Jurisprudence : CE 5/6 ch.-r., 08-03-2022, n° 459292

CE 5/6 ch.-r., 08-03-2022, n° 459292

A94847PX

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CE 5/6 ch.-r., 08-03-2022, n° 459292. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/82239908-ce-56-chr-08032022-n-459292
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CONSEIL D'ETAT



Statuant au contentieux



459292



FRANCE NATURE ENVIRONNEMENT et autres



Mme Rozen Noguellou, Rapporteure



M. Stéphane Hoynck, Rapporteur public



Séance du 25 février 2022



Décision du 8 mars 2022



REPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



Le Conseil d'Etat statuant au contentieux



(Section du contentieux, 6ème et 5ème chambres réunies)



Sur le rapport de la 6ème chambre de la Section du contentieux





Vu la procédure suivante :



Par un mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés les 10 décembre 2021 et 22 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, les associations France Nature Environnement, Eau et Rivières de Bretagne, Sources et Rivières du Limousin, l'association nationale pour la protection des Eaux et Rivières - Truites, Ombres, Saumons demandent au Conseil d'État, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958🏛 et à l'appui de leur requête tendant à l'annulation de la décision implicite rejetant leur demande d'abrogation des dispositions d'application de l'article L. 214-18-1 du code de l'environnement🏛, notamment de la note technique du 30 juin 2018, et rejetant leur demande de prendre toutes mesures afin de permettre l'application de la continuité écologique et sédimentaire à l'ensemble des ouvrages implantés sur des cours d'eau classés par les préfets coordinateurs de bassin au titredu 2° du I de l'article L. 214-17 du code de l'environnement🏛, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article L. 214-18-1 du code de l'environnement🏛.



Elles soutiennent que ces dispositions, applicables au litige, méconnaissent les articles 1er à 4 de la Charte de l'environnement, le principe d'égalité devant la loi garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits et de l'homme et du citoyen de 1789 et le principe d'intelligibilité et de clarté de la loi.



Par un mémoire, enregistré le 21 février 2022, la ministre de la transition écologique conclut à ce que la question prioritaire de constitutionnalité ne soit pas renvoyée au Conseil constitutionnel. Elle soutient que les conditions posées par l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 ne sont pas remplies et, en particulier, que la question ne présente pas de caractère sérieux.



Vu les autres pièces du dossier ;



Vu :



- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;



- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;



- le code de l'environnement, notamment son article L. 214-18-1 ;



- le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :



- le rapport de Mme Rozen Noguellou, conseillère d'Etat,



- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;



Considérant ce qui suit :



1. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : « Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ». Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.



2. Aux termes de l'article L. 214-18-1 du code de l'environnement🏛, issu de la loi du 24 février 2017🏛 ratifiant les ordonnances n° 2016-1019 du 27 juillet 2016🏛 relative à l'autoconsommation d'électricité et n° 2016-1059 du 3 août 2016 relative à la production d'électricité à partir d'énergies renouvelables et visant à adapter certaines dispositions relatives aux réseaux d'électricité et de gaz et aux énergies renouvelables : « Les moulins à eau équipés par leurs propriétaires, par des tiers délégués ou par des collectivités territoriales pour produire de l'électricité, régulièrement installés sur les cours d'eau, parties de cours d'eau ou canaux mentionnés au 2° du I de l'article L. 214-17, ne sont pas soumis aux règles définies par l'autorité administrative mentionnées au même 2°. Le présent article ne s'applique qu'aux moulins existant à la date de publication de la loi n° 2017-227 du 24 février 2017🏛 (...) ».



3. Par ces dispositions de l'article L. 214-18-1 du code de l'environnement🏛, telles qu'éclairées par les travaux parlementaires préparatoires à l'adoption de la loi du 24 février 2017🏛 dont elles sont issues, le législateur a entendu, afin de préserver le patrimoine hydraulique que constituent les moulins à eau, exonérer l'ensemble des ouvrages pouvant recevoir cette qualification et bénéficiant d'un droit de prise d'eau fondé en titre ou d'une autorisation d'exploitation à la date de publication de la loi du 24 février 2017🏛 des obligations mentionnées au 2° du I de l'article L. 214-17 du même code, destinées à assurer la continuité écologique des cours d'eau, sans limiter le bénéfice de cette exonération aux seuls moulins hydrauliques mis en conformité avec ces obligations ou avec les obligations applicables antérieurement ayant le même objet.



4. Ces dispositions sont applicables au litige et n'ont pas été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel. Les moyens tirés de ce que l'article L. 214-18-1 du code de l'environnement🏛 méconnaîtrait les articles 1er à 4 de la Charte de l'environnement ainsi que le principe d'égalité devant la loi soulèvent une question présentant un caractère sérieux. Il y a lieu, dès lors, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par les associations requérantes à l'appui de leur requête.



DECIDE :



Article 1er : La question de la conformité à la Constitution de l'article L. 214-18-1 du code de l'environnement🏛 est renvoyée au Conseil constitutionnel.



Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête des associations France Nature Environnement et autres jusqu'à ce que le Conseil constitutionnel ait tranché la question de constitutionnalité ainsi soulevée.



Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association France Nature Environnement, à l'association Eau et Rivières de Bretagne, à l'association Sources et Rivières du Limousin, à l'association nationale pour la protection des Eaux et Rivières - Truites, Ombres, Saumons et à la ministre de la transition écologique.



Copie en sera adressée au Premier ministre.











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