La lettre juridique n°800 du 24 octobre 2019

La lettre juridique - Édition n°800

Durée du travail

[Brèves] Convention de forfait en jours : vigilance sur la date de conclusion des accords de révision

Réf. : Cass. soc., 16 octobre 2019, n° 18-16.539, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A1963ZR7)

Lecture: 2 min

N0828BYC

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par Charlotte Moronval

Le 23 Octobre 2019

► A défaut d’avoir soumis au salarié une nouvelle convention de forfait en jours après le 1er avril 2016, date de l’entrée en vigueur de l’arrêté d’extension de l’avenant n° 22 du 16 décembre 2014, relatif aux cadres autonomes, l’employeur ne pouvait se prévaloir des dispositions de ce texte pour la période postérieure au 1er avril 2016 et pour laquelle l'article 13.2 de l'avenant n° 1 du 13 juillet 2004, relatif à la durée et à l'aménagement du temps de travail, aux congés payés, au travail de nuit et à la prévoyance à la Convention collective nationale des hôtels, cafés, restaurants du 30 avril 1997 n’étaient pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail d’un salarié ayant conclu une convention de forfait en jours restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, de son travail, et, donc, à assurer la protection de la sécurité et de la santé de l’intéressé.

Telle est la solution dégagée par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 16 octobre 2019 (Cass. soc., 16 octobre 2019, n° 18-16.539, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A1963ZR7 ; lire la notice explicative de l’arrêt).

L’affaire. Un employeur invoque les dispositions de l’avenant n° 22 du 16 décembre 2014, relatif aux cadres autonomes, étendu par arrêté du 29 février 2016, entré en vigueur le 1er avril suivant, qui ont remplacé les dispositions de l’article 13.2 de l’avenant n° 1 du 13 juillet 2004 et en déduit la validité de la convention de forfait en jours prévue au contrat de travail du salarié.

La position de la cour d’appel. La cour d’appel (CA Paris, Pôle 6, 3ème ch., 13 mars 2018, n° 14/09919 N° Lexbase : A7250XGM), sans rechercher si les dispositions de l’avenant n° 22 du 16 décembre 2014 offraient pour le salarié les garanties relatives à la protection de sa sécurité et de sa santé, constate la nullité de la convention de forfait en énonçant que l’employeur ne peut se prévaloir de ces nouveaux accords collectifs et qu’il lui appartient de soumettre au salarié une nouvelle convention de forfait.

La solution. Enonçant la solution susvisée, la Cour de cassation rejette le pourvoi (sur L'amplitude et la charge de travail du salarié soumis à une convention de forfait en jours, cf. l'Ouvrage «Droit du travail» N° Lexbase : E0430GA8).

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Entreprises en difficulté

[Jurisprudence] La résiliation du bail commercial en raison d’un défaut de paiement de loyers et charges postérieurs au jugement de liquidation : précisions importantes

Réf. : Cass. com., 9 octobre 2019, n° 18-17.563, FS-P+B+I (N° Lexbase : A6604ZQN)

Lecture: 11 min

N0922BYS

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par Emmanuelle Le Corre-Broly, Maître de conférences - HDR à l'Université de Nice Côte d'Azur, Directrice du Master 2 Droit des entreprises en difficulté, Membre du CERDP (EA 1201), Avocate au barreau de Nice

Le 24 Octobre 2019

La résiliation du bail des locaux affectés à l’activité de l’entreprise est régie par les dispositions de l’article L. 622-14 (N° Lexbase : L8845INW en sauvegarde, applicable au redressement judiciaire par renvoi de l’article L. 631-14, al. 1er N° Lexbase : L7317IZZ) et L 641-12 (N° Lexbase : L8859ING en liquidation judiciaire) du Code de commerce. Il résulte de ces dispositions que le bailleur peut demander ou faire constater la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d’ouverture, le bailleur ne pouvant agir qu’au terme d’un délai de trois mois à compter dudit jugement.

La question s’est posée en jurisprudence de savoir s’il convenait de coordonner ces dispositions propres au livre VI du Code de commerce avec les dispositions spécifiques du droit commun du bail commercial et, plus précisément, si le constat de la résiliation était subordonné à la délivrance préalable par le bailleur d’un commandement de payer visant la clause résolutoire, dans les prévisions de l’article L. 145-41 du Code de commerce (N° Lexbase : L1063KZE).

Les juges du fond ont été divisés sur cette question. Les cours d’appel de Paris [1] et de Lyon [2] avaient jugé que le constat de la résiliation du bail commercial par le juge-commissaire pour défaut de paiement de loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d’ouverture supposait la délivrance d’un commandement de payer préalable. Au contraire, les cours d’appel d’Orléans [3], d’Aix-en-Provence [4] et de Bordeaux [5] considéraient que la procédure de constat de la résiliation de plein droit du bail par le juge-commissaire était une procédure spécifique du droit des entreprises en difficulté, distincte de la procédure visant à faire constater l’acquisition d’une clause résolutoire, seule procédure dont le constat suppose la délivrance d’un commandement de payer resté infructueux visé à l’article L. 145-41, alinéa 1er, du Code de commerce.

Par un arrêt du 9 octobre 2019 cassant un arrêt de la cour d’appel de Paris, la Chambre commerciale de la Cour de cassation tranche la difficulté en jugeant, dans un attendu de principe, que «lorsque le juge-commissaire est saisi sur le fondement [de l’article L. 641-12, 3° du Code de commerce], d’une demande de constat de la résiliation de plein droit du bail d’un immeuble utilisé pour l’activité de l’entreprise, en raison d’un défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement de liquidation judiciaire du preneur, cette procédure, qui obéit à des conditions spécifiques, est distincte de celle qui tend, en application de l’article L. 145-41 du Code de commerce, à faire constater l’acquisition de la clause résolutoire stipulée au bail», de sorte que «le bailleur, qui agissait devant le juge-commissaire pour lui demander la constatation de la résiliation de plein droit du bail, sans revendiquer le bénéfice d’une clause résolutoire, n’était pas dans l’obligation de délivrer le commandement exigé par l’article L. 145-41 du Code de commerce».

Ainsi, la Cour de cassation distingue-t-elle selon que la résiliation du bail commercial intervient sur le fondement du bénéfice d’une clause résolutoire, lequel suppose la délivrance préalable du commandement prévu à l’article L. 145-41 du Code de commerce, ou sur le fondement de l’article L. 641-12, 3° lequel ne suppose pas la délivrance d’un commandement.

Cette solution est-elle parfaitement conforme à la lettre du 3° de l’article L. 641-12 du Code de commerce ? La lecture attentive du texte conduit à répondre à cette question de façon nuancée.

Observons que l’article L. 642-12, alinéa 1er, qui régit, en liquidation judiciaire, la continuation du bail des locaux affectés à l’activité professionnelle du débiteur énonce que la résiliation du bail des immeubles utilisés pour l’activité de l’entreprise intervient «sans préjudice de l’application du I et II de l’article L. 641-11-1(N° Lexbase : L3298IC7)». Cela signifie donc que les I et II des dispositions relatives au droit commun de la continuation des contrats en cours sont applicables au bail des locaux affectés à l’activité de l’entreprise. A contrario, les autres dispositions de l’article L. 641-11-1 sont inapplicables et notamment le III prévoyant les hypothèses dans lesquelles le contrat en cours est résilié de plein droit. Ainsi, le mécanisme de l’option sur la continuation du contrat qui résulte du jeu d’une mise en demeure prévue au 1° du III de l’article L. 641-11-1 est sans application en matière de baux des locaux affectés à l’activité de l’entreprise, de sorte que si le bailleur mettait en demeure le liquidateur judiciaire de se prononcer sur la continuation du contrat de bail, l’absence de réponse pendant plus d’un mois ne conduirait-elle pas à la résiliation de plein droit du contrat.

De même, est inapplicable au bail commercial le 2° du III de l’article L. 641-11-1 qui prévoit que le contrat en cours est résilié de plein droit à défaut de paiement d’une créance postérieure.

La résiliation du contrat de bail des locaux affectés à l’activité de l’entreprise n’est donc régi que par les dispositions spécifiques à ce contrat posées à l’article L. 641-12 du Code de commerce dont le 3° prévoit que le bailleur peut  «demander la résiliation judiciaire ou faire constater la résiliation de plein droit du bail pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement de liquidation judiciaire, dans les conditions prévues au troisième à cinquièmes alinéas de l’article L. 622-14».

Cependant, la rédaction du 3° de cet article peut semer le doute dans les esprits quant à la volonté du législateur de poser un cas de résiliation, autonome, pour défaut de paiement des loyers et charges postérieurs. Pourquoi le législateur aurait-il pris le soin d’indiquer que le bailleur peut demander la résiliation judiciaire pour défaut de paiement d’une créance postérieure alors que cette résiliation interviendrait de plein droit en dehors du jeu d’une clause résolutoire insérée au bail ? Si le législateur distingue ces deux hypothèses c’est peut-être parce que, dans la première hypothèse, il vise le cas où le bailleur ne se prévaut pas de la clause de résiliation de plein droit mais demande au juge de prononcer la résiliation judiciaire, alors que dans le deuxième cas, il demande à faire constater la résiliation, nécessairement, nous semblait-il [6], sur le fondement d’une clause résolutoire car si cette résiliation intervenait de plein droit en dehors du jeu d’une clause résolutoire, il ne serait pas nécessaire que le texte prévoie que le bailleur peut demander la résiliation judiciaire ! Par conséquent, le constat de la résiliation par juge-commissaire nous semblait nécessairement intervenir à la suite du jeu d’une clause résolutoire, lequel suppose la délivrance préalable d’un commandement de payer en application de l’article L. 145-41 du Code de commerce.

