 2020. La nullité soulevée par le requérant n’était donc pas encore couverte par la forclusion au 25 septembre 2020.

Enfin, la Chambre criminelle a mis fin à tout débat en déclarant, qu’en tout état de cause, la requête en nullité avait été déposée dans le délai de trois mois suivant la délivrance de l’avis de fin d’information, ce qui permettait à l’intéressé d’invoquer toute cause de nullité non couverte par la forclusion.

En précisant l’application de l’article 173-1 du Code de procédure pénale, la Haute cour s’est rangée du côté de la réalité, de la pratique et du respect des droits de la défense.

Il reste intéressant de relever que si le requérant faisait valoir qu’il n’avait eu connaissance du courriel que postérieurement à l’avis de fin d’information, les faits ainsi que la décision de la Haute cour retiennent qu’il avait pris connaissance dudit courriel à l’occasion d’une procédure civile l’ayant opposé à un tiers en 2017, sans pour autant préciser ni le jour ni le mois. Seulement, la précision de cette date est primordiale dans la mesure où le mis en examen a fait l’objet d’une confrontation le 12 décembre 2017. En effet, s’il s’avère qu’il a eu connaissance du courriel avant cette confrontation, le délai de six mois aurait dû courir à compter du 12 décembre 2017, et non du 1er juillet 2020. Au vu de la décision de la Haute cour, le mis en examen aurait vraisemblablement eu connaissance de ce courriel postérieurement au 12 décembre 2017.

En outre, il est plausible d’envisager que la Haute cour a profité de cette décision pour étendre l’application de l’article 173-1 du Code de procédure pénale. En effet, la situation ne commandait pas un tel débat car « en tout état de cause », le requérant se trouvait dans le délai de trois mois suivant la délivrance de l’avis de fin d’information (C. proc. pén., art. 175, al. 4). Il était donc encadré par un double délai, puisque la particularité de l’espèce réside dans le fait que l’avis de fin d’information était intervenu dans le délai de six mois à compter de la dernière confrontation. Ainsi, les délais de l’article 173-1 et 175 du Code de procédure pénale se chevauchaient.

newsid:477762

Propriété intellectuelle

[Brèves] Recevabilité de la demande d’annulation d'une marque de médicament vétérinaire : pas de subordination à une interdiction préalable

Réf. : Cass. com., 27 mai 2021, n° 19-17.676, F-P (N° Lexbase : A47934TP)

Lecture: 4 min

N7728BYU

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par Vincent Téchené

Le 02 Juin 2021

► La recevabilité d'une action en annulation d'une marque fondée sur les articles L. 711-3, b), du Code de la propriété intellectuelle (N° Lexbase : L3712ADT), dans sa version antérieure à l’ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019 (N° Lexbase : L5296LTC), et R. 5141-1-1 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L8652LTM) n'est pas subordonnée à l'interdiction préalable de la marque par les autorités de santé.

Faits et procédure. La société Merial, société pharmaceutique diffusant des médicaments destinés aux animaux, est titulaire de la marque verbale « Frontline » désignant les « insecticides et produits antiparasitaires à usage vétérinaire », sous laquelle elle commercialise un antiparasitaire à base d'un principe actif dénommé « fipronil ». Une société concurrente, la société Virbac, a déposé la marque française « Fiproline » désignant également en classe 5, les « préparations vétérinaires, en particulier un antiparasitaire externe ». Depuis que le brevet qui couvrait le fipronil est tombé dans le domaine public, en mai 2009, elle commercialise sous cette marque un antiparasitaire pour chiens et chats à base de ce principe actif, fabriqué par la société Alfamed.

La société Merial, devenue la société Boehringer, a assigné les sociétés Virbac et Alfamed en paiement de dommages-intérêts et annulation de la marque « Fiproline » pour atteinte à la renommée de sa marque « Frontline », subsidiairement, pour contrefaçon de celle-ci, ainsi qu'en annulation de la marque « Fiproline » sur le fondement des articles L. 711-3, b), du Code de la propriété intellectuelle et R. 5141-1-1 du Code de la santé publique.

