La lettre juridique n°409 du 23 septembre 2010

La lettre juridique - Édition n°409

Éditorial

Monopole public des jeux d'argent : du price-maker au pacemaker

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N0907BQN

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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la publication

Le 27 Mars 2014


Après avoir charrié les Etats sur leur manque d'entrain à libéraliser le secteur des jeux d'argent, de hasard et autres paris sportifs, l'Union européenne, par l'intermédiaire de son bras judiciaire, la Cour de justice, poursuit son combat en faveur de la concurrence dans ce secteur par trop lucratif, écartelant volontiers les Etats membres, avec un argument imparable : la santé publique. Le 8 septembre 2010, la CJUE est, ainsi, venue apporter certaines précisions en matière de réglementation des jeux, en retenant que le monopole public allemand ne poursuit pas de manière cohérente et systématique l'objectif de lutte contre les dangers liés aux jeux de hasard et doit, par conséquent, être suspendu... Suspendu faute de cohérence et donc d'efficacité dans la lutte contre le jeu pathologique : la logique édificatrice d'une morale libérale à la sauce européenne laisse songeur...

Démonstration. La Cour considère que, dans un souci de canaliser l'envie de jouer et l'exploitation des jeux dans un circuit contrôlé, les Etats sont libres d'instituer des monopoles publics. En particulier, un tel monopole est susceptible de maîtriser les risques liés au secteur des jeux de hasard de manière plus efficace qu'un régime dans lequel des opérateurs privés seraient autorisés, sous réserve du respect de la réglementation applicable en la matière, à organiser des jeux de paris. Ensuite, la Cour observe que la circonstance que divers types de jeux de hasard soient soumis, les uns à un monopole public, les autres à un régime d'autorisations délivrées à des opérateurs privés, ne saurait, à elle seule, remettre en question la cohérence du système allemand. En effet, ces jeux ont des caractéristiques différentes. Ouf ! Nous voici rassurés, les législations protectrices européennes telles que notre loi du 12 mai 2010, relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne, confortant les monopoles d'Etat, non plus dans la commercialisation, mais dans l'organisation du marché des jeux et l'homologation des opérateurs, bénéficient de la clémence bienveillante des caciques de la libre concurrence.

Néanmoins, eu égard aux constatations auxquelles elles ont procédé dans ces affaires, les juridictions allemandes sont fondées à considérer que la réglementation allemande ne limite pas d'une manière cohérente et systématique les jeux de hasard. En effet, d'une part, les titulaires des monopoles publics se livrent à des campagnes publicitaires intensives en vue de maximiser les profits résultant des loteries en s'éloignant ainsi des objectifs justifiant l'existence de ces monopoles. D'autre part, s'agissant des jeux de hasard, tels que les jeux de casino et les jeux automatisés, qui ne relèvent pas du monopole public mais présentent un potentiel de risque d'assuétude supérieur aux jeux soumis à ce monopole, les autorités allemandes mènent ou tolèrent des politiques visant à encourager la participation à ces derniers. Or, dans de telles circonstances, l'objectif préventif de ce monopole ne peut plus être efficacement poursuivi, si bien que celui-ci cesse de pouvoir être justifié. Aie ! C'est le serpent qui se mord la queue : à vouloir courir deux lièvres à la fois -protection de la santé publique et gain commercial croissant-, c'est le monopole des Etats en matière d'organisation des paris sportifs et des loteries qui pourrait bien finir... en civet.

Explication. Les monopoles légaux sont légitimes pour autant qu'ils servent un intérêt collectif, un service public, une ambition morale pour la société, concède Walras. Or, le jeu pathologique est une réalité qui concerne entre 1 et 2 % des joueurs. Trouble de l'impulsion, classé DSM-III, cette psychopathologie appelle une réaction des Etats afin de limiter substantiellement le nombre de "joueurs excessifs" et les coûts sociaux y associés -on sait, désormais, que ce sont les mêmes zones et régions du cerveau qui sont impliquées dans la consommation de cocaïne que dans la pratique excessive des jeux d'argent-. Telle est, du moins, l'ambition officielle de la majorité des Etats européens en faveur d'un marché du jeu réglementé ; pour d'autres, le taux de prévalence du jeu pathologique n'est pas à mettre en rapport avec l'accessibilité aux jeux et il n'y a donc pas lieu de réglementer cet accès... La vérité est, comme souvent, ailleurs : peut-être dans la dizaine de milliards d'euros de chiffre d'affaires des monopoles publics, sûrement dans les centaines de millions d'euros redistribués à l'Etat percepteur et actionnaire. Qui renoncerait à un tel pactole au risque de voir l'offre se multiplier, les prix s'éroder, la rentabilité s'affaisser... et la santé publique en danger (pardon j'oubliais).

Bon, à l'origine, l'intention était louable : alimenter la caisse des "gueules cassées" du colonel Picot -toujours actionnaires de la Française des jeux à hauteur de 9,2 %- au sortir la Première guerre mondiale, tout en renflouant celles de l'Etat assombries par la crise de 1929. Encore une belle initiative de Raymond P., de Bar-Le-Duc, pour varier des plaisirs fiscaux sur l'alcool et le tabac... avec la taxation aux deux tiers de la "traite" des femmes, on n'était ainsi pas loin d'emporter la castration de tous les lucres. Mais force est de constater que l'Etat a du mal à "lâcher la rampe" et à se départir d'une manne financière à la perception indolore, exemple parfait du consentement populaire à l'impôt inscrit à l'article 13 de la DDHC -"L'argent gagné au jeu est deux fois plus précieux que l'argent gagné en travaillant" ; et cela vaut même pour l'Etat organisateur et percepteur-. C'est que Paul Bonhoure et ses cinq millions de francs (de 1933), perçus à l'occasion du premier tirage de la Loterie nationale, aura fait quelques émules... et fait construire quelques stades et autres équipements sportifs à la charge de l'Etat.

Alors, pour rester dans la course, malgré une libéralisation contrôlée du marché des jeux, le monopole public doit faire oeuvre d'innovation -contredisant les théories de Schumpeter sur l'inertie des monopoles en matière de recherche et développement en raison d'une situation confortable sur le marché-, de promotion et de communication autour des jeux qu'il propose. C'est que le loto national n'est plus seul sur les bancs des jeux de tirage et de grattage, sans parler de la diversification des paris sportifs. Ce n'est sans doute pas pour faire de nouveaux émules, toujours plus addicts, que sont apparus les "Astro", "Dédé", "Eldorado", "L'Or des Corsaires", "XIII LA BD CULTE" et autre "VEGAS Brandon/VEGAS Brenda", mais pour promouvoir les sciences exotériques, la réconciliation avec les animaux de la ferme, la littérature imagée et, finalement, l'autodérision.

Plus sérieusement, la publicité des jeux d'argent bat son plein sur tous les médias et les entreprises publiques ne sont pas en reste. A tel point que le CSA a, dès le 18 mai 2010, c'est-à-dire au lendemain de la publication de la loi d'ouverture, invité l'ensemble des éditeurs de services de télévision et de radio à adopter une charte de bonne conduite aux fins de faire respecter l'interdiction des communications commerciales en faveur des opérateurs de jeux sur certains services de radios et de télévision susceptibles d'être destinés à des mineurs, d'en limiter le volume et la concentration, et d'éviter la "dénaturation" du contenu éditorial des programmes des émissions sportives ou hippiques et de celles consacrées au Poker. Une charte de bonne conduite semble donc nécessaire pour réglementer, non pas l'offre de jeux elle-même, mais sa promotion... à charge des médias et non des opérateurs de jeux...

Si bien que, si l'emballement de la promotion des services de jeux de tirage, de grattage ou en ligne ne s'étiole pas, c'est le principal organisateur/annonceur qui en pâtira : quelle légitimité aura-t-il à vouloir régenter -réglementer- directement ou indirectement le marché des jeux d'argent, s'il ne s'oblige pas à une certaine retenue promotionnelle ? A vouloir rétablir un monopole, non plus légal, mais réel ou à défaut un oligopole dans lequel il conserve une position dominante, c'est la libre concurrence qui risque bien de l'emporter et... la pathologie des jeux avec elle.

newsid:400907

Bancaire

[Textes] La nouvelle ligne bleue du monde bancaire : "Bâle III"

Réf. : Comité de Bâle sur le contrôle bancaire, communiqué de presse du 12 septembre 2010

Lecture: 16 min

N0960BQM

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par Alexandre Bordenave, Avocat au Barreau des Hauts-de-Seine, chargé d'enseignement à l'ENS Cachan

Le 07 Octobre 2010

"Jamais deux sans trois" : l'adage populaire, relevant au moins autant de la vérité générale que du commandement, pétri d'un sens commun que n'aurait pas renié le phénomélogiste Alfred Schütz, présente l'avantage commode d'être susceptible de déclinaisons multiples. Souvent, l'art trouve plus facilement son équilibre naturel dans le triptyque ou la trilogie que dans le diptyque ou la dilogie. A nouveau, cette règle se trouve vérifiée avec l'adoption quasi-achevée par le Comité de Bâle (1) de la version 3.0 des "accords de Bâle". Au coeur -depuis 1988- de la réglementation bancaire prudentielle à l'échelle international, les "accords de Bâle" se veulent pour la sphère bancaire un peu ce qu'est le monolithique extraterrestre à l'humanité "clarko-kubrickienne" : un concentré absolu de savoir, de sagesse, mais aussi, de complexité insondable ! Si bien qu'à chaque ère, on peut y revenir et en tirer quelque chose d'intrinsèquement nouveau sans tout à fait l'être.

L'histoire commence avec "Bâle I" dont la principale construction originale consistait en un ratio de solvabilité (2) minimum de 8 % devant être respecté par tout établissement de crédit et se calculant comme le rapport entre les fonds propres de l'établissement de crédit en cause et ses engagements de crédit pondérés.
En 2004, un nouvel accord, celui de "Bâle II", entendit mieux prendre en considération un risque que les spécialistes avisés avaient appris à mieux circonscrire au cours de la décennie 1990 : le risque de crédit de la "contrepartie" (3) bénéficiaire du crédit. Bâle réorganisa également la matière prudentielle autour de trois piliers : le premier relatif aux exigences minimales en fonds propres (minimum capital requirements), le deuxième consacré au processus de surveillance prudentielle (supervisory review process) et le dernier focalisé sur la discipline de marché (market discipline). Au-delà de cette systématisation, on retient le plus souvent de la deuxième mouture des accords bâlois le remplacement du "ratio Cooke" par un ratio plus fin, intégrant les risques opérationnels et de marché : le "ratio McDonough" (4).

Le vent, l'ouragan, de la crise de 2008 mit en évidence la nécessité d'une profonde refonte de la réglementation prudentielle à l'échelle mondiale. Et, tout naturellement, "Bâle III" poignit à l'horizon. "Bâle I" fêtait son seizième anniversaire lorsque "Bâle II" fut adopté ; certainement, ce dernier profitera tout juste du clignement d'un septennat : y verrait-on une version dégradée de la loi de Moore (5) ?

Des améliorations de "Bâle II" furent envisagées, avec un degré de détail suffisant pour être étudiées, à partir du mois de juillet 2009 (6) avec trois objectifs principaux maintenus depuis, même avec une ambition diminuée :
- l'instauration de "volants de sécurité" (buffers) destinés à amortir les chocs économiques ;
- le renforcement de la qualité des capitaux des banques ;
- et l'introduction d'un ratio de levier comme filet de sécurité (backstop) des dispositifs de "Bâle II".

Par la suite, en décembre 2009, vraisemblablement au nom d'une facilité de l'époque, le Comité de Bâle lança deux consultations ouvertes baptisées avec une pittoresque poésie : "Un cadre international pour la mesure, le suivi et la gestion du risque de liquidité", et surtout "Renforcer la résilience du secteur bancaire" (7). Les projets du Comité furent accueillis avec une froideur peu dissimulée, et le mois de juillet 2010 vit donc l'adoption d'un nouvel accord par le groupe de gouverneurs de banques centrales et de responsables du contrôle bancaire, instance gouvernante du Comité de Bâle, moins ambitieux que la prévision originale. C'est cet accord qui vient d'être officiellement entériné, le 12 septembre 2010 par le même groupe.

A l'heure actuelle, l'instrument ressort pleinement de la "soft law" : comme ses prédécesseurs, il nécessitera une greffe locale, fût-ce à un niveau supranational, à l'image des Directives 2006/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2006 concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice (N° Lexbase : L1385HKI) et 2006/49/CE du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2006 sur l'adéquation des fonds propres des entreprises d'investissement et des établissements de crédit (N° Lexbase : L1386HKK) qui constituent l'appropriation européenne des règles de "Bâle II". Il n'en reste pas moins que, à terme, "Bâle III" incarnera le quotidien des hères de la dimension bancaire. Partons nous y frotter à point en étudiant comment les normes nouvelles renforcent le dispositif prudentiel au plan qualitatif (I) et quantitatif (II), le tout étant évidemment centré autour de la question des fonds propres bancaires.

I - Le renforcement qualitatif du dispositif prudentiel : l'exigence de fonds propres de meilleure qualité

Le concept de fonds propres bancaires, qui embrasse des éléments plus variés que le seul capital social auquel le juriste féru de droit des sociétés est accoutumé, est au coeur de la réglementation prudentielle. Sans qu'elle ne procède d'une entreprise aussi vaste que celle de Mendeleïv (8), l'idée de fonds propres bancaires comprend un effort réel de classification des composantes des fonds propres, des plus subordonnées (9) à celles qui le sont le moins. Plus le rang est élevé, plus l'élément est subordonné. En termes visuels, plus la composante figure haut au passif d'un bilan, plus elle est subordonnée.

Depuis le deuxième accord de Bâle, les fonds propres bancaires se décomposent comme suit :
- les fonds propres "Tier 1", le noyau dur (core capital) des fonds propres, très subordonnés. A titre principal, ils comprennent le capital social ;
- les fonds propres "Tier 2" (10), le complément des premiers (supplementary capital), qui incluent les titres hybrides (11) et la dette subordonnée (12) ;
- les fonds propres "Tier 3", qui consistent en des instruments de dette subordonnée à court terme destinés à couvrir certains risques de marché.

L'accord entériné par le Comité de Bâle le 12 septembre 2010 entend procéder à une vaste réorganisation des types d'instruments éligibles à ces strates de fonds propres. On le comprend aisément : c'est un enjeu majeur de la réglementation, puisque les différents ratios sur lesquels se fonde la régulation bancaire prennent d'une manière ou d'une autre pour référence les fonds propres bancaires.

L'impulsion qui vient d'être donnée est double : les catégories existantes sont redéfinies (A) et les "ajustements réglementaires" (regulatory adjustements) introduits (B).

A - La redéfinition des catégories existantes de fonds propres

En la matière, "Tier 1", "Tier 2" et "Tier 3" connaissent des destinées diverses : d'une disparition pure et simple (1°) à une redéfinition sensible (2°).

1° - L'abolition du "Tier 3"

Introduit par "Bâle II", le "Tier 3" ne fera donc pas long feu puisque le principe de sa disparition semble aujourd'hui définitivement acquis au nom d'une volonté du Comité de Bâle de s'assurer que les capitaux auxquels il est recouru pour répondre aux exigences en termes de risques de marché sont de qualité équivalente à ceux destinés à la couverture des risques de crédits et opérationnels.
Il est vrai que le "Tier 3", admis à titre optionnel et subsidiaire, fait figure de parent pauvre des fonds propres : les actifs éligibles à cette catégorie sont définis avec fort peu de contraintes (13) et, en tout état de cause, ils ne sont pas autosuffisants puisque la couverture des risques de marché doit être assurée au minimum à 28,5 % par des fonds "Tier 1".

Ainsi, dès la consultation initiée en décembre 2009, les circonstances ont eu raison de la tolérance du Comité de Bâle pour ces capitaux de troisième zone dont la disparition ne semble pas perturber outre mesure les établissements de crédit.

2° - La refonte du "Tier 1" et du "Tier 2"

Si le Comité de Bâle s'est contenté de balayer d'un revers de main le "Tier 3", il consacre, dans l'ensemble de sa production relative à "Bâle III", de longs développements aux deux niveaux préservés. Sans surprise, la focale est mise sur le "Tier 1", parce qu'il constitue le nec plus ultra de la solidité bancaire.

Le constat de base est relativement simple : il faut faire en sorte que le "Tier 1" demeure ce qu'il aurait toujours dû être, à savoir un fonds quasi-immuable de ressources pérennes pour les établissements de crédit. Animé par ce souci, le Comité de Bâle a non seulement réaffirmé que, par principe, seuls le capital social (common equity) et les réserves (retained earnings) devaient entrer dans le calcul du "Tier 1", mais il a défini avec une plus grande précision tant ce qui peut être considéré comme du capital (14) que les critères auxquels doivent répondre les instruments de "Tier 1" additionnels, c'est-à-dire ceux qui, sans être constitutifs ni de capital social ni de réserves, sont admis à titre subsidiaire dans le saint des saints des fonds propres.

Quant au "Tier 2", dont la vocation d'éponge à premières pertes (gone-concern capital) est rappelée, il subit lui aussi une cure de discipline via l'édiction d'une liste de huit critères. Ici, l'objectif affiché est clairement la simplification d'une catégorie de fonds propres devenue tentaculaire.

Rien de très neuf ou de révolutionnaire sous le soleil, mais il n'en demeure pas moins que la démarche globale est appréciable en ce qu'elle devrait permettre de clarifier et d'uniformiser les calculs de fonds propres. En saupoudrant le tout de règles de transparence, le Comité de Bâle parachève la reconstruction des fonds propres et rend possible leur révélation complète au grand jour.

B - L'apparition des ajustements réglementaires

Le terme "ajustement réglementaire" est absent du discours de "Bâle II". Pourtant, ce dernier est familier de la technique, laquelle consiste à appliquer aux fonds propres un certain nombre de déductions et de "filtres prudentiels" (prudential filters) pour les besoins du calcul des ratios prudentiels (15). Simplement, et le Comité de Bâle le met fort bien en évidence dans les documents relatifs à "Bâle III", le concept à peine exprimé ne pouvait remplir son office. La seule adoption d'un vocable nouveau, une véritable opération de communication, est révélatrice de la volonté du Comité de Bâle de rendre ces règles plus effectives.

En la matière, le progrès est double : la règle d'imputation est plus sévère (1°) et les actifs à déduire des fonds propres sont définis avec une précision jusqu'alors inédite (2°).

1° - La règle d'imputation des ajustements réglementaires

Si "Bâle II" prévoit le principe de déductions grevant les fonds propres, ces dernières n'ont vocation qu'à peser sur le "Tier 1" de manière générale. A l'évidence, c'est un peu court : l'opération de retour aux fondamentaux menée par le Comité de Bâle opte ainsi désormais pour une imputation directe sur le seul capital social (16) (tel que nous l'avons décrit plus avant). En conséquence, l'importance de cette composante majeure des fonds propres se trouve automatiquement renforcée.

2° - La clarification en matière d'actifs à déduire

Le souci de définition est l'un des leitmotivs de "Bâle III". Cette discipline est appliquée à la question des ajustements réglementaires et une liste précise d'actifs, assortie de règles multiples, est incluse dans les documents produits par le Comité de Bâle. La clarification ainsi opérée offre également au Comité l'occasion d'instaurer des règles particulières à certains actifs déductibles. Et, à cette occasion, a été soulevé l'un des points les plus polémiques de la réforme : le traitement des prises de participations des établissements de crédit.
Cela ne peut échapper à quiconque : la concentration du secteur bancaire a atteint un niveau rare. A cet égard, une crainte anime les sages installés en Suisse : celle d'une double comptabilisation des fonds propres, au niveau de la filiale et au niveau de la banque-mère, notamment du fait de l'approche consolidée prévue par les accords de Bâle.

