La lettre juridique n°247 du 8 février 2007 : Procédure civile

[Textes] Le décret du 23 décembre 2006 : un Noël du procédurier pas comme les autres !

Réf. : Décret n° 2006-1805, 23 décembre 2006, relatif à la procédure en matière successorale et modifiant certaines dispositions de procédure civile (N° Lexbase : L9637HT4)

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[Textes] Le décret du 23 décembre 2006 : un Noël du procédurier pas comme les autres !. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/3208909-textes-le-decret-du-23-decembre-2006-un-noel-du-procedurier-pas-comme-les-autres
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par Christian Boyer, Avoué à la cour d'appel de Toulouse

le 07 Octobre 2010

Chaque année, à Noël, les Codes de procédures civiles anciens et nouveaux font leur toilette. L'année 2006 n'aura pas dérogé à la règle, si ce n'est par la multiplicité des sujets abordés et par le morcellement accru des textes désormais en vigueur. Entré en vigueur au 1er janvier 2007, le texte du 23 décembre dernier, qui fait suite aux réformes récentes du Code civil, révise les règles procédurales des successions, des régimes matrimoniaux, du divorce, de la procédure de prise à partie, essayant, également, de parfaire la cohérence dans le domaine des significations et des saisies immobilières, récemment rénovées. La présente ne peut prétendre faire un tour complet de chacune des matières ci-dessus. Tout au plus peut-elle espérer attirer l'attention des professionnels sur certaines règles essentielles en regrettant certaines lacunes. I - Les successions

Le décret ne pouvait faire moins qu'adapter les règles existantes à l'importante loi du 23 juin 2006 ayant réformé les successions (loi n° 2006-728, 23 juin 2006, portant réforme des successions et des libéralités N° Lexbase : L0807HK4).

  • L' apposition des scellées

Elle peut, désormais, être sollicitée par le "pacsé " autant que par le conjoint, et par le mandataire désigné pour l'administration de la succession autant que par l'exécuteur testamentaire, l'article 1034 du Nouveau Code de procédure civile ayant été revu.

  • L'inventaire

Les textes des articles 1128 à 1133 du Nouveau Code de procédure civile ont été intégralement créés. Ils précisent que l'inventaire peut être requis par ceux qui peuvent demander l'apposition des scellées ainsi que par le curateur à la succession vacante.

Ils déterminent les personnes qui doivent être appelées à l'inventaire.

L'inventaire obéira aux règles propres du professionnel qui l'établit (commissaire-priseur, huissier de justice ou notaire), le texte déterminant les mentions spécifiques de cet acte quel que soit le professionnel rédacteur. Il consistera en une liste numérotée des éléments d'actifs et pourra contenir le cas échéant la relation des qualités et droits de ceux prétendant à la communauté ou à la succession ainsi que la consistance active et passive de la communauté résultant des éléments remis au notaire.

Il est précisé qu'en cas de difficulté lors de l'établissement de l'inventaire le président du tribunal de grande instance sera saisi et statuera en la forme des référés.

  • L'option successorale

Les articles 1334 à 1338 du NCPC sont créés. Ils déterminent les règles propres à "l'acceptation à concurrence de l'actif net", à la renonciation et à l'option du conjoint survivant, tout ceci en étroite relation avec les règles du Code civil. La déclaration d'acceptation à concurrence de l'actif net (anciennement dénommé acceptation sous bénéfice d'inventaire) sera faite par déclaration au greffe du tribunal de grande instance contre récépissé. Le texte fixe les modalités de publicité de cette mesure et de règlement de ses frais. Quant à la déclaration de renonciation à une succession, elle sera également faite au greffe du tribunal de grande instance et pourra être révoquée. Enfin, par référence aux articles 757 (N° Lexbase : L3361AB4) et 758-3 (N° Lexbase : L3483AWW) du Code civil, le conjoint successible devra exercer l'option par lettre recommandée avec accusé de réception.

