La lettre juridique n°332 du 8 janvier 2009 : Sécurité sociale

[Textes] LFSS 2009 : de quelques réformes des branches maladie, accident du travail/maladie professionnelle et famille

Réf. : Loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008, de financement de la Sécurité sociale pour 2009 (N° Lexbase : L2678IC8)

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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen et Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Droit de la Sécurité sociale"

le 07 Octobre 2010


La loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008, de financement de la Sécurité sociale pour 2009, s'inscrit dans un contexte économique particulièrement délicat, qui laisse prévoir des tensions sur les rentrées de cotisations salariales et patronales, alors même que les dépenses (singulièrement, celles de la branche maladie) sont structurellement en phase de croissance. Le pouvoir réglementaire et le législateur ont, exercice de style oblige, mis en place des outils destinés à réduire un écart trop important entre rentrées de cotisations et dépenses. Les efforts attendus les plus importants concernent la branche maladie : les mesures visent la gouvernance, la maitrise médicalisée, l'organisation des dépenses de santé (...). La nouveauté de cette LFSS 2009 tient à la place occupée par les mesures relatives à la branche vieillesse et aux dispositifs de maintien dans l'emploi des actifs seniors. Parmi celles-ci, le recul de 65 à 70 ans de l'âge maximum de demande de bénéfice d'une pension de vieillesse, disposition la plus médiatisée et polémique, pourtant, validée par le Conseil constitutionnel (1). Si la LFSS contient, classiquement, des modifications aux différentes branches de la Sécurité sociale (I), elle apporte quelques innovations marquantes, notamment, en matière de contrôle et de sanctions des prestations indues (II). I - Réformes des prestations et de la prise en charge des différents risques

Pour l'année 2009, les prévisions de recettes ont été fixées, pour l'ensemble des régimes obligatoires de base de Sécurité sociale et par branche, à 181,8 milliards d'euros pour la branche maladie ; 182,5 milliards d'euros pour la branche vieillesse ; 58,7 milliards d'euros pour la branche famille ; 13 milliards d'euros pour la branche accident du travail/maladie professionnelle ; pour le régime général de Sécurité sociale, à 156 milliards d'euros pour la branche maladie ; 94,7 milliards d'euros pour la branche vieillesse ; 58,2 milliards d'euros pour la branche famille ; 11,2 milliards d'euros pour la branche accident du travail/maladie professionnelle. Pour l'année 2009, pour l'ensemble des régimes obligatoires de base de Sécurité sociale, entre les prévisions de recettes et les objectifs de dépense, le budget est donc négatif pour la branche maladie (-3,8 milliards d'euros), vieillesse (-7,2 milliards d'euros) et famille (-0,5 milliards d'euros), et à l'équilibre pour la branche AT/MP. Toutes branches confondues, les objectifs de dépense dépassent de 11,4 milliards d'euros les prévisions de recette.

A - Branche maladie

Au titre de l'année 2008, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie rectifié de l'ensemble des régimes obligatoires de base est fixé à 71,5 milliards d'euros, ainsi répartis : dépenses de soins de ville, 48,9 milliards d'euros ; dépenses relatives aux établissements de santé tarifés à l'activité, 18,6 milliards d'euros ; autres dépenses relatives aux établissements de santé, 5,5 milliards d'euros ; contribution de l'assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes âgées, 7,4 milliards d'euros, soit un total de 152,8 milliards d'euros (2).

La loi n° 2008-1330 (art. 36) associe l'UNOCAM (3) aux négociations conventionnelles liant les professionnels de santé et l'assurance maladie. Cette mesure, ainsi que celle visant à majorer la taxe versée par les organismes complémentaires au Fonds de financement de la CMU, est la traduction de la convention d'accord signée le 28 juillet 2008 entre le Gouvernement et la Fédération nationale de la mutualité française.

