Le Quotidien du 19 mai 2022

Le Quotidien

Baux commerciaux

[Brèves] Baux dérogatoires : effets de la délivrance d’un congé antérieurement au terme du dernier des baux dérogatoires successifs

Réf. : Cass. civ. 3, 11 mai 2022, n° 21-15.389, FS-B N° Lexbase : A56187WY

Lecture: 3 min

N1493BZC

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par Vincent Téchené

Le 18 Mai 2022

► Un congé, délivré antérieurement au terme du dernier des baux dérogatoires successifs, dont la durée cumulée ne dépasse pas la durée légale, et qui manifeste la volonté des bailleurs de ne pas laisser le locataire se maintenir dans les lieux, le prive de tout titre d'occupation à l'échéance de ce bail.

Faits et procédure. Les propriétaires d'une parcelle de terrain sur laquelle sont édifiés une maison et deux chalets meublés ont consenti à une société une location commerciale, dérogatoire au statut des baux commerciaux, pour une durée d'un an à compter du 1er juillet 2015, renouvelable tacitement pour la même durée dans la limite de trois années au total. Les bailleurs ont signifié à la locataire, le 28 juin 2017, un congé à effet du 30 juin 2017, puis l'ont assignée en libération des lieux et en paiement d'une indemnité d'occupation.

C’est dans ces conditions que la cour d’appel de Saint-Denis de La Réunion a déclaré la locataire occupante sans droit ni titre depuis le terme du bail, le 30 juin 2017, a ordonné sous astreinte la libération des locaux occupés, au besoin par voie d'expulsion et a fixé l'indemnité d'occupation due aux bailleurs. La locataire s’est donc pourvue en cassation.

Décision. La Cour de cassation énonce qu’un congé, délivré antérieurement au terme du dernier des baux dérogatoires successifs, dont la durée cumulée ne dépasse pas la durée légale, et qui manifeste la volonté des bailleurs de ne pas laisser le locataire se maintenir dans les lieux, le prive de tout titre d'occupation à l'échéance de ce bail.

Or, la cour d’appel a relevé que le contrat de bail dérogatoire prévoyait qu'il était « consenti et accepté pour une durée d'une année qui a commencé à courir rétroactivement du 1er juillet 2015 pour se terminer le 30 juin 2016 et qu'il sera renouvelé tacitement à l'issue de la première année et ainsi chaque année, sans dépasser une durée maximum de trois ans » et qu'aucun délai de prévenance, hormis l'antériorité du congé au regard de la date d'expiration du bail, n'était imposé au bailleur. La cour d’appel a alors retenu que les bailleurs avaient fait connaître, par acte d'huissier du 28 juin 2017 antérieur au terme normal du bail, leur volonté de ne pas poursuivre celui-ci, de sorte qu’elle en a exactement déduit que la locataire ne pouvait se prévaloir d'un défaut de respect des dispositions de l'article L. 145-41 du Code de commerce N° Lexbase : L1063KZE, applicables aux seuls baux commerciaux statutaires.

En conséquence, la Cour de cassation rejette le pourvoi.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les baux dérogatoires, in Baux commerciaux, (dir. J. Prigent), Lexbase N° Lexbase : E1320AEM.

 

newsid:481493

Baux d'habitation

[Brèves] Délai de prescription du recours subrogatoire d’une association caution d’un preneur à bail d’habitation ?

Réf. : Cass. civ. 3, 11 mai 2022, n° 20-23.335, FS-B N° Lexbase : A56357WM

Lecture: 4 min

N1533BZS

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 18 Mai 2022

► Le délai applicable au recours subrogatoire intenté par une association, caution solidaire d’un preneur à bail d’habitation, contre ce dernier, au titre des loyers et charges impayés qu’elle a réglés, est celui de l'article 7-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, soit trois ans.

Faits et procédure. En l’espèce, ayant réglé des loyers et charges impayés, l’association qui s’était portée caution solidaire des engagements des preneurs d'un local à usage d'habitation, subrogée dans les droits du bailleur, avait obtenu du juge d'instance une ordonnance en injonction de payer à l'encontre de laquelle l’un des copreneurs avait formé opposition.

