La lettre juridique n°556 du 30 janvier 2014 : Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

[Chronique] Chronique de TVA - Janvier 2014 (Spéciale loi de finances pour 2014 et loi de finances rectificative pour 2013)

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par Laurence Vapaille, Maître de conférences à l'Université d'Evry-Val-d'Essonne

le 30 Janvier 2014

Lexbase Hebdo - édition fiscale vous propose de retrouver, cette semaine, la chronique de Laurence Vapaille, Maître de conférences à l'Université d'Evry-Val-d'Essonne, retraçant l'essentiel de l'actualité juridique rendue en matière de TVA. Ce mois-ci, dans le cadre d'une chronique dédiée aux lois de finances pour 2014 (1) de finances rectificative pour 2013 (2), notre auteur a choisi de s'arrêter sur trois dispositions. Pendant une période relativement longue, au regard du temps fiscal, les taux de TVA ont connu une très grande stabilité. Jusqu'au 31 décembre 2011, il n'existait en droit français qu'un seul taux réduit de TVA, fixé à 5,5 %. Depuis la quatrième loi de finances rectificative pour 2011 (3) qui a instauré un nouveau taux réduit de 7 % (4), applicable à compter du 1er janvier 2012, les modifications sont nombreuses. Une de ces modifications n'est que le retour à la législation antérieure, car la baisse de 5,5 % à 5 % du taux réduit a été supprimée avant même son entrée en vigueur. Mais dans le même temps, le législateur a procédé à l'extension du domaine d'application de ce taux (loi de finances pour 2014, art. 6). Il a également institué des mesures transitoires, prises à la suite de l'augmentation du taux intermédiaire applicable aux travaux de rénovation des logements, autres que de rénovation énergétique, en voie d'achèvement (loi de finances rectificative pour 2013, art. 21). Enfin, la lutte contre la fraude à la TVA est un objectif qui devient essentiel en cette période de déficit pour les finances publiques. A cette fin, en lien avec le droit de l'Union européenne, ont été instaurées des mesures spécifiques : d'une part, un régime d'autoliquidation de la TVA par le donneur d'ordre dans le secteur du bâtiment et, d'autre part, un mécanisme de réaction rapide en cas de fraude (loi de finances pour 2014, art. 25).
  • Maintien du taux réduit de TVA à 5,5 % (loi de finances pour 2014, art. 6)

L'article 68 de la troisième loi de finances rectificative pour 2012 (5) a modifié les taux de TVA. Cette modification devait entrer en vigueur à compter du 1er janvier 2014. A compter de cette date, les différents taux applicables (6) sont les suivants :
- le taux normal antérieurement fixé à 19,6 % est passé à 20 %,
- le taux intermédiaire de 7 % est porté à 10 %,
- le taux réduit de 5,5 % est ramené à 5 %.

La création d'un taux intermédiaire -7 % et à présent 10 %- est venue étendre le champ d'application du taux réduit. Ainsi, les opérations soumises à taux intermédiaire sont celles qui, antérieurement au 1er janvier 2012, étaient soumises au taux réduit de 5,5 %, à l'exception des opérations indiquées à l'article 278-0 bis du CGI (N° Lexbase : L0400IWQ), auxquelles le taux réduit est toujours applicable. Cette modification des différents taux de TVA a pour objectif de financer pour partie le crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE ; CGI, art. 244 quater C N° Lexbase : L9889IW8).

Si les dispositions relatives aux taux normal et intermédiaires ont été mises en oeuvre depuis le 1er janvier 2014, en revanche, les parlementaires ont maintenu le taux réduit à 5,5 %. Le groupe SRC (7), avec l'assentiment du Gouvernement, avait proposé le maintien de ce taux. La suppression de cette baisse du taux doit permettre une économie de 735 millions d'euros en vue de financer partiellement la baisse du taux de TVA sur les travaux de rénovation thermique pour les logements achevés depuis plus de deux ans (8). Par ailleurs, Christian Eckert a estimé que "l'abaissement de 5,5 % à 5 % tel que prévu au 1er janvier 2014 n'aurait eu en pratique qu'un effet très faible pour ne pas dire nul à court et moyen terme sur les prix" (9).