La LFSS 2009 (art. 37) permet au directeur de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie de réduire, pour l'année 2009, la prise en charge, par ces caisses, d'une part des cotisations d'assurance maladie des chirurgiens-dentistes. Le Conseil constitutionnel (décision n° 2008-571 DC du 11 décembre 2008 N° Lexbase : A6887EBP) n'a pas prononcé de censure sur ce dispositif. En effet, le pouvoir conféré au directeur de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, établissement public de l'Etat, par la LFSS 2009, ne porte que sur la fixation de la participation des caisses aux cotisations d'assurance maladie d'une seule catégorie de professionnels (les chirurgiens-dentistes) et pour la seule année 2009. L'article 37 de la loi a pour objet de permettre, par une minoration de la part des cotisations prise en charge par les caisses au titre de l'année 2009, de tenir compte des conséquences financières de l'application de la décision du Conseil d'Etat du 16 juin 2008 (CE 1° et 6° s-s-r., 16 juin 2008, n° 296578, Fédération des syndicats dentaires libéraux et autres N° Lexbase : A2359D9A). Pour le Conseil constitutionnel, si la disposition contestée compense les effets de cette décision, elle n'a pas pour effet de rétablir l'acte annulé en ce qu'il méconnaissait le principe de non-rétroactivité des actes réglementaires. Elle ne porte pas atteinte au dispositif de cette décision et ne méconnaît pas ses motifs. Elle ne peut donc être regardée comme ayant pour objet ou pour effet de censurer une décision de justice.

Enfin, la loi rétablissait la qualification de médecin compétent (art. 40) ; désignait l'autorité compétente pour fixer le montant de la contribution due par les professionnels de santé n'utilisant pas les feuilles de soins électroniques (art. 41) ; prévoyait l'information des patients sur la liste des professionnels et des centres de santé ayant adhéré à des contrats d'amélioration des pratiques (art. 43) ; renvoyait au décret les modalités de participation des patients au système de pharmacovigilance (art. 44) ; précisait les missions et modalités de fonctionnement du groupement d'intérêt public chargé du développement des systèmes d'information de santé partagés (art. 45) ; mettait en place une expérimentation afin de remettre à certains patients un dispositif portable contenant leur dossier médical sous forme numérique (art. 46) ; accroissait les pouvoirs du directeur de l'Agence régionale de l'hospitalisation sur les directeurs des établissements de santé, sociaux et médico-sociaux et sur ces établissements en cas de difficulté financière ou de dysfonctionnement (art. 55) ; rendait obligatoire la certification des comptes de certains établissements publics de santé (art. 56) ; modifiait les modalités de financement du Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière (art. 57) ; regroupait trois organismes dans un même groupement d'intérêt public (art. 58) ; faisait participer la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie au financement de la formation des aidants et des accueillants familiaux de personnes âgées ou handicapées adultes (art. 65-I) ; et imposait la mention du prix de revente des prothèses et autres dispositifs médicaux dans le devis préalable (art. 72).

Mais, dans la mesure où ces dispositions n'ont pas d'effet ou ont un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement, le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2008-571 DC du 11 décembre 2008, en a déduit qu'elles ne trouvaient pas leur place dans une loi de financement de la Sécurité sociale, et donc, en a prononcé la censure.

B - Branche accident du travail/maladie professionnelle (AT/MP)

Après être passé sous le seuil des 700 000 en 2004 et en 2005, le nombre d'accidents de travail ayant occasionné un arrêt de travail s'établit à plus de 720 000 en 2007. L'indice de fréquence des accidents avec arrêt est resté inchangé depuis deux ans, à 39,4 pour 1 000 salariés. Trois grands types d'affections concentrent l'essentiel des cas de maladies professionnelles reconnues : les affections périarticulaires, causées par certains gestes ou postures de travail (soit 70,7 % des maladies professionnelles avec arrêt reconnues en 2007) ; les affections dues à l'inhalation de poussières d'amiante (12,2 % des maladies professionnelles avec arrêt reconnues en 2007) ; les affections chroniques du rachis lombaire (6,4 % en 2007) (4).

  • Amélioration de la prise en charge de certains frais de santé au titre des AT

L'article 98 de la LFSS 2009 (CSS, art. L 431-1, 1° N° Lexbase : L3062ICE) tend à améliorer la prise en charge de certains frais de santé engagés par la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle. Afin de pallier le faible taux de prise en charge de certains produits, résultant de l'écart entre le prix de vente ou la tarification de la prestation et sa base de remboursement, la loi prévoit de majorer le niveau de prise en charge de certains produits ou prestations. L'article 98 modifie la liste des frais de santé pris en charge par la branche AT/MP en prévoyant, de façon explicite, la liste des produits et prestations ainsi que les prothèses dentaires. Enfin, l'article 98 modifie les modalités de calcul de la prise en charge de ces deux types de produits et prestations : leurs tarifs de remboursement seront majorés en application d'un coefficient déterminé par arrêté, dans la limite des frais réellement engagés, lorsque leur prix n'est pas administré. Cette mesure transpose l'accord des partenaires sociaux du 25 avril 2007, relatif à l'amélioration de la prévention, de la tarification et de la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles.

