La lettre juridique n°852 du 28 janvier 2021

La lettre juridique - Édition n°852

Assurances

[Brèves] Déchéance du contrat pour déclaration tardive : encore faut-il que la clause de déchéance soit conforme aux dispositions d’ordre public

Réf. : Cass. civ. 2, 21 janvier 2021, n° 19-13.347, FS-P+I (N° Lexbase : A30894DR)

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 27 Janvier 2021

► Une déclaration tardive de sinistre ne peut être sanctionnée par la déchéance du contrat lorsque la clause prévoyant cette déchéance n’est pas conforme aux dispositions d’ordre public de l’article L. 113-2, 4°, du Code des assurances (N° Lexbase : L9563LGB).

En l’espèce, une EARL avait souscrit un contrat d’assurance « multi-périls sur récoltes ». Le 6 novembre 2013, à la suite du refus d’un client d’accepter sa récolte d’oignons, elle a adressé une déclaration de sinistre à l’assureur, qui avait dénié sa garantie en invoquant, notamment, le caractère tardif de cette déclaration. Après dépôt du rapport de l’expert dont elle avait obtenu la désignation en référé, l’EARL a assigné l’assureur en paiement de certaines sommes.

Pour débouter l’EARL de ses demandes, la cour d’appel avait retenu que le rapport de l’expert judiciaire mentionnait que le sinistre climatique ayant affecté la culture d’oignons pouvait être détecté dès le mois de mai 2013 et que les conséquences en étaient visibles à la mi-août. Elle en avait déduit que l’EARL aurait dû déclarer le sinistre au plus tard à ce moment de sorte que sa déclaration, intervenue le 6 novembre 2013, avait été tardive et qu’un tel retard avait été préjudiciable à l’assureur.

Le raisonnement est censuré par la Haute juridiction qui rappelle que  « l’article L. 113-2, 4°, du Code des assurances (N° Lexbase : L9563LGB), déclaré d’ordre public par l’article L. 111-2 du même code, dispose, d’une part, que l’assuré est obligé de donner avis à l’assureur, de tout sinistre de nature à entraîner la garantie de celui-ci, dès qu’il en a eu connaissance et au plus tard dans le délai fixé par le contrat, qui ne peut être inférieur à cinq jours ouvrés mais peut être prolongé d’un commun accord entre les parties et, d’autre part, que lorsqu’elle est prévue par une clause du contrat, la déchéance pour déclaration tardive ne peut être opposée à l’assuré que si l’assureur établit que le retard dans la déclaration lui a occasionné un préjudice ».

Il s’en déduit, selon la Haute juridiction, que « l’assureur ne peut opposer à l’assuré une déchéance pour déclaration tardive lorsque le contrat applicable ne comporte pas de clause l’édictant ou lorsque la clause la prévoyant n’est pas conforme à ces dispositions, qui n’autorisent pas d’autres modifications conventionnelles que la prorogation du délai de déclaration de sinistre ».

Aussi, en l’espèce, les juges d’appel ont violé les textes susvisés en retenant la déchéance du contrat pour déclaration tardive, alors qu’il n’était pas contesté que la clause de déchéance invoquée par l’assureur prévoyait un délai de déclaration de sinistre inférieur au délai minimal légal de cinq jours ouvrés, ce dont il résultait qu’elle n’était pas opposable à l’assuré.

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Contrats administratifs

[Jurisprudence] Retour sur la résiliation tacite d’un contrat administratif par l’administration

Réf. : CE 2° et 7° ch.-r., 11 décembre 2020, n° 427616, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A653339T)

Lecture: 12 min

N6223BY7

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par Thomas Vaseux et Sandra Hahn Duraffourg, Avocats au barreau de Paris, De Gaulle Fleurance & Associés

Le 28 Janvier 2021

 


Mots clés : contrats administratifs – résiliation – circonstances exceptionnelles

Par un arrêt du 11 décembre 2020, le Conseil d'État a confirmé la possibilité pour un contrat administratif d’être regardé comme tacitement résilié par l’administration.


 

Cette décision s’inscrit dans le prolongement de sa jurisprudence « Département de la Seine-Saint-Denis » du 27 février 2019 [1].

Dans cette affaire, une commune avait confié en 1995 à un opérateur économique la réalisation d’une zone d’aménagement concertée. La convention d’aménagement prévoyait la construction de 94 logements en quatre tranches successives. Or, si la première tranche s’est achevée en 2000, les trois dernières tranches n’ont jamais été engagées en raison des conclusions d’une étude hydraulique réalisée en 1996 faisant état de risques d’inondation. En réponse à une relance du titulaire du contrat en 2012, la commune a indiqué que l’aménagement des zones concernées par les trois dernières tranches était arrêté pour un motif d’intérêt général.

Cette information a conduit le cocontractant à saisir le juge administratif d’une requête indemnitaire tendant à la réparation du préjudice subi du fait notamment de la résiliation de la convention par la commune. Le tribunal administratif de Marseille a rejeté la requête de l’opérateur et la cour administrative d’appel de Marseille a ensuite rejeté l’appel intenté par l’opérateur. Dans son arrêt en date du 26 novembre 2018, la cour administrative d’appel de Marseille relevait notamment que la convention n’avait pas été résiliée par la commune.

Le cocontractant s’est ensuite pourvu en cassation devant le Conseil d’État. La Haute juridiction a annulé l’arrêt de la cour administrative d’appel en considérant que la convention d’aménagement avait été, au regard du comportement non équivoque de la commune, tacitement résiliée par cette dernière.   

Cet arrêt permet ainsi au Conseil d’État de réaffirmer la reconnaissance d’une résiliation tacite d’un contrat administratif par l’administration (I). Une telle résiliation tacite, dont certaines implications pratiques demeurent encore à déterminer, n’est susceptible d’être caractérisée que dans des hypothèses exceptionnelles (II).           

I. La réaffirmation de la résiliation tacite d’un contrat administratif par l’administration

La reconnaissance de la possibilité pour un contrat administratif d’être regardé comme ayant été tacitement résilié par l’administration n’a été explicitement affirmée que très récemment par la jurisprudence (A) dans un souci de préservation des intérêts du cocontractant (B).

A. La consécration tardive de la possibilité pour un contrat administratif d’être résilié tacitement par l’administration

La possibilité pour l’administration de résilier unilatéralement un contrat administratif, notamment en cas de faute de son cocontractant ou pour motif d’intérêt général, est reconnue depuis longtemps par la jurisprudence [2]. Cette faculté est désormais codifiée, pour les marchés publics et les concessions, dans le Code de la commande publique [3].

La jurisprudence ne s’est toutefois que très rarement intéressée à la matérialisation de la décision de résiliation. La résiliation d’un contrat résulte en effet en général d’une décision expresse et seules quelques décisions anciennes du Conseil d’État, recensées par le rapporteur public Gilles Pellissier dans ses conclusions sur l’arrêt « Département de la Seine-Saint-Denis » [4], ont pu déduire du comportement de l’administration la volonté de celle-ci de résilier tacitement un contrat [5]. Ce manque de jurisprudence contraste avec les nombreuses hypothèses dans lesquelles le juge administratif déduit du comportement de l’administration l’existence de décisions tacites. C’est notamment le cas s’agissant de la réception tacite de prestations [6], de la renonciation à une partie des travaux [7], ou encore de la renonciation à l’application de pénalités de retard [8].  Cette jurisprudence peu nombreuse en matière de résiliation tacite se justifie au regard des effets d’une telle résiliation sur la force obligatoire du contrat et la sécurité des relations contractuelles.

Ce n’est ainsi que dans son arrêt « Département de Seine Saint-Denis » précité du 27 février 2019 que le Conseil d’État a consacré explicitement la possibilité pour un contrat administratif d’être regardé comme tacitement résilié par l’administration, tout en réitérant le principe du caractère formel de la résiliation. Ce principe, repris par le Conseil d’État dans la décision ici commentée, a pour objet de protéger les intérêts du cocontractant de l’administration.

  1. B. La nécessité de préserver les intérêts du cocontractant de l’administration

La relation contractuelle entre l’administration et son cocontractant est, pour les contrats administratifs, profondément asymétrique.

En effet, l’administration bénéficie de prérogatives exorbitantes du droit commun (lui permettant notamment de résilier ou de modifier unilatéralement le contrat pour motif d’intérêt général). De plus, le cocontractant ne peut en principe se délier de ses obligations contractuelles en invoquant l’inexécution par l’administration de ses propres obligations. Ce refus de l’exception d’inexécution a toutefois été nuancé par le Conseil d’État qui a admis la possibilité – étroitement conditionnée – pour le cocontractant de l’administration de résilier le contrat en cas de faute de l’administration [9]. Cette faculté est toutefois subordonnée à l’existence d’une clause en ce sens et ne peut être mise en œuvre pour les contrats ayant pour objet l’exécution d’un service public. En outre, la personne publique dispose de la possibilité d’opposer un motif d’intérêt général à son cocontractant qui sera ainsi contraint de poursuivre l’exécution du contrat. Le caractère effectif de cette faculté est ainsi, dans la plupart des cas, très relatif.

Face à l’inertie de l’administration n’exécutant pas ses obligations contractuelles, le cocontractant peut alors seulement envisager l’engagement de la responsabilité contractuelle pour faute si cette dernière est caractérisée, et le cas échéant obtenir une indemnité, voire une condamnation de l’administration à exécuter ses obligations [10].

La reconnaissance d’une résiliation tacite d’un contrat du fait du comportement de l’administration permet ainsi d’équilibrer davantage les relations entre l’administration et ses cocontractants. Cette résiliation tacite permettra ainsi au cocontractant de « passer à autre chose » en obtenant, le cas échéant, une indemnité, ou alors à l’inverse de saisir le juge d’un recours en reprise des relations contractuelles [11]. Toutefois, la résiliation d’un contrat résultant de comportements de l’administration doit rester l’exception à la règle selon laquelle la résiliation intervient en principe de manière formelle. Ce caractère exceptionnel est rappelé ici par le Conseil d’État qui précise qu’un contrat « doit être regardé comme tacitement résilié lorsque, par son comportement, la personne publique doit être regardée comme ayant mis fin, de façon non équivoque, aux relations contractuelles ».

II. L’appréciation du comportement de l’administration et les conséquences de la reconnaissance de la résiliation tacite

L’appréciation du comportement de l’administration s’effectue au travers d’un faisceau d’indices permettant de limiter de façon stricte les cas dans lesquels la résiliation tacite peut être constatée et sur lequel le Conseil d’État apporte des précisions (A). La résiliation tacite d’un contrat administratif soulève toutefois des nouvelles interrogations (B).