Telle n’est cependant pas la position adoptée par la Cour de cassation dans l’arrêt commenté, appelé à une large diffusion (P+B+I) : selon la Chambre commerciale, en application de l’article L. 641-12, 3°, la résiliation pour défaut de paiement de loyers et charges postérieurs au jugement de liquidation intervient de plein droit sans qu’il soit nécessaire de faire application d’une clause résolutoire stipulée au contrat de bail, et donc sans qu’il soit nécessaire de délivrer un commandement de payer visant cette clause.

Il nous semble que, pour mettre le texte de l’article L. 641-12, 3° en conformité avec la position adoptée aujourd’hui par la Chambre commerciale de la Cour de cassation, il conviendrait de supprimer les mots «demander la résiliation judiciaire» et de ne faire référence qu’à la constatation d’une résiliation de plein droit pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement de liquidation judiciaire. Toute difficulté serait ainsi aplanie.

La solution posée en liquidation judiciaire par la Chambre commerciale dans son arrêt du 9 octobre 2019 est-elle applicable en sauvegarde ou en redressement judiciaire ?

La comparaison des textes régissant dans les différentes procédures la résiliation du bail des locaux affectés à l’activité professionnelle apporte des éléments de réponse à cette question.

En sauvegarde (et en redressement par renvoi de l’article L. 631-14, alinéa 1er du Code de commerce), le 2° de l’article L. 622-14 énonce que la résiliation intervient «lorsque le bailleur demande la résiliation ou fait constater la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d’ouverture, le bailleur ne pouvant agir qu’au terme d’un délai de trois mois à compter dudit jugement».

Pour sa part, en liquidation judiciaire, l’article L. 641-12, 3° prévoit que «le bailleur peut également demander la résiliation judiciaire ou faire constater la résiliation de plein droit du bail pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement de liquidation judiciaire […]».

On remarquera que, dans le cadre de la procédure de sauvegarde et de redressement, il est fait état de la constatation d’une résiliation du bail sans mention que celle-ci interviendrait «de plein droit», par la volonté de la loi, pour défaut de paiement des loyers et charges postérieures. A notre sens, puisque la résiliation n’intervient pas «de plein droit», il faut en déduire qu’en sauvegarde ou en redressement judiciaire, la résiliation constatée par le juge-commissaire ne peut qu’être une résiliation résultant du jeu d’une clause résolutoire, laquelle suppose nécessairement la délivrance préalable d’un commandement de payer.

En revanche, en liquidation judiciaire, le texte de l’article L. 641-12, 3° précise que le bailleur peut faire constater la résiliation «de plein droit» du bail pour défaut de paiement de loyers et charges postérieurs, ce qui laisse entendre que la résiliation intervient ici légalement par le seul défaut de paiement des loyers et charges postérieures et non pas par le jeu d’une clause résolutoire qui supposerait la délivrance d’un commandement de payer préalable.

Ainsi, la solution posée par la Chambre commerciale dans son arrêt du 9 octobre 2019 en matière de liquidation ne vaudrait-elle pas en cas de sauvegarde ou de redressement.

En résumé, il nous apparaît que :

- lorsque la procédure est une liquidation judiciaire, le défaut de paiement de loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement de liquidation entraîne, de plein droit -et donc sans faire appel à l’application d’une clause de résiliation conventionnelle-, la résiliation du contrat, le bailleur ne pouvant agir qu’au terme d’un délai de trois mois à compter du jugement d’ouverture (cf. le renvoi opéré par le 3° de l’article L. 641-12 au 3ème alinéa de l’article L. 622-14). Libre au bailleur cependant de se prévaloir de la clause résolutoire, ce qui supposera la délivrance d’un commandement de payer.

- lorsque la procédure est un redressement judiciaire ou une sauvegarde, le défaut de paiement de loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d’ouverture n’entraîne pas la résiliation légale de plein droit du contrat mais autorise le bailleur à faire constater la résiliation du bail commercial, en application de la clause de résiliation conventionnelle, de sorte qu’il convient alors nécessairement de délivrer préalablement un commandement de payer visé à l’article L. 145-41 du Code de commerce.

Cette distinction semble opportune dans la mesure où elle conduit à protéger davantage le bail commercial lorsque la procédure tend au sauvetage de l’entreprise.

 

[1] CA Paris, Pôle 5, 8ème ch., 4 avril 2018, n° 17/19289 (N° Lexbase : A0170XKI), nos obs., Lexbase, éd. aff., 2018, n° 552 (N° Lexbase : N3943BXC) ; Gaz. Pal., 10 juillet 2018, n° 328x4, p. 47, note F. Kendérian ; Loyers et copr., 2018, comm. 151, note Ph.-H. Brault.

[2] CA Lyon, 14 juin 2018, n° 17/07301 (N° Lexbase : A1209XR9), AJDI, 2018, p. 713.

[3] CA Orléans, 15 novembre 2018, n° 18/00810 (N° Lexbase : A3274YLT) et CA Orléans, 24 janvier 2019, n° 18/00873 (N° Lexbase : A0717YU4) ;  Gaz. Pal., 16 avril 2019, n° 350x1, p. 66, note F. Kendérian. 

[4] CA Aix-en-Provence, 21 février 2013, n° 12/07700 (N° Lexbase : A5723I8H), D., 2013, p. 1800, obs. M.-P. Dumont-Lefrand ; JCP éd. E, 2013, 1549, obs. F. Kendérian.

[5] CA Bordeaux, 29 juin 2015, n° 14/07310 (N° Lexbase : A4847NMH), Rev. proc. coll., 2017, chron. 1, n° 15, obs. F. Kendérian.

[6] Nos obs., préc. sous CA Paris, 4 avril 2018, n° 17/19289, préc.. En ce sens égal. F. Kendérian, note préc., sous CA Orléans, 15 novembre 2018, n° 18/00810 et 24 janvier 2019, n° 18/00873, préc., spéc. p. 67 ; La clause résolutoire du bail commercial, JCP éd. E, 2017, 1258, spéc. n° 37.

newsid:470922

Famille et personnes

[Brèves] Accouchement sous X et impossibilité pour l’enfant de passer outre le refus réitéré par la mère de dévoiler son identité à la demande de levée du secret : compatibilité avec l’article 8 CESDH

Réf. : CE 2° et 7° ch.-r., 16 octobre 2019, n° 420230, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A9243ZRR)

Lecture: 4 min

N0896BYT

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 23 Octobre 2019

► Ne méconnaît pas l’article 8 de la CESDH (N° Lexbase : L4798AQR), le refus, obligatoirement opposé par le Conseil national pour l'accès aux origines personnelles (CNAOP), à la demande d'une personne, visant à connaître l'identité de la femme ayant accouché d'elle, lorsque cette dernière a manifesté la volonté de taire son identité lors de l'accouchement et a renouvelé expressément cette volonté en réponse à la demande de levée du secret.

Telle est la solution d’un arrêt rendu par le Conseil d’Etat le 16 octobre 2019 (CE 2° et 7° ch.-r., 16 octobre 2019, n° 420230, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A9243ZRR).

En l’espèce, la requérante avait été adoptée par jugement du 6 novembre 1952, quelques mois après sa naissance, déclarée le 11 juin 1952. Elle s'était adressée en septembre 2010 au Conseil national pour l'accès aux origines personnelles (CNAOP) pour tenter d'obtenir l'identité de ses parents biologiques. Par une décision du 12 mars 2012, le CNAOP avait refusé de lui communiquer l'identité de sa mère biologique. Elle se pourvoyait contre l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel de Paris avait rejeté l'appel qu'elle avait formé contre le jugement du 30 septembre 2015 du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ayant rejeté sa demande d'annulation de cette décision. En vain. Elle n’obtiendra pas gain de cause.

La Haute juridiction administrative, relève, en effet, qu’il résulte des différentes dispositions du Code de l’action sociale et des familles (CASF) (L. 147-1 N° Lexbase : L6986I7U, L. 147-2 N° Lexbase : L9011HWN, L. 147-5 N° Lexbase : L5430DKC et L. 147-6 N° Lexbase : L5431DKD) que le CNAOP est tenu de refuser de satisfaire à la demande d'une personne, visant à connaître l'identité de la femme ayant accouché d'elle, lorsque cette dernière a manifesté la volonté de taire son identité lors de l'accouchement et a renouvelé expressément cette volonté en réponse à la demande de levée du secret.

