La lettre juridique n°295 du 6 mars 2008 : Immobilier et urbanisme

[Chronique] Chronique en droit immobilier

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N3542BEW

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par Marine Parmentier, Avocat à la cour d'appel de Paris

le 07 Octobre 2010

Lexbase Hebdo - édition privée générale vous propose de retrouver, cette semaine, la chronique en droit immobilier de Marine Parmentier, Avocat à la cour d'appel de Paris. Au premier plan de cette chronique, un arrêt rappelant que le bail à nourriture est caractérisé par l'obligation contractée par l'acquéreur de subvenir à la vie et aux besoins de l'auteur de l'aliénation, spécialement, en lui assurant la fourniture et la prise en charge de ses aliments. A l'honneur également, une décision rappelant que l'obligation de déposer une demande de permis de construire modificatif ôte au permis initialement délivré tout caractère définitif.
  • Le bail à nourriture est caractérisé par l'obligation contractée par l'acquéreur de subvenir à la vie et aux besoins de l'auteur de l'aliénation, spécialement, en lui assurant la fourniture et la prise en charge de ses aliments (Cass. civ. 1, 20 février 2008, n° 06-19.977, F-P+B N° Lexbase : A0505D7T)

Pour la première fois à notre connaissance, la Cour de cassation donne une définition très précise du "bail à nourriture", contrat innomé qu'il est rare de rencontrer en pratique.

En l'espèce, un oncle avait vendu à son neveu une propriété sise en Ardèche. La clause "Prix" était ainsi libellée : "La présente vente est consentie et acceptée moyennant un prix de soixante mille francs, 60 000 francs [environ 9 147 euros], lequel prix converti d'un commun accord entre les parties en l'obligation que prend l'acquéreur envers le vendeur, de lui assurer deux promenades hebdomadaires sur le département de l'Ardèche, de lui fournir l'habillement nécessaire, et généralement lui assurer le suivi de sa correspondance. En outre, il est bien convenu que pour le cas où l'état de santé du vendeur nécessiterait une admission en hospice ou hôpital suite à la dégradation de son état de santé, cette obligation cesserait pendant la période de séjour dans lesdits établissements, et uniquement en ce qui concerne les deux promenades hebdomadaires. Ladite prestation représentant une valeur annuelle de sept mille deux cents francs (7 200 francs) [environ 1 098 euros]". En outre, le neveu disposait d'une procuration sur les comptes ouverts au nom de son oncle auprès d'un établissement bancaire.

L'oncle est décédé le 7 mars 2000 en laissant pour lui succéder ses neveux et nièce.

Sa nièce a alors assigné le neveu bénéficiaire de l'acte précité en annulation de la vente pour défaut de prix. Le neveu faisait, notamment, grief à l'arrêt d'appel d'avoir décidé que l'acte par lequel son oncle lui avait vendu l'immeuble ne pouvait être qualifié de bail à nourriture et qu'il devait être résolu pour vil prix, et, enfin, d'avoir ordonné le rapport de cet immeuble à la succession de ce dernier.

La Cour de cassation devait donc se prononcer sur la nature du contrat conclu entre l'oncle et son neveu.

La définition donnée dans l'arrêt rapporté est très précise : le bail à nourriture est caractérisé par l'obligation contractée par l'acquéreur de subvenir à la vie et aux besoins de l'auteur de l'aliénation, spécialement, en lui assurant la fourniture et la prise en charge de ses aliments. Ainsi, dès lors que l'acte de vente ne mettait pas à la charge de l'acquéreur l'obligation d'assumer la subsistance du vendeur, le contrat litigieux ne constituait pas un bail à nourriture mais un contrat de vente qui pouvait être résolu pour vileté du prix. Cette décision a une portée importante, surtout dans la mesure où elle s'inscrit dans une matière où le contentieux est rare.

Rappelons qu'il avait, notamment, été précisé par la Cour de cassation que le bail à nourriture est caractérisé par l'obligation prise par l'acquéreur de subvenir entièrement à la vie et aux besoins de l'auteur de l'aliénation. Aucun texte ne fait du logement permanent commun la condition essentielle de ce contrat dont le caractère personnel n'est nullement incompatible avec une résidence séparée (Cass. soc., 9 février 1961, n° 59-10.918, Sieur Achille de L. c/ Sieur Emile D., N° Lexbase : A1948D7B, Bull. civ. IV n° 185).

  • L'obligation de déposer une demande de permis de construire modificatif ôte au permis initialement délivré tout caractère définitif : en conséquence, la condition suspensive insérée au sein d'un contrat de vente tenant en l'obtention du permis de construire n'est pas satisfaite (Cass. civ. 3, 13 février 2008, n° 07-11.462, FS-P+B N° Lexbase : A9313D4P)

Une promesse synallagmatique de vente peut être conclue sous condition suspensive, notamment, de l'obtention d'un permis de construire. En l'espèce, le promettant avait assigné le bénéficiaire d'une promesse de vente d'un bien immobilier sous condition suspensive en paiement du montant de l'indemnité d'immobilisation pour défaut de signature de l'acte de vente dans le délai convenu. La condition suspensive tenait, notamment, en l'obtention d'un permis de construire définitif. Les parties avaient réservé au chapitre "recours des tiers" l'éventualité d'un contrôle de légalité. Dans le cadre du contrôle de légalité, le sous-préfet avait fait obligation au bénéficiaire de la promesse de déposer une demande de permis modificatif.

La cour d'appel avait indiqué que l'obligation de déposer une demande de permis modificatif privait le permis initial de tout caractère définitif. Dès lors, la condition devait être réputée défaillante et chacune des parties à la promesse devait retrouver son entière liberté contractuelle. Saisie d'un pourvoi, la Cour de cassation a confirmé la position adoptée par les premiers juges.

La défaillance ou la réalisation de la condition doivent avoir lieu dans le délai prévu par le contrat ou, le cas échéant, par la loi. Si aucun délai n'est prévu, il résulte de l'article 1176 du Code civil (N° Lexbase : L1278ABX) que la condition n'est défaillie que s'il est certain que sa réalisation soit impossible.

Ainsi, la vente d'un immeuble conclue sous la condition suspensive de l'obtention d'un permis de construire, dont la réalisation n'était soumise à aucun délai, n'a pu intervenir faute pour la commune d'avoir statué sur le plan d'occupation des sols. La vente a pu être déclarée caduque dès lors que l'arrêt, après avoir justement rappelé que toute condition doit être accomplie de la manière dont les parties ont vraisemblablement voulu et entendu qu'elle le fût, retient souverainement que les parties n'ont pu envisager que la condition suspensive puisse s'accomplir plus de six ans après la signature de la convention alors qu'il n'avait été stipulé aucune indexation du prix de vente ni aucun coefficient de revalorisation (Cass. civ. 3, 3 février 1982, n° 80-15.794 N° Lexbase : A1952D7G, Bull. civ. III, n° 37).

Lorsqu'un délai a été stipulé, la Cour de cassation a précisé que le permis de construire obtenu "hors délai" impliquait la caducité de la promesse de vente sous condition suspensive (Cass. civ. 3, 13 juillet 1999, n° 97-20.110, Mme Baron c/ M. Bonnefon N° Lexbase : A5290AWT, Defrénois 1999, 1331, note D. Mazeaud).

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