Ce dernier faisait grief à l'arrêt de déclarer recevable l'action de l'association et de le condamner en conséquence à lui payer une certaine somme, invoquant l’application des dispositions de l'article L. 137-2, devenu L. 218-2, du Code de la consommation N° Lexbase : L1585K7T, selon lesquelles l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans.

Délai applicable au recours subrogatoire de la caution ? La question se posait donc de savoir quel était le délai applicable : le délai de deux ans prévu par l'article L. 137-2, devenu L. 218-2, du Code de la consommation, applicable à l’action des professionnels ? Ou le délai de prescription de trois ans applicable aux actions dérivant d'un contrat de bail d'habitation en application de l'article 7-1 de la loi n° 89-462, du 6 juillet 1989 N° Lexbase : L8461AGH ?

Réponse de la Cour de cassation. Dans la lignée d’un arrêt rendu un an auparavant, presque jour pour jour, par la Chambre commerciale, la troisième chambre civile de la Cour de cassation rappelle qu’il résulte de l'article 2306 du Code civil, dans sa version applicable N° Lexbase : L1204HIG, que l'action subrogatoire de la caution contre le débiteur est soumise à la même prescription que celle applicable à l'action du créancier contre le débiteur (Cass. com., 5 mai 2021, n° 19-14.486, F-P N° Lexbase : A33194RD).

Or, ainsi que le relève la Haute juridiction, le délai de prescription des actions dérivant d'un contrat de bail d'habitation étant spécifiquement fixé à trois ans par les dispositions de l'article 7-1 de la loi n° 89-462, du 6 juillet 1989, l'article L. 137-2, devenu L. 218-2, du Code de la consommation ne leur est pas applicable.

Elle approuve alors les conseillers nîmois ayant, à bon droit, retenu que le délai applicable au recours subrogatoire intenté par l'association contre le locataire était celui de l'article 7-1 de la loi n° 89-462, du 6 juillet 1989 ; ayant constaté que moins de trois ans s'étaient écoulés entre son point de départ et l'acte interruptif de prescription, la cour d’appel en avait exactement déduit que l'action était recevable (CA Nîmes, 23 juillet 2020, n° 19/00147 N° Lexbase : A65013R9).

Spécificité du cautionnement donné dans le cadre d’un bail d’habitation. On ajoutera, enfin, que cette décision fait écho à un arrêt rendu le 17 février 2022, ayant donné l’occasion à la Cour de cassation de relever la spécificité du cautionnement donné dans le cadre d’un bail d’habitation, énonçant que « le cautionnement donné dans le cadre d'un bail d'habitation régi par la loi du 6 juillet 1989 fait l'objet d'un régime propre, exclusif de celui mis en place pour la protection de la caution à l'égard des créanciers professionnels » (Cass. civ. 3, 17 février 2022, n° 21-12.934, FS-B N° Lexbase : A40677NX ; v. V. Téchené, Cautionnement d’un bail d’habitation : pas d’application des dispositions du Code de la consommation relatives à l’obligation d’information et à la mention manuscrite de la caution, Le Quotidien Lexbase, 24 février 2022 N° Lexbase : N0486BZZ).

Le cautionnement donné dans le cadre d’un bail d’habitation suit donc résolument un régime spécifique, concernant tant les rapports de la caution avec les créanciers, que ceux avec le débiteur dans le cadre du recours subrogatoire.

Réforme du droit des sûretés. La solution retenue par le présent arrêt est pleinement reconductible après l’entrée en vigueur de la réforme du droit des sûretés (ordonnance n° 2021-1192, du 15 septembre 2021 N° Lexbase : L8997L7D), le 1er janvier 2022. Désormais, le siège textuel du recours subrogatoire est le nouvel article 2309 du Code civil N° Lexbase : L0164L8L

newsid:481533

Construction

[Brèves] Risque pour la santé des occupants = gravité décennale

Réf. : Cass. civ. 3, 11 mai 2022, n° 21-15.608, FS-B N° Lexbase : A56527WA

Lecture: 4 min

N1485BZZ

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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC et Paris Saclay, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

Le 18 Mai 2022

► L’assureur dommages-ouvrage ne garantit les dommages de nature décennale que s’ils sont apparus, dans leur gravité décennale, dans le délai d’épreuve de dix ans à compter de la réception ;
► le risque sanitaire rend l’ouvrage impropre à sa destination.