Il convient de préciser, en premier lieu, que, pour juger que la décision de refus opposée à la requérante par le CNAOP ne méconnaissait pas ces dispositions, les juges d'appel ont estimé, après avoir cité les articles 8 et 9 de la loi du 27 juin 1904 relative au service des enfants assistés, d'une part que les dispositions antérieures à l'entrée en vigueur du régime organisé par le CASF permettait à une mère de garder le secret sur son identité, d'autre part que le CNAOP avait accompli les diligences prévues par les dispositions du CASF dont il ressortait la volonté expresse de la mère biologique de la requérante de maintenir le secret. Selon la Haute juridiction administrative, si, en faisant en application de la loi de 1904 alors que cette loi avait été abrogée par l'acte dit loi n° 182 du 15 avril 1943 relative à l'assistance à l'enfance, encore en vigueur à la date de l'accouchement, les juges d'appel, dont l'arrêt est suffisamment motivé, ont commis une erreur de droit, celle-ci est sans incidence sur le sens de leur décision dès lors que les dispositions de cet acte, en particulier les articles 6, 7, 11 et 39 organisaient la possibilité pour une mère de confier son enfant à des tiers en maintenant le secret de son identité. Il y a lieu, en conséquence, de remplacer, par une substitution de pur droit qui n'implique l'appréciation d'aucune circonstance de fait, le texte sur lequel la cour s'est fondée par l'acte dit loi du 15 avril 1943.

En second lieu, le Conseil d’Etat relève que les dispositions du CASF organisent la possibilité de lever le secret de l'identité de la mère de naissance en permettant de solliciter la réversibilité du secret de son identité sous réserve de l'accord de celle-ci et définissent ainsi un équilibre entre le respect du au droit à l'anonymat garanti à la mère lorsqu'elle a accouché et le souhait légitime de l'enfant né dans ces conditions de connaître ses origines.

Aussi, en estimant que la requérante, dont il ressortait des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'elle avait pu disposer, hormis l'identité de sa mère biologique encore en vie, d'informations relatives à sa naissance recueillies par le CNAOP, n'était pas fondée à soutenir que les stipulations de l'article 8 de la CESDH avaient été méconnues, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de qualification juridique.

newsid:470896

Internet

[Brèves] Publicité ciblée sur internet : le Conseil d'Etat rejette les recours contre le plan d'action de la CNIL

Réf. : CE, 9° et 10° ch.-r., 16 octobre 2019, n° 433069 (N° Lexbase : A3699ZRG)

Lecture: 2 min

N0841BYS

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par Vincent Téchené

Le 07 Novembre 2019

► La décision de la CNIL d’engager une concertation pour définir les nouvelles modalités pratiques d’expression du consentement en matière de publicité ciblée, et de laisser aux acteurs du secteur une période d’adaptation pour s’y conformer est légale.

Tel est le sens d’un arrêt rendu par le Conseil d’Etat le 16 octobre 2019 (CE, 9° et 10° ch.-r., 16 octobre 2019, n° 433069 N° Lexbase : A3699ZRG).

L'affaire. Le «RGPD» (Règlement n° 2016/679 du 27 avril 2016 N° Lexbase : L0189K8I) et la loi du 6 janvier 1978 modifiée (loi n° 78-17 N° Lexbase : L8794AGS) ont renforcé les exigences attendues des acteurs numériques, qui doivent s’assurer que l’internaute consent explicitement à ce que des «cookies» ou d’autres traceurs soient déposés dans son ordinateur ou téléphone, à des fins de publicité ciblée, lorsqu’il consulte des sites internet.

Pour tenir compte de ce nouveau cadre juridique, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a adopté, en juillet 2019, une délibération explicitant les nouvelles règles de consentement en matière de publicité ciblée (CNIL, délibération n° 2019-093 du 4 juillet 2019 N° Lexbase : Z780538P). Elle a par ailleurs décidé d’engager une concertation en vue de définir, au premier trimestre 2020, les modalités pratiques de recueil du consentement. Elle a également indiqué que les acteurs du secteur, une fois ces modalités arrêtées, auraient six mois pour s’y conformer. Plusieurs associations ont attaqué ces décisions.

La décision. Le Conseil d’Etat rappelle tout d’abord que la CNIL, qui est une autorité administrative indépendante, dispose d’un large pouvoir d’appréciation dans l’exercice de ses missions. Il en déduit que la CNIL pouvait élaborer un tel plan d’action et le rendre public, afin de parvenir à un meilleur respect effectif du droit de la protection des données personnelles.

Le Conseil d’Etat juge ensuite que, dans le cadre de ce plan, le délai laissé aux acteurs du secteur pour se conformer aux règles qui seront publiées à l’issue de la concertation n’est pas illégal. Il estime en effet que cette tolérance vise à permettre aux acteurs concernés de s’approprier ces nouvelles règles, dont la CNIL a correctement explicité la teneur, et ainsi de respecter pleinement les exigences fixées par le «RGPD» à l’horizon de l’été 2020.

Le Conseil d’Etat estime enfin que la stratégie de la CNIL ne méconnaît pas le droit au respect de la vie privée car elle contribue à remédier aux pratiques prohibées de publicité ciblée, et n’empêchera pas la Commission de réaliser des contrôles pendant cette période transitoire, en sanctionnant le cas échéant les manquements les plus graves à ce nouveau cadre juridique.

newsid:470841

(N)TIC

[Brèves] Vidéosurveillance : pas de violation du droit à la vie privée des caissières de supermarché espagnoles filmées secrètement par des caméras de sécurité

Réf. : CEDH, 17 octobre 2019, Req. n° 1874/13 et 8567/13 (N° Lexbase : A3700ZRH)

Lecture: 2 min

N0842BYT

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par Charlotte Moronval

Le 23 Octobre 2019

► La Cour considère que l’utilisation comme preuves des images obtenues par vidéosurveillance n’a pas porté atteinte au caractère équitable de la procédure en l’espèce. Rien ne permet à la Cour de remettre en cause les conclusions des juridictions internes en ce qui concerne la validité et la portée des accords transactionnels signés par les requérantes.

Telle est la solution dégagée par la Cour européenne des droits de l'Homme dans un arrêt rendu le 17 octobre 2019 (CEDH, 17 octobre 2019, Req. n° 1874/13 et 8567/13 N° Lexbase : A3700ZRH).

L’affaire. Ayant constaté des disparités entre les stocks du magasin et ses ventes, ainsi que des pertes pendant plus de cinq mois, le directeur d’un supermarché installa des caméras de vidéosurveillance visibles ou cachées. Peu après avoir installé les caméras, il montra à un représentant syndical des images de salariées participant à des vols de marchandises dans le magasin. Les salariées furent licenciées pour motif disciplinaire. Elles saisissent le juge du travail pour licenciement abusif, voyant en particulier dans le recours à la vidéosurveillance cachée une violation de leur droit à la vie privée et estimant que les enregistrements ne pouvaient être versés au dossier.

La procédure. Invoquant les articles 8 (N° Lexbase : L4798AQR) et 6, § 1 (N° Lexbase : L7558AIR), les requérantes estiment inéquitables le recours à une vidéosurveillance dissimulée et l’utilisation par les juridictions nationales des données ainsi obtenues aux fins de conclure à la légitimité de leurs licenciements.

Dans son arrêt de chambre du 9 janvier 2018 (CEDH, 9 janvier 2018, Req. n° 1874/13, lire N° Lexbase : N2166BXI), la Cour a conclu, par six voix contre une, à la violation de l’article 8 de la Convention et, à l’unanimité, à la non-violation de l’article 6, § 1. Le 28 mai 2018, le collège de la Grande Chambre a accepté la demande du gouvernement espagnol tendant à renvoyer l’affaire devant la Grande Chambre.

La solution. La Cour juge que les tribunaux espagnols avaient minutieusement mis en balance les droits des employées du supermarché et ceux de l’employeur, et qu’ils avaient examiné en détail la justification de la vidéosurveillance. Un des arguments des requérantes était qu’elles n’avaient pas été averties au préalable de leur mise sous surveillance, malgré une obligation légale, mais la Cour juge qu’une telle mesure était clairement justifiée en raison des soupçons légitimes d’irrégularités graves et des pertes constatées, considérant l’étendue et les conséquences de cette mesure. Les tribunaux internes avaient donc conclu, sans outrepasser leur marge d’appréciation, que cette surveillance était proportionnée et légitime (sur La mise en place du contrôle des salariés, cf. l’Ouvrage «Droit du travail» N° Lexbase : E1366Y9H).

newsid:470842

Presse

[Brèves] Modernisation de la distribution de la presse

Réf. : Loi n° 2019-1063 du 18 octobre 2019, relative à la modernisation de la distribution de la presse (N° Lexbase : L9577LSI)

Lecture: 3 min

N0861BYK

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par Vincent Téchené

Le 23 Octobre 2019

► La loi n° 2019-1063 du 18 octobre 2019, relative à la modernisation de la distribution de la presse (N° Lexbase : L9577LSI), a été publiée au Journal officiel du 19 octobre 2019, ayant pour objectif d’adapter la loi du 2 avril 1947, dite loi «Bichet», aux nouveaux enjeux du secteur de la distribution de la presse.

