Le Quotidien du 14 mars 2022

Le Quotidien

Droit pénal de la presse

[Brèves] Droit de la presse : quel état pour l’action publique entre le versement de la consignation et l’ouverture de l’information ?

Réf. : Cass. crim., 8 mars 2022, n° 21-83.037, F-B N° Lexbase : A88847PQ

Lecture: 4 min

N0730BZ3

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/82205911-edition-du-14032022#article-480730
Copier

par Adélaïde Léon

Le 22 Mars 2022

► Le dépôt d'une plainte avec constitution de partie civile, à la suite duquel est versée, dans le délai imparti, la consignation prévue par ce texte interrompt la prescription de l'action publique ; par ailleurs, suspend la prescription tout obstacle de fait ou de droit qui rend impossible la mise en mouvement ou l’exercice de l’action publique ; tel est le cas lorsque l’auteur d’une plainte avec constitution de partie civile, après avoir versé dans le délai imparti la consignation fixée, ne dispose d'aucun moyen de droit pour obliger le juge d'instruction à accomplir un acte interruptif de prescription, la partie civile n’étant recevable à présenter une demande d’acte qu’après l’ouverture de l’information.

Rappel de la procédure. Le 18 décembre 2019, un individu a porté plainte et s’est constitué partie civile auprès du juge d’instruction pour divers propos qu’il jugeait diffamatoires à son encontre, publiés sur une page internet dédiée à une pharmacie, sous couvert d’un pseudonyme.

Le 6 mars 2019, la consignation – fixée à 500 euros par ordonnance du 25 février 2019 – était versée par la partie civile. Elle était enregistrée le 26 mars 2019 à la DRFIP et, le 27 novembre 2019, l’avocat de la partie civile transmettait au juge d’instruction le justificatif du dépôt de consignation.

Le 18 février 2020, sur réquisitions conformes du ministère public, le doyen des juges d’instruction a rendu une ordonnance de refus d’informer en raison de la prescription de l’action publique.

La partie civile a interjeté appel.

En cause d’appel. La chambre de l’instruction a constaté l’extinction de l’action publique par prescription et confirmé l’ordonnance du juge d’instruction refusant d’informer.

La cour estimait que le délai de prescription (trois mois en matière de presse) avait été interrompu par :

  • l’ordonnance de fixation de la consignation du 25 février 2019 ;
  • puis par l’enregistrement du versement par la DRFIP, le 26 mars 2019.

Elle relevait par ailleurs que le doyen des juges d’instruction n’avait été avisé du versement de la consignation ni par la partie civile ni par la DRFIP. Dès lors, selon la cour d’appel, il n’avait pu accomplir aucun acte interruptif de prescription, notamment en transmettant la procédure au ministère public pour solliciter ses réquisitions.

Le délai de prescription n’étant pas suspendu par l’attente du versement de la consignation, les juges d’appel ont déduit que la prescription de l’action publique était acquise.

La partie civile a formé un pourvoi contre l’arrêt de la chambre de l’instruction.

Moyens du pourvoi. Il était fait grief à la chambre d’instruction d’avoir jugé que les faits objets de la plainte avec constitution de partie civile étaient couverts par la prescription et qu’il n’y avait dès lors pas lieu à informer, alors que :

  • lorsqu’une consignation est mise à la charge de la partie civile, son versement suffit à interrompre le cours de la prescription ;
  • que la prescription est suspendue par les obstacles de droit ou de fait rendant impossible l’exercice de l’action publique : qu’au cas d’espèce, l’absence de communication au juge d’instruction de l’information relative au versement de la consignation constituait un tel obstacle, non imputable à la partie civile ;
  • que la seule obligation de la partie civile à la charge de laquelle est mis le versement d’une consignation est de procéder à ce versement ; obligation remplie en l’espèce dans le délai imparti à la partie civile.

Décision. La Chambre criminelle censure l’arrêt d’appel au visa des articles 65 de la loi du 29 juillet 1881 N° Lexbase : C98664Y3, 9-2 N° Lexbase : L2668L4L et 9-3 N° Lexbase : L0369LDZ du Code de procédure pénale.

L’article 65 de la loi de 1881 fixe à trois mois le délai de prescription en matière de presse.

