La lettre juridique n°782 du 9 mai 2019

La lettre juridique - Édition n°782

Avocats

[Questions à...] "Aujourd’hui, les nouvelles semblent rassurantes" - Questions à Georges Bouchet, Bâtonnier de Guyane, à propos de la découverte d'amiante dans une annexe du tribunal de Cayenne

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par Joséphine Pasieczny

Le 07 Mai 2019

Georges Bouchet, Bâtonnier de l’Ordre des avocats du Barreau de Guyane, a accepté pour Lexradio et Lexbase Professions de revenir sur la fermeture du tribunal de grande instance de Cayenne. Les murs de certains bâtiments contiennent ou sont suspectés de contenir, comme ceux du bâtiment historique, de l’amiante.

 

Dans l’optique de futurs travaux devant être réalisés dans l’annexe du tribunal, un rapport d’amiante avant travaux datant du 27 mars a été rendu public le 29 mars. Il fait état de présence d’amiante dans certains matériaux de construction du bâtiment, sachant que des travaux avaient déjà été entamés courant 2018 pour des besoins de réagencement des bureaux entraînant ainsi une éventuelle exposition du personnel à des poussières d’amiante. 

 

Cette interview est, également, disponible en podcast sur Lexradio.

 

Lexradio : Quelle a été la réaction du personnel du tribunal ?

 

Georges Bouchet : Evidemment, la découverte de l’amiante dans l’une des annexes du tribunal de grande instance de Cayenne a suscité une vive émotion et des inquiétudes au sein du personnel. La première démarche qui a été entreprise a été d’organiser une réunion syndicale au cours de laquelle il a été évoqué la problématique du droit de retrait. Le lundi suivant la communication du rapport d’expertise, plus d’un tiers du personnel du tribunal a individuellement exercé son droit de retrait. Il a, ensuite, été question de réunir le comité d’hygiène, de sécurité et de santé au travail qui a été saisi d’urgence par les chefs de juridiction. Le comité a validé les droits de retrait.

 

Lexradio : Quelles ont été les revendications syndicales à la suite de ce rapport ?

 

Georges Bouchet : Les syndicats avaient demandé que des expertises soient réalisées en termes d’empoussièrement mais aussi un repérage d’amiante avant travaux sur le bâtiment historique qui, a priori, n’avait pas été expertisé avant les travaux, lesquels avaient déjà été entamés depuis 2016/2017. Ces expertises ont été validées par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail qui a, aussi, préconisé que les lieux soient vidés en attendant le retour de ces expertises d’empoussièrement et de diagnostic de repérage d’amiante sur le bâtiment historique. Parallèlement, il a également été demandé des fiches d’exposition à l’amiante qui, à ce jour et à ma connaissance, n’ont pas encore été délivrées par le chef de juridiction.

 

Lexradio : Pourquoi est-il nécessaire de délivrer ces fiches d’exposition à l’amiante ?

 

Georges Bouchet : Dans l’hypothèse où il serait avéré qu’il y ait eu une exposition à l’amiante avec les risques sanitaires que l‘on connait, notamment, des risques cancérigènes, cela permet une prise en charge du personnel exposé ou malade.

 

Lexradio : Si le personnel a exercé son droit de retrait, il y a des conséquences sur l’organisation au sein du tribunal. Est-il fermé entièrement, tous les bâtiments sont-ils concernés ? Comment est réorganisé le calendrier judiciaire chamboulé ?

 

Georges Bouchet : Le rapport de repérage d’amiante dans l’une des annexes a été rendu public le vendredi 29 mars. L’activité judiciaire s’est poursuivie jusqu’au vendredi suivant et le Palais de justice a été complètement fermé au public a compté du vendredi soir. Une cellule de crise a été mise en place dès le lundi suivant et cette cellule a réorganisé une activité judiciaire qui a été délocalisée sur les autres sites existants, du tribunal d’instance, du tribunal administratif et de la cour d’appel. Les audiences ont été réparties en fonction des urgences. Cette cellule de crise a eu l’appui technique de deux hauts magistrats qui se sont déplacés. Au cours de la deuxième semaine, on a pu également bénéficier de la mise à disposition de la caserne Loubère (site militaire). Il y a une délocalisation des audiences pénales et civiles sur ce site jusqu’à l’heure où je vous parle.

 

Au début, cela relevait un peu du jeu de piste pour s’y retrouver dans cette nouvelle organisation, notamment, pour les justiciables qui n’étaient pas avisés en temps et en heure mais aussi pour les professionnels car la première semaine les plannings n’étaient pas précisément arrêtés. Il arrivait que l’on nous communique au dernier moment un autre site pour nos audiences. Désormais, les choses sont beaucoup plus claires, tant pour l’accueil des justiciables que pour les audiences. Il y a encore quelques erreurs mais dans l’ensemble cela se passe plutôt bien.

 

Lexradio : Des contrôles ont ensuite été (ou sont encore) effectués pour vérifier la présence ou l’absence d’amiante dans les murs. Quels sont les premiers résultats ?

 

Georges Bouchet : Plusieurs expertises ont été commandées par la Chancellerie dont, notamment, des expertises d’empoussièrement dans l’annexe «Lam-Cham» dans laquelle l’amiante a été découverte. Les résultats de cette expertise ont été rendu publics et il s’avère qu’il n’y a pas de présence d’amiante dans l’air, ce qui est rassurant. Il y a également eu des expertises d’empoussièrement dans le bâtiment historique, qui était en cours de rénovation et de réagencement. Celles-ci, selon mes dernières informations, se seraient également révélées négatives. Donc il n’y a pas d’empoussièrement aux particules d’amiante dans l’air dans ces deux bâtiments. Il nous reste, encore, à prendre connaissance d’un dernier rapport concernant le repérage d’amiante dans le bâtiment historique dont nous n’avons pas encore les résultats.

 

Lexradio : Les avocats s’étaient réunis pour une assemblée générale exceptionnelle à la suite de ce rapport. Quelles décisions avaient été prises ?

 

Georges Bouchet : Nous étions dans une situation d’urgence avec bien évidemment cette crainte d’une exposition à l’amiante, nous avons donc rappelé qu’il fallait que le principe de précaution soit appliqué pleinement et entièrement. Les avocats ont, d’une part, soutenu le droit de retrait exercé par le personnel du tribunal et, d’autre part, interpellé la Chancellerie sur une décision de fermeture officielle du site, puisque nous avons constaté entre le 29 mars et le 5 avril que des audiences se tenaient encore sur ce site qui était fréquenté par certains justiciables et des avocats, notamment dans le cadre des audiences de permanence pénale. A la suite de cette motion, la décision a été prise d’évacuer le site et de le fermer en attendant le retour des expertises. Aujourd’hui, les nouvelles semblent rassurantes, il n’en demeure pas moins que nous attendons la communication officielle de ces différents rapports et qui auraient été validé par un expert en amiante près de la cour d’appel de Paris. Nous attendons, également, l’avis du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail qui sera certainement saisi par les chefs de juridiction sur l’éventualité de la reprise d’activité au sein du Palais de justice de Cayenne.

 

Lexradio : L’activité du tribunal reprendra-t-elle normalement si les résultats sont négatifs ? 

 

Georges Bouchet : Oui, je pense que les choses devraient aller dans ce sens sous réserve de la possibilité de désamianter ou non le site dans lequel l’amiante a été découvert et sous réserve du rapport d’expertise de repérage de l’amiante dans le bâtiment historique.

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Concurrence

[Brèves] Transparence, pratiques restrictives de concurrence et autres pratiques prohibées : publication de l’ordonnance

Réf. : Ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019, portant refonte du titre IV du livre IV du Code de commerce relatif à la transparence, aux pratiques restrictives de concurrence et aux autres pratiques prohibées (N° Lexbase : L0386LQD)

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par Vincent Téchené

Le 07 Mai 2019

► Une ordonnance, publiée au Journal officiel du 25 avril 2019, réforme le titre IV du livre IV du Code de commerce relatif à la transparence, aux pratiques restrictives de concurrence et aux autres pratiques prohibées (ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 N° Lexbase : L0386LQD).

 

L'article 17 de la loi «Egalim» (loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 N° Lexbase : L6488LMA) a habilité le Gouvernement à procéder à cette refonte du titre IV du livre IV du Code de commerce.

 

L'ordonnance comporte six articles.

 

Plus précisément concernant les articles 1 à 3, l'ordonnance tend d'abord à répondre à l'objectif de réorganisation du titre IV du livre IV du Code de commerce à travers un plan chronologique et thématique de la relation commerciale avec.

 

Un chapitre préliminaire, conservé en l'état, est relatif à la Commission d'examen des pratiques commerciales (CPEC).

 

Le chapitre Ier, relatif à la transparence dans la relation commerciale (article 1er de l'ordonnance), couvre la relation contractuelle des parties en débutant par les conditions générales de vente (section 1), puis la négociation et la formalisation de la relation commerciale, c'est-à-dire la contractualisation obligatoire et le contenu de ces contrats (section 2) -cf. nouveaux articles L. 441-1 (N° Lexbase : L0511LQY) à L. 441-16 du Code de commerce-.

 

Le chapitre II, relatif aux pratiques commerciales déloyales (article 2 de l'ordonnance) rassemble les pratiques restrictives de concurrences (section 1) et les autres pratiques prohibées (section 2, nouveaux articles L. 442-1 (N° Lexbase : L0501LQM) à L. 442-11). Ce chapitre II se réorganise autour de deux sections. La section I est relative aux pratiques restrictives de concurrence qui regroupent certaines dispositions de l'actuel article L. 442-6 du Code de commerce. La section 2 est relative aux autres pratiques prohibées.

 

Ensuite, les dispositions du chapitre III relatif aux dispositions spécifiques aux produits agricoles et aux denrées alimentaires (article 3 de l'ordonnance ; nouveaux articles L. 443-1 N° Lexbase : L0516LQ8 à L. 443-4) sont modifiées.

 

L'article 4 est relatif aux dispositions d'outre-mer et adapte les dispositions du livre IX du Code de commerce.