  • Les successions vacantes et les successions en déshérence

Ce sont également des textes nouvellement créés (article 1343 à 1354) qui fixent les modalités d'intervention du curateur, en lien avec les dispositions des articles 809-1 (N° Lexbase : L9885HNG) et suivants du Code civil, notamment, quant à l'établissement de l'inventaire, aux formalités de déclaration de créance et à la vente des biens dépendant de la succession. La reddition de compte en fin de curatelle, ainsi que les recours des héritiers et les modes de réalisation des actifs subsistants sont également délimités.

  • Le mandataire successoral judiciaire

Les articles 1355 à 1357 sont créés pour établir les modalités de l'enregistrement de sa désignation, de l'information qui lui est due par les héritiers, son pouvoir de les convoquer, et de la surveillance exercée sur lui par le président du tribunal de grande instance.

  • Le partage

Comme dans la loi, il est distingué le partage amiable et le partage judiciaire.

Dans le cadre du partage amiable, le représentant de l'héritier défaillant sollicite l'autorisation de consentir au partage amiable en transmettant le projet de partage au juge, une fois approuvé par les co-partageants. Cette autorisation est donnée en dernier ressort.

Dans le cadre du partage judiciaire, les textes fixent les règles quant à l'assignation, à ses modalités de délivrance, précisent les cas où le tribunal ordonne le partage ou la licitation, au besoin après expertise.

Au cas de tirage au sort, ce dernier est réalisé devant notaire et, à défaut, devant le président du tribunal de grande instance, les héritiers défaillants étant représentés par une personne désignée par le président du tribunal de grande instance.

Ramassés dans les dispositions particulières prévues aux articles 1364 à 1376 du NCPC, les pouvoirs du notaire et ceux de surveillance du juge sont clairement délimités. A noter que l'article 1376 reprend les règles du procès verbal de difficulté avec renvoi par le notaire devant le juge des co-partageants. Les règles de la procédure, alors contentieuse, ne paraissent pas clairement déterminées.

Enfin, les articles 1377 et 1378 déterminent le régime de la licitation, des immeubles et des meubles, précisant que si tous les indivisaires sont capables et présents, ils peuvent décider à l'unanimité que l'adjudication se déroulera entre eux.

  • Les dispositions communes

Les articles 1379 à 1381 permettent à ceux qui avaient encore quelque espoir sur la clarté des textes de voir dissipée toute illusion. Ces trois textes, même s'ils ne contiennent que quelques lignes, renvoient à pas moins de 26 articles du Code civil, espérant déterminer les compétences du président du tribunal de grande instance, qui dans certains cas statuera "en la forme des référés".

II - Le changement de régime matrimonial

Le texte réforme, ici, des textes existants, les articles 1300 à 1303 du Nouveau Code de procédure civile.

C'est l'article 1397 du Code civil (N° Lexbase : L0272HPR) qui gouverne la matière. Le décret détermine, cependant, les personnes qui seront informées et les modalités des oppositions, ainsi que la publicité du changement de régime matrimonial et ses délais. On peut regretter qu'il faille attendre un arrêté du Garde des sceaux pour connaître le contenu de l'information prévue au deuxième alinéa de l'article 1397 du Code civil, ce qui fait perdre la cohérence d'ensemble de ce texte. L'homologation du changement de régime matrimonial sera sollicitée devant le tribunal de grande instance de la résidence de la famille, selon la procédure gracieuse.

III - Le divorce

Continuant la "visite à rebours" du NCPC, c'est, cette fois, par ajout des articles 1136-1 à 1136-3 que le décret tente de régler des opérations de liquidation et partage des intérêts patrimoniaux par renvoi aux textes du NCPC relatifs à l'administration de la preuve et plus particulièrement aux pouvoirs du technicien et de l'expert.