L’article 9-2 du Code de procédure pénale prévoit que la prescription de l’action publique est interrompue par le dépôt d’une plainte avec constitution de partie civile à la suite duquel la consignation fixée est versée dans le délai imparti.

Enfin, l’article 9-3 du même code dispose que la prescription est suspendue par tout obstacle de droit, prévu par la loi, ou tout obstacle de fait insurmontable et assimilable à la force majeure, qui rend impossible la mise en mouvement ou l'exercice de l'action publique.

Selon la Chambre criminelle, tel est le cas lorsque l’auteur d’une plainte avec constitution de partie civile ne dispose d’aucun moyen de droit pour obliger le juge d’instruction à accomplir un acte interruptif de prescription.

En l’espèce, après le versement de la consignation, la partie civile n’était recevable à présenter une demande d’acte qu’après l’ouverture de l’information. Elle ne pouvait, dès lors, obliger le juge d’instruction à accomplir un acte interruptif de prescription.

Pour aller plus loin : E. Raschel, ÉTUDE : La procédure en droit de la presse, La suspension du délai de prescription, in Droit de la presse, Lexbase {"IOhtml_internalLink": {"_href": {"nodeid": 55681549, "corpus": "encyclopedia"}, "_target": "_blank", "_class": "color-encyclopedia", "_title": "La suspension du d\u00e9lai de prescription", "_name": null, "_innerText": "N\u00b0\u00a0Lexbase\u00a0: E0878Z9E"}}.

newsid:480730

Entreprises en difficulté

[Brèves] Liquidation judiciaire : dessaisissement du débiteur et signature d’un procès-verbal de réception de travaux

Réf. : Cass. civ. 3, 2 mars 2022, n° 20-16.787, FS-B N° Lexbase : A10507PL

Lecture: 3 min

N0694BZQ

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/82205911-edition-du-14032022#article-480694
Copier

par Vincent Téchené

Le 11 Mars 2022

► Un procès-verbal de réception de travaux ne constituant pas, en raison des conséquences qui s'y attachent, un simple acte conservatoire, seul le liquidateur judiciaire est recevable à se prévaloir de l'inopposabilité du procès-verbal signé par la débitrice, dessaisie par l'effet de sa mise en liquidation judiciaire.

Faits et procédure. Une société a, selon un marché du 16 juillet 2012, confié l'exécution des travaux d'aménagements de deux boutiques à un entrepreneur. Une banque a cautionné ce dernier au titre de la retenue de garantie applicable à ce marché. Après sa mise en liquidation judiciaire, le maître d’ouvrage a assigné la banque en paiement des sommes dues par l'entrepreneur. La banque a soulevé l'irrecevabilité de cette demande, au motif qu'elle avait été formée plus d'un an après la réception de l’ouvrage.

La cour d’appel (CA Rennes, 12 décembre 2019, n° 17/00504 N° Lexbase : A9356Z7N) ayant rejeté les demandes formées contre la banque, le maître d’ouvrage a formé  un pourvoi en cassation.

Décision. La Cour de cassation rappelle, au visa de l'article L. 641-9 du Code de commerce N° Lexbase : L7329IZH, que la règle du dessaisissement étant édictée dans l'intérêt des créanciers, seul le liquidateur peut se prévaloir de l'inopposabilité d'un acte juridique accompli par le débiteur au mépris de cette règle, à condition que l'acte concerne les droits et actions inhérents à l'administration et à la disposition des biens dont le débiteur est dessaisi par l'effet du jugement de liquidation judiciaire, les actes conservatoires échappant à ce dessaisissement.

Or, elle relève que, pour écarter le procès-verbal de réception du 19 mars 2014 invoqué par la créancière comme constituant la date de la réception des travaux déterminant le point de départ du délai d'un an stipulé dans le cautionnement, et déclarer, en conséquence, irrecevable sa demande formée contre la banque, l'arrêt retient que ce procès-verbal a été établi le jour même du jugement prononçant la liquidation judiciaire et que, ce jugement ayant dessaisi la débitrice au profit du liquidateur, son directeur général n'était plus habilité à signer quelque document que ce soit en son nom.

