Réf. : CE 9° et 10° s-s-r., 20 janvier 2016, n° 377902, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A5767N4D)
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Le 28 Janvier 2016
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Le 28 Janvier 2016
II - Fiscalité des entreprises
III - Fiscalité des particuliers
- Actualité du 18 janvier 2016 : les montants suivants sont mis à jour pour l'imposition des revenus de l'année 2015 :
- le montant maximal de la rente donnant lieu à majoration de l'Etat utilisé pour déterminer le montant des versements en vue de la retraite mutualiste du combattant déductible du revenu global en application du 5° du II de l'article 156 du CGI (N° Lexbase : L3998KWY) ;
- les plafonds applicables pour la déduction du revenu imposable de certaines pensions alimentaires et des avantages en nature consentis, en l'absence d'obligation alimentaire, aux personnes âgées de plus de 75 ans vivants sous le toit du contribuable ;
- les coefficients utilisés pour la revalorisation spontanée des pensions alimentaires et de la contribution aux charges du mariage déductibles du revenu imposable, ainsi que pour l'évaluation des versements en capital ouvrant droit à la réduction d'impôt accordée au titre des prestations compensatoires lorsque ces versements résultent de conversion de rente prononcées en 2015 (voir le BoFip - Impôts, BOI-IR-BASE-20-30-20-10 N° Lexbase : X3831ALH et s.).
IV - Fiscalité du patrimoine
V - Fiscalité financière
VI - Fiscalité immobilière
- Actualité du 21 janvier 2016 : l'article 234 du CGI (N° Lexbase : L7784I8S) prévoit qu'une taxe annuelle, dite taxe "Apparu", est due à raison des loyers perçus pour des logements de petite surface situés dans certaines zones du territoire, lorsque le loyer mensuel de ces biens excède un plafond fixé par décret. Le seuil d'application de cette taxe, ainsi que les limites dans lesquelles celui-ci est compris, ont été révisés au 1er janvier 2016 selon les modalités prévues par l'article L. 353-9-2 du CCH (N° Lexbase : L8987IZU), soit en fonction de l'indice de référence des loyers du deuxième trimestre de l'année 2015. Ainsi, pour les loyers perçus en 2016, le seuil d'application de la taxe s'établit à 41,64 euros par mètre carré de surface habitable (voir le BoFip - Impôts, BOI-RFPI-CTRL-10 N° Lexbase : X8844AMI).
VII - Fiscalité internationale
VIII - Impôts locaux
IX - Procédures fiscales
X - Recouvrement de l'impôt
XI - TVA
XII - Taxes diverses et taxes parafiscales
XIII - Droits de douane
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Le 28 Janvier 2016
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par Jules Bellaiche, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo - édition fiscale
Le 28 Janvier 2016
L'attitude des autorités, dans un sens large, a évolué en faveur de la lutte contre la fraude fiscale ces dernières années par la mise en place de mesures.
Ainsi, à l'instar de nombreux Etats, la France a progressivement durci sa législation en matière de lutte contre l'évasion fiscale. En première ligne, sont naturellement visés les prix de transfert. Les flux financiers entre des sociétés d'un même groupe représentent en effet des enjeux financiers considérables. De nombreuses mesures visent donc à faciliter l'analyse de ces flux par l'administration fiscale.
Un premier palier décisif a été franchi début 2010 : la France impose alors à certaines sociétés de tenir à disposition de l'administration une documentation permettant de justifier leur politique de prix de transfert en cas de contrôle fiscal.
Fin 2013, le dispositif de lutte contre l'évasion fiscale était à nouveau renforcé avec l'instauration d'une obligation de déclaration annuelle. Doivent être communiquées à l'administration diverses informations portant sur l'activité du groupe, les actifs incorporels exploités et méthodes de prix de transfert appliquées à chaque transaction impliquant la société déclarante.
Enfin, en novembre 2015, à la suite des travaux de l'OCDE sur les actions BEPS (Base erosion and profit shifting), les députés ont adopté, dans le cadre de la loi de finances pour 2016 (loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 N° Lexbase : L2719KWM), une nouvelle mesure sur le reporting pays par pays. Cette mesure doit permettre à l'administration fiscale française de disposer d'informations sur les bénéfices de toutes les entités d'un groupe consolidé pour mieux cibler les contrôles fiscaux sur les sociétés dites à risque.
L'Union européenne participe également activement au même mouvement, par exemple par le plan d'action publié en juin 2015 où la Commission européenne reprend et complète les changements prônés par l'OCDE (v. nos obs. N° Lexbase : N8077BUP). Cette instance utilise aussi le moyen de l'aide d'Etat pour sanctionner sans attendre les Etats membres qui ont mis en place sans la prévenir des régimes fiscaux considérés comme "trop généreux". Ainsi, le 11 janvier 2016, la Belgique a été sanctionnée en raison des avantages fiscaux sélectifs octroyés au titre de son régime d'exonération des bénéfices excédentaires (v. nos obs. N° Lexbase : N0927BWA). En conséquence, l'Etat belge aura l'obligation de demander aux sociétés ayant bénéficié de la mesure déclarée illégale la restitution avec intérêts de l'avantage ainsi obtenu.
Le Conseil d'Etat a également contribué a cette tendance, notamment via une décision rendue le 9 novembre 2015 (CE 9° et 10° s-s-r., 9 novembre 2015, n° 371132, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A3594NWZ). Pour la Haute juridiction, en vue de l'objectif et du but de la Convention fiscale franco-espagnole du 10 octobre 1995 (N° Lexbase : L6689BH9), un fonds de pension exonéré d'impôt en Espagne ne pouvait bénéficier des avantages prévus par la Convention. Si la Convention a pour principal objet d'éliminer la double imposition, cela signifie qu'a contrario, elle ne peut aboutir à une double exonération. Cependant, cette décision soulève certaines problématiques, notamment le fait que le Conseil ait recherché "l'esprit" des dispositions de la Convention, et non l'application de la lettre. Or, l'esprit de ce type de convention est la commune intention des Etats à signer un accord. Au cas présent, l'entreprise espagnole concernée se retrouve imposable en France alors qu'elle n'a commis aucun abus ou n'a tenté d'éluder l'impôt dans aucun des deux Etats. Il n'est donc pas certain que cette décision soit la commune intention des parties.
Ce nouvel environnement, ce changement de paradigme, peut laisser craindre la paralysie des dirigeants qui, lorsqu'il s'agira de structurer un projet national ou international au travers la fiscalité, réfléchiront à deux fois avant de s'engager.
II - Présentation et analyse de l'enquête réalisée par Fidal sur les prix de transfert
Que pensent les entreprises de cette évolution vers une plus grande transparence ? Pour répondre à cette question, le cabinet Fidal a interrogé plus de 200 entreprises françaises, mais également des entreprises étrangères ayant des filiales en France. Cette enquête a pour objectifs de recueillir leur perception sur la réglementation en vigueur et son efficacité, d'apprécier les pratiques lors des contrôles fiscaux diligentés en matière de prix de transfert, et de mesurer l'intérêt que portent les entreprises à la procédure d'accord préalable promue par l'administration.
S'agissant de la connaissance de cette réglementation française en matière de prix de transfert, 89 % des répondants déclarent la maîtriser parfaitement ou partiellement. Ce chiffre élevé s'explique sans doute par la typologie des entreprises ayant répondu à l'enquête (plus de la moitié d'entre elles ont un effectif supérieur à 250 salariés) et des répondants eux-mêmes qui, pour 72,5 % d'entre eux, appartiennent soit à une direction administrative et financière, soit à une direction fiscale pour les plus importantes structures. Quoi qu'il en soit, dans le contexte actuel de lutte contre l'évasion fiscale ou plus généralement de lutte contre toute optimisation fiscale agressive, il apparaît difficile pour les entreprises de faire l'impasse sur les questions relatives aux prix de transfert. Environ 80 % des répondants possèdent également une documentation formalisée afin de répondre rapidement à l'administration fiscale et devancer leurs questions.