Le texte réaffirme les grands principes de la loi «Bichet» de 1947 : la liberté de diffusion et la neutralité de la distribution. Il prévoit que le statut de coopérative demeure obligatoire mais les sociétés qui assurent la distribution de la presse ne doivent plus avoir leur capital majoritairement détenu par les coopératives d’éditeurs. L’ouverture du marché à de nouveaux acteurs interviendra au plus tard le 1er janvier 2023.

La loi renforce, par ailleurs, la régulation du secteur, qui est confiée à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP). Renommée Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse, elle succède aux deux instances actuelles : le Conseil supérieur des messageries de la presse (CSMP) et l’Autorité de régulation de distribution de la presse (ARDP). La nouvelle ARCEP est chargée d’agréer les sociétés de distribution de la presse et de sanctionner les acteurs qui ne respecteraient pas les règles.

L’agrément d’une société de distribution de la presse est subordonné à un cahier des charges fixé par décret pris au vu d’une proposition de l’ARCEP, établie après consultation des organisations professionnelles représentatives des entreprises de presse. Ce cahier des charges fixe les critères permettant de satisfaire au respect des principes d’indépendance et de pluralisme de la presse, à la continuité territoriale de la distribution, dans des conditions transparentes, efficaces et non discriminatoires et compte tenu de la spécificité des titres. Il précise les obligations spécifiques à satisfaire pour la distribution des quotidiens.

La loi donne également aux marchands de journaux un plus grand contrôle sur les types de publications qu’ils reçoivent afin de limiter les invendus. Seule la presse d’information politique et générale garde un droit d’accès absolu au réseau de distribution. Pour les autres catégories de presse, les marchands de journaux disposent d’une plus grande liberté pour choisir les titres qu’ils mettent en vente, pour mieux s’adapter à leur clientèle locale.

Les principes fondamentaux de la loi du 2 avril 1947 sont étendus aux kiosques et agrégateurs numériques.

Par ailleurs, il est imposé à la commission du réseau de la diffusion de la presse, avant toute décision relative à l’implantation d’un nouveau point de vente de presse, de se conformer à l’avis du maire de la commune concernée.

Enfin, on relèvera qu’une personne physique ou morale établie en dehors d’un Etat partie à l’accord sur l’EEE ne peut détenir plus de 20 % des droits de vote d’une société de distribution de presse.

newsid:470861

Procédure pénale

[Brèves] Garde à vue et droit à l’information : absence de nullité de la notification des droits et de la nouvelle qualification des faits retenue

Réf. : Cass. crim., 15 octobre 2019, n° 19-82.380, FS-P+B+I (N° Lexbase : A1967ZRB)

Lecture: 5 min

N0843BYU

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par June Perot

Le 23 Octobre 2019

► Le défaut de notification à la personne gardée à vue de la modification de qualification d’une infraction qu’elle est soupçonnée d’avoir commise ou tenté de commettre, ordonnée par le procureur de la République, ne peut entraîner le prononcé d’une nullité que s’il en est résulté pour elle une atteinte effective à ses intérêts, au sens de l’article 802 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L4265AZY) ;

► le délai de vingt minutes écoulé entre la présentation de l’individu à l’officier de police judiciaire de permanence (commissariat de police du 16ème arrondissement de Paris en l’espèce), et son placement en garde à vue, qui inclut la notification des droits afférents à cette mesure, ne peut donner lieu à son annulation, compte tenu des circonstances de l’interpellation, de la zone dans laquelle elle a eu lieu (19ème arrondissement) et des délais de transport, le procureur de la République ayant été par ailleurs préalablement avisé de cette mesure.

C’est ainsi que s’est prononcée la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 15 octobre 2019 (Cass. crim., 15 octobre 2019, n° 19-82.380, FS-P+B+I N° Lexbase : A1967ZRB).

Résumé des faits. Les faits de l’espèce concernaient l’interpellation de trois personnes (deux hommes et une femme) et leur placement en garde à vue pour, en ce qui concerne les deux hommes, refus d’obtempérer et la femme pour complicité de cette infraction. Le ministère public a procédé à l’ajout de la qualification d’association de malfaiteurs et infractions à la législation sur les armes. Les deux hommes se sont vu notifier la qualification supplémentaire de proxénétisme aggravé. La femme s’est vu notifier la modification de la complicité de refus d’obtempérer en association de malfaiteurs lors de la prolongation de sa garde à vue. Une information judiciaire a été ouverte à l’encontre des trois personnes notamment des chefs de tentative d’enlèvement et séquestration, infraction à la législation sur les armes, association de malfaiteurs, pour lesquels la femme a été mise en examen. L’intéressée a saisi la chambre de l’instruction d’une requête en nullité.

Moyen de nullité tiré de la notification tardive des droits. Pour écarter ce moyen, l’arrêt énonce que l’intéressée a été interpellée porte de Pantin (19ème arrondissement) aux côtés de deux autres individus, à 3 heures 05, par des agents de police du commissariat du 16ème arrondissement, qui ont immédiatement avisé l’OPJ de permanence. Sur instructions de ce dernier, l’intéressée lui a été présentée à 3 heures 35, son placement en GAV et les droits afférents à la mesure lui étant notifiés à 3 heures 55, le début de celle-ci étant fixé à 3 heures 05, heure d’interpellation. Les juges en déduisent que le délai de vingt minutes écoulé entre la présentation à l’officier de police judiciaire de permanence et son placement en garde à vue, qui inclut la notification des droits afférents à cette mesure, ne peut donner lieu à son annulation, compte tenu des circonstances de l’interpellation, de la zone dans laquelle elle a eu lieu et des délais de transport, le procureur de la République ayant été par ailleurs préalablement avisé de cette mesure à 3 heures 49.

Moyen de nullité tiré de l’absence de notification de la modification de la qualification retenue. Pour écarter ce moyen de nullité des auditions, l’arrêt énonce qu’au cours de sa première audition, l’intéressée a désigné les deux hommes comme étant ses proxénètes et qu’elle a donné des explications plus détaillées, à l’occasion de sa deuxième audition, désignant notamment un troisième individu, ce qui a amené le procureur de la République à donner à l'OPJ l’instruction de notifier aux deux autres personnes interpellées à ses côtés la qualification de proxénétisme aggravé. Les juges retiennent que ce n’est qu’au cours de sa troisième audition que l’intéressée a reconnu qu’elle devait attirer les clients pour permettre à ses comparses de les voler. Conformément aux réquisitions du ministère public, la qualification d’association de malfaiteurs a été notifiée lors de la prolongation de la garde à vue, soit postérieurement à sa seconde audition, à l’issue de laquelle il est apparu qu’elle pouvait être soupçonnée de cette infraction.

Réponse de la Cour. Saisie par un pourvoi dans cette affaire, la Haute juridiction approuve la chambre de l’instruction. S’agissant de la modification de la qualification, elle précise que si c’est à tort que les juges ont considéré que la notification de la qualification pouvait être reportée à l’issue de cette audition, dès lors que le procureur de la République a ordonné, en application de l’article 63 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7438LP8), la modification de qualification des faits, l’arrêt n’encourt pas la censure pour les raisons susvisées (aucune atteinte effective aux intérêts de la personne). En l’espèce, la Cour de cassation est en mesure de s’assurer au vu de l’examen du procès-verbal d’audition critiqué, qu’en répondant aux questions des enquêteurs, l’intéressée n’a tenu aucun propos par lequel elle se serait incriminée sur les faits d’association de malfaiteurs (cf. l’Ouvrage «Procédure pénale», Les droits de la personne gardée à vue, Le droit à l'information N° Lexbase : E4307EU3).

newsid:470843

Rel. collectives de travail

[Jurisprudence] Discrimination syndicale et dispositifs conventionnels d’évaluation des compétences mobilisées dans le cadre d’un mandat représentatif

Réf. : Cass. soc. 9 octobre 2019, n° 18-13.529, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A6603ZQM)

Lecture: 19 min

N0874BYZ

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par Patrice Adam, Professeur à l’Université de Lorraine

Le 07 Novembre 2019


Résumé : Pour la prise en compte dans son évolution professionnelle de l’expérience acquise par le salarié dans l’exercice de ses mandats représentatifs ou syndicaux, un accord collectif peut prévoir un dispositif, facultatif pour l’intéressé, permettant une appréciation par l’employeur, en association avec l’organisation syndicale, des compétences mises en œuvre dans l’exercice du mandat, susceptible de donner lieu à une offre de formation et dont l’analyse est destinée à être intégrée dans l’évolution de carrière du salarié.

Par ailleurs, l’accord collectif qui prévoit, dans le cadre des dispositions visant à faciliter l’exercice de mandats syndicaux ou représentatifs par la valorisation des compétences mises en œuvre par les salariés dans l’exercice de ces mandats, l’élaboration par l’employeur, après négociation avec les organisations syndicales représentatives dans l’entreprise, d’un référentiel dont l’objet est d’identifier ces compétences ainsi que leur degré d’acquisition dans le but de les intégrer au parcours professionnel du salarié et dont le juge a vérifié le caractère objectif et pertinent, ne porte pas atteinte au principe de la liberté syndicale, l’employeur étant tenu en tout état de cause dans la mise en œuvre de l’accord au respect des prescriptions des articles L. 1132-1 (N° Lexbase : L5538LQ8) et L. 2141-5, alinéa 1er, du Code du travail (N° Lexbase : L8734LGL).