  • Transmission du rapport médical ayant contribué à la fixation du taux d'incapacité de travail en cas de contentieux (art. 99)

L'Assemblée nationale avait adopté un article visant à définir, en cas de contestation d'un taux d'incapacité de travail, les conditions dans lesquels le service du contrôle médical pouvait transmettre au médecin expert le rapport médical ayant contribué à la fixation de ce taux. Or, les dispositions relatives au respect de la vie privée prévues à l'article 226-13 du Code pénal (N° Lexbase : L5524AIG) s'opposent à la transmission de ce rapport. Les tribunaux de l'incapacité déclaraient alors inopposable à l'employeur la décision fixant le taux de l'incapacité de l'assuré en raison du défaut de présentation de ce document et du non respect du contradictoire. La Cour de cassation s'est prononcée, il y a peu, sur ce thème (5) : ni l'accord de la victime, ni son absence d'opposition à la levée du secret médical ne peuvent résulter de la simple sollicitation de prestations. L'assuré social ne peut renoncer aux droits qu'il tient de l'article 9 du Code civil (N° Lexbase : L3304ABY) (droit au respect de la vie privée), ni le médecin se libérer de l'obligation de secret médical (C. santé publ., art. R. 4127-4 N° Lexbase : L8698GTC), institué dans l'intérêt des patients. Les médecins conseils de la CNAMTS sont donc justifiés à refuser de transmettre des données médicales au juge au nom du principe du secret médical.

L'amendement adopté visait à pallier cette situation en prévoyant que les dispositions de l'article 226-13 du Code pénal ne sont pas opposables au médecin expert ou consultant. A la demande de l'employeur, ce rapport est notifié au médecin qu'il mandate à cet effet. La victime de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle est informée de cette notification. Mais le Conseil constitutionnel (décision n° 2008-571 DC du 11 décembre 2008, préc.) a censuré cet article 99 de la LFSS 2009 autorisant, en cas de contestation d'une décision relative à la fixation du taux d'incapacité d'une victime, la transmission du rapport médical à un médecin placé auprès de la juridiction saisie. En effet, ces dispositions n'ont pas d'effet ou ont un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement : par suite, elles ne trouvent pas leur place dans une loi de financement de la Sécurité sociale.

  • Maintien des indemnités journalières versées à la suite d'un accident du travail ou une maladie professionnelle (art. 100)

L'article L. 433-1 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L3044ICQ) prévoit la possibilité de maintenir le versement d'une indemnité journalière pour accident du travail ou maladie professionnel en cas de reprise d'un travail léger autorisé par le médecin traitant, si cette reprise est reconnue par le médecin-conseil de la caisse primaire comme de nature à favoriser la guérison ou la consolidation de la blessure. L'article 100 de la LFSS 2009 prévoit d'étendre cette possibilité dans deux cas : lorsque la victime demande à accéder, avec l'accord du médecin traitant, aux actions de formation professionnelle ; au cours de la période pendant laquelle la victime d'un accident du travail ne peut plus recevoir de rémunération liée à son activité salariée et pendant laquelle l'employeur n'a pas encore fait part de sa décision de reclassement ou de licenciement de la personne concernée, celui-ci disposant d'un délai de 30 jours. Cette mesure fait, également, suite à une recommandation de l'accord des partenaires sociaux du 25 avril 2007 (6).

C - Branche famille

  • Transfert, à la branche famille, de l'intégralité du financement des majorations de pensions pour les parents de 3 enfants

Depuis le 1er janvier 2003, les dépenses dues aux majorations de pensions accordées en fonction du nombre d'enfants, prises en charge par le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) au titre de l'article L. 135-2 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L3303HWA), font l'objet d'une contribution à hauteur de 60 % de ces dépenses par la Caisse nationale d'assurance familiale (CNAF) (CSS, art. L. 223-1 N° Lexbase : L3109IC7). Selon les travaux parlementaires, si l'on considère cette majoration de pension comme un élément important de la politique familiale, il serait préférable, du point de vue de la lisibilité des missions des différents organismes, que cet avantage familial soit intégralement pris en charge par la branche famille.