Dans le même temps que le taux de 5,5 % a été maintenu en vigueur, il a été procédé à une extension du champ d'application des opérations soumises à ce taux. Outre les travaux d'amélioration de la performance énergétique des logements achevés depuis plus de deux ans, dont la situation sera examinée plus précisément dans la seconde partie de ce commentaire, on peut aussi noter l'application de ce taux aux catégories d'opérations suivantes :

- Entrées de salle de cinéma . L'article 7 de la loi de finances pour 2014 est venu compléter la liste énoncée à l'article 278-0 bis du CGI et soumet les entrées dans les salles de cinéma au taux de 5,5 %. Elles étaient antérieurement imposables au taux de 7 %. Cette disposition a pour effet que l'article 68 de la loi de finances rectificative pour 2012 (10) ne s'appliquera pas, et donc que les entrées de salles cinéma ne seront pas soumises au taux intermédiaire de 10 % à compter du 1er janvier 2014. Cet amendement, à l'initiative de la commission des finances de l'Assemblée nationale, a été déposé en prenant en compte le fait que la fréquentation des cinémas a baissé de 6,3 % en 2012. Le coût de cette mesure est évalué à 55 millions d'euros en 2014 et 60 millions d'euros à compter de 2015 (11).

Le taux de 5,5 % s'applique depuis le 1er janvier 2014. Selon les dispositions du c du 2 de l'article 269 du CGI (N° Lexbase : L0372IWP), la TVA est exigible pour les prestations de services lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits. Par exemple, en cas de ventes de places de cinéma le 30 décembre 2013 pour une séance se déroulant en janvier 2014, ces entrées seront encore soumises au taux de 7 % (12). S'agissant des formules d'abonnement, la doctrine administrative a précisé que ce sont des opérations donnant lieu à l'établissement de décomptes ou à des encaissements successifs. Le fait générateur et l'exigibilité de ces opérations se produisent à la fin des périodes auxquelles les décomptes et les encaissements se rapportent (13).

- Importations et acquisitions intracommunautaires d'oeuvres d'art (14) . Antérieurement, les importations et les acquisitions intracommunautaires d'oeuvres d'art, d'objets de collection ou d'antiquité étaient soumises au taux intermédiaire de 7 % (15). Cette baisse du taux de TVA applicable à ces catégories d'opérations a pour objectif "d'accroître l'attractivité du marché français de l'art et d'enrichir le patrimoine international" (16). Cette mesure a fait l'objet d'un large consensus lors de son adoption (17). La baisse du taux de TVA dans ce domaine doit entraîner une perte de recettes évaluée à 15 millions d'euros (18).

Le taux réduit de TVA s'applique aux importations ainsi qu'aux acquisitions intracommunautaires effectuées par un assujetti à la TVA ou une personne morale non assujettie. Cependant, ne peuvent bénéficier du taux réduit et restent soumises au intermédiaire de 10 % les opérations réalisées par l'auteur ou les ayants droit (19) et celles effectuées à titre occasionnel par les personnes qui ont utilisé lesdites oeuvres à titre professionnel et qui ont ainsi pu bénéficier du droit à déduction (20).

- Construction et rénovation de logements sociaux . Sous le régime antérieur au 1er janvier 2014, les dispositions de l'article 278 sexies, I du CGI (N° Lexbase : L0759IWZ) soumettaient au taux intermédiaire douze catégories d'opérations concernant le logement social. Etaient aussi soumises à ce taux les livraisons à soi-même de logements. L'article 29 de la loi de finances pour 2014 a ramené le taux applicable à certaines de ces opérations à 5,5 %. Sont soumises au taux réduit :
- les livraisons de logements sociaux,
- les livraisons de logements sociaux dans le cadre des reprises d'opérations de l'Association foncière logement aux conditions énoncées par les dispositions de l'article 278 septies, I, 7 bis nouveau du CGI,
- les travaux de rénovation réalisés dans les logements sociaux qui concourent à la réalisation d'économies d'énergie et de fluides, l'accessibilité de l'immeuble et du logement pour les personnes en situation de handicap, la mise en conformité des locaux avec les normes édictées par la loi du 23 décembre 1986 (21), la protection des locataires quant à différents domaines de sécurité (lutte contre les incendies, sécurité en matière d'ascenseur, sécurité des installation d'électricité et de gaz ou encore la prévention des risques naturels).