L’arrêt rapporté présente deux intérêts : celui de rappeler les critères du dommage futur, d’une part, et celui de caractériser la gravité décennale en cas de danger pour la sécurité des personnes, d’autre part.

  • Sur le dommage futur

Le délai décennal est un délai d’épreuve et un délai d’action. En tant que délai d’action, il doit être valablement interrompu, par exemple par une citation en justice, dans le délai de dix ans suivant la réception de l’ouvrage. En tant que délai d’épreuve, les conditions de l’engagement de la responsabilité civile décennale des constructeurs doivent, également, survenir dans le délai décennal. La condition de gravité n’y fait pas obstacle.

Cette double exigence s’accommode mal avec la garantie des dommages futurs, lesquels, pour reprendre les exigences posées par le droit commun, sont des dommages qui vont survenir de façon certaine, dans leur gravité décennale, dans le futur. Autrement dit, à la date de l’interruption du délai décennal, le critère de gravité n’est pas rempli mais il le sera de façon certaine un jour. Toute la question est donc de savoir si ce « jour » doit survenir dans le délai décennal, ce qui serait alors une limitation par rapport au droit commun.

La réponse est, comme le confirme l’arrêt rapporté, positive.

Le dommage futur est réparable sur le fondement de la responsabilité décennale des constructeurs à deux conditions. Il doit, d’une part, être dénoncé dans le délai d’épreuve décennal et, d’autre part, revêtir la gravité décennale dans le délai décennal. La jurisprudence est désormais bien établie (v. pour exemple, Cass. civ. 3, 8 octobre 2003, n° 01-17.868, FS-P+B+I N° Lexbase : A7162C97 ou, plus récemment, Cass. civ. 3, 20 avril 2017, n° 17-23.190, FS-P+B+I N° Lexbase : A5429YES ; Cass. civ. 3, 18 mars 2021, n° 19-20.710, F-D N° Lexbase : A88264LH).

Par voie de conséquence, en l’absence de désordre décennal constaté dans le délai d’épreuve, les demandes formées à l’encontre de l’assureur dommages-ouvrage ne peuvent être accueillies.

  • Sur le risque sanitaire

L’article 1792 du Code civil N° Lexbase : L1920ABQ exige la démonstration d’un dommage d’une particulière gravité. Aux deux cas légaux prévus par cet article que sont, d’un côté, l’atteinte à la solidité de l’ouvrage et, de l’autre, l’impropriété à la destination, la jurisprudence a consacré un troisième cas de gravité décennale : l’atteinte à la sécurité des personnes.

La notion d’impropriété à destination permet de faire entrer de nombreux dommages dans le champ d’application de la responsabilité décennale des constructeurs comme le rapporte la présente décision. En l’espèce, la Haute juridiction a considéré comme étant un dommage de nature décennale, l’absence de raccordements des évents qui provoquent des odeurs nauséabondes présentant un danger pour la santé des personnes.

La solution n’est pas nouvelle et mérite d’être confirmée. L’ « impropriété-dangerosité », comme l’appelle la doctrine, est réparée sur le fondement décennal. Il s’agit des hypothèses où l’ouvrage présente un risque de danger soit pour ceux qui l’habitent, soit pour les passants, comme par exemple, une installation de gaz présentant un risque d’explosion (Cass. civ. 3, 10 mars 1981, n° 80-10.069, publié au bulletin N° Lexbase : A8898CGN), un risque d’éboulement de talus sur une maison (Cass. civ. 3, 12 septembre 2012, n° 11-16.943, FS-P+B N° Lexbase : A7533ISS) ou, encore, une non-conformité à la règlementation parasismique (Cass. civ. 3, 25 mai 2005, n° 03-20.247, FS-P+B N° Lexbase : A4203DII).