 

L'article 5 concerne les dispositions d'entrée en vigueur des articles 1 à 3. Il prévoit une application immédiate de l'ordonnance à tous les contrats ou avenants conclus postérieurement à son entrée en vigueur, même si l'avenant se rapporte à une convention conclue antérieurement. Par ailleurs, s'agissant des contrats pluriannuels en cours d'exécution à la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance, l'article 3 prévoit leur mise en conformité avec les dispositions introduites par l'ordonnance à la date du 1er mars 2020. L'article 5 prévoit également que les professionnels ont jusqu'au 1er octobre 2019 pour s'adapter aux nouvelles règles applicables en matière de facturation.

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Droit médical

[Brèves] Affaire «Vincent Lambert» : la décision mettant fin au traitement jugée légale par le Conseil d’Etat

Réf. : CE référé, 24 avril 2019, n° 428117 (N° Lexbase : A7429Y9Z)

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N8771BX7

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par Laïla Bedja

Le 07 Mai 2019

► Sur l’office du juge des référés : au regard de l’article L. 521-2 du Code de justice administrative (N° Lexbase : L3058ALT), le juge des référés, lorsqu’il est saisi d’une décision, prise par un médecin, dans le cadre défini par le Code de la santé publique, et conduisant à arrêter ou ne pas mettre en œuvre, au titre du refus de l’obstination déraisonnable, un traitement qui apparaît inutile ou disproportionné ou sans autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, dans la mesure où l’exécution de cette décision porterait de manière irréversible une atteinte à la vie, doit prendre les mesures de sauvegarde nécessaire pour faire obstacle à son exécution lorsque cette décision pourrait ne pas relever des hypothèses prévues par la loi, en procédant à la conciliation des libertés fondamentales en cause, que sont le droit au respect de la vie et le droit du patient de consentir à un traitement médical et de ne pas subir un traitement qui serait le résultat d’une obstination déraisonnable ;

 

► Sur la conformité de la décision mettant fin à un traitement : il revient au juge des référés de s’assurer au vu de l’ensemble des circonstances de l’affaire et de l’ensemble des éléments versés dans le cadre de l’instruction contradictoire menée devant lui ainsi que des déclarations des parties lors de l’audience, que la décision prise le 9 avril 2018 par le médecin a respecté les conditions mises par la loi pour que puisse être prise une décision mettant fin à un traitement dont la poursuite traduit une obstination déraisonnable ; en l’espèce, il estime, tout d’abord, que la procédure collégiale préalable à l’adoption de la procédure litigieuse n’est entachée d’aucune irrégularité ; ensuite au regard des éléments médicaux et non médicaux, le juge a pu déduire qu’étaient réunies les différentes conditions exigées par la loi pour que la décision d’arrêter l’alimentation et l’hydratation artificielles de M. L., en accompagnant l’arrêt de ce traitement d’une sédation profonde et continue, puisse être prise par le médecin en charge du patient, et, en conséquence, il juge que cette décision ne peut être tenue pour illégale.

 

Telle est la solution retenue par le Conseil d’Etat dans une ordonnance rendue le 24 avril 2019 (CE référé, 24 avril 2019, n° 428117 N° Lexbase : A7429Y9Z).

 

Lors d’une précédente procédure relative à la décision de l’arrêt des traitements de Vincent L., prise le 11 janvier 2014 par le médecin en charge de ce dernier, les juges du Conseil d’Etat avait jugé légale la décision (CE Contentieux, 24 juin 2014, n° 375081 N° Lexbase : A6298MRP), qui n’avait toutefois pas reçu application dès lors que le médecin qui l’avait prise n’était plus en charge du patient une fois épuisés les recours contentieux (CE 2° et 7° ch.-r., 19 juillet 2017, n° 402472 N° Lexbase : A1691WNX). Aussi, par un arrêt du 5 juin 2015, la Cour européenne des droits de l’Homme a ensuite jugé qu’il n’y aurait pas violation de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales en cas de mise en œuvre de la décision du Conseil d’Etat (CEDH, 5 juin 2015, Req. 46043/14 N° Lexbase : A1981NKL).

 

Le 22 septembre 2017, le nouveau médecin en charge de M. L. a informé la famille de ce dernier de sa décision d’engager une nouvelle procédure collégiale. Au terme de celle-ci, ce médecin a, le 9 avril 2018, pris la décision d’arrêter les traitements de nutrition et d’hydratation artificielles de M. L., en accompagnant l’arrêt de ce traitement d’une sédation profonde et continue. Plusieurs membres de la famille de M. L. ont saisi le juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en lui demandant, notamment, la suspension de cette décision. Après avoir diligenté une expertise supplémentaire, ce juge, par une ordonnance du 31 janvier 2019, a rejeté la requête. Cette ordonnance a été contestée, en appel, devant le Conseil d’Etat.

 

Enonçant la solution précitée, le Conseil d’Etat n’accueille pas la requête dont il est saisi (cf. l’Ouvrage «Droit médical», L'acharnement thérapeutique  N° Lexbase : E0588ER9). 

 

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Fiscalité des entreprises

[Brèves] Nouvelles précisions du Conseil d’Etat sur le mode de calcul des plus-values de cession de titres de sociétés de personnes

Réf. : CE Plénière, 24 avril 2019, n° 412503, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A7394Y9Q)

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N8770BX4

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par Marie-Claire Sgarra

Le 07 Mai 2019

► Dans le cas où une société vient à retirer à l’actif de son bilan, à la suite d’une cession ou de la dissolution sans liquidation avec confusion de patrimoine, les parts qu’elle détenait jusqu’alors dans une société relevant de l’article 8 du Code général des impôts (N° Lexbase : L1176ITQ), le résultat de cette opération doit être calculé en retenant comme prix de revient de ces parts leur valeur d’acquisition ;

 

► Cette valeur est majorée en premier lieu, d'une part, de la quote-part des bénéfices de cette société revenant à l'associé qui a été ajoutée aux résultats imposés de celui-ci, antérieurement à la cession et pendant la période d'application du régime visé ci-dessus, d'autre part, des pertes afférentes à des entreprises exploitées par la société et ayant donné lieu de la part de l'associé à un versement en vue de les combler. Elle est par suite minorée, d'une part, des déficits que l'associé a déduits pendant cette même période, à l'exclusion de ceux qui trouvent leur origine dans une disposition par laquelle le législateur a entendu conférer aux contribuables un avantage fiscal définitif et, d'autre part, des bénéfices afférents à des entreprises exploitées en France par la société et ayant donné lieu à répartition au profit de l'associé.

 

Telle est la solution rappelée par le Conseil d’Etat dans un arrêt du 24 avril 2019 (CE Plénière, 24 avril 2019, n° 412503, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A7394Y9Q).

 

En l’espèce, une SCI a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2009 et 2010, ainsi que des pénalités correspondantes. Le tribunal administratif de Paris fait droit à cette demande. Par suite, la cour administrative d’appel de Paris (CAA de Paris, 17 mai 2017, n° 16PA01892 N° Lexbase : A5190WDL) a remis à la charge de la société les impositions dont le tribunal administratif avait prononcé la décharge.

 

Le Conseil d’Etat précise que la règle de calcul des plus-values de cession de titres a pour objet d’assurer la neutralité de l'application de la loi fiscale, compte tenu de la nature spécifique du régime prévu à l'article 8 du Code général des impôts, et trouve notamment à s'appliquer à la quote-part de bénéfices revenant à l'associé d'une société soumise à ce régime lorsque ces bénéfices résultent d'une réévaluation des actifs sociaux, qu'elle soit opérée par l'administration fiscale dans le cadre de ses pouvoirs de contrôle et ait pour effet d'accroître rétroactivement la base d'imposition de la société au titre de la période d'imposition close par la dissolution de la société et l'annulation consécutive des parts détenues par l'associé ou que cette réévaluation intervienne au moment de la dissolution de la société soumise au régime spécifique.

 

Par suite, en subordonnant la mise en œuvre du mode de détermination du prix de revient des parts d'une société relevant du régime prévu à l'article 8 du Code général des impôts, en vue de la détermination du gain résultant de la dissolution sans liquidation de cette société avec transmission universelle de son patrimoine au profit de son associé unique, telle que prévue à l'article 1844-5 du Code civil (N° Lexbase : L2025ABM), dans l'hypothèse où tout ou partie des bénéfices réalisés par cette société avant sa dissolution procèdent de l'existence d'un excédent de la valeur réelle de ses actifs sur leur valeur comptable, à la condition que la valeur à laquelle les parts en cause sont inscrites à l'actif de l'associé reflète la valeur comptable de ces actifs et non leur valeur réelle et que, par conséquent, ces bénéfices soient pris en compte une seconde fois, au titre du résultat de l'opération de dissolution-confusion, dans les résultats de l'associé, la cour commet une erreur de droit.

 

Par cet arrêt le Conseil d’Etat abandonne sa jurisprudence antérieure (CE 8° et 3° ch.-r., 6 juillet 2016, n° 377904, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6113RWC) selon laquelle le correctif du montant de la plus-value de cession des titres ne devait être appliquée qu’en cas de double imposition qui résulterait de la taxation de bénéfices de la société qui ont déjà été taxés entre les mains de cet associé en application du régime fiscal des sociétés de personnes. Cette décision excluait l’application du correctif lorsqu’il aurait pour effet, par la correction du prix d’acquisition des titres qu’il prévoit, de corriger lors de la taxation de la plus-value de cession des parts détenues par un associé, la taxation entre ses mains au titre de l’impôt sur le revenu, par application du régime fiscal des sociétés de personnes, de bénéfices de la société qui correspondent à un enrichissement de celle-ci antérieur à l’acquisition des parts par cet associé et dont il a déjà été tenu compte pour fixer leur prix d’acquisition (cf. le BoFip - Impôts annoté N° Lexbase : X5707ALX).