  1. A. L’appréciation stricte de la volonté de l’administration de résilier le contrat : l’utilisation d’un faisceau d’indices

Dans la continuité de sa jurisprudence « Département de la Seine-Saint-Denis » précitée, le Conseil d’État va d’abord rappeler que l’existence d’une résiliation tacite du contrat s’apprécie souverainement par le juge « au vu de l’ensemble des circonstances de l’espèce ». Ces circonstances peuvent notamment résulter « des démarches engagées par la personne publique pour satisfaire les besoins concernés par d'autres moyens, de la période durant laquelle la personne publique a cessé d'exécuter le contrat, compte tenu de sa durée et de son terme, ou encore de l'adoption d'une décision de la personne publique qui a pour effet de rendre impossible la poursuite de l'exécution du contrat ou de faire obstacle à l'exécution, par le cocontractant, de ses obligations contractuelles ».

Il s’en infère que deux séries de comportements permettent de déduire la volonté de l’administration de résilier tacitement un contrat. D’une part, l’administration peut adopter un comportement « positif » résultant par exemple dans l’engagement de démarches pour satisfaire les besoins du contrat litigieux par un autre moyen (par exemple par la conclusion d’un contrat distinct ayant un périmètre et un objet identique), ou encore par l’adoption d’une décision rendant impossible l’exécution du contrat. D’autre part, l’administration peut à l’inverse faire preuve d’un comportement « négatif » en s’abstenant d’exécuter le contrat pendant une certaine période. A l’évidence, les comportements « positifs » de l’administration sont moins susceptibles d’interprétation et apparaissent les mieux à même de caractériser une volonté univoque de l’administration de résilier un contrat. Il n’est toutefois pas nécessaire de caractériser à la fois l’existence de comportements « positifs » et de comportements « négatifs » pour caractériser la volonté de l’administration de mettre un terme à une relation contractuelle. Tout sera une question d’appréciation des circonstances de l’espèce.

Ainsi, dans l’arrêt « Département de la Seine-Saint-Denis » précité, le Conseil d’État avait considéré que l’absence de nouvelles commandes depuis le transfert du contrat au nouveau titulaire et la conclusion par la personne publique d’un nouveau marché de maintenance ayant le même objet que le marché en litige étaient des circonstances permettant de considérer que l’administration avait mis fin de façon non-équivoque à un contrat.

Dans le présent arrêt du 11 décembre 2020, la renonciation de la commune à poursuivre l’exécution du contrat apparaissait également de façon flagrante. En effet, aucun aménagement de la zone d’aménagement concertée n’avait eu lieu après l’achèvement de la première tranche du programme en 2000 et la commune avait informé le titulaire du contrat, en 2012, de l’arrêt de l’aménagement pour le motif d’intérêt général représenté par le risque d’inondation, sans toutefois ni faire état d’une perspective de reprise des travaux, ni des mesures envisagées afin de remédier à ce risque. Ces éléments ont permis au Conseil d’État de considérer que le contrat devait être regardé comme résilié.

  1. B. Les interrogations soulevées par la reconnaissance de la résiliation tacite

La reconnaissance de la résiliation tacite n’est pas sans poser de nouvelles interrogations qui ont vocation à être encadrées et précisées par la jurisprudence.

La première interrogation réside dans la validité d’une telle résiliation. En effet, il apparaît que, le plus souvent, une telle résiliation tacite devrait être regardée comme irrégulière en ce qu’elle serait dépourvue de motif. Il doit toutefois être noté que tel n’était pas le cas dans l’arrêt commenté où la résiliation tacite a été regardée comme une résiliation pour motif d’intérêt général. En tout état de cause, qu’elle soit irrégulière [12] ou justifiée par un motif d’intérêt général, la résiliation tacite du contrat devrait en principe ouvrir le droit du cocontractant à la réparation intégrale de son préjudice. Le caractère irrégulier de cette résiliation, en raison notamment de l’absence de motif, pourrait toutefois permettre au cocontractant de l’administration de contester la résiliation par le biais d’un recours en reprise des relations contractuelles [13].

La deuxième interrogation réside dans la détermination du point de départ du délai dans lequel le recours en reprise des relations contractuelles doit être introduit. En effet, la jurisprudence considère qu’une telle action doit être intentée dans les deux mois à compter de la date à laquelle le cocontractant « a été informé de la mesure de résiliation ». Un tel principe ne pose pas de difficulté dans le cas de résiliation formelle mais interroge dans l’hypothèse d’une résiliation tacite.

Une dernière interrogation porte sur la détermination de la date à laquelle le contrat doit être regardé comme résilié. Cette date est en effet essentielle afin notamment de déterminer l’étendue du préjudice subi par le cocontractant. Dans l’hypothèse d’une résiliation tacite, notamment lorsqu’une telle résiliation résulte d’une inertie de l’administration, la détermination de cette date risque de s’avérer délicate.

A retenir :

Un contrat administratif peut être regardé comme tacitement résilié du fait d’un comportement non équivoque de l’administration. Ce comportement peut résulter notamment d’actes positifs (décisions faisant obstacle à l’exécution du contrat, conclusion d’un nouveau contrat ayant un objet et un périmètre identique) ou de comportements « négatifs » (absence d’exécution du contrat par l’administration) sur lequel les cocontractants de l’administration doivent rester attentifs. La volonté de l’administration de résilier tacitement un contrat sera appréciée souverainement par le juge, étant précisé qu’une telle résiliation tacite devrait demeurer exceptionnelle.

 

[1] CE, 27 février 2019, n° 414114 (N° Lexbase : A2150YZN).

[2] CE, 2 mai 1958, n° 32401 (N° Lexbase : A9976Y4A), Rec., p. 246.

[3] CCP, art. L. 2195-1 (N° Lexbase : L8184LQ8) et suivants pour les marchés publics et art. L. 3136-1 (N° Lexbase : L3907LR7) et suivants pour les contrats de concession.

[4] Ces conclusions sont disponibles sur le site internet ArianeWeb.

[5] CE, 1er mars 1968, n° 67118 (N° Lexbase : A1103B7Y).

[6] CE, 12 octobre 1988, n° 67968 (N° Lexbase : A8290APQ).

[7] CE, 17 décembre 1982, n° 30259 (N° Lexbase : A2473AL8).

[8] CE, 10 mars 2010, n° 308676 (N° Lexbase : A7939ET9).

[9] CE, 8 octobre. 2014, n° 370644 (N° Lexbase : A0011MY3).

[10] CE, 18 novembre 2005, n° 271898 (N° Lexbase : A6340DLE).

[11] CE, 21 mars 2011, n° 304806 (N° Lexbase : A5712HIE).

[12] CE, 10 octobre 2018, n° 410501 (N° Lexbase : A7023YET).

[13] CE, 21 mars 2011, n° 304806 (N° Lexbase : A5712HIE).

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Covid-19

[Brèves] Interruption des délivrances de visas de regroupement familial : le Conseil d’État suspend la décision du Gouvernement

Réf. : CE, référé, 21 janvier 2021, n° 447878, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A29884DZ)

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N6186BYR

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par Marie Le Guerroué

Le 27 Janvier 2021

► Le juge des référés du Conseil d’État suspend la décision du Gouvernement d’interrompre, en raison de l’épidémie de covid-19, la délivrance de visas de regroupement familial aux conjoints et enfants d’étrangers non-européens résidant en France ; le juge estime, notamment, que cette décision porte une atteinte disproportionnée au droit à la vie familiale normale et à l’intérêt supérieur de l’enfant.

Faits/procédure. Dans le cadre de la lutte contre la covid-19, le Premier ministre avait décidé de limiter la circulation sur le territoire national des personnes en provenance de l’étranger (instruction 6239-SG du 29 décembre 2020, relative aux mesures frontalières mises en oeuvre dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire). Si, depuis cette date, les conjoints et enfants de citoyens français ou européens peuvent toujours entrer en France pour les rejoindre, les membres de la famille des ressortissants d’autres nationalités résidant en France ne le peuvent plus, sauf à de rares exceptions. La Haute juridiction administrative était saisie par plusieurs associations représentant les étrangers (notamment la CIMADE, l’ADDE, le GISTI) d’une demande de suspension de l’exécution de la décision du pouvoir réglementaire.

Une incidence limitée sur la propagation du virus. D’une part, le juge des référés relève que le nombre des personnes bénéficiant du regroupement familial équivaut en temps normal à soixante personnes par jour. L’administration n’apporte pas d’élément montrant qu’un tel flux pourrait contribuer de manière significative à une augmentation du risque de propagation de la covid-19, alors que les mesures récemment renforcées de dépistage et d’isolement, pour faire face à l’apparition des nouveaux variants, peuvent être appliquées aux intéressés comme aux personnes bénéficiant déjà d’une dérogation leur permettant d’entrer sur le territoire.

Une atteinte disproportionnée au droit à la vie familiale normale et à l’intérêt supérieur de l’enfant. D’autre part, le juge constate que la mesure attaquée porte une atteinte grave au droit à la vie familiale normale de l’ensemble des intéressés et à l’intérêt supérieur des enfants en cause, qui perdure de manière continue depuis plus de dix mois. Pourtant, les personnes concernées sont souvent contraintes, en l’état, de saisir le juge des référés du tribunal administratif de Nantes pour obtenir la régularisation de leur situation. Ainsi, et alors même que le droit de l’Union ne fait pas obstacle à ce que, face à une situation de pandémie, le Premier ministre restreigne provisoirement, par des mesures réglementaires justifiées par des considérations sanitaires, les entrées sur le territoire national, la décision contestée n’est pas proportionnée car elle ne prévoit pas de dérogations pour les bénéficiaires d’un regroupement familial.

Réponse du juge des référés du Conseil d’État. Le juge des référés estime, dès lors, qu’il existe un doute sérieux sur la légalité de la mesure en cause, qui justifie qu’elle soit suspendue.

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Covid-19

[Point de vue...] Rave party Covid : mise en danger d’autrui ?

Lecture: 12 min

N6096BYG

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par Caroline Lacroix, Maître de conférences HDR en droit privé & sciences criminelles, Université Evry-val d’Essonne - Paris Saclay

Le 27 Janvier 2021


Mots-clés : mise en danger d’autrui • covid-19 • rave party • fête clandestine


 

Revendiquant « un droit à la fête », quelque 2 400 personnes, venues de toute la France et même de l'étranger, se sont données rendez-vous du 31 décembre au samedi 2 janvier 2021 au matin pour une fête clandestine du Nouvel an organisée à Lieuron, au sud de Rennes. La rave party a eu lieu dans des hangars désaffectés d’une zone d’activités.

