Jurisprudence : Cass. crim., 08-03-2022, n° 21-83.037, F-B, Cassation

Cass. crim., 08-03-2022, n° 21-83.037, F-B, Cassation

A88847PQ

Référence

Cass. crim., 08-03-2022, n° 21-83.037, F-B, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/82177787-cass-crim-08032022-n-2183037-fb-cassation
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N° S 21-83.037 F-B

N° 00268


SL2
8 MARS 2022


CASSATION


M. SOULARD président,


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 8 MARS 2022



M. [O] [C], partie civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Metz, en date du 1er avril 2021, qui, dans l'information suivie sur sa plainte, contre personne non dénommée, du chef de diffamation publique envers un particulier, a constaté l'extinction de l'action publique par prescription et a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction refusant d'informer.


Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Violeau, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [O] [C], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 1er février 2022 où étaient présents M. Soulard, président, M. Violeau, conseiller rapporteur, M. Bonnal, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale🏛, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Le 18 décembre 2018, M. [O] [C] a porté plainte et s'est constitué partie civile auprès du juge d'instruction pour divers propos jugés diffamatoires à son encontre, publiés sur une page Internet dédiée à la pharmacie [C], sous couvert d'un pseudonyme.

3. Par ordonnance du 25 février 2019, le juge d'instruction a fixé à 500 euros le montant de la consignation à verser par M. [C] avant le 5 avril 2019.

4. Le 27 novembre 2019, l'avocat de ce dernier a transmis au juge d'instruction le justificatif du dépôt de la consignation, versée le 6 mars 2019 et enregistrée le 26 mars 2019 à la direction régionale des finances publiques (DRFIP) d'Auvergne-Rhône-Alpes.

5. Le 18 février 2020, sur réquisitions conformes du ministère public, le doyen des juges d'instruction a rendu une ordonnance de refus d'informer en raison de la prescription de l'action publique.

6. Appel a été interjeté par la partie civile.


Examen du moyen

Enoncé du moyen

7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Thionville ayant dit que les faits objets de la plainte avec constitution de partie civile de M. [C] étaient couverts par la prescription et qu'il n'y avait dès lors pas lieu à informer, alors :

« 1°/ que lorsqu'une consignation est mise à la charge d'une partie civile, le versement de ladite consignation suffit à interrompre le cours de la prescription, sans qu'il puisse être exigé de la partie civile qu'elle adresse au juge d'instruction le justificatif du versement effectué ; qu'au cas d'espèce la chambre de l'instruction a constaté que la prescription avait été interrompue par l'enregistrement, le 26 mars 2019, du versement par la partie civile de la consignation ; qu'en retenant, pour dire l'action publique prescrite, que faute d'avoir été informé du versement de la consignation par la partie civile, le juge d'instruction avait pu n'accomplir aucun acte interruptif de prescription dans les trois mois suivant l'enregistrement du versement de la consignation, la chambre de l'instruction a violé les articles 65 de la loi du 29 juillet 1881🏛, 88, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

2°/ que la prescription est suspendue par les obstacles de droit ou de fait rendant impossible l'exercice de l'action publique ; qu'au cas d'espèce constituait un tel obstacle, non imputable à la partie civile, l'absence de communication au juge d'instruction de l'information relative au versement de la consignation ; qu'en retenant, pour dire l'action publique prescrite, que la prescription n'était pas suspendue par l'attente du versement de la consignation, quand il lui appartenait de rechercher si l'absence d'information quant au versement de la consignation ne constituait pas un obstacle de fait au cours de la prescription, la chambre de l'instruction a violé les articles 65 de la loi du 29 juillet 1881🏛, 9-3, 82-1, 88, 89, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

3°/ que la seule obligation de la partie civile à la charge de laquelle est mis le versement d'une consignation est de procéder à ce versement ; qu'en opposant à M. [C] la prescription de l'action publique à raison de l'inaction du juge d'instruction, après avoir constaté que M. [C] avait versé la consignation mise à sa charge dans le délai qui lui avait été imparti, pour ce faire, la chambre de l'instruction a violé l'article préliminaire, 88, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme🏛. »


Réponse de la Cour

Vu les articles 65 de la loi du 29 juillet 1881🏛, 9-2 et 9-3 du code de procédure pénale :

8. Selon le premier de ces textes, le délai de prescription de l'action publique pour les délits de presse est de trois mois et court à compter du jour où ils ont été commis ou du jour du dernier acte d'instruction ou de poursuite s'il en a été fait.

9. Aux termes du deuxième, le dépôt d'une plainte avec constitution de partie civile, à la suite duquel est versée, dans le délai imparti, la consignation prévue par ce texte interrompt la prescription de l'action publique. Il en est de même lorsque le juge d'instruction communique la plainte au procureur de la République en application de l'article 86 du code précité.

10. Il résulte du troisième que tout obstacle de droit, prévu par la loi, ou tout obstacle de fait insurmontable et assimilable à la force majeure, qui rend impossible la mise en mouvement ou l'exercice de l'action publique, suspend la prescription.

11. Tel est le cas lorsque la personne qui, lésée par un crime ou un délit, a mis en mouvement l'action publique par sa plainte avec constitution de partie civile, ne dispose d'aucun moyen de droit pour obliger le juge d'instruction à accomplir un acte interruptif de prescription.

12. Il s'en déduit que le délai de prescription est suspendu entre la date de dépôt de la plainte avec constitution de partie civile et la délivrance du réquisitoire par le procureur de la République.

13. Pour déclarer éteinte par la prescription l'action engagée par M. [C], l'arrêt attaqué énonce que le délai de prescription a été interrompu par l'ordonnance de fixation de la consignation du 25 février 2019 puis par l'enregistrement du versement de son montant, par la DRFIP, à la date du 26 mars 2019.

14. Les juges relèvent que le doyen des juges d'instruction n'a été avisé du versement de la consignation ni par la partie civile ni par la DRFIP Auvergne-Rhône-Alpes.

15. Ils énoncent que de ce fait, le juge d'instruction n'a pu accomplir aucun acte interruptif de prescription, notamment en transmettant la procédure au ministère public pour solliciter ses réquisitions en vue d'une ouverture d'information.

16. Les juges en déduisent que la prescription de l'action publique était acquise, ce délai n'étant pas suspendu par l'attente du versement de la consignation de la partie civile.

17. En se déterminant ainsi, alors que la partie civile n'est recevable à présenter une demande d'acte qu'après l'ouverture de l'information, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés.

18. La cassation est par conséquent encourue.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Metz, en date du 1er avril 2021, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nancy, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Metz et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit mars deux mille vingt-deux.

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