 

 

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Fiscalité internationale

[Brèves] Affaire «Google» : confirmation en appel de la non-imposition en France de la société sur la période 2005/2010

Réf. : CAA de Paris, 25 avril 2019, n° 17PA03065 (N° Lexbase : A9105Y94), n° 17PA03066 (N° Lexbase : A9106Y97), n° 17PA03067 (N° Lexbase : A9107Y98), n° 17PA03068 (N° Lexbase : A9108Y99) et n° 17PA03069 (N° Lexbase : A9109Y9A)

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par Marie-Claire Sgarra

Le 07 Mai 2019

► La cour administrative d’appel de Paris a confirmé le 25 avril 2019 l’annulation du redressement infligé par l’administration fiscale à Google (CAA de Paris, 25 avril 2019, n° 17PA03065 N° Lexbase : A9105Y94, n° 17PA03066 N° Lexbase : A9106Y97, n° 17PA03067 N° Lexbase : A9107Y98, n° 17PA03068 N° Lexbase : A9108Y99 et n° 17PA03069 N° Lexbase : A9109Y9A).

 

En l’espèce, la société contestait les redressements fiscaux dont elle avait fait l’objet en matière d’impôt sur les sociétés, retenue à la source, TVA, cotisation minimale de taxe professionnelle et cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, à raison des prestations de publicité qu’elle facture à ses clients français. L’administration fiscale s’était fondée sur la convention entre la France et l’Irlande (N° Lexbase : E0457EUH) qui prévoit l’imposition en cas de présence d’un établissement stable en France. Le tribunal administratif de Paris avait par cinq jugements (TA Paris, 12 juillet 2017, cinq jugements, n° 1505113 N° Lexbase : A6559WMU, n° 1505126 N° Lexbase : A6560WMW, n° 1505147 N° Lexbase : A6561WMX, n° 1505165 N° Lexbase : A6562WMY et n° 1505178 N° Lexbase : A6563WMZ) jugé qu’une personne résidente de France contrôlée par une société résidente d'Irlande ne peut constituer un établissement stable de cette dernière que si elle ne peut être considérée comme un agent indépendant de la société résidente d'Irlande et si elle exerce habituellement en France des pouvoirs lui permettant d'engager cette société dans une relation commerciale ayant trait aux opérations constituant les activités propres de cette société.

 

Rappelons que, pour que la convention fiscale soit applicable, deux conditions sont nécessaires : la SARL en France doit être placée sous la dépendance de la société Google Ireland Limited et ses salariés doivent disposer de pouvoir leur permettant de conclure des contrats au nom de la société irlandaise. La cour administrative d’appel a admis que la première de ces conditions était remplie mais, après avoir analysé les relations contractuelles entre les deux sociétés, celles entre la société irlandaise et ses clients français et les éléments invoqués par l’administration pour tenter de prouver que, malgré la lettre des contrats, les salariés de la société française disposaient en réalité de pouvoirs leur permettant d’engager la société irlandaise dans une relation contractuelle avec ses clients français, elle a considéré que la seconde condition ne l’était pas.

 

Ces décisions marquent donc une seconde défaite de l’administration fiscale française. Mais elles étaient visiblement attendues du Gouvernement français qui, rappelons le, travaille activement ces derniers mois sur un projet de loi ayant vocation à taxer les géants du numérique. Affaire à suivre… Une note sur cette décision sera publiée ultérieurement (cf. le BoFip - Impôts annoté N° Lexbase : X8810ALU).

 

 

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Procédure

[Conclusions] Conséquence de la différence de nature entre un titre exécutoire une lettre de rappel sur les modalités de recours par leur destinataire - Conclusions du Rapporteur public

Réf. : CE 3° et 8° ch.-r., 16 avril 2019, n° 422004, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A3550Y9D)

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N8776BXC

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par Romain Victor, Rapporteur public au Conseil d'Etat

Le 07 Mai 2019

Dans un arrêt rendu le 16 avril 2019, le Conseil d’Etat a jugé que le recours contre une lettre de rappel ne peut avoir pour effet de conserver le bénéfice du délai raisonnable pour contester un titre exécutoire, les deux actes étant distincts.  Lexbase Hebdo - édition publique vous propose de retrouver les conclusions anonymisées du Rapporteur public, Romain Victor.

1.- La présente affaire vous conduira, si vous nous suivez, à faire une nouvelle application, positive, de votre jurisprudence d’Assemblée «Czabaj» (CE, 13 juillet 2016, n° 387763 N° Lexbase : A2114RXL, rec. p. 340, concl. O. Henrard, RFDA, 2016 p. 927, chron. L. Dutheillet de Lamothe et G. Odinet, AJDA, 2016, p. 1629).

 

2.- La communauté d’agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines (CASQY), qui regroupe douze communes du département des Yvelines [1] et vient aux droits de l’établissement public d’aménagement de la ville nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines [2], est en conflit depuis plusieurs années avec la société Orange, qui a elle-même succédé à France Télécom, au sujet de la propriété des infrastructures de génie civil permettant l’implantation des réseaux de communications électroniques.

 

Le juge judiciaire y a été mêlé : à la suite de la réalisation par la communauté d’agglomération de travaux de voirie ayant, selon Orange, endommagé ou rendu inaccessibles ces infrastructures, dont elle revendique la propriété, celle-ci a engagé une action tendant à faire constater l’existence d’une voie de fait. La Cour de cassation, qui avait déjà posé une présomption de propriété en faveur de France Télécom (Cass. civ. 1, 9 avril 2014, n° 13-15.608, F-P+B+I N° Lexbase : A0725MK3, Bull. 2014, n° 66), a approuvé la cour d’appel de Versailles à avoir jugé que la CASQY ne démontrait pas être propriétaire des infrastructures construites avant le 1er janvier 1997, tout en déclarant les juridictions judiciaires incompétentes pour connaître du litige en l’absence d’actes de la CASQY de nature à caractériser l’extinction du droit de propriété de la société Orange et à justifier ainsi la qualification de voie de fait (Cass. civ. 1, 9 décembre 2015, n° 14-24.880, FS-P+B+I N° Lexbase : A8211NYR, Bull. 2015, n° 313).

 

En ce qui concerne la juridiction administrative, le litige s’est cristallisé lorsque, par une délibération du 15 février 2007, le conseil communautaire de l’intercommunalité a fixé les tarifs des redevances annuelles qu’elle entendait percevoir au titre de l’occupation des infrastructures passives de communications électroniques, incluant un droit d’accès forfaitaire et des redevances de mise à disposition et de maintenance calculées par mètre linéaire pour les fourreaux et par valeur pour les chambres de tirage.

 

Un premier épisode contentieux a porté sur le titre exécutoire, d’un montant de 6 millions d’euros, émis le 21 janvier 2010 par la CASQY pour le paiement de redevances au titre de la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2009, dont France Télécom a obtenu l’annulation par un jugement du 2 avril 2012 du tribunal administratif de Versailles, confirmé par un arrêt du 28 décembre 2014 de la cour administrative d’appel de Versailles devenu définitif.

 

Un second front contentieux -celui qui nous occupe- s’est ouvert après que la communauté d’agglomération a émis le 12 septembre 2011 un titre exécutoire d’un montant de 1 571 505,25 euros TTC en paiement des redevances d’occupation de l’année 2010. Ce montant correspond au produit du nombre de fourreaux occupés par le nombre de mètres linéaires des voies par un taux de 1,20 euro HT au titre de la mise à disposition et de 0,12 euro HT au titre de la maintenance.

 

Le titre a été notifié le 30 septembre 2011 à la société Orange. Il est constant qu’il mentionne le délai de recours de deux mois mais pas les voies de recours puisqu’il comporte une mention stéréotypée désignant, selon la nature de la créance, la juridiction judiciaire ou la juridiction administrative et fournissant une liste d’exemples n’incluant pas les redevances d’occupation d’infrastructures de réseaux de télécommunications [3], ce qui est irrégulier au regard des exigences de l’article L. 1617-5 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L8576LH4) applicables à la notification des titres de recettes et fait obstacle, en vertu de l’article R. 421-5 du Code de justice administrative (N° Lexbase : L3025ALM), à l’opposabilité du délai de recours contentieux, ainsi que vous avez plusieurs fois eu l’occasion de le juger (CE 9° et 10° s-s-r., 15 novembre 2006, n° 264636 N° Lexbase : A3520DS8, T. pp. 713-1002).

 

Aucun paiement n’ayant été fait à sa caisse, le comptable public de la trésorerie de Saint-Quentin-en-Yvelines a adressé le 2 novembre 2011 à la société Orange, avant d’engager des poursuites, une lettre de rappel. Par une requête enregistrée le 4 janvier 2012, cette société a demandé au tribunal administratif de Versailles d’annuler cette lettre de rappel, avant de se résoudre à introduire un second recours contentieux, dirigé cette fois contre le titre exécutoire, par une requête enregistrée le 12 juin 2013 au greffe du tribunal administratif de Versailles.

 

Par un premier jugement du 1er décembre 2015, ce tribunal a rejeté la demande d’annulation de la lettre de rappel comme étant dirigée contre un acte «purement confirmatif» ne faisant pas grief et, par un second jugement du même jour, il a jugé que le recours formé le 12 juin 2013 contre le titre exécutoire notifié fin septembre 2011 était tardif.

 

Pour aboutir à cette conclusion, les premiers juges ont observé, avec un bon sens certain, que la société Orange avait introduit devant eux, le 4 janvier 2012, un recours contre la lettre de rappel, ce dont ils ont déduit que la société devait être réputée avoir eu connaissance de l’ordre de juridiction compétent au plus tard à cette date, avant de constater que le recours contre le titre exécutoire avait été introduit plus de deux mois après cette même date.

 

Sur appel de la société Orange, la cour administrative d’appel de Versailles a toutefois annulé ce jugement et accueilli la demande de première instance par un arrêt du 7 juin 2018 dont la CASQY vous demande l’annulation.

 

3.- S’agissant de la recevabilité, les juges d’appel ont procédé en trois temps.