Par ailleurs, une très grande majorité des répondants estime que la réglementation française est efficace en matière de lutte contre les transferts de bénéfices à l'étranger. Les entreprises semblent donc donner raison aux autorités françaises qui considèrent que le durcissement des obligations, notamment documentaires, mises à la charge des entreprises, contribue à freiner les velléités de transfert de bénéfices à l'étranger. Il est intéressant de constater que plus de 82 % des répondants étrangers jugent très efficace ou efficace la réglementation française contre 64 % des répondants français. Les entreprises étrangères perçoivent donc comme particulièrement coercitif le dispositif législatif mis en place en France.
Il n'en demeure pas moins qu'au global, plus d'un répondant sur cinq estime totalement inefficace la réglementation française en matière de lutte contre les bénéfices. Ce taux de réponse peut s'expliquer par la marge d'appréciation liée à toute problématique économique, et par conséquent, à toute politique menée en matière de prix de transfert.
Il s'agit sans doute de la plus grande surprise de cette enquête. Alors même que les transferts de bénéfices constituent un axe privilégié d'investigation pour l'administration fiscale, plus de 50 % des répondants déclarent avoir échappé à tout contrôle de leur politique de prix de transfert sur les cinq dernières années.
En outre, l'administration fiscale n'a pas systématiquement eu recours aux traitements informatiques qui lui offrent pourtant de larges possibilités en termes d'analyse de marges ou de flux. Plus de 46 % des répondants y ont ainsi échappé.
Par ailleurs, d'après les informations recueillis dans l'enquête, 59 % des contrôles fiscaux diligentés en prix de transfert se traduisent par une absence de notification de redressement, donc un résultat favorable, et 24 % d'entre eux donnent lieu à redressement. Ceci est notamment dû à la bonne tenue de manière générale de la documentation.
Enfin, 17 % des répondants n'ont pas souhaité se prononcer sur la question, ce qui témoigne des réticences de certaines entreprises à évoquer le sujet.
En synthèse, il ressort que bon nombre d'entreprises semble encore passer au travers des mailles du filet. Il est vrai que les ressources déployées par l'administration fiscale pour lutter contre l'évasion fiscale ne sont pas extensibles à l'infini et que les vérificateurs ne sont pas tous parfaitement aguerris pour traiter ces problématiques plus économiques que fiscales.
S'agissant des difficultés rencontrées en pratique par les entreprises sondées, les répondants, dans leur grande majorité (64 %), relèvent la quantité d'informations demandées par l'administration, ce qui est confirmé par les conseils de ces entreprises. La seconde difficulté mise en avant diffère selon leur nationalité. 43 % des répondants étrangers soulignent la durée du contrôle fiscal (dans se nombreux Etats, les entreprises tentent de trouver rapidement un accord avec l'administration). Cette difficulté n'est relevée qu'en quatrième position des répondants français habitués aux contrôles fiscaux qui s'éternisent. 35 % des répondants français déclarent avoir été confrontés à une méconnaissance de leur secteur d'activité par l'inspecteur en charge du contrôle. Sont ensuite citées les difficultés rencontrées pour récupérer les informations auprès du groupe et de la maison mère, l'ancienneté des informations demandées par l'inspecteur en charge du contrôle, et l'absence de documentation disponible en matière de prix de transfert.
Si plus de la moitié des entreprises ont échappé à un contrôle relatif aux prix de transfert, il est peu probable que cette situation dure dans un futur proche en raison des travaux BEPS. Toutefois, alors que 89 % des sociétés françaises déclarent connaître parfaitement ou partiellement la réglementation française, elles sont très peu nombreuses à s'intéresser en détail aux travaux de l'OCDE sur le projet BEPS. En effet, 37 % des répondants français indiquent ne pas les suivre du tout et 17 % d'entre eux ne les suivent que très rarement. Il est vrai que les recommandations de l'OCDE n'ont pas force de loi et il est souvent difficile pour les entreprises d'en mesurer la réelle portée dans les faits.
Cependant, certaines mesures ont d'ores et déjà trouvé leur traduction en droit français, à l'instar de la déclaration pays par pays qui rentrera prochainement en vigueur.
De plus, l'OCDE a publié un nouveau manuel sur l'évaluation des risques liés aux prix de transfert qui rassemble les procédures, les méthodes et pratiques récentes afin de fournir aux administrations fiscales un outil d'évaluation des risques leur permettant de cibler leurs contrôles fiscaux. Ces informations se retrouvent dans la déclaration 2257 que de nombreuses entreprises sont amenées à remplir.
Promue par Bercy et centralisée au niveau de la Mission d'expertise juridique et économique internationale (MEJEI), la procédure d'accord préalable en matière de prix de transfert est connue par environ 56 % des répondants.
En revanche, cette procédure est loin de susciter un engouement puisque 80 % des répondants, qu'ils soient français ou étrangers, déclarent ne pas envisager de conclure un tel accord. Les raisons invoquées sont multiples. La communication de trop d'informations à l'administration fiscale pour 36 % des répondants, le coût et la durée d'une telle procédure pour 27 % des répondants, et la taille des entreprises ciblées, 35 % des répondants considérant qu'elle ne concerne que les grandes entreprises.
Le degré de protection qu'offrirait cette proc"dure n'est salué que par 29 % des répondants français qui estiment qu'elle permettrait de réduire les risques de redressements, contre 57 % pour les répondants étrangers sans doute plus enclin à solliciter des "tax rulings".
Ce taux est surprenant au regard des avantages, notamment une importante sécurité juridique, que présente une procédure d'accord préalable en matière de prix de transfert dans l'environnement coercitif et incertain actuel. Cette procédure devrait donc être promue par l'administration fiscale, ce que soulignent un quart des répondants.
Pour conclure, de nombreuses entreprises ont bien compris que l'étau des administrations fiscales sur la question des prix de transfert, et plus largement, sur toute forme d'optimisation n'est pas prêt de se desserrer. Les autres, et en particuliers celles qui déclarent ne pas posséder de documentation, disposent de peu de temps pour s'organiser. Car il est une certitude : il leur sera de plus en plus difficile de suivre cet adage qui veut qu'il faille vivre caché pour vivre heureux.
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Réf. : CE 9° et 10° s-s-r., 20 janvier 2016, n° 370121, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A5759N43)
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Le 28 Janvier 2016
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Réf. : CE 9° et 10° s-s-r., 20 janvier 2016, n° 376980, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A5766N4C)
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Le 29 Janvier 2016
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Réf. : CAA Versailles, 31 décembre 2015, n° 13VE02416 (N° Lexbase : A0122N4B)
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Le 28 Janvier 2016
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Réf. : CE 3°, 8°, 9° et 10° s-s-r., 7 décembre 2015, n° 357189, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A0396NZP)
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par Thibaut Massart, Professeur à l'Université Paris-Dauphine, PSL Research University, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition fiscale
Le 28 Janvier 2016
3. Afin d'éviter que le crédit d'impôt tombe en non-valeur, les sociétés déficitaires ont pris l'habitude de céder temporairement leurs titres à des sociétés bénéficiaires afin que ces dernières puissent profiter du crédit d'impôt. Ces cessions temporaires prennent des formes variées : vente à réméré, vente avec option de rachat, prêt de titres, pension de titres ou encore equity swaps. Lorsque l'opération a lieu juste avant le "détachement du coupon", la distribution des dividendes se réalise en faveur du propriétaire des actions, c'est-à-dire au profit de la société cessionnaire. Cette dernière peut alors profiter du crédit d'impôt correspondant en l'imputant sur son IS. Les titres sont rendus à bref délai au cédant à un prix permettant un partage de l'économie fiscale. Le but principalement fiscal de l'opération ne fait guère de doute.