- Fourniture de logement et de nourriture dans certains établissements à caractère social . Jusqu'au 31 décembre 2013, le principe en matière de TVA pour cette catégorie était l'application du taux intermédiaire de 7 % (22). Ce principe comprenait certaines exceptions ; ainsi, le taux réduit (5,5 %) était applicable à la fourniture de logement et de nourriture dans les maisons de retraite et les établissements accueillant des personnes handicapées (23). Il pouvait aussi s'agir d'exonération de TVA, par exemple pour les lieux de vie et d'accueil pour mineurs et jeunes en difficulté (24).

L'article 29 loi de finances pour 2014 a instauré de nouvelles exceptions à l'application du taux intermédiaire et a fait entrer dans le champ d'application du taux de 5,5 % certains établissements à vocation sociale :
- les foyers de jeunes travailleurs (25),
- les centres de réadaptation, de préorientation et de rééducation professionnelle des travailleurs handicapés (26),
- les logements-foyers (27),
- les établissements assurant l'accueil, le soutient ou l'accompagnement social, l'adaptation à la vie active ou l'insertion professionnelle des personnes ou des familles en difficulté ou en situation de détresse (28).

  • Mesure transitoire relative au taux intermédiaire de TVA pour les travaux de rénovation des logements, autres que de rénovation énergétique, en voie d'achèvement (loi de finances rectificative pour 2013, art. 21)

En matière de prestations de services, le principe est que le fait générateur de la TVA a lieu lorsque la prestation est effectuée (29). En conséquence, les nouveaux taux s'appliquent aux prestations de services qui sont effectuées à compter du 1er janvier 2014. A compter de cette date, les travaux d'amélioration, de transformation, d'aménagement et d'entretien dans le cadre de locaux à usage d'habitation achevés depuis plus de deux ans sont soumis au taux de 10 % (30). Antérieurement, le taux applicable était de 7 %. Par exception au principe mentionné ci-avant, l'article 21 de la loi de finances rectificative pour 2013 met en oeuvre une disposition transitoire au terme de laquelle le taux de 7 % reste applicable aux travaux qui remplissent les conditions suivantes :
- avoir fait l'objet d'un devis daté et accepté avant le 1er janvier 2014,
- avoir donné lieu au versement d'un acompte au moins égal à 30 % du prix TTC du total des travaux éligibles figurant au devis encaissé avant cette même date,
- et d'un solde facturé avant le 1er mars 2014 et encaissé au plus tard le 15 mars de cette même année (31).

Cette disposition transitoire trouve aussi à s'appliquer si un contrat de marché public ou de privé de travaux remplit lesdites conditions. L'administration fiscale précise que, si les deux premières conditions, relatives au devis et à l'acompte sont remplies, et qu'un deuxième acompte est encaissé entre le 1er janvier et le 28 février 2014, le professionnel est autorisé à lui appliquer le taux de 7 %. Si la dernière condition relative au paiement du solde s'avère non remplie, il sera tenu de régulariser la TVA au taux de 10 %. En revanche, le premier acompte encaissé avant le 1er janvier 2014 reste soumis au taux de 7 %. Enfin, dans l'hypothèse où un avenant à un contrat ou à un marché public ou privé de travaux est signé après le 31 décembre 2013, le taux de 10 % s'applique aux travaux prévus par cet avenant, si ceux-ci font l'objet d'un paiement à compter du 1er janvier 2014, même si cet avenant se rapporte à un contrat signé avant le 31 décembre 2013. De la même manière, en cas de marché à tranches conditionnelles, le taux de 10 % est applicable aux tranches conditionnelles qui font l'objet d'une confirmation à compter du 1er janvier 2014, même si le marché a été conclu avant cette date (32).

Cette mesure transitoire semble relativement complexe à appliquer tant pour les particuliers que pour les entrepreneurs. Néanmoins, Christian Eckert, rapporteur général au budget, considère que c'est le type de disposition qui est actuellement prise en cas de changement de taux de TVA. Le coût de cette disposition a été évalué à 135 millions d'euros (33).

