Le Quotidien du 29 septembre 2021 : Bancaire

[Brèves] Précisions sur le droit applicable à l’action exercée en raison du défaut de communication du taux et/ou de la durée de la période

Réf. : Cass. civ. 1, 22 septembre 2021, n° 19-25.316, FS-B (N° Lexbase : A134447W)

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par Jérôme Lasserre Capdeville

le 29 Septembre 2021

► Pour la Cour de cassation, dans la suite de son arrêt remarqué du 10 juin 2020 (Cass. civ. 1, 10 juin 2020, n° 18-24.287, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A54113NQ), il convient de poursuivre l’uniformisation des sanctions en matière de taux effectif global erroné et de juger que le défaut de communication du taux et/ou de la durée de la période est sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge, sous réserve que l’écart entre le TEG mentionné et le taux réel soit supérieur à la décimale prescrite par l’annexe à l’ancien article R. 313-1 du Code de la consommation (N° Lexbase : L3654IPZ).

Selon l’article R. 314-2, alinéa 2, du Code de la consommation (N° Lexbase : L1402K9S), le taux de période est un taux « calculé actuariellement, à partir d’une période unitaire correspondant à la périodicité des versements effectués par l’emprunteur ». Ce taux de période est donc une sorte de taux « tout compris » calculé à partir d’une période unitaire, généralement mensuelle, correspondant à la périodicité des versements effectués par l'emprunteur.

Depuis quelques années, la jurisprudence cherche à encadrer le droit applicable à l’absence de mention de ce taux de période (v. not., Cass. civ. 1, 5 février 2020, n° 19-11.939, FS-P+B+I N° Lexbase : A37993D3 ; G. Biardeaud, Lexbase Affaires, mars 2020, n° 626 N° Lexbase : N2400BYK – Cass. civ. 1, 5 février 2020, n° 18-26.769, F-P+B+I N° Lexbase : A37973DY ; J. Lasserre Capdeville, Lexbase Affaires, février 2020, n° 624 N° Lexbase : N2196BYY – Cass. civ. 1, 6 janvier 2021, n° 18-25.865, F-P N° Lexbase : A88624BT ; J. Lasserre Capdeville, Lexbase Affaires, janvier 2021, n° 661 N° Lexbase : N6038BYB). Nous en avons ici une nouvelle illustration.

Faits et procédure. En l’espèce, la banque X. avait consenti à M. et Mme H. deux offres de prêts immobiliers, formalisés par actes authentiques les 17 et 23 octobre 2008. Or, arguant notamment d’un défaut de communication du taux de période du taux effectif global (TEG) de chacun des contrats, les emprunteurs avaient sollicité la nullité des stipulations d’intérêts. La cour d’appel de Douai avait alors été amenée à se prononcer par une décision du 19 septembre 2019, rendue sur renvoi après cassation (Cass. civ. 1, 11 janvier 2017, n° 15-24.914, F-D N° Lexbase : A0849S8X).

Arrêt d’appel. La cour d’appel avait, en l’occurrence, prononcé la nullité des stipulations d’intérêts mentionnées dans les contrats de prêts immobiliers et substitué le taux d’intérêt légal aux taux conventionnels, après avoir constaté que les taux de période des TEG des prêts incluant la période d’anticipation n’avaient été ni mentionnés ni communiqués aux emprunteurs.

Décision. Cette solution n’est cependant pas partagée par la Cour de cassation. Sa décision se veut très motivée.

Elle commence par indiquer qu’il ressort des anciens articles L. 313-1 (N° Lexbase : L6649IM9) et L. 313-2 (N° Lexbase : L1518HI3) du Code de la consommation, et de l’article R. 313-1 du même code, que le TEG doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt, mais aussi qu’il est, pour les opérations de crédit immobilier, un taux annuel, proportionnel au taux de période, à terme échu et exprimé pour cent unités monétaires, et que le taux de période ainsi que la durée de la période doivent être expressément communiqués à l’emprunteur (§ 4).

Elle rappelle ensuite que s’agissant de l’offre de crédit immobilier, en application des textes précités et des articles L. 312-8, 3° (N° Lexbase : L7512IZA), et L. 312-33 (N° Lexbase : L7965IZZ) du Code de la consommation, le défaut de mention du TEG ou son caractère erroné est sanctionné par la déchéance, totale ou partielle, du droit aux intérêts. Cette sanction, qui s’applique au défaut de communication du taux et/ou de la durée de la période, ne saurait cependant être prononcée lorsque l’écart entre le taux effectif global mentionné et le taux réel est inférieur à la décimale prescrite par l’annexe à l’article R. 313-1 mentionné précédemment (§ 5).