En ce sens, le Comité de Bâle a d'abord souhaité que les participations minoritaires dans le capital d'un établissement de crédit intégré dans un périmètre de consolidation soient décomptabilisées des fonds propres du groupe. Ce faisant, le Comité entendait répondre à la préoccupation selon laquelle ces participations minoritaires ne représentent pas une protection satisfaisante contre le risque au niveau du groupe, mais seulement au niveau de la filiale concernée.
De plus, une déduction des participations dans le capital d'établissements de crédit hors périmètre de consolidation ou de compagnies d'assurance était envisagée : la principale règle consistait à imposer une déduction soit de l'intégralité des participations supérieures à 10 %, soit de la partie des participations agrégées représentant plus de 10 % du capital de l'établissement de crédit actionnaire. A l'évidence, les modèles français de la "bancassurance" (17) et de la banque mutualiste, dans lequel foisonnent les participations croisées, se seraient trouvés fort pénalisés par de telles dispositions.
La réaction virulente de la Fédération bancaire française, entre autres, a poussé le Comité de Bâle à revoir sa position en juillet 2010. Aussi, est-il désormais prévu que :
- seule une partie du capital social émis par une filiale bancaire au-delà des exigences réglementaires devra être déduite, en proportion de l'importance de la participation minoritaire ;
- et seules les prises positions dites "courtes" (18) dans le capital social d'autres institutions financières que celles du périmètre de consolidation bancaire devront être déduites, peu importe la qualité de crédit de la contrepartie de l'établissement considéré à cette occasion.

Le coeur plein de patriotisme économique, on peut se réjouir de cet abaissement des futures exigences, favorable aux banques françaises, tout en admettant qu'il vient limiter assez nettement l'ambition originelle.

En insistant longuement sur ces questions de définition, de sélection de certaines composantes et d'exclusion d'autres, le nouveau dispositif de Bâle s'efforce de distinguer le bon grain de l'ivraie. Ce faisant, n'est pas oublié son amour de toujours : le chiffre, clé d'une réglementation prudentielle qualitative.

II - Le renforcement quantitatif du dispositif prudentiel : l'exigence de fonds propres plus élevés

Pour beaucoup, les règles de Bâle se limitent à la seule exigence traditionnelle du respect par tout établissement de crédit d'un "ratio McDonough" au moins égal à 8 %. En réalité, les règles prévalant en matière de ratios sont plus nombreuses et complexes. Sur la question, "Bâle III" prépare tant un renforcement des ratios existants (A) que la création de nouveaux ratios dédiés à la question de la liquidité (B).

A - Le renforcement des ratios existants

Que les puristes et nostalgiques se rassurent : McDonough et ses 8 % ne sont pas engloutis par la vague de "Bâle III" ! L'attention du Comité de Bâle en matière de niveau minimal de ratios s'est plutôt portée sur les ratios concernant le seul "Tier 1" (1°) et l'introduction de volants de sécurité, complétant les exigences de base en termes de fonds propres (2°).

1° - Le relèvement des ratios portant sur le "Tier 1"

Le moins que l'on puisse dire, c'est que le deuxième accord de Bâle était relativement clément concernant le niveau du "Tier 1" : ce dernier ne devait représenter au minimum que 4 % des engagements de crédit pondérés de tout établissement de crédit. Cela laissait largement de quoi s'exprimer aux composantes "Tier 2" et "Tier 3", pourtant de qualités moindres.
Echaudé par la crise des subprimes, le Comité de Bâle a opté pour un relèvement significatif du minimum de "Tier 1" requis : ce plancher est désormais fixé à 6 %. Le "Tier 3" ayant disparu, les 2 % nécessaires au respect du "ratio McDonough" minimum ne pourront être que du "Tier 2" (dans le cas le moins favorable).

Dans la même veine, sous l'empire de "Bâle III", le capital social (19) devrait représenter au moins 4,5 % des engagements de crédit pondérés de tout établissement de crédit, contre 2 % à l'heure actuelle. Autrement dit, une fois le dispositif nouveau entièrement déployé, l'enchaînement devrait être le suivant : pour tout établissement de crédit, les fonds propres devront représenter 8 % des engagements de crédits pondérés, dont au moins 75 % de "Tier 1" comprenant au moins 75 % de capital social.

Le durcissement des normes est incontestable et en tenir compte nécessitera que les établissements de crédit lèvent d'importants capitaux sur les marchés financiers, ou diminuent le niveau de leurs engagements de crédit.

2° - L'introduction de volants de sécurité

Pour répondre à l'éventualité, désormais avérée, d'une crise financière soudaine et contaminante, le Comité de Bâle a inclus dans son nouveau jeu de normes prudentielles un concept inédit : celui des volants de sécurité. Il ne s'agit, ni plus ni moins, que de compléments de fonds propres destinés à respecter des ratios venant se superposer à ceux qui viennent d'être décrits.

Le premier des volants, appelé volant de conservation, devrait être d'application permanente et universelle : son niveau est fixé à 2,5 % des engagements de crédit pondéré, étant entendu qu'il devra être constitué exclusivement par du capital social. Le but recherché est de contraindre à la mise en place, au niveau de chaque établissement de crédit, d'un matelas financier, mobilisable en période de difficultés. Toutefois, moins ce matelas sera conséquent (par rapport à la norme), plus l'établissement en cause se verra limité dans sa politique de distribution de profits : c'est l'arme anti-bonus, anti-stock options de "Bâle III".

Le volant contra-cyclique est le second volant de sécurité. Ne pouvant (comme le précédent) comprendre que du capital social, il devrait varier entre 0 % et 2,5 % en fonction d'une conjoncture économico-financière appréciée au niveau national. Cette institution entend protéger le secteur bancaire contre les phases de croissance du crédit non maîtrisé. C'est une réponse directe à l'une des causes de la dernière crise financière : ce volant devrait venir dégonfler toute bulle future du crédit.

Au final, on s'aperçoit à quel point l'exigence en termes de fonds propres s'est accrue lorsque l'on prend en compte l'application de ces deux volants de sécurité : le niveau de fonds "Core Tier 1" pouvant être porté, dans certains cas, à 9,5 % ! Ajoutons à cela qu'une réflexion visant à imposer des contraintes supplémentaires aux établissements d'importance systémique est en cours au sein du Conseil de stabilité financière (20).

B - La création de nouveaux ratios

Comme la physique de Lavoisier, la règlementation prudentielle semble avoir une sainte horreur du vide : l'imagination sans borne de la banque et de la finance globalisée rend indispensable le développement de nouveaux outils destinés à serrer la bride d'un chaos potentiel.
Cette fois, contrairement à ce qui était apparu lors des discussions ayant précédé l'adoption du précédent accord de Bâle en 2004, ce n'est pas une malfaçon du ratio de solvabilité qui a été détectée (21). Plutôt, la crise des subprimes a tout particulièrement mis en lumière deux insuffisances des outils de contrôle de "Bâle II" : le niveau de levier du bilan des établissements de crédit (22) ne peut qu'imparfaitement être surveillé par le seul "ratio McDonough" et liquidité n'est pas solvabilité (23), c'est pourquoi sur la première (1°) comme sur la seconde (2°) de ces problématiques, le Comité de Bâle a proposé la création de nouveaux ratios.

1° - Le ratio de levier

La pratique du levier financier, consistant recourir fortement à l'endettement plutôt qu'à un financement sur fonds propres s'est révélée particulièrement nocive au cours de la dernière crise financière. Pour cette raison, le Comité de Bâle a proposé la création d'un ratio de levier indépendant des risques encourus par un établissement de crédit, lequel se calculerait ainsi comme le rapport entre, d'une part, le "Tier 1" et, d'autre part, la somme des engagements non pondérés et hors bilan.
Finalement, il a été décidé de repousser sensiblement l'application de ce ratio inédit afin de pouvoir le tester et le calibrer au plus juste. Aussi, une phase de test devrait-elle prochainement s'ouvrir, durant laquelle un plancher de 3 % sera expérimenté.

2° - Les ratios de liquidité

L'une des consultations ayant abouti à l'accord trouvé le 12 septembre 2010 portait sur la liquidité. Finalement, il en a été assez peu question jusqu'ici. Il est vrai que le Comité semble s'être plutôt pris de passion pour la question de la résilience, même s'il s'est risqué à formuler des propositions novatrices en matière de liquidité.
Ce faisant, le Comité de Bâle ne faisait que tirer les conclusions d'un des phénomènes les plus remarquables de la récente crise financière : la faillite, le 15 septembre 2008, de Lehman Brothers, faillite essentiellement liée à l'illiquidité de cette banque. D'où, l'idée d'imposer aux établissements de crédit, en plus d'exigences minimales en matière de fonds propres, des contraintes en termes de liquidité de leurs bilans.

En ce sens, le Comité de Bâle avait formulé deux propositions cumulatives de ratios avec deux horizons temporels différents :

  • Un ratio de couverture de la liquidité (liquidity coverage ratio), qui est un ratio à un mois, fondé sur les approches bancaires internes de suivi de la liquidité, qui rapprochait à tout moment le stock d'actifs liquides sans risque de tout établissement de crédit de ses engagements de paiement à 30 jours. Le niveau minimal suggéré pour ce ratio imposait que lesdits engagements puissent être intégralement couverts par une liquidation des actifs considérés ;
  • Un ratio de financement net stable (net stable funding ratio), qui est un ratio à un an, dont l'objet était de mesurer l'importance relative des ressources de financement stables à long terme d'un établissement de crédit par rapport à la liquidité des actifs financés et des besoins potentiels en termes de liquidité résultants d'engagements hors-bilan. L'objectif assigné a minima était de couvrir à tout moment lesdits besoins pendant un an, de favoriser le recours à des ressources stables.

Les établissements de crédit ayant soumis des réponses à l'occasion de la consultation organisée par le Comité de Bâle ont réagi vertement à l'introduction programmée de ces ratios, condamnés comme étant excessifs et inadaptés. Cela a conduit le Comité de Bâle à reconsidérer, pour les élargir, un certain nombre de tolérances déjà prévues dans le calcul de ces ratios, et à repousser l'entrée en vigueur de ces derniers respectivement à 2015 et 2018.

A Bâle, toutes les cloches semblent carillonner pour célébrer l'arrivée du nouvel accord. Le discours prononcé, le 21 septembre 2010, par le directeur général de la Banque des règlements internationaux témoigne bien de cette ambiance de distribution générale de satisfecit : "Bâle III" est un "renforcement significatif", une "refonte radicale", une "étape importante" (24). De cela, on ne doute pas. Toutefois, un scepticisme prudent reste de mise :
- d'abord, les nouveaux seuils minimaux de ratios demeurent raisonnables et sont déjà respectés par un bon nombre d'établissements de crédit ;
- ensuite, la question de la liquidité -au coeur de la récente crise financière- n'est abordée que de manière satellitaire ;
- enfin, l'applicabilité du nouvel accord laisse songeur. Outre le fait que l'accord devra passer sous les fourches caudines du prochain G20 coréen, qu'il doit encore être précisé et qu'il ne devrait pas être transposé avant 2013, il ne faut pas perdre de vue qu'il recèle un foisonnement de dispositions transitoires, réclamées par les banques, repoussant à 2019 son application pleine et entière (25) ! Quant à sa portée territoriale, lorsque l'on sait l'entrain que les Etats-Unis mettent à se conformer à "Bâle II", elle ne peut être que sujette à une dose de pessimisme.

A ces différents égard, "Bâle III" est bel et bien la ligne bleue du monde bancaire : un horizon sérieux, mais lointain, aux contours incertains et mouvants et dissimulant avec peine le malaise des concessions ayant abouti à son tracé.


(1) Hébergé par la Banque des règlements internationaux, installée à Bâle, il dédit ses travaux à la supervision bancaire. Il regroupe aujourd'hui près d'une trentaine de représentants des banques centrales.
(2) Dit "ratio Cooke", d'après Peter Cooke, un anglais qui fut notamment gouverneur de la Banque d'Angleterre et premier président du Comité de Bâle.
(3) Mot savant de l'univers financier pour désigner un débiteur de somme d'argent à terme. Le risque de contrepartie, au fond, est celui de ne jamais voir son débiteur payer (au sens vulgaire) : le boulanger faisant crédit sur la semaine à une cliente fidèle prend sur cette dernière un risque de contrepartie.
(4) McDonough est l'un des successeurs de Cooke à la tête du Comité de Bâle. La méthode de baptême est commode, mais on peut douter de la pertinence d'un futur "ratio Trichet"...
(5) Bien connue en informatique, cette "loi" répute que la puissance des microprocesseurs double tous les dix-huit mois.
(6) Basel II capital framework enhancements announced by the Basel Committee.
(7) International framework for liquidity risk measurement, standards and monitoring -consultative document et Strengthening the resilience of the banking sector- consultative document.
(8) Dimitri Ivanovitch Mendeleïev (1834-1907) est un chimiste russe, principalement connu pour son travail sur la classification périodique des éléments, publié en 1869.
(9) C'est à dire payables en dernier lieu en cas de liquidation de l'établissement de crédit.
(10) Au sein desquels on distingue parfois le "Upper Tier 2" et le "Lower Tier 2", toujours selon l'idée d'une classification en termes de liquidité.
(11) Le droit français parle de "valeurs mobilières donnant accès au capital" (C. com., art. L. 228-91 N° Lexbase : L8336GQS et s.)
(12) Ici bas, les prêts participatifs de l'article L. 313-13 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L7977HB3) et les titres participatifs des articles L. 228-36 (N° Lexbase : L6211AIU) et suivants du Code de commerce.
(13) Simplement, ces actifs devaient :
- être libres de gage, subordonnés et intégralement libérés ;
- avoir une échéance initiale d'au moins deux ans ;
- ne pas être remboursable avant la date convenue, sauf accord de l'autorité de contrôle ;
- et être assujettie à une clause de verrouillage (lock-in), stipulant que ni les intérêts ni le principal ne seront payés (même à échéance) si l'exécution du paiement doit entraîner une chute ou un maintien des fonds propres de la banque au-dessous de son exigence minimale.
(14) En proposant une liste de quatorze critères précis.
(15) De fait, l'ajustement règlementaire constitue l'élément négatif des fonds propres.
(16) Une composante du "Tier 1" donc, telle que décrite plus avant.
(17) Puissent nos lecteurs avoir l'extrême bonté de nous pardonner le recours à cet infâme néologisme.
(18) A savoir, répondant à une pure opportunité d'investissement.
(19) Le "core Tier One".
(20) Qui est l'ancien Financial Stability Forum, abrité par le G-20.
(21) Même si, de fait, en modifiant substantiellement le calcul du numérateur de ce ratio, on le modifie.
(22) Le fameux "leverage".
(23) Rien de très ardu à comprendre pourtant !
(24) Cf. Basel III : towards a safer financial system, discours de M. Jaime Caruana du 15 septembre 2010.
(25) Si tout se passe comme prévu cela va de soi : la décennie 2000 a connu deux crises financières, nul ne peut dire ce qu'il en sera de la présente. Le calendrier prévu figure en annexe du communiqué de presse du 12 septembre 2010, publié par le Groupe des gouverneurs de banque centrale et de responsables du contrôle bancaire :

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Pénal

[Manifestations à venir] Troisièmes rencontres de droit pénal : le nomadisme criminel dans l'espace judiciaire européen

Lecture: 1 min

N0946BQ4

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Le 07 Octobre 2010

Depuis l'année 2009, la Commission Pénale du Barreau de Marseille organise régulièrement à la Maison de l'Avocat des rencontres entre pénalistes pour provoquer la réflexion sur des thèmes majeurs du droit pénal et sur des sujets de société. Ces rencontres permettent de diffuser les idées propres à faire évoluer le système judiciaire vers une plus grande prise en compte des droits de la défense. Les troisièmes rencontres, qui auront lieu le 4 octobre 2010, proposent une réflexion ouverte sur le nomadisme criminel dans l'espace judiciaire européen. L'harmonisation des législations européennes : un véritable espace judiciaire ? Le mandat d'arrêt européen : un instrument efficace ? Ce sont notamment à ces questions que s'efforceront de répondre les différents intervenants.
  • Programme

Le nomadisme criminel dans l'espace judiciaire européen
Présentation du sujet par Maître Davide Ferrarini, Avocat au Barreau de Marseille

L'actualité du système judiciaire européen
Par Monsieur le Bâtonnier Dominique Mattei

La répression du trafic de stupéfiants et le délit de l'association de malfaiteurs

- En Espagne, par Maître Joan Merelo, Avocat au Barreau de Barcelone
- En Italie, par Monsieur le Bâtonnier Stefano Savi, Bâtonnier du Barreau de Gênes
- En France, par Maître Fabrice Giletta, Avocat au Barreau de Marseille

Table ronde :

L'avancement de l'harmonisation des législations européennes est-elle vraiment envisageable ?
Le mandat d'arrêt européen : un instrument efficace ?

- Monsieur Dominique Mattei, Bâtonnier du Barreau de Marseille
- Monsieur Jacques Dallest, Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance de Marseille
- Monsieur le Sénateur Gianrico Carofiglio, Procureur Adjoint à la Direction anti-mafia du district de Bari
- Monsieur Stefano Savi, Bâtonnier Barreau de Gênes
- Monsieur Joan Merelo, Avocat au Barreau de Barcelone
- Monsieur Luc Febbraro, Avocat au Barreau d'Aix en Provence

  • Date

Lundi 4 octobre 2010
16h00-19h00

  • Lieu

Maison de l'Avocat
Salle Albert Haddad
51 rue grignan
13006 Marseille

  • Renseignements

www.barreau-marseille.avocat.fr
E-mail : SAO@barreau-marseille.avocat.fr
Télécopie : 04 91 55 02 10.

newsid:400946

Internet

[Manifestations à venir] L'ADIJ fête ses 40 ans à Paris sur le thème "Générations numériques"

Lecture: 3 min

N0371BQS

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Le 07 Octobre 2010

L'Association pour le développement de l'informatique juridique (ADIJ), en partenariat avec l'Ordre des avocats de Paris et sous le haut patronage de Madame Michèle Alliot-Marie, ministre d'Etat, Garde des Sceaux, ministre de la Justice et des Libertés, célébrera ses 40 ans d'informatique juridique et de droit des technologies sur le thème "Générations numériques" le 30 septembre 2010 de 9 heures à 19 heures à la Maison du Barreau à Paris. Les technologies font partie intégrante de notre société, de notre quotidien, et les Jeunes de moins de 40 ans sont nés dans un environnement numérique qui fonde une génération dite "numérique" ; l'ADIJ, association de juristes s'étant penchée sur le berceau des technologies dès 1970, a su accompagner les révolutions technologiques et numériques de ses analyses, de ses alertes, de sa prospective et apporter, ainsi, un éclairage savant et sage tant à la société civile qu'au monde du droit. Une cinquantaine d'experts vont travailler en mode prospectif le 30 septembre pour fêter les 40 ans de cette association dynamique ! - Programme :

8h30 : accueil des participants.

9h00 - 9h30 : allocutions d'ouverture

Madame Christiane Féral-Schuhl, Présidente de l'ADIJ

Monsieur Jean Castelain, Bâtonnier du Barreau de Paris

Monsieur Alex Türk, Président de la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés - CNIL

9h30 - 10h45 : séance plénière d'ouverture par la Section Jeunes de l'ADIJ

(Auditorium) Madame Karima Ben Abdelmalek, Juriste d'entreprise, et Madame Anne-Charlotte Gros, Avocat au Barreau de Paris

"La nouvelle génération est-elle responsable de son futur numérique?"

Les jeunes au coeur des nouveaux modèles économiques, les bouleversements des relations sociales, de la vie professionnelle et de la vie privée :

Présidente de séance : Madame Michèle Côme, Vice-présidente de l'ADIJ

TABLE RONDE animée par Monsieur David Abiker, journaliste et écrivain

Monsieur Pierre-Yves Gautier, Professeur à l'Université de Paris II

Monsieur Stéphane Roussel, Directeur des Ressources Humaines de Vivendi

Monsieur Yoram Elkaïm, Directeur juridique de Google "Southern and Eastern Europe, Middle East and Africa"

Monsieur Jérémie Zimmerman, co-fondateur de "la Quadrature du Net"

11h15 - 13h00 : réunion des ateliers.