Déboutée de sa demande pour atteinte à la renommée de sa marque « Frontline » sur le fondement de l'article L. 713-5 du Code de la propriété intellectuelle (N° Lexbase : L5812LTG) et de sa demande d'annulation de la marque française « Fiproline », la société Boehringer a formé un pourvoi en cassation.

Décision.  La Cour de cassation répond donc aux deux moyens.

  • Sur l’atteinte à la renommée de la marque

La Cour de cassation rappelle, en premier lieu, que l'usage d'un signe qui ne présente aucune similitude avec une marque n'est pas de nature à permettre de tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de cette marque ou à leur porter préjudice, au sens de l'article L. 713-5 du Code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019.  

En l’espèce, l'arrêt d’appel retient que la comparaison des signes selon une approche globale écarte toute similitude entre les marques « Frontline » et « Fiproline », qu'elle soit visuelle, auditive ou intellectuelle.

Il en résulte ainsi, selon la Haute juridiction, que l'usage de la marque « Fiproline » n'a pas pu porter atteinte à la renommée, à la supposer établie, de la marque « Frontline ». Dès lors, par ce motif de pur droit, l’arrêt d’appel se trouve légalement justifié, en ce qu’il a débouté la société titulaire de la marque de sa demande en atteinte à la renommée de cette dernière.

  • Sur l’annulation de la marque

En second lieu, la Cour de cassation rappelle qu’aux termes des articles L. 711-3, b) et L. 714-3 (N° Lexbase : L3736ADQ) du Code de la propriété intellectuelle, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019, est déclaré nul par décision de justice l'enregistrement d'une marque contraire à l'ordre public ou aux bonnes mœurs, ou dont l'utilisation est légalement interdite. En outre, il résulte de l’article R. 5141-1-1 du Code de la santé publique que, lorsque le nom d'un médicament vétérinaire est un nom de fantaisie, celui-ci ne peut se confondre avec une dénomination commune.

Or, pour débouter la société Merial de sa demande d'annulation de la marque « Fiproline », l'arrêt d’appel énonce que cette marque n'a fait l'objet d'aucune interdiction d'utilisation par les autorités de santé, de sorte qu'elle ne saurait être considérée comme contraire à l'ordre public et que la société Merial est irrecevable à se prévaloir des dispositions combinées des articles R. 5141-1-1 du Code de la santé publique et L. 711-3, b), du Code de la propriété intellectuelle.

La Cour de cassation censure, sur ce point, l’arrêt d’appel : en statuant ainsi, alors que la recevabilité d'une action en annulation d'une marque fondée sur les articles L. 711-3, b), du Code de la propriété intellectuelle et R. 5141-1-1 du Code de la santé publique n'est pas subordonnée à l'interdiction préalable de la marque par les autorités de santé, la cour d'appel a violé les textes visés.

newsid:477728

Responsabilité médicale

[Brèves] Produits défectueux : caractère récursoire (et non subrogatoire) de l’action de l’établissement de santé contre le producteur

Réf. : CE 5° et 6° ch.-r., 27 mai 2021, n° 433822, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A16364TR)

Lecture: 3 min

N7763BY8

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par Laïla Bedja

Le 02 Juin 2021

► L'établissement public de santé ayant utilisé un produit défectueux dans le cadre d'une prestation de soins n'a pas la qualité de fournisseur de ce produit au sens de l'article 1386-7 du Code civil, devenu son article 1245-6 (N° Lexbase : L0626KZ9) ; l'indemnisation versée à la victime par cet établissement public ne l'est donc pas en raison de ce que l'établissement serait fournisseur du produit, mais en raison de ce qu'il est responsable, même en l'absence de faute de sa part, des conséquences dommageables, pour les usagers, de la défaillance des produits et appareils de santé qu'il utilise ; par suite, l'action exercée contre le producteur du dispositif médical défectueux par l'établissement public de santé ayant été condamné à ce titre à indemniser la victime, ne peut être regardée comme celle d'un établissement de santé qui aurait été subrogé dans les droits de la victime en qualité de fournisseur ; elle constitue l'action propre, à caractère récursoire, dont dispose l'établissement de santé à l'encontre du producteur.