Selon le ministre de l’Intérieur, 1 645 verbalisations ont été dressées à l’encontre des participants. Un tweet dudit ministre indiquait que les gendarmes avaient établi « 1 225 infractions covid (masques-rassemblement-couvre-feu) + 420 infractions diverses dont 225 en lien avec les stupéfiants ». Parallèlement, L'Agence Régionale de Santé (ARS) de Bretagne, soulignant que l’évènement « présente un très fort risque de diffusion de la Covid-19 », a publié ses recommandations aux participants de la rave party de Lieuron [1].

De son côté, le parquet a ouvert une enquête notamment pour « organisation illicite d'un rassemblement festif à caractère musical », « violences volontaires sur personnes dépositaires de l'autorité publique », ou encore « infractions à la législation sur les stupéfiants et notamment la facilitation de l’usage ». Un individu a été mis en examen, notamment pour organisation illicite de cette manifestation et mise en danger de la vie d'autrui. Selon un communiqué du procureur de la République, le mis en cause aurait reconnu avoir participé à l'organisation de cet événement et communiqué le lieu de rendez-vous de la rave party à plus de 1 000 personnes. Il a été placé en détention provisoire.

Si l’organisation d’une rave party en période de crise sanitaire constitue à l’évidence une prise de risque sur le plan de la santé publique, l’infraction de mise en danger d’autrui, prévue à l’article 223-1 du Code pénal (N° Lexbase : L3399IQX), peut-elle s’appliquer ? Sans préjuger des suites judiciaires à venir et de l’éventuelle décision du tribunal correctionnel, un petit exercice de simulation, à la manière d’un cas pratique, pour tenter de répondre à cette question s’impose.

Le délit dénoncé se définit comme « Le fait d’exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement ». Cette infraction, instituée par le législateur dans le Code pénal de 1994, réprime, indépendamment de la réalisation d’un résultat, le seul comportement dangereux. Afin d’établir l’infraction, et suivant la méthodologie imposée par la Chambre criminelle, les juges doivent successivement établir l’existence d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité, imposée par la loi ou le règlement, dont la violation est susceptible de permettre la caractérisation du délit. Il leur appartient ensuite d’apprécier le caractère immédiat du risque créé, puis de rechercher si le manquement relevé résulte d’une violation manifestement délibérée de l’obligation de prudence ou de sécurité [2].

I. L’existence d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité́ imposée par la loi ou le règlement

L’infraction ne peut exister sans le support préalable d’une obligation textuelle particulière. L’identification d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement est un « préalable indispensable » à l'infraction [3]. En premier lieu, le champ d’application de l’infraction est circonscrit par la nature de l’obligation : elle doit être particulière et non générale. Une telle obligation se définit comme celle « qui impose un modèle de conduite circonstanciée », fixant de manière objective l'attitude à adopter sans faculté d’appréciation individuelle [4]. Sont ainsi particulières les obligations « objectives, immédiatement perceptibles et clairement applicables sans faculté d’appréciation personnelle du sujet » [5]. En second lieu, l’obligation visée par le texte doit être édictée par la loi ou le règlement. S’agissant de la notion de règlement, celle-ci renvoie, d’une part, à la conception constitutionnelle de la réglementation [6] et, d’autre part, ne vise que les actes à caractère général, et non les actes individuels. Aux juges de rechercher la loi ou le règlement édictant l'obligation particulière de prudence ou de sécurité qui aurait été́ violée [7].

Une telle recherche en l’espèce conduit d’abord à admettre qu’il apparait clairement qu’un certain nombre d’obligations imposées dans le cadre de la lutte contre l’épidémie peuvent être identifiées sans pour autant préjuger qu’elles puissent nécessairement suffire à caractériser l’infraction. Ainsi en est-il :

• du non-respect du couvre-feu : depuis le 15 décembre un couvre-feu de 20 heures à 6 heures est en vigueur sur l’ensemble du territoire métropolitain en vertu de l’article 2 du décret n° 2020-1582, du 14 décembre 2020, modifiant les décrets n° 2020-1262 du 16 octobre 2020 et n° 2020-1310, du 29 octobre 2020, prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire (N° Lexbase : L1030LZ8).

• du non-respect du port du masque : depuis le 20 juillet 2020, le port du masque est obligatoire à partir de l'âge de 11 ans dans les lieux publics clos ainsi que dans les bureaux non-individuels et les espaces professionnels communs depuis le 1er septembre 2020. Il peut également être imposé en extérieur dans les zones où le virus circule activement, sur décision du préfet ou du maire. Concernant la ville de Lieuron, un arrêté municipal prévoit que le port du masque est obligatoire dans toutes les rues de la ville.

Si ces deux obligations peuvent être considérées comme des obligations de prudence ou de sécurité, trouvent leur source dans un texte et présentent la particularité nécessaire, elles ne paraissent cependant pas permettre la caractérisation de l’infraction. En effet, l’infraction de mise en danger suppose de s'assurer que l'obligation violée incombe bien aux personnes poursuivies [8]. Or, en l’espèce, ces obligations s’imposent aux participants et non à l’organisateur lui-même.

En revanche, l’existence d’un arrêté préfectoral interdisant ce type de rassemblement adopté pour lutter contre l’épidémie pourrait peut-être remplir la condition préalable.

En admettant la condition préalable satisfaite, et afin de pouvoir poursuivre l’exercice, le délit suppose en second lieu une exposition directe à un risque immédiat de mort, de mutilation ou d’infirmité permanente.

II. Une exposition directe à un risque immédiat grave

Concernant la nature du risque, le législateur n’a envisagé de prendre en considération que les risques les plus importants : la mort ou les atteintes à l’intégrité physique graves. Toute la difficulté réside dans le fait de déterminer l’éventuelle gravité de conséquences qui, par hypothèse, ne se réaliseront pas. Ainsi, n’est-il nécessaire que soit constatée la contraction du covid-19 chez une victime, ici les participants à la fête illégale, la simple exposition au risque étant suffisante. L’exposition au risque doit également être directe et le risque immédiat. L’agent doit avoir créé un danger certain, actuel et non hypothétique. La condition d'immédiateté s'attache au risque lui-même, indépendamment de sa réalisation, qui peut être instantanée ou différée [9].

Le non-respect des obligations réglementaires relatives à la protection contre les risques liés à l'exposition au virus du covid-19 expose-telle de manière directe et immédiate à un risque certain de mort, ou d'infirmité permanente ? Rien n’est moins sûr.

Si l’on ne peut nier que le fait de rassembler de très nombreuses personnes en un même lieu sans respecter les gestes barrières expose vraisemblablement au risque d’une contamination, il semble plus difficile de caractériser un risque immédiat de mort ou de blessures graves. Il ne s’agit pas ici de minimiser les conséquences de l’épidémie de covid-19 laquelle a déjà fait plus de 68 000 morts sur notre territoire [10]. Mais les données épidémiologiques connues et les connaissances scientifiques seront au cœur des débats. L’existence du risque encouru par une personne contaminée par le covid-19 montre un risque de mort ou d’infirmité permanente. Néanmoins, l’exposition au virus n’implique pas nécessairement de conséquences graves. Ainsi lit-on sur le site de l’Inserm que « La façon dont se manifeste la Covid-19 est très hétérogène et une part non négligeable des personnes qui sont infectées ne développent pas de symptômes […] Dans 80% des cas environ, les symptômes restent légers ou modérés et disparaissent après 5 à 14 jours ». Enfin, concernant le profil des personnes décédées de la covid-19, il est mentionné que « Selon les données disponibles début novembre 2020, plus de 9 patients sur 10 décédés de la Covid-19 sont âgés d’au moins 65 ans », ce qui pour cette dernière donnée est loin du profil habituel du « teuffeur » !

Du reste déjà, une circulaire du 25 avril 2020 [11] admettait que « si la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement apparaît constituée par le non-respect des mesures de confinement, l’exigence tenant à la caractérisation d’un risque immédiat de mort ou de blessures graves ne parait pas remplie, au regard des données épidémiologiques connues ».

Par sa méconnaissance délibérée des obligations liées à la pandémie, l’organisateur d’une rave party participe potentiellement à la propagation du virus. Mais, sauf à considérer que la seule contamination est constitutive du risque grave, l’existence d’un lien de causalité direct entre le non-respect du confinement et l’exposition d'autrui à un risque « immédiat » de décès fera sans nul doute l’objet de débats juridiques, factuels et scientifiques, soumis à l’appréciation des juges.

III. Une violation manifestement délibérée de l’obligation

Ce dernier élément de l’infraction est sans doute celui qui posera le moins de difficulté. La seule volonté d’enfreindre la réglementation ne suffit pas à constituer l’élément moral de l’infraction. Le délit de mise en danger d’autrui suppose que l’agent a violé l’obligation considérée de manière manifestement délibérée. En revanche, le texte ne requiert pas la volonté de mettre autrui en danger. La connaissance précise du danger encouru est indifférente au titre de l’élément moral, celui-ci se caractérisant par la connaissance de l’obligation et la volonté d’agir malgré tout. Selon le Professeur Y. Mayaud « La culpabilité commence et s'arrête là où se manifeste la volonté d'agir à l'opposé de ce qui est prescrit, sans tenir compte de ce qui a pu être subjectivement perçu de danger prévisible » [12]. La Cour de cassation admet qu’il n’est pas nécessaire de constater que l'auteur du délit avait eu connaissance de la nature du risque particulier effectivement causé par son manquement [13] puisque « l’élément intentionnel de l’infraction résulte du caractère manifestement délibéré de la violation d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, de nature à causer un risque immédiat de mort ou de blessures graves à autrui » [14]. L’organisation d’une rave party comportant plusieurs milliers de personnes démontre un mépris affirmé des obligations à l’application de la réglementation relative à la lutte contre l'épidémie de covid-19 et permet de démontrer que l’intéressé a agi sciemment.

Depuis le début de la pandémie le délit de risques causés à autrui est à l’honneur. Il est invoqué à l’encontre des personnes ne respectant pas le confinement [15], des employeurs pour défaut de mise en place des mesures de protection au sein des entreprises [16], ou encore des décideurs publics pour la gestion de la crise… Mais cette incrimination, qui requiert des conditions nombreuses et précises, n’est pas, loin s’en faut, la solution irréductible de la répression de toute les formes d’« indifférence au sort d’autrui » [17].