Salle 1 Atelier Droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information

(Auditorium) co-animé par Madame Sophie Soubelet-Caroit, avocat au Barreau de Paris, et Monsieur Antoine LatreilleProfesseur à l'Université Paris Sud 11

La lutte contre la contrefaçon sur l'internet au plan européen et international : Madame Agnès Robin, Maître de Conférences à la Faculté de Droit de Montpellier, Responsable du Master 2 Créations immatérielles ;

Essai d'analyse rétrospective et prospective sur la propriété littéraire et artistique à l'ère du numérique : Monsieur Xavier Strubel, Professeur de Droit, Directeur du Département DEFI, TELECOM Ecole de Management ;

La numérisation des oeuvres : Madame Marie Anne Gallot Le Lorier, avocat au Barreau de Paris, Cabinet NGO & Associés ;
L'évaluation des préjudices en droit d'auteur : Madame Sandrine Le Mao, Conseil technique en évaluation de préjudice et Monsieur Claude Bodeau, expert judiciaire en Informatique et Techniques Associées

Salle 2 Atelier Dématérialisation et paiement électronique

(Monnerville) co-animé par Monsieur Philippe Bazin, avocat au Barreau de Rouen, Cabinet Emo Hebert & Associés, et Madame Cathie-Rosalie Joly, avocat au Barreau de Paris, Cabinet ULYS

La dématérialisation du travail collégial au sein d'une cour administrative d'appel : une expérience réussie : Monsieur Bruno Martin Laprade, Conseiller d'Etat, Président de la cour administrative d'appel de Paris

Le paiement en ligne et la fraude aux moyens de paiement : Madame Myriam Quémener, avocat général à la cour d'appel de Versailles et Monsieur François Wallon, expert en informatique agréé par la Cour de cassation

13h00 - 14h30 : buffet dans les Salons de Harlay, Maison du Barreau.

14h30 - 16h30 : réunion des ateliers.

Salle 1 Atelier Ressources humaines et données personnelles

(Auditorium) co-animé par Madame Christine Baudoin, avocat au Barreau de Paris, Cabinet LMT Avocats, spécialiste en droit social, et Madame Nicole Turbé-Suetens, expert européen et consultante en nouvelles technologies, avec la participation de Madame Nathalie Métallinos, juriste d'entreprise et de Monsieur Guillaume Desgens-Pasanau, avocat au Barreau des Hauts-de-Seine, Ernst & Young Société d'Avocats, ancien chef du service juridique de la CNIL, co-responsables de l'Atelier Protection des Données Personnelles de l'ADIJ

L'évaluation des salariés et la protection des données personnelles : Madame Sophie Nerbonne, Directrice adjointe des affaires juridiques et de l'expertise, CNIL

Ressources humaines et données personnelles : Monsieur Jean-Emmanuel Ray, Professeur à l'université de

Paris I (Panthéon-Sorbonne) et à l'Institut d'Etudes Politiques de Paris - Monsieur Jean-Paul Bouchet,

secrétaire général CFDT Cadres

Le transfert international des données relatives aux salariés : Monsieur Sylvain Germain, Directeur administratif et financier BARD France

Salle 2 Atelier Nouvelles technologies en droit public

(Monnerville) animé par Madame Danièle Véret, avocat au Barreau de Paris

La réutilisation des données publiques, l'accès du citoyen aux données de l'administration, le respect des droits

de propriété intellectuelle des auteurs privés, la valorisation du droit de reproduction : quelles implications

juridiques ?

Monsieur Flavien Errera, chef de projet à l'Agence du patrimoine immatériel de l'Etat

Monsieur Samuel Frédéric Servière, consultant à l'IFRAP - Institut Français pour la Recherche sur les

Administrations et les Politiques Publiques

Monsieur Patrice Platel, Responsable du portail d'accès aux informations publiques au SGG

16h45 - 17h : projection de la vidéo réalisée par la Section Jeunes de l'ADIJ (Auditorium).

17h - 18h 30 Séance plénière de clôture (Auditorium)

Synthèse et perspectives des ateliers de la journée

Président de séance : Monsieur Pascal Petitcollot, Vice-Président de l'ADIJ, Secrétariat Général du Gouvernement - Services du Premier Ministre, Rédacteur en chef de Légifrance

Les responsables des ateliers de la journée tireront les conclusions des débats qu'ils ont animés, évoqueront les perspectives de leurs domaines respectifs et dresseront ensemble la feuille de route de l'ADIJ pour l'avenir.

19h00 Cocktail de clôture

Lieu :

Maison du Barreau - 2/4, Rue de Harlay, 75001 Paris.

Renseignements et inscriptions :

coordination-adij@feral-avocats.com

newsid:400371

Contrats administratifs

[Doctrine] Chronique de droit interne des contrats publics - Septembre 2010

Lecture: 13 min

N0973BQ4

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par François Brenet, Professeur de droit public à l'Université Paris VIII Vincennes Saint-Denis

Le 28 Décembre 2011

Lexbase Hebdo - édition publique vous propose, cette semaine, de retrouver la chronique d'actualité de droit interne des contrats publics, rédigée par François Brenet, Professeur de droit public à l'Université Paris VIII Vincennes Saint-Denis et Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition publique. Au sommaire de cette chronique, tout d'abord, un arrêt rendu le 23 juillet 2010 par le Conseil d'Etat aux termes duquel l'urgence qui s'attache à la réalisation du projet envisagé est au nombre des motifs d'intérêt général pouvant justifier la passation d'un contrat de partenariat (CE 2° et 7° s-s-r., 23 juillet 2010, n° 326544 et n° 326545, publié au Recueil Lebon). Ensuite, un arrêt rendu par la cour administrative d'appel de Bordeaux, le 1er juillet 2010, énonce que l'annulation d'un acte détachable d'un contrat administratif ne se traduit pas obligatoirement par une remise en cause systématique et catégorique du contrat administratif auquel il se rattache (CAA Bordeaux, 4ème ch., 1er juillet 2010, n° 08BX01968, inédit au recueil Lebon). Enfin, dans la troisième décision ici commentée, la cour administrative d'appel de Paris, faisant application de la célèbre jurisprudence "Commune de Béziers", dit pour droit que la violation des obligations de publicité et de mise en concurrence est de nature à justifier la nullité de la convention concernée (CAA Paris, 6ème ch., 2 juillet 2010, n° 07PA02268, inédit au recueil Lebon).
  • Contrat de partenariat : l'épilogue de l'affaire du collège de Villemandeur (CE 2° et 7° s-s-r., 23 juillet 2010, n° 326544 et n° 326545, publié au Recueil Lebon N° Lexbase : A9939E4U)

Nul doute que l'arrêt rendu le 23 juillet 2010 par le Conseil d'Etat concernant la technique du contrat de partenariat pour la construction et la maintenance du collège de Villemandeur, à la suite du recours du conseil général du Loiret, ne manquera pas d'attirer l'attention. Il faut dire qu'il constitue l'épilogue d'un feuilleton judiciaire dont les deux précédents épisodes ont soufflé le chaud et le froid sur le contrat de partenariat (1), contrat dont l'on sait qu'il n'a pas connu le succès escompté, comme n'a pas manqué de le rappeler M. Nicolas Boulouis dans ses conclusions (que nous remercions pour leur aimable communication).

En 2006, le département du Loiret avait fait figure de précurseur en décidant d'utiliser le "nouveau" contrat de partenariat crée par l'ordonnance du 17 juin 2004 (ordonnance n° 2004-559, relative au contrat de partenariat N° Lexbase : L2584DZQ), afin de faire construire et entretenir un nouveau collège. Cette décision faisait suite à un appel d'offres qui avait été déclaré infructueux. Non contents de ce choix, M. X et le syndicat national des entreprises du second oeuvre du bâtiment avaient porté le fer devant le tribunal administratif d'Orléans, qui par un jugement du 29 avril 2008 avait annulé la délibération du 14 avril 2006 par laquelle la commission permanente du conseil général du Loiret avait attribué le contrat à la société X. Ce jugement avait fait grand bruit, car sa lecture est intervenue au moment même où les parlementaires étaient en train de débattre du texte de la future loi du 28 juillet 2008, relative aux contrats de partenariat (loi n° 2008-735 du 28 juillet 2008 N° Lexbase : L7307IAU), laquelle visait clairement à faciliter le recours à ce type de contrats en établissant une présomption d'urgence sectorielle (qui ne l'était assurément pas, comme le Conseil constitutionnel le jugera par la suite (2)), et en établissant une nouvelle hypothèse de recours au contrat de partenariat reposant sur le bilan avantageux. Les juges orléanais ont, en effet, considéré que l'urgence du projet n'était pas constituée et que le département du Loiret ne pouvait donc pas légalement utiliser la formule alternative du contrat de partenariat. Saisie en appel, la cour administrative d'appel a annulé le premier jugement en considérant que l'urgence du projet était belle et bien caractérisée. L'arrêt du Conseil d'Etat valide cette dernière solution et ne présente du point de vue de l'affaire du collège de Villemandeur qu'un intérêt limité puisque ledit établissement a bien été construit et a accueilli ses premiers élèves à la rentrée 2007. Il reste que la décision du 23 juillet 2010 apporte un certain nombre de précisions qui ne manqueront pas de servir de curseur aux juges du fond qui, à l'avenir, pourraient être saisis de contentieux portant sur les conditions d'éligibilité d'un projet au contrat de partenariat.

Le premier enseignement que l'on doit tirer de l'arrêt du Conseil d'Etat est relatif à la notion d'urgence. C'est, en effet, cette dernière qui avait divisé les juges nantais et orléanais et la réponse du juge de cassation était donc attendue. Sans remonter trop loin dans l'historique du contrat de partenariat, l'on se souvient que cette condition est née de la décision du Conseil constitutionnel du 26 juin 2003 (3). Parce qu'il déroge au droit commun de la commande publique, le contrat de partenariat ne peut être conclu que lorsqu'un motif d'intérêt général le justifie, motif qui peut constituer précisément en l'urgence qu'il peut y avoir, "en raison de circonstances particulières ou locales, à rattraper un retard préjudiciable". Comme il y était tenu, le Gouvernement a repris la réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel dans le texte de l'ordonnance du 17 juin 2004. Dans sa version initiale, applicable au litige dont avait à connaître le Conseil d'Etat, ladite ordonnance se contentait d'exiger que le projet "présente un caractère d'urgence". Malgré cet énoncé épuré, il n'a jamais fait aucun doute que cette condition d'urgence devait être interprétée et appliquée à la lumière des précisions formulées par le juge constitutionnel. C'est ce que le Conseil d'Etat avait déjà jugé dans son arrêt du 29 octobre 2004 (4), et c'est ce qu'il confirme dans la présente espèce en jugeant que, "sous réserve qu'elle résulte objectivement, dans un secteur ou une zone géographique déterminés de la nécessité de rattraper un retard particulièrement grave, préjudiciable à l'intérêt général, affectant la réalisation d'équipements collectifs ou l'exercice d'une mission de service public, qu'elles qu'en soient les causes, l'urgence qui s'attache à la réalisation du projet envisagé est au nombre des motifs d'intérêt général pouvant justifier la passation d'un contrat de partenariat".

Mais par cette formule, la Haute juridiction fait bien davantage que de confirmer sa jurisprudence antérieure. Elle règle, en effet, une question non résolue jusque là et résidant précisément dans le point de savoir si le retard à rattraper peut être le fait de la collectivité publique. Autrement dit, une personne publique peut-elle légalement se fonder sur l'urgence à rattraper un retard lorsqu'il apparaît, en réalité, qu'elle en est à l'origine, soit parce qu'elle n'a jamais pris les décisions qui s'imposaient (décision de ne pas construire un nouveau collège afin de faire face à l'augmentation prévisible du nombre d'élèves et au mauvais état des collèges existants), soit parce qu'elle a pris une mauvaise décision (décision de construire un collège dans une zone où sa présence n'était pas une priorité, par exemple) ? Le Conseil indique clairement, dans le présent arrêt, que l'urgence peut être constituée alors même qu'elle est la conséquence de l'impéritie de la personne publique et qu'il n'appartient aucunement, au juge administratif, de s'interroger sur les causes du retard.

Enfin, le Conseil précise l'articulation entre les conditions relatives à l'urgence du projet et à son caractère avantageux. Comme cela a déjà été souligné, l'affaire du collège de Villemandeur tombait sous le coup des dispositions de l'ordonnance du 17 juin 2004 avant sa modification par la loi du 28 juillet 2008. C'est dire qu'il fallait respecter deux conditions cumulatives pour conclure un contrat de partenariat, la première tenant au caractère urgent ou complexe du projet (ces deux conditions étant alternatives), et la seconde tenant à la réalisation d'une évaluation préalable exposant les motifs ayant conduit la personne publique à opter pour le contrat de partenariat par rapport à d'autres contrats de la commande publique et exposant la condition d'éligibilité retenue (urgence ou complexité). La loi du 28 juillet 2008 a modifié cet agencement en faisant glisser la seconde au même rang que la première, de telle sorte qu'il suffit désormais d'apporter la preuve, toujours en réalisant une évaluation préalable, du caractère urgent, complexe ou avantageux du projet pour prétendre recourir au contrat de partenariat. La question qui se posait, en l'espèce, était celle de savoir s'il appartenait à la collectivité publique désireuse de conclure un contrat de partenariat d'apporter la preuve de l'urgence du projet et de son bilan avantageux par rapport aux autres contrats de la commande publique. Comme le relevait M. Nicolas Boulouis, la question n'a plus de sens depuis l'intervention de la loi du 28 juillet 2008, puisqu'il suffit désormais de satisfaire à l'une ou à l'autre pour justifier de l'éligibilité d'un projet. Il n'en demeure pas moins qu'elle présente un intérêt car elle renseigne sur la portée juridique de l'évaluation préalable. Faut-il considérer que l'évaluation préalable se résume à une exigence formelle dont l'objet est simplement de faire état des motifs du choix opéré ou, au contraire, une condition de fond imposant de démontrer, et non plus seulement de présenter, les avantages du recours au contrat de partenariat ? Le Conseil d'Etat opte clairement pour la première solution en n'exigeant pas de la cour administrative d'appel qu'elle prenne soin de vérifier le gain de temps procuré par le contrat de partenariat par rapport aux autres contrats de la commande publique.

  • La théorie des actes détachables et ses conséquences : une application de la jurisprudence "IRD" (CAA Bordeaux, 4ème ch., 1er juillet 2010, n° 08BX01968, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A1321E8G)

Le contentieux des contrats administratifs connait une période de mutation sans précédent et il est aujourd'hui difficile, pour ne pas dire impossible, de déterminer l'ampleur des changements à intervenir, et encore moins de dire quand le balancier va s'immobiliser. Dans ce flot continuel d'instabilité, il est, cependant, possible d'identifier quelques lignes de force dont l'une d'entre elles est la volonté très nette du juge administratif de concilier, autant que faire ce peut, les exigences du principe de légalité avec celles de la sécurité juridique.

C'est ce qu'illustre, après bien d'autres décisions, l'arrêt rendu par la cour administrative d'appel de Bordeaux le 1er juillet 2010. Celui-ci témoigne de ce que si, l'annulation d'un acte détachable d'un contrat administratif n'a plus nécessairement un effet platonique comme le dénonçait Romieu en 1905, elle ne se traduit pas non plus par une remise en cause systématique et catégorique du contrat administratif auquel il se rattache. C'est au terme d'une sorte de bilan coûts-avantages que le juge administratif détermine les conséquences à tirer de l'annulation d'un acte détachable et il ne s'interdit donc pas, soit de remettre en cause le contrat, soit, au contraire, de le valider. Dans l'affaire jugée par la cour administrative d'appel de Bordeaux, un conseil syndical avait confié la gestion du service public de la distribution d'eau à la société X et autorisé son président à signer la convention afférente. Seulement, le président du syndicat avait omis d'exposer au syndicat les motifs l'ayant conduit à retenir ladite société. Il avait, ainsi, clairement violé les dispositions de l'article L. 1411-5 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L3849HWH), lequel dispose que "l'autorité habilitée à signer la convention engage librement toute discussion utile avec une ou des entreprises ayant présenté une offre. Elle saisit l'assemblée délibérante du choix de l'entreprise auquel elle a procédé. Elle lui transmet le rapport de la commission présentant, notamment, la liste des entreprises admises à présenter une offre et l'analyse des propositions de celles-ci, ainsi que les motifs du choix de la candidate et l'économie générale du contrat".

Malgré cette illégalité, le syndicat n'avait pas jugé bon de résilier la convention dont il était évident qu'elle était entachée de nullité, compte tenu de l'importance du vice identifié et de la nature de l'acte concerné. Un concurrent, dont l'offre n'avait pas été retenue, a alors saisi le tribunal administratif de Pau afin qu'il prononce l'annulation de la délibération et qu'il enjoigne au syndicat de résilier la convention, ou à défaut, de saisir le juge du contrat pour qu'il constate la nullité de cette convention. Curieusement, cette demande a été rejetée par les juges palois et la cour administrative d'appel de Bordeaux annule ce jugement au motif, logique, de la violation de l'article L. 1411-5 du Code général des collectivités territoriales. Le requérant avait pris soin d'assortir sa demande d'annulation de la délibération du conseil syndical d'une demande d'injonction au titre de l'article L. 911-1 du Code de justice administrative (N° Lexbase : L3329ALU), lequel énonce que "lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution".

La cour administrative d'appel de Bordeaux fait application de la désormais célèbre jurisprudence "Institut Recherche pour le Développement" ("IRD") du 10 décembre 2003 (5), aux termes de laquelle "l'annulation d'un acte détachable d'un contrat n'implique pas nécessairement la nullité dudit contrat [...] qu'il appartient au juge de l'exécution, saisi d'une demande d'un tiers d'enjoindre à une partie au contrat de saisir le juge compétent afin d'en constater la nullité, de prendre en compte la nature de l'acte annulé, ainsi que le vice dont il est entaché et de vérifier que la nullité du contrat ne portera pas, si elle est constatée, une atteinte excessive à l'intérêt général". Plus précisément, l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux reprend l'analyse en trois temps dégagée par le Conseil d'Etat. L'illégalité constatée (le défaut d'information) est en elle-même d'une gravité importante (premier temps), elle affecte un acte essentiel (la délibération autorisant l'exécutif à signer le contrat) et donc les conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement (deuxième temps).

Enfin, et c'était la nouveauté introduite par l'arrêt "IRD" (troisième temps), les juges examinent si la remise en cause de la convention est de nature à porter une atteinte excessive à l'intérêt général. En l'espèce, il est jugé que la résiliation n'est pas susceptible d'imposer au syndicat une charge indemnitaire insupportable, de même qu'il ne lui est pas impossible de prendre les mesures transitoires lui permettant de préserver la continuité du service public durant la période nécessaire à la passation d'un nouveau contrat d'affermage. Au total, la cour administrative d'appel de Bordeaux enjoint au syndicat, soit d'obtenir la résolution amiable du contrat initialement conclu, soit, à défaut, de saisir le juge du contrat dans un délai de trois mois, afin qu'il constate la nullité du contrat.

  • Une application de la jurisprudence "Commune de Béziers" : la méconnaissance des obligations de publicité et de mise en concurrence justifie la nullité du contrat (CAA Paris, 6ème ch., 2 juillet 2010, n° 07PA02268, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A1974E8M)

Dans le prolongement de la jurisprudence "Tropic" (6), qui avait autorisé les concurrents évincés à saisir le juge du contrat d'une action en contestation de validité du contrat et lui avait octroyé des pouvoirs conséquents, le Conseil d'Etat a doté, par son arrêt "Commune de Béziers" (7), le juge de plein contentieux, saisi par les parties, de pouvoirs étendus permettant d'en faire le juge d'un litige contractuel et non plus seulement d'un contrat. La liaison qui était automatiquement faite entre la découverte d'une irrégularité et le constat de la nullité du contrat était, ainsi, définitivement abandonnée au nom de la réalité contractuelle et de la sécurité juridique qui veulent que toute irrégularité ne se traduise pas nécessairement par l'anéantissement rétroactif du contrat. Mais cette jurisprudence "Commune de Béziers" a aussi laissé un certain nombre de questions en suspens. C'est donc aux juges du fond qu'il revient d'y répondre, en attendant que le cheminement naturel du contentieux ne donne l'occasion au Conseil d'Etat de fixer sa position.