Or, la Cour cassation censure l’arrêt d’appel : en statuant ainsi, alors que, le procès-verbal de réception de travaux ne constituant pas, en raison des conséquences qui s'y attachent, un simple acte conservatoire, seul le liquidateur était recevable à se prévaloir de l'inopposabilité du procès-verbal signé par la débitrice, dessaisie par l'effet de sa mise en liquidation judiciaire, la cour d'appel a violé l’article L. 641-9 du Code de commerce.

Observations. La Cour de cassation et le Conseil d’État ont déjà précisé que la règle du dessaisissement étant édictée dans l'intérêt des créanciers, seul le liquidateur peut s'en prévaloir (CE, Contentieux, 21 juin 2000, n° 196245, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A0681AW7 – Cass. com., 22 janvier 2002, n° 98-22.206, F-D N° Lexbase : A8283AX3 – Cass. com., 24 avril 2007, n° 05-21.376, F-D N° Lexbase : A0205DWI).

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les effets du prononcé de la liquidation judiciaire, Le principe de l'inopposabilité de l'acte à la liquidation judiciaire, in Entreprises en difficulté, (dir. P.-M. Le Corre), Lexbase N° Lexbase : E4004EUT.

 

newsid:480694

Environnement

[Brèves] Recours contre une mesure préparatoire à une décision administrative en matière de chasse : compétence du JA

Réf. : Cass. civ. 2, 10 mars 2022, n° 19-23.496, F-B N° Lexbase : A03507QZ

Lecture: 2 min

N0726BZW

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/82205911-edition-du-14032022#article-480726
Copier

par Yann Le Foll

Le 16 Mars 2022

► Un recours formé contre une mesure préparatoire à une décision administrative en matière de chasse relève de la compétence du juge administratif.

Principe. L'exercice, par le conseil d'administration d'une association communale de chasse agréée (ACCA), de la faculté de demander au préfet de prononcer la suspension du droit de chasser, sur son territoire, des propriétaires apporteurs de droit de chasse, conformément à l'article R. 422-63, 17°, a), du Code de l'environnement N° Lexbase : L2490LUR, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2019-1432 du 23 décembre 2019 N° Lexbase : L1864LUL, constitue une mesure préparatoire à la décision préfectorale de sanction, susceptible d'être prise, dont elle n'est qu'un élément de la procédure d'édiction.

Par suite, la juridiction administrative est seule compétente pour connaître des actions, notamment indemnitaires, fondées sur les irrégularités imputées à la décision du conseil d'administration d'une telle association de saisir, à cette fin, le préfet, dont la décision, le cas échéant, peut seule faire grief.

Rappel. Un litige relatif au montant des cotisations dues par les adhérents d'une ACCA à la suite de la modification de ses statuts relève aussi de la compétence de la juridiction administrative (T. confl., 9 juillet 2012, n° 3861 N° Lexbase : A8456IQA).

Motivation TI. Pour écarter l'exception d'incompétence de la juridiction judiciaire soulevée par les défendeurs, le jugement du tribunal d'instance de Romans-sur-Isère retient que le litige opposant les parties relève des relations privées entre l'ACCA et l'un de ses membres et, partant, de la gestion interne de l'association.

La décision ajoute que la mesure litigieuse, prise par le conseil d'administration de l'association, n'a requis la mise en œuvre d'aucune prérogative de puissance publique.

Décision CCass. En statuant ainsi, alors que la juridiction administrative est seule compétente pour connaître des actions, notamment indemnitaires, fondées sur les irrégularités imputées à une mesure préparatoire à l'édiction d'une décision administrative, laquelle peut seule faire grief, le tribunal d'instance a violé les textes susvisés. Son jugement est cassé et annulé en toutes ses dispositions.

newsid:480726

Fiscalité du patrimoine

[Brèves] Transmission d’une entreprise individuelle agricole : l’exonération Dutreil s’applique uniquement aux biens nécessaires à l’exploitation

Réf. : Cass. com., 9 février 2022, n° 20-10.753, F-D N° Lexbase : A09707NA

Lecture: 3 min

N0663BZL

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/82205911-edition-du-14032022#article-480663
Copier

par Marie-Claire Sgarra

Le 11 Mars 2022

Si, en ce qui concerne les entreprises individuelles, l’inscription des biens meubles et immeubles, corporels ou incorporels au bilan, ou leur mention sur le document en tenant lieu, en font présumer le caractère affecté à l’exploitation de l’entreprise, l’administration a la faculté de rapporter la preuve qu’ils ne sont pas nécessairement et effectivement affectés à celle-ci.