4. Dans notre affaire, une banque française avait emprunté pour quelques semaines, entre mai et juillet 2002, auprès d'une banque britannique des titres d'une société de droit italien. Cette opération de prêt ayant entraîné un transfert de propriété des titres à la société emprunteuse, cette dernière a alors perçu les dividendes versés par la société italienne pour un montant total de 9 450 000 euros. Cette somme a fait l'objet d'une retenue à la source en Italie de 1 417 500 euros, de sorte que la banque française a perçu un montant net de 8 032 500 euros. En application des stipulations du contrat de prêt, la société française a cependant reversé au prêteur des titres, immédiatement après la perception des dividendes, une somme égale au montant brut de ces dividendes, puis, après quelques semaines, lui a restitué les titres ainsi que 566 962 euros d'intérêts dus au titre de l'opération. La banque française a comptabilisé, en produit, le montant net des dividendes reçus et imputés sur l'IS dont elle était redevable une fraction du crédit d'impôt correspondant aux retenues à la source italienne.
5. A l'issue d'une vérification de la comptabilité de cette société, l'administration fiscale a remis en cause cette imputation. Pour cette dernière, le reversement au prêteur des titres des dividendes reçus majorés de la retenue à la source supportée en Italie est constitutif d'une charge à déduire des revenus à prendre en compte pour l'application de la règle du butoir, de sorte que l'assiette de l'impôt dû en France sur les revenus de source étrangère serait nulle. Admettre l'imputation des crédits d'impôt litigieux aurait abouti, en l'absence de base imposable en France sur ces dividendes, à faire supporter au seul Trésor public français le paiement d'un impôt retenu à la source à l'étranger en méconnaissance de la règle dite du butoir, interne et conventionnelle, prévue, respectivement, aux articles 220 du CGI (N° Lexbase : L1389IZH) et 24 de la Convention fiscale signée entre la France et l'Italie le 5 octobre 1989 (N° Lexbase : L6706BHT).
6. Cependant, ni le tribunal administratif de Montreuil, à travers son jugement du 27 mai 2010 (4), ni la cour administrative d'appel de Versailles, par un arrêt du 13 décembre 2011 (5) n'ont suivi le raisonnement de l'administration. Les juges du fond ont opté pour une interprétation stricte des dispositifs légaux et conventionnels applicables.
En censurant les magistrats de la cour administrative d'appel, le Conseil d'Etat semble donner sa préférence à l'approche économique globale de l'opération suggérée par le service des impôts. Pour l'application de la règle du butoir, le revenu à prendre en compte est donc le revenu net des reversements effectués au titre de l'opération de prêt.
Une telle décision constitue indiscutablement un revirement de jurisprudence, car, en 2009, le Conseil d'Etat avait rendu un avis contraire sur cette problématique (I). Les conséquences pratiques de cette décision doivent être appréciées à l'aune de la réforme opérée par le législateur en 2010 et visant à durcir la règle du butoir au nom de la lutte contre l'optimisation fiscale (II).
I - Le revirement de jurisprudence
7. La décision de la cour administrative d'appel se plaçait assurément dans le cadre de l'avis rendu par le Conseil d'Etat en 2009 (A). Mais la Haute juridiction modifie la dernière partie de son raisonnement (B).
A - La cour administrative d'appel suit le raisonnement proposé par le Conseil d'Etat en 2009
8. Afin de parfaitement comprendre le raisonnement suivi par la cour administrative d'appel, il convient de clairement poser les principes généraux qui gouvernent la matière.
Lorsque des dividendes proviennent de sociétés étrangères, la question se pose de connaître le sort qu'il convient de réserver à la retenue à la source qui a pu être opérée par l'Etat de résidence de la société distributrice. En l'absence de convention fiscale, la retenue à la source a la nature d'une charge déductible de l'IS en vertu des articles 39, 1 (N° Lexbase : L3894IAH) et 122, 1 (N° Lexbase : L8875IR7) du CGI.
Ce système ne permettant pas d'éviter totalement la double imposition, les conventions fiscales prévoient généralement une solution très différente. La retenue à la source est cette fois analysée comme un revenu imposable qui doit en principe être ajouté au montant net perçu pour la détermination du résultat soumis à l'IS. Mais la retenue à la source forme un crédit d'impôt pour être imputée sur l'IS.
9. Soulignons toutefois, pour être totalement précis, qu'il est possible de comptabiliser, comme l'a fait la banque française dans la présente affaire, les dividendes pour leur montant net perçu. Cette approche est parfaitement conforme aux règles comptables admettant la comptabilisation des revenus pour leur montant net de retenue prélevée à l'étranger. Dans ce cas, la société ne peut imputer sur son IS qu'une fraction du montant de la retenue à la source correspondant au contre prorata du taux de l'IS, soit 66,2/3 %. Cette solution découle de l'article 136 de l'annexe II au CGI (N° Lexbase : L0420HNU) qui indique, pour les revenus de capitaux mobiliers, que seul le montant net est pris en compte dans la base de l'impôt et qu'en contrepartie, le crédit d'impôt imputable, notamment étranger, est limité à une fraction de son montant. La doctrine administrative (BOI 4 H-3-97 du 30 mai 1997 § 36 à 38 N° Lexbase : X1146AAP) présente cette solution comme une simple faculté, la prise en compte des revenus pour leur montant brut (impôt étranger compris) constituant la règle (6).
Ainsi compris, ce système permet d'éliminer la double imposition, les revenus perçus, en net ou en brut, étant soumis à une imposition globale correspondant au taux de l'IS français.
10. La difficulté principale de ce régime provient de la règle du butoir édictée par l'article 220, 1 du CGI.
Le a de ce texte pose une règle générale d'imputation sur l'IS des retenues à la source prélevée sur les revenus de capitaux mobiliers perçus par une société. La loi précise toutefois que "la déduction à opérer de ce chef ne peut excéder la fraction de ce dernier impôt correspondant au montant desdits revenus". Autrement dit, la règle de butoir limite l'imputation du crédit d'impôt à l'impôt français dû sur ce même revenu avant imputation.
Le b de l'article 220,1 concerne spécifiquement les revenus de source étrangère visés aux articles 120 (N° Lexbase : L3811KW3) à 123 du CGI. Dans ce cas, "l'imputation est limitée au montant du crédit correspondant à l'impôt retenu à la source à l'étranger ou à la décote en tenant lieu, tel qu'il est prévu par les conventions internationales". Pour les revenus de source étrangère, l'imputation d'un crédit d'impôt correspondant à la retenue à la source est soumise à la condition qu'une convention internationale l'ait prévue et n'est ouverte que dans la limite du montant de la retenue à la source prévue par cette convention. Si le b ne reprend pas la règle du butoir visé au a, les conventions fiscales contiennent généralement une telle règle en posant que le montant du crédit d'impôt imputé ne doit pas non plus excéder la fraction de l'impôt français correspondant aux revenus donnant lieu à imputation (Doc. adm. DGI 4 H-5411, § 95, 30 octobre 1996). Le montant imputable de ces impôts étrangers est limité, pays par pays, au montant de l'impôt français qui frapperait le bénéfice reconstitué selon les règles du droit français.
11. Pour calculer l'IS butoir, il convient de déterminer l'assiette théorique imposable et le taux d'imposition.
Si le taux d'imposition peut éventuellement poser des difficultés (7), c'est surtout la détermination de l'assiette théorique imposable qui focalise la plus grande incertitude. La question principale consiste à déterminer les modalités de calcul du revenu d'imputation et la prise en compte de charges sur l'opération.
12. Une instruction du 1er avril 1975 (BOI 14 B-1-76 ; Dr. fisc., 1976, n° 19, instr. 5087) avait indiqué, pour l'application de la règle du butoir, que le montant imposable des revenus "est égal au montant brut des revenus diminué de toutes les dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation des revenus, à l'exception de l'impôt prélevé à l'étranger".