De l'arrêt "Commune de Béziers", il ressort que l'annulation ou l'illégalité du contrat ne peuvent être prononcées qu'en cas d'irrégularités tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité tenant, notamment, aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement. Cette irrégularité peut être invoquée par une partie comme elle peut être soulevée d'office par le juge. L'arrêt offre, ensuite, une alternative à deux branches dont l'une est ouverte. La première branche se rapporte à l'hypothèse du contrat dont le contenu est illicite. Sont ici visés les contrats dépourvus de cause ou dotés d'une cause illicite, de même que les contrats portant sur un objet illicite (contrat comportant délégation d'une mission de police administrative, par exemple), ou encore contenant des stipulations contraires à la réglementation ou à l'ordre public (contrat comportant une clause par laquelle l'administration renonce à exercer son pouvoir de résiliation unilatérale pour motif d'intérêt général, notamment). La seconde branche de l'alternative se rapporte à l'hypothèse dans laquelle le contrat est entaché d'un vice d'une particulière gravité relatif "notamment" aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement. Sont, évidemment, concernés tous les contrats affectés d'un vice du consentement (dol, violence, erreur) ou encore les contrats conclus par une autorité incompétente (contrat conclu par un maire sans l'autorisation préalable de son conseil municipal).

Se pose ici la question de savoir si les irrégularités relatives à la procédure de choix du cocontractant entrent dans cette catégorie. Faut-il considérer qu'une irrégularité relative à la mise en concurrence préalable à l'attribution d'un contrat administratif est de nature à justifier la remise en cause du contrat ? L'arrêt "Commune de Béziers" ne répondait pas à cette interrogation majeure, alors que le Rapporteur public, M. Emmanuel Glaser, lui avait proposé de considérer que de telles irrégularités n'entraient pas, quelle que soient leur gravité, dans la liste de celles pouvant justifier l'annulation ou la déclaration d'illégalité du contrat. Au soutien de cette proposition, le Rapporteur public soutenait que ces règles procédurales visaient, avant tout, à protéger les droits des tiers et qu'il n'était pas normal de permettre à une partie d'exciper de l'illégalité du contrat en raison de la méconnaissance des règles de passation à l'occasion d'un litige relatif à son exécution pour échapper à ses obligations contractuelles. Il n'était pas certain, cependant, que le Conseil d'Etat ait complètement fait sienne cette proposition. L'utilisation de l'adverbe "notamment" ("irrégularité [...] tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement [...]") montre qu'il avait peut-être entendu ne pas trancher la question de façon définitive.

Dans l'arrêt d'espèce du 2 juillet 2010, la cour administrative d'appel de Paris apporte un début de réponse en indiquant clairement que la violation des obligations de publicité et de mise en concurrence (violation qui découlait, en l'espèce, de la requalification d'un bail emphytéotique en marché public) est de nature à justifier la nullité de la convention concernée. Il va de soi que cet arrêt n'a pas vocation à fixer l'état du droit et qu'il faut attendre, pour cela, une prise de position du Conseil d'Etat. En attendant, l'on ne peut qu'y souscrire car une illégalité aussi grave que la méconnaissance des obligations de publicité et de mise en concurrence doit de toute évidence justifier une remise en cause radicale du contrat, sauf si un motif d'intérêt général s'y oppose (8).


(1) TA Orléans, 29 avril 2008, n° 0604132 (N° Lexbase : A8857D8K), AJDA, 2008, p.1203, note J.-D. Dreyfus, BJCP 2008, p. 199, concl. G. Borot, obs. P. Terneyre, Contrats Marchés publ., 2008, comm. 123, note G. Eckert, Dr. adm. 2008, comm. 92, note F. Melleray, JCP éd. A, 2008, 2171, note G. Terrien et V. Cochi ; CAA Nantes, 4ème ch., 23 janvier 2009, n° 08NT01579 (N° Lexbase : A2817EDP), AJDA, 2009, p. 779, note J.-D. Dreyfus, BJCP, 2009, p. 158, obs. R. Vandermeren, Contrats Marchés publ., 2009, comm. 80.
(2) Cons. const., décision n° 2008-567 DC du 24 juillet 2008 (N° Lexbase : A7893D99).
(3) Cons. const., décision n° 2003-473 DC du 26 juin 2003 (N° Lexbase : A9631C89).
(4) CE, Sect., 29 octobre 2004, n° 269814 (N° Lexbase : A6635DD4), Rec. CE, p. 393, concl. D. Casas, AJDA, 2004, p. 2383, chron. C. Landais et F. Lénica.
(5) CE 5° et 7° s-s-r., 10 décembre 2003, n° 248950 (N° Lexbase : A4046DA4).
(6) CE, Ass, 16 juillet 2007, n° 291545 (N° Lexbase : A4715DXW), Rec. CE, p.360, concl. D. Casas, AJDA, 2007, p. 1577, chron. C. Landais et F. Lénica, GAJA, n° 117 (et les références citées).
(7) CE, Ass, 28 décembre 2009, n° 304802 (N° Lexbase : A0493EQC), AJDA, 2010, p. 142, chron. S.-J. Liéber et D. Botteghi, Contrats Marchés publ., 2010, repère 2, F. Llorens et P. Soler Couteaux, comm. 85, JCP éd. A, 2010, 2072, comm. F. Linditch.
(8) CE 5° et 7° s-s-r., 10 décembre 2003, n° 248950, préc..

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Procédure civile

[Chronique] La chronique de procédure civile d'Etienne Vergès, Professeur à l'Université de Grenoble - Septembre 2010

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Le 07 Octobre 2010

Lexbase Hebdo - édition privée générale vous propose, cette semaine, de retrouver la chronique d'actualité en procédure civile réalisée par Etienne Vergès, agrégé des facultés de droit et Professeur à l'Université de Grenoble II. L'auteur a d'abord choisi de revenir sur un avis rendu par la Cour de cassation le 4 mai 2010, qui apporte des précisions fort utiles concernant la date d'introduction de l'instance, lorsqu'une demande est présentée par assignation. Ce sont, ensuite, deux arrêts rendus début juillet par la première chambre civile qui ont retenu l'attention de l'auteur : la première décision, en date du 8 juillet 2010, fait application du principe de l'estoppel en matière d'arbitrage ; la seconde, rendue le 1er juillet 2010, poursuit le mouvement jurisprudentiel du principe de concentration de moyens, combiné avec l'autorité de la chose jugée. I - Les notions fondamentales du procès : la notion d'instance et l'introduction de l'instance
  • Lorsqu'une demande est présentée par assignation, la date d'introduction de l'instance doit s'entendre de la date de cette assignation, à condition qu'elle soit remise au secrétariat-greffe (Cass. avis n° 0100002P du 4 mai 2010 [LXB=A9178E9S])

Dans la précédente chronique du mois d'avril (1), nous abordions la délicate question de la délimitation des contours de la notion d'instance. Une nouvelle fois, la jurisprudence nous donne l'occasion de nous pencher sur ce concept théorique mais dont les conséquences pratiques sont nombreuses et importantes.

C'est un avis rendu par la Cour de cassation qui vient donner une précision très utile sur le début de l'instance et plus précisément sa date d'introduction.

En l'espèce, un époux avait introduit une requête en divorce. Le Code de procédure civile (C. pr. civ., art. 1108 N° Lexbase : L1618H4P) prévoit que la procédure débute par une tentative de conciliation. A l'issue de cette conciliation, le juge peut prononcer une ordonnance de non-conciliation qui autorise les époux à introduire l'instance en divorce par voie d'assignation. L'article 1113 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1638H4G) précise alors que l'instance doit être introduite dans les trente mois par l'un des époux, sous peine de caducité de la procédure de conciliation. On sait par ailleurs que l'assignation doit être signifiée à la partie adverse, puis qu'une copie doit être remise au secrétariat-greffe de la juridiction. On parle ici d'enrôlement de l'assignation (2).

Toute cette procédure est bien connue des professionnels de la justice et des amateurs de droit processuel. La question qui se pose traditionnellement est celle de savoir si l'instance est introduite par la signification de l'assignation ou par la remise de la copie au secrétariat-greffe. Le Code de procédure civile conserve toute son ambiguïté puisqu'il indique, à l'article 53 (N° Lexbase : L1227H49), que la "demande initiale [...] introduit l'instance" (3). A première vue, c'est l'enrôlement qui emporte saisine de la juridiction (4) et l'on pourrait être tenté de considérer que l'instance est introduite au moment où la juridiction est saisie (5). Cette solution a d'ailleurs parfois été retenue en matière de prescription (6).

Comme l'indiquait très justement le conseiller rapporteur dans l'arrêt étudié (7), il est important de distinguer deux éléments essentiels de la procédure contentieuse. Le premier concerne la saisine de la juridiction, qui confie une mission à la justice (participer à la conduite du procès et trancher le litige). Le second concerne l'avertissement de l'adversaire (8) et dépend intimement du principe du contradictoire. La question se pose alors de savoir si l'ouverture de l'instance doit être rattachée à la saisine de la juridiction, à la délivrance de l'assignation, ou à la réunion de ces deux formalités.

Trois solutions sont alors envisageables :

- soit on retient la signification de l'assignation comme acte introductif d'instance ;

- soit, au contraire, l'instance est introduite au jour de l'enrôlement ;

- soit, enfin, on considère que la combinaison des deux formalités marque l'introduction de l'instance, mais que l'enrôlement emporte introduction rétroactive au jour de la signification.

En se conformant à l'avis de l'avocat général, la Cour de cassation a rendu un avis tenant compte de la dualité des fonctions de l'introduction de l'instance (appel des parties et saisine de la juridiction). Elle considère que "lorsqu'une demande est présentée par assignation, la date d'introduction de l'instance doit s'entendre de la date de cette assignation", mais elle précise que l'introduction de l'instance ne peut avoir lieu qu'à la condition que l'assignation "soit remise au secrétariat-greffe". C'est donc la troisième option qui a été retenue. L'instance n'est introduite que par la réunion des deux formalités, la seconde produisant un effet rétroactif d'ouverture de l'instance à la date de la première.

La solution est favorable au demandeur puisqu'elle permet d'avancer la date d'introduction de l'instance et réduit le risque d'encourir caducité ou prescription.

II - Les principes de la procédure

A - La vivacité de l'estoppel et du principe de loyauté des débats en matière d'arbitrage

  • Un tiers à la procédure d'arbitrage, qui n'est pas intervenu volontairement, ne peut, alors qu'il avait connaissance de l'instance, se contredire en demandant par la suite l'annulation de la décision arbitrale (Cass. civ. 1, 8 juillet 2010, n° 09-14.280, F-P+B+I N° Lexbase : A1242E4R)

La première chambre civile applique le principe de l'estoppel avec beaucoup de dynamisme malgré son admission réservée par l'Assemblée plénière de la Cour de cassation (9). Le domaine de l'arbitrage fait ainsi figure de domaine d'application privilégié de l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui.

En remontant le temps, on se souvient que, dans un premier arrêt du 6 juillet 2005 (10), la Cour de cassation avait considéré qu'une partie ayant formé une demande d'arbitrage et participé, sans réserve, durant neuf années à la procédure d'arbitrage, était "irrecevable, en vertu de la règle de l'estoppel" à invoquer devant la juridiction française, saisie d'une demande d'exequatur, la nullité de la convention d'arbitrage.

Dans un arrêt du 6 mai 2009 (11), la même chambre civile se fondait sur le principe de loyauté procédurale entre les parties pour qualifier d'estoppel, l'attitude d'un liquidateur qui avait refusé de participer à une procédure d'arbitrage dont il avait connaissance pour s'en plaindre en formant un appel contre la décision ordonnant l'exequatur de la sentence arbitrale. Cette décision était contestée en doctrine (12), mais elle avait le mérite de rapprocher l'estoppel du principe de loyauté des débats.

Dans un arrêt du 3 février 2010 (13), la première chambre civile rendait une décision intéressante sur deux points. D'une part, la Cour donnait une définition positive de l'estoppel décrit comme "le changement de position en droit d'un plaideur de nature à induire son adversaire en erreur sur ses intentions". D'autre part, la Haute juridiction considérait que le plaideur -qui a contesté la recevabilité d'une demande devant un arbitre, puis signé le procès-verbal d'audience, pour invoquer une nouvelle fois l'irrecevabilité de la demande dans une procédure d'annulation de la sentence arbitrale- n'usait pas de l'estoppel. Il n'y avait effectivement aucune contradiction à invoquer l'irrecevabilité d'une demande devant l'arbitre puis dans l'exercice d'une voie de recours. La Cour de cassation précise ainsi progressivement les limites de l'estoppel.

La première chambre civile vient de rendre un nouvel arrêt le 8 juillet 2010 (14) dans lequel elle poursuit sans défaillir son travail d'implantation de l'estoppel dans la procédure française et particulièrement en matière d'arbitrage.

En l'espèce, un conflit opposait une société marocaine à la société française France Q. à propos de la résiliation unilatérale de deux contrats d'installation de restaurants Q. au Maroc. Les contrats avaient été conclus avec une société marocaine dont le conseil d'administration était présidé par M. X. Une action fut intentée par la société marocaine devant un tribunal arbitral qui jugea que les contrats avaient été résiliés à bon droit. Cette décision fit l'objet d'un recours en annulation par M. X, lequel n'avait pas été partie en première instance. Ce dernier considérait que la sentence arbitrale était contraire à l'ordre public international, car le tribunal avait statué sur la résiliation de contrats auxquels M. X était personnellement partie, sans qu'il ait été régulièrement appelé à l'instance pour faire valoir ses droits.

La situation devenait complexe, puisque M. X se plaignait de n'avoir pas été appelé à une instance à laquelle il avait indirectement participé en sa qualité de président du conseil d'administration de la société demanderesse.

La première chambre civile n'a pas été trompée par la manoeuvre et elle a considéré que le "président du conseil d'administration qui n'a pas jugé utile d'intervenir à la procédure à titre personnel, ne peut, sans se contredire au préjudice de la société défenderesse et violer ainsi le principe de la loyauté des débats, soutenir, devant le juge de l'annulation, que la reconnaissance et l'exécution de la sentence sont contraires à l'ordre public international du fait de l'absence de mise en cause" de sa propre personne.

La décision associe une nouvelle fois l'estoppel au principe de loyauté procédurale. En étant bien attentif, on constate que la première chambre civile n'utilise pas explicitement le terme "estoppel", mais elle évoque l'attitude du plaideur qui se contredit au détriment de son adversaire. Cette posture procédurale correspond précisément au changement de position visant à induire l'adversaire en erreur. On se trouve bien dans le cadre de l'estoppel tel qu'il a été défini dans l'arrêt du 3 février 2010.

Ce faisant, la première chambre civile s'écarte de la jurisprudence plus restrictive et mesurée de l'Assemblée plénière sur l'estoppel. En effet, on se souvient que, dans son arrêt du 27 février 2009, l'Assemblée plénière avait soumis le jeu de l'estoppel à une triple identité : action de même nature, fondée sur le même objet et réunissant les mêmes parties.

A l'évidence, ces trois conditions ne sont pas réunies dans l'arrêt puisque le plaideur auquel la Cour de cassation oppose l'estoppel n'a pas été partie en première instance. La première chambre civile adopte donc une acception plus souple de l'estoppel. Elle rejoint les deux conditions qu'il nous semblait opportun de retenir dans notre précédente chronique (15) : un plaideur qui crée une apparence trompeuse dans le but de causer un préjudice procédural à un adversaire. Telle est bien la définition retenue dans l'arrêt du 3 février 2010 et mise en application dans celui du 8 juillet 2010.

Toutefois, la question demeure de savoir si l'on peut opposer l'estoppel à un plaideur qui volontairement n'a pas été partie à la première instance. Cette solution a fait l'objet de vives critiques (16) et elle a le mérite de souligner que l'estoppel est un concept dont les contours sont encore mal définis en droit français. Il en va ainsi d'un certain nombre de principes généraux de la procédure. Ainsi, le très classique principe de l'autorité de la chose jugée conserve, encore aujourd'hui, sa part de mystère. Comment espérer que le principe émergent de loyauté et son corollaire, l'estoppel, accèdent si rapidement à la clarté et la précision exigée par certains ?

B - Autorité de la chose jugée et principe de concentration, l'évolution de la jurisprudence

  • Il appartient au défendeur de présenter dès l'instance initiale l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à justifier le rejet total ou partiel de la demande, même si le plaideur invoque, en réalité, deux prétention distinctes ! (Cass. civ. 1, 1er juillet 2010, n° 09-10.364, F-P+B+I N° Lexbase : A5810E3L)

Depuis le célèbre arrêt d'Assemblée plénière "Cesareo" du 7 juillet 2006 (17), la Cour de cassation précisait la notion d'identité des causes et consacrait, dans le même temps, le principe de concentration des moyens, selon lequel, "il incombe au demandeur de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci". Depuis cette décision, la Cour de cassation n'a pas cessé d'étendre le champ d'application du principe, modifiant en substance la définition de l'autorité de la chose jugée, mais portant également atteinte aux principes directeurs du procès. Cette chronique à pour but de présenter quelques éléments marquants de l'évolution contemporaine de la jurisprudence sur le principe de concentration et de porter une appréciation critique sur cette évolution.

Dans un arrêt du 13 février 2008, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a étendu le principe de concentration des moyens au défendeur (18). Il s'agissait, en l'espèce, d'une contestation portant sur l'exécution d'un contrat de "réservation" d'un immeuble. Pour refuser d'exécuter le contrat et de conclure la vente, le défendeur avait invoqué le préjudice qui résultait d'une baisse sensible du prix de l'immeuble. Cette défense ayant échoué, le défendeur exerça, par la suite, une nouvelle action en justice, cette fois en rescision pour lésion. La Cour de cassation affirma alors qu'"il incombait à la défenderesse à l'action en régularisation forcée de la vente de présenter dès cette instance l'ensemble des moyens qu'elle estimait de nature à faire échec à la demande en invoquant notamment la lésion, fondement juridique qu'elle s'était abstenue de présenter en temps utile, de sorte que l'action en rescision se heurtait à l'autorité de la chose jugée".

Dans un arrêt du 28 mai 2008, auquel il a été donné la plus grande publicité (19), la première chambre civile inventait un principe de "concentration des demandes fondées sur la même cause". Dans cette affaire, un franchisé avait rompu son contrat et avait violé la clause qui lui interdisait durant un an de se réaffilier à un réseau de franchise concurrent. Dans un premier procès, le franchiseur agissait en responsabilité pour obtenir la dépose de la nouvelle enseigne de son ancien franchisé. Dans un second procès, le franchiseur sollicitait, cette fois, des dommages et intérêts. L'objet du second litige était nettement distinct de celui du premier, mais la Cour de cassation considéra qu'"il incombe au demandeur de présenter dans la même instance toutes les demandes fondées sur la même cause et qu'il ne peut invoquer dans une instance postérieure un fondement juridique qu'il s'était abstenu de soulever en temps utile".

La solution est éminemment critiquable. Elle consiste à nier le rôle des parties dans la définition du champ de saisine du juge (20), mais également à dénaturer le concept d'identité d'objet lié au principe d'autorité de la chose jugée. La première chambre civile a souhaité privilégier une efficacité procédurale radicale au détriment des droits des parties, mais également de l'équilibre aménagé par les auteurs du Code de procédure civile. Si l'on ajoute que la notion de cause du litige baigne dans un flou profond, qui n'a pas été dissipé par l'Assemblée plénière, on peut demeurer plus que perplexe à l'égard de la position prise par la première chambre civile.

La question s'est posée, par la suite, de savoir comment appréhender le principe de concentration en présence d'un changement de circonstances. La Cour de cassation a, d'abord, été confrontée à l'apparition d'un fait nouveau. Dans un arrêt du 25 avril 2007 (21), la troisième chambre civile a opportunément jugé que l'autorité de la chose jugée ne peut être opposée lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice. En d'autres termes, une partie peut légitimement agir une seconde fois pour soumettre au juge une demande déjà tranchée mais fondée sur un moyen de fait nouveau, car inconnu durant le premier procès. Dans cette hypothèse, l'objet du litige est identique, mais la cause est différente. La Cour de cassation a, ensuite, été confrontée à l'apparition d'une règle de droit nouvelle. Dans un arrêt du 24 septembre 2009 (22) la première chambre civile a jugé que l'apparition d'une nouvelle règle de droit (en l'espèce un revirement de jurisprudence) ne permettait pas au demandeur d'invoquer une nouvelle fois en justice sa demande en se fondant sur un moyen de droit qui lui était favorable et qui était inconnu (des parties et du juge) au cours du premier procès. Si elle contribue un peu plus à éloigner la cause de l'autorité de la chose jugée, cette décision n'en est pas moins critiquable puisqu'elle empêche un justiciable d'invoquer une règle de droit qu'il lui était impossible d'invoquer lors du premier procès puisqu'elle n'existait pas encore. La concentration des moyens appliquée de façon radicale conduit à des solutions absurdes.