Les organisateurs de soirées clandestines sont-ils coupables de mise en danger ? Le jugement à venir nous le dira. Mais peut-être pourrait-on souffler à l’oreille des magistrats qu’il est possible d’explorer une autre voie, non liée spécifiquement à la pandémie de covid-19. Les tribunaux ont déjà par le passé pu admettre des poursuites et des condamnations pour risques causés à autrui à l’encontre des organisateurs de rave party en raison de manquement à la réglementation prévue pour les lieux ouverts au public [18].

 

[1] Agence Régionale de Santé de Bretagne, Rassemblement techno à Lieuron : mesures destinées à freiner la propagation de la covid-19, communiqué de presse, 2 janvier 2021 [en ligne].

[2] Cass. crim., 13 novembre 2019, n° 18-82.718 (N° Lexbase : A6182ZUI) : C. Lacroix, Risques causés à autrui : une valse à 3 temps, Lexbase Pénal, décembre 2019 (N° Lexbase : N1641BYG).

[3] Cass. crim., 22 septembre 2015, n° 14-84.355 (N° Lexbase : A8406NPZ) : C. Fonteix, L’obligation, préalable indispensable du délit de risques causés à autrui, Dalloz actualité, 8 octobre 2015 [en ligne].

[4] CA Aix-en-Provence, 22 novembre 1995, n° 1405D95 (N° Lexbase : A5520XE8) : J. Borricand, note, D., 1996. 405 [en ligne] ; Doucet, note, Gaz. Pal., 1996. 1. 112.

[5] CA Grenoble, 19 février 1999 : M. Redon, note, D., 1999, p. 480; Y. Mayaud, obs., 2000. 33, ibid ; P. Le Bas, note, JCP G, 1999.II.10171 et Cass. crim., 22 septembre 2015, n° 14-84.355 (N° Lexbase : A8406NPZ) : Y. Mayaud, obs., RSC, 2015. 854.

[6] CA Aix-en-Provence, 22 novembre 1995, op. cit. ; Cass. crim., 10 mai 2000, n° 99-80.784 (N° Lexbase : A9179CG3). La violation manifestement délibérée d’un règlement de l’Union européenne qui édicte des obligations particulières de prudence et de sécurité, est également susceptible de constituer une faute de mise en danger délibérée : Cass. crim., 31 mars 2020, n° 19-82.171 (N° Lexbase : A76253KM) : F. Charlent, Blessures involontaires : précisions sur la faute de mise en danger délibérée, Dalloz actualité, 14 mai 2020 [en ligne].

[7] Cass. crim., 13 novembre 2019, no 18-82.718, F-P+B+I (N° Lexbase : A6182ZUI) : F. Charlent, Précisions sur la caractérisation du délit de risque causé à autrui, Dalloz actualité, 2 décembre 2019 [en ligne].

[8] CA Grenoble, 19 février 1999, op. cit.

[9] Cass. crim., 19 avril 2017, n° 16-80.695 (N° Lexbase : A9920U9B) : D., 2017. 869.

[10] Santé publique France, Coronavirus : chiffres clés et évolution de la COVID-19 en France et dans le Monde, 12 janvier 2021 [en ligne].

[11] Circulaire DACG, du 25 mars 2020, de présentation des dispositions applicables pendant l'état d'urgence sanitaire et relative au traitement des infractions commises pendant l'épidémie de Covid-19 (N° Lexbase : L5958LWL).

[12] Y. Mayaud, obs., RSC, 1999, p. 581.

[13] Cass. crim., 16 février 1999, n° 97-86.290 (N° Lexbase : A9291ATB) : A. Cerf, note, D. 2000, p. 9 ; Cass. crim., 1er juin 1999, n° 98-85.257 (N° Lexbase : A0317CLC) : Gaz. Pal., 1999, 2, p. 143.

[14] Cass. crim., 9 mars 1999, n° 98-82.269 (N° Lexbase : A7441CGP) : B. Bouloc, obs., RSC, 1999, p. 808.

[15] E. Daoud, A. Guillemain et E. Pili, Le non-respect de l’obligation de confinement, un délit de mise en danger de la vie d’autrui ? pas sûr du tout, Les surligneurs, 22 mars 2020 [en ligne].

[16] P.-H. Gout, L’entreprise et le droit pénal au temps du covid-19, Dalloz actualité, 30 avril 2020 [en ligne].

[17] J.P. Vial, La répression de l’indifférence au sort d’autrui à l’épreuve du Covid-19, Actu-Juridique.fr, 25 mai 2020 [en ligne].

[18] V. par exemple : CA Paris, 31 mai 2000 : D., 2000, IR 203 ; T. corr., Reims, 19 février 2002, JAC n° 25, obs. C. Lienhard, CA Bourges, Ch. corr. 2, 20 novembre 2003.

newsid:476096

Droit financier

[Brèves] Lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme : l’AMF met à jour son règlement général et ses lignes directrices

Réf. : AMF, actualité du 18 janvier 2021

Lecture: 3 min

N6221BY3

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par Vincent Téchené

Le 27 Janvier 2021

► L’AMF a actualisé, le livre III de son règlement général ainsi que ses quatre lignes directrices qui constituent sa doctrine en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le 8 financement du terrorisme (LCB-FT) pour prendre en compte les impacts des modifications législatives et réglementaires opérées dans le cadre de la transposition de la cinquième Directive anti-blanchiment et pour procéder à quelques ajustements (Directive n° 2018/843 du 30 mai 2018 N° Lexbase : L7631LKT via l’ordonnance n° 2020-115 du 12 février 2020 N° Lexbase : L9352LUW et ses décrets d’application n° 2020-118 N° Lexbase : L9270LUU et n° 2020-119 N° Lexbase : L9267LUR).

  • Mise à jour du règlement général

La mise à jour du règlement général fait suite aux modifications législatives et réglementaires effectuées dans le cadre des travaux de transposition de la cinquième Directive anti-blanchiment.

Le champ d’application des obligations relatives à la LCB-FT prévues au sein du règlement général de l’AMF est aligné sur celui prévu à l’article L. 561-2, 6° du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L0451LZQ) et est, en conséquence, élargi aux gestionnaires d’ « Autres FIA » mentionnés au 3° du III de l’article L. 214-24 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L9549LGR), aux gestionnaires de fonds de capital risque européens (EUVECA) et d’entrepreneuriat social européens (EUSEF) ainsi qu’aux succursales établies en France par des sociétés de gestion européennes pour la gestion d’OPCVM ou de FIA français.

Par ailleurs, le règlement général est modifié afin de tenir compte de l’exemption prévue à l’article R. 561-38-4 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L0962LWK) pour les CIF et les CIP de transmettre à l’AMF un rapport sur l’organisation du dispositif de contrôle interne.

  • Mise à jour des lignes directrices

Les documents de doctrine impactés sont les suivants :

  • Position - Recommandation DOC-2019-15, Lignes directrices sur l'approche par les risques en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (N° Lexbase : L7647LTE) ;
  • Position - Recommandation DOC-2019-16, Lignes directrices sur les obligations de vigilance à l'égard des clients et de leurs bénéficiaires effectifs (N° Lexbase : L7646LTD) ;
  • Position DOC-2019-17, Lignes directrices sur la notion de personne politiquement exposée (N° Lexbase : L7645LTC) ;
  • Position DOC-2019-18 : Lignes directrices sur l'obligation de déclaration à Tracfin (N° Lexbase : L7644LTB).
  • Les principaux points d’attention de cette mise à jour

Outre l’ajustement de leur champ d’application, les lignes directrices tiennent compte des modifications législatives et réglementaires qui prévoient l’obligation pour les assujettis de consulter le registre des bénéficiaires effectifs des sociétés clientes inscrites au Registre du commerce et des sociétés sauf en présence d’un risque faible et la suppression des mesures de vigilance complémentaires pour les entrées en relation d’affaires à distance.

Les lignes directrices tiennent également compte des ajustements réglementaires opérés lorsque les assujettis recourent à un tiers pour la mise en œuvre des obligations de vigilance avant l’entrée en relation d’affaires ou encore ceux visant à renforcer les mesures de vigilance complémentaires lorsque l’opération implique un pays à haut risque.

Par ailleurs, l’AMF recommande aux assujettis de prévoir dans leurs procédures internes une méthodologie d’évaluation du niveau d’équivalence des obligations en matière de LCB-FT des pays tiers. Pour évaluer ce niveau d’équivalence, l’AMF recommande aux assujettis de consulter non seulement les listes établies par le GAFI mais également les rapports d’évaluation mutuelle publiés par le GAFI.

Enfin, l’AMF ajuste sa position concernant les diligences des sociétés de gestion de placements collectifs vis-à-vis des locataires des immeubles acquis par les fonds immobiliers qu'elles gèrent.

newsid:476221

Droit pénal des mineurs

[Brèves] Code de justice pénale des mineurs : amendement et report de mise en œuvre de la réforme

Lecture: 1 min

N6190BYW

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par Adélaïde Léon

Le 27 Janvier 2021

► Le 20 janvier 2021, la Commission des lois a modifié le projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 portant partie législative du Code de justice pénale des mineurs (N° Lexbase : L2043LSH) lequel doit remplacer l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945, relative à l'enfance délinquante (N° Lexbase : L4662AGR).

La commission des lois a repoussé l’entrée en vigueur de la réforme au 30 septembre 2021 afin de tenir compte de l’état de préparation de l’ensemble des juridictions et de la protection judiciaire de la jeunesse.

La commission a également adopté des amendements définissant notamment la notion de discernement afin d’accompagner les magistrats dans leur appréciation de la responsabilité pénale des mineurs.

Le recours au tribunal de police pour les contraventions commises par les mineurs à quant à lui été supprimé.

Un amendement a également confié à un juge des enfants, non chargé de l’affaire, la compétence en matière de détention provisoire d’un mineur.

Enfin, la commission a adopté un amendement renforçant la responsabilité des parents lesquels sont tenus de répondre aux convocations de la justice.

Le projet de loi sera examiné en séance publique le 26 janvier 2021.

Pour aller plus loin : consultez notre Dossier spécial "Code de la justice pénale des mineurs", Lexbase Pénal, novembre 2019 (N° Lexbase : N1086BYU).

