Commet une faute de nature à engager sa responsabilité, l'établissement hospitalier qui n'a pas mis en oeuvre les moyens nécessaires pour identifier le syndrome des loges, nonobstant l'existence de signes évocateurs. Le lien de causalité entre la faute et le dommage étant établie, le préjudice de perte de chance indemnisable s'évalue à une fraction du dommage corporel en fonction de la chance perdue. Tels sont les apports du jugement rendu par le tribunal administratif d'Orléans le 12 mars 2015 (TA Orléans, 12 mars 2015, n° 1204190
N° Lexbase : A1320NEM). En l'espèce, M. P. a été hospitalisé en urgence au centre hospitalier de Dreux à la suite d'un accident d'équitation. Il a été opéré le même jour d'une fracture ouverte du tibia et du péroné gauche. A la suite de cette intervention, M. P. s'est plaint auprès de l'équipe médicale, dès les premières heures qui ont suivi, de douleurs très importantes dans le milieu de la jambe. Un traitement antidouleur à base de morphine lui a lors été prescrit. Continuant de souffrir après sa sortie de l'hôpital, un chirurgien lui a diagnostiqué un syndrome des loges. C'est dans ce contexte que le tribunal administratif a été saisi par M. P. d'une demande tendant à l'indemniser de l'intégralité de ses préjudices. Selon le requérant, le centre hospitalier aurait commis une faute consistant à ne pas avoir, après l'opération, diagnostiqué un syndrome des loges ou pour ne pas avoir procédé aux actes d'investigation qui auraient permis de déceler ce syndrome. Bien que l'intervention se soit déroulée dans les règles de l'art, le tribunal administratif, après expertise, applique l'article L. 1142-1 du Code de la santé publique (
N° Lexbase : L1910IEH) et retient que l'apparition des signes évocateurs d'un syndrome des loges aurait dû conduire le service à intervenir en urgence. Le centre hospitalier a donc commis une faute susceptible d'engager sa responsabilité en ne mettant pas en oeuvre les moyens nécessaires pour suivre efficacement l'évolution de la nécrose musculaire inhérente au syndrome des loges. Sur la caractérisation du lien de causalité entre la faute et le dommage, le tribunal retient que la faute commise dans la prise en charge du patient a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation. Le préjudice indemnisable résultant de la faute commise, n'est pas le préjudice corporel, mais la perte de chance d'éviter la survenance du dommage. Ainsi, la réparation incombant à l'hôpital doit être évaluée à une fraction du dommage corporel en fonction de l'ampleur de la chance perdue. Eu égard à l'importante probabilité que la prise en charge à temps du syndrome des loges aurait permis de traiter cette pathologie, l'ampleur de la perte de chance est évaluée à 100 % .
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