Les faits :

  • un exploitant agricole, est décédé, laissant pour légataires universels ses neveu et nièce, M. et Mme [T], lesquels ont demandé à bénéficier d'une exonération des droits de succession à concurrence des trois quarts de la valeur transmise, en application des dispositions de l'article 787 C du CGI  ;
  • considérant que des valeurs mobilières de placement et des sommes provenant de la succession de l’épouse de l’exploitant avaient été intégrées à tort dans la valeur de l'exploitation agricole léguée, ce qui avait indûment augmenté l'assiette de l'exonération partielle de la valeur de biens qui ne pouvaient pas en bénéficier comme n'étant pas nécessaires à l'exercice de la profession, l'administration fiscale a adressé à M. et Mme [T] une proposition de rectification rehaussant les droits de succession dus ;
  • après le rejet de leurs réclamations contentieuses, M. et Mme [T] ont assigné l'administration fiscale en annulation des décisions de rejet et en décharge des droits supplémentaires mis en recouvrement.

Principe. L'article 787 C du CGI N° Lexbase : L8958IQT prévoit que sont exonérées, sous certaines conditions, de droits de mutation à titre gratuit, à concurrence de 75 % de leur valeur, la totalité ou une quote-part indivise de l'ensemble des biens meubles ou immeubles, corporels ou incorporels, affectés à l'exploitation d'une entreprise individuelle ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale transmis par décès ou entre vifs.

Plusieurs constatations de la cour d’appel (CA Pau, 19 novembre 2019, n° 16/03456 N° Lexbase : A0024Z3B) :

  • les sommes litigieuses, provenant de la succession de son épouse, ont été déposées par l’exploitant sur un compte personnel et aucun élément ne démontre que ce dernier, âgé de quatre-vingt-six ans, avait prévu, à ce moment-là, des modifications dans la gestion de l'entreprise ;
  • les sommes litigieuses n'ont été mentionnées à l'actif du bilan de l'entreprise que postérieurement au décès de l’exploitant, de même que les valeurs mobilières de placement, qui n'apparaissent pas au bilan de l'exercice clos le 31 décembre 2010 ;
  • après avoir évalué la moyenne des besoins de trésorerie de l'entreprise sur les trois derniers exercices complets, celle-ci disposait de liquidités très supérieures à ses charges courantes d'exploitation ;
  • si M. et Mme [T] justifient avoir, postérieurement au décès de l’exploitant, investi dans du matériel et des travaux, les liquidités de l'entreprise, hors les sommes litigieuses, suffisaient à financer ces investissements.

Solution de la Chambre commerciale. La cour d'appel, qui, après avoir retenu comme probants les éléments produits par l'administration fiscale contestant l'affectation des sommes litigieuses et des valeurs mobilières de placement à l'exploitation de l'entreprise, a relevé que M. et Mme [T] ne produisaient aucun élément contraire de nature à leur permettre de bénéficier de l'exonération prévue par l'article 787 C du CGI, et qui n'était pas tenue de s'expliquer sur les éléments de preuve qu'elle décidait d'écarter, a, sans inverser la charge de la preuve, légalement justifié sa décision.

À noter : le critère de l’inscription au bilan n’est pas toujours indispensable pour bénéficier de l’exonération. En matière d’entreprises individuelles, l’exonération ne s’applique qu’à la valeur correspondant à des biens affectés à l’exploitation.

newsid:480663

Fonction publique

[Brèves] CNESER statuant en matière disciplinaire : sanction du harcèlement moral et charge de la preuve

Réf. : CE, 1° et 4° ch.-r., 2 mars 2022, n° 444556, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A84217PL

Lecture: 2 min

N0709BZB

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/82205911-edition-du-14032022#article-480709
Copier

par Yann Le Foll

Le 11 Mars 2022

► Il appartient au Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER), statuant en matière disciplinaire sur les accusations de harcèlement moral formulées à l'encontre d'un enseignant-chercheur par l'autorité ayant engagé les poursuites, de former sa conviction au vu des éléments versés au dossier par les parties, sans mettre en œuvre le mécanisme probatoire particulier institué au profit des victimes d'agissements constitutifs de harcèlement moral.