C'est dans ce contexte qu'est intervenu un dernier arrêt de la première chambre civile du 1er juillet 2010 (23), qui, sous couvert d'une application conventionnelle du principe de concentration des moyens, poursuit le mouvement d'extension vers un principe de concentration des demandes. En l'espèce, deux époux s'étaient portés caution d'une société de fruits et légumes qui avaient fait l'objet d'une liquidation judiciaire. La banque créancière de la société avait donc agi contre les cautions pour obtenir le paiement des crédits contractés par la société liquidée. Lors d'un premier procès, les époux cautions s'étaient défendus en discutant la validité et la portée de leur engagement. Ils furent tout de même condamnés au paiement des sommes réclamées par la banque. Par la suite, les cautions intentèrent une action en responsabilité contre la banque au cours d'un second procès. Les époux reprochaient à l'établissement de crédit d'avoir commis un certain nombre de négligences, lesquelles avaient été à l'origine de la mise en oeuvre de l'action contre eux. Cette action fut jugée irrecevable par la cour d'appel en raison de l'autorité de la chose jugée frappant le jugement rendu au cours du premier procès.

Dans leur pourvoi, les cautions reprochaient à la cour d'appel d'avoir mis en oeuvre l'autorité de la chose jugée alors que les deux procès ne portaient pas sur le même objet. En effet, le premier procès portait sur une somme due par les cautions à la banque. Le second procès concernait, quant à lui, une somme due par la banque aux cautions. Si une compensation pouvait s'opérer entre ces deux sommes, il était évident que l'objet du litige était différent dans les deux procès. Le raisonnement de la cour d'appel était étrange. Elle reprochait aux époux cautions de n'avoir pas formé de demande reconventionnelle contre la banque tirée du comportement fautif de cette dernière. Le raisonnement avait de quoi surprendre, puisque le défendeur, s'il a la liberté de former une demande reconventionnelle, n'en a pas l'obligation. Si l'article 4 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1113H4Y) prévoit que "l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties", c'est non seulement pour interdire au juge de statuer au-delà de ce qui lui est demandé, mais également pour permettre aux parties de circonscrire le procès à une fraction du litige. Mais rien n'empêche une partie, qui a limité sa demande ou sa défense au cours d'un premier procès, de formuler cette demande plus tard, au cours d'un autre procès. L'autorité de la chose jugée ne porte que sur la "chose" qui a été jugée, c'est-à-dire, la prétention alléguée par une partie et tranchée par le juge. La chose jugée correspond bien à l'objet du litige. Tout objet qui n'a pas été tranché peut être soumis en justice. Il en va non seulement de l'équité procédurale, mais surtout de la logique inhérente au procès, telle qu'elle a été voulue par les rédacteurs du code. Le procès civil moderne n'est pas simplement une suite de règles de procédure. Il a été pensé comme un système cohérent.

C'est ce que semble avoir oublié la première chambre civile de la Cour de cassation en rejetant le pourvoi. Elle affirme "attendu qu'il appartenait aux consorts X de présenter dès l'instance initiale l'ensemble des moyens qu'ils estimaient de nature à justifier le rejet total ou partiel de la demande ; qu'ayant relevé que, poursuivis en exécution de leurs engagements de caution, les consorts X n'avaient développé lors de l'instance initiale que des contestations relatives à la validité et à la portée de ces engagements sans faire valoir que la banque avait engagé sa responsabilité civile à leur égard et devait être condamnée à leur payer des dommages-intérêts qui viendraient en compensation avec les condamnations prononcées à leur encontre, la cour d'appel en a exactement déduit qu'était irrecevable la demande dont elle était saisie, qui ne tendait qu'à remettre en cause, par un nouveau moyen qui n'avait pas été formé en temps utile".

En apparence, l'arrêt n'est qu'une application scolaire de la jurisprudence de l'Assemblée plénière. En réalité, il n'en est rien. La Cour de cassation affirme, d'abord, que les défendeurs avaient l'obligation de présenter dès l'instance initiale l'ensemble des moyens de nature à justifier le rejet de la demande. C'est, ici, l'expression stricte du principe de concentration des moyens. C'est d'ailleurs ce que les cautions ont fait. Les époux ont contesté la validité et la portée de leur engagement, deux moyens de nature à faire échec à la demande. Ils ont ainsi pleinement rempli leur obligation. La Haute juridiction reproche, ensuite, aux cautions de n'avoir développé que des "contestations relatives à la validité et portée de leur engagement". Le terme de "contestations" n'a pas de signification en procédure. Les parties développent des prétentions et des moyens, mais pas de contestations. Les mots ont un sens, car les prétentions définissent l'objet du litige, alors que les moyens définissent la cause. Si l'arrêt "Cesareo" a détruit partiellement la conception théorique de la cause, fort heureusement, il n'a pas touché l'objet de litige. La première chambre civile s'est, quant à elle, attaquée à détruire également la notion d'objet du litige. Elle poursuit cette oeuvre en considérant que deux prétentions distinctes concernant les créances qui peuvent se compenser constituent simplement deux moyens distincts liés à une prétention unique : la compensation. Il s'agit là d'un raccourci peu approprié et on mesure bien la philosophie qui sous-tend ce raisonnement : obliger les parties à invoquer au cours du même procès tous les moyens, mais également toutes les prétentions qui peuvent graviter autour de leurs relations conflictuelles. Il est effectivement plus pratique pour une juridiction de vider l'ensemble des différends dans un même procès.

Bientôt, un voisin condamné à des dommages-intérêt pour trouble anormal de voisinage en raison de son coq chanteur se verra opposer l'autorité de la chose jugée pour n'avoir pas invoqué au cours d'un premier procès le trouble causé par l'autre voisin en raison d'une tondeuse bruyante. En définitive, toutes les dettes d'argent se compensent. La cause est donc la même !

A trop rechercher l'efficacité dans la conduite de la justice, on finit par perdre la logique, mais également l'équité de la procédure. Faire ainsi usage de l'autorité de la chose jugée à tort et à travers expose immanquablement la France à un risque de condamnation devant la CEDH pour violation du droit d'accès à la justice.

Etienne Vergès, Professeur à l'Université de Grenoble II


(1) Lire La chronique de procédure civile d'Etienne Vergès, Professeur à l'Université de Grenoble II - Avril 2010, Lexbase Hebdo n° 390 du 8 avril 2010 - édition privée générale (N° Lexbase : N7337BN3).
(2) Cf. not. S. Guichard, F. Ferrand, C. Chainais, Procédure civile, droit interne et droit communautaire, 29ème éd., 2008, n° 984.
(3) Cf. L. Cadiet et E. Jeuland qui soulignent l'ambiguïté de cette disposition. Selon ces auteurs, "l'instance n'est véritablement introduite que par la saisine du juge", Droit judiciaire privé, Litec, 6ème éd., 2009, n° 550.
(4) C. pr. civ., art. 838 (N° Lexbase : L0778H4L).
(5) En ce sens, Cass. civ. 2, 26 juin 2003, n° 01-14.317, FP-P+B (N° Lexbase : A9739C89), Bull. civ. II, n° 211, dans lequel la Cour affirme que "fait une exacte application des articles 757 (N° Lexbase : L4953GUY) et 1113, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, une cour d'appel qui, pour constater la caducité des mesures provisoires, relève que le juge aux affaires familiales n'a pas été saisi dans le délai de six mois par la remise, au secrétariat-greffe, d'une copie de l'assignation".
(6) Cass. com., 18 décembre 1984, n° 83-10.664 (N° Lexbase : A2388AAP), Bull. n° 356. Cf., toutefois, contra, Cass. civ. 3, 15 mai 2002, n° 00-22.175, FS-P+B (N° Lexbase : A6611AYI), D., 2002, p. 2499, note Atias, mais ce dernier arrêt évoque l'exercice de l'action et non l'introduction de l'instance.
(7) Rapport de M. Alt, Conseiller référendaire.
(8) "En lui donnant rendez-vous devant le juge" poursuit le conseiller référendaire, ibid.
(9) Voir La chronique de procédure civile d'Etienne Vergès, Professeur à l'Université de Grenoble II - mars 2009, Lexbase Hebdo n° 344 du 2 avril 2009 - édition privée générale (N° Lexbase : N9948BIB) et Ass. plén., 27 février 2009, n° 07-19.841, P+B+R+I N° Lexbase : A3925EDQ) : JCP éd. G, 2009, II, 10073, note P. Callé ; JCP éd. G, 2009, I, 142, n° 7, obs. Y.-M. Serinet ; D., 2009, p. 1245, note D. Houtcieff ; Dr. et proc., 2009, p. 263, note M. Douchy-Oudot ; LPA, 13 mai 2009, p. 7, avis M. de Gouttes ; Gaz. Pal., 2009, 1, p. 1261, note T. Janville.
(10) Cass. civ. 1, 6 juillet 2005, n° 01-15.912, FS-P+B (N° Lexbase : A8785DI9), Bull., I, n° 302, D. 2006, Jur. p. 1424, obs. E. Agostini ; RTDCom., 2006, p. 309, obs. E. Loquin ; Revue des contrats, 1er octobre 2006, n° 4, p. 1279, note B. Fauvarque-Cosson ; Revue arbitrage, 2005, 993, note Ph. Pinsolle.
(11) Cass. civ. 1, 6 mai 2009, n° 08-10.281, FS-P+B+I (N° Lexbase : A7526EGT).
(12) G. Bolard, La première chambre civile, entre estoppel superflu et suspension des poursuites individuelles, JCP éd. G, 2009, 534.
(13) Cass. civ. 1, 3 février 2010, n° 08-21288, FS-P+B+I (N° Lexbase : A2062ERS), JCP éd. G, 2010, 626, note D. Houtcieff.
(14) Cass. civ. 1, 8 juillet 2010, n° 09-14.280, F-P+B+I, D., 2010, p. 1886, note X. Delpech.
(15) Voir La chronique de procédure civile d'Etienne Vergès, Professeur à l'Université de Grenoble II - mars 2009, Lexbase Hebdo n° 344 du 2 avril 2009 - édition privée générale, préc..
(16) Cf. G. Bolard préc..
(17) Ass. plén., 7 juillet 2006, n° 04-10.672, P+B+R+I (N° Lexbase : A4261DQU), Bull. ass. plén. 2006, n° 8 ; JCP éd. G, 2006, I, 183, n° 15, obs. S. Amrani-Mekki ; JCP éd. G, 2007, II, 10070, note G. Wiederkehr ; Procédures, 2006, repère 9, obs. H. Croze ; Procédures, 2006, comm. 201, obs. R. Perrot ; D., 2006, p. 2135, note L. Weiller ; RTDciv., 2006, p. 825, obs. R. Perrot ; Rev. Huissiers, 2006, p. 348, obs. N. Fricéro.
(18) Cass. civ. 3, 13 février 2008, n° 06-22.093, FS-P+B+I N° Lexbase : A9239D4X) ; Bull. civ. 2008, III, n° 28.
(19) Cass. civ. 1, 28 mai 2008, n° 07-13.266, FS-P+B+I (N° Lexbase : A7685D87), JCP éd. G, 2008, II, 10170, note. G. Bollard.
(20) Cf., notamment, les critiques de G. Bolard préc..
(21) Cass. civ. 3, 25 avril 2007, n° 06-10.662, FS-P+B (N° Lexbase : A0267DWS), D., 2007, IR, p. 1344 ; Procédures, 2007, comm. 158, obs. R. Perrot.
(22) Cass. civ. 1, 24 septembre 2009, n° 08-10.517, FS P+B (N° Lexbase : A3400ELI), JCP éd. G, 2009, p. 401, note C. Bléry.
(23) Cass. civ. 1, 1er juillet 2010, n° 09-10.364, F-P+B+I (N° Lexbase : A5810E3L), JCP éd. G, 2010, 785, note à paraître Yves-Marie Serinet.

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Procédure

[Textes] La procédure de dématérialisation devant les juridictions du fond

Réf. : Décret n° 2010-434 du 29 avril 2010, relatif à la communication par voie électronique en matière de procédure civile (N° Lexbase : L0190IHI) et arrêté du 5 mai 2010 (N° Lexbase : L3316IKZ)

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par Cédric Tahri, Directeur de l'Institut Rochelais de Formation Juridique (IRFJ), Chargé d'enseignement à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV

Le 04 Janvier 2011

Après la dématérialisation de la procédure devant la Cour de cassation (1), la Chancellerie a décidé de s'attaquer à la dématérialisation de la procédure civile devant les juridictions du fond (2). Prévisible, cette évolution est le fruit d'un partenariat avec le Conseil national des barreaux (CNB) qui a fait oeuvre de propositions en la matière. En effet, le ministère de la Justice et le CNB ont signé, le 16 juin 2010, le renouvellement de la convention cadre nationale du 28 septembre 2007 organisant l'usage des nouvelles technologies dans le débat judiciaire entre juridictions et avocats, tant en matière civile que pénale. Par cette signature, ils ont rappelé leur implication et manifesté leur volonté commune de poursuivre le développement des échanges par voie électronique et la dématérialisation des procédures dans l'objectif d'apporter à l'ensemble des acteurs de cette communication un gain de temps, une diminution des déplacements, une accélération de la transmission des informations, et une meilleure gestion des affaires. Il faut dire que la dématérialisation de la procédure présente de nombreux avantages. D'abord, le justiciable peut espérer que son dossier soit traité plus rapidement et de manière plus transparente. Ensuite, l'avocat réduit considérablement ses allées et venues au Palais ; il n'est plus contraint par les horaires d'ouverture des greffes. Le magistrat, quant à lui, dispose d'un accès permanent au dossier et à ses pièces sans avoir à passer par le rapporteur de l'affaire. Enfin, les tâches d'accueil et de renseignement du greffe vers les avocats sont allégées puisque les avocats peuvent consulter via e-barreau l'intégralité des informations concernant leur dossier. Autant dire que la communication par voie électronique permet de redonner du temps utile à tous les professionnels du droit concernés. Mais cette évolution vers le "tout numérique" suscite des interrogations, voire même des inquiétudes par certains de ses aspects. D'une part, la dématérialisation trouve ses limites pour les procédures dans lesquelles l'oralité des débats prévaut. D'autre part, cette "révolution culturelle" (3) nécessite un profond changement des pratiques professionnelles.

Aussi, examinerons-nous successivement la dématérialisation de la procédure civile devant les juridictions du premier (I) et du second degré (II).

I - La procédure dématérialisée devant les juridictions du premier degré

Depuis le 1er janvier 2008, tous les tribunaux de grande instance sont équipés en matériel de numérisation. Cependant, les textes réglementaires récents clarifient les modalités d'établissement (A) et de transmission (B) des actes dématérialisés devant les juridictions du premier degré.

A - L'établissement des actes dématérialisés

La lettre du décret du 29 avril 2010. Le décret n° 2010-434 du 29 avril 2010, relatif à la communication par voie électronique en matière de procédure civile, précise que "vaut signature, pour l'application des dispositions du code de procédure civile aux actes que les auxiliaires de justice assistant ou représentant les parties notifient ou remettent à l'occasion des procédures suivies devant les juridictions des premier et second degrés, l'identification réalisée, lors de la transmission par voie électronique, selon les modalités prévues par les arrêtés ministériels pris en application de l'article 748-6 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L8588IAC)". Autrement dit, l'identification de l'auxiliaire de justice réalisée lors de la transmission par voie électronique (RPVA), selon les modalités prévues par arrêté du Garde des Sceaux, ministre de la Justice et des Libertés, vaut signature.

L'esprit du décret du 29 avril 2010. Adoptées sur proposition du Conseil national des barreaux, les dispositions du décret sont opportunes car les textes antérieurs ne régissent que la transmission des actes de procédure et non leur établissement qui, en vertu des règles de procédure, doit nécessairement s'accompagner d'une signature. Applicables jusqu'au 31 décembre 2014, elles assurent la mise en oeuvre du dispositif avec les règles de procédure, dans l'attente de l'adaptation des applications métiers des juridictions leur permettant de lire la signature électronique apposée au moyen de dispositifs sécurisés de création électronique, telle que prévue au sens du décret n° 2001-272 du 30 mars 2001 pris pour l'application de l'article 1316-4 du Code civil (N° Lexbase : L0630ANN) et relatif à la signature électronique (N° Lexbase : L1813ASX).

B - La transmission des actes dématérialisés

L'arrêté du 7 avril 2009. Devant le tribunal de grande instance, la communication par voie électronique des actes de procédure est prévue par les articles 748-1 (N° Lexbase : L8378IAK) à 748-6 du Code de procédure civile, entrés en vigueur le 1er janvier 2009. Ces dispositions sont précisées par l'arrêté du 7 avril 2009, relatif à la communication par voie électronique devant les tribunaux de grande instance (N° Lexbase : L0193IEU).

Ce dernier fixe les garanties auxquelles devront répondre les envois, remises et notifications de ces actes, des pièces, avis, avertissements ou convocations, des rapports, des procès-verbaux ainsi que des copies et expéditions revêtues de la formule exécutoire des décisions juridictionnelles, "lorsqu'ils sont effectués par voie électronique entre avocats ou entre un avocat et la juridiction, dans le cadre d'une procédure devant le tribunal de grande instance". L'arrêté généralise ainsi à l'ensemble des tribunaux de grande instance l'application des dispositions relatives aux procédés techniques propres à garantir la fiabilité et la sécurité de ces échanges dématérialisés (4), qui avait d'ores et déjà été mises en oeuvre de manière anticipée devant 68 tribunaux de grande instance par l'arrêté du 25 septembre 2008.

Le "ComCi TGI". Le système de communication électronique mis à disposition des agents du ministère de la Justice chargés du traitement et de l'exploitation des informations recueillies ou expédiées par la voie électronique, conformément aux dispositions de l'article 748-1 du Code de procédure civile, est un système d'information fondé sur les procédés techniques d'une messagerie automatisée dénommé "ComCi TGI", composante de l'application informatique de la chaîne civile "WinCi TGI", adossée sur le réseau privé virtuel justice (RPVJ). Son accès est contrôlé par un identifiant strictement personnel (5).

Le RPVA. L'accès des avocats au système de communication électronique mis à disposition des juridictions se fait par l'utilisation d'un procédé de raccordement à un réseau indépendant privé opéré sous la responsabilité du Conseil national des barreaux, dénommé "réseau privé virtuel avocat" (RPVA). Le contrôle de l'accès des avocats au RPVA fait l'objet d'une procédure d'habilitation au moyen d'une application informatique hébergée par une plate-forme de services de communication électronique sécurisée dénommée "e-barreau". Cette plate-forme est opérée par un prestataire de services de confiance qualifié, agissant sous la responsabilité du Conseil national des barreaux. Le RPVA dispose d'un point de terminaison sécurisé autorisant une interconnexion avec le RPVJ. L'interconnexion entre les points de terminaison sécurisés du RPVA et du RPVJ est opérée par un prestataire de services de confiance du Conseil national des barreaux.

A noter, enfin, que les courriers électroniques expédiés par les agents habilités de la juridiction ou les avocats, ainsi que le journal de l'historique des échanges, sont enregistrés et conservés au moyen de dispositifs de stockage mis à disposition de chaque juridiction.

II - La procédure dématérialisée devant les juridictions du second degré

Le décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009, relatif à la procédure d'appel avec représentation obligatoire en matière civile (N° Lexbase : L0292IGW) (A) et l'arrêté du 5 mai 2010 relatif à la communication par voie électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d'appel (B), introduisent la dématérialisation des procédures et fixent les modalités de communication et de transmission électroniques des actes.

A - La procédure d'appel avec représentation obligatoire

Le décret du 9 décembre 2009. Le décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009, relatif à la procédure d'appel avec représentation obligatoire en matière civile, met en oeuvre un grand nombre des préconisations du rapport sur "la célérité et la qualité de la Justice devant la cour d'appel", remis par le Premier Président Magendie au Garde des Sceaux, ministre de la Justice, le 23 juin 2008.