 

La règle de non-discrimination, supportée par l’article L. 2141-5, alinéa 1er, du Code du travail (N° Lexbase : L8734LGL), est bien connue : «il est interdit à l’employeur de prendre en considération l’appartenance à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d’avancement, de rémunération et d’octroi d’avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail». Cette règle, d’ordre public (C. trav., art. L. 2141-8 N° Lexbase : L2153H9M), est élément de protection de la liberté syndicale du travailleur -constitutionnellement garantie (Préambule du 27 octobre 1946, alinéa 6 N° Lexbase : L6821BH4)- ; liberté qui englobe à la fois la liberté d’adhérer (ou non) à un groupement syndical et la liberté d’exercer une activité ou des responsabilités syndicales. Elle bégaie partiellement le «principe de non-discrimination» énoncée à l’article L. 1132-1 du Code du travail (N° Lexbase : L5538LQ8) (qui ne vise lui, expressis verbis, que «l’activité syndicale»). Son «fonctionnement» apparaît relativement simple : elle exclut simplement du champ des motifs licites de décision patronale «l’appartenance à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale». L’alinéa 2 de l’article L. 2141-8 du Code du travail organise la sanction civile [1] de la violation de cette interdiction : «toute mesure prise par l'employeur contrairement à ces dispositions est considérée comme abusive et donne lieu à dommages et intérêts». La sanction est enrichie par l’article L. 1132-4 du même code (N° Lexbase : L0680H93) selon lequel «toute disposition ou tout acte pris à l'égard d'un salarié en méconnaissance [du principe de non-discrimination] est nul».

I - De l’évaluation des compétences professionnelles...

Si le contentieux social offre mille exemples d’application de ces règles, il est une question qui, plus que d’autres, à poser singulières difficultés. Celle de l’évaluation par l’employeur des compétences professionnelles des salariés en mandat (la difficulté étant maximum lorsque les heures de délégation dont bénéficie le salarié l’éloigne durablement de son poste de travail) [2]. Comme il a été souligné, «en pratique […], les discriminations fondées sur des considérations de nature syndicale concernent souvent l'évolution de la carrière ou la rémunération» [3]. Il y a dix ans déjà, la Cour de cassation jugeait, sans surprise, que les critères d’évaluation ne peuvent inclure l’appartenance ou l’activité syndicale [4]. Quelques années plus tard, la Haute juridiction affinait sa jurisprudence en précisant que la simple mention d’une activité syndicale ou des absences liées à une telle activité laisse supposer l’existence d’une discrimination [5]. Par ailleurs, elle décidait également qu’est caractérisée la discrimination syndicale dès lors que l’employeur a exclu les salariés titulaires de mandats représentatifs du dispositif d’évaluation/notation les privant, ce faisant, d’une chance d’obtenir un avancement au choix [6]. N’échappe pas non plus au grief de discrimination, la décision par l’employeur d’instituer, unilatéralement, un dispositif d’évaluation propre aux représentants du personnel [7]. Quant à la fixation du montant des primes d’objectif, elle devait opérer pertinente distinction entre le temps d’exercice du mandat et le temps consacré à l’activité professionnelle (le niveau des objectifs devant être adapté en conséquence) [8]. La chose était entendue, sauf accord visant à en assurer la neutralité ou à le valoriser [9] -nombre d’accords instituent, de longue date, des procédures, des règles permettant un déroulement de carrière «normal» des salariés en mandat [10]- l'employeur ne peut prendre en considération l'exercice d'activités syndicales dans l'évaluation professionnelle du salarié [11].

Reste que ces décisions, aussi importantes soient-elle, ne portaient que sur l’évaluation des compétences professionnelles du salarié, c’est-à-dire des compétences qu’il mettait en œuvre dans l’exercice de son activité de travail. Celles qu’il pouvait acquérir et/ou mobiliser lors de l’exercice d’un mandat de représentation [12] restaient largement invisibles, maintenues dans un angle mort. Il faut dire que les organisations syndicales elles-mêmes ont «longtemps [été] réticentes à l’idée qu’un salarié mandaté puisse tirer un profit personnel d’une expérience tournée vers la défense de l’intérêt collectif» [13]. Les temps ont changé. Et si un travailleur accepte aujourd’hui de s’engager pour le collectif c’est, souvent, à la condition que sa carrière individuelle ne soit pas sacrifiée sur son autel. Et puis, va s’imposer peu à peu, une autre idée, celle «qu’il est nécessaire de protéger et de valoriser ceux qui s’investissent dans des tâches de représentation, et qui par leur contribution participent à la performance économique, sociale et environnementale dans tous types de structures privées et publiques et donc à la cohésion sociale» [14].

II - … à l’évaluation des compétences mobilisées dans l’exercice d’un mandat

La loi n° 2008-789 du 20 août 2008 (N° Lexbase : L7392IAZ) [15], modifiée par la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 (N° Lexbase : L2618KG3), a donné -dans l’esprit du temps- à l’accord collectif un nouveau rôle : il doit déterminer «les mesures à mettre en œuvre pour concilier la vie personnelle, la vie professionnelle et les fonctions syndicales et électives, en veillant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes. Cet accord prend en compte l'expérience acquise, dans le cadre de l'exercice de mandats, par les représentants du personnel désignés ou élus dans leur évolution professionnelle» (C. trav., art. L. 2141-5, al. 2 N° Lexbase : L8734LGL [16]). L’expérience acquise dans l’exercice du mandat doit donc désormais être prise en compte, valorisée, par les politiques d’évolution professionnelle et de gestion de carrière selon les modalités définies conventionnellement [17]. Par ailleurs, l’article L. 2242-20, 6° (N° Lexbase : L9907LLI) dispose que dans les entreprises (groupes…) d'au moins trois cents salariés, ainsi que dans les entreprises et groupes d'entreprises de dimension communautaire comportant au moins un établissement ou une entreprise d'au moins cent cinquante salariés en France, l'employeur engage tous les trois ans, notamment sur le fondement des orientations stratégiques de l'entreprise et de leurs conséquences mentionnées à l'article L. 2323-10 (N° Lexbase : L2746H9L), une négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels et sur la mixité des métiers portant sur le déroulement de carrière des salariés exerçant des responsabilités syndicales et l'exercice de leurs fonctions. De plus, le dernier alinéa de l’article L. 2141-5 (N° Lexbase : L8734LGL) dispose que «lorsque l'entretien professionnel est réalisé au terme d'un mandat de représentant du personnel titulaire ou d'un mandat syndical et que le titulaire du mandat dispose d'heures de délégation sur l'année représentant au moins 30 % de la durée de travail fixée dans son contrat de travail ou, à défaut, de la durée applicable dans l'établissement, l'entretien permet de procéder au recensement des compétences acquises au cours du mandat et de préciser les modalités de valorisation de l'expérience acquise». Le texte est réécrit par l’ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 (N° Lexbase : L7628LGM) et la nouvelle version entrera en vigueur le 1er janvier 2020 [18].

A - L’affaire

Jusqu’à présent, ces dispositions, destinées à valoriser l’exercice d’un mandat (et donc peut-être à inciter les salariés à s’engager, plus qu’ils ne le font aujourd’hui, dans l’action syndicale ou représentative) n’ont guère suscité de contentieux. L’arrêt rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation le 9 octobre 2019 n’en est que plus remarquable. Dans l’affaire qui lui a été déférée, la fédération CGT des syndicats du personnel de la banque et de l’assurance (FSPBA-CGT) et le syndicat CGT des personnels de Natixis et ses filiales ont fait assigner la société BPCE et les organisations syndicales signataires (CFDT, UNSA et CFE-CGC représentant 60 % des salariés) en contestation d’un accord conclu le 28 janvier 2016 sur le parcours professionnel des représentants du personnel au sein du groupe BPCE (ainsi que le syndicat FO) devant le tribunal de grande instance afin que l’article 3.1.1 dudit accord mettant en place un entretien d’appréciation des compétences et d’évaluation professionnelle soit déclaré illégal. Demande dont la cour d’appel de Paris les a sèchement déboutés. A l’appui de leur pourvoi, les organisations syndicales articulent plusieurs arguments. Trois en fait. Le premier : en application des stipulations conventionnelles contestées, «l’employeur peut être amené à prendre en considération l’évaluation qu’il fait de la façon dont le représentant du personnel concerné exerce ses mandats pour arrêter ses décisions le concernant en matière de formation, d’avancement ou de rémunération», ce qui serait contraire aux dispositions des articles L. 2141-5 (N° Lexbase : L8734LGL) et L. 2141-8 (N° Lexbase : L2153H9M). Le deuxième : des dispositions soutenues par les articles L. 2141-5 et L. 2141-8 étant d’ordre public, il est indifférent que le dispositif institué par l’article dont la légalité est mise en débat soit «l’aboutissement d’un long processus de négociation et que son adoption avait été approuvée par des syndicats représentant plus de 60 % des salariés du groupe BPCE». Il l’est tout autant qu’il présente un «caractère facultatif, le salarié ayant le libre choix de participer à l’entretien d’appréciation des compétences et d’évaluation professionnelle» prévu par l’accord collectif. Le dernier situe la discussion sur le terrain des normes supra-nationales : «le principe de liberté syndicale implique l’indépendance des syndicats dans l’exercice de leurs activités et leur protection contre tout acte d’ingérence de l’employeur dans leur fonctionnement et leur administration. Or, en l’espèce, […] l’évaluation des compétences mobilisées au titre de l’exercice des mandats prévue par les stipulations conventionnelles litigieuses est réalisée par le directeur des ressources humaines, sur la base de supports d’évaluation et d’appréciation élaborés par la direction, ce dernier appréciant notamment, au vu de l’évaluation ainsi réalisée, si une formation ou un accompagnement du représentant du personnel évalué est nécessaire». Aussi, d’après les auteurs du pourvoi,  il s’en déduit que «le dispositif d’appréciation des compétences mis en place en application de ces dispositions conduit l’employeur à évaluer la qualité de l’activité syndicale des représentants du personnel et leurs besoins en formation dans ce cadre», ce qui violerait les dispositions de l’article 11 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales (N° Lexbase : L6799BHB), ensemble celles de l’article 3 de la Convention n° 87 de l’OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical et de l’article 2 de la Convention n° 98 de l’OIT sur le droit d’organisation et de négociation collective. Et peu importe, à les suivre, que la cour d’appel ait pu constater que cette évaluation se faisait sous le «regard croisé» de l’organisation syndicale à laquelle appartient le salarié évalué, que le processus mis en place exclut toute appréciation discrétionnaire de la part de l’employeur et qu’il a été «validé», à l’issue d’une phase d’expérimentation par les organisations syndicales ayant signé l’accord.