Position CNESER. Statuant sur l'un des deux griefs sur lesquels les poursuites disciplinaires engagées à l'encontre du Maître de conférences par l'Université de Poitiers étaient fondées et tiré de ce que le comportement de l'intéressé aurait été constitutif d'une situation de harcèlement moral au sens de l'article 6 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa version applicable au litige N° Lexbase : L6938AG3, à l'égard de trois de ses collègues, le CNESER, statuant en matière disciplinaire, a relevé l'apparition de tensions entre l’intéressé et trois de ses collègues à l'occasion de l'organisation d'un congrès en 2012, dans laquelle l'intéressé avait été quasiment le seul à s'impliquer alors qu'une implication collective des quatre enseignants-chercheurs avait été initialement envisagée.

Le CNESER a ensuite constaté que ces tensions s'étaient renforcées et qu'il existait un conflit entre l’intéressé et ses trois collègues, dont témoignaient des échanges vifs et des reproches réciproques.

Position CE. En déduisant de ces éléments ainsi que du contexte de travail et des usages de la profession, qu'elle a souverainement appréciés sans les dénaturer, que l'ensemble de ces faits étaient insuffisants pour caractériser l'existence d'une situation de harcèlement moral de l’intéressé à l'encontre de ses trois collègues, en dépit du caractère abrupt de l'attitude de celui-ci, le CNESER, statuant en matière disciplinaire, à qui il appartenait de former sa conviction sur les points en litige au vu des éléments versés au dossier par les parties, sans mettre en œuvre le mécanisme probatoire particulier institué au profit des victimes d'agissements constitutifs de harcèlement moral, n'a pas commis d'erreur de droit et a suffisamment motivé son arrêt (voir, s'agissant des litiges opposant un agent public à son employeur, CE Sect., 11 juillet 2011, n° 321225, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A0246HWZ).

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Le contenu des obligations des fonctionnaires, L'obligation d’obéissance et l'obligation de désobéissance, in Droit de la fonction publique, Lexbase N° Lexbase : E27983NX.

newsid:480709

Procédure civile

[Brèves] Mesures d’instruction : irrecevabilité du pourvoi formé indépendamment de la décision sur le fond, sauf excès de pouvoir

Réf. : Cass. civ. 2, 3 mars 2022, n° 20-16.809, F-B N° Lexbase : A24637PW

Lecture: 2 min

N0714BZH

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/82205911-edition-du-14032022#article-480714
Copier

par Alexandra Martinez-Ohayon

Le 11 Mars 2022

Les décisions relatives à l'exécution d'une mesure d'instruction ne peuvent être frappées d'appel ou de pourvoi en cassation qu'en même temps que le jugement sur le fond ; il n'est dérogé à cette règle qu'en cas d'excès de pouvoir ;

ne constitue pas un excès de pouvoir la violation du principe de la contradiction par le juge en charge du contrôle des expertises ayant statué sur la demande de relevé de caducité par l’une des parties, sans provoquer les explications de l'autre.

En l’espèce, une expertise a été ordonnée par un juge de la mise en état. Le juge avait ordonné que paiement de la consignation soit mis à la charge de plusieurs parties. Par ordonnance, le juge chargé du contrôle des expertises a relevé la caducité de diverses parties auxquelles incombait le paiement de la consignation. L’appel interjeté à l’encontre de cette décision a été déclaré irrecevable. Des sociétés ont formé un pourvoi à l’encontre de cet arrêt (CA Amiens, 25 février 2020, n° 19/01775 N° Lexbase : A82613G3).

Pour déclarer le pourvoi irrecevable, la Cour de cassation retient la solution précitée au visa des dispositions de l’article 170 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1563H4N, et énonce :

  • en premier lieu, il est de jurisprudence constante qu'aucun texte n'autorise le juge chargé du contrôle des expertises à statuer sur la demande de relevé de caducité présentée, sur le fondement de l'article 271 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1830H4K, par l'une des parties, sans provoquer les explications de l'autre, la violation du principe de la contradiction ne constitue pas un excès de pouvoir ;
  • en second lieu, le juge chargé du contrôle des expertises, désigné par l'ordonnance du juge de la mise en état pour surveiller la mesure d'instruction, conformément aux articles 155, alinéa 3, N° Lexbase : L7730IUT et 155-1 N° Lexbase : L1526H4B du Code de procédure civile, statue sur une requête en relevé de caducité sans excéder ses pouvoirs, alors même que le juge de la mise en état aurait accordé un renvoi pour conclure sur la demande en relevé de caducité.