Force est d'admettre que ces directives étaient pour le moins sommaires et qu'aucun fondement légal n'était précisé, même si la référence à l'article 13 du CGI (N° Lexbase : L9938IWY) semblait s'imposer, même si cette disposition n'a pas été reconnue applicable à l'impôt sur les sociétés. Rappelons que cet article donne une définition générale du bénéfice ou du revenu imposable, prévoyant qu'il "est constitué par l'excédent du produit brut, y compris la valeur des profits et avantages en nature, sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu".
13. Confronté à l'apparition d'un marché des crédits d'impôt, le ministre du Budget a demandé à la section des finances du Conseil d'Etat de rendre un avis portant sur les modalités d'imputation du crédit d'impôt étranger sur l'impôt sur les sociétés dû en France (8). Plus précisément, le Gouvernement souhaitait savoir si les règles légales autorisaient, pour la détermination de la base d'imputation de la retenue à la source, la déduction des revenus mobiliers de sources étrangères imposables des dépenses directement liées à l'acquisition, à la conservation ou à la cession des titres.
14. Selon la section des finances, le renvoi de l'article 209 du CGI (N° Lexbase : L4558I7X) à l'article 39 du même code a un caractère général en matière pour d'impôt sur les sociétés, si bien que, pour tous les éléments du bénéfice, "le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges", si les charges sont engagées dans l'intérêt de l'entreprise, n'ont pas pour contrepartie un accroissement de l'actif, correspondent à des charges effectives et ne sont pas exclues des dépenses déductibles par une disposition expresse. Dès lors, "des frais justifiés directement liés à l'acquisition, à la conservation et à la cession de titres et n'ayant pas pour contrepartie un accroissement de l'actif, sont, sauf exclusion par des dispositions spécifiques, susceptibles d'être déduits de la fraction du revenu brut procuré par les titres et servant d'assiette pour le calcul de l'impôt sur les sociétés dû à raison de ces titres. Peuvent notamment être déduits, sur ce fondement, les frais de garde et d'encaissement des titres. En revanche, les intérêts d'un emprunt contracté pour acquérir les titres à l'étranger ne pourraient être regardés comme des dépenses directement liées à l'acquisition des titres, pas plus que de tels intérêts ne sont déductibles pour l'impôt sur le revenu, sauf dans des cas particuliers, comme ceux dans lesquels, en application des articles 13 et 83 (N° Lexbase : L7780I8N) du CGI, l'emprunt a été utilisé pour acquérir une participation nécessaire à la poursuite d'un contrat de travail" (CE 3° et 8° s-s-r., 25 octobre 2004, n° 255092, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A6729DDL).
15. La section des finances poursuit son analyse en indiquant que pour les revenus des valeurs mobilières émises hors de France, l'article 122 du CGI dispose que : "le revenu est déterminé par la valeur brute en euros des produits encaissés d'après le cours du change au jour des paiements, sans autre déduction que celle des impôts établis dans le pays d'origine et dont le paiement incombe au propriétaire". Pour le Conseil d'Etat, "ces dispositions, qui interdisent de déduire des revenus de valeurs mobilières émises hors de France des dépenses engagées à l'étranger, autres que les impôts payés à l'étranger, ne font pas par elles-mêmes obstacle à ce que des dépenses engagées en France pour acquérir ou conserver les valeurs mobilières à l'origine de ces revenus soient considérées comme des charges déductibles de ceux-ci. En revanche, ces dispositions font obstacle à la déduction de la rémunération que le bénéficiaire du crédit d'impôt verserait, en application des stipulations d'une convention de partage de l'économie d'impôt, au vendeur étranger des titres, dès lors que cette déduction ne pourrait s'analyser que comme une déduction faite sur les produits des revenus encaissés de l'étranger autre que celle des impôts établis dans le pays d'origine".
Si l'on suit le raisonnement de la section des finances, c'est parce que le prêteur des titres est étranger que la rémunération convenue ne peut être prise en compte. On en déduit, a contrario, que la solution est différente dès lors que le prêteur est une société française.
16. La cour administrative d'appel de Versailles, dans la présente affaire, reprend cette argumentation à la lettre au terme d'une approche méthodologique classique.
Dans un premier temps, la cour applique le principe de subsidiarité en recherchant d'abord la qualification du revenu et la base légale de l'imposition sur le fondement du droit interne, puis en vérifiant qu'une stipulation conventionnelle ne s'y oppose pas. La cour mentionne à ce titre les dispositions de l'article 220 du CGI puis les termes des articles 10 et 24 de la Convention fiscale franco-italienne. L'article 10 de la Convention prévoit que les dividendes sont imposés dans le pays du résident qui les perçoit, mais permet également de les imposer dans l'Etat de la société qui les distribue en limitant la retenue à la source à 5 % ou à 15 % selon les cas. L'article 24 de la Convention institue un mécanisme d'élimination des doubles impositions reposant sur la méthode de l'imputation : l'impôt italien n'est pas déductible pour le calcul du revenu imposable en France, mais le bénéficiaire du revenu a droit à un crédit d'impôt imputable sur l'impôt français dans la base duquel ces revenus sont compris. Et l'article 24 de préciser que le crédit d'impôt "ne peut toutefois excéder le montant de l'impôt français correspondant à ces revenus".
17. Dans un second temps, la cour s'interroge sur l'interprétation de ce butoir conventionnel, en particulier sur la notion de revenu.
La cour constate qu'en l'absence de toute stipulation contraire dans la Convention fiscale franco-italienne, les termes "bénéfices", "revenus" et "autres revenus positifs" qui y sont employés doivent être interprétés conformément à leur acception en droit interne.
S'appuyant sur les dispositions des articles 39 et 38 (N° Lexbase : L3125I7U) du CGI, et en reprenant l'avis du Conseil d'Etat de 2009, la cour affirme d'abord que "les frais directement liés à l'acquisition, à la conservation et à la cession de titres et n'ayant pas pour contrepartie un accroissement de l'actif, sont, sauf exclusion par des dispositions spécifiques, susceptibles d'être déduits de la fraction du revenu brut procuré par les titres et servant d'assiette pour le calcul de l'impôt sur les sociétés dû à raison de ces titres". Puis, la cour considère que, pour les revenus de valeurs mobilières émises hors de France, tels que les dividendes en cause, l'article 122 du CGI dispose, spécialement, que le revenu est déterminé par "la valeur brute en euros des produits encaissés d'après le cours du change au jour des paiements, sans autre déduction que celle des impôts établis dans le pays d'origine et dont le paiement incombe au propriétaire". La cour en déduit, reprenant à la lettre l'avis du Conseil d'Etat de 2009, que "si ces dispositions, qui interdisent de déduire des revenus de valeurs mobilières émises hors de France des dépenses engagées à l'étranger, autres que les impôts payés à l'étranger, ne s'opposent pas par elles-mêmes à ce que des dépenses engagées en France pour acquérir ou conserver les valeurs mobilières à l'origine de ces revenus puissent être considérées comme des charges déductibles de ceux-ci, en revanche, elles font obstacle à la déduction de la rémunération que le bénéficiaire du crédit d'impôt verse, en vertu d'une convention, au prêteur étranger de ces titres, dès lors que cette déduction ne peut s'analyser que comme une déduction faite sur les produits des revenus encaissés de l'étranger autre que celle des impôts établis dans le pays d'origine".
18. Ayant respecté scrupuleusement la position du Conseil d'Etat, l'arrêt de la cour administrative d'appel semblait à l'abri de l'annulation. La surprise est donc grande de constater qu'en censurant la cour d'appel, le Conseil d'Etat a opéré un revirement de jurisprudence.
B - Le Conseil d'Etat propose une nouvelle interprétation de la règle du butoir
19. Trois séries de questions étaient posées à la formation plénière du contentieux.
Premièrement, comment calcule-t-on le montant maximal du crédit d'impôt susceptible d'être imputé sur l'impôt français prévu par la Convention fiscale franco-italienne ? Peut-on, pour ce calcul du butoir, déduire du montant brut de ces dividendes l'ensemble des charges justifiées directement liées à l'acquisition, à la conservation ou à la cession des titres ayant donné lieu à la perception des dividendes ?