L'obligation de communication par voie électronique. S'agissant de la dématérialisation de la procédure, le texte envisage le cas où un acte ne peut être transmis par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l'accomplit. Ainsi, le nouvel article 748-7 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L0423IGR) pose que "lorsqu'un acte doit être accompli avant l'expiration d'un délai et ne peut être transmis par voie électronique le dernier jour du délai pour une cause étrangère à celui qui l'accomplit, le délai est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant". Cette disposition, qui sécurise les échanges par voie électronique devant l'ensemble des juridictions, est d'application immédiate. En revanche, les autres dispositions relatives à la communication électronique entreront en vigueur à une date fixée par un arrêté du Garde des Sceaux à paraître ou au plus tard au 1er janvier 2013. Parmi elles, se trouve le nouvel article 930-1 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L0362IGI) (6). Selon ce texte, les actes de procédure doivent être remis à la cour d'appel par voie électronique "à peine d'irrecevabilité relevée d'office". Lorsqu'un acte ne peut être transmis par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l'accomplit, il est établi sur support papier et remis au greffe. En ce cas, la déclaration d'appel est remise au greffe en autant d'exemplaires qu'il y a de parties destinataires, plus deux. La remise est constatée par la mention de sa date et le visa du greffier sur chaque exemplaire, dont l'un est immédiatement restitué. Du reste, l'article 930-1 indique que les avis, avertissements ou convocations sont remis aux avoués des parties par voie électronique, sauf impossibilité pour cause étrangère à l'expéditeur.

B - Les procédures d'appel sans représentation obligatoire

La valse des arrêtés. L'arrêté du 5 mai 2010 relatif à la communication par voie électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d'appel encadre et organise les modalités pratiques liées aux communications effectués par voie électronique entre avocats ou entre un avocat et la juridiction du second degré. Il annule et remplace l'arrêté du 14 décembre 2009 publié six mois plus tôt !

Le contenu de l'arrêté. L'arrêté du 5 mai 2010 dispose que les actes dématérialisés doivent répondre à certaines garanties. Ces garanties concernent la forme des actes de procédure remis par voie électronique (format des fichiers notamment), la sécurité et la fiabilité du système (accès à l'application informatique, procédure d'habilitation), l'identification des parties à la communication électronique (dispositif d'identification, certificat électronique) ainsi que la sécurité des transmissions (confidentialité des informations communiquées).

Le "ComCi CA". Les articles 7 et 8 de l'arrêté indiquent que le système de communication électronique mis à disposition des agents du ministère de la justice chargés du traitement et de l'exploitation des informations recueillies ou expédiées par la voie électronique, conformément aux dispositions de l'article 748-1 du Code de procédure civile, est un système d'information fondé sur les procédés techniques d'une messagerie automatisée, dénommé "ComCi CA", composante de l'application informatique de la chaîne civile "WinCi CA", adossée sur le réseau privé virtuel justice (RPVJ). Son accès est contrôlé par un identifiant strictement personnel. Par ailleurs, lorsqu'un courrier électronique est émis par un service de la cour d'appel et a pour destinataire un auxiliaire de justice, l'utilisateur est authentifié et le courriel mis en forme par "WinCi CA" (7). Le dispositif mis en place présente donc toutes les garanties de fiabilité et de sécurité.

Dès lors, faut-il avoir peur de cette évolution vers le "tout numérique" ? Telle est la question que l'on peut légitimement se poser au terme de cette étude. Un éminent processualiste a écrit : "Avec l'arrivée de la communication électronique, la pratique procédurale deviendra l'utilisation d'un système de traitement automatisé d'informations. On assistera à une substitution de protocoles, le protocole juridique étant contaminé, si ce n'est absorbé, par le protocole informatique. La réglementation procédurale aura des allures de manuel d'utilisation d'un logiciel et les 'décrets de toilette' auxquels les processualistes s'étaient habitués seront remplacés par des mises à jour" (8). Sans doute ne faut-il pas être aussi alarmiste. Certes, la technique informatique bouscule la technique procédurale. Mais c'est vite oublier que le droit a la formidable capacité de s'adapter aux défis de son temps...


(1) La première signification dématérialisée d'un arrêt de la Cour de cassation a été réalisée le 3 décembre 2009. V. l'arrêté du 17 juin 2008 portant application anticipée pour la procédure devant la Cour de cassation des dispositions relatives à la communication par voie électronique (N° Lexbase : L0432INC). Ce texte met en oeuvre l'article 88 du décret n° 2005-1678 du 28 décembre 2005 relatif à la procédure civile, à certaines procédures d'exécution et à la procédure de changement de nom (N° Lexbase : L3298HEU).
(2) Pour la dématérialisation de la procédure pénale, v. décret n° 2007-1388, 26 septembre 2007 (N° Lexbase : L5422HYH), JCP éd. G, 2007, act. 433 ; décret n° 2007-1620, 15 novembre 2007 (N° Lexbase : L2972H3H), JCP éd. G, 2007, act. 570 ; JCP éd. G, 2008, act. 73 ; JCP éd. G, 2008, act. 91.
(3) V. G. Didier et G. Sabatier, Dématérialisation des procédures : une révolution culturelle est nécessaire, JCP éd. G, 2008, I, 118.
(4) Le fonctionnement des échanges sur deux réseaux privés virtuels, le RPVJ et le RPVA, donc en dehors d'Internet, évite toute intrusion de la part de personnes extérieures au système et non autorisées. Il préserve le secret professionnel de l'avocat.
(5) Les fonctions de sécurité du réseau privé virtuel justice (RPVJ) sont spécifiées par l'arrêté du 31 juillet 2000 portant création d'un traitement automatisé d'informations nominatives pour l'ensemble des agents du ministère de la justice relatif à la diffusion interne d'informations au titre de la communication ministérielle (N° Lexbase : L0433IND).
(6) De manière dérogatoire, l'article 15 du décret précise que les dispositions de l'article 930-1 du Code de procédure civile ne sont applicables qu'aux déclarations d'appel et aux constitutions d'avoué afférentes aux appels formés à compter du 1er janvier 2011.
(7) Au 1er juin 2010, l'ensemble des greffes des cours d'appel sont équipés du logiciel communiquant avec "e-barreau".
(8) V. H. Croze, Le progrès technique de la procédure civile, JCP éd. G, 2009, I, 108.

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Hygiène et sécurité

[Textes] L'ANI sur le harcèlement et la violence au travail du 26 mars 2010

Réf. : Arrêté du 23 juillet 2010, portant extension d'un accord national interprofessionnel sur le harcèlement et la violence au travail du 26 mars 2010 (N° Lexbase : L9690IMT)

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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen et Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Protection sociale"

Le 07 Octobre 2010

Le ministre de l'Emploi a, en application de l'article L. 2261-15 du Code du travail (N° Lexbase : L2443H9D) rendu obligatoire l'accord national interprofessionnel sur le harcèlement et la violence au travail du 26 mars 2010 (1), lequel transpose l'accord européen du 15 décembre 2006 sur le harcèlement et la violence au travail. L'ANI du 26 mars 2010 s'inscrit dans une longue série de développements judiciaires et doctrinaux (2), de normes internationales, communautaires (3) et de droit interne (légales (4), conventionnelles), signe finalement assez inquiétant que la multiplication des normes internationales, européennes ou internes ne parvient pas à endiguer, contenir, maitriser un phénomène récurrent et croissant en entreprise, lié aux risques psycho-sociaux. En particulier, l'ANI du 26 mars 2010 participe d'un réseau de normes conventionnelles déjà riche et dense, aussi bien au plan national et interprofessionnel (accord européen du 26 avril 2007 sur la violence et le harcèlement au travail (5) ; accord national interprofessionnel sur le stress au travail du 2 juillet 2008 (6)), qu'au plan des branches ou des entreprises (7) (par exemple, accord Gdf-Suez du 18 février 2010, sur la prévention des risques psychosociaux par l'amélioration de la qualité de vie au travail (8)). Les partenaires sociaux rappellent que les employeurs et salariés ont un intérêt mutuel à traiter, notamment par la mise en place d'actions de prévention, le harcèlement et la violence au travail, qui peuvent avoir de graves conséquences sur les personnes et sont susceptibles de nuire à la performance de l'entreprise et de ses salariés. L'ANI complète la démarche initiée par l'ANI du 2 juillet 2008 sur le stress au travail (signé le 24 novembre 2008) dont les dispositions abordent les aspects organisationnels, les conditions et l'environnement de travail. Il vise à identifier, à prévenir et à gérer deux aspects spécifiques des risques psycho-sociaux : le harcèlement et la violence au travail. L'accord traite des formes de harcèlement et de violence au travail qui ressortent de la compétence des partenaires sociaux. Classiquement, l'ANI définit l'objet des comportements interdits (I), fixe un objectif de prévention et gestion des agissements de harcèlement et de violence au travail (II) et enfin propose un ensemble de sanctions (III).
Résumé

L'ANI a pour objectifs d'améliorer la sensibilisation, la compréhension et la prise de conscience des employeurs, des salariés et de leurs représentants à l'égard du harcèlement et de la violence au travail afin de mieux prévenir ces phénomènes, les réduire et les éliminer ; d'apporter aux employeurs, aux salariés et à leurs représentants, à tous les niveaux, un cadre concret pour l'identification, la prévention et la gestion des problèmes de harcèlement et de violence au travail.

L'ANI propose une définition des risques psycho-sociaux (harcèlement, violence au travail), rappelle les engagements des employeurs et des salariés, et fixe des objectifs de prévention et un régime de sanctions.

I - Définition des risques psycho-sociaux couverts par l'ANI du 26 mars 2010

A - Définition légale et contentieuse

Pour le législateur, le harcèlement moral se définit comme une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité (C. trav., art. L. 1152-1 N° Lexbase : L0724H9P). La Cour de cassation (9) neutralise l'élément intentionnel dans la définition du harcèlement. Le harcèlement moral est constitué, indépendamment de l'intention de son auteur, dès lors que sont caractérisés des agissements répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de travail.

Les agissements répréhensibles dégagés par la jurisprudence sont très variables : fait pour l'employeur d'affecter la salariée dans un local exigu, sans outils de travail ni chauffage décent, de l'isoler des autres salariés de l'entreprise et de mettre en doute son équilibre psychologique (10) ; fait de modifier délibérément des heures de présence, d'empêcher le salarié d'accéder à son lieu de travail, de le priver de ses salaires irrégulièrement, de lui faire des reproches injustifiés ou réflexions désobligeantes (11) ; la succession de procédures de licenciement exercées à l'encontre de la salariée caractérisant un acharnement de l'employeur à l'égard d'une salariée protégée (12).

B - Définition conventionnelle

1 - ANI du 26 mars 2010

Les partenaires sociaux (ANI 26 mars 2010, préambule) ont, légitimement, exposé la variété des comportements interdits, en mettant en avant le fait que le harcèlement et la violence au travail peuvent prendre différentes formes, susceptibles d'être d'ordre physique, psychologique et/ou sexuel ; consister en incidents ponctuels ou en comportements systématiques ; être exercés entre collègues, entre supérieurs et subordonnés, ou par des tiers tels que clients, consommateurs, patients, élèves, etc. ; aller de cas mineurs de manque de respect à des agissements plus graves, y compris des délits, exigeant l'intervention des pouvoirs publics. Certaines catégories de salariés et certaines activités sont plus exposées que d'autres, notamment, s'agissant des agressions externes, les salariés qui sont en contact avec le public. Néanmoins, dans la pratique, tous les lieux de travail et tous les salariés ne sont pas affectés.

Les partenaires sociaux (art. 2) proposent une définition (13) du harcèlement et de la violence au travail, comme les comportements inacceptables d'un ou de plusieurs individus, prenant des formes différentes (physiques, psychologiques, sexuelles), dont certaines sont plus facilement identifiables que d'autres. L'environnement de travail peut avoir une influence sur l'exposition des personnes au harcèlement et à la violence.

Le harcèlement survient lorsqu'un ou plusieurs salariés font l'objet d'abus, de menaces et/ou d'humiliations répétés et délibérés dans des circonstances liées au travail, soit sur les lieux de travail, soit dans des situations liées au travail (14). La violence au travail se produit lorsqu'un ou plusieurs salariés sont agressés dans des circonstances liées au travail, et se manifeste par le manque de respect, la volonté de nuire, de détruire, l'incivilité et l'agression physique. La violence au travail peut prendre la forme d'agression verbale, d'agression comportementale, notamment sexiste, d'agression physique... Le harcèlement et la violence au travail peuvent être exercés par un ou plusieurs salariés ou par des tiers avec pour but ou pour effet de porter atteinte à la dignité d'un salarié, affectant sa santé et sa sécurité et/ou créant un environnement de travail hostile.

Les partenaires sociaux, enfin, évoquent l'existence de cas particulier de harcèlement et de violence au travail. Certaines catégories de salariés peuvent être affectées plus particulièrement par le harcèlement et la violence en raison de leur origine, de leur sexe, de leur orientation sexuelle, de leur handicap, ou de la fréquence de leur relation avec le public. Les personnes potentiellement exposées à des discriminations peuvent être plus particulièrement sujettes à des situations de harcèlement ou de violence au travail. En ce qui concerne plus particulièrement les violences faites aux femmes, la persistance des stéréotypes et des tabous ainsi que la non-reconnaissance des phénomènes de harcèlement sexuel nécessitent une forte sensibilisation à tous les niveaux de la hiérarchie et la mise en place de politiques de prévention et d'accompagnement dans les entreprises.

2 - Accord-cadre européen sur le harcèlement et la violence au travail du 27 avril 2007

L'ANI du 26 mars 2010 s'écarte assez sensiblement de la définition proposée par les partenaires sociaux européens, qui s'en sont tenus à des considérations assez générales. Le harcèlement et la violence sont l'expression de comportements inacceptables adoptés par un ou plusieurs individus et peuvent revêtir de nombreuses formes, dont certaines sont plus facilement détectables que d'autres. L'exposition des personnes au harcèlement et à la violence peut aussi dépendre de l'environnement de travail. Le harcèlement survient lorsqu'un ou plusieurs travailleurs ou cadres sont à plusieurs reprises et délibérément malmenés, menacés et/ou humiliés dans des situations liées au travail. On parle de violence lorsqu'un ou plusieurs travailleurs ou cadres sont agressés dans des situations liées au travail. Le harcèlement et la violence peuvent être le fait d'un ou de plusieurs cadres ou membres du personnel, ayant pour objectif ou pour effet de porter atteinte à la dignité de la personne visée, de nuire à sa santé et/ou de créer un environnement de travail hostile.

II - Prévention et gestion des agissements de harcèlement et de violence au travail

A - Une obligation d'origine conventionnelle

1 - Principe : le salarié doit être protégé

Les partenaires sociaux (ANI 26 mars 2010, art. 3) invoquent le principe de protection absolue des salariés, qui ne doivent subir des agissements répétés de harcèlement ayant pour objet ou pour effet une dégradation de leurs conditions de travail susceptible de porter atteinte à leurs droits et à leur dignité, d'altérer leur santé physique ou mentale ou de compromettre leur avenir professionnel. De même, aucun salarié ne doit subir des agressions ou des violences dans des circonstances liées au travail, qu'il s'agisse de violence interne ou externe : la violence au travail interne est celle qui se manifeste entre les salariés, y compris le personnel d'encadrement ; la violence au travail externe est celle qui survient entre les salariés, le personnel d'encadrement et toute personne extérieure à l'entreprise présente sur le lieu de travail.

2 - Conséquence : obligation de l'employeur de prévention des agissements interdits

L'employeur doit prendre toutes les mesures nécessaires en vue de prévenir de tels agissements (ANI 26 mars 2010, art. 3). Les entreprises doivent affirmer que le harcèlement et la violence au travail ne sont pas admis. Cette position (qui peut être déclinée sous la forme d'une "charte de référence") précise les procédures à suivre si un cas survient.

Prévention des problèmes de harcèlement et de violence au travail. Les partenaires sociaux ont rappelé (ANI 26 mars 2010, art. 4) qu'une meilleure sensibilisation et une formation adaptée des responsables hiérarchiques et des salariés réduisent la probabilité des cas de survenance de harcèlement et de violence au travail. Cette sensibilisation et cette formation passent par la mobilisation des branches professionnelles qui mettront en place les outils adaptés à la situation des entreprises de leur secteur professionnel. Les mesures visant à améliorer l'organisation, les processus, les conditions et l'environnement de travail et à donner à tous les acteurs de l'entreprise des possibilités d'échanger à propos de leur travail participent à la prévention des situations de harcèlement et de violence au travail.

En cas de réorganisation, restructuration ou changement de périmètre, l'entreprise doit veiller à concevoir un environnement de travail équilibré. A cet effet, les branches professionnelles s'emploieront avec les organisations syndicales de salariés à aider les entreprises à trouver des solutions adaptées à leur secteur professionnel. Lorsqu'une situation de harcèlement ou de violence est repérée ou risque de se produire, le salarié peut recourir à la procédure d'alerte prévue en cas d'atteinte au droit des personnes.

Les acteurs de la prévention du harcèlement et de la violence au travail doivent être mobilisés : le médecin du travail joue un rôle particulier tenant au respect du secret médical tel qu'il est attaché à sa fonction et auquel il est tenu ; dans le cadre des attributions des institutions représentatives du personnel, le CHSCT agit, en lien avec le comité d'entreprise, pour la promotion de la prévention des risques professionnels dans l'établissement. Il peut notamment proposer des actions de prévention en matière de harcèlement et de violence au travail. En cas de refus de l'employeur, ce refus doit être motivé.

Identification et gestion des problèmes de harcèlement et de violence au travail. Les partenaires sociaux suggèrent la mise en place d'une procédure appropriée pour identifier, comprendre et traiter les phénomènes de harcèlement et de violence au travail. Elle sera fondée sur les éléments suivants, tels que déjà répertoriés par les partenaires sociaux européens (Accord-cadre européen sur le harcèlement et la violence au travail, 27 avril 2007, point n° 4, prec.) :

- il est dans l'intérêt de tous d'agir avec la discrétion nécessaire pour protéger la dignité et la vie privée de chacun ;

- aucune information, autre qu'anonymisée ne doit être divulguée aux parties non impliquées dans l'affaire en cause ;

- les plaintes doivent être suivies d'enquêtes et traitées sans retard ;

- toutes les parties impliquées doivent bénéficier d'une écoute impartiale et d'un traitement équitable ;

- les plaintes doivent être étayées par des informations détaillées ;

- les fausses accusations délibérées ne doivent pas être tolérées, et peuvent entraîner des mesures disciplinaires ;

- une assistance extérieure peut être utile. Elle peut notamment s'appuyer sur les services de santé au travail.

Enfin, les partenaires sociaux (ANI 26 mars 2010, art. 4) suggèrent de recourir à une procédure de médiation, mise en oeuvre par toute personne de l'entreprise s'estimant victime de harcèlement ou par la personne mise en cause. Le choix du médiateur fait l'objet d'un accord entre les parties. Le médiateur s'informe de l'état des relations entre les parties. Il tente de les concilier et leur soumet des propositions qu'il consigne par écrit en vue de mettre fin au conflit. Ce recours au médiateur est déjà visé au Code du travail (C. trav., art. L. 1152-6).

B - Une obligation d'origine légale

L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (C. trav., art. L. 1152-4 N° Lexbase : L0730H9W). Ces mesures comprennent : des actions de prévention des risques professionnels ; des actions d'information et de formation ; la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes (C. trav., art. L. 4121-1 N° Lexbase : L1448H9I).

L'employeur est tenu d'une obligation de prévention efficace (C. trav., art. L. 4121-3 N° Lexbase : L1452H9N) ; l'information et la formation de l'ensemble des acteurs de l'entreprise, notamment celle des managers ; l'amélioration des modes organisationnels et la prise en compte d'un juste équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Depuis un décret du 5 novembre 2001, modifié par le décret n° 2008-1382 du 19 décembre 2008 (N° Lexbase : L3269IC3), l'employeur a l'obligation de mettre en place un document unique d'évaluation, quelle que soit la taille et l'activité de l'entreprise, mis à jour chaque année, y compris sur les risques psychosociaux (C. trav., art. R. 4121-1 N° Lexbase : L3625ICA) et suivants). L'employeur ayant omis l'établissement ou la mise à jour du document unique s'expose à une sanction pénale : contravention de 5ème classe (1 500 euros).

C - Une obligation d'origine jurisprudentielle

L'obligation de sécurité, initialement établie par la Cour de cassation dans ses arrêts "Amiante" (15), en matière de maladie professionnelle, puis d'accident du travail, s'est étendue et élargie au harcèlement. Par deux arrêts du 3 février 2010 (16), la Cour de cassation a ainsi décidé que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité, manque à cette obligation, lorsqu'un salarié est victime sur le lieu de travail d'agissements de harcèlement moral ou sexuel (n° 08-44.019) ou de violences physiques ou morales (n° 08-40.144).