 

Ils se sont d’abord séparés, à juste titre selon nous, du motif d’irrecevabilité retenu par les premiers juges. S’inscrivant dans le cadre de la jurisprudence ayant transposé à l’hypothèse d’une succession de recours contentieux la solution initialement dégagée par votre arrêt «Mme Mauline» à propos de l’exercice d’un recours administratif (CE Sect., 13 mars 1998, n° 120079 N° Lexbase : A6552ASH, Rec. p. 80, concl. Combrexelle), ils ont rappelé que la connaissance acquise d’une décision administrative manifestée par l’exercice d’un recours contentieux contre une autre décision est sans influence sur l’inopposabilité des délais de recours contentieux contre la première décision en l’absence de mention des voies et délais de recours dans la notification qui en a été faite (v. CE 7° et 10° s-s-r., 5 décembre 1994, n° 150332 N° Lexbase : A4355AS4, T. p. 1105 ; CE 3° et 8° s-s-r., 25 mars 2016, n° 387755 N° Lexbase : A3884RA4, T. p. 870). Ceci les a conduit à juger que, par elle-même, la circonstance que la société Orange ait eu connaissance du titre exécutoire à la date d’introduction de son recours contentieux contre la lettre de rappel n’était pas de nature à l’avoir renseignée sur les voies de recours pour contester la légalité du titre exécutoire.

 

Puis, ils ont jugé, par un motif qui n’est pas contesté en cassation, que la circonstance, mise en avant par la CASQY, tirée de ce que la société aurait, plusieurs années auparavant, attaqué avec succès devant la juridiction administrative un précédent titre exécutoire concernant la même redevance n’avait pas non plus d’incidence sur l’application des dispositions de l’article R. 421-5 du Code de justice administrative.

 

Enfin, ils ont considéré que le recours de la société Orange ne pouvait être regardé, dans les circonstances de l’espèce, comme présenté au-delà d’un délai raisonnable au sens de la jurisprudence «Czabaj», car ils ont estimé qu’en contestant la lettre de rappel à l’intérieur du délai d’un an, Orange avait entendu contester le bien-fondé du titre exécutoire, donc son obligation de payer les redevances litigieuses, et qu’elle n’avait véritablement su que son recours contre la lettre de rappel était irrecevable que lorsque le tribunal lui a dit, fin 2015.

 

4.- Ce dernier temps du raisonnement nous paraît critiquable.

 

4.1.- La jurisprudence «Czabaj», qui découle du principe général du droit de sécurité juridique, a été conçue, ainsi que l’indiquent ses termes mêmes, pour s’appliquer à la généralité des recours juridictionnels, puisqu’elle ne réserve que les cas dans lesquels des textes prévoiraient des «délais particuliers», tout en ménageant la possibilité pour le juge de tenir compte de «circonstances particulières» conduisant à déroger au délai d’un an imparti au destinataire d’une décision administrative individuelle qui lui a été notifiée irrégulièrement

           

La postérité de l’arrêt illustre cette vocation «universelle» puisque vous l’avez acclimaté au plein contentieux fiscal d’assiette et de recouvrement, en tenant compte de l’exigence d’un recours administratif préalable obligatoire (CE Sect., 31 mars 2017, n° 389842 N° Lexbase : A0457UT4, Rec. p. 105). Vous avez en outre décidé que l’impossibilité d’exercer un recours juridictionnel au-delà d’un délai raisonnable s’appliquait aussi bien aux décisions expresses, mentionnées par la décision d’Assemblée, qu’aux décisions implicites (CE 5° et 6° ch.-r., 18 mars 2019, n° 417270 N° Lexbase : A1779Y4N, à publier au Recueil) qu’elle pouvait être opposée lorsqu’est contestée une décision individuelle par voie d’exception (CE 2° et 7° ch.-r., 27 février 2019, n° 418950 N° Lexbase : A2163YZ7, à publier au Recueil) et relevée d’office par le juge (CE 4° et 1° ch.-r., 28 mars 2018, n° 410552 N° Lexbase : A9020XIW, à mentionner aux Tables).

 

Compte tenu de sa parenté avec le plein contentieux fiscal, c’est tout naturellement que vous avez retenu, par votre décision Communauté d’agglomération du pays ajaccien (CE 3° et 8° ch.-r., 9 mars 2018, n° 401386 N° Lexbase : A6313XGW, T. p., concl. V. Daumas, JCP éd. A, 2018 n° 21), que la jurisprudence «Czabaj» était également appelée à produire ses effets lorsque le recours juridictionnel est dirigé contre un titre exécutoire, car il s’agit là d’un plein contentieux par nature (CE, Sect., 23 décembre 1988, n° 70113 N° Lexbase : A7895AP4, Rec. p. 465).

 

Vous avez considéré que, sauf circonstances particulières dont se prévaudrait son destinataire, le délai raisonnable ne saurait excéder un an à compter de la date à laquelle le titre exécutoire, ou à défaut, le premier acte procédant de ce titre ou un acte de poursuite, a été notifié au débiteur ou porté à sa connaissance. Il en résulte concrètement qu’à compter du jour où il a connaissance de sa dette, le débiteur dispose d’un délai d’un un an pour agir contre le titre de recettes. Le seul aménagement à cette règle que vous avez prévu correspond à l’hypothèse dans laquelle le débiteur se serait trompé en saisissant à tort la juridiction judiciaire. Vous avez considéré, conformément à une solution dégagée en ce qui concerne la conservation du délai de recours contentieux (CE 3° et 10° s-s-r., 28 avril 1967 N° Lexbase : A9004B8Y, T. pp. 696-729-886), que l’auteur du recours mal dirigé conservait le bénéfice du délai raisonnable, sous réserve qu’il saisisse le juge administratif dans les deux mois de la signification de la décision de la juridiction judiciaire se déclarant incompétente.

 

4.2.- Ceci étant rappelé, nous croyons que le chemin suivi par la cour dans l’arrêt attaqué confine au refus d’application de vos jurisprudences «Czabaj» et «Communauté d’agglomération du pays ajaccien», et révèle pour cette raison une erreur de droit.

 

Il ressort des propres constatations des juges d’appel que la société Orange devait être regardée comme ayant connaissance de l’existence du titre exécutoire au jour où elle a saisi le tribunal administratif d’un recours dirigé contre la «lettre de rappel», document qui ne se confond pas avec le titre exécutoire et qui a pour objet, comme son nom l’indique, de rappeler au débiteur, avant que ne soient mis en œuvre à son encontre des actes de recouvrement forcé, l’existence de sa dette procédant d’un titre de recettes.

 

S’il est légitime que le débiteur visé par un titre exécutoire ayant attaqué le «bon» acte devant le «mauvais» ordre de juridiction conserve le bénéfice du délai, il nous paraît beaucoup plus contestable de transposer cette solution à l’hypothèse dans laquelle le débiteur a saisi a « bonne » juridiction contre le «mauvais» acte, ici un acte ne faisant pas grief.

 

Il faut en effet garder en mémoire que la jurisprudence «Czabaj» a entendu responsabiliser les administrés en partant de l’idée simple et pragmatique qu’il appartient à celui qui s’est vu notifier, même irrégulièrement, une décision administrative, de se renseigner sur les voies et délais de recours applicables.

 

Comme l’indiquait avec force Olivier Henrard dans ses conclusions : «La jurisprudence ‘Mauline’ […] repose sur l’idée que la connaissance de la décision elle-même et la connaissance des voies et délais de recours sont deux choses différentes. Nous pouvons tout à fait admettre ce raisonnement lorsque le destinataire de la décision, non informé par celle-ci des voies et délais de recours, ne dispose que de deux mois pour mobiliser les éléments nécessaires à la connaissance et à l’exercice de ce recours. / Nous le récusons, en revanche, lorsque le destinataire de l’acte dispose d’un délai raisonnable beaucoup plus long. Nous ne pouvons accepter, en effet, la conception d’un sujet de droit entièrement passif, qui ne serait tenu à aucune forme de diligence alors même qu’il aurait eu connaissance d’une décision administrative dont il estime qu’elle lèse ses intérêts. Le délai raisonnable sera suffisamment étendu pour ménager au destinataire de l’acte toutes les possibilités de se renseigner sur l’existence et les modalités d’exercice de voies de recours, auprès de l’administration ou de professionnels du droit».

 

Bref, si la décision «Czabaj» repose -c’est son côté clair- sur l’objectif de protection de la sécurité juridique de l’administration, elle sanctionne aussi -c’est son côté obscur- l’inertie des administrés et les options contentieuses hasardeuses.

 

En l’espèce, il est vrai qu’Orange a agi en saisissant le juge. Mais la société avait connaissance du titre au plus tard à la date de son recours contre la lettre de rappel, soit le 4 janvier 2012, et nous pensons qu’elle doit subir les conséquences du choix qui a été le sien de laisser s’écouler un délai de dix-huit mois à compter de cette date avant de contester le titre exécutoire.

 

Enfin, nous avons un peu de mal à approuver la mansuétude dont la cour a fait preuve à son égard et à identifier des «circonstances particulières» justifiant de déroger à la règle énoncée par la décision Czabaj, comme il vous est déjà arrivé d’en identifier (CE 3° et 8° ch.-r., 2 mai 2018, n°s 391876, 391966 N° Lexbase : A1886XMS, à mentionner aux Tables sur un autre point), ainsi que le rappelle la société Orange dans ses écritures en défense, car le manquement du destinataire d’une décision administrative à son devoir de se renseigner sur les voies et délais de recours à sa disposition dans un délai raisonnable est d’autant moins excusable que :

 

i) celui-ci est une importante société disposant des moyens d’assurer sa défense ;

 

ii) l’enjeu du litige est important -ce qui était doublement le cas ici, du point de vue pécuniaire, s’agissant d’un titre portant sur la somme d’1,5 million euros, et du point de vue du principe même de l’obligation de payer, dans la mesure où Orange revendiquait la propriété des infrastructures au titre desquelles les redevances étaient établies-.

 

Vous pourrez donc casser l’arrêt.