Deuxièmement, l'article 122 du CGI fait-il obstacle à l'application des règles fixées par l'article 39 du code régissant la déduction des charges pour la détermination de l'impôt sur les sociétés et, par suite, pour le calcul du montant maximal du crédit d'impôt imputable au titre des retenues à la source acquittées sur les dividendes de source étrangère perçus par une société soumise à l'impôt en France en interdisant la déduction de dépenses versées à l'étranger ?
Troisièmement, les exigences de l'article 63 TFUE (N° Lexbase : L2713IP8) ont-elles été méconnues au motif que le droit applicable traiterait différemment des revenus de source française et des revenus de source italienne ?
20. Le Conseil d'Etat répond à la première série de questions en reprenant le raisonnement suivi en 2009. En revanche, pour la deuxième série de questions, celle relative à l'article 122 du CGI, le Conseil d'Etat adopte une approche novatrice en opérant une distinction entre les produits et les charges.
La détermination des produits serait fixée par l'article 38 du CGI tandis que la détermination des charges dépendrait de l'article 39.
Or, l'article 122 du CGI, en prévoyant que le revenu de valeurs mobilières émises hors de France est déterminé par la valeur brute des produits encaissés sans autre déduction que celle des impôts établis dans le pays d'origine et dont le paiement incombe au bénéficiaire, déterminerait uniquement le revenu à prendre en compte au titre des produits de l'exercice, au sens de l'article 38.
L'article 122 ne s'appliquerait donc pas aux règles fixées par l'article 39 régissant la déduction des charges.
En conséquence, pour le calcul de l'IS butoir, il n'y aurait pas lieu d'opérer une distinction selon que la rémunération prévue conventionnellement à la charge du bénéficiaire du crédit d'impôt serait versée à un prêteur français ou étranger. Dans tous les cas de figure, cette rémunération sera prise en compte dans le cadre de la détermination du bénéfice théorique pour le calcul de l'IS butoir.
21. Le Conseil d'Etat ne répond pas à la dernière série de questions, celle relative de la conformité de la solution avec le droit européen. Mais la solution nouvelle n'opérant plus de distinction entre les prêteurs des titres étrangers et les prêteurs français, aucune discrimination ne peut se faire jour. C'est d'ailleurs le mérite essentiel de ce revirement de jurisprudence et l'on doit admettre que la position de l'avis était pour le moins bancale sur ce point. On ne voit en effet nullement à la lecture de l'article 122 du CGI pourquoi une distinction devrait être faite entre les dépenses "engagées à l'étranger" et celles "engagées en France" (9). Bien au contraire, ce texte indique qu'il faut prendre en compte la valeur brute, sans autre réduction que l'impôt étranger. Aucune dépense, engagée en France ou à l'étranger, ne devrait ainsi être prise en compte.
22. La position du Conseil d'Etat qui estime qu'il faut déduire du montant brut des dividendes l'ensemble des charges justifiées directement liées à l'acquisition, à la conservation ou à la cession des titres ayant donné lieu à la perception des dividendes, semble résolument contraire aux directives posées par l'article 122 du CGI. Mais la Haute juridiction a suivi les recommandations du rapporteur public qui prétend, à l'issue d'une analyse historique des textes en cause, que le maintien de la mention des articles 121 (N° Lexbase : L2130HLH), 122 et 123 (N° Lexbase : L2134HLM) au b) du 1 de l'article 220 n'est plus justifié. Il est vrai que c'est un décret du 9 décembre 1948 qui a institué une taxe proportionnelle frappant notamment les revenus de valeurs mobilières françaises ou étrangères. Ce décret prévoyait également que la taxe proportionnelle acquittée sur des éléments du bénéfice pouvait être imputée sur le montant de l'impôt à la charge du redevable de l'IS, et instaurait pour la première fois la règle du butoir que l'on retrouve aujourd'hui au deuxième alinéa du a) du 1 de l'article 220 du CGI. Il est également vrai qu'une ordonnance du 28 septembre 1967 a supprimé la retenue à la source sur les revenus des valeurs mobilières émises hors de France et les revenus assimilés visés aux articles 120 à 123 bis du CGI à compter du 1er janvier 1968. Il est donc effectivement curieux de retrouver la référence à l'article 122 du CGI dans l'article 220. Pourtant, il ne s'agit nullement d'un oubli ou d'une inadvertance, car l'ordonnance du 28 septembre 1967 a été codifiée dans le CGI par un décret du 15 avril 1969, supprimant la référence aux articles 120 à 123 bis dans le a) du 1 de l'article 220 du CGI, mais créant le b) dans lequel figure une référence expresse à l'article 122. L'explication historique nous semble par conséquent douteuse.
En revanche, la présente décision révèle que le législateur a peut-être commis une erreur en 2010 lorsqu'il a souhaité durcir les conditions du butoir. Ce qui nous amène à envisager les conséquences pratiques de ce revirement de jurisprudence.
II - Les conséquences pratiques du revirement de jurisprudence
23. Il ne fait pas de doute que la nouvelle approche du Conseil d'Etat durcit considérablement les conditions du butoir dans l'hypothèse d'une opération d'aller-retour de titres étrangers conclue par une société française avec une société étrangère. Mais, dans le même temps, il faut souligner qu'à la suite de l'avis rendu par le Conseil d'Etat en 2009, le législateur était déjà intervenu pour renforcer les conditions du butoir (A). Cependant, en modifiant uniquement le a) de l'article 220 du CGI, le législateur est parti du postulat que les revenus d'origine étrangère visés au b) de l'article 220 subiraient également les conséquences du durcissement. La présente décision du Conseil d'Etat, même si le litige se situait avant la réforme législative, pourrait mettre en lumière l'inexactitude d'un tel postulat et impliquer des conséquences favorables à certaines opérations d'aller-retour (B).
A - Un revirement de jurisprudence confortant en apparence la modification législative du régime du butoir
24. Confrontée à l'apparition d'un marché des crédits d'impôt, l'administration fiscale avait essayé d'invoquer la fraude à la loi, le but principalement fiscal des opérations ne faisant guère de doute. Mais le Conseil d'Etat, à travers deux arrêts rendus en 2009 (10) relatifs à des revenus de source française, a considéré que des opérations d'aller-retour sur titres dans le seul but de faire profiter le cessionnaire d'un avoir fiscal n'étaient pas constitutives d'une fraude à la loi fiscale. En effet, la Haute juridiction s'est fondée sur une analyse juridique jugeant que "dès lors qu'une société a effectivement la qualité d'actionnaire, les dividendes qu'elle perçoit à raison des titres qu'elle détient ouvrent droit à son profit au bénéfice de l'avoir fiscal qui y est attaché". Le Conseil d'Etat a, en revanche, jugé dans une décision ultérieure que la fraude à la loi était établie à propos d'une cession temporaire de titres dans le seul but de permettre au cessionnaire de profiter de l'imputation d'un crédit d'impôt (11).
25. Lors du projet de loi de finances pour 2011, la commission des finances du Sénat a proposé un amendement en vue de modifier la règle de plafonnement du montant des crédits d'impôt, de sorte que les opérations d'aller-retour perdent leur intérêt financier (12).
Aux termes du a) du 1 de l'article 220 du CGI, dans sa nouvelle version, le revenu à prendre en compte pour la règle du butoir dans ce type d'opération est désormais calculé sous déduction "des charges engagées pour l'acquisition de ces revenus par le contribuable et les personnes qui lui sont liées, y compris les moins-values de cession de ces biens ou droits [et] les sommes, autres que le prix d'acquisition de ces biens ou droits, versées à cette autre personne ou aux personnes qui lui sont liées, au sens du 12 de l'article 39". Dans ces conditions, sauf à établir comme le permet l'article 220 du CGI que l'opération "n'avait pas principalement pour objet ou pour effet de lui faire bénéficier du crédit d'impôt", le droit interne s'oppose à une imputation intégrale du crédit d'impôt dans ce type d'opération de portage en prenant en compte les revenus nets perçus par le contribuable pour l'application de la règle du butoir.