A ces arguments, la Cour de cassation reste sourde. Au soutien de sa réponse, la Haute juridiction livre d’abord un énoncé de synthèse, quoique singulièrement enrichi, des dispositions supportées par l’article L. 2141-5 du Code du travail. Il résulte en effet de ces dispositions que «pour la prise en compte dans son évolution professionnelle de l’expérience acquise par le salarié dans l’exercice de ses mandats représentatifs ou syndicaux, un accord collectif peut prévoir un dispositif, facultatif pour l’intéressé, permettant une appréciation par l’employeur, en association avec l’organisation syndicale, des compétences mises en œuvre dans l’exercice du mandat, susceptible de donner lieu à une offre de formation et dont l’analyse est destinée à être intégrée dans l’évolution de carrière du salarié». A ce premier énoncé, la Haute juridiction en ajoute un second : «l’accord collectif qui prévoit, dans le cadre des dispositions visant à faciliter l’exercice de mandats syndicaux ou représentatifs par la valorisation des compétences mises en œuvre par les salariés dans l’exercice de ces mandats, l’élaboration par l’employeur, après négociation avec les organisations syndicales représentatives dans l’entreprise, d’un référentiel dont l’objet est d’identifier ces compétences ainsi que leur degré d’acquisition dans le but de les intégrer au parcours professionnel du salarié et dont le juge a vérifié le caractère objectif et pertinent, ne porte pas atteinte au principe de la liberté syndicale, l’employeur étant tenu en tout état de cause dans la mise en œuvre de l’accord au respect des prescriptions des articles L. 1132-1 et L. 2141-5, alinéa 1er, du Code du travail».

B - Les conditions de validité du dispositif conventionnel

Appréciation unilatérale de l’employeur. Des modalités précises de prise en compte de l’expérience acquise dans l’exercice du mandat, la loi ne souffle mot. Il revient aux négociateurs de l’accord -si la loi ne le précise pas expressément, il doit bien s’agir, selon la Cour de cassation, d’un accord collectif- de déterminer ces modalités. Leur liberté de stipulation est-elle totale ? Sans doute pas. La règle d’interdiction de la discrimination syndicale étend, sans conteste, son empire sur leur activité normative (comme le prétendait d’ailleurs le pourvoi). Ainsi, par exemple, ne sauraient-ils instituer des modes de prise en compte de l’expérience acquise différents selon l’étiquette syndicale des salariés concernés. Mais au-delà de ce cas archétypal, qu’interdit exactement aux partenaires sociaux l’exigence de non-discrimination ? L’accord collectif pourrait-il ainsi confier à l’employeur le soin d’évaluer unilatéralement les compétences mobilisées dans l’exercice du mandat représentatif ? Il est peu probable que les négociateurs salariés acceptent facilement pareille délégation… Mais s’ils le font, que décider ? que les négociateurs de l’accord se sont rendus coupables d’une «incompétence négative» ? Pourquoi pas. Cette notion [19], apparue en droit administratif, après avoir migrée dans le champ du droit constitutionnel, pourrait utilement trouver sa place en droit du travail. A la «réserve de loi» de l’article 34 de la Constitution ferait écho la «réserve d’accord» supportée par plusieurs textes du Code du travail. Mais c’est là encore simple expectative. Il est question plus actuelle : semblable abandon au pouvoir d’appréciation patronal entre-t-il en contrariété avec la règle de non-discrimination ? On ne saurait l’exclure sans pour autant facilement l’admettre. Car, a priori, si une discrimination peut venir d’autant plus aisément se loger dans la décision d’évaluation que l’employeur la prend seul, cette décision ne peut pas pour autant être considérée comme discriminatoire au seul motif que l’employeur l’a prise seul ! Bien entendu que l’activité syndicale peut justifier alors -à travers les compétences reconnues par l’employeur- destins professionnels différents (et plus ou moins enviables), mais, en soi, ces différences trouvent ressort légal dans l’alinéa 2 de l’article L. 2141-5 du Code du travail, peu important (sauf importation de la règle d’incompétence négative) que l’accord collectif ait habilité l’employeur à évaluer seul des salariés concernés. La règle de condamnation de l’entrave (C. trav., art. L. 2146-1 N° Lexbase : L2229H9G) ne serait-elle ici obstacle plus pertinent ? On peut, croit-on, le soutenir. C’est qu’à l’évidence, le pouvoir unilatéral d’évaluation confié à l’employeur est de nature à exercer sur les salariés en mandat délétère pression sur la manière dont il se comporte. Elle fait peser sur eux une menace (l’employeur ne l’aurait jamais formulée) susceptible d’infléchir le cours de leurs actions de représentation. Voilà le véritable danger.

En tout état de cause, l’accord collectif dont le contenu était mis en débat devant la Chambre sociale de la Cour de cassation ne s’inscrivait manifestement pas dans l’horizon d’un pouvoir unilatéral d’évaluation attribué à l’employeur. Il résultait en effet des constatations des juges d’appel que «l’appréciation des compétences était menée selon un processus [20] en plusieurs étapes sous le regard croisé de l’organisation syndicale du salarié et d’un représentant de l’employeur devant avoir participé aux instances dans lesquelles le salarié exerce son mandat». Le spectre de l’unilatéralisme s’évanouit. Mais s’il avait hanté, comme le prétendaient les demandeurs au pourvoi, l’affaire qui nous retient, aurait-il suffit à invalider la disposition conventionnelle critiquée ? On peut le penser (V. supra). D’autant plus que la Cour de cassation, pour rejeter le pourvoi et donc valider la clause conventionnelle disputée, constate qu’elle contient des éléments précis et objectifs qui ont fait «l’objet d’une méthodologie excluant toute discrimination ou atteinte à la liberté syndicale». C’est bien, croit-on comprendre, cette «méthodologie», qui associe les organisations syndicales, à l’acte d’évaluation des compétences qui permet d’échapper à l’illicéité de la disposition de l’accord collectif.

Autres conditions. Mais chassé le spectre de l’unilatéralisme ne suffit point tout à fait à assurer la validité du mécanisme conventionnel mis en place. Encore faut-il, à lire l’arrêt du 9 octobre 2019, et sans que cela ne provoque la surprise, que l’évaluation réalisée le soit à partir de critères définis par l’accord collectif et -c’est là une seconde et cumulative condition- que ces critères soient «objectifs et vérifiables». L’évaluation des compétences ne peut être lieu de déploiement de l’arbitraire [21]. Par ailleurs, les juges semblent donner grande importance au «caractère transversal entre les métiers et le mandat des compétences contenues dans le référentiel».

Quid enfin de la référence au caractère facultatif du dispositif institué par la clause litigieuse (point 7 de l’arrêt) ?  Faut-il y voir simple référence aux faits de l’espèce, sans la moindre portée normative ou réelle condition à la validité du mécanisme conventionnel de valorisation de compétences mobilisées en cours de mandat ? L’hésitation est permise. L’absence de référence, dans le point 9 de l’arrêt, au caractère facultatif du dispositif critiqué laisse à penser qu’il n’en est pas une condition de validité. On le comprend. Le fait que l’entrée dans le dispositif soit volontaire ou obligatoire semble étranger à la question de savoir s’il porte atteinte à la liberté syndicale ou caractérise une discrimination syndicale. L’accord donné par le salarié n’exclut ni l’un ni l’autre ; son absence d’accord n’implique ni l’un ni l’autre. Reste qu’il est sans doute plus conforme à l’objet des règles en cause (la valorisation des parcours syndicaux) que le dispositif mis en place soit facultatif et donc que chacun des salariés concernés puisse décider librement d’y adhérer ou non.