 

Réglant l’affaire au fond, vous pourrez écarter comme manquant en fait le moyen tiré du défaut de signature de la minute du jugement et confirmer le dispositif du jugement du tribunal administratif de Versailles en substituant au motif d’irrecevabilité erroné retenu par ce tribunal le motif ayant justifié la cassation.

 

Par ces motifs nous concluons à l’annulation de l’arrêt attaqué, au rejet de l’appel de la société Orange, au rejet des conclusions présentées par cette société au titre de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative et à ce que celle-ci verse la somme de 3 000 euros à la CASQY au titre de ces mêmes dispositions.

 

[1] Elancourt, Guyancourt, Magny-les-Hameaux, Montigny-le-Bretonneux, Trappes, la Verrière Voisins-le-Bretonneux, Coignières, Villepreux, Les Clayes-sous-Bois, Maurepas et Plaisir.

[2] Auquel avaient succédé le syndicat communautaire d’aménagement de l’agglomération nouvelle puis le syndicat d’agglomération nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines.

[3] Il ne comportait qu’une mention stéréotypée en fonction de la nature des sommes réclamées («cantines scolaires : tribunal administratif ; produits hospitaliers : tribunal administratif / loyers d’habitation et charges : tribunal d’instance / redevances d’assainissement : tribunal d’instance ou tribunal de grande instance […]»).

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Procédure civile

[Textes] Simplification et efficacité, les deux maîtres-mots de la réforme de la justice civile (loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice)

Réf. : Loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice (N° Lexbase : L6740LPC)

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par Etienne Vergès, Professeur à l’Université Grenoble Alpes, Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Procédure civile"

Le 07 Mai 2019

Un petit vent de modernité souffle sur la justice civile. Alors que la procédure pénale s’enfonce année après année dans les lourdeurs procédurales, la procédure civile connaît quant à elle, des cures régulières de rajeunissement. La loi du 23 mars 2019 poursuit le travail engagé depuis la précédente réforme, qui prétendait de façon un peu excessive, faire entrer la justice dans le 21ème siècle [1]. Le fait est que, réforme après réforme, ces lois contribuent à une mutation assez profonde de la procédure civile. Cette mutation est dominée par deux grandes idées. La première est la simplification. La justice doit être plus simple pour être plus accessible aux justiciables. Elle doit encore l’être pour faciliter l’acte de juger et la gestion des dossiers. La seconde idée est celle de l’efficacité. Face à la masse, il faut résoudre plus d’affaires en un temps plus court. Et pour cela, tous les moyens sont bons. La loi de réforme pour la justice décline ces deux idées sous des formes très différentes, qu’il s’agisse de l’organisation juridictionnelle, des modes amiables de règlement des litiges, ou encore de la procédure civile proprement dits. Elle cible principalement les contentieux de masse : le divorce, l’injonction de payer ou encore les litiges portants sur des sommes de faible valeur. Nulle utopie politique ne se cache derrière ce texte, mais on y décèle plutôt la figure d’un législateur qui calque son comportement sur celui que les économistes appellent «l’agent rationnel». Ses choix procéduraux sont calculés par rapport au résultat optimum qu’ils sont censés produire. Le nouveau visage de la justice civile emprunte beaucoup à cette rationalité. C’est ce que nous proposons d’explorer dans cette chronique en examinant successivement l’organisation des juridictions (1), les modes amiables de règlement des litiges (2), les règles communes aux différentes procédures (3) et enfin les procédures particulières (4). Il est à souligner que toutes les dispositions de la loi n’entrent pas en vigueur avec sa promulgation. De nombreuses dispositions nécessitent des décrets d’application, et pour certaines, l’entrée en vigueur pourra être repoussée jusqu’au 1er janvier 2022 [2].

 

I - L’organisation des juridictions

 

  • La promesse d’une juridiction unique

 

Comme nous l’avions évoqué dans de précédentes chroniques [3], la promesse de la création d’un tribunal de première instance à compétence civile universelle n’est pas encore tenue. Toutefois, en créant le «Tribunal judiciaire», qui regroupera au 1er janvier 2020 le tribunal de grande instance et le tribunal d’instance, la loi du 23 mars 2019 amorce un pas décisif [4]. Certes, c’est le pas le plus simple qui a été franchi. On est encore bien loin de réunir au sein d’un même tribunal, les juridictions civiles au sens strict, et les juridictions commerciale et prud’homale. La simplification est donc assez modeste. Elle consiste principalement à réduire les difficultés liées à la compétence respective des TI et des TGI. Du point de vue des implantations géographiques, le Gouvernement s’est engagé à plusieurs reprises à ne supprimer aucun lieu de justice. Du point de vue de l’affichage, c’est plutôt la complexité qui domine, puisque la suppression des tribunaux d’instance donne lieu à une forme de renaissance : celles des «tribunaux de proximité» qui constituent, d’un point de vue administratif, des «chambres de proximité» détachées du tribunal judiciaire. Pour bien comprendre cette nouvelle organisation, lorsqu’un ancien tribunal d’instance se situe en dehors du siège d’un tribunal judiciaire, il lui est rattaché sous la forme d’une chambre de proximité. Cette chambre prend alors le nom de tribunal de proximité, mais elle demeure une chambre composant le tribunal judiciaire.

 

  • La spécialisation des juridictions

 

L’efficacité va dans le sens de la spécialisation. Lorsque plusieurs tribunaux judiciaires existent dans un même département (ou dans deux départements géographiquement proches), l’un d’entre eux peut être spécialement désigné par décret pour traiter des contentieux techniques [5]. L’idée est ici de regrouper des contentieux qui nécessitent des compétences pointues et qui seront plus efficacement jugés par des magistrats spécialisés.

La spécialisation est encore recherchée à travers la création d’un juge des contentieux de la protection au sein du tribunal judiciaire. Ce juge est compétent en premier lieu à l’égard du contentieux des majeurs protégés (tutelle, curatelle, sauvegarde de justice, mesure d’accompagnement judiciaire, mandat de protection future). Il connaît d’autres contentieux, tels que l’expulsion des personnes sans droits ni titres, des litiges portant sur les contrats de louage d’immeubles à usage d’habitation ou d’occupation d’un logement, le crédit à la consommation, le surendettement des particuliers. Ce juge unique peut décider de renvoyer l’affaire à une formation collégiale du tribunal judiciaire.

 

  • La souplesse dans la composition de la juridiction

 

La loi apporte des petites modifications à la répartition des contentieux entre juge unique et collégialité [6]. Lorsqu’une affaire est dévolue à une formation à juge unique, le renvoi à la formation collégiale peut être décidé, soit à la demande d’une partie, soit d’office. La décision est alors qualifiée de mesure d’administration judiciaire. Le renvoi à la collégialité n’est donc plus «de droit» pour les parties. Les cas de renvois doivent être précisés par un décret. Par ailleurs, si la formation collégiale est incomplète au jour de l’audience, plutôt que d’ordonner le renvoi, le président peut demander l’accord des parties pour statuer à juge unique [7]. Cette possibilité permet d’éviter un renvoi d’audience.

 

  • Déjudiciarisation de certains actes

 

La loi de réforme de la Justice s’inscrit dans un mouvement qui consiste à recentrer le juge sur sa fonction juridictionnelle. Il s’agit donc de retirer au juge des tâches qui ne relèvent pas de son office, mais qui nécessitent une certaine solennité :

- la première catégorie d’actes est dressée à des fins probatoires. Il s’agit de l’acte de notoriété. En matière de filiation, chaque parent peut désormais demander à un notaire qu’il leur délivre un acte de notoriété faisant foi de sa possession d’état [8] alors que le pouvoir de dresser un tel acte appartenait antérieurement au juge du TGI. Cet acte est toujours établi sur la foi des déclarations d’au moins trois témoins. Pour être valable, l’acte doit être signé par le notaire et par les témoins. L’acte de notoriété peut également être délivré par le notaire pour suppléer aux actes d’état civil dont les originaux ont été détruits ou sont disparus [9] ;

- la seconde catégorie d’acte concerne le recueil du consentement d’un couple ayant recours à une procréation médicalement assistée (avec tiers donneur ou accueil d’embryon). Ce consentement doit être donné exclusivement à un notaire. Auparavant, il pouvait également être donné à un juge [10].

 

II - Les modes alternatifs de règlement des litiges : entre contrainte et anticipation

 

Les modes amiables de règlement des litiges font encore l’objet de toutes les attentions de la part du législateur. L’objectif est toujours le même. D’une part, la procédure amiable est une manière de détourner les litiges de la voie juridictionnelle. Le rôle du juge est réduit et chaque affaire réglée à l’amiable évite de gaspiller de précieuses heures de travail des magistrats. D’autre part, la voie amiable est une voie efficace de règlement des litiges. Elle permet de trouver une issue à la fois à la question juridique soulevée, mais également de résoudre le conflit psychologique. En 2015, le taux de réussite de la conciliation était de 57 % lorsque le conciliateur était saisi par un particulier et de 49 % lorsqu’il était saisi par un juge [11]. La difficulté française réside dans une tradition culturelle qui est marquée par une certaine forme d’hostilité à l’égard de la voie amiable. Devant le TI, le taux de tentative de conciliation au regard des affaires introduites au fond représente entre 0,7 et 1,6 %. Devant le TGI, le taux d’envoi en médiation ou d’injonction à rencontrer un médiateur est proche de 0,5 % [12]. Ces chiffres montrent, de façon constante, que ni les juges ni les parties ne recourent, de façon spontanée, à un mode de règlement amiable du litige. Face à ce constat, quasi immuable, le législateur tente à nouveau d’utiliser plusieurs leviers pour favoriser le développement des modes de règlement amiable.