La LFSS 2009 (art. 105) transfert à la branche famille, progressivement, sur 3 ans, le financement des majorations de pensions pour les parents de 3 enfants. A titre transitoire, la loi prévoit que le versement de la CNAF au Fonds de solidarité vieillesse sera de 70 % pour l'année 2009 et de 85 % pour l'année 2010. La prise en charge intégrale des ces dépenses sera effective en 2011. Mais ce transfert de charges, qui permet, avant tout, d'alléger les dépenses du Fonds de solidarité vieillesse (qui retrouve une situation de déficit), pèsera sur l'équilibre de la branche famille avec un coût prévisionnel de 415 millions d'euros. Ce transfert sera majoritairement responsable du déficit prévu pour cette branche en 2009.

  • Modulation du montant du complément de libre-choix du mode de garde en fonction des horaires de travail atypiques des parents

La LFSS 2009 (art. 107) instaure une majoration du complément de libre-choix du mode de garde pour compenser les surcoûts liés à la garde de jeunes enfants lors d'horaires atypiques. En effet, le rapport annuel de la Commission européenne sur la situation de l'emploi en 2006 et l'Enquête Emploi de 2007, ont souligné le développement en France d'horaires de travail décalés ou atypiques (en soirée, de nuit ou le dimanche), qui concernent environ 14 % des familles avec de jeunes enfants. Or, lors de ces périodes, la garde d'enfants est plus coûteuse. La LFSS 2009 propose de remédier à cette situation en modifiant le Code de la Sécurité sociale (CSS, art. L. 351-5 N° Lexbase : L7661DKX) afin de tenir compte des horaires de travail des parents dans l'attribution de l'allocation du complément de mode de garde. Un décret ultérieur devrait préciser les modalités pour bénéficier de cette majoration. Une telle mesure est justifiée par les difficultés croissantes des familles à trouver un mode de garde adapté à leur vie professionnelle.

  • Assouplissement des conditions d'exercice de la profession d'assistant maternel

La LFSS 2009 (art. 108) introduit deux mesures visant à améliorer l'offre d'accueil de jeunes enfants par les assistants maternels, dans le contexte de volonté du Gouvernement de mettre en place, dès 2012, un droit à l'accompagnement à la garde d'enfant, ce qui impliquerait, selon le Centre d'analyse stratégique, la création de 350 000 places d'accueil dans les cinq ans.

La première mesure consiste à permettre aux assistants maternels d'accueillir simultanément, à leur domicile, jusqu'à quatre enfants (au lieu de 3 actuellement). Le texte original permettait que ces 4 enfants soient âgés de moins de 3 ans, mais cette possibilité a été supprimée en première lecture par le Sénat. Le coût de ce premier dispositif est évalué à 50 millions d'euros, dans la mesure où il devrait accroître le nombre de bénéficiaires du complément de libre-choix du mode de garde de la PAJE à raison d'environ 5 000 euros par an et par place créée, ce dernier montant étant estimé à 10 000.

La seconde mesure autorise le regroupement d'assistants maternels en dehors de leur domicile, afin d'accueillir plus d'enfants, dans le cadre d'une convention entre la collectivité locale, la caisse d'allocations familiales et l'assistant maternel concerné et sur autorisation du président du Conseil général. Cette mesure devrait permettre d'accroître l'offre de garde (7).

II - Lutte contre la fraude

A - Révision de la procédure des pénalités financières

L'article 13 de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004, relative à l'assurance maladie (N° Lexbase : L0836GT7), a procédé à la réforme de la procédure des pénalités financières en cas d'abus ou de fraude des professionnels, des établissements de santé et des assurés. Ce dispositif a montré des limites, dont témoignent les données chiffrées : en 2006, 48 pénalités ont été prononcées pour un montant total de 66 000 euros, alors que, pour la même année, 4 661 cas de fraude ont été détectés. En 2007, le nombre de pénalités prononcées s'élève à 207, pour un montant total de 307 000 euros (8).