newsid:481485

Environnement

[Brèves] Validation de l’exemption pour certains moulins à eau des obligations visant à assurer la continuité écologique des cours d'eau

Réf. : Cons. const., décision n° 2022-991 QPC, du 13 mai 2022 N° Lexbase : A86377WS

Lecture: 2 min

N1521BZD

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par Yann Le Foll

Le 18 Mai 2022

► L’exemption pour certains moulins à eau des obligations visant à assurer la continuité écologique des cours d'eau prévue par la loi ne constitue pas une méconnaissance de la Charte de l'environnement, ni du principe d'égalité (sur renvoi de CE 5°-6° ch. réunies, 8 mars 2022, n° 459292 N° Lexbase : A94847PX).

Objet QPC. L'article L. 214-18-1 du Code de l'environnement N° Lexbase : L0177LDW, dans sa rédaction issue de la loi n° 2017-227 du 24 février 2017 N° Lexbase : L0067LDT, exempte les moulins à eau équipés pour produire de l'électricité des règles que l'administration peut édicter pour assurer la migration des poissons et le transport des sédiments et qui tendent à préserver la continuité écologique de ces cours d'eau (voir, sur la portée de la notion « d’ouvrage régulièrement installé » s’agissant d’un moulin à eau bénéficiant d’un droit fondé en titre, CE 5°-6° ch. réunies, 31 mai 2021, n° 433043, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A57314TG).

Réponse des Sages. Il ressort des travaux parlementaires que le législateur a entendu non seulement préserver le patrimoine hydraulique, mais également favoriser la production d'énergie hydroélectrique qui contribue au développement des énergies renouvelables. Il a, ce faisant, poursuivi des motifs d'intérêt général.

En outre, d’une part, cette exemption ne concerne que les moulins à eau équipés pour produire de l'électricité et qui existent à la date de publication de la loi du 24 février 2017. D'autre part, elle ne s'applique pas aux ouvrages installés sur les cours d'eau en très bon état écologique, qui jouent le rôle de réservoir biologique ou dans lesquels une protection complète des poissons est nécessaire.

En dernier lieu, les dispositions contestées ne permettent de déroger qu'aux règles découlant du 2° du paragraphe I de l'article L. 214-17 du Code de l'environnement N° Lexbase : L6867L7H et ne font pas obstacle, en particulier, à l'application de l'article L. 214-18, qui impose de maintenir un débit minimal garantissant en permanence la vie, la circulation et la reproduction des espèces aquatiques.

Décision. La QPC est donc rejetée.

newsid:481521

Fiscalité locale

[Brèves] Droit de suite en matière de taxe foncière : le Conseil constitutionnel a tranché et c’est un non !

Réf. : Cons. const., décision n° 2022-992 QPC, du 13 mai 2022 N° Lexbase : A86387WT

Lecture: 4 min

N1477BZQ

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par Marie-Claire Sgarra

Le 18 Mai 2022

Le 2° du 2 de l'article 1920 du CGI, dans sa rédaction résultant de la loi n° 84-1208, du 29 décembre 1984, de finances pour 1985, relatif au droit de suite donné à l’administration en matière de taxe foncière, est contraire à la Constitution.

Pour rappel, le privilège du Trésor en matière de contributions directes et taxes assimilées s'exerce avant tout autre sur les meubles et effets mobiliers appartenant aux redevables en quelque lieu qu'ils se trouvent. Ce privilège s'exerce, lorsqu'il n'existe pas d'hypothèques conventionnelles, sur tout le matériel servant à l'exploitation d'un établissement commercial, même lorsque ce matériel est réputé immeuble par application des dispositions du premier alinéa de l'article 524 du Code civil (CGI, art. 1920, 1 N° Lexbase : L5788MAM).