Pour conclure. Premier de son espèce, l’arrêt du 9 octobre 2019 en annonce sans doute bien d’autres. Le message qu’il envoie est clair : parce qu’il bénéfice à tous (aux salariés qui y trouve un porte-voix, à l’employeur qui y trouve un interlocuteur) l’exercice d’un mandat représentatif doit être, dans l’entreprise, une expérience valorisée. Encore faut-il que le dispositif d’évaluation mis en place par l’accord collectif ne se retourne pas contre la finalité qui lui est assignée et constitue un cheval de Troie de la discrimination ou de l’atteinte à la liberté syndicale. 

👉 Quel impact dans ma pratique ?

De cet arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation, un enseignement nous semble pouvoir être tiré : les négociateurs d’un accord ayant pour objet la prise en compte des compétences mobilisées par les salariés dans le cadre de leur fonction représentative (C. trav., art. L. 2141-5, al. 2 N° Lexbase : L8734LGL) devront prendre soin d’instituer un dispositif d’évaluation de ces compétences reposant sur des critères prédéfinis, objectifs et vérifiables. Par ailleurs, ils mettront en place une méthodologie d’évaluation associant étroitement l’employeur et les organisations syndicales. En l’état, la prudence commande par ailleurs de conférer un caractère simplement facultatif au dispositif d’évaluation mis en place.

 

[1] L’article L. 2146-2 du Code du travail (N° Lexbase : L2231H9I) en organise la répression pénale (voir également, C. pén., art. L. 225-1 N° Lexbase : L2676LBQ et art. L. 225-2 N° Lexbase : L7899LCK).

[2] M. Roussel, L’évaluation professionnelle des salariés, LGDJ, coll. Bibliothèque de droit social, Tome 76, 2019, pp. 338 et s..

[3] B. Bossu, note sous Cass. soc., 6 juillet 2010, n° 09-41.354, FS-P+B+R (N° Lexbase : A2379E4U), JCP éd. S, 2010, n° 1461 ; Ch. Radé, Rémunération et discrimination syndicale, Dr. soc., 1999, p. 773.

[4] Cass. soc., 27 mai 2008, n° 07-40.145, F-D (N° Lexbase : A7911D8I) et plus récemment, Cass. soc., 22 septembre 2015, n° 14-11.549, F-D (N° Lexbase : A8461NP3).

[5] Par ex., Cass. soc., 11 janvier 2012, n° 10-16.655, FS-P (N° Lexbase : A5266IAB). L’arrêt casse l’arrêt d’appel ayant retenu «que la référence à ses activités syndicales constitue un simple constat dépourvu de jugement de valeur ne remettant pas en cause la qualité du travail de l'intéressé soulignée dans d'autres rubriques d'évaluation et que les éléments de fait présentés par le salarié ne laissent pas supposer l'existence d'une discrimination syndicale».

[6] Par ex., Cass. soc., 23 mars 2016, n° 14-23.751, F-D (N° Lexbase : A3593RAC).

[7] Cass. soc., 23 février 2005, n° 02-47.433, F-D (N° Lexbase : A8636DGX) ; Cass. soc., 29 janvier 2008, n° 06-42.066, F-D (N° Lexbase : A6055D4Z).

[8]  Cass. soc., 6 juillet 2010, précité : «l'exercice de mandats représentatifs ne pouvant avoir aucune incidence défavorable sur la rémunération du salarié de sorte que Mme L. avait droit à percevoir au titre de la prime litigieuse une somme fixée en tenant compte, pour la partie de son activité correspondant à ses mandats, au montant moyen de cette prime versée, pour un temps équivalent, aux autres salariés, et, pour la part correspondant à son temps de production, une somme calculée sur la base d'objectifs réduits à la mesure de ce temps».

[9] Cass. soc., 23 mars 2011, n° 09-72.733, F-D (N° Lexbase : A7690HIN) ; Cass. soc., 24 septembre 2008, n° 07-40.935,  n° 06-46.179 et n° 06-46.180, FS-P+B (N° Lexbase : A4854EAZ).

[10] Il résulte d’ailleurs de l’article L. 2261-22 du Code du travail (N° Lexbase : L8561LQ7) que, pour être étendue, une convention collective doit nécessairement comporter des dispositions relatives au «déroulement de carrière des salariés exerçant des responsabilités syndicales et l'exercice de leurs fonctions».

[11] Cass. soc., 17 octobre 2006, n° 05-40.393, F-P+B (N° Lexbase : A9701DRQ), Dr. soc., 2006, p. 1186, obs. Ch. Radé ; Cass. soc., 1er juillet 2009, n° 08-40.988, FS-P+B (N° Lexbase : A6023EIW).

[12] N. Maggi-Germain, La reconnaissance des compétences liées au mandat, Dr. soc., 2008, p. 32.

[13] I. Meftah, La carrière des salariés titulaires de mandat, RDT, 2019, p. 236.

[14] L. Marie et J.-F. Pilliard, Repérer, prévenir et lutter contre les discriminations syndicales, Les avis du CESE, juillet 2017, p. 3.

[15] Le même texte a également inséré l’exercice des responsabilités syndicales dans le champ de la VAE (C. trav., art. L. 6111-1, al. 3 N° Lexbase : L6961LRA, modifié par la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 N° Lexbase : L6066IZP).

[16] Et l’alinéa 3 du même texte de prévoir qu’«au début de son mandat, le représentant du personnel titulaire, le délégué syndical ou le titulaire d'un mandat syndical bénéficie, à sa demande, d'un entretien individuel avec son employeur portant sur les modalités pratiques d'exercice de son mandat au sein de l'entreprise au regard de son emploi. Il peut se faire accompagner par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise. Cet entretien ne se substitue pas à l'entretien professionnel mentionné à l'article L. 6315-1 (N° Lexbase : L9899LL9)».

[17] I. Meftah, art. préc., RDT, 2019, p. 234.

[18] «Lorsque l'entretien professionnel est réalisé au terme d'un mandat de représentant du personnel titulaire ou d'un mandat syndical, celui-ci permet de procéder au recensement des compétences acquises au cours du mandat et de préciser les modalités de valorisation de l'expérience acquise. Pour les entreprises dont l'effectif est inférieur à deux mille salariés, ce recensement est réservé au titulaire de mandat disposant d'heures de délégation sur l'année représentant au moins 30 % de la durée de travail fixée dans son contrat de travail ou, à défaut, de la durée applicable dans l'établissement».

[19] Que l’on peut définir simplement comme le fait, pour l'autorité compétente, de n'avoir pas utilisé pleinement les pouvoirs que les textes lui ont attribués. P. Raapi, L'incompétence négative dans la QPC : de la double négation à la double incompréhension, Les nouveaux cahiers du Conseil constitutionnel, n° 34, janvier 2012 ; G. Scmitter, L'incompétence négative du Législateur et des autorités administratives, AIJC, 1989, p. 137.

[20] Dont les juges constatent par ailleurs qu’il est le fruit d’une négociation, qui comprenait une phase d’expérimentation, et qui avait permis la prise en compte de plusieurs suggestions des organisations syndicales.

[21] M. Roussel, op. cit..

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Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

[Questions à...] La TVA intracommunautaire - Questions à Laurent Dommergues, avocat et directeur de mission en fiscalité internationale au sein du cabinet GMBA

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par Marie-Claire Sgarra et Joséphine Pasieczny

Le 23 Octobre 2019

Laurent Dommergues, avocat et directeur de mission en fiscalité internationale au sein du cabinet d'expertise comptable, fiscale et sociale, d'audit et de conseil GMBA, a accepté de revenir pour Lexradio et Lexbase Edition fiscale sur le dispositif de la TVA intracommunautaire.

Lexbase Edition fiscale : Qu’est-ce que la TVA intracommunautaire ? (définition, principe et application)

Laurent Dommergues : La TVA intracommunautaire est un ensemble de règles fiscales applicables aux entreprises qui vendent des biens et des services dans l’Union européenne. Les opérations intracommunautaires sont celles qui font intervenir des opérateurs d’au moins deux Etats membres de l’UE.

S’agissant des biens, le régime applicable en B2C depuis les années 90 est celui des «ventes à distance».

En B2B, on applique depuis 1993 un régime dit «transitoire». Le fonctionnement est le suivant : lorsqu’une entreprise d’un Etat membre vend un bien à une société d’un autre Etat membre, l’opération est scindée en deux : d’une part une livraison intracommunautaire dans le pays de départ, et d’autre part une acquisition intracommunautaire dans le pays d’arrivée.

En ce qui concerne les prestations de services, il existe une règle générale en B2B, une règle générale en B2C et une série de dérogations. En B2C, la prestation est généralement taxée au lieu d’établissement du prestataire alors qu’en B2B, l’opération est taxée dans le pays d’établissement du preneur.

Lexbase Edition fiscale : Pouvez-vous nous donner une définition de l’autoliquidation ?