Les causes de dysfonctionnement sont multiples :

- la procédure actuelle ne permet pas de poursuivre un nombre important de comportements, pourtant, répréhensibles (comme les actes fictifs ou les obstacles aux contrôles) ;

- elle prévoit un plafond et un barème fixe applicables, sans distinction, à tous les auteurs d'infraction (assuré ou établissement de santé) et quel que soit le type d'infraction. Ce plafond est fixé à deux fois le plafond mensuel de la Sécurité sociale (montant trop réduit par rapport à la gravité de certains actes dissuade souvent le directeur de l'organisme local d'assurance maladie de poursuivre la procédure) ;

- le dispositif actuel ne permet pas d'interrompre la procédure pour des cas fautifs ne nécessitant pas forcément de sanction. Une procédure de mise en garde a été introduite par voie réglementaire mais s'est avérée inadaptée ;

- la réunion de commissions spécifiques au sein de l'organisme local d'assurance maladie est une procédure lourde. Les coûts de gestion et d'organisation de cette procédure seraient plus importants que les pénalités prononcées ;

- la procédure s'avère, enfin, inadaptée en cas de dossiers concernant plusieurs organismes locaux d'assurance maladie et longue en cas de fraude lourde.

La LFSS 2009 s'est attachée à répondre à chacune de ces carences. L'article 112-I (CSS, art. L. 162-1-14 N° Lexbase : L3029IC8) définit les personnes ou organismes susceptibles d'être sanctionnées : assuré, employeur, professionnel et établissement de santé. La loi élargit le champ d'application des pénalités à des cas de fraude qui, en l'état actuel du droit, ne peuvent être poursuivies : il s'agit, notamment, des abus en matière de couverture maladie universelle complémentaire, d'aide médicale de l'Etat et d'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé ; il introduit la notion de "fraude en bande organisée".

L'article 115-II de la LFSS 2009 énumère les cas d'infractions ou omissions susceptibles d'être sanctionnés, de façon extensive et plus précise qu'en l'état actuel du droit : l'inobservation des règles du Code de la Sécurité sociale, du Code de la santé publique ou du Code de l'action sociale et des familles ayant abouti à une demande, une prise en charge ou un versement indu d'une prestation ; l'obstacle aux contrôles ou à la bonne gestion de l'organisme ; le défaut de déclaration en cas de changement de situation ; l'agissement visant à obtenir, par une fausse déclaration, la protection complémentaire ou le bénéfice du crédit d'impôt pour bénéficier de cette assurance, ou encore l'aide médicale de l'Etat ; le refus de transmission de certaines informations ; les récidives sous certaines conditions ; les abus constatés en matière de soins et de prescriptions d'arrêt de travail ; le refus par un professionnel de santé de reporter dans le dossier médical personnel les éléments issus de chaque acte ou consultation ; le non-respect par les employeurs des obligations de déclaration des accidents du travail ; et le fait d'organiser ou de participer au fonctionnement d'une fraude en bande organisée.

L'article 115-III définit les différents types de pénalités pouvant être prononcées : une pénalité forfaitaire, dans la limite de deux fois le plafond mensuel de la Sécurité sociale, pour les abus dont le montant n'est pas déterminé ou difficilement déterminable ; une pénalité proportionnelle, dans les autres cas, dans la limite de 50 % du montant de l'abus constaté. Il est, également, tenu compte des prestations servies au titre de la protection complémentaire en matière de santé et de l'aide médicale de l'Etat. En cas de récidive, le montant de la pénalité est doublé.

L'article 115-IV définit la procédure contradictoire de notification des faits reprochés à la personne mise en cause et précise les droits de la défense. Dans le cadre de cette nouvelle procédure, est ouverte la possibilité pour le directeur de l'organisme local d'assurance maladie, avant la saisine de la commission, de ne pas poursuivre la procédure et de prononcer, dans certains cas, un avertissement à l'intéressé.

L'article 115-VI vise les cas de fraude concernant plusieurs organismes locaux d'assurance maladie et instaure une possibilité de délégation de compétences entre organismes. L'article 115-VII prévoit des pénalités financières renforcées en cas de fraude grave, définie par voie réglementaire : la sanction peut être prononcée par le directeur de l'organisme local d'assurance maladie sans sollicitation de la commission ; les plafonds de pénalités sont majorés, respectivement à 200 % et quatre fois le plafond mensuel de la Sécurité sociale. Pour la fraude en bande organisée, le plafond est porté à 300 % des sommes indûment présentées au remboursement ; un plancher de pénalité est instauré et modulé en fonction des personnes poursuivies.