 

newsid:476190

Entreprises en difficulté

[Jurisprudence] L’irrecevabilité de la tierce-opposition de l’associé de SCI contre la décision de condamnation de la SCI après admission de la créance à son passif

Réf. : Cass com., 20 janvier 2021, n° 19-13.539, F-P+I (N° Lexbase : A00034DH)

Lecture: 7 min

N6203BYE

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par Pierre-Michel Le Corre, Professeur à l'Université Côte d'Azur, Directeur du Master 2 Administration et liquidation des entreprises en difficulté de la Faculté de droit de Nice, Membre CERDP (EA 1201)

Le 27 Janvier 2021


Mots-clés : procédure collective atteignant une SCI • condamnation de la SCI envers un créancier par décision définitive avant le jugement d’ouverture • admission de la créance au passif • poursuite des associés par le créancier social • recevabilité de la tierce-opposition des associés contre la décision de condamnation (non) • défaut d'intérêt à agir

L’autorité de chose jugée qui s’attache à la décision irrévocable d’admission d’une créance au passif de la liquidation d’une société civile s’impose à ses associés, de sorte que, s’il n’a pas présenté contre une telle décision la réclamation prévue par l’article R. 624-8 du Code de commerce, dans le délai fixé par ce texte, l’associé d’une société civile en liquidation judiciaire est sans intérêt à former tierce-opposition à la décision, antérieure, condamnant la société au paiement de ladite créance et sur le fondement de laquelle celle-ci a été admise.


Chacun connaît les dangers que recèle l’appartenance à une société de personnes. En cause, l’obligation indéfinie de l’associé au passif social. Ces dangers se révèlent spécialement en cas de procédure collective de la société. La question est alors de savoir comment les associés peuvent se prémunir des poursuites des créanciers sociaux et quelle peut avoir l’incidence de l’admission au passif de la créance détenue par le créancier social. La tentation est évidement grande d’exercer des recours pour essayer de ne pas payer ce que doit la société, mais, ainsi que nous allons le voir, sa marge de manœuvre est limitée et il doit parfaitement la maîtriser.

En l’espèce, Une caisse régionale de crédit agricole mutuel (la banque) a consenti deux prêts à une société civile immobilière (la SCI), en 2007.

Par un arrêt du 24 mars 2011, devenu irrévocable le 28 juin 2012, confirmant partiellement un jugement du 29 juin 2010 du tribunal de grande instance de Châteauroux, la cour d’appel de Bourges a condamné la SCI à payer à la banque diverses sommes dues au titre de ces prêts.

La SCI a été mise en redressement judiciaire le 3 février 2014, puis en liquidation judiciaire le 9 février 2015, et les créances déclarées par la banque, sur le fondement de l’arrêt du 24 mars 2011, ont été admises par une ordonnance du juge-commissaire du 2 février 2015.

Assignés en paiement par la banque en leur qualité d’associés de la SCI, tenus en tant que tels des dettes de celles-ci à proportion de leur part dans le capital social, les consorts X ont formé tierce-opposition à l’arrêt du 24 mars 2011 et demandé l’annulation des deux contrats de prêt et le rejet de la demande en paiement formée par la banque contre la SCI.

Les juges du fond ont déclaré recevable la tierce-opposition des associés. La banque s’est pourvue en cassation.

La question posée à la Cour de cassation est la suivante : les associés de SCI sont-ils recevables en leur tierce-opposition formée contre la décision passée en force de chose jugée condamnant les associés au paiement, dès lors que les associés de la SCI n’ont pas formé réclamation contre l’état des créances, une fois admises au passif de la SCI les créances de la banque ?

La Cour de cassation va répondre par la négative à la question posée en cassant la décision de la cour d’appel : « L’autorité de chose jugée qui s’attache à la décision irrévocable d’admission d’une créance au passif de la liquidation d’une société civile s’impose à ses associés, de sorte que, s’il n’a pas présenté contre une telle décision la réclamation prévue par l’article R. 624-8 du code de commerce, dans le délai fixé par ce texte, l’associé d’une société civile en liquidation judiciaire est sans intérêt à former tierce-opposition à la décision, antérieure, condamnant la société au paiement de ladite créance et sur le fondement de laquelle celle-ci a été admise ».

En droit commun, la tierce-opposition est recevable pendant trente ans. Les associés de la SCI, tiers à la décision de condamnation de la SCI envers la banque, ont évidemment intérêt à faire rétracter cette décision. En effet, ils seront tenus indéfiniment au passif social, chacun en tenant compte de la part respective qu’ils détiennent dans le capital social.

Si une procédure collective s’ouvre contre la SCI, le créancier, en possession du titre exécutoire contre son débiteur, devra néanmoins déclarer sa créance au passif. La déclaration de créance ne pourra pas être contestée sur le fond, du fait du titre exécutoire, mais pourra faire l’objet de discussion sur la forme et sur l’adéquation par rapport au titre obtenu, le créancier titulaire d’un titre pour 100 ne pouvant évidemment pas déclarer 200 [1].

Une fois l’admission au passif intervenue, elle sera reportée sur l’état des créances. Le greffier du tribunal fera publier au BODDAC un avis d’insertion informant de ce que l’état des créances a été déposé au greffe. Courra alors un délai d’un mois à compter de cette insertion pour les personnes qui ne sont pas des parties à la décision d’admission, mais qui sont intéressées par celle-ci. Il en est ainsi des associés de sociétés civiles, dans la mesure où, à défaut pour la société d’avoir un patrimoine suffisant pour payer les créanciers, ces derniers pourront agir contre les associés pour obtenir paiement de la dette sociale, les associés étant tenus à la dette sociale indéfiniment, chacun d’eux respectivement en pourcentage de la fraction du capital social qu’ils détiennent. Là se mesure l’intérêt des associés indéfiniment tenus du passif social à remettre en cause la décision d’admission au passif. Notons que, en liquidation judiciaire, l’insuffisance patrimoniale fait l’objet d’une présomption simple [2].

Les tiers intéressés sont donc recevables à former une réclamation, voie de recours particulière au droit des entreprises en difficulté [3]. Bien qu’elle ne soit qu’une variété de tierce-opposition, seule la réclamation est recevable contre l’état des créances [4]. Passé le délai du mois à compter de l’insertion au BODDACC la réclamation cesse d’être recevable. La décision d’admission s’impose alors aux associés.

Parce que l’autorité de la chose jugée attachée à la décision d’admission au passif, une fois à l’abri de la réclamation, s’impose aux associés indéfiniment tenus du passif social, ceux-ci ne disposent plus d’aucun moyen pour prétendre qu’ils devraient autre chose au créancier social que ce que l’état des créances démontre.

On comprend dès lors le raisonnement imparable de la Cour de cassation : puisque l’autorité de la chose jugée attachée à la décision d’admission au passif du créancier social s’impose aux associés, ceux-ci ne peuvent plus remettre en cause la décision antérieure de condamnation de la SCI à l’égard du créancier social. Ils sont par conséquent dépourvus d’intérêt à agir pour former la tierce-opposition de droit commun contre la décision qui a condamné la SCI envers la banque.

Les praticiens retiendront de cet arrêt la leçon. Les associés de SCI peuvent intervenir à l’instance au cours de laquelle le créancier recherche la condamnation de la SCI, en qualité d’intervenant volontaire accessoire. Dans ce cas, ayant été présents à l’instance, ils ne seront plus des tiers recevables à former tierce-opposition. Si la SCI est placée sous procédure collective, la tierce-opposition contre la décision de condamnation de la SCI devra être engagée avant la décision d’admission au passif. Une fois la décision d’admission intervenue, les associés sont sans intérêt à former tierce-opposition contre la décision de condamnation de la SCI. Les associés peuvent également exercer une réclamation contre l’état des créances, une fois la décision d’admission intervenue, dans le délai du mois de l’avis d’insertion au BODACC du dépôt au greffe de l’état des créances. Au-delà, point de salut !

 

[1] Cass. com., 13 septembre 2017, n° 15-28.833, F-P+B (N° Lexbase : A0870WSZ) ; Act. proc. coll., 2017/17, comm. 260, note P. Cagnoli ; Rev. proc. coll., mai/juin 2018, comm. 101, p. 55, note P. Cagnoli ; P.-M. Le Corre, Lexbase Affaires, in Chron., septembre 2017, n° 523 (N° Lexbase : N0192BXE). Sur cette question, P.-M. Le Corre, Droit et pratique des procédures collectives, Dalloz action, 11ème éd., 2021/2022, n° 663.511.

[2] Cass. mixte, 18 mai 2007, n° 05-10.413, P (N° Lexbase : A3178DWM), D., 2007, AJ 1414, obs. A. Lienhard ; D., 2008, Pan. 579, obs. P.-M. Le Corre ; RJDA, 2007/8-9, p. 766, rapp. Besançon ; Gaz. proc. coll., 2007/3, p. 18, note P.-M. Le Corre ; Act. proc. coll., 2007, n° 128, note C. Régnaut-Moutier ; JCP G, 2007, II, 10128, note J.-P. Legros ; JCP E, 2007, Chron. 2119, n° 10, obs. Ph. Pétel ; JCP E, 2007, n° 1877, n° 10, obs. J.-J. Caussain, Fl. Deboissy et G. Wicker ; LPA, 14 août 2007, n° 162, p. 18, note Vinckel ; Dr. sociétés, 2007, n° 130, note F.-X. Lucas ; Dr. sociétés, 2007, n° 157, note J.-P. Legros ; Rev. proc. coll., 2007, n° 19, obs. Ch. Lebel ; Rev. sociétés, 2007, 620, note J.-F. Barbièri ; RTD com., 2007, 550, n° 1, obs. M.-H. Monsérié-Bon ; RTD com., 2007, 597, n° 3, obs. A. Martin-Serf ; Banque et droit, juillet-août 2007, 57, note Storck ; RJ com., 2007, 345, note M.-H. Monsérié-Bon ; Defrénois, 2007, 1571, 38675, n° 9, note D. Gibirila ; Bull. Joly Sociétés, 2007, 1174, note F. Pérochon ; P.-M. Le Corre, Lexbase édition Privée, in Chron., juin 2007, n° 265 (N° Lexbase : N5621BBS) – Cass. com., 16 juin 2009, n° 07-14.913, F-D (N° Lexbase : A2894EIZ), Rev. proc. coll., 2010, n° 123, note Ch. Lebel – Cass. com., 2 octobre 2019, n° 18-11.854, F-D (N° Lexbase : A5008ZQK), Rev. proc. coll., juillet/août 2020, comm. 108, note Dumont. Sur le détail de la question, P.-M. Le Corre, Droit et pratique des procédures collectives, Dalloz Action, 11ème éd., 2021/2022, n° 731.232.