Les Hauts magistrats retiennent que le moyen ne caractérise pas un excès de pouvoir et déclarent le pourvoi irrecevable.

newsid:480714

Procédure prud'homale

[Brèves] Droit du CSE et des syndicats d’invoquer l’exception d’illégalité lors d’une action en nullité d’un accord collectif

Réf. : Cass. soc., 2 mars 2022, n° 20-16.002, FP-B+R N° Lexbase : A10487PI ; Cass. soc., 2 mars 2022, n° 20-18.442, FP-B+R N° Lexbase : A10607PX ; Cass. soc., 2 mars 2022, n° 20-20.077, FP-B N° Lexbase : A10467PG

Lecture: 7 min

N0688BZI

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/82205911-edition-du-14032022#article-480688
Copier

par Lisa Poinsot

Le 11 Mars 2022

► En matière d’action en nullité d’un accord collectif, le CSE et le syndicat disposent de la faculté de contester, par voie d’exception, la validité d’un accord dans le cadre d’une action concernant leurs propres droits, quand bien même elle aurait été formée postérieurement à l’expiration du délai de prescription de deux mois.

Les faits. Dans la première affaire (n° 20-16.002), le CSE d’une entreprise désigne un expert dans le cadre des consultations sur les situations économiques, financières et sociales de la société. L’employeur saisit la juridiction civile pour demander l’annulation de ces délibérations en invoquant l’application d’un accord collectif prévoyant que cette consultation doit avoir lieu au niveau du comité central. Le CSE conteste, quant à lui, la validité de cet accord collectif d’entreprise relatif au dialogue social, au motif qu’il écartait la consultation des CSE, au profit du seul comité central, pour les consultations obligatoires sur les politiques économique et sociale. La cour d’appel  fait droit à la demande du CSE en déclarant son action en justice recevable.

Dans la deuxième espèce (n° 20-18.442), une société conteste en justice la désignation d’un représentant syndical sur un périmètre plus restreint que celui des établissements distincts, alors que l’accord collectif d’entreprise prévoit que le périmètre de désignation des délégués syndicaux est identique à celui retenu pour les CSE d’établissement. En défense, l’organisation syndicale mise en cause conteste la validité de cet accord collectif, qu’elle n’avait pas signé.

Dans la troisième espèce (n° 20-20.077), le litige porte sur les deux thématiques des deux premières affaires. En effet, une organisation syndicale conteste devant le tribunal judiciaire la validité d’un accord collectif, qu’elle n’avait pas signé, et qui prévoit les modalités de mise en place des CSEE et du CSE central. L’employeur décide par ailleurs de saisir le tribunal judiciaire afin de voir annuler les délibérations d’un des CSEE ayant décidé de désigner un expert pour l’assister dans la procédure d’information-consultation relative à la politique sociale de l’établissement. Il soutient que ces délibérations sont contraires à l’accord collectif qui prévoit que ces consultations doivent avoir lieu au niveau du CSE central. En défense, le CSEE fait valoir l’illégalité de l’accord collectif litigieux.

La procédure. Concernant les deux premiers litiges, les juridictions de fond font droit à la demande du CSE et du syndicat en déclarant leur action en justice respective recevable.

Dans la troisième affaire, le tribunal judiciaire rejette l’exception d’illégalité aux motifs que la sanction du non-respect des conditions d’adoption de l’accord collectif, étant un acte de droit privé, est la nullité. Il considère que cette sanction doit être soulevée par voie l’exception et non l’inopposabilité. Ainsi, n’étant pas annulé, l’accord collectif est opposable au CSEE.