 

Le premier levier est celui de la contrainte. Il consiste dans la généralisation de la possibilité offerte au juge d’enjoindre aux parties de rencontrer un médiateur. Cette injonction constitue une part très faible du règlement amiable [13] et, en pratique, seuls les juges aux affaires familiales y ont recours [14]. L’objectif poursuivi par la loi est donc de généraliser la possibilité pour le juge de recourir à cette injonction. L’article 22-1 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 (N° Lexbase : L1139ATD) est modifié et prévoit désormais que le juge peut enjoindre aux parties de rencontrer un médiateur «en tout état de la procédure, y compris en référé». Cette injonction ne contraint pas les parties à régler leur différend à l’amiable. A ce stade de la procédure, le rôle du médiateur est simplement d’informer celles-ci sur l’objet et le déroulement de la mesure de médiation. Par ailleurs, le législateur a ouvert la possibilité de désigner un médiateur dans la procédure de divorce ou de séparation de corps, alors que, jusqu’à présent, la médiation était interdite pour procéder au préalable obligatoire de conciliation. Ce préalable ayant désormais disparu [15], le juge aux affaires familiales peut recourir à la médiation à tout moment de la procédure de divorce. Toujours en matière familiale, l’article 22-3 de la loi précitée du 8 février 1995 et l’article 373-2-10 du Code civil (N° Lexbase : L7364LPG) sont modifiés pour permettre au JAF d’ordonner une médiation même lorsqu’il est dessaisi. Il s’agit du cas particulier où le juge prend une décision sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale. Dans sa décision, qui fixe ces modalités, le juge peut ordonner une médiation. La médiation prend ici une forme atypique. Elle ne vise plus à résoudre un litige, puisque le juge l’a déjà tranché, mais elle est destinée à favoriser l’exécution de la décision [16]. On parle alors de médiation post-sentencielle.

La contrainte est encore utilisée pour imposer une tentative de règlement amiable préalable à la saisine de la juridiction pour les petits litiges. Depuis la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle (N° Lexbase : L1605LB3), ce préalable obligatoire existe déjà devant le tribunal d’instance, lorsque la saisine de cette juridiction est faite par déclaration au greffe. Avec la fusion du TI et du TGI, le préalable obligatoire est remodelé. Il concerne toutes les demandes qui tendent au paiement d’une somme n’excédant pas un certain montant ou celles relatives à un conflit de voisinage. Il s’agit donc principalement de litiges relatifs à des petites créances, encore que le seuil de la créance reste à fixer par décret (4 000 euros ? 10 000 euros ?). Le demandeur a le choix du mode amiable. Il peut s’agir d’une conciliation par un conciliateur de justice, d’une médiation ou d’une procédure participative. A défaut de tentative de règlement amiable, l’action en justice est irrecevable. Le texte prévoit plusieurs exceptions lorsque :

1/ une des parties sollicite l’homologation d’un accord. La procédure amiable a donc déjà eu lieu ;

2/ l’exercice d’un recours préalable est imposé ;

3/ l’existence d’un motif légitime (qui doit être précisé par décret) ;

4/ l’obligation pour le juge, ou pour l’autorité administrative, de procéder à une tentative préalable de conciliation.

La loi prévoit également une exclusion spéciale s’agissant des litiges relatifs au crédit à la consommation et au crédit immobilier.

 

Le second levier et celui de la régulation du marché commercial du règlement alternatif des litiges. Prenant acte que le règlement des litiges se développe en dehors de l’activité juridictionnelle, le législateur a entrepris de reconnaître juridiquement l’existence de prestataires privés pour mieux en contrôler l’activité. L’article 4 de la loi du 23 mars 2019 définit ainsi le statut juridique des services en ligne de conciliation de médiation, mais également d’arbitrage et d’aide à la saisine des juridictions.

 

En premier lieu, ces prestataires sont soumis à un ensemble d’obligations et d’interdictions. Ils doivent protéger les données à caractère personnel et garantir aux parties la confidentialité. Par principe, ils ne peuvent réaliser d’acte d’assistance ou de représentation en justice, ni donner de consultations juridiques ou rédiger des actes sous seings privés, sauf s’ils y sont expressément autorisés par la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques (N° Lexbase : L6343AGZ). Cette application du droit commun des professions juridiques permet donc aux avocats de créer leurs propres plateformes de services juridiques couvrant l’ensemble du champ de compétences (consultation, rédaction d’actes, représentation, assistance, résolution amiable ou arbitrage). Quelle que soit la qualité du prestataire, celui-ci doit respecter les obligations générales qui s’imposent au «médiateur» [17] : impartialité, indépendance, compétence et diligence. Plus spécifiquement, la loi du 23 mars traite la question du recours à traitement de données pour aider à la résolution du litige, qu’il s’agisse d’une résolution amiable ou par voie d’arbitrage. Le prestataire de service en ligne ne peut faire usage d’un algorithme ou un traitement automatisé de données à caractère personnel [18] que s’il en informe explicitement les parties et qu’il recueille leur consentement exprès. Le responsable du traitement doit pouvoir expliquer «en détail et sous une forme intelligible» la manière dont le traitement a été fait. Le législateur fait ici preuve d’une certaine capacité d’anticipation. Les algorithmes, et de façon plus générale, le traitement informatisé des litiges n’a pas encore fait la preuve de son efficacité. Les domaines d’application de ces techniques se limitent à ceux dans lesquels une prétention est chiffrée. Il s’agit des prestations compensatoires, des indemnités de licenciement ou encore des préjudices corporels. Pour autant, les algorithmes ne savent pas encore dire si un contrat a été exécuté, si une personne a commis une faute ou encore s’il y a trouble anormal de voisinage. Autrement dit, les prestataires privés ne savent pas encore faire ce que le législateur encadre déjà.

 

En second lieu, la loi de réforme de la justice crée une certification pour les prestataires de service de conciliation, de médiation ou d’arbitrage. La certification est délivrée par un organisme accrédité [19] au prestataire de service en ligne qui en fait la demande et qui respecte les obligations et interdictions précitées. La procédure de certification doit être précisée par un décret. Les personnes qui exercent une activité de médiation ou de conciliation juridiquement reconnue bénéficient de plein droit de cette certification. Il s’agit des conciliateurs de justice, des médiateurs de la consommation inscrits sur la liste prévue à l’article L. 615-1 du Code de la consommation (N° Lexbase : L0834K7Z) et enfin des médiateurs inscrit sur une liste de cour d’appel prévue par l’article 21 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995. Ces trois catégories font l’objet d’un contrôle préalable à leur désignation, ce qui justifie leur certification automatique. La procédure de certification des médiateurs et conciliateur a pour but d’introduire de la confiance dans un marché en plein essor. Elle ne certifie en rien la qualité du service rendu, mais plutôt la conformité de l’activité aux exigences légales. Le développement des services en ligne pourrait participer au succès du règlement amiable des litiges à l’avenir, mais il faut aussi souligner le fait que ce type de service néglige la dimension psychologique du travail du médiateur. Si les parties ne se rencontrent pas, il est douteux que le conflit psychologique, qui sous-tend le litige, soit résolu.

 

III - Le droit commun procédural

 

Le droit commun procédural évolue dans le sens d’un renforcement des procédures écrites et de la représentation obligatoire. La procédure orale avait déjà subi les assauts de l’écrit à la suite de la réforme réglementaire de 2010 [20]. Elle subit aujourd’hui la concurrence d’une nouvelle procédure sans audience.

 

  • Un accroissement modéré de la représentation obligatoire

 

La représentation obligatoire est réorganisée pour s’adapter à la fusion entre TGI et TI. Les règles de cette représentation sont aménagées par diverses lois. Le principe est fixé par le premier alinéa de l'article 4 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques (N° Lexbase : L6343AGZ) : «Nul ne peut, s'il n'est avocat, assister ou représenter les parties, postuler et plaider devant les juridictions et les organismes juridictionnels ou disciplinaires de quelque nature que ce soit».

Ce principe subit des exceptions prévues dans des lois générales et d’autres dans des lois particulières. Deux exceptions sont précisées et reconfigurées par la réforme :

- s’agissant des litiges relevant de l’ancienne compétence du TI, l’article 2 de la loi n° 2007-1787 du 20 décembre 2007 relative à la simplification du droit (N° Lexbase : L5483H3H) est modifié et il énumère de façon générale que : «dans certaines matières, en raison de leur nature, ou en considération de la valeur du litige, les parties peuvent se défendre elles-mêmes ou se faire assister ou représenter devant le tribunal de grande instance, outre par un avocat, par :

1° Leur conjoint ;

2° Leur concubin ou la personne avec laquelle elles ont conclu un pacte civil de solidarité ;

3° Leurs parents ou alliés en ligne directe ;

4° Leurs parents ou alliés en ligne collatérale jusqu'au troisième degré inclus ;

5° Les personnes exclusivement attachées à leur service personnel ou à leur entreprise».

L’article ajoute que «l'Etat, les régions, les départements, les communes et les établissements publics peuvent se faire représenter ou assister par un fonctionnaire ou un agent de leur administration».

Cette disposition -qui s’appliquera à compter de la fusion entre TI et TGI au sein du Tribunal judiciaire- doit faire l’objet d’un décret d’application pour préciser le domaine de la dispense de représentation obligatoire.

L’autre dispense légale concerne les litiges devant le Conseil des prud’hommes. L’absence de représentation obligatoire par avocat des parties devant le conseil de prud’hommes est désormais inscrite dans le Code du travail [21]. La règle reste la même. Le salarié peut être représenté et assisté par un autre salarié appartenant à la même branche d’activité, un défenseur syndical, le conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin. L’employeur peut se faire représenter ou assister par un autre employeur appartenant à la même branche d’activité ou par un membre de l’entreprise ou de l’établissement fondé de pouvoir ou habilité à cet effet.

Sur le fond, cette réorganisation générale de la représentation obligatoire et de ses dérogations ne devrait pas modifier substantiellement les règles existantes. Toutefois, la loi impose la représentation obligatoire par avocat dans deux nouveaux contentieux :

- dans le contentieux civil douanier, la représentation obligatoire est alignée sur les règles du Code de procédure civile.

- devant le juge de l’exécution, l’article L. 121-4 du Code des procédures civiles d’exécution (N° Lexbase : L5807IRI) est modifié. La représentation est obligatoire par principe, mais deux dérogations sont conservées, à savoir les demandes relatives à l’expulsion et les litiges ayant pour origine une créance ou qui tendent au paiement d’une somme qui n’excède pas un montant déterminé par décret en Conseil d’Etat [22].