B - Renforcement des procédures permettant le recouvrement des indus de prestations sociales

L'article 118 de la LFSS 2009 prévoit d'améliorer le recouvrement des indus : en étendant aux organismes du régime général le pouvoir de contrainte dont disposent déjà les caisses de mutualité sociale agricole ; et en permettant de recouvrer des indus d'une prestation familiale sur d'autres prestations et réciproquement. Le 1° du I de l'article 118 (CSS, art. L. 161-1-5 N° Lexbase : L2949IC9) prévoit de confier des pouvoirs supplémentaires au directeur d'un organisme de Sécurité sociale en vue de recouvrer une prestation indûment versée. Celui-ci pourra, désormais, dans les délais et selon les conditions fixés par voie réglementaire, délivrer une contrainte qui, à défaut d'opposition du débiteur devant la juridiction compétente, comporte tous les effets d'un jugement et confère, notamment, le bénéfice de l'hypothèque judiciaire. Cette disposition est rendue possible, sans préjudice des articles L. 133-4 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L4647H9Y) et L. 725-3-1 du Code rural (N° Lexbase : L9654G7P) (qui traitent, notamment, des moyens de contrôle à disposition des organismes de Sécurité sociale pour apprécier le droit aux prestations). Un tel pouvoir de contrainte existe, déjà, dans certains cas : les organismes de sécurité sociale peuvent, ainsi, délivrer des contraintes pour recouvrer les cotisations de sécurité de sociale impayées (CSS, art. L. 244-9 N° Lexbase : L4979ADR) ; les sommes indûment perçues par les professionnels de santé et les établissements de santé qui ne respectent pas les règles de tarification ou de facturation (CSS, art. L. 133-4) ; les pénalités financières sanctionnant l'inexactitude ou le caractère incomplet des déclarations ou l'absence de déclaration d'un changement dans la situation justifiant le versement des prestations (CSS, art. L. 114-17 N° Lexbase : L2776HIN et L. 162-1-14 N° Lexbase : L3029IC8). Les autres organismes n'ont pas cette possibilité : en cas de non-paiement des sommes dues, ils sont obligés de saisir le tribunal des affaires de Sécurité sociale pour obtenir un titre exécutoire et exercer le recouvrement selon les voies de droit commun. Tous les organismes pourront, désormais, recourir à cette procédure, exorbitante du droit commun, lorsqu'il s'agira de recouvrer des indus de prestations. Elle sera tout particulièrement utile aux caisses d'allocations familiales, qui exercent, chaque année, après échec de la procédure de recouvrement amiable, près de 27 000 recours en répétition d'indus.

L'article 118 de la LFSS 2009 instaure une forme de "fongibilité" des prestations en cas de récupération d'indus. Actuellement, un indu de prestations sociales ne peut être récupéré par les organismes débiteurs que sur les prestations du même fonds : les indus de prestations familiales sont, ainsi, recouvrés sur les seules prestations familiales (CSS, art. L. 553-2 N° Lexbase : L2884ICS), les indus d'allocation de logement sociale sur cette seule allocation (CSS, art. L. 835-3 N° Lexbase : L2852ICM) et les indus d'aide personnalisée au logement sur la seule aide personnalisée au logement (CCH, art. L. 351-11 N° Lexbase : L8404HEY). L'article 118 a pour objectif de faciliter le recouvrement des indus, en permettant aux organismes débiteurs des prestations familiales de recouvrer l'indu d'une allocation sur les autres aides versées à l'allocataire. Cette mesure vise, ainsi, à mettre fin à une incohérence du dispositif actuel où des allocations continuent d'être versées alors que des sommes sont réclamées simultanément au même bénéficiaire mais au titre d'autres prestations. Initialement, ce dispositif ne s'appliquait qu'à trois prestations : prestations familiales, allocation de logement sociale et aide personnalisée au logement. La formule utilisée est, à chaque fois, la même : par exemple, tout paiement indu de prestations familiales est récupéré, sous réserve que l'allocataire n'en conteste pas le caractère indu, par retenues sur les prestations à venir ou par remboursement intégral de la dette en un seul versement si l'allocataire opte pour cette solution. A défaut, l'organisme payeur peut, dans des conditions fixées par décret, procéder à la récupération de l'indu par retenues sur les échéances à venir dues soit au titre de l'allocation de logement sociale, soit au titre de l'APL.