Les sociétés (arrêts n° 20-16.002 et n° 20-18.442) forment en conséquence un pourvoi en cassation. Elles se fondent sur les nouvelles dispositions de l’article L. 2262-14 du Code du travail N° Lexbase : L7773LGY, issues de l’ordonnance n° 2017-1385 du 22 septembre 2017 N° Lexbase : L7631LGQ, pour soutenir qu’en raison d’un délai de recours en annulation de deux mois, la validité de l’accord ne peut plus être remise en cause par le CSE ou par le syndicat en raison de l’absence d’action en nullité dans le délai de deux mois.

Dans le troisième arrêt, le CSEE forme un pourvoi en cassation en contestant la décision rendue en première instance tendant à rejeter sa demande à voir prononcer l’inopposabilité de l’accord collectif à son égard.

La solution. La Chambre sociale de la Cour de cassation, en formation plénière, rejette le raisonnement de l’employeur dans les deux premières affaires en application de l’article L. 2262-14 du Code du travail, de l’article 16 de la DDHC N° Lexbase : L1363A9D, de l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne N° Lexbase : L0230LGM et de l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales N° Lexbase : L6799BHB. Dans les deux arrêts, elle affirme qu’un CSE et un syndicat disposent de la faculté de s’exonérer du délai de prescription de deux mois destiné à l’action en nullité d’un accord collectif, à condition que leur contestation relative à la validité d’un accord collectif porte sur leurs droits propres et prenne la voie de l’exception.

Dans la troisième affaire, en utilisant les mêmes fondements juridiques que dans les deux autres décisions, la Chambre sociale de la Cour de cassation précise que « la reconnaissance de l’illégalité d’une clause d’une convention ou d’un accord collectif la rend inopposable à celui qui a soulevé l’exception ».

Pour aller plus loin :

  • la première décision confirme la jurisprudence constante de la Cour de cassation concernant la recevabilité de l’action du CSE à l’encontre d’un accord collectif dès lors qu’il s’agit de défendre ses droits propres relatifs notamment à l’information-consultation (v. Cass. soc., 19 mars 2003, n° 01-12.094, publié N° Lexbase : A4955A7N). La Cour de cassation s’appuie sur la décision du Conseil constitutionnel n° 2018-761 du 21 mars 2018 N° Lexbase : A4835XHK qui « a seulement précisé les conditions de la constitutionnalité de l’article L. 2262-14 du Code du travail au regard du droit au recours juridictionnel effectif », ce qui « ne pouvait conduire à exclure la possibilité pour d’autres personnes que le salarié de soulever, dans un litige individuel, une telle exception d’illégalité » ;
  • sur les modalités de consultation du CSE par accord : la Cour de cassation, dans l’arrêt du 2 mars 2022, vient préciser les modalités d’application de l’article L. 2323-7 du Code du travail N° Lexbase : L5631KGN. Selon cette disposition légale, il est possible qu’un accord collectif puisse définir, dans les entreprises comprenant plusieurs établissements distincts, des niveaux auxquels les consultations récurrentes sont conduites. En ce sens, il est possible que les consultations récurrentes portant sur les politiques sociales et économiques, concernent uniquement le comité central et non les CSEE ;
  • sur la question du périmètre de désignation des délégués syndicaux : il est de jurisprudence constante qu’au regard de l’article L. 2143-3 du Code du travail N° Lexbase : L1436LKE, un accord fixant un même périmètre de désignation des délégués syndicaux et des élections au comité d’entreprise « ne peut priver un syndicat du droit de désigner un délégué syndical au niveau d’un établissement » (Cass. soc., 31 mai 2016, n° 15-21.175, FS-P+B N° Lexbase : A8521RRZ ; Cass. soc., 9 juin 2021, n° 20-14.171, F-D N° Lexbase : A92334UI ; Cass. soc., 29 septembre 2021, n° 20-15.870, F-D N° Lexbase : A049248Q ; Cass. soc., 8 décembre 2021, n° 20-60.257, F-D N° Lexbase : A79957ET ; Cass. soc., 5 janvier 2022, n° 20-16.725, F-D N° Lexbase : A83037HY) ;
  • dans sa note explicative, la Cour de cassation met en évidence qu’une « question demeure en revanche plus ouverte s’agissant de l’action d’un syndicat au titre de la seule défense de l’intérêt collectif de la profession, au sens de l’article L. 2132-3 du Code du travail N° Lexbase : L2122H9H ».