 

  • La création d’une procédure exclusivement écrite et dématérialisée

 

Le Code de l’organisation judiciaire accueille deux nouvelles dispositions ayant pour objet de définir le cadre général des procédures sans audience [23]. Les règles posées par le COJ sont très générales et elles doivent faire l’objet de précisions par décret. Pour cette raison, leur application est reportée, au plus tard, au 1er janvier 2022. La première procédure a vocation à s’intégrer dans le droit commun du procès civil. La seconde concerne plus particulièrement l’injonction de payer [24].

L’article L. 212-5-1 du COJ (N° Lexbase : L7183LPQ) prévoit que «devant le tribunal de grande instance, la procédure peut, à l’initiative des parties lorsqu’elles en sont expressément d’accord, se dérouler sans audience. En ce cas, elle est exclusivement écrite». Le tribunal peut décider de tenir une audience (contre l’accord des parties), lorsqu’il estime «qu’il n’est pas possible de rendre une décision au regard des preuves écrites».

Ce cadre général semble pouvoir s’appliquer à toutes les procédures. En réalité, l’étude d’impact fait apparaître que cette procédure est destinée à s’appliquer aux litiges inférieurs à la somme de 5 000 euros [25]. Elle a pour finalité d’apporter une réponse rapide aux «litiges du quotidien» [26]. Il s’agirait ainsi de la transposition dans la loi d’une promesse de campagne du président de la République. La promesse consiste à donner une réponse judiciaire à ces litiges dans un délai de deux mois.

Les modalités de cette procédure sans audience restent à définir. L’étude d’impact évoque une mise en état opérée par le juge en cabinet. La circulaire d’application parle, quant à elle, d’une procédure dématérialisée.

Cette nouvelle procédure sans audience préfigure une troisième voie procédurale. En effet, dans la procédure orale, les parties peuvent être autorisées à formuler leurs prétentions par écrit [27], mais pour former cette demande, elles doivent se présenter à une première audience. La physionomie de la nouvelle procédure écrite semble différente. Les parties vont saisir la juridiction par voie dématérialisée et les échanges d’écritures vont avoir lieu de la même façon. Par conséquent, le droit commun procédural devrait, à l’avenir, être composé de trois voies principales : la procédure écrite avec mise en état ; la procédure orale qui conduit les parties d’une audience à une autre audience avec des renvois successifs ; et enfin, cette procédure écrite simplifiée dont la vocation est d’être dématérialisée et de dispenser les acteurs du procès de se rencontrer en vue d’obtenir une solution rapide.

 

IV - Les procédures spéciales

 

Deux procédures spéciales font l’objet d’une rénovation. La loi apporte quelques touches, assez modestes, à la procédure de divorce. En revanche, elle réinvente totalement la procédure d’injonction de payer.

 

  • Un divorce sans audience de conciliation, mais sans bouleversement

 

En matière de divorce, l’innovation présentée comme la plus importante est la disparition du préalable obligatoire de conciliation [28]. Cette modification n’est pas une nouveauté en soi. D’une part, la place du règlement amiable dans la procédure de divorce conserve toute son importance. D’autre part, l’audience qui ouvre la procédure continuera d’exister et d’occuper une place centrale, puisqu’il s’agira d’une audience destinée à orienter le dossier et à statuer sur les mesures provisoires [29]. Le changement n’en est donc pas vraiment un.

Sur le terrain du règlement amiable, nous avons vu précédemment que le juge peut orienter les parties vers la voie amiable à tout moment de la procédure et même à la suite de la décision qui le dessaisit. De surcroît, le nouvel article 252 du Code civil (N° Lexbase : L7332LPA) prévoit que la demande introductive d’instance en divorce comporte un rappel des dispositions relatives aux modes amiables de règlement du litige (médiation en matière familiale, procédure participative, homologation des accords partiels).

La loi du 23 mars 2019 ajoute à la procédure de divorce quelques innovations de faible ampleur. D’abord, l’acte contresigné par avocats est étendu aux époux qui acceptent le principe de la rupture du mariage. Ces derniers peuvent consentir à ce divorce par un acte conclu avant l’introduction de l’instance [30]. Ensuite, la durée minimale de la cessation de la communauté de vie dans la procédure de divorce pour altération définitive du lien conjugal passe de deux ans à un an [31]. Enfin, la réforme introduit la possibilité de signer électroniquement les actes de divorce et de séparation de corps par consentement mutuel [32].

 

  • L’injonction de payer réinventée

 

L’injonction de payer constitue le prototype du contentieux de masse. Il constitue un volume de requête annuelle variant entre 430 000 et 500 000. Le taux d’opposition varie entre 3 % et 4 % des requêtes [33], ce qui signifie que la question est principalement tranchée au stade de la requête. Ce contentieux mobilise une masse importante de magistrat et de magistrats à titre temporaire. La réforme opérée par la loi du 23 mars 2019 se situe sur un double terrain : d’une part, celui de la spécialisation juridictionnelle ; d’autre part, celui de la dématérialisation.

En ce qui concerne la spécialisation, la loi prévoit de regrouper les demandes d’injonction de payer devant un tribunal spécialement désigné [34]. Il s’agira d’un TGI existant, qui se verra confier ce contentieux par décret. Ce décret devra entrer en vigueur au plus tard le 1er janvier 2021. Le tribunal désigné sera compétent pour statuer sur l’ensemble des requêtes en injonction de payer, à l’exception de celles qui relèvent du tribunal de commerce. Il sera également compétent pour juger, sans exception, toute les requêtes relevant du Règlement (CE) n° 1896/2006 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 instituant une procédure européenne d’injonction de payer (N° Lexbase : L1426IRA). Les oppositions seront formées devant le tribunal spécialement désigné et elles seront transmises par le greffe aux tribunaux de grande instance territorialement compétents.

La nouvelle procédure d’injonction de payer peut prendre une forme dématérialisée ou traditionnelle (sur support papier) selon les situations :

 

- devant le tribunal à compétence nationale, la procédure est dématérialisée par principe. Ce principe subit deux exceptions. D’une part, les demandes d’injonction de payer formées par une personne physique n’agissant pas à titre professionnel et non représentées par un mandataire ; d’autre part, les demandes relevant de la procédure européenne. Dans ces deux situations, la demande peut être formée sur support papier et adressée au greffe de la juridiction nationale ;

- devant le tribunal territorialement compétent pour statuer sur l’opposition, les parties doivent suivre la procédure de droit commun. Toutefois, l’article. L. 212-5-2 du COJ (N° Lexbase : L7184LPR) prévoit que pour les créances ne dépassant pas un certain montant (fixé par décret), les parties peuvent prendre l’initiative de suivre une procédure dématérialisée. Cette procédure se déroule alors sans audience, à moins que le juge estime ne pas pouvoir juger l’affaire au regard des preuves écrites.

 

Au premier abord, cette procédure semble particulièrement complexe. Toutefois, elle présente une certaine cohérence. La demande d’injonction de payer est, par nature, non contradictoire. L’audience n’est pas nécessaire et, en faisant usage d’une procédure dématérialisée, elle peut être tranchée par n’importe quelle juridiction française. A partir du moment où la saisine de la juridiction pourra avoir lieu via une application centralisée et accessible en ligne, la procédure devrait être particulièrement simple. En revanche, l’opposition à l’ordonnance portant injonction de payer nécessite un débat contradictoire. Le retour au droit commun s’impose donc, c’est-à-dire celui qui gouverne la compétence et la procédure. Les parties pourront alors choisir entre une procédure de droit commun et, pour les petites créances, une procédure entièrement dématérialisée qui leur évitera de se présenter devant le juge si elles jugent que leur dossier écrit est suffisant. La souplesse et l’efficacité sont donc bien les maîtres mots de cette procédure.

 

En définitive, la loi du 23 mars 2019 ne propose pas une refonte de la justice civile. En revanche, elle procède à une modernisation incontestable de l’institution et de la procédure. Toutefois, le parcours de la réforme est loin d’être achevé. D’une part, le ministère de la Justice devra déployer d’importants moyens matériels et humains pour mettre en place un système informatique opérationnel qui est désormais indispensable pour que la réforme puisse être appliquée. D’autre part, dans le domaine de la procédure civile, la compétence du législateur demeure marginale. C’est au pouvoir réglementaire qu’est confié le pouvoir de modifier le Code de procédure civile. La véritable réforme de la justice civile est à venir et, en cette matière, il n’existe pas de travaux préparatoires qui nous permettent d’imaginer ce qu’elle sera.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

[1] Loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle (N° Lexbase : L1605LB3).

[2] Pour le détail de l’application dans le temps, nous renvoyons à la circulaire du 25 mars 2019 de présentation des entrées en vigueur des dispositions civiles de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.

[3] Nous renvoyons à notre chronique sur le projet de loi déposé en 2015 : E. Vergès, La Justice du 21ème siècle : petits arrangements avec la procédure, Lexbase, éd. priv., n° 632, 2015 (N° Lexbase : N9828BUK).

[4] Loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, art. 95.

[5] COJ, art. L. 211-9-3.-I (N° Lexbase : L7243LPX).

[6] COJ, art. L. 212-2.

[7] COJ, art. L. 218-1 (N° Lexbase : L1586K7U).

[8] C. civ., art. 317 (N° Lexbase : L7273LP3).

[9] C. civ., art. 46 (N° Lexbase : L7272LPZ).

[10] C. civ., art. 311-20 (N° Lexbase : L8445LPH) et C. sant. pub., art. L. 2141-6 (N° Lexbase : L7275LP7).

[11] Etude d’impact de la loi, p. 21. Ce taux est relativement stable, comme le montre la comparaison établie par l’étude d’impact entre 2001 et 2015.

[12] Etude d’impact de la loi, p. 23.

[13] 7,3 % des médiations en 2017.

[14] Les injonctions sont prononcées par le JAF dans 99,7 % à 100 % des cas selon les années (de 2010 à 2017).