26. La possibilité d'apporter la preuve contraire offerte au contribuable devait permettre de considérer que l'atteinte éventuelle portée à la liberté communautaire de circulation des capitaux ou au principe conventionnel de non-discrimination n'était pas excessive compte tenu de l'objectif affiché de lutte contre les montages artificiels à visée purement fiscale. Par ailleurs, en insérant son nouveau dispositif à l'article 220, 1, a, et non à l'article 220, 1, b, l'administration fiscale, qui fut à l'origine de l'amendement sénatorial, semblait considérer que la limitation prévue par les dispositions conventionnelles suffisait à fonder l'application du nouveau dispositif aux revenus de source étrangère tout en limitant le risque d'inconventionnalité soulevé par le Conseil d'Etat dès lors que ce dispositif ne vise pas uniquement les revenus de source étrangère.
Mais comme le soulignait déjà Jérôme Ardouin en commentant le nouveau dispositif, restait "à savoir si une clause conventionnelle prévoyant que le montant du crédit d'impôt ne peut excéder la fraction de l'impôt correspondant aux revenus imposables dans l'Etat de résidence permet de fonder l'application du nouveau dispositif. En effet, une telle clause doit-elle être interprétée comme renvoyant aux seules règles traditionnelles de détermination de l'impôt dans l'Etat de résidence, ce qui exclurait de déterminer le butoir en se référant aux nouvelles dispositions de l'article 220, 1, a ou comme permettant à l'Etat de résidence d'appliquer des règles anti-abus propres au seul calcul du butoir ?" (13).
Dans la présente affaire, si le Conseil d'Etat ne répond pas directement à cette question, des indices sérieux laissent à penser que le butoir conventionnel suivra un régime différent du butoir légal en permettant au marché des crédits d'impôt de continuer à prospérer.
B - Un revirement de jurisprudence stérilisant la modification législative du régime du butoir
27. Par sa décision du 7 décembre 2015, le Conseil d'Etat neutralise l'article 122 du CGI dans la mise en oeuvre du butoir conventionnel puisque cet article ne concernerait que le calcul des produits et non des charges. Pour la détermination des charges, il faudrait suivre les directives de l'article 39 du CGI. Ainsi, le revenu théorique destiné à calculer l'IS butoir correspondrait au revenu brut auquel il conviendrait de retrancher l'ensemble des charges justifiées directement liées à l'acquisition, à la conservation ou à la cession des titres ayant donné lieu à la perception des dividendes, et n'ayant pas pour contrepartie un accroissement de l'actif, sauf exclusion par des dispositions spécifiques. Avec une telle règle, la plupart des opérations d'aller-retour perdront leur intérêt financier, dans la mesure où, comme dans la présente affaire, ces charges incluraient le reversement au prêteur des titres de la somme correspondant au montant brut des dividendes servis par la société italienne et les intérêts qui lui sont dus. D'ailleurs, cette solution est parfaitement conforme avec les modifications apportées par la loi de finances pour 2011 à l'article 220 du CGI prévoyant, en cas de prêts de titres, la déduction des sommes, autres que le prix d'acquisition, versées à la personne qui prête les titres.
28. En revanche, un doute apparaît lorsqu'il s'agit des montages d'aller-retour adossés à des cessions temporaires de titres et de la prise en compte de l'éventuelle moins-value constatées lors de la revente des titres. Doit-on déduire cette moins-value ? Cette question avait été posée au Conseil d'Etat en 2009 par le Gouvernement qui envisageait de rendre déductible cette moins-value du revenu correspondant aux intérêts versés et servant d'assiette à l'impôt sur les sociétés sur lequel est imputé le crédit d'impôt égal à la retenue à la source. La section des finances avait répondu que les titres acquis peu avant le détachement du coupon donnant droit au versement des intérêts subissent, après détachement de celui-ci, une décote correspondant, en principe, au montant des intérêts versés. Mais le Conseil d'Etat avait clairement indiqué que "si, à la différence des plus-values à long terme, dont le montant net pour un même exercice fait l'objet d'une imposition séparée à un taux différent de celui de l'impôt sur les sociétés, en vertu de l'article 39 quindecies du CGI (N° Lexbase : L1467HLW), les plus-values à court terme sont imposées au même taux et rentrent dans l'assiette de l'impôt sur les sociétés, la moins-value constatée lors de la revente du titre qui est due au détachement du coupon ne peut, en elle-même, être regardée comme une charge, au sens des dispositions de l'article 39 du CGI, rattachable aux revenus qui ont donné lieu à la retenue à la source et, par suite, déductible". La section des finances avait alors invité le législateur national à définir les règles d'imposition des revenus d'origine étrangère ayant donné lieu à la retenue à la source, l'impôt ainsi déterminé permettant l'imputation du crédit d'impôt correspondant à la retenue à la source. Ce que le législateur fit par la loi de finances pour 2011 en prévoyant expressément, pour le calcul du butoir, que le montant du revenu est diminué des charges engagées pour l'acquisition de ces revenus par le contribuable et les personnes qui lui sont liées, y compris les moins-values de cession de ces biens ou droits. Mais cette règle figure au a) de l'article 220 du CGI et non au b) qui concerne les revenus de source étrangère. La question se pose dès lors de savoir si, à la suite de l'arrêt du Conseil d'Etat du 7 décembre 2015, l'article a) du 220 du CGI s'applique aux revenus d'origine étrangère.
29. Le Conseil d'Etat ne répond pas à cette question, car elle n'était pas en litige dans la présente affaire. Mais la position du rapporteur public est pour le moins troublante. Ce dernier débute son analyse en posant clairement la question du fondement juridique de la règle du butoir s'agissant de revenus de capitaux mobiliers de source étrangère. Il se demande s'il faut faire application du deuxième alinéa du a) du 1 de l'article 220 ou seulement des stipulations conventionnelles. Pour lui, deux lectures du texte sont en effet possibles : la première consiste à lire l a) comme fixant des règles générales applicables à la fois aux revenus de source française et de source étrangère, tandis que le b) poserait des conditions supplémentaires à l'imputation pour les revenus de source étrangère en imposant qu'elle soit prévue par la convention internationale et en la limitant au montant de la retenue à la source prévue par la convention. La seconde option consiste à interpréter le b) comme renvoyant aux conventions fiscales pour la définition des modalités du calcul du butoir.
Si la jurisprudence n'a pas tranché expressément la question, elle semble retenir la première option en jugeant que la règle prévue à l'article 220 s'applique indifféremment aux crédits d'impôt d'origine étrangère et aux crédits d'impôt d'origine française (14).
30. Mais le rapporteur public est clairement en faveur de la deuxième option. Il évoque deux raisons. D'abord, le mécanisme du a) tendait à faire de la retenue à la source prévue une imposition minimale. Le b) tend au contraire à faire en sorte que le Trésor n'ait pas à rembourser un impôt étranger (directement ou sous forme d'imputation sur un impôt afférent à d'autres revenus). Ensuite, en raison de la suppression de la retenue à la source sur les revenus d'origine étrangère par l'ordonnance de 1967, la règle du butoir définie par l'article 220 ne s'applique plus à ces revenus. Le choix du pouvoir réglementaire de maintenir le b) lui paraît seulement guidé par le souci de rappeler qu'il peut exister des crédits d'impôt imputables en vertu de conventions fiscales bilatérales.