Que prévoient les dispositions au litige ? Aux termes de l’article 1920, 2, 2, du CGI, le privilège établi à l’article 1920, 1, précité s’exerce pour la taxe foncière sur les récoltes, fruits, loyers et revenus des biens ou immeubles sujets à la contribution.

Précisions. Les dispositions de l'article 1920, 2, 2, du CGI sont interprétées de façon constante par la Cour de cassation en ce sens que le privilège spécial mobilier du Trésor pour le recouvrement de la taxe foncière comporte un droit de suite et s'exerce donc sur les récoltes, fruits, loyers et revenus de l'immeuble après que le redevable de la taxe foncière l'a cédé (Cass. com., 28 mars 2006, n° 03-13.822, FS-P+B N° Lexbase : A8484DNK).

Lire en ce sens sur cet arrêt, V. Le Quintrec, Le privilège spécial du Trésor en matière de taxe foncière est assorti d'un droit de suite, Lexbase Fiscal, avril 2006, n° 210 N° Lexbase : N6937AK7.

La doctrine administrative va dans le même sens (BOI-REC-GAR-10-10-20-10 n° 240 N° Lexbase : X5156ALK) : « Le privilège spécial mobilier du Trésor est limité aux fruits de l'immeuble imposé : le Trésor n'a pas le privilège spécial sur les fruits des autres immeubles du contribuable. Il engendre un droit de suite : il atteint tous les revenus des immeubles imposés, sans qu'il soit besoin de distinguer si ces immeubles sont restés la propriété du contribuable ou s'ils ont été vendus à l'amiable ou judiciairement. Cette solution s'explique dans la mesure où l'impôt est une charge de l'immeuble lui-même. Dès lors, il est possible de saisir par voie de saisie administrative à tiers détenteur des loyers dus par un locataire d'un immeuble à raison des taxes foncières concernant cet immeuble, quand bien même l'immeuble en question ne serait plus la propriété du contribuable inscrit au rôle. »

Solution du Conseil constitutionnel

Les dispositions contestées prévoient que, pour le recouvrement de la taxe foncière, ce privilège s'exerce sur les récoltes, fruits, loyers et revenus des biens immeubles sujets à la contribution. En adoptant ces dispositions, le législateur a entendu garantir le recouvrement des créances publiques. Il a ainsi poursuivi un objectif d'intérêt général.

Toutefois, ces dispositions, telles qu'interprétées par la jurisprudence constante de la Cour de cassation rappelées ci-dessus, permettent que, en cas de transfert de propriété de l'immeuble, la créance de taxe foncière de l'ancien propriétaire puisse être recouvrée sur les loyers dus au nouveau propriétaire. En mettant cette créance à la charge de ce dernier, alors qu'il n'est ni le redevable légal de cet impôt ni tenu solidairement à son paiement, ces dispositions portent à son droit de propriété une atteinte disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi.

Les dispositions contestées sont contraires à la Constitution.

À noter :

  • les dispositions déclarées contraires à la Constitution, dans leur rédaction contestée, ne sont plus en vigueur ;
  • la déclaration d'inconstitutionnalité est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à la date de publication de la présente décision.

 

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les privilègesLes privilèges mobiliers spéciaux du Trésor, in Droit des sûretés, (dir. G. Piette), Lexbase N° Lexbase : E8689EPI.

newsid:481477

Procédure pénale

[Brèves] CRPC et recours : la déclaration d’irrecevabilité d’une seconde requête fondée sur le rejet de la première demande d’homologation ne peut faire l’objet d’un pourvoi en cassation

Réf. : Cass. crim., 17 mai 2022, n° 21-86.131, FS-B N° Lexbase : A19947X7

Lecture: 2 min

N1513BZ3

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par Adélaïde Léon

Le 21 Juin 2022

► Ne constitue pas un excès de pouvoir, susceptible d’autoriser un pourvoi en cassation contre une ordonnance refusant l’homologation d’une peine proposée dans le cadre d’une procédure CRPC, l’ordonnance du juge délégué qui déclare irrecevable une seconde requête en homologation au motif que la première proposition de peine avait été elle-même rejetée.