 

newsid:480688

Protection sociale complémentaire

[Brèves] Liquidation judiciaire et portabilité des droits : confirmation de la condition de l’absence de résiliation du contrat

Réf. : Cass. civ. 2, 10 mars 2022, n° 20-20.898, F-B N° Lexbase : A03537Q7

Lecture: 3 min

N0728BZY

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/82205911-edition-du-14032022#article-480728
Copier

par Laïla Bedja

Le 16 Mars 2022

► L'article L. 911-8 du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L0437IXH, créé par la loi n° 2013-504, du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi N° Lexbase : L0394IXU, permet aux salariés garantis collectivement dans les conditions prévues à l'article L. 911-1 du même code N° Lexbase : L2615HIP contre les risques décès, les risques portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ou liés à la maternité ou les risques d'incapacité de travail ou d'invalidité, de bénéficier du maintien à titre gratuit de cette couverture en cas de cessation du contrat de travail, non consécutive à une faute lourde, ouvrant droit à prise en charge par l'assurance chômage, selon les conditions qu'il détermine ; ces dispositions d'ordre public sont applicables aux anciens salariés licenciés d'un employeur placé en liquidation judiciaire qui remplissent les conditions fixées par ce texte ; toutefois, le maintien des droits implique que le contrat ou l'adhésion liant l'employeur à l'organisme assureur ne soit pas résilié.

Les faits et procédure. Une société a conclu avec une institution de prévoyance un contrat de mutuelle santé et prévoyance au profit de ses salariés. La liquidation judiciaire ayant été prononcé par jugement du 16 février 2016, l’institution a résilié le contrat de prévoyance avec effets au 29 février 2016 et a formulé une proposition de « prolongation onéreuse du contrat » à compter du 1er mars 2016. Le liquidateur lui a adressé à ce titre, le 18 mars suivant, une somme de 35 120,18 euros afin de maintenir, pour un an, les garanties précédemment souscrites pour les salariés licenciés.

Le liquidateur es qualités a assigné l'institution de prévoyance en remboursement de la somme ainsi versée, selon lui indûment, et en paiement de dommages-intérêts pour résistance abusive.

La cour d’appel (CA Colmar, 8 juillet 2020, n° 18/03277 N° Lexbase : A03253RH) ayant écarté sa demande de remboursement, le liquidateur a formé un pourvoi en cassation selon le moyen que la portabilité de l'assurance couverture santé et prévoyance joue, même en cas de liquidation judiciaire de l'employeur, sans condition de l'existence d'un dispositif assurant le financement du maintien de ces couvertures. En vain.

Rejet. Énonçant la solution précitée, la Haute juridiction rejette le pourvoi. La cour d’appel, relevant que l’institution de prévoyance a résilié le contrat le 29 février 2016, soit dans le délai de trois mois prévu par l’article L. 932-10 du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L2177LED, et qu'à compter de la prise d'effet de cette résiliation prévue par la loi, les garanties ouvertes ont pris fin pour n'être plus en vigueur dans l'entreprise, a pu en déduire que le paiement volontairement opéré par le liquidateur, en ce qu'il portait sur des cotisations dues au-delà du 29 février 2016, ne pouvait être assimilé à un paiement indu.

Contexte. Dans cinq avis rendus le 6 novembre 2017 (Cass., avis, 6 novembre 2017, n° 17013 N° Lexbase : A8557WYL, n° 17014 N° Lexbase : A8558WYM, n° 17015 N° Lexbase : A8559WYN, n° 17016 N° Lexbase : A8560WYP et n° 17017 N° Lexbase : A8561WYQ), la Cour de cassation avait subordonné l’application de la portabilité aux anciens salariés d’une société placée en liquidation judiciaire à la seule condition que le contrat d’assurance liant l’employeur à l’organisme assureur n’ait pas été résilié. Puis dans un arrêt du 5 novembre 2020 (Cass. civ. 2, 5 novembre 2020, n° 19-17.164, FS-P+B+I N° Lexbase : A521033D), la Cour de cassation a finalement pris une position conforme aux avis rendus en 2017 : dès lors qu’il existe un contrat de complémentaire santé et de prévoyance au jour où le licenciement du salarié est intervenu, ce salarié peut prétendre au maintien « à titre gratuit » de ces couvertures. Le présent arrêt confirme la solution.

newsid:480728

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.