En outre, s’agissant de l’écrit qui constate le contrat de crédit immobilier, la Cour de cassation indique qu’il a été jugé que l’inexactitude de la mention du TEG, comme l’omission de la mention de ce taux, qui privent l’emprunteur d’une information sur son coût, emportent l’annulation de la clause stipulant l’intérêt conventionnel et la substitution à celui-ci de l’intérêt légal, lorsque l’écart entre le taux mentionné dans le contrat de crédit et le taux réel est supérieur à la décimale prescrite par l’annexe à l’article R. 313-1 susvisé. Elle complète ces rappels en visant un certain nombre de décisions remarquées de sa première chambre civile (§ 6).

Un cas particulier est, ensuite, abordé : le cas des contrats souscrits postérieurement à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2019-740 du 17 juillet 2019 (N° Lexbase : L1483LRD), en cas de défaut de mention ou de mention erronée du taux effectif global dans un écrit constatant un contrat de prêt. Dans cette hypothèse, en effet, le prêteur n’encourt pas l’annulation de la stipulation de l’intérêt conventionnel, mais peut être déchu de son droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge, au regard notamment du préjudice subi par l’emprunteur (§ 7).

Mais qu’en est-il pour les contrats souscrits antérieurement à l’entrée en vigueur de l’ordonnance précitée ? La Cour de cassation indique que le régime des sanctions a été uniformisé et qu’il a ainsi été jugé qu’en cas d’omission du taux effectif global dans l’écrit constatant un contrat de prêt, comme en cas d’erreur affectant la mention de ce taux dans un tel écrit, le prêteur peut être déchu de son droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge (Cass. civ. 1, 10 juin 2020, n° 18-24.287, préc. ; G. Biardeaud, Lexbase Affaires, juin 2020, n° 640 N° Lexbase : N3804BYK) (§ 8).

Après ces rappels intéressant avant tout le TEG/TAEG, la Haute juridiction s’intéresse au taux de période. Elle déclare qu’il était jugé, par le passé, que le défaut de communication du taux et/ou de la durée de la période dans le contrat de prêt ou un document relatif à celui-ci était sanctionné par la nullité de la clause stipulant l’intérêt conventionnel et la substitution à celui-ci de l’intérêt légal (en ce sens, Cass. civ. 1, 1er juin 2016, n° 15-15.813, F-D N° Lexbase : A8710RRZ – Cass. civ. 1, 7 mars 2019, n° 18-11.617, F-D N° Lexbase : A7329Y7L – Cass. civ. 1, 27 mars 2019, n° 18-11.448, F-D N° Lexbase : A7221Y7L) (§ 9).

Elle en profite alors pour rappeler des évolutions jurisprudentielles auxquelles elle tient. En effet, « pour les motifs exposés au point 8 et dans la suite de l’arrêt précité du 10 juin 2020, il convient de poursuivre l’uniformisation des sanctions et de juger que le défaut de communication du taux et/ou de la durée de la période est sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge, sous réserve que l’écart entre le TEG mentionné et le taux réel soit supérieur à la décimale prescrite par l’annexe à l’article R. 313-1 susvisé ». Nous retrouvons là, en substance, les évolutions figurant dans ses deux décisions remarquées du 5 février 2020 (Cass. civ. 1, 5 février 2020, deux arrêtés, n° 19-11.939, préc., et n° 18-26.769, préc.).

Elle en conclut alors que la cour d’appel Douai ne pouvait pas, comme elle l’avait fait, prononcer la nullité des stipulations d’intérêts mentionnées dans les contrats de prêts immobiliers et les substituer par le taux d’intérêt légal. En effet, en statuant ainsi, alors que « n’était nullement allégué un écart entre le TEG mentionné et le TEG réel supérieur ou égal à la décimale et qu’est seule encourue la déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts », la cour d’appel avait violé les textes précités.

Cette décision témoigne de la volonté de la première chambre civile de mettre un terme, ou du moins de limiter à l’extrême, le contentieux lié au taux de période non mentionné par écrit. Elle reprend ainsi ses jurisprudences déjà développées en matière de recours indu à « l’année lombarde » et de TEG/TAEG erroné : d’une part, elle exige une erreur ayant suffisamment d’impact sur le TEG et, d’autre part, elle se prononce en faveur d’une sanction offrant un pouvoir de modulation au juge (qui pourra ainsi ramener la déchéance à un pourcentage symbolique des intérêts).

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