Cette compensation inter-fonds est limitée, dans un premier temps, au fonds national des prestations familiales (FNPF) et au fonds national d'aide au logement (FNAL) et ne concerne donc que les seuls recouvrements des prestations familiales et des aides personnelles au logement. Elle a vocation à être étendue à terme au revenu de solidarité active, dès que les modalités techniques auront été fixées en lien avec les départements. La LFSS 2009 a accéléré cette démarche et a prévu d'inclure dans le champ de cette "fongibilité" l'allocation aux adultes handicapés et le revenu de solidarité active. A défaut de pouvoir être récupéré sur la prestation initiale, un indu de prestations familiales pourra, ainsi, être récupéré sur l'allocation aux adultes handicapés, ainsi que sur le complément de ressources et la majoration pour la vie autonome (dans la limite de la retenue mensuelle calculée selon le barème de recouvrement personnalisé, qui tient compte de la capacité contributive de l'allocataire) ou sur le revenu de solidarité, et vice-versa. Compte tenu des travaux techniques préalables, la date d'effet des dispositions relatives l'élargissement de ce mécanisme au RSA est fixée au 1er janvier 2010.


(1) Les mesures relatives à l'emploi des seniors et à la branche vieillesse feront l'objet d'une analyse particulière, à paraître dans le prochain numéro de Lexbase Hebdo - édition sociale.
(2) J.-J. Jégou, Avis Sénat n° 84 (2008-2009), pp. 101-159 ; A. Vasselle, Rapport Sénat n° 83 (2008-2009), tome VII, examen des articles, pp. 130-212 ; A. Vasselle, Rapport Sénat n° 83, 2008-2009, tome II, Assurance maladie.
(3) Créée par la loi n° 2004-810 du 13 août 2004, relative à l'assurance maladie (N° Lexbase : L0836GT7), l'UNOCAM regroupe les représentants des mutuelles, des institutions de prévoyance et les sociétés d'assurance qui offrent des prestations d'assurance maladie complémentaire. Les missions de l'UNOCAM sont définies aux articles L. 182-2 (N° Lexbase : L2870ICB) et L. 182-3 (N° Lexbase : L3046ICS) du Code de la Sécurité sociale. Elles visent à renforcer le dialogue entre l'assurance maladie et les organismes complémentaires. La LFSS 2008 les a élargies, en prévoyant, notamment, une meilleure association de l'UNOCAM, en cas de déclenchement de la procédure d'alerte (loi n° 2007-1786 du 19 décembre 2007, de financement de la Sécurité sociale pour 2008 N° Lexbase : L5482H3G).
(4) G. Dériot, Rapport Sénat n° 83 2008-2009, tome VI, Accidents du travail et maladies professionnelles ; A. Vasselle, Rapport Sénat n° 83, 2008-2009, Tome VII, examen des articles, p. 277-287 ; J.-J. Jégou, Avis Sénat n° 84, 2008-2009, p. 203-212.
(5) Cass. civ. 2, 13 novembre 2008, n° 07-18.364, CNAMTS, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A2340EBB) et nos obs., Contentieux des accidents du travail : entre procès équitable et secret médical, quel arbitrage ?, Lexbase Hebdo n° 328 du 27 novembre 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N7623BHS).
(6) J.-J. Jégou, Avis Sénat n° 84, 2008-2009, préc., p. 210.
(7) J.-J. Jégou, Avis Sénat n° 84, 2008-2009, préc., p. 210 ; A. Vasselle, Rapport Sénat n° 83, 2008-2009, tome VII, examen des articles, préc., p. 288-298 ; J.-J. Jégou, Avis Sénat n° 84, 2008-2009, préc., p. 195-202.
(8) J.-J. Jégou, Avis Sénat n° 84, 2008-2009, préc., p. 210 ; A. Vasselle, Rapport Sénat n° 83, 2008-2009, tome VII, examen des articles, préc., p. 305-319 ; J.-J. Jégou, Avis Sénat n° 84, 2008-2009, préc., p. 213-222.

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