  • De nouvelles mesures en vue de lutter contre la fraude à la TVA (loi de finances pour 2014, art. 25)

En principe, la TVA doit être collectée auprès du client par le prestataire de services ou le fournisseur du bien, ce dernier la reversant à l'Etat. Ce principe peut être remis en cause et c'est le client qui devient redevable de la TVA au terme de l'application du mécanisme d'autoliquidation. Ce dispositif aboutit à une inversion du redevable ; il est essentiellement mis en oeuvre en vue de lutter contre la fraude à la TVA.

L'instauration d'un régime d'autoliquidation est autorisée par les dispositions de l'article 199, §1, de la Directive-TVA (34) récemment modifiée par la Directive 2013/43/UE du Conseil (35). Si, dans un premier temps, ce mécanisme a été principalement mis en place pour les opérations transfrontalières (les acquisitions intracommunautaires de biens livrés en France, les prestations de services acquises auprès d'entreprises établies hors de France) ; eu égard à l'importance de la fraude, la Commission européenne a élargi les possibilités dans lesquels ce mécanisme peut être instauré (36).

Les dispositions de l'article 25 de la loi de finances pour 2014 s'inscrivent dans la perspective d'une lutte accrue contre la fraude à la TVA au plan de l'Union européenne comme au niveau interne. Les deux mesures sont, d'une part, l'instauration d'un régime d'autoliquidation de la TVA dans le secteur du bâtiment (37) (A) et, d'autre part, la mise en place d'un mécanisme de réaction rapide dans l'hypothèse de fraude "carrousel" (38) (B).

A - Régime d'autoliquidation de la TVA par le donneur d'ordre dans le secteur du bâtiment

Cette mesure a pour objectif d'éliminer une possibilité de fraude importante du fait de l'existence d'un grand nombre de sociétés sous-traitantes éphémères. Selon l'exposé des motifs de l'article 16 du projet de loi de finances pour 2014, "il s'agit de supprimer les schémas dans lesquels un sous-traitant facture de la TVA à son donneur d'ordres, sans jamais la reverser au Trésor public, alors que le donneur d'ordres, le plus souvent de bonne foi, déduit la TVA que lui a facturée son sous-traitant". Cette disposition mettrait ainsi fin à "une distorsion de concurrence au détriment des sous-traitants du secteur du bâtiment respectueux de leurs obligations fiscales. Les sous-traitants aux pratiques frauduleuses peuvent en effet afficher des prix toutes taxes comprises plus bas que ceux de leurs concurrents civiques, puisqu'ils détournent la TVA à leur profit" (39).
L'entrée en vigueur de cette mesure est fixée au 1er janvier 2014 et s'applique aux contrats de sous-traitance conclus à compter de cette date. Les prestataires concernés sont les entreprises sous-traitantes telles que définies par l'article 1er la loi du 31 décembre 1975 (40), selon lequel "la sous-traitance est l'opération par laquelle un entrepreneur confie par un sous-traité, et sous sa responsabilité, à une autre personne appelée sous-traitant l'exécution de tout ou partie du contrat d'entreprise ou d'une partie du marché public conclu avec le maître de l'ouvrage".

Les opérations concernées par ce mécanisme d'autoliquidation sont les travaux de construction définis largement, car sont aussi inclus les travaux de réparation, de nettoyage, d'entretien, de transformation et de démolition réalisés en relation avec un bien immobilier. La notion de travaux de construction comprend aussi les travaux préparatoires (fondations) ainsi que les différents travaux de couverture, d'achèvement de la construction comme ceux de finition. Il peut s'agir non seulement de bâtiments, mais aussi d'ouvrages de génie civil (par exemple des autoroutes). La TVA pesant sur ces travaux de construction réalisés par le sous-traitant doit être acquittée par le preneur assujetti. L'entreprise sous-traitant est elle-même redevable pour les travaux qu'elle a confiés à ses propres sous-traitants.