[3] Sur la notion de personnes intéressées autre que les parties recevables à former une réclamation, P.-M. Le Corre, Droit et pratique des procédures collectives, Dalloz Action, 11ème éd., 2021/2022, n° 683.221.

[4] Cass. com., 6 décembre 2011, n° 10-25.571, F-P+B (N° Lexbase : A1860H4N) ; D., 2012, Actu 7, note A. Lienhard ; Gaz. Pal., 28 avril 2012, n° 118, p. 39, note E. Le Corre-Broly ; Bull. Joly Entrep. en diff., mars 2012, comm. 60, p. 88, note S. Brena – CA Angers, 17 décembre 2019, n° 18/02553 (N° Lexbase : A5592Z8M), arrêt aimablement communiqué par Me J.-P. Riou, avocat au Barreau de Nantes.

newsid:476203

Fiscalité des entreprises

[Brèves] Loi de finances pour 2021 : suppression de l'obligation de dépôt annuel du document récapitulant les positions symétriques

Réf. : Loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021, art. 181 (N° Lexbase : L3002LZ9)

Lecture: 1 min

N6229BYD

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par Marie-Claire Sgarra

Le 27 Janvier 2021

L’article 181 de la loi de finances pour 2021 supprime l’obligation pour les entreprises d’envoyer systématiquement à l’administration le document récapitulant les positions symétriques.

🔎 Aux termes de l’article 38-6-3° du Code général des impôts (N° Lexbase : L6167LUX), une position s'entend de la détention, directe ou indirecte, de contrats à terme d'instruments financiers, de valeurs mobilières, de devises, de titres de créances négociables, de prêts ou d'emprunts, ou d'un engagement portant sur ces éléments.

👉 Des positions sont qualifiées de symétriques si leurs valeurs ou leurs rendements subissent des variations corrélées telles que le risque de variation de valeur ou de rendement de l'une d'elles est compensé par une autre position, sans qu'il soit nécessaire que les positions concernées soient de même nature, prises sur la même place, ou qu'elles aient la même durée.

👉 Il faut que les variations de valeurs ou de rendement de chaque position soient corrélées et de sens inverse.

📌 Actuellement, les entreprises sont tenues de déclarer, dans un document annexé à leurs déclarations de résultat de l’exercice, les positions symétriques prises au cours de l’exercice et celles qui sont en cours à la clôture de celui-ci.

À défaut, la perte sur une position n’est pas déductible du résultat imposable .

📌 L’obligation d’envoi systématique à la déclaration à l’administration est supprimée.

En pratique : l'entreprise continuera à mentionner ces positions sur un document spécifique, remis à l’administration sur demande

La suppression de cette obligation s’applique aux exercices clos à compter du 31 décembre 2020.

 

newsid:476229

Fiscalité internationale

[Brèves] Loi de finances pour 2021 : retenue à la source sur salaires versés à l'étranger

Réf. : Loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021, art. 4 (N° Lexbase : L3002LZ9)

Lecture: 1 min

N6216BYU

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par Marie-Claire Sgarra

Le 01 Février 2021

La fiscalité des non-résidents a fait l’objet d’une réforme votée dans le cadre de loi de finances pour 2019 (loi n° 2018-1317, du 28 décembre 2018, de finances pour 2019 N° Lexbase : L6297LNK).

🔎 Pour rappel, la loi prévoyait :

  • la suppression de la retenue à la source sur les salaires de l’article 182 A du Code général des impôts (N° Lexbase : L4651ICA) ;
  • la suppression du caractère partiellement libératoire de l’impôt sur le revenu de la retenue à la source
  • la mise en place d’une retenue à la source déterminée selon le même barème que celui appliqué aux résidents (CGI, art. 204 H N° Lexbase : L6205LUD)
  • l’application du taux minimum de 20 % dès le 1er euro, et 30 % au-delà d’un certain seuil.
👉 Lire en ce sens, C. Koubar, Les modifications apportées par la loi de finances au régime d’imposition à l’impôt sur le revenu des revenus de source française de personnes domiciliées à l’étranger, Lexbase Fiscal, n° 775 (N° Lexbase : N7975BXN).

📌 La loi de finances pour 2020 avait repoussé l’entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions (loi n° 2019-1479, du 28 décembre 2019, de finances pour 2020 N° Lexbase : L5870LUX).

📌 La nouvelle loi de finances pour 2021 abandonne la réforme du régime d’imposition prévue par les deux derniers budgets et maintient le dispositif de retenue à la source spécifique, partiellement libératoire sur les salaires et revenus assimilés de source française.

newsid:476216

Majeurs protégés

[Brèves] Pouvoirs de gestion du tuteur : nécessité d’une autorisation pour verser des primes sur un contrat d'assurance vie

Réf. : Cass. Avis, 18 décembre 2020, n° 15007 (N° Lexbase : A50464DA)

Lecture: 2 min

N6213BYR

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par Marie-Lou Hardouin-Ayrinhac

Le 27 Janvier 2021

► Les dispositions de l'article 501 du Code civil (N° Lexbase : L7282LPE) autorisant, depuis la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 (N° Lexbase : L6740LPC), le tuteur à placer sans autorisation des fonds sur un compte ne sont pas applicables au versement libre de primes sur un contrat d'assurance sur la vie existant, ce type de placement demeurant un acte de disposition soumis, sauf circonstances particulières, à l'autorisation du conseil de famille ou, à défaut, du juge des contentieux de la protection.

La demande était ainsi formulée : « Les dispositions de l'article 501 du Code civil autorisant, depuis la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, le tuteur à placer sans autorisation des fonds sur un compte sont-elles applicables au versement libre de primes sur un contrat d'assurance vie existant ou ce type de placement doit-il toujours être considéré comme un acte de disposition soumis à l'autorisation du juge des tutelles ? »

Dans l’examen de la demande d’avis, la première chambre civile de la Cour de cassation rappelle tout d'abord que, selon l’article 501 du Code civil, dans sa rédaction issue de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, le tuteur peut, sans autorisation, placer des fonds du majeur protégé sur un compte.

Ensuite, la première chambre civile décompose son raisonnement comme suit.

En premier lieu, le contrat d’assurance sur la vie n’est pas un compte.

En deuxième lieu, un tel contrat peut comporter des risques financiers, notamment lorsqu’il est libellé en unités de compte.

En troisième lieu, la clause bénéficiaire, dans certaines hypothèses, notamment lorsqu’elle désigne le tuteur, peut placer celui-ci dans une situation de conflit d’intérêts.

Enfin, le décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008 (N° Lexbase : L4112ICB), qui classe le versement de nouvelles primes sur un contrat d’assurance sur la vie dans les actes de disposition, sauf circonstances particulières, n’a pas été modifié.

Ainsi, selon la première chambre civile, il en résulte que, sauf circonstances particulières, le tuteur doit solliciter l’autorisation du conseil de famille, ou à défaut, du juge des contentieux de la protection, pour verser des primes sur un contrat d’assurance sur la vie existant.

Pour aller plus loin :

  • Lire S. Moracchini-Zeidenber, Le droit des majeurs protégés après la loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, Lexbase Droit privé, avril 2019, n° 781 (N° Lexbase : N8691BX8).
  • v. ÉTUDE : Le mineur sous tutelle, Les décisions du conseil de famille ou du juge dans la gestion du patrimoine des mineurs en tutelle, in La protection des mineurs et des majeurs vulnérables, (dir. A. Gouttenoire), Lexbase (N° Lexbase : E4696E4P).
  • v. ÉTUDE : La curatelle et la tutelle du majeur vulnérable, Les décisions du conseil de famille ou du juge dans la gestion du patrimoine des majeurs en tutelle, in La protection des mineurs et des majeurs vulnérables, (dir. A. Gouttenoire), Lexbase (N° Lexbase : E4708E47).

 

newsid:476213

Procédure civile

[Jurisprudence] La péremption encourue durant la radiation pour défaut d’exécution

Réf. : Cass. civ. 2, 14 janvier 2021, n° 19-20.721, F-P +I (N° Lexbase : A23014C9)

Lecture: 17 min

N6209BYM

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par Guillaume Isouard, avocat au barreau d’Aix-en-Provence

Le 27 Janvier 2021


Mots-clés : procédure civile • procédure d’appel • péremption d’instance • exécution provisoire • radiation

La péremption d’une affaire en cause d’appel radiée du rôle pour défaut d’exécution provisoire est interrompue par un acte manifestant sans équivoque la volonté d’exécuter sans qu’il s’agisse nécessairement d’une exécution totale de la décision.


 

La péremption d’instance est le sort, toujours redouté, réservé aux dossiers qui ont trop longtemps traîné. Elle prend une tournure particulière lorsqu’elle s’allie à la radiation pour défaut d’exécution provisoire au cours de la procédure d’appel. La péremption n’est alors plus uniquement l’effet du cours du temps sanctionnant l’indolence des plaideurs, elle devient le couperet procédural qui plane sur l’appelant qui n’a pas exécuté la décision de première instance.

Si habituellement le défendeur à l’action est tout à fait passif dans le cours de la péremption – puisqu’il ne fait que laisser s’écouler le temps – il peut avoir un rôle moteur dans cette forme de péremption en appel en prenant l’initiative d’une demande de radiation pour défaut d’exécution provisoire et ainsi contraindre l’appelant à exécuter la décision avant de pouvoir la contester. Le régime de la péremption d’instance encourue durant la radiation pour défaut d’exécution se distingue en outre de la péremption générale quant aux actes interruptifs : la radiation à titre de sanction paralyse l’efficacité des actes procéduraux tant que la décision n’est pas exécutée. Dans quelle mesure la décision doit-elle être exécutée pour que la péremption se trouve interrompue ?

Les faits de l’espèce sont les suivants : un couple saisit le tribunal de diverses demandes, qui les en déboute et les condamne aux dépens ainsi qu’à payer à la défenderesse 3 500 euros en application l’article 700 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1253IZG), ils en interjettent appel. Devant la cour d’appel, la partie intimée sollicite la radiation de l’affaire pour défaut d’exécution provisoire, ce qu’elle obtient le 17 février 2014, après que les deux parties aient conclu en cause d’appel. Le 15 décembre 2015, les appelants, après avoir réglé le montant de la condamnation prononcée sur le fondement de l’article 700 – mais non le montant des dépens, sollicitent la remise au rôle de l’affaire. L’affaire est réinscrite et les appelants déposent de nouvelles conclusions au fond. Mais en parallèle, un contentieux s’élève quant à la péremption de l’instance. La cour d’appel, saisie d’un déféré, confirme l’ordonnance qui avait prononcé la péremption : elle estime que la demande de remise au rôle ne peut faire progresser l’affaire en l’absence d’une exécution totale de la décision de première instance.