Laurent Dommergues : Le principe en matière de TVA est que la taxe est due par le fournisseur ou le prestataire. C’est ce dernier qui est redevable légal de la taxe et doit, dès lors, la facturer à son client puis la reverser à l’Etat. La dérogation à cette règle est le mécanisme dit d’ «autoliquidation», en application duquel le client doit liquider et déclarer la TVA à l’Etat, au lieu et place du vendeur. S’il dispose d’un droit complet à déduction, le client qui autoliquide peut déduire immédiatement la taxe.

Le mécanisme d’autoliquidation a plusieurs finalités. Il peut s’agir d’une mesure de simplification, évitant à une société d’un Etat membre qui vend des biens à une entreprise dans un autre pays européen de s’immatriculer à la TVA. Le client est désigné redevable de la taxe, dispensant ainsi le vendeur non établi de toute obligation. Mais il peut également s’agir d’un dispositif anti-fraude, en particulier dans le secteur de la sous-traitance immobilière.

Lexbase Edition fiscale : Quel est le principe du système définitif de TVA et quelles sont les avancées sur le sujet ?

Laurent Dommergues : Il faut en premier lieu évoquer le régime «transitoire» entré en vigueur en 1993 et qui aurait dû prendre fin en 1996. Plus de 25 ans après, ce régime est toujours en vigueur.

Pour mémoire, ce régime consiste à scinder les opérations intracommunautaires en une livraison intracommunautaire exonérée dans l’Etat membre de départ suivie d’une acquisition intracommunautaire taxée par voie d’autoliquidation dans l’Etat membre d’arrivée.

Le système définitif mettrait fin à cette scission en ne retenant qu’une seule opération au plan fiscal. La vente serait taxée directement dans le pays d’arrivée, au taux applicable localement.

Dans ce nouveau contexte, deux modalités de collecte de la TVA sont envisagées. La première modalité concerne les clients bénéficiant du statut d’ « assujetti certifié », lesquels autoliquideront la taxe. La deuxième modalité, applicable aux autres entreprises, est le guichet unique. Ce régime existe déjà en B2C et serait ainsi étendu aux ventes B2B.

La proposition de Directive du 25 mai 2018 prévoyait une entrée en vigueur du régime définitif au 1er juillet 2022. Mais ce régime soulève des difficultés techniques et politiques, en raison de la règle de l’unanimité fiscale (accord de tous les Etats membres).

Au plan technique, de nombreuses questions restent en suspens. Si l’autoliquidation par des «assujettis certifiés» devrait fonctionner, en revanche le guichet unique avec des assujettis non certifiés suscite des interrogations. A titre d’exemple, une société française vendant des biens à une société espagnole devrait, dans le cadre du régime définitif de taxation, facturer la TVA espagnole et la reverser via le guichet unique français. La société espagnole pourrait déduire immédiatement cette TVA. L’une des questions qui se pose est comment l’administration fiscale espagnole pourrait-elle être certaine que la TVA espagnole a bien été collectée en amont par la société française et payée via le guichet unique ? Quelle sera l’administration compétente pour contrôler l’opération ? Les services espagnols qui ne sont pas sur place pour contrôler la société française ou les services français pour lesquels le recouvrement de la TVA espagnole n’est peut-être pas prioritaire  ?

Lexbase Edition Fiscale : Quelles sont les avancées des travaux de la Commission européenne ces dernières années en matière de lutte contre la fraude à la TVA ?

Laurent Dommergues : En matière de lutte contre la fraude à la TVA, deux réformes entreront en vigueur prochainement.

La première réforme s’intitule les «quick fixes» et entrera en vigueur le 1er janvier 2020. Elle introduit quatre dispositifs qui apportent des solutions à des problématiques récurrentes en matière de TVA intracommunautaire. Le premier dispositif durcit au 1er janvier les conditions d’exonération des livraisons intracommunautaires de biens. Les vendeurs devront systématiquement s’assurer de la validité du numéro de TVA de leur client et souscrire une déclaration d’échange de biens exhaustive et correcte pour chaque opération. La deuxième mesure introduit un cadre commun au niveau européen en matière de preuve du transport intracommunautaire. Les deux derniers dispositifs, plus techniques, sont des mesures de simplification pour les ventes sous contrat de dépôt («call-off stock»), et les ventes en chaîne. Le renforcement des conditions d’exonération des livraisons intracommunautaires a pour objectif de réduire les pertes de recettes fiscales.

Le deuxième ensemble de règles entrera en vigueur le 1er janvier 2021. Il s’agit du «paquet TVA sur le commerce électronique», lequel modifie en profondeur les règles de TVA sur l’e-commerce dans les relations B2C. C’était l’une des priorités de la stratégie du marché unique numérique. Les objectifs annoncés par la Commission européenne sont les suivants : lutter contre la fraude,  faciliter l’e-commerce en simplifiant les règles pour les opérateurs et assurer des conditions de concurrence équitables entre les opérateurs européens et les opérateurs établis dans des pays tiers.

La première mesure est la réforme du régime des ventes à distance. Ce régime date des années 90 et fonctionne par seuil. A titre d’exemple, une société française qui exploite un site d’e-commerce et vend des biens dans dix pays de l’Union européenne doit  s’immatriculer à la TVA dans ces 10 pays si elle dépasse les seuils applicables localement.

Ces seuils de vente à distance seront supprimés et remplacés par un seuil unique de 10 000 euros. Pour faciliter l’application de ce nouveau régime, une simplification est prévue. Il s’agira d’opter pour le régime du guichet unique (OSS) lequel, dans notre exemple, permettra à la société française de déclarer en France l’ensemble des opérations qu’elle réalise dans l’Union européenne.

La deuxième mesure est la création d’un guichet unique pour les ventes à distance de biens importés de pays tiers dont la valeur n’excède pas 150 euros (IOSS).

La troisième mesure phare du paquet TVA est l’élargissement du mini guichet unique à tous les services B2C étant précisé qu’à ce jour le mini guichet unique (MOSS) ne concerne que certains services, en particulier les services fournis par voie électronique (téléchargements d’applications, musiques, films et jeux en ligne). En 2021, tous les services fournis en B to C pourront être déclarés dans le cadre du mini guichet unique.

Le mini guichet unique a été un succès : 70 % des ventes de services fournis par voie électronique ont été déclarés via le MOSS. Le système d’e-commerce tel qu’il existe aujourd’hui n’est pas satisfaisant en termes de résistance à la fraude. Les pertes sont estimées à 5 milliards d’euros. En 2021 avec l’essor du commerce électronique et les nouvelles règles, la Commission européenne attend plus de 7 milliards d’euros de recettes supplémentaires au niveau de l’UE.

C’est à mon sens une très bonne réforme pour les entreprises, en particulier les TPE et les PME qui ne peuvent pas supporter les coûts déclaratifs à l’étranger. C’est également une bonne nouvelle pour les Etats membres si l’objectif d’augmentation des recettes fiscales est atteint.

Un dernier volet doit être évoqué. Il concerne les «marketplaces». Sur les plateformes les plus connues sur lesquelles on peut acheter des biens provenant du monde entier, une grande partie des produits sont vendus par des micro-entreprises, des TPE ou des PME de pays tiers.

La plateforme est considérée comme un simple intermédiaire qui facilite la vente et facture une commission. Des difficultés de collecte de la TVA ayant été détectées avec les fournisseurs de pays tiers, un dispositif de responsabilité des plateformes a été introduit.

Le nouveau régime applicable aux opérations réalisées par des vendeurs établis hors UE implique qu’une plateforme d’e-commerce qui facilite les ventes à distance sera considérée comme ayant acheté et revendu les biens. C’est dès lors la plateforme qui devra collecter la TVA sur la vente et non plus le fournisseur.

C’est d’abord une volonté politique car les plateformes ont un rôle crucial de rapprochement du vendeur et du client final. Les plateformes disposent en outre de toutes les données pour déclarer correctement les flux.

Lexbase Edition fiscale : quelles seront les problématiques auxquelles devra se confronter l’Union européenne dans les années à venir en matière de TVA ?

Laurent Dommergues : Le sujet essentiel est la collecte de la TVA et la lutte contre la fraude. Des études annuelles de la Commission européenne viennent mesurer l’écart entre les recettes attendues et les recettes effectivement perçues par les Etats membres (le «VAT Gap»). Sur ce sujet, le dernier rapport de la Commission du 4 septembre 2019 estime à 137 milliards d’euros le montant des pertes de recettes fiscales dans l’Union européenne, la part se rapportant à la France étant estimée, pour 2017, à 12 milliards d’euros.

Par ailleurs, il faudra suivre de près la problématique de la responsabilité des plateformes et évaluer si cela améliore la collecte de la TVA. Il s’agira aussi de déterminer si les «quick fixes» apportent des solutions pérennes et efficaces. D’autres sujets que l’on peut évoquer sont la généralisation de la facturation électronique et la liste noire des plateformes, lesquels figurent dans le Projet de Loi de Finances pour 2020. Une autre obligation, également présentée dans le PLF 2020 est l’obligation pour les entrepôts logistiques français de tenir un registre de tous les envois de biens qui arrivent en France, permettant ainsi à l’administration fiscale et aux douanes d’intensifier les contrôles. Sur ce point, la France irait plus loin que ses voisins européens.

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