31. En conséquence, il proposa au Conseil d'Etat de juger sur le fondement de l'article 24 de la Convention fiscale franco-italienne et du b) du 1 de l'article 220 que la retenue à la source acquittée à l'étranger ne peut être imputée sur l'impôt dû en France que dans la limite du montant de l'impôt français correspondant aux revenus concernés. Or, c'est précisément ce qu'a fait le Conseil d'Etat dans son cinquième considérant. La Haute cour indique "qu'il résulte des dispositions précitées du b) du 1 de l'article 220 du CGI, qui définissent le régime applicable aux revenus de source étrangère auxquels cette disposition fait référence, que l'imputation sur l'impôt dû en France de la retenue à la source acquittée à l'étranger à raison des revenus est limitée au montant du crédit d'impôt correspondant à cette retenue à la source tel qu'il est prévu par les conventions internationales". Autrement dit, pour les revenus de source étrangère, seul le b) de l'article 220 du CGI s'appliquerait, à l'exclusion du régime général prévu au a).
32. Il serait, par conséquent, toujours possible de réaliser des opérations d'aller-retour sans prévoir de rémunération pour le cédant, mais en lui permettant uniquement de réaliser une plus-value lors du rachat des titres. La moins-value subie par le cessionnaire ne serait alors pas prise en compte dans le calcul du butoir. Malheureusement, dans cette logique, le cessionnaire ne pourrait pas profiter de la possibilité offerte par le a) de l'article 220 du CGI d'échapper à la prise en compte de l'ensemble des charges engagées pour l'acquisition des revenus en apportant la preuve que la conclusion du contrat n'avait pas principalement pour objet ou pour effet de lui faire bénéficier du crédit d'impôt.
D'autres arrêts seront nécessaires pour conforter cette interprétation de textes pour le moins byzantins qui révèlent la technicité excessive du droit fiscal.
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Réf. : Communiqué de presse du 19 janvier 2016
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Le 28 Janvier 2016
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Réf. : Communiqué de presse du 21 janvier 2016
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Le 28 Janvier 2016
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Réf. : CE 3° et 8° s-s-r., 21 janvier 2016, n° 371972, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A5761N47)
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Le 04 Février 2016
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Réf. : CE 3° et 8° s-s-r., 21 janvier 2016, n° 374054, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A5764N4A)
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Le 28 Janvier 2016
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Réf. : CE 3° et 8° s-s-r., 21 janvier 2016, n° 385395, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A5772N4K)
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Le 28 Janvier 2016
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Réf. : CAA Marseille, 14 janvier 2016, n° 14MA00505 (N° Lexbase : A0269N4Q)
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Le 28 Janvier 2016
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Réf. : CE 3° et 8° s-s-r., 7 décembre 2015, n° 371403, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A0409NZ8)
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par Nathalie Escaut, Maître des Requêtes au Conseil d'Etat et Rapporteur public
Le 28 Janvier 2016
Le 25 juin 2008, puis le 22 décembre 2009, la société représentante jusqu'au 30 septembre 2008 a demandé le remboursement de la TVA facturée, en France, par les sociétés de location de voitures auxquelles les sociétés du groupement avaient fait appel, respectivement au titre de l'année 2007, et de la période du 1er octobre au 30 novembre 2009. Ces demandes ont été rejetées au motif que les opérations réalisées caractérisaient une activité d'agent de voyages soumise au régime de la TVA sur la marge.
Le Conseil d'Etat devra écarter d'abord la fin de non recevoir opposée en défense par le ministre des Finances et des Comptes publics.
En effet, la société requérante (société représentante jusqu'au 30 septembre 2008) était recevable à se pourvoir en cassation contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles dès lors qu'elle avait la qualité de partie en appel (CAA Versailles, 18 juin 2013, n° 11VE01119 N° Lexbase : A6535KKA).
En revanche, le ministre a raison de se prévaloir de l'irrecevabilité de la requête. En effet, si la demande de remboursement de TVA a été régulièrement formée, le 25 juin 2008, par la société requérante, puisque cette dernière était, jusqu'au 30 septembre 2008, le représentant du "groupement TVA", la requête dont a été saisi le tribunal administratif a été formée par une autre société du groupement. Cette dernière n'étant qu'un membre du "groupement TVA", elle ne justifiait, en l'absence de mandat, d'aucune qualité pour agir en justice. Toutefois, le Conseil d'Etat n'aura à se prononcer sur la recevabilité de cette demande que si l'arrêt attaqué est annulé puisque la cour administrative d'appel a choisi de la rejeter au fond.
Se plaçant d'abord sur le terrain de la loi fiscale, la cour a rejeté la demande de remboursement de TVA au motif que la société requérante exerçait une activité d'agence de voyages soumise au régime de la TVA sur la marge.
L'article 26 de la 6ème Directive du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires, repris aux articles 306 et suivants de la Directive du 28 novembre 2006 relative au système commun de TVA (Directive 2006/112/CE N° Lexbase : L7664HTZ), soumet les opérations réalisées par les agences de voyages et les organisateurs de circuits touristiques au régime de la TVA sur la marge lorsque ces derniers "agissent en leur nom propre à l'égard du voyageur et utilisent, pour la réalisation du voyage, des livraisons de biens et des prestations de services d'autres assujettis". L'ensemble des prestations constituant un voyage est ainsi regardé comme une prestation unique de l'agence de voyages au voyageur. Cette prestation est imposée dans l'Etat membre où l'agence de voyages a le siège de son activité ou un établissement stable.
Ces règles ont été transposées en droit interne au paragraphe 1.e de l'article 266 du CGI qui prévoit que la base d'imposition à la TVA est constituée "pour les opérations d'entremise effectuées par les agences de voyages et les organisateurs de circuits touristiques, par la différence entre le prix total payé par le client et le prix effectif facturé à l'agence ou à l'organisateur par les entrepreneurs de transport, les hôteliers [...] et les autres assujettis qui exécutent matériellement les services utilisés par les clients". L'ancien article 231 de l'annexe II au CGI, abrogé par le décret du 16 avril 2007 au 1er janvier 2008, mais repris à l'article 206 de la même annexe (N° Lexbase : L4430IQ7), exclut, en conséquence, tout droit à déduction de la TVA payée par les agences de voyages et les organisateurs de circuits touristiques aux prestataires de service auxquels ils font appel pour les services à leurs clients.
L'application du régime de la TVA sur la marge aux opérations des agences de voyages répond à deux objectifs :
- adapter les règles de TVA à la multiplicité des prestations fournies qui peuvent être réalisées tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du territoire de l'Etat membre où l'entreprise a son siège ;
- répartir les recettes provenant de la perception de la TVA "de manière équilibrée entre les Etats membres en assurant, d'une part, l'attribution des recettes de TVA relatives à chaque service individuel à l'Etat membre dans lequel a lieu la consommation finale du service et, d'autre part, l'attribution de celles afférentes à la marge de l'agence de voyages à l'Etat membre dans lequel cette dernière est établie" (voir sur cet objectif l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 26 septembre 2013, aff. C-296/11 N° Lexbase : A8796KLD, à la RJF, 12/13, n° 1190).
Dès lors qu'il constitue une exception au régime de droit commun de la TVA, le régime de la TVA sur la marge ne doit être appliqué que dans la mesure nécessaire pour atteindre ses objectifs (voir en ce sens l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 22 octobre 1998, aff. C-308/96 et C-94/97 N° Lexbase : A7502AHC, à la RJF, 12/98, n° 1251).
La Cour de justice a, par ailleurs, précisé les modalités d'application de ce régime de TVA :
- tout d'abord, ce régime porte sur toutes les opérations des agences de voyages qui entrent dans son champ, qu'elles s'effectuent exclusivement au sein de l'Etat membre où les agences sont installées ou dans d'autres Etats membres (les opérations effectuées en dehors des Etats membres sont regardées comme des activités d'intermédiaires exonérées) (voir en ce sens l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 22 octobre 1998, aff. C-308/96 et C-94/97, à la RJF, 12/98, n° 1251, préc.).