La décision est cassée : « tout acte d’exécution significative de [la décision frappée d’appel] manifeste la volonté non équivoque de l’exécuter et constitue, par conséquent, une diligence interrompant le délai de péremption de l’instance d’appel » (Cass. civ. 2, 14 janvier 2021, n° 19-20.721, F-P+I (N° Lexbase : A23014C9).

La solution peut sembler évidente à la lecture du septième alinéa de l’article 524 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L9293LTD) qui rend interruptif du délai « un acte manifestant sans équivoque la volonté d’exécuter ». Sauf que cet alinéa a été ajouté en 2017 [1] et que les faits jugés sont antérieurs à son entrée en vigueur. L’interruption est donc appréciée sur le fondement de l’article 386 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L2277H44).

Il ne nous apparaît pas incongru de considérer que le sens de la décision a été pour partie influencé par la réforme textuelle de 2017. Le mécanisme de radiation pour défaut de l’exécution existe devant la Cour de cassation depuis 1999 [2], il a inspiré celui applicable durant la procédure d’appel [3]. Quelques différences existaient entre les deux procédures et la réforme opérée en 2017 a, pour partie, procédé à un « réalignement » [4]. Quoi qu’il en soit, la solution est d’autant plus applicable aux affaires postérieures.

Dans le contexte d’une procédure portant sur l’appel d’un jugement bénéficiant de l’exécution provisoire, la péremption est bien plus qu’une sanction de l’absence de diligence des parties : c’est un outil procédural pour celui qui a triomphé en première instance et une embûche pour l’intimé. Sa mécanique commence par la demande de radiation (I) dont le cours est interrompu par l’exécution de la décision déférée à la cour (II).

I. Le commencement du cours de la péremption : la radiation pour défaut d’exécution provisoire

La procédure de radiation pour défaut d’exécution de la décision déférée à la cour d’appel est régie, depuis le 1er janvier 2020, par l’article 524 du Code de procédure civile [5]. La demande de radiation (A) produit des effets à la fois durant l’examen de cette demande et après son admission (B).

A. La demande de radiation

1) Exigence d’un jugement exécutoire par provision

Naturellement, il ne saurait y avoir de demande de radiation que pour autant que la décision déférée à la cour d’appel soit assortie de l’exécution provisoire. Cela va désormais concerner un nombre croissant de décisions, puisque l’article 514 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L9080LTH) dispose désormais que « les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre de provision ». Cette disposition, introduite par le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 (N° Lexbase : L8421LT3) est applicable aux instances introduites devant les juridictions du premier degré à compter du 1er janvier 2020 [6].

Il est toujours possible pour une partie de demander l’arrêt de l’exécution provisoire d’une décision, en saisissant le premier président sur le fondement des articles 514-3 (N° Lexbase : L9082LTK) ou 517-1 (N° Lexbase : L9091LTU) du Code de procédure civile [7], bien que les modalités aient été rendues plus restrictives [8]. Il est parfois plus opportun, notamment en cas de solvabilité incertaine du créancier de la décision de première instance, d’être autorisé par le juge à consigner le montant des condamnations (CPC. art. 521 N° Lexbase : L9097LT4).

2) Forme et délai de la demande de radiation

La demande de radiation doit, depuis le 1er septembre 2017 [9], être formée par l’intimé dans le délai qui lui est imparti pour conclure, « à peine d’irrecevabilité prononcée d’office ». Ce délai est d’un mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant en procédure à bref délai (CPC. art. 905‑2 N° Lexbase : L8614LYP), et de trois mois à compter de cette même notification en procédure « ordinaire » (CPC. art. 909 (N° Lexbase : L7240LEU) pour l’intimé et 910 (N° Lexbase : L7241LEW) pour l’intimé à un appel incident ou provoqué).

En défense, l’appelant peut exposer que l’exécution de la décision lui est impossible ou qu’elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives. L’examen de la possibilité d’exécuter est indispensable sur le fondement de l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales ([LXB=L7558AIR]) : une radiation pour défaut d’exécution alors que le montant des condamnations est disproportionné aux revenus de l’appelant prive celui-ci de l’accès à un tribunal (CEDH, 31 mars 2011, Req. 34658/07, Chatellier c/ France N° Lexbase : A5685HMI). Pour autant, le mécanisme de radiation pour défaut d’exécution n’est pas, en lui-même, contraire à l’article 6§1 (v. CEDH, 10 octobre 2013, Req. 37640/11, Pompey c/ France N° Lexbase : A4752KMX).

La décision de radiation (ou de rejet de la demande) constitue une mesure d’administration judiciaire, cela est expressément prévu par l’alinéa 3 de l’article 524 depuis le décret du 6 mai 2017, la jurisprudence avait déjà statué en ce sens (Cass. civ. 2, 18 juin 2009, n° 08-15.424, FS-P+B N° Lexbase : A3020EIP) [10].

B. Les effets de la radiation

1) Effets de la procédure de radiation

Au regard des délais impartis en cause d’appel, la demande de radiation traite différemment l’appelant de l’intimé. En effet, les délais impartis pour conclure ou former appel incident ou provoqués ne sont suspendus qu’à l’égard de l’intimé. La suspension opère à compter de la demande de radiation et va jusqu’à la notification de la décision rejetant la demande de radiation ou, en cas d’admission, jusqu’à la notification de la décision qui autorisera ultérieurement la réinscription de l’affaire au rôle.

Il ne s’agit toutefois que d’une suspension, et non d’une interruption. Sur un plan purement pratique, le répit accordé à l’intimé pourrait se muer en un piège à son encontre lorsque vingt mois après – ou plus encore – le dossier viendrait à être réinscrit.

L’appelant ne bénéficie pour sa part d’aucune trêve : l’examen de la radiation, pas plus que son admission, ne sont productifs d’une quelconque suspension des délais qui lui sont impartis.

2) Effets de la décision de radiation

La radiation a pour premier effet d’empêcher l’examen des appels, tant principaux qu’incidents. Mais la radiation ne porte que sur la procédure en cours : elle ne fait pas obstacle à ce que l’appelant forme un appel incident si son adversaire, intimé dans la procédure radiée, forme de son côté un autre appel principal (Cass. civ. 2, 19 novembre 2020, n° 18-21.550, F-P+B+I N° Lexbase : A944834P).

La notification de la décision ordonnant la radiation pour défaut d’exécution provisoire marque en outre le point de départ du délai de péremption, ainsi que le prévoit l’alinéa 7 depuis le décret n° 2017-891 du 6 mai 2017. C’est contraire à la mécanique générale de la péremption où seul un acte des parties peut servir de point de départ au délai de péremption (CPC. art. 386), ce dont il résulte qu’une ordonnance de retrait du rôle ou de radiation est sans effet sur le cours de la (Cass. civ. 2, 24 septembre 2015, n° 14-20.299, F-P+B N° Lexbase : A8394NPL)). La Cour de cassation avait d’ailleurs statué en ce sens, avant la modification apportée par le décret du 6 mai 2017 (Cass. civ. 2, 21 février 2013, n° 11‑28.632, F-P+B N° Lexbase : A4236I8E) Cet apport, qui s’est en fait calqué sur le dispositif de radiation prévu devant la Cour de cassation [11], a l’avantage de poser un point de départ clair et lisible.

En bref : La radiation pour défaut d’exécution par l’appelant de la décision assortie de l’exécution provisoire doit être demandée par l’intimé au président ou au conseiller de la mise en état avant l’expiration du délai qui lui est imparti pour conclure. Mesure d’administration judiciaire, elle est insusceptible de recours.

II. L’interruption du cours de la péremption : un acte manifestant sans équivoque la volonté d’exécuter

La péremption prenant son cours, celui-ci se trouve interrompu par un acte du débiteur manifestant sa volonté d’exécuter (A), jusqu’à ce que la radiation soit levée ou que le temps entraîne la péremption de l’instance (B).

A. Acte manifestant la volonté d’exécuter

1) L’exécution comme acte interruptif de la péremption

L’exécution significative est-elle le seul acte interruptif envisageable, ou bien les actes habituellement reconnus comme interruptifs de la péremption « de droit commun » peuvent-ils également l’être en matière de péremption durant une radiation pour défaut d’exécution ?

Bien que la radiation empêche l’accomplissement des actes procéduraux les plus habituels, elle ne prive pas les parties de la faculté d’accomplir des diligences interruptives du délai de péremption, même avant tout rétablissement (Cass. civ. 2, 16 mars 2000, n° 97-21.029 N° Lexbase : A5314AWQ). Encore faut-il que les actes démontrent une volonté de faire avancer l’affaire, et non la seule intention de ne pas abandonner la procédure [12].

En ce sens, il a été jugé qu’une demande de réinscription au rôle ne constituait pas, à elle seule, une diligence interruptive du délai de péremption au sens de l’article 386 du CPC (CA Bastia, 11 janvier 2012, n° 11/00501 (N° Lexbase : A2355IAH ; CA Amiens, 25 juin 2020, n° 20/02145 N° Lexbase : A90993PP).

De la même façon, des actes qui auraient pu être interruptifs du délai de péremption en temps normal, car manifestant une volonté de poursuivre l’affaire, n’auront pas la même portée en matière de radiation pour défaut d’exécution provisoire tant que les condamnations n’auront pas été réglées. En effet, à défaut d’un tel règlement et d’une réinscription au rôle, les appels ne peuvent être examinés ; l’affaire ne peut donc avancer.

2) L’examen de la significativité de l’exécution

On aurait alors pu estimer que seul le rétablissement de l’affaire au rôle soit interruptif de la péremption, ou, à tout le moins, que les conditions du rétablissement – c’est-à-dire le règlement des condamnations – soient accomplies.

Ce n’est pas le sens de la décision du 14 janvier 2021 : le paiement des condamnations, même partiel, est en lui-même une diligence interrompant le délai de péremption au sens de l’article 386 du Code de procédure civile.