Les faits et procédure. À la suite d’une opération réalisée en 2009 au sein d’un centre hospitalier universitaire, une patiente a subi un accident médical résultant de la défaillance d’un dispositif dit « pantalon anti-G », livré à l’établissement de santé par la société D.. Ayant procédé à une indemnisation transactionnelle de la victime, l’assureur de l’établissement a saisi le tribunal administratif d’Orléans d’une demande tendant à ce que la société D. soit condamnée à lui rembourser le montant de la réparation versée à la patiente.

Le tribunal administratif et la cour administrative d’appel (CAA Nantes, 21 juin 2019, n° 17NT02106 N° Lexbase : A4180ZLE) ayant rejeté la demande de l’assureur, il a formé un pourvoi en cassation.

Rejet (mais cassation sur un autre point). Sur la demande tendant à la condamnation de la société D. au titre de la responsabilité du fait des produits défectueux, la Haute juridiction rejette le pourvoi et dit que la cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit. Ainsi, en en déduisant que le délai de dix ans qui, en vertu de l'article 1386-16 du Code civil (N° Lexbase : L1509ABI), avait commencé à courir à compter de la livraison du produit en 2004, était expiré à la date d'introduction de l'action indemnitaire engagée par l’assureur devant le tribunal administratif en 2016 et que la saisine de la commission de conciliation et d'indemnisation par la patiente le 27 juin 2012, saisine qui n'avait en tout état de cause pas le caractère d'une action en justice, n'avait pu avoir pour effet d'interrompre ce délai, la cour n'a pas davantage commis d'erreur de droit.

Pour en savoir plus : v. ÉTUDE : La responsabilité civile sans faute des établissements de santé publics, La Directive, la jurisprudence et la loi du 4 mars 2002, in Droit médical, Lexbase (N° Lexbase : E15413TA) ; et la jurisprudence en ce sens CE, Section, 25 juillet 2013, n° 339922, Falempin, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A1195KKH).

newsid:477763

Voies d'exécution

[Brèves] Quid de la date de prise d’effet de l’astreinte ? Notification ou signification de la décision ?

Réf. : Cass. civ. 2, 27 mai 2021, n° 19-25.127, F-D (N° Lexbase : A47804T9)

Lecture: 2 min

N7748BYM

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par Alexandra Martinez-Ohayon

Le 02 Juin 2021

► La deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans son arrêt rendu le 27 mai 2021, rappelle que l'astreinte prend effet à la date fixée par le juge.

Faits et procédure. Dans cette affaire, les comités d’une société ont été condamnés à verser in solidum le salaire au demandeur, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par infraction constatée. Le salarié, passé le délai d’un mois suivant la signification de l’arrêt, a saisi le juge de l’exécution aux fins de liquidation de l’astreinte.

Le pourvoi. Le demandeur fait grief à l'arrêt de la cour d'appel (CA Paris, 4, 8, 3 octobre 2019, n° 18/16805 N° Lexbase : A3928ZQK) de l’avoir débouté de sa demande tendant à la liquidation de l’astreinte.

L’intéressé fait valoir que les décisions rendues en matière prud’homale sont notifiées par le greffe, et que la notification fait courir l’astreinte.

En l’espèce, l’arrêt ayant prononcé l’astreinte avait indiqué que cette dernière commencerait à courir un mois à compter de la signification de la décision. Par ailleurs, la cour d’appel a déduit que l’astreinte n’avait pas commencé à courir, du fait que le demandeur produisait les notifications de l’arrêt auxquelles le greffe de la cour avait procédé, sans produire les significations de la décision, et sans alléguer y avoir procédé.

Solution. Énonçant le principe susvisé au visa de l’article R. 131-1 du Code des procédures civiles d’exécution (N° Lexbase : L2179ITU), les Hauts magistrats valident le raisonnement de la cour d’appel, précisant qu’elle a à bon droit retenu que la signification n'était pas synonyme de notification, et exactement déduit que l’astreinte n’avait pas commencé à courir.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La prévention des difficultés d’exécution : l’astreinte, Le montant, les modalités et le point de départ de l'astreinte (CPCEx, art. R. 131-1), in Voies d’exécution, (dir. N. Fricéro et G. Payan), Lexbase (N° Lexbase : E8338E8C).

 

 

newsid:477748

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