De plus, l'employeur doit mettre en place une organisation du travail qui, a minima, ne génère pas en elle-même stress, tensions et risques psycho-sociaux. Par un arrêt rendu le 5 mars 2008 (17), la Cour de cassation a rappelé à cet égard que dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a constaté que la nouvelle organisation mise en place par l'employeur, en février 2005, réduisait le nombre des salariés assurant le service de jour et entraînait l'isolement du technicien chargé d'assurer seul la surveillance et la maintenance de jour, en début de service et en fin de journée, ainsi que pendant la période estivale et à l'occasion des interventions, cet isolement augmentant les risques liés au travail dans la centrale, et que le dispositif d'assistance mis en place était insuffisant pour garantir la sécurité des salariés. Elle a pu en déduire, sans modifier l'objet du litige, que cette organisation était de nature à compromettre la santé et la sécurité des travailleurs concernés et que sa mise en oeuvre devait en être suspendue.

III - Sanctions

A - Régime légal de sanctions

Le Code pénal a prévu une incrimination, celle de harceler autrui par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. L'infraction est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende (C. pén., art. 222-33-2 N° Lexbase : L1594AZ3).

En droit du travail, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2 du Code du travail, toute disposition ou tout acte contraire est nul (C. trav., art. L. 1152-3 N° Lexbase : L0728H9T). De plus, tout salarié ayant procédé à des agissements de harcèlement moral est passible d'une sanction disciplinaire (C. trav., art. L. 1152-5 N° Lexbase : L0732H9Y).

Enfin, les faits de harcèlement moral et sexuel, définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1, sont punis d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 15 000 euros. La juridiction peut également ordonner, à titre de peine complémentaire, l'affichage du jugement aux frais de la personne condamnée dans les conditions prévues à l'article 131-35 du Code pénal (N° Lexbase : L9868GQK) et son insertion, intégrale ou par extraits, dans les journaux qu'elle désigne. Ces frais ne peuvent excéder le montant maximum de l'amende encourue (C. trav., art. L. 1155-2).

Il faut enfin relever que certaines juridictions admettent la qualification d'accident du travail à des salariés victimes de fait de harcèlement moral. La Cour de cassation a admis que la dépression nerveuse, survenue lors d'un entretien d'évaluation au cours duquel a été notifiée au salarié une rétrogradation, et survenue par le fait ou à l'occasion du travail, constitue un accident du travail (18).

B - Régime conventionnel de sanctions

1- Accord-cadre européen sur le harcèlement et la violence au travail du 27 avril 2007

De manière très générale et assez évasive, les partenaires sociaux européens ont retenu quelques grands principes (point 4). Si le harcèlement ou les actes de violence sont avérés, des mesures appropriées doivent être prises à l'égard du ou des auteurs. Ces mesures peuvent aller des sanctions disciplinaires au licenciement. La victime doit bénéficier d'un soutien et être assistée dans sa réintégration. Les employeurs, en consultation avec les travailleurs et/ou leurs représentants, établiront, réviseront et contrôleront ces procédures, afin de garantir leur efficacité à prévenir les problèmes et à les traiter s'ils surviennent malgré tout.

2 - ANI du 26 mars 2010

Les partenaires sociaux (ANI 26 mars 2010, art. 5) ont prévu que des mesures adaptées sont prises à l'égard du ou des auteurs. Le règlement intérieur précisera les sanctions applicables aux auteurs des agissements de harcèlement ou de violence.

De plus, la victime bénéficie d'un soutien et d'une aide à leur maintien, à leur retour dans l'emploi ou à leur réinsertion. Des mesures d'accompagnement prises en charge par l'entreprise sont mises en oeuvre en cas de harcèlement avéré ou de violence, pouvant porter atteinte à la santé. Celles-ci sont avant tout destinées à apporter un soutien à la victime, notamment au plan médical et psychologique.

S'agissant des agressions par des tiers, l'entreprise pourra prévoir des mesures d'accompagnement, notamment juridique, du salarié agressé. L'employeur, en concertation avec les salariés ou leurs représentants, procédera à l'examen des situations de harcèlement et de violence au travail lorsque de telles situations sont constatées, y compris au regard de l'ensemble des éléments de l'environnement de travail : comportements individuels, modes de management, relations avec la clientèle, mode de fonctionnement de l'entreprise...


(1) Le texte de l'accord susvisé a été publié au Bulletin officiel du ministère, fascicule conventions collectives n° 2010/21. Sont rendues obligatoires, pour tous les employeurs et tous les salariés compris dans son champ d'application, les dispositions de l'ANI du 26 mars 2010. L'extension des effets et sanctions de l'ANI est faite à la date de la publication de l'arrêté du 23 juillet 2010 (JO 31 juillet 2010) pour la durée restant à courir et aux conditions prévues par l'ANI. D'ailleurs, les partenaires sociaux ont prévu (art. 6) qu'à l'issue d'un délai de 2 ans suivant la publication de l'arrêté d'extension de l'accord, les partenaires sociaux se réuniront pour évaluer la mise en oeuvre de l'accord à tous les niveaux.
(2) Bibliographie abondante. V. not. L. Lerouge, La reconnaissance d'un droit à la protection de la santé mentale au travail, pref. P. Chaumette, LGDJ, bibliothèque droit social t. 40, 2005 ; Comment gérer les "nouveaux" risques psychosociaux dans l'entreprise ?... Questions à Maître C. Hammelrath, Lexbase Hebdo n° 383 du 18 février 2010 - édition sociale (N° Lexbase : N1772BNX) ; Rapport de la mission d'information sur le mal-être au travail et de la commission des affaires sociales du Sénat ; P. Nasse et P. Légeron, Rapport sur la détermination, la mesure et le suivi des risques psychosociaux au travail, 12 mars 2008. V. aussi E. Bressol, Organisations du travail et nouveaux risques pour la santé des salariés, Rapport du Conseil économique et sociale, publié in extenso sur le site internet du CES ; S. Hamon-Cholet et C. Rougerie, La charge mentale au travail : des enjeux complexes pour les salariés, Economie et statistique, n° 339-340, 2000-9/10, p. 243.
(3) La législation européenne inclut notamment les Directives suivantes : Directive 2000/43/CE du Conseil du 29 juin 2000 (N° Lexbase : L8030AUX) ; Directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 (N° Lexbase : L3822AU4) ; Directive 2002/73/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 septembre 2002 (N° Lexbase : L9630A4G) modifiant la Directive 76/207/CEE du Conseil (N° Lexbase : L9232AUH) modifiée par la Directive 2006/54/CE du 5 juillet 2006 (N° Lexbase : L4210HK7) ; Directive 89/391/CEE du Conseil du 12 juin 1989 (N° Lexbase : L9900AU9).
(4) La loi du 17 janvier 2002 (loi n° 2002-73 N° Lexbase : L1304AW9) a apporté une définition du harcèlement moral professionnel (art. 169), l'a pénalisé (art. 170), a modifié en conséquence le contenu du règlement intérieur des entreprises (art. 172), a élargi l'obligation de prévention de l'employeur à la santé mentale (art. 173), a étendu le rôle du CHSCT à la santé mentale (art. 174) et a, enfin, accordé aux médecins du travail de nouvelles compétences (art. 175). V. C. trav., article L. 4121-1 (N° Lexbase : L1448H9I).
(5) S. Martin-Cuenot, Harcèlement et violence au travail : conclusion d'un accord cadre européen, Lexbase Hebdo n° 259 du 10 mai 2007 - édition sociale (N° Lexbase : N0430BBK).
(6) S. Martin-Cuenot, Accord national interprofessionnel sur le stress au travail : entre compromis et amélioration du dispositif existant, Lexbase Hebdo n° 319 du 25 septembre 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N1924BHQ).
(7) Pour un modèle d'accord sur la prévention des risques psycho-sociaux et du stress au travail, voir (N° Lexbase : N0548BPY).
(8) Lire (N° Lexbase : N4680BNN).
(9) Cass. soc., 10 novembre 2009, n° 08-41.497, FS-P+B+R 1er et 2e moyens du pourvoi principal (N° Lexbase : A7558ENA).
(10) Cass. soc., 29 juin 2005, n° 03-44.055, F-D (N° Lexbase : A8540DI7).
(11) Cass. crim., 21 juin 2005, n° 04-86.936, F-P+F (N° Lexbase : A9438DIE).
(12) Cass. soc., 7 juillet 2009, n° 08-40.034, F-D (N° Lexbase : A7498EIK).
(13) Au sens du BIT la violence au travail s'entend de toute action, tout incident ou tout comportement qui s'écarte d'une attitude raisonnable par lesquels une personne est attaquée, menacée, lésée, ou blessée dans le cadre du travail ou du fait de son travail : la violence au travail interne est celle qui se manifeste entre les travailleurs, y compris le personnel d'encadrement ; la violence au travail externe est celle qui s'exprime entre les travailleurs (et le personnel d'encadrement) et toute personne présente sur le lieu de travail.
(14) Sur le harcèlement, cf. l’Ouvrage "Droit du travail" (N° Lexbase : E2900ETL).
(15) Cass. soc., 28 février 2002, 6 arrêts, n° 00-13.172, FP-P+B+R+I (N° Lexbase : A0610AYA).
(16) Cass. soc., 3 février 2010, 2 arrêts, n° 08-40.144, FP-P+B+R (N° Lexbase : A6060ERU) et n° 08-44.019, FP-P+B+R (N° Lexbase : A6087ERU).
(17) Ch. Radé, L'obligation de sécurité de l'employeur plus forte que le pouvoir de direction, Lexbase Hebdo n° 297 du 20 mars 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N4384BE4), note sous Cass. soc., 5 mars 2008, n° 06-45.888, FS-P+B+R (N° Lexbase : A3292D73).
(18) Cass. civ. 2, 1er juillet 2003, n° 02-30.576, FS-P (N° Lexbase : A0610C9H).

Référence

Arrêté du 23 juillet 2010, portant extension d'un accord national interprofessionnel sur le harcèlement et la violence au travail du 26 mars 2010 (N° Lexbase : L9690IMT)

Textes concernés : (néant)

Mots-clés : risques psycho sociaux - harcèlement - violence au travail - définition - engagement des employeurs et des salariés - prévention - sanctions

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Impôts locaux

[Chronique] Chronique de fiscalité locale - Septembre 2010

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par Laurence Vapaille, Maître de conférences à l'Université d'Evry-Val-d'Essonne

Le 24 Janvier 2011

Lexbase Hebdo - édition fiscale vous invite, cette semaine, à retrouver la chronique d'actualité en matière de fiscalité locale réalisée par Laurence Vapaille, Maître de conférences à l'Université d'Evry-Val-d'Essonne. La suppression de la taxe professionnelle (TP) est encore trop récente pour que les litiges à son propos soient encore tous épuisés. Ainsi dans un arrêt du 9 juillet 2010 (CE 9° et 10° s-s-r., 9 juillet 2010, n° 318309, mentionné dans les tables du recueil Lebon), le Conseil d'Etat vient confirmer une solution déjà admise en matière de détermination de la valeur locative de véhicule de tourisme pris en location. Néanmoins, il s'agissait de savoir si cette solution pouvait être remise en cause par l'application d'une réponse ministérielle sur le fondement de l'article L. 80 A du LPF (N° Lexbase : L4634ICM). Les deux autres décisions abordées dans cette chronique sont relatives à la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB). L'une porte principalement sur la détermination du débiteur en cas d'autorisation d'occupation du domaine public (CE 3° et 8° s-s-r., 23 juillet 2010, n° 320188, mentionné dans les tables du recueil Lebon) ; cette question apparaît comme non négligeable pour les finances locales. L'autre est relative à la détermination de la valeur locative des locaux commerciaux situés dans un immeuble de grande hauteur (CE 3° et 8° s-s-r., 23 juillet 2010, n° 320188, mentionné dans les tables du recueil Lebon) ; la particularité de cette catégorie d'immeubles doit être prise en compte lors du choix par l'administration de local-type en vue d'appliquer la méthode de comparaison.
  • TFPB : détermination du débiteur en cas d'autorisation d'occupation du domaine public (CE 3° et 8° s-s-r., 23 juillet 2010, n° 320188, mentionné dans les tables du recueil Lebon N° Lexbase : A9912E4U)

Cette décision de la Haute juridiction administrative, relative à la TFPB, aborde trois questions. La principale d'entre elles est de savoir quel est le débiteur au titre de la TFPB dans le cas particulier de constructions édifiées sur le domaine public. Cette question n'est pas nouvelle, cependant elle n'est que rarement en jeu d'où l'intérêt de cet arrêt (2). Quant aux deux autres points il s'agit, d'une part, de la reconduction des bases d'imposition d'une année sur l'autre dès lors où il n'y a pas eu de changement (1) et, d'autre part, des termes de la comparaison dans le cadre de l'application de l'article 1498 du CGI (N° Lexbase : L0267HMT) en vue d'établir la valeur locative (3).

En l'espèce, la société NFDB avait été autorisée, en vertu d'un contrat d'amodiation en date du 6 avril 1973 conclu avec le Port autonome de Paris, à occuper un terrain situé dans l'enceinte du port de Gennevilliers. Elle avait été imposée au titre de la TFPB à raison de locaux implantés sur ce terrain. Le litige portait sur les cotisations dues pour les années 1998 et 2000.

Antérieurement au pourvoi formé par le mandataire liquidateur de la société NFDB, par un jugement en date du 25 juin 2008, le tribunal administratif de Paris avait entièrement dégrevé le contribuable de l'imposition établie au titre de 1998, en revanche il avait maintenu à la charge du contribuable la cotisation pour l'année 2000. Le liquidateur judiciaire de la société NFDB venait demander la décharge de cette cotisation.

1 - Le premier moyen invoqué concernait le principe général du respect des droits de la défense. Pour évaluer des immeubles, les propriétaires doivent souscrire une déclaration. Dans l'hypothèse où l'administration procède, en vertu de l'article 1508 du CGI (N° Lexbase : L0289HMN) à un redressement des bases de la TFPB fondé sur l'insuffisance d'évaluation due à l'inexactitude ou au défaut des déclarations prévues aux articles 1406 (N° Lexbase : L9964HLM) et 1502 (N° Lexbase : L0278HMA) du CGI ; par application de ce principe, le contribuable doit avoir été mis en mesure de présenter ses observations. En revanche, si l'administration reconduit les bases d'imposition sans changement, elle n'est pas tenue à l'obligation de mettre à même le contribuable de présenter des observations. En l'espèce, lors de la première année d'imposition -1998-, même si l'administration avait établie son imposition suivant une procédure irrégulière et après avoir mis en demeure le contribuable de souscrire aux déclarations, ce dernier n'ayant pas répondu ; l'administration a pu, à bon droit, prendre en considération les mêmes bases dès lors qu'elles n'ont subi aucun changement.

Il s'agit d'une application du principe général des droits de la défense appliqué au cas particulier des déclarations d'évaluation en matière de TFPB. Si le contribuable n'a pas jugé bon de soumettre ses observations lors de la première imposition, et si les bases de celle-ci ne sont pas modifiées, il ne peut soutenir que ce principe n'a pas été respecté par l'administration lors de l'imposition suivante.

2 - Le second point de droit intéresse l'application de l'article 1400 du CGI (N° Lexbase : L4755IC4) aux termes duquel "sous réserve des dispositions des articles 1403 (N° Lexbase : L9958HLE) et 1404 (N° Lexbase : L9961HLI), toute propriété, bâtie ou non bâtie, doit être imposée au nom du propriétaire actuel". L'autorisation temporaire d'occupation et d'utilisation du domaine public a été consentie à la société NFDB par le Port autonome de Paris en vue de répondre à des besoins de service public. La question était de savoir qui était débiteur de la TFPB assise sur les constructions édifiées par la société ou déjà existantes à la date de la conclusion de la convention autorisant l'occupation temporaire du domaine public. Selon le Conseil d'Etat, ces constructions avaient été édifiées "en vue de satisfaire les seuls besoins de l'activité" de l'entreprise et, a contrario, n'avaient pour finalité de répondre aux besoins de service public. En conséquence, c'étaient des constructions privées dont la société permissionnaire était propriétaire pour toute la durée de l'autorisation d'occupation du domaine public. Dès lors cette société était débitrice de cette imposition.

Cette solution avait déjà été établie par la Haute juridiction administrative dans un arrêt en date du 21 avril 1997 (CE Contentieux, 21 avril 1997, n° 147602 N° Lexbase : A9303ADW). Dans cette affaire, il avait été jugé que l'édification d'installations dans le seul objectif des activités privées du permissionnaire et non pour les besoins du service public n'était pas incompatible avec l'inaliénabilité du domaine public. Ainsi, il apparaît que l'inaliénabilité du domaine public n'empêche pas la constitution des droits réels portant sur les constructions établies sur ce domaine dès lors qu'elles ne le sont pas en vue de répondre aux nécessités du service public.

Il faut noter que le II de l'article 1400 du CGI a été modifié par l'article 106 de la loi de finances pour 2004 (loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 N° Lexbase : L6348DM3). Cette disposition prévoit des dérogations au principe selon lequel l'imposition à la TFPB doit être établie au nom du propriétaire pour les titulaires de certains droits spéciaux (immeubles loués par bail emphytéotique, grevés d'usufruit, loués par bail à construction ou par bail à réhabilitation). Outre ces catégories limitativement énumérées, il a été ajouté celle des "titulaires d'autorisation temporaire du domaine public qui est constitutive de droits réels". Cette mesure est entrée en vigueur à compter des impositions établies au titre de l'année 2004.

3 - Enfin, le dernier point de droit abordé par cette décision est relatif à la problématique, toujours d'actualité, de l'évaluation par comparaison en vue de déterminer la valeur locative des bâtiments en vertu de l'article 1498 du CGI. Le contribuable remettait en cause les locaux-types désignés par l'administration au motif que l'état de vétusté de ses locaux ne permettait pas d'effectuer une comparaison pertinente eu égard à ceux choisis par l'administration. En tout état de cause, le choix des termes de la comparaison ne peut être remis en cause par le contribuable sur ce seul motif. Le Conseil d'Etat a, déjà, beaucoup oeuvré en vue de "maintenir à flot le système" (cf. Y. Bénard, Valeurs locatives foncières : panorama de la jurisprudence 2006, RJF, 2/07, p. 95), notamment en développement une jurisprudence très constructive quant aux termes de la comparaison mise en oeuvre sur le fondement du 2° de l'article 1498 du CGI.

  • TFPB : détermination de la valeur locative des locaux commerciaux situés dans un immeuble de grande hauteur (CE 3° et 8° s-s-r., 23 juillet 2010, n° 320188, mentionné dans les tables du recueil Lebon N° Lexbase : A9912E4U)

Comme exposé dans une chronique précédente (Chronique en impôts locaux - mai 2010, Lexbase Hebdo n° 394 du 13 mai 2010 - édition fiscale N° Lexbase : N0641BPG) à propos de l'arrêt "SARL Agora Cinémas" (CE, 12 mars 2010, n° 306458, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A1599ETE), la jurisprudence relative à la détermination de la valeur locative des locaux commerciaux ne semble pas se tarir. Selon les dispositions de l'article 1498 du CGI, il existe trois méthodes permettant d'évaluer la valeur locative des locaux commerciaux, la première est la référence au loyer (CGI, art. 1498-1°), à défaut est appliquée une méthode comparative (CGI, art. 1498-2°), voire en dernier recours la méthode d'appréciation directe (CGI, art. 1498-3°). Au final et eu égard au silence du législateur, la référence au loyer considérée comme la règle générale est devenue l'exception. En revanche l'évaluation par la comparaison est de plus en plus usitée -selon le rapport de la Cour des comptes pour 2009, la méthode d'évaluation par rapport au bail concerne 5,7 % des locaux commerciaux, la méthode comparative 92,7 % et celle de l'appréciation directe intéresse 1,5 % de cette même catégorie de locaux- et génère un important contentieux. C'est précisément cette méthode qui pose problème dans l'affaire commentée.