De ce mécanisme d'autoliquidation découlent des dispositions particulières quant à la procédure. En matière de facturation, le sous-traitant ne devra pas mentionner sur la facture la TVA exigible car le montant des travaux y figurant doit être considéré comme le prix HT que l'entrepreneur principal doit soumettre à la TVA. La facture devra faire apparaître de manière claire que la TVA est due par le preneur ; il faudra indiquer les dispositions de la Directive 2006/112/CE (41) ou celles du CGI (42). Cette mesure a aussi des répercussions quant au droit à déduction. Si l'entreprise sous-traitant ne collecte pas la TVA, néanmoins elle a toujours le droit de déduire la TVA qui a grevé ses dépenses. Enfin, pour la déclaration, l'entrepreneur principal doit indiquer dans le cadre des "autres opérations imposables" de la déclaration de chiffre d'affaires le montant total HT de l'opération. En cas de défaut de déclaration, une amende de 5 % est applicable (43).

B - Mécanisme de réaction rapide (MRR) en cas de fraude

Antérieurement, lorsqu'un Etat membre souhaitait lutter contre la fraude à la TVA au moyen de mesures qui ne sont pas prévues par la législation de l'UE, il devait faire une demande officielle de dérogation. A la suite de cette demande, la Commission élaborait une proposition qui était présentée au Conseil ; cette proposition devait être adoptée à l'unanimité avant que ces mesures puissent être mises en oeuvre. Cette procédure est trop peu rapide pour lutter efficacement contre les différents mécanismes de fraudes. Or, "lorsqu'on parle de fraude à la TVA, le temps c'est de l'argent. Les fraudeurs sont devenus plus rapides et plus astucieux [...]. Le mécanisme de réaction rapide garantira que notre système dispose des moyens nécessaires pour lutter efficacement contre la fraude à la TVA" (44).

Ce mécanisme proposé par la Commission a été mis en oeuvre par la Directive 2013/42/CE (45). Au plan du droit interne, les dispositions du I de l'article 25 de la loi de finances pour 2014 autorise le ministre du Budget à mettre en place par arrêté un régime d'autoliquidation de la TVA dans le cas où il existe une urgence impérieuse du fait d'un risque de fraude "présentant un caractère soudain, massif et susceptible d'entraîner pour le Trésor des pertes financières considérables et irréparables" (46).

L'instauration d'un MRR doit être notifiée à la Commission au moyen d'un formulaire type communiqué dans le même temps aux autres Etats membres (47). Cette information des autres Etats doit permettre d'enrayer les fraudes qui ont très souvent une dimension internationale (48). Le MRR ne pourra entrer en vigueur qu'après confirmation écrite de l'absence d'opposition de la Commission.

Le MRR est une disposition spécifique -il ne s'agit pas du droit commun applicable en matière de TVA- qui doit faire l'objet de contrôles appropriés par l'Etat membre. La durée d'application du MRR ne peut être supérieure à neuf mois (49). La période limitée de mise en oeuvre de ce type de mécanisme est la conséquence du fait qu'il s'agit d'une "solution temporaire" (50). Actuellement, il existe deux procédures en vue de remédier à l'absence de normes légales en faveur de la lutte contre les fraudes à la TVA : soit par l'obtention d'une modification directe de la Directive en vigueur, soit par l'octroi d'une dérogation individuelle. Ces deux procédures sont lourdes et peu rapides au regard de la célérité des fraudeurs. Le MRR vient s'ajouter aux procédures déjà existantes mais est limité aux situations de fraudes massives et soudaines pour lesquelles les moyens actuels se sont révélés insuffisants.

Ces nouvelles dispositions du droit de l'Union européenne, applicables en droit français depuis le 1er janvier 2014, sont significatrices à la fois de l'ampleur de la fraude en matière de TVA et de la nécessité de plus en plus importante de lutter contre les pertes financières qui en résultent. Ces mesures sont présentées comme des dispositions transitoires "dans l'attente de la mise en oeuvre de solutions législatives à plus long terme visant à rendre le système de TVA plus résistant aux cas de fraude" (51). Elles attestent de l'urgence à renouveler le droit de l'Union européenne en matière de lutte contre la fraude à la TVA.