Rappel des faits. Un homme a fait l’objet d’une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) du chef de blanchiment.

Le juge délégué par le président du tribunal judiciaire de Paris a refusé d’homologuer la peine proposée. Le procureur de la République financier a saisi le juge délégué d’une nouvelle proposition de peine.

Le juge délégué par le président du tribunal judiciaire de Paris a déclaré irrecevable la nouvelle requête en homologation de la peine proposée.

Le procureur de la République financier a formé un pourvoi contre cette dernière ordonnance.

Décision. La Chambre criminelle déclare le pourvoi irrecevable.

La Haute juridiction rappelle qu’aucun texte n’envisage la possibilité d’un recours contre une ordonnance de refus d’homologation des peines proposées par le procureur de la République dans le cadre d’une procédure de CRPC (à ce sujet, on rappellera que l'absence de voie de recours permettant de remettre en cause la décision de refus d'homologation a été déclarée conforme à la constitution par le Conseil constitutionnel dans une décision n° 2021-918 QPC, du 18 juin 2021 N° Lexbase : A39884WM).

Dans ces conditions, la Cour affirme qu’un pourvoi en cassation contre un refus d’homologation n’est possible que si son examen fait apparaître un risque d’excès de pouvoir relevant du contrôle de la Cour de cassation.

La Cour de cassation ajoute qu’il se déduit de l’article 495-12 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L0519LTE, qu’elle interprète à la lumière des travaux parlementaires relatifs aux lois n° 2004-204, du 9 mars 2004 N° Lexbase : L1768DP8 et n° 2018-898, du 23 octobre 2018 N° Lexbase : L5827LMR, qu’après un refus d’homologation, une nouvelle proposition ne peine ne peut autoriser la mise en œuvre d’une autre CRPC.

La Chambre criminelle déduit de ces constatations qu’en déclarant irrecevable la seconde requête en homologation au motif que la première proposition avait été elle-même rejetée, le juge délégué n’a pas excédé ses pouvoirs.

Au surplus, la Cour note que le pourvoi formé plus de cinq jours francs après le prononcé de l’ordonnance de refus d’homologation est intervenu tardivement.

newsid:481513

Procédure prud'homale

[Brèves] Prescription de cinq ans pour l’action en qualification d’un contrat en contrat de travail

Réf. : Cass. soc., 11 mai 2022, 2 arrêts, n° 20-18.084 N° Lexbase : A56447WX et n° 20-14.421, FS-B N° Lexbase : A56207W3

Lecture: 3 min

N1476BZP

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par Lisa Poinsot

Le 18 Mai 2022

L’action par laquelle une partie demande de qualifier un contrat, dont la nature juridique est indécise ou contestée, de contrat de travail revêt le caractère d’une action personnelle et se prescrit par cinq ans à compter de la cessation de la relation contractuelle.

Faits et procédure. Dans l’affaire n° 20-18.084, une justiciable, engagée en qualité de médecin-conseil, est licenciée le 4 mai 2018. Dans l'affaire n° 20-14.421, un individu travaille d’abord en tant que photographe, puis comme journaliste pigiste et enfin sous CDD en 2008 et en 2009, en remplacement d’un salarié absent, avant de reprendre une activité de pigiste jusqu’à mai 2015.

Ils saisissent chacun la juridiction prud’homale afin que soit constatée l’existence d’un contrat de travail.

Les cours d’appel (CA Versailles, 27 mai 2020, n° 17/04954 et CA Pau, 30 janvier 2020, n° 17.04127 N° Lexbase : A34753D3) constatent que :

  • pour le litige n° 20-18.084, la relation contractuelle, dont la qualification en contrat de travail est sollicitée, a pris fin le 31 mars 1992 et qu’à cette date la justiciable a tous les éléments lui permettant d’exercer son droit d’agir en justice ;
  • pour le litige n° 20-14.421, du fait de l’existence de relations contractuelles successives, le travailleur est en mesure de connaître, au mois au terme de son dernier CDD, les faits lui permettant d’exercer ses droits en vue d’obtenir la requalification de la relation contractuelle. Ce constat est justifié par les juges du fond par l’appréciation d’un courrier du 13 octobre 2010, dans lequel l’intéressé a sollicité la prise en charge d’un congé paternité.