Les faits de l'espèce sont les suivants : la société immobilière PB6 a demandé par réclamations préalables, l'une en date du 17 décembre 2004 et l'autre du 11 mai 2005, la décharge des cotisations de TFPB au titre de 2003 et de 2004 dues pour un immeuble "tour PB6 - EDF" situé à Puteaux. Par un jugement en date du 7 mai 2008, le tribunal administratif de Versailles n'a fait droit qu'en partie à la demande de la société qui s'est pourvue en cassation afin de voir sa demande en décharge totalement reconnue.

Selon le 2° de l'article 1498 du CGI, pour certains biens "[...] la valeur locative est déterminée par comparaison. Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel". En l'espèce, pour évaluer la valeur locative du bien à raison duquel le contribuable était assujetti à la TFPB (pour rappel, c'est une tour située à Puteaux), l'administration avait proposé comme terme de la comparaison un local-type sis à Neuilly-sur-Seine. L'application de cette disposition n'implique pas que les biens comparés soient de même taille. Il peut exister une différence significative quant à la superficie entre les deux termes de la comparaison : le local-type et l'immeuble à évaluer. Dans cette hypothèse il est fait application de l'article 324 AA de l'annexe III du CGI (N° Lexbase : L3147HMI) qui prévoit une pondération par coefficient permettant l'ajustement de la valeur locative afin de tenir compte des différences entre les immeubles qui sont comparés.

L'immeuble dont était évaluée la valeur locative est une tour de 40 étages d'une hauteur de 165 m dont la surface réelle est de 60 207 m² (surface pondérée de 47 470 m²), en revanche le local-type est constitué d'un ensemble de bureaux situé dans un immeuble de taille moyenne d'une surface réelle de 905 m² (surface pondérée de 486 m²). Pour tenir compte de la différence de surface, il avait été appliqué un ajustement de 40 %. La Haute juridiction administrative a considéré que, en ne remettant pas en cause les termes de la comparaison, les juges du fond avaient commis une erreur de droit et en conséquence a annulé la décision du tribunal administratif.

Le dispositif de l'article 324 AA de l'annexe III du CGI doit permettre un ajustement lors de la comparaison. Cependant, les termes de la comparaison, même si nécessairement ils ne sont pas identiques, sinon la notion d'ajustement n'aurait pas de raison d'être, doivent être, selon le Conseil d'Etat, "pertinents". Au regard des faits exposés dans la décision, les juges de cassation ont pris en considération, à la fois, la différence de surface, la hauteur des immeubles et leur consistance : l'un étant un immeuble de grande hauteur alors que le local-type est défini comme un "immeuble de taille moyenne". Les juges du fond avaient pourtant considéré que ces termes de comparaison étaient valables eu égard à la conception, l'année de construction et le lieu d'implantation.

Le bien immobilier sis à Puteaux est un "immeuble de grande hauteur". Cette notion est définie par d'autres branches du droit, notamment aux termes de l'article R 122 -2 du Code de la construction et de l'habitation (N° Lexbase : L7845IEB). Même si cette qualification n'est pas prise en compte en tant que telle par le droit fiscal, il n'en reste pas moins que la méthode comparative de l'article 1498 du CGI ne peut prospérer qu'en étant fondée sur des éléments comparables. En l'occurrence, cette notion de "terme de comparaison pertinent" utilisée par le Conseil d'Etat peut constituer un moyen pour les contribuables dans le cadre des nombreux litiges relatifs à la valeur locative dans le cadre de la TFPB. On ne peut augurer du particulier au général surtout à propos d'une seule décision, il sera nécessaire que le Conseil d'Etat définisse plus avant les caractéristiques de la pertinence des termes de comparaison.

Le dispositif de l'article 1498 du CGI est particulièrement sollicité. On peut se demander si cette décision du Conseil d'Etat ne va pas constituer un nouveau motif de contentieux et augmenter d'autant ce dernier. L'inflation du contentieux en la matière est due à l'évolution des différentes méthodes pour l'évaluation de la valeur locative qui a remis en cause l'équilibre initial de ce dispositif. Face à cette situation, la politique de la Haute juridiction administrative consiste à pallier certaines "déficiences à coup d'expédients jurisprudentiels" (cf. V. Daumas, Valeurs locatives foncières : le mécano jurisprudentiel, RJF, 8-9/09, p. 634). La mise en oeuvre de la notion de pertinence des éléments de comparaison pourrait être un nouveau facteur d'inflation.

  • TP : détermination de la valeur locative d'un véhicule pris en location (CE 9° et 10° s-s-r., 9 juillet 2010, n° 318309, mentionné dans les tables du recueil Lebon N° Lexbase : A1352E4T)

La Caisse d'Epargne Languedoc-Roussillon a subi une vérification de comptabilité pour la période du 1er janvier 1999 au 31 décembre 2000. A la suite de cette vérification, la Caisse d'Epargne a été assujettie à une cotisation supplémentaire de taxe professionnelle (TP) au titre de l'année 1999. Ce supplément d'imposition résultait de la prise en compte, taxe sur la valeur ajoutée (TVA) comprise, des véhicules de tourisme qu'elle avait loué. Le tribunal administratif de Montpellier, dans un jugement du 14 avril 2005, avait prononcé une réduction de la cotisation de TP à hauteur de 367 euros pour 1999. Sur appel formé par l'administration fiscale, la cour administrative d'appel de Marseille, dans une décision rendue le 13 mai 2008 (CAA Marseille, 4ème ch., 13 mai 2008, n° 05MA02108 N° Lexbase : A8935D9S), est venue infirmer le jugement.

L'arrêt présentement commenté de la Haute juridiction administrative est venu confirmer la décision des juges d'appel. Le contribuable qui a formé le pourvoi développait plusieurs moyens à l'appui d'annulation de la décision de la cour administrative d'appel venant mettre à sa charge une cotisation supplémentaire de TP. Outre un premier moyen relatif à la régularité externe de l'arrêt des juges d'appel sur le fondement de l'article R. 222-26 du Code de justice administrative (N° Lexbase : L2815ALT), les moyens suivants concernaient les aux règles applicables en matière de détermination d'un véhicule de tourisme pris en location.

Pour déterminer l'assiette de la TP, selon les dispositions du second alinéa de l'article 1469 du CGI (N° Lexbase : L4903ICL), la valeur locative des biens pris en location et dont la durée d'amortissement est inférieure à 30 ans est égale au montant du loyer pour la période de référence sauf s'il diffère de plus de 20 % de la valeur locative qui serait obtenue en multipliant le prix de revient par 16 %. Dans cette hypothèse la valeur locative est égale à 16 % du prix de revient diminué ou majoré de 20 % selon que le loyer est plus proche de l'une ou l'autre de ces limites. Le prix de revient est celui qui sert de base de calcul des amortissements pratiqués par le propriétaire qui donne les biens en location. S'agissant d'un véhicule de tourisme, aux termes de l'article 237 de l'annexe II du CGI (N° Lexbase : L0913HN7) l'acquisition n'ouvre pas au propriétaire le droit à déduire la TVA, la base est ainsi constituée par le prix d'acquisition TVA comprise. Cette solution avait été déjà admise par le Conseil d'Etat dans une décision du 28 juillet 1999 (CE Contentieux, 28 juillet 1999, n° 1674 N° Lexbase : A4610AXZ). Ainsi à la question de savoir si le prix de revient servant de base au calcul de la valeur locative devait être hors TVA ou, au contraire TVA comprise, la haute Juridiction administrative réaffirme, dans cette décision, qu'il s'agit du prix de revient TVA comprise.

Cependant le contribuable assujetti à la cotisation supplémentaire de TP remettait cette solution en cause sur le fondement de l'article L. 80 A du LPF. Notamment, il se fondait sur une réponse ministérielle en date du 9 mai 1988 (Rép. min. n° 8689 à M. Michel Chauty, JO Sénat, 9 mai 1988, p. 645 ; DF 1988, n° 28, comm. 1471) au terme de laquelle, il était admis in fine "que le prix de revient servant de référence soit le prix auquel l'utilisateur pourrait acquérir un matériel neuf du même modèle". Or dans un arrêt en date du 12 mai 1998, la cour administrative d'appel de Nantes (CAA Nantes, 1ère ch., 12 mai 1998, n° 95NT01417 N° Lexbase : A2408BHN, DF, 1999, n° 7, comm. 128) avait fait droit à une demande portant sur le même fondement. En effet, pour la cour administrative d'appel, il résultait de la réponse ministérielle que la valeur locative du bien pris en location était calculée en prenant en compte le prix de revient hors TVA, dès lors que le propriétaire avait été en droit de déduire la TVA ayant grevé l'acquisition pour l'imposition des loyers à la TVA.

Or, pour le Conseil d'Etat, et confirmant la cour administrative d'appel de Marseille, la réponse ministérielle invoquée concerne les biens acquis pour être donnés en location mais ne se prononce pas sur la question de l'inclusion dans le prix de revient de la TVA eu égard au régime d'assujettissement à cette imposition du locataire du bien. En conséquence, la solution fondée sur les articles 1469 et 237 de l'annexe II du CGI telle que décrite ci-dessus ne pouvait être remise en cause par la réponse ministérielle sur le fondement de l'article L. 80 A du LPF.

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Juristes d'entreprise

[Questions à...] Le développement durable, un engagement stratégique auquel participe la filière juridique - Questions à Sandra Lagumina, directeur juridique Corporate

Lecture: 4 min

N0888BQX

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par L'Association française des juristes d'entreprise

Le 27 Mars 2014

De la lutte contre le réchauffement climatique en passant par la préservation des ressources fossiles et naturelles jusqu'à la promotion d'une énergie respectueuse de l'environnement, GDF SUEZ oeuvre à la maîtrise de l'impact des activités du groupe sur l'environnement. Pour relever ce défi, le département juridique composé de 680 membres dont 575 juristes, joue un rôle actif comme nous l'explique Sandra Lagumina, directeur juridique Corporate (1).

Association française des juristes d'entreprise (AFJE) : De par la nature de ses activités liées aux métiers de l'énergie, GDF SUEZ est au coeur des enjeux environnementaux et est engagé dans une démarche développement durable depuis ses débuts...

Sandra Lagumina : Le changement climatique, la pression sur les ressources en eau et la maîtrise de l'énergie sont au coeur de la stratégie du groupe. C'est la raison pour laquelle nous privilégions un développement industriel qui s'appuie sur des technologies sobres en CO2, telles que le nucléaire, les turbines gaz à cycle combiné, et bien sûr les énergies renouvelables, dans lesquelles nous avons investi un milliard d'euros en 2008. Avec 38 % d'électricité produite sans CO2, notre parc de production est l'un des plus propres d'Europe. Par ailleurs, tout nouveau site fait l'objet de mesures des impacts sur l'environnement de sa conception jusqu'à son arrêt définitif voire bien au-delà comme on le constate avec les anciennes usines à gaz par exemple.

AFJE : Quel est le rôle du service juridique dans l'action du groupe en faveur de la protection de l'environnement ?

Sandra Lagumina : Bien évidemment, nous devons tout d'abord interpréter, expliquer aux collaborateurs et faire respecter les textes réglementaires d'une grande complexité : au niveau européen, les directives environnementales (IPPC, sur l'eau, l'air ambiant et la responsabilité environnementale), le Règlement "REACH" (Règlement (CE) n° 1907/2006 du 18 décembre 2006, du Parlement européen et du Conseil, concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances N° Lexbase : L0078HUG), mais aussi des Directives sectorielles ou spécifiques comme "SEVESO" (Directive (CE) 96/82 du 9 décembre 1996, concernant la maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances dangereuses N° Lexbase : L7868AUX)et sur le plan national, les règles de notre Code de l'environnement et les textes du "Grenelle". Nous participons également à la réflexion sur l'évolution de ces textes. Enfin, certains des contentieux ayant trait à ces matières demeurent gérés directement par la direction juridique centrale à la fois pour des raisons historiques et parce que ces contentieux nécessitent souvent un suivi sur plusieurs années.

AFJE : En matière d'environnement, quel sont les contentieux que vous gérez ?

Sandra Lagumina : Le principal risque en matière de gaz naturel a trait au risque d'explosion et aux dramatiques conséquences sanctionnées au pénal. Notre priorité est la protection des personnes. Nous sommes, en revanche, moins concernés en raison des caractéristiques de la molécule de gaz par les dommages de pollutions au sens environnemental du terme. En revanche, nous sommes très attentifs aux atteintes au voisinage de nos sites industriels : pollution sonore ou visuelle par exemple. Sur le sujet particulier de la dépollution, notre démarche a été très volontariste dans la remise en état des anciennes usines à gaz pour lesquelles nous avions passé une convention avec l'Etat. Notre responsabilité administrative demeure en tant qu'ancien exploitant pendant 30 ans après la cessation d'activité et quoi qu'il en soit, nous assumons notre responsabilité en tant que propriétaire initial des sites. Nous devons donc être organisés de manière à gérer le long-terme ces dossiers et c'est la raison pour laquelle nous avons décidé de conserver cette compétence de contentieux au même titre que nous avions gardé les contentieux liés à l'amiante.

AFJE : En matière d'énergie, l'anticipation des changements de modes de consommation est une question de survie financière pour les entreprises énergétiques. Quel rôle joue la direction juridique ?

Sandra Lagumina : L'anticipation de la demande en énergie est évidemment cruciale. Elle nous conduit à transformer en profondeur la structure de l'entreprise, à réinventer continuellement nos offres et à adapter notre sourcing en amont. Pour une entreprise énergétique dont le marché historique est le gaz naturel, comprendre la transformation de la perception des énergies par la société est, en effet, essentiel. Aujourd'hui, une chose est sûre : nous ne pouvons nous contenter de commercialiser une seule énergie. Il faut désormais proposer de l'électricité produite sous toutes ses formes : l'éolien, le photovoltaïque, l'hydroélectrique, le nucléaire etc.

Le rôle de la direction juridique est d'accompagner ces transformations en amont, d'anticiper sur les nouvelles réglementations et de faire du droit un instrument comme les autres au service de l'évolution de l'entreprise. Le rôle de la direction juridique n'est donc pas seulement curatif mais également préventif sur l'évolution du cadre réglementaire de l'activité de l'entreprise.

AFJE : Vous êtes donc en quelque sorte chargés d'accompagner la redéfinition du modèle énergétique du groupe...

Sandra Lagumina : Incontestablement. Encourager nos équipes commerciales à préconiser auprès des clients des réductions de consommation d'énergie entraîne non pas une évolution mais une révolution des mentalités. Faire du développement durable c'est aussi cela : transformer la contrainte en opportunités, prendre ces défis comme éléments de croissance et de compétitivité. Il en va de même quand nous accompagnons les évolutions structurelles de l'entreprise.

AFJE : Mais, concrètement, quel est votre rôle dans cette démarche de développement durable ?

Sandra Lagumina : C'est une démarche globale soutenue au plus haut niveau de l'entreprise. Quelques exemples concrets. La direction juridique va créer les outils et agir en support de la direction DD placée au sein de la direction de la stratégie. Elle va également, avec la direction des achats des cahiers des charges stricts et respectueux de l'environnement par nos fournisseurs. Nous travaillons aussi avec un réseau de déontologues internes qui se révèlent être pour la plupart des juristes pour toute question délicate ou éthique et notre département sera consulté sur certains accords d'intermédiaires commerciaux ou sur les politiques d'embargos par exemple.


(1) Après une première expérience comme auditeur et maître de requêtes au Conseil d'Etat, Sandra Lagumina devient conseiller technique et juridique du Président de l'Assemblée nationale. Elle est, ensuite, chargée du droit de la concurrence et de la commande publique au cabinet du ministre de l'Economie et de Finances. De 2002 à 2005, elle est sous-directeur à la Direction des affaires juridiques du ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie. Elle intègre en 2005 le Groupe Gaz de France en tant que directeur adjoint de la Direction de la stratégie et devient directeur juridique du groupe Gaz de France en février 2007. Depuis juillet 2008, elle est directeur juridique corporate du groupe GDF SUEZ.

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Pénal

[En librairie] Cybercriminalité : droit pénal appliqué

Lecture: 1 min

N0971BQZ

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Le 07 Octobre 2010

Depuis le 13 septembre 2010, l'ouvrage de Myriam Quéméner et Yves Charpenel, intitulé Cybercriminalité : droit pénal appliqué (1), est disponible dans les librairies spécialisées.

L'omniprésence de l'informatique et d'internet dans la vie quotidienne a contribué au progrès social dans de nombreux domaines. Elle s'est aussi accompagnée de dérives désignées sous l'appellation de cybercriminalité qui sont sources de menaces graves pour les internautes, la société, les entreprises et les Etats. Face à l'éparpillement des textes applicables en matière de droit de l'internet et de cybercriminalité, les auteurs ont relevé le défi de rassembler l'ensemble de l'arsenal pénal tant en matière de droit matériel que processuel afin de répondre aux questions qui se posent désormais quotidiennement à tous les professionnels du droit, juristes, magistrats, avocats, étudiants et universitaires. L'ouvrage de Myriam Quéméner et Yves Charpenel, outil opérationnel intégrant à la fois les textes législatifs et réglementaires ainsi que la jurisprudence récente et la politique pénale en matière de cybercriminalité, répond aux attentes de l'ensemble des acteurs, qu'ils soient juristes, avocats, magistrats, policiers, gendarmes, étudiants, directeurs et responsables de la sécurité des systèmes d'information et acteurs de l'internet. Il apparaît ainsi comme l'ouvrage de référence en matière de droit pénal de l'internet.

Yves Charpenel est magistrat, avocat général à la Chambre criminelle de la Cour de cassation. Il a été membre de deux cabinets ministériels auprès du Garde des Sceaux, ministre de la Justice et directeur des affaires criminelles et des grâces. Il fut le plus jeune procureur général de France, en Martinique puis à Reims. Il est également expert au Conseil de l'Europe et à l'ONU.

Myriam Quéméner est magistrat au parquet général de la cour d'appel de Versailles et précédemment sous-directrice de la justice pénale à la Chancellerie. Auteur de Cybermenaces, entreprises, internautes (2008) et co-auteur de Cybercriminalité, défi mondial (2009) chez Economica, elle est aussi expert au Conseil de l'Europe.


(1) M. Quéméner et Y. Charpenel, Cybercriminalité : droit pénal appliqué, Economica, 2010, 272 pages, 23 euros.

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Procédures fiscales

[Manifestations à venir] Commissions fiscales de conciliation : quel intérêt ?

Lecture: 1 min

N0949BQ9

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Le 07 Octobre 2010

La Chambre de commerce et d'industrie de Paris (CCIP) organise, le 12 octobre 2010, de 17 heures à 20 heures, un colloque sur le rôle des commissions fiscales de concilaition : Commissions fiscales de conciliation (Commission nationale des impôts, commissions départementales, commissions de conciliation) : quel intérêt ? Pour communiquer sur le retour d'expériences de ces commissions, la CCIP a souhaité organiser ce colloque avec les interlocuteurs acteurs du dialogue mené au sein de ces instances. Magistrat, administration fiscale, représentants des contribuables présenteront leur point de vue et répondront à vos questions sur ce thème.
Programme

17h00 - Allocution d'ouverture (Georges Nectoux, membre de la CCI)

17h15 - Les représentants des entreprises au travers de l'enquête 2010 (Claudie Payet, membre de la CCIP)

17h45 - L'administration fiscale : un nouveau cadre (Sylvie Sanchez, responsable du Pôle de Gestion Fiscale de Paris Centre et services spécialisés de la DRFIP)

18h15 - CDI-CNI-Conciliation : les spécificités de ces commissions

Faut-il un expert-comptable en commission ? (Jean-François Pestureau, conseiller supérieur de l'Ordre des experts comptables)

18h45 - Les grandes entreprises en CNI : déjà une nouvelle approche un an après la première séance (Olivier Sivieude, directeur de la Direction des vérifications nationales et internationales)

Témoignages d'une entreprise ayant saisi la CNI et de représentants ayant siégé en CNI

19h15 - Débats

19h30 - Réflexions sur les propositions de l'enquête, après un an d'expérience de la CNI (Bruno Martin Laprade, conseiller d'Etat, Président de la CNI)

20h00 - Cocktail

Date et lieu

Mardi 12 octobre 2010 à 17 heures

Chambre de commerce et d'industrie de Paris, 27 avenue de Friedland, 75008 Paris

Frais d'inscription

50 euros (non assujettis à la TVA)

Formulaire d'inscription ou Inscrivez-vous en ligne

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