IV - La procédure de prise à partie

Elle vient compléter le Titre X du Premier livre du NCPC, par la création d'un cinquième chapitre, comprenant les articles nouveaux 366-1 à 366-9.

On ne pourra que regretter l'incapacité flagrante des rédacteurs à unifier ce texte avec les articles 505 à 516 de l'ancien Code de procédure civile, régissant les règles de la prise à partie, qui restent applicables,même si le rédacteur du décret a pris soin, in fine, d'abroger certains articles du Code de procédure civile (507-509 ; 511 ; 512 ; 514 et 515).

Une telle juxtaposition de textes peut faire douter de la possibilité de voir, un jour, un seul Code de procédure civile exister en France !

Une requête pour être autorisée à engager la procédure de prise à partie est déposée devant le premier président de la cour d'appel. Probablement dans le but de limiter ces recours, elle ne pourra être régularisée que par un avoué prés la cour et devra contenir l'énoncé des faits reprochés au juge, ainsi que les pièces justificatives. Si le premier président donne l'autorisation, l'affaire est fixée devant deux chambres réunies de la cour d'appel, le greffier informant le juge et le président de sa juridiction de cette décision "par tout moyen".

Si le premier président refuse d'autoriser cette procédure, un recours devant la Cour de cassation peut être formé dans les quinze jours de son prononcé, selon la procédure sans représentation obligatoire.

Il est à noter que le requérant, lorsque la procédure est autorisée et fixée, assigne le juge en vue de l'audience en annexant à son assignation copie de la requête de la décision du premier président et des pièces justificatives. L'huissier de justice notifiera par lettre recommandée avec accusé de réception une copie de cette assignation au Ministère public. De façon plus que curieuse, le texte de l'article 366-8 prévoie que, lors de l'audience, les règles de la procédure sans représentation obligatoire s'appliqueront.

En outre, lorsque la prise à partie est fondée sur le déni de justice, le requérant devra produire deux sommations de juger délivrées par huissier de justice dans un laps de temps supérieur à 8 jours. L'incohérence de ces règles et de leur codification révèle l'embarras des magistrats devant ce type de procédure.

V - Les significations

Deux petites précisions et clarification de texte : d'une part, il est précisé dans l'article 656 du NCPC (N° Lexbase : L7673HEW) que ce mode de signification constitue une signification à domicile ; d'autre part, la cohérence de l'article 1418 du même code, concernant la convocation par le greffier de toutes les parties en vue de l'audience d'injonction de payer, est revue.

VI - Autres dispositions

C'est le traditionnel "fourre tout" de ces décrets de toilettage. Pour l'essentiel, le rédacteur du décret s'est aperçu de certaines lacunes dans les textes récents concernant la saisie immobilière. Il complète certains articles, modifiant certains délais. Allongés de deux jours ou raccourcis de cinq, le souci du détail va jusqu'à réduire le délai à l'issue duquel les enchères sont écoulées de 3 minutes à 90 secondes (art. 9 du décret) !

L'avocat pourra compléter, par une déclaration écrite, remise au greffe dans les trois jours ouvrables de l'audience d'adjudication les renseignements d'identité concernant l'adjudicataire.

A noter également que l'article 125-1 s'ajoute dans le décret du 27 juillet 2006 (décret n° 2006-936, 27 juillet 2006, relatif aux procédures de saisie immobilière et de distribution du prix d'un immeuble N° Lexbase : L3872HKM) pour prévoir qu'au bout de six mois la consignation du prix de vente par l'acquéreur produit à l'égard du débiteur tous les effets d'un paiement.

Enfin l'entrée en application du décret est fixée au 1er janvier 2007, une mesure particulière destinée à assurer la cohérence des dates d'entrée en vigueur étant prévue en ce qui concerne les indivisions existantes et les successions non ouvertes non encore partagées.

On l'aura compris ce décret continue de disperser certains textes qu'il était nécessaire de moderniser et rectifie les erreurs de certains autres très récents et peu préparés.

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