Les cours d’appel en déduisent donc que :

  • pour le litige n° 20-18.084, l’intéressée a disposé d’un délai pour agir jusqu’au 19 juin 2013. Son action intentée le 24 septembre 2014 est alors prescrite ;
  • pour le litige n° 20-14.421, l’action en requalification peut être exercée jusqu’au 25 octobre 2015. Puisque le travailleur a saisi la juridiction prud’homale le 20 juillet 2016, son action est considérée comme prescrite.

La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi (n° 20-18.084) et casse le raisonnement de la cour d’appel (n° 20-14.421) en se fondant sur les articles 2224 du Code civil N° Lexbase : L7184IAC et L. 1471-1, alinéa 1 du Code du travail N° Lexbase : L1453LKZ dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387, du 22 septembre 2017 N° Lexbase : L7629LGN. Elle considère que le point de départ du délai de prescription de cinq ans est la date à laquelle la relation contractuelle a cessé puisque c’est à cette date que le titulaire connaît l’ensemble des faits lui permettant d’exercer son droit.

Pour aller plus loin : La Cour de cassation permet aux travailleurs indépendants de saisir le juge dans des délais plus longs que ceux applicables aux salariés dont la nature du contrat de travail n'est pas contestée. Sur ce point : v. ÉTUDES : Les compétences du conseil de prud’hommes, Les litiges liés à l’exécution du contrat de travail N° Lexbase : E3725ET7 et Les litiges liés à la rupture du contrat de travail, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E4960EXY.

 

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Responsabilité

[Brèves] L’obligation de conseil du vendeur professionnel : « attention au poids » ne suffit pas !

Réf. : Cass. civ. 1, 11 mai 2022, n° 20-22.210, F-B N° Lexbase : A56297WE

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par Claire-Anne Michel, Maître de conférences, Université Grenoble-Alpes, Centre de recherches juridiques (CRJ)

Le 18 Mai 2022

► Le vendeur professionnel, tenu d’une obligation de conseil, ne peut se contenter de mentionner sur une facture « attention au poids » afin d’attirer l’attention de l’acheteur sur la charge des équipements supplémentaires installés sur le véhicule.

Faits et procédure. L’arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation attirera l’attention des vendeurs de véhicules automobiles et plus encore celle des vendeurs de camping cars. Car c’est bien de la vente d’un camping car dont il était question. Postérieurement à cette acquisition, l’acheteur demanda au vendeur d’installer des équipements supplémentaires sur le véhicule. La facture mentionnait une mention ainsi rédigée : « attention au poids » et précisait que « chaque accessoire supplémentaire diminue la charge utile ». Or quelques mois plus tard, un infléchissement, dû à un excès de poids, avait été constaté par l’acheteur. Les seules mentions portées sur la facture permettaient-elles de considérer que le vendeur professionnel s’était acquitté de son obligation de conseil ?

Solution. C’est au visa de l’ancien article 1147 du Code civil (v. désormais, C. civ., 1231-1 N° Lexbase : L0613KZQ) que l’arrêt d’appel est cassé. Reprenant le principe qui prévaut en matière d’obligation de conseil dû par le vendeur professionnel, selon lequel il « est tenu, avant la vente, d’une obligation de conseil qui lui impose de se renseigner sur les besoins de l’acheteur afin d’être en mesure de l’informer sur l’adéquation entre le bien qui est proposé et l’usage qui en est prévu », la cour considère l’arrêt d’appel pour violation de la loi dès lors que la cour d’appel n’a pas constaté que « le vendeur s’était informé des besoin (du vendeur) et, en particulier, de la charge utile qui lui était nécessaire pour mener à bien son voyage ». Il apparaît ainsi que la seule mention « attention au poids » ne saurait constituer une exécution du devoir de mise en garde.

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