(1) Loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 (N° Lexbase : L7405IYW).
(2) Loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 (N° Lexbase : L7404IYU).
(3) Loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 (N° Lexbase : L4994IRE).
(4) Loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011, art. 13, op. cit..
(5) Loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 (N° Lexbase : L7970IUQ).
(6) On peut aussi noter que le taux de 8 % applicable à certaines opérations en Corse est porté à 10 %.
(7) SRC : socialiste, républicain et citoyen.
(8) Voir le rapport de la commission des finances n° 1619, tome I, art. 6 bis.
(9) Le Monde, 18 octobre 2012.
(10) Loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012, op. cit..
(11) Voir le rapport de la commission des finances n° 1619, tome I, art. 7, op. cit..
(12) BoFip - Impôts, BOI-TVA-LIQ-50, § 70, 2 janvier 2014, publication à venir.
(13) BoFip - Impôts, BOI-TVA-LIQ-50, § 70, 2 janvier 2014, op. cit..
(14) CGI, art. 278-0 bis, H, nouveau.
(15) Sur les modalités d'application, cf : BOI-TVA-LIQ-50, § 60, 2 janvier 2014, op. cit..
(16) Voir le rapport de la commission des finances n° 1619, tome I, op. cit..
(17) Le Monde, 19 octobre 2012.
(18) Voir le rapport de la commission des finances n° 1619, tome I, op. cit..
(19) CGI, art. 278 septies, 2 (N° Lexbase : L0940IZT).
(20) CGI, art. 278 septies, 3.
(21) Loi n° 86-1290, en vue de favoriser l'investissement locatif, l'accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l'offre foncière, art. 25 (N° Lexbase : L8834AGB).
(22) CGI, 279, a (N° Lexbase : L0784IWX).
(23) CGI, art. 278-0 bis, C.
(24) CGI, art. 261, 7, 1° quater (N° Lexbase : L4768IXU).
(25) CCH, art. L. 351-2 (N° Lexbase : L1091HP4) et L. 353-2 (N° Lexbase : L6485G93).
(26) C. trav., art. L. 5213-3 (N° Lexbase : L2452H9P).
(27) CCH, art. L. 633-1 (N° Lexbase : L9080IDN).
(28) C. act. soc. fam., art. L. 212-1, 8° (N° Lexbase : L5406DKG).
(29) CGI, art. 269, 1, a.
(30) CGI, art. 279-0 bis, 1 et 3 (N° Lexbase : L0547IW8).
(31) BoFip - Impôts, BOI-TVA-LIQ-50, 80, 2 janvier 2014, publication à venir.
(32) BoFip - Impôts, BOI-TVA-LIQ-50, 80, 2 janvier 2014, op. cit..
(33) Le Nouvel Observateur.
(34) Directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006, relative au système commun de TVA (N° Lexbase : L7664HTZ).
(35) Directive 2013/43/UE du Conseil du 22 juillet 2013, modifiant la Directive 2006/112/CE relative au système commun de TVA en ce qui concerne l'application facultative et temporaire de l'autoliquidation aux livraisons de certains biens (N° Lexbase : L9707IXS).
(36) Directive du 22 juillet 2013, op. cit..
(37) CGI, art. 283, 2, nonies nouveau (N° Lexbase : L1022IZU).
(38) CGI, art. 283, 2, decies nouveau.
(39) Voir le projet de loi de finances pour 2014, enregistré à l'Assemblée nationale le 25 septembre 2013, art. 16.
(40) Loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, relative à la sous-traitance (N° Lexbase : L5127A8E).
(41) Directive du 28 novembre 2006, art. 199, §1-a, op. cit..
(42) CGI, art. 283, 2, nonies.
(43) CGI, art. 1788, A, 4 (N° Lexbase : L1764HNN).
(44) Algirdas emeta, communiqué de presse de la Commission du 31 juillet 2012.
(45) Directive du 22 juillet 2013, relative au système commun de TVA en ce qui concerne un mécanisme de réaction rapide contre la fraude à la TVA op. cit..
(46) Directive 2006/112/CE, art. 199 ter, modifié par la Directive 2013/42/UE du 22 juillet 2013 et codifié sous CGI, art. 283, 2, decies nouveau.
(47) Directive 2006/112/CE, art. 199 ter, 1°, dernier alinéa, modifié par la Directive 2013/42/UE du 22 juillet 2013.
(48) Directive 2013/42/UE, op. cit..
(49) Directive 2006/112/CE, art. 199 ter, 1°, dernier alinéa, modifié par la Directive 2013/42/UE du 22 juillet 2013.
(50) Directive 2013/42/UE, op. cit..
(51) Directive 2013/42/UE, op. cit..

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