- ensuite, ce régime n'est pas limité aux seuls opérateurs relevant de la qualification formelle d'agences de voyages car il repose sur un critère fonctionnel qui tient à la nature des activités de l'opérateur. Il s'applique ainsi à tout opérateur qui organise, en son propre nom, des voyages ou circuits touristiques, et qui recourt à des tiers assujettis pour fournir les prestations de services y afférents. Il faut, toutefois, que ces activités n'aient pas un caractère accessoire par rapport aux autres prestations assurées par l'entreprise. Lorsque les prestations de service se décomposent en prestations exécutées par l'entreprise et en prestations acquises auprès de tiers, le régime de la TVA sur la marge ne concerne que ces dernières (voir sur ces principes l'arrêt précité du 22 octobre 1998, et une décision du Conseil d'Etat : CE 9° et 10° s-s-r., 15 novembre 2006, n° 276006, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A3541DSX, à la RJF, 02/07, n° 102).
- enfin les prestations concernées doivent répondre à plusieurs critères. Elles doivent être assurées par l'agence de voyages agissant en son nom propre vis à vis du voyageur et non en qualité d'intermédiaire ; elles doivent être acquises auprès de tiers. Lorsque l'opérateur fournit une prestation qu'il assure lui-même, cette prestation est soumise au régime commun de la TVA (voir en ce sens un arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 25 octobre 2012, aff. C-557/11 N° Lexbase : A8897IU3, à la RJF, 02/13, n° 243, ou une décision du Conseil d'Etat : CE 9° et 10° s-s-r., 5 mars 2012, n° 324263, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A0659IE7, p. 642/734, et à la RJF, 05/12, n° 461).
Enfin, et c'est cette condition qui est au coeur du litige soumis, la prestation doit viser à la réalisation d'un voyage :
- cela n'impose pas d'assurer nécessairement le transport du voyageur (voir en ce sens l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 12 novembre 1992, aff. C-163/91 N° Lexbase : A9750AUN, à la RJF, 03/93, n° 472).
- mais cela exclut les prestations isolées. L'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 9 décembre 2010 (CJUE, 9 décembre 2010, aff. C-31/10 N° Lexbase : A7093GMN, à la RJF, 10/11, n° 1110), a ainsi exclu du champ du régime de la TVA applicable aux agences de voyages la vente de billets d'opéra par une agence de voyages en dehors de toute fourniture d'une prestation de voyages. Dans la même logique, une ordonnance du 1er mars 2012 de la Cour de justice de l'Union européenne a jugé qu'une société de transport qui se contente d'assurer le transport des personnes en fournissant un transport en autocar aux agences de voyages, sans aucun autre service, ne relève pas du régime de TVA des agences de voyages.
Dans l'arrêt attaqué, la cour a regardé l'activité de la société requérante comme relevant des activités d'une agence de voyages. La société requérante critique cette analyse en soutenant que l'activité isolée de location de véhicules qu'elle exerce ne peut être assimilée à une activité d'agent de voyages qui implique l'exercice de plusieurs activités concourant à la réalisation d'un voyage. Elle développe une triple argumentation.
Elle soutient d'abord que la définition donnée par la cour du champ du régime de la TVA sur la marge des agences de voyages ajoute à la loi. Mais en mentionnant que ce régime s'applique "aux opérateurs économiques qui, même s'ils ne bénéficient pas formellement de la qualité d'agents de voyages ou d'organisateurs de circuits touristiques, organisent en leur nom propre une ou des prestations de services généralement attachées à la réalisation d'un voyage et qui, pour fournir ces prestations, recourent à des tiers assujettis", la cour s'est bornée à rappeler les principes précités dégagés par la jurisprudence précitée de la Cour de justice.
La société requérante soutient ensuite que la cour ne pouvait qualifier son unique activité de location de véhicules de tourisme d'activité d'agence de voyages.
Si l'arrêt de la cour est certes maladroit en tant qu'il qualifie l'activité de location de véhicules comme relevant des prestations d'une agence de voyages en se bornant à relever qu'elle "s'inscrit dans le cadre de voyages effectués en France par les clients de la société", il ressortait néanmoins des pièces au dossier des juges du fond que la société requérante propose à ses clients, installés notamment au Royaume-Uni, un site internet sur lequel figurent un certain nombre de sociétés qui louent des voitures de tourisme en France, et qui ont été sélectionnées par la société requérante pour assurer leurs déplacements lors de leurs voyages en France. Ses clients trouvent sur son site les différents tarifs et offres de ces loueurs, qui sont actualisés en permanence avec indication des modèles disponibles. Y figurent aussi une note chiffrée et une appréciation sur chaque loueur ainsi que des indications sur les conditions d'accès au lieu de location. Le site met aussi à la disposition de ses clients un centre d'appel ouvert tous les jours. Le client bénéficie ainsi à la fois d'une prestation d'information non personnalisée au travers du site et d'une prestation d'assistance personnalisé au travers du centre d'appels, qui viennent accompagner la location proprement dite du véhicule. Il semble donc que la cour n'a pas commis d'erreur de qualification juridique des faits en regardant l'activité de la société requérante comme relevant des activités des agences de voyages soumises à la TVA sur la marge.
Si la société requérante soutient enfin que la cour aurait dû rechercher si elle avait été effectivement assujettie à la TVA sur la marge au Royaume-Uni, cette question, en tout état de cause, n'a pas été débattue devant les juges du fond, l'administration ayant indiqué, sans que cela ne soit contesté par la requérante, que le "groupement TVA" dont elle faisait partie exerçait, au Royaume Uni une activité de "tour operator". Il est donc proposé aux Hauts magistrats d'écarter les moyens de la requérante, relatifs à l'application de la loi fiscale.
Se plaçant ensuite sur le terrain de la doctrine administrative, la cour a jugé que la société requérante ne pouvait se prévaloir de l'instruction référencée 3 L-3-86 du 18 mars 1986 au motif que le rejet d'une demande de remboursement d'un crédit de TVA ne constitue pas un rehaussement d'imposition au sens de l'article L. 80 A du LPF (N° Lexbase : L4634ICM) qui limite la garantie contre les changements de doctrine qu'il institue aux seuls rehaussements d'imposition.
Il conviendra alors d'écarter le moyen d'erreur de droit soulevé par la société requérante contre ce motif car la cour a ainsi fait application de la jurisprudence constante du Conseil d'Etat qui refuse d'assimiler les refus de remboursements de crédits de TVA à des rehaussements d'imposition au sens de l'article L. 80 A (voir en ce sens : CE 7° et 9° s-s-r., 26 novembre 1975, n° 98563, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A8187B8Q, p. 943 et à la RJF, 1/76, n° 69, ou CE 9° et 10° s-s-r., 10 juillet 1992, n° 330254, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A8383IQK, à la RJF, 11/12, n° 1024).
Il faudra enfin écarter comme manquant en fait le moyen tiré de ce que la cour se serait méprise sur la portée des écritures de la requérante.
Il est donc proposé de rejeter le pourvoi de la société requérante, y compris, en conséquence, les conclusions qu'elle a présentées au titre de l'article L. 761-1 du CJA ({"IOhtml_internalLink": {"_href": {"nodeid": 4970573, "corpus": "sources"}, "_target": "_blank", "_class": "color-textedeloi", "_title": "L761-1", "_name": null, "_innerText": "N\u00b0\u00a0Lexbase\u00a0: L3227AL4"}}).
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Réf. : CJUE, 21 janvier 2016, aff. C-335/14 (N° Lexbase : A6126N4N)
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Le 02 Février 2016
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Réf. : CE 9° et 10° s-s-r., 20 janvier 2016, n° 371685, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A5760N44)
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Le 28 Janvier 2016
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Réf. : CE 3° et 8° s-s-r., 21 janvier 2016, n° 388676, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A5775N4N)
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N1088BW9
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Le 28 Janvier 2016
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Réf. : CE 3° et 8° s-s-r., 21 janvier 2016, n° 388989, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A5776N4P)
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Le 28 Janvier 2016
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