[15] Cf. infra, sur la procédure de réforme du divorce.

[16] Circulaire de présentation des entrées en vigueur des dispositions civiles de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, annexe 1, p. 2.

[17] Le terme «médiateur» est ici entendu au sens large, c’est-à-dire celui visé par l’ordonnance n° 2011-1540 du 16 novembre 2011 portant transposition de la Directive 2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale (N° Lexbase : L2513IRI).

[18] C’est-à-dire un traitement statistique des données du litige.

[19] La procédure devrait passer par le comité français d’accréditation (COFRAC)

[20] Décret n° 2010-1165 du 1er octobre 2010 relatif à la conciliation et à la procédure orale en matière civile, commerciale et sociale (N° Lexbase : L0992IN3).

[21] C. trav., art. L. 1453-1 A (N° Lexbase : L2044H9L).

[22] Les dispositions spécifiques applicables à la saisie des immeubles, navires, aéronefs et bateaux de navigation intérieure sont inchangées.

[23] COJ, art. L. 212-5-1 (N° Lexbase : L7183LPQ) et L. 212-5-2 (N° Lexbase : Z64068RE).

[24] Elle sera envisagée plus loin, avec les procédures spéciales.

[25] Ce montant devra être fixé par décret.

[26] Etude d’impact, p. 110. Dans le programme de campagnes, étaient évoqués les litiges relatifs à la consommation, aux conflits de voisinage, aux injonctions de payer ou de faire.

[27] C. pr. civ., art. 446-1 (N° Lexbase : L1138INH).

[28] L’article 252 du Code civil (N° Lexbase : L7332LPA) prescrivant qu’une «tentative de conciliation est obligatoire avant l'instance judiciaire» est totalement réécrit.

[29] C. civ., art. 254 (N° Lexbase : L2817DZD) : «Le juge tient, dès le début de la procédure, sauf si les parties ou la partie seule constituée y renoncent, une audience à l’issue de laquelle il prend les mesures nécessaires pour assurer l’existence des époux et des enfants de l’introduction de la demande en divorce à la date à laquelle le jugement passe en force de chose jugée».

[30] C. civ., art. 233 (N° Lexbase : L2791DZE).

[31] C. civ., art. 238 (N° Lexbase : L2794DZI).

[32] C. civ., art. 1175 (N° Lexbase : L7344LPP).

[33] Chiffres issus de l’étude d’impact (p. 114) et des statistiques 2017 du ministère de la Justice.

[34] COJ, art. L. 211-17 (N° Lexbase : L7346LPR).

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Procédure pénale

[Brèves] Cour criminelle : l’expérimentation débutera le 13 mai 2019

Réf. : Arrêté du 25 avril 2019 relatif à l'expérimentation de la cour criminelle (N° Lexbase : L0553LQK)

Lecture: 2 min

N8783BXL

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par June Perot

Le 07 Mai 2019

► A été publié au Journal officiel du 26 avril 2019, l’arrêté du 25 avril 2019 relatif à l'expérimentation de la cour criminelle (N° Lexbase : L0553LQK).

 

Pris pour l’application de l’article 63 de la loi n° 2019-222, du 23 mars 2019, de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice (N° Lexbase : L6740LPC), l’arrêté fixe les départements dans lesquels sera expérimenté la cour criminelle et la date de début de cette expérimentation.

 

Objectif. Cette cour criminelle a pour but de rendre plus rapide le jugement des crimes et de limiter la pratique de la correctionnalisation.

 

Compétence. Ainsi, par dérogation à l’article 181 (N° Lexbase : L2990IZR) et aux chapitres Ier à V du titre Ier du livre II du Code de procédure pénale, les personnes majeures accusées d’un crime puni de quinze ans ou de vingt ans de réclusion criminelle, lorsqu’il n’est pas commis en état de récidive légale, sont jugées en premier ressort par la cour criminelle. Cette cour est également compétente pour le jugement des délits connexes. Elle n’est pas compétente s’il existe un ou plusieurs coaccusés qui n’est pas dans cette situation.

 

Composition. La cour criminelle sera exclusivement composée d’un président et de quatre assesseurs, choisis par le premier président de la cour d’appel parmi, pour le président, les présidents de chambres et les conseillers du ressort de la cour d’appel et, pour les assesseurs, les conseillers et les juges de ce ressort. Deux des assesseurs peuvent être des magistrats exerçant à titre temporaire ou des magistrats honoraires exerçant les fonctions juridictionnelles mentionnées à l’article 41-25 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature (N° Lexbase : L5336AGQ).

 

Départements d’expérimentation. L’article 63 de la loi de programmation prévoit que l’expérimentation doit avoir lieu «dans au moins deux départements et aux plus dix départements». En application de l’article 1er de l’arrêté du 25 avril 2019, les départements concernés sont : les Ardennes, le Calvados, le Cher, la Moselle, la Réunion, la Seine-Maritime et les Yvelines. La cour criminelle siège au même lieu que la cour d’assises.

 

Durée. La cour criminelle est expérimentée pour une durée de trois ans, soit jusqu’au 13 mai 2022. Les premières audiences des cours criminelles interviendront à compter du 1er septembre 2019.

 

A ce sujet, lire, Projet de réforme des assises - Questions à Maître Henri Leclerc, Lexbase Pénal, mai 2018 (N° Lexbase : N4072BX4) et M.-S. Baud, Projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice : une procédure criminelle en chantier ?, Lexbase Pénal, mai 2018 (N° Lexbase : N4070BXZ).

 

newsid:468783

Procédure prud'homale

[Brèves] Annulation de l'arrêté relatif aux nominations pour le mandat prud'homal 2018-2021

Réf. : CE, 6° et 5° ch-r., 24 avril 2019, n° 405793, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A7386Y9G)

Lecture: 1 min

N8780BXH

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par Charlotte Moronval

Le 07 Mai 2019

► L'arrêté du 5 mai 2017, portant attribution des sièges de conseillers prud'hommes et calendrier de dépôt des candidatures à la fonction de conseiller prud'homme pour le mandat prud'homal 2018-2021 (N° Lexbase : L2884LEK) est partiellement annulé.

 

Telle est la solution retenue par le Conseil d’Etat dans un arrêt rendu le 24 avril 2019 (CE, 6° et 5° ch-r., 24 avril 2019, n° 405793, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A7386Y9G).

 

En l’espèce, plusieurs organisations syndicales demandent au Conseil d'Etat l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 5 mai 2017, relatif aux désignations prud’homales pour le mandat 2018-2021.

 

Le Conseil d’Etat décide d’annuler le 2° de l'article 1er et les articles 2 et 3 de l’arrêté du 5 mai 2017 ainsi que le tableau annexé à cet arrêté en tant qu'il porte sur les sièges attribués aux organisations professionnelles pour le collège des employeurs. En effet, il estime que le projet d’arrêté n’a été adressé aux membres du Conseil supérieur de la prud’homie que par un courriel le matin même de la consultation, sans que ses membres aient disposé plus en amont des éléments nécessaires pour être en mesure de porter utilement une appréciation sur la répartition des sièges figurant dans ce projet, alors même que la répartition des sièges à laquelle procède l’arrêté résulte de l’addition de nombreux résultats, suivant l’affiliation de nombreuses organisations, secteur par secteur, représentant des centaines de pages de documents. Les membres du Conseil supérieur de la prud’homie n’ont, dès lors, pas disposé des documents nécessaires à l’exercice de leur mission dans un délai leur permettant d’en prendre utilement connaissance et ont, par suite, été privés d’une garantie.

newsid:468780

Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

[Brèves] TVA : quid des opérations accomplies par une banque à la réception d’un ATD

Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 24 avril 2019, 24 avril 2019, n° 412570, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A7395Y9R)

Lecture: 2 min

N8821BXY

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par Marie-Claire Sgarra

Le 07 Mai 2019

Les opérations accomplies par une banque à la réception d’un avis à tiers détenteur ne constituent pas des prestations de services, et, par suite, elles ne sont pas soumises à la TVA.

 

Telle est la solution retenue par le Conseil d’Etat dans un arrêt du 24 avril 2019 (CE 9° et 10° ch.-r., 24 avril 2019, n° 412570, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A7395Y9R).

 

En l’espèce, une banque a fait l’objet d’une vérification de comptabilité à l’issue de laquelle l’administration fiscale a estimé que les frais bancaires facturés à ses clients faisant l’objet d’un avis à tiers détenteur étaient soumis à la taxe sur la valeur ajoutée. Le tribunal administratif de Montreuil rejette la demande de décharge des rappels de TVA auxquelles la banque a été assujettie. La cour administrative d’appel de Versailles confirme le jugement.

 

Le Conseil d’Etat rappelle qu’il résulte des dispositions de l’article 256 du Code général des impôts (N° Lexbase : L0374IWR), telles qu’interprétées par la Cour de justice de l’Union européenne, qu’une prestation de services n’est effectuée à titre onéreux et dès lors taxable que s’il existe entre le prestataire et le bénéficiaire un rapport juridique au cours duquel des prestations réciproques sont échangées, la rétribution perçue par le prestataire constituant la contre-valeur effective du service fourni au bénéficiaire. Pour juger que les opérations réalisées par une banque à l’occasion d’un ATD sont soumises à la TVA, la cour administrative d'appel a relevé qu’elles sont rémunérées par des frais prévus par la convention de compte conclue avec le client et en a déduit qu’il existe, en pareille hypothèse, un rapport juridique entre la banque et son client sur le fondement duquel des prestations réciproques sont échangées. En statuant ainsi, alors, d’une part, que l’obligation pour la banque d’accomplir ces opérations ne résulte pas de la relation contractuelle avec son client, mais de la demande qui lui est faite sous la forme d’avis à tiers détenteur par le comptable chargé du recouvrement et, d’autre part, que le client ne peut être regardé comme tirant un avantage de ces opérations, la cour a commis une erreur de droit. Par suite, son arrêt doit être annulé (cf. le BoFip - Impôts annoté N° Lexbase : X9390ALD).

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