L’appréciation de cette volonté d’exécuter doit se faire au regard de ce qui est soumis à l’exécution provisoire. Notons au passage, puisque dans la présente il était question de l’absence de règlement des dépens, que l’article 515 du Code de procédure civile n’empêche plus l’exécution provisoire portant sur les dépens [13]. De la même manière, la jurisprudence avait déjà admis que l’exécution provisoire pouvait porter sur les condamnations prononcées au titre de l’article 700 du Code de procédure civile (Cass. civ. 2, 31 mai 2011, n° 99-13.712 N° Lexbase : A5733ATI).

Il faut, en revanche, déterminer avec précision quelles sont les obligations mises à la charge de l’appelant par l’arrêt contesté. Ainsi, un jugement qui « dit » caduc un legs n’emporte pas obligation pour le légataire de réaliser concrètement la transmission du patrimoine successoral aux héritiers désignés par le jugement, faute de disposition en ce sens (Cass. civ. 2, 19 novembre 2020, n° 19-25.100, FS-P+B+I, N° Lexbase : A946334A). Aussi, l’appréciation du caractère significatif de la décision doit être fait en fonction de ce qui figure dans le dispositif de la décision querellée.

Pour autant, et c’est le sens de cet arrêt, une exécution intégrale n’est pas requise : « tout acte d’exécution significative de cette décision manifeste la volonté non équivoque de l’exécuter et constitue, par conséquent, une diligence interrompant le délai de péremption de l’instance d’appel ».

Il faut donc que l’exécution soit « significative », sans nécessairement être intégrale.

Notons qu’en matière de radiation pour défaut d’exécution devant la Cour de cassation, il avait été admis que des versements considérés comme significatifs étaient, chacun à leur date, interruptifs du délai de péremption, et que « le caractère significatif des versements doit s’apprécier non seulement au regard de la somme due […] mais également en tenant compte des facultés de paiement de la partie condamnée » (Cass. ord., 23 mai 2001, n° 97-22.084 N° Lexbase : A7053CI3).

B. L’épuisement du cours de la péremption

1) La réinscription au rôle

Le mécanisme de péremption pour défaut d’exécution provisoire prend naturellement fin s’il est procédé à la remise au rôle de l’affaire. La réinscription est prononcée par le président ou le conseiller de la mise en état ; elle suppose la justification de l’exécution de la décision attaquée (CPC. art. 524, dernier alinéa). Cette décision n’est pas susceptible de recours (Cass. civ. 2, 22 septembre 2016, n° 15-19.662, F-P+B N° Lexbase : A0074R4I).

Il semble bien ici qu’une exécution intégrale soit nécessaire [14], ce qu’a d’ailleurs jugé une cour d’appel déclarant irrégulière une réinscription alors que les dépens de première instance n’avaient pas été réglés (CA Colmar, 5 avril 2017, n° 16/03596).

Il faut toutefois peut-être nuancer cette exigence. D’abord, car la procédure de radiation ne fait pas obstacle à la saisine du premier président en arrêt de l’exécution provisoire (Cass. civ. 2, 9 juillet 2009, n° 08-13.451, FS-P+B N° Lexbase : A7277EID). Si l’exécution provisoire venait à être arrêtée ou aménagée, plus rien ne s’opposerait à la réinscription au rôle de l’affaire. Ensuite, il ne nous paraît pas absurde de reconsidérer la proportionnalité de la sanction de radiation à la situation du débiteur qui a pu évoluer. Une exécution partielle significative pourrait alors permettre une réinscription lorsqu’une exécution intégrale aurait des conséquences manifestement excessives : c’est ce qu’a admis une cour d’appel dans sa motivation, tout en rejetant l’application au cas d’espèce (CA Aix, 23 mars 2017, n° 16/17529 N° Lexbase : A0282UGK).

2) L’acquisition de la prescription

Si aucun obstacle n’est mis au cours de la péremption, celle-ci sera définitivement acquise au bout de deux années. Elle peut être constatée d’office, le décret du 6 mai 2017 l’ayant prévu spécialement pour la péremption durant la radiation pour non-exécution (CPC. art. 524 al. 7), et l’ayant ajouté pour la péremption « de droit commun » (CPC. art. 388 N° Lexbase : L6753LET).

La partie qui souhaite soulever la prescription doit le faire avant tout autre moyen (Cass. civ. 2, 15 février 1995, n° 93-13.960 N° Lexbase : A8264ABP) et ce, à titre principal, et non à titre subsidiaire (Cass. civ. 2, 16 juillet 1993, n° 92-11.580, N° Lexbase : A6021ABM).

La péremption, lorsqu’elle est acquise, est de droit (CPC. art. 388). Cette décision, à l’inverse de celles relatives à la radiation, est susceptible d’être déférée à la cour dans les quinze jours de sa date, en ce qu’elle a pour effet de mettre fin à l’instance (CPC. art. 916 N° Lexbase : L8615LYQ) ; y compris lorsque l’ordonnance dit n’y avoir lieu à péremption (Cass. civ. 2, 18 avril 2019, n° 17-21.189, F-P+B+I N° Lexbase : A3815Y98).

La péremption qui intervient en cause d’appel confère au jugement la force de la chose jugée, même lorsqu’il n’avait pas été notifié (CPC. art. 390 N° Lexbase : L6491H7K).

En bref : le délai de péremption est interrompu par tout acte significatif d’exécution, sans qu’il soit nécessaire qu’il s’agisse d’une exécution intégrale de la décision. À défaut d’interruption, la péremption est acquise au bout de deux années à compter de la décision de radiation, elle doit être constatée. La partie qui souhaite l’invoquer doit le faire avant tout autre moyen. Elle confère au jugement de première instance la force de la chose jugée.

[1] Décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, relatif aux exceptions d'incompétence et à l'appel en matière civile (N° Lexbase : L2696LEL)

[2] Décret n° 99-131 du 26 février 1999, en vigueur le 15 septembre 1999, relatif à la Cour de cassation et modifiant le Code de l'organisation judiciaire et le nouveau code de procédure civile (N° Lexbase : L0679ISX)

[3] Décret n° 2005-1678 du 28 décembre 2005, en vigueur le 1er mars 2006, relatif à la procédure civile, à certaines procédures d'exécution et à la procédure de changement de nom (N° Lexbase : L3298HEU)

[4] Et notamment sur la question du caractère interruptif de l’exécution prévu en matière de cassation à l’article 1009-2 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L5883IA7)

[5] Il s’agissait auparavant de l’article 526 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L7263LEQ), le transfert a été opéré par le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019.

[6] Article 55 II du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 (N° Lexbase : Z82497RT).

[7] Mécanisme anciennement prévu à l’article 524 du Code de procédure civile, encore un « apport » du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019.

[8] Notamment la nécessité de devoir démontrer, en plus du risque de conséquences manifestement excessives, un moyen sérieux d’annulation ou de réformation de la décision, et, lorsque l’exécution provisoire est de droit, le préalable d’avoir discuté devant le juge de première instance des conséquences excessives de l’exécution provisoire.

[9] Date d’entrée en vigueur du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 relatif aux exceptions d’incompétence et à l’appel en matière civile.

[10] L’article 383 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L2268H4R) prévoit en effet que la radiation du rôle est, de façon générale, une mesure d’administration judiciaire ; toutefois, la radiation pour défaut d’exécution n’est pas un simple constat opéré par le président ou le conseiller de la mise en état, puisqu’il doit faire une appréciation sur les conséquences de l’exécution provisoire et sur la possibilité d’exécuter ; cette assimilation à une mesure d’administration judiciaire, quoique juridiquement correcte, n’est pas exempte de critiques (R. Perrot, RTD Civ. 2009, p. 574).

[11] Articles 1009-1 et suivants du Code de procédure civile.

[12] R.Perrot, RTD Civ. 2000, p. 398 à propos de (Cass. civ. 2, 16 mars 2000, n° 97-21.029 N° Lexbase : A5314AWQ)

[13] Le second alinéa de l’article 515 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L9088LTR) a été modifié par l’article 46 du décret n° 2005-1678 du 28 décembre 2005 avec effet au 1er mars 2006.

[14] On observe d’ailleurs que plusieurs décisions de radiation conditionnent la réinscription « sur justification de l’exécution intégrale » : par exemple : CA Paris, 17 octobre 2013, n° 13/13729 N° Lexbase : A9900KMM ; CA Paris, 2 octobre 2014, n° S 12/07305 N° Lexbase : A5853MX3 ; CA Rennes, 9 janvier 2018, n° 17/06894 N° Lexbase : A2231XAU ; CA Versailles, 16 mai 2019, n° 18/06909 N° Lexbase : A5423ZBH ; CA Grenoble, 25 mai 2019, n° 18/01192, CA Grenoble, 10 décembre 2019, n° 19-01509, etc.

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Syndicats

[Brèves] Intérêt à agir du syndicat en cas de violation des dispositions d'un accord de branche

Réf. : Cass. soc., 20 janvier 2021, n° 19-16.283, FS-P+I (N° Lexbase : A00054DK)

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N6188BYT

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par Charlotte Moronval

Le 27 Janvier 2021

Les syndicats peuvent agir en justice aux fins d'obtenir des dommages-intérêts en cas de violation des dispositions d'un accord de branche dès lors qu’elle cause un préjudice à l'intérêt collectif de la profession qu'il défendent ; les juges doivent évaluer le préjudice en question.

Faits et procédure. Une salariée saisit la juridiction prud’homale de demandes de rappels de salaires et de dommages-intérêts dirigées contre la société l’employant. Un syndicat intervient à l’instance et sollicite des dommages-intérêts.

Pour rejeter la demande de dommages-intérêts du syndicat, la cour d’appel retient que le syndicat est fondé à intervenir pour solliciter l’application des accords collectifs au sein de la société mais qu’il ne justifie pas du préjudice que ce différend au sujet de l’application des accords collectifs au sein de l’entreprise aurait porté aux intérêts de la profession.

La solution. Enonçant la solution susvisée, la Chambre sociale casse et annule l’arrêt rendu par la cour d’appel.

En statuant comme elle l’a fait, alors qu’elle avait constaté une violation des dispositions de l’accord de branche et qu’une telle violation cause un préjudice à l’intérêt collectif de la profession, la cour d’appel, à qui il appartenait d’évaluer ce préjudice, a violé l’article L. 2132-3, alinéa 2 du Code du travail (N° Lexbase : L2122H9H).

En savoir plus. V. ÉTUDE : L’instance prud’homale, Les actions exercées dans l'intérêt collectif de la profession par les organisations syndicales, in Droit du travail, Lexbase (N° Lexbase : E3755ETA).

 

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