Le Quotidien du 4 mars 2022 : Régimes matrimoniaux

[Brèves] Apport en capital d’un époux séparé de biens pour financer la part du conjoint lors de l’acquisition d’un bien indivis : remboursement assuré !

Réf. : Cass. civ. 1, 9 février 2022, n° 20-14.272, F-D N° Lexbase : A06507NE

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par Anne-Lise Lonné-Clément

le 03 Mars 2022

► Il résulte de l'article 214 du Code civil N° Lexbase : L2382ABT que, sauf convention contraire des époux, l'apport en capital de fonds personnels par un époux séparé de biens afin de financer la part de son conjoint lors de l'acquisition d'un bien indivis affecté à l'usage familial ne participe pas de l'exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage.

La solution est maintenant bien acquise depuis un arrêt rendu le 3 octobre 2019 (Cass. civ. 1, 3 octobre 2019, n° 18-20.828, FS-P+B+I N° Lexbase : A4983ZQM ; cf. J. Casey, Séparation de biens, logement & CCM : exclusion des apports en capital, Lexbase Droit privé, novembre 2019, n° 803 N° Lexbase : N1246BYS) et rappelée en 2021 (Cass. civ. 1, 17 mars 2021, n° 19-21.463, FS-P N° Lexbase : A88744LA, cf. J. Casey, Sommaires d’actualité de droit des régimes matrimoniaux 2021-1 (janvier - juillet 2021), obs. n° 13, Lexbase Droit privé, septembre 2021, n° 876 N° Lexbase : N8692BYL).

« Séparation de biens, logement & CCM ». Le contexte est classique et concerne des époux mariés sous le régime de la séparation de biens, l’un d’eux réclamant, lors du divorce, le remboursement des sommes qu’il a versées pour l’acquisition du bien indivis constituant le logement familial, au-delà de sa proportion dans l’indivision, finançant par là-même, en tout ou partie, la part incombant à l’autre époux ; la difficulté provient de la clause, contenue presque systématiquement dans les contrats de séparation de biens, affirmant que « les époux sont réputés avoir contribué aux charges du mariage au jour le jour, de sorte qu’ils ne sont tenus à aucun compte à ce titre ».

La Cour de cassation a indiqué, en 2013, qu’une telle clause posait une présomption irréfragable, interdisant toute demande de remboursement à ce titre (Cass. civ. 1, 15 mai 2013, n° 11-26.933, FS-P+B+I N° Lexbase : A3195KDP). La Haute juridiction a néanmoins, par la suite, été amenée à affiner sa jurisprudence, admettant la possibilité pour un époux d’invoquer, en la prouvant, une surcontribution, laquelle écarte toute qualification de charges du mariage, et par là-même l’application de la clause (cf. notamment, Cass. civ. 1, 3 octobre 2018, n° 17-25.858, F-D N° Lexbase : A5433YEX ; Cass. civ. 1, 5 décembre 2018, n° 18-10.488, F-D N° Lexbase : A7877YPG ; pour une analyse détaillée, cf. J. Casey, Sommaires de jurisprudence - Droit des régimes matrimoniaux (année 2018) - Première partie, obs. n° 17, Lexbase Droit privé, janvier 2019, n° 769 N° Lexbase : N7341BX8), étant précisé que toute idée de surcontribution est par définition incompatible avec le caractère irréfragable de la clause (Cass. civ. 1, 18 novembre 2020, n° 19-15.353, FS-P+B N° Lexbase : A506837T ; pour bien comprendre l’articulation globale des solutions, cf. J. Casey, Sommaires de droit des régimes matrimoniaux (septembre 2020 - décembre 2020), obs. n° 10, Lexbase Droit privé, janvier 2021, n° 850 N° Lexbase : N6084BYY).

Toujours est-il que cette question ne concerne que la seule hypothèse d’un financement par des revenus, et que s’agissant d’un financement par un apport en capital de fonds personnels, la clause reste sans incidence, et ne saurait donc faire obstacle à une demande de remboursement.

L’affaire. En l’espèce, un époux était décédé le 27 août 2013, en laissant pour lui succéder son épouse séparée de biens, et ses quatre enfants, dont deux nés d'une précédente union. Ces derniers avaient assigné leurs cohéritiers en partage de la succession.

Pour rejeter la demande de créance au titre du financement des biens immobiliers indivis, dire que la succession ne disposait d'aucune créance à ce titre à l'encontre de l’épouse et, en conséquence, rejeter leur demande de communication des pièces justificatives du financement de ces biens, après avoir constaté que les immeubles avaient une destination familiale, la cour d’appel avait retenu : d'abord, que l’épouse n'avait pu faire face seule au règlement de la somme de 1 785 000 francs ayant permis l'acquisition de ses parts indivises ; ensuite, que le financement par l’époux, fût-ce par le biais d'un apport en capital, relevait de sa contribution aux charges du mariage ; enfin, n'apparaissait pas excessif au regard du patrimoine de l'époux.

Dans la parfaite lignée des décisions précitées de 2019 et 2021, l’arrêt est censuré par la Cour régulatrice qui reproche à la cour d’avoir ainsi statué, sans constater l'existence d'une convention entre les époux prévoyant l'exécution par l’époux de sa contribution aux charges du mariage sous la forme d'un apport en capital.

Aussi, la position de la Cour de cassation est parfaitement claire : sauf convention contraire, l’apport en capital de fonds personnels (et ce quelle que soit leur origine) pour financer l’acquisition d’un bien indivis entre époux, même à destination familiale, ouvre toujours droit à remboursement au profit de l’époux apporteur.

Pour aller plus loin : cf. ÉTUDE : La contribution aux charges, Le logement de la famille et la contribution aux charges du mariage, in Droit des régimes matrimoniaux, (dir. J. Casey), Lexbase N° Lexbase : E5969EYQ.

 

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