Le Quotidien du 8 mars 2022

Le Quotidien

Actualité judiciaire

[A la une] Règlements de compte en hauts lieux entre Éric Dupond-Moretti et les juges de la Cour de justice de la République

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par Vincent Vantighem

Le 22 Mars 2022

Il ne manque finalement que la musique de Sergio Leone. Mais c’est un vrai règlement de comptes auquel on assiste au plus haut sommet de l’appareil judiciaire français depuis quelques jours. Ici, personne n’erre dans les plaines, solitaire. Mais dans les ministères et les institutions. Ici, pas de Winchester, Deringer ou Remington. Mais des communiqués et des tribunes libres… Dans ce western moderne, les premiers rôles sont tenus par Éric Dupond-Moretti, le ministre de la Justice, et les plus hauts magistrats de France. Ceux qui instruisent la procédure pour « prise illégale d’intérêts » le visant devant la Cour de justice de la République (CJR).

Jeudi 3 mars, à 9 heures, le garde des Sceaux était, en effet, convoqué, rue de Constantine (Paris, 7e arrondissement), devant les trois magistrats de la commission d’instruction de la CJR qui enquêtent sur lui. Pas vraiment d’enjeu : ayant déjà été mis en examen le 16 juillet 2021 pour l’ensemble des faits dont les juges sont saisis, il ne risquait rien de plus. L’audition, comme de coutume, visait surtout à le confronter aux derniers actes d’investigation et à lui demander s’il contestait toujours les faits qui lui sont reprochés, comme il le prétend depuis le départ. « Oh, de ce point de vue là, il n’y a pas de risque », souriait encore la veille, l’un des proches du ministre.

Il en a apporté la preuve lui-même dès le début de l’audition. Comme n’importe quel justiciable en a le droit, Éric Dupond-Moretti a choisi de lire une déclaration liminaire de deux pages et demie pour indiquer qu’il ne répondrait en fait … à aucune question. « J’attends sereinement de pouvoir m’expliquer devant la formation de jugement de la Cour de justice de la République [lors du procès s’il venait à être renvoyé] pour y défendre mon honneur, et rétablir enfin une vérité que vous ne souhaitez pas voir depuis le premier jour de votre instruction. »

Face à lui, les trois juges n’ont même pas tenté de le faire changer d’avis. « Donc, on comprend que vous ne répondrez pas à nos questions ? », se sont-ils enquis en substance, selon nos informations. « Oui, vous avez bien compris », leur a répondu le garde des Sceaux. À 10 heures, l’audition était terminée et chacun pouvait reprendre ses occupations…

« Partialité » et « inimité » au menu d’une tribune libre dans « L’Opinion »

Mais, dans ce dossier où Éric Dupond-Moretti est soupçonné de s’être servi de son nouveau statut de ministre pour régler ses comptes avec d’anciens magistrats avec qui il avait eu maille à partir lorsqu’il était un ténor des barreaux, rien n’est jamais simple. Le lendemain, vendredi 4 mars, L’Opinion publiait ainsi une « tribune libre » signée « Éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux ». À l’intérieur ? La déclaration liminaire qu’il avait lue, la veille, aux trois magistrats de la CJR. In extenso. Et sans autre commentaire. Attention, il ne s’agissait pas ici d’un article émanant d’un journaliste qui aurait dégotté la fameuse déclaration grâce à un précieux travail d’investigation. Mais bien d’un acte de communication d’un ministre empêtré dans une procédure judiciaire depuis plus d’un an. « Oui, c’est une décision de communication assumée », indiquait-on ainsi à la Chancellerie, dans la journée.

La tribune en question donnait donc l’occasion d’en savoir davantage sur les griefs formulés par le ministre de la Justice envers les trois juges d’instruction – indépendants donc – qui le poursuivent aujourd’hui. Le principal d’entre eux est « la partialité » avec laquelle ils instruisent les plaintes déposées par leurs « collègues dirigeants de syndicats de magistrats » qui avaient qualifié la nomination du ministre de « déclaration de guerre ». Et Éric Dupond-Moretti d’expliquer, en gras dans le texte, que c’est pour cette raison qu’ils ont perquisitionné durant 15 heures, le 15 juillet 2021, les bureaux du ministère, place Vendôme, allant jusqu’à ouvrir les coffres à la disqueuse et à la meuleuse, à aspirer les mails du directeur des affaires criminelles et des grâces et à lui réclamer ses agendas pour vérifier ses rendez-vous, y compris sur une période de prévention dont ils ne sont pourtant pas saisis.

Après la « partialité », c’est « l’inimitié » des juges à son endroit que le ministre a voulu dénoncer dans son propos. Expliquant que deux des juges qui enquêtent sur lui sont d’anciennes présidentes de cours d’assises qu’il a affrontées, « et de quelle manière », lors de sa carrière d’avocat. « Ces relations de travail délétères auraient dû vous conduire à vous déporter de mon dossier », explique-t-il ainsi, renversant la vapeur dans un dossier où le poison du conflit d’intérêts sourd désormais partout…

La colère d’Éric Dupond-Moretti n’aurait sans doute pas été complète sans deux paragraphes consacrés à François Molins. Sans jamais le nommer, le ministre a vertement critiqué l’attitude du procureur général près la Cour de cassation qui a requis l’ouverture de l’enquête le visant mais qui a refusé de témoigner dans la procédure alors que son rôle dans toute cette affaire est trouble. Haines recuites, ambitions contrariées et vieilles vengeances : n’en jetez plus…

Quand Chantal Arens répond par un communiqué

Tout ça serait presque passé inaperçu, dans une actualité occupée à compter les victimes de la dramatique guerre en Ukraine et les intentions de vote dans les sondages alors qu’Emmanuel Macron vient de se déclarer candidat, si Chantal Arens n’avait pas apporté sa pierre à cet édifice de déstabilisation de la Justice avec un grand « J ». Dans un communiqué officiel diffusé par ses services, la première présidente de la Cour de cassation « regrette » que le ministre, mis en examen dans ce dossier, ait communiqué à la presse sa déclaration liminaire.

Se faisant, elle a évidemment pris la défense de ses collègues juges d’instruction visés et qu’elle dirige au sein de la plus haute institution judiciaire française. « Ils conduisent leur mission, de manière collégiale, en toute indépendance et dans le respect du droit. » Allant jusqu’à donner une leçon au ministre, elle y indique aussi qu’il devrait se souvenir que sa mission est de « garantir l’indépendance de la Justice ». « Mettant en cause l’honneur de magistrats instructeurs, [les propos] d’Éric Dupond-Moretti contribuent à fragiliser l’autorité judiciaire, pilier de l’État de droit », balance-t-elle.

Ainsi va donc ce dossier qui pourrit la vie du ministre de la Justice depuis qu’il a posé ses valises, place Vendôme, et dont on se demande bien comment il va terminer, lors d’un éventuel procès devant une formation de jugement, la CJR, si souvent critiquée pour sa mansuétude à l’égard des ministres, seuls prévenus qu’elle peut voir comparaître devant elle. Depuis sa création en 1999, la Cour de justice de la République n’a en effet prononcé que dix décisions : quatre relaxes, deux dispenses de peine, quatre peines de prison avec sursis et aucune de prison ferme...

Mais il est encore bien trop tôt pour évoquer cela. Il faudrait d’abord que les juges qui instruisent cette affaire de « prise illégale d’intérêts » clôturent le dossier. Ce n’est pas encore pour tout de suite : selon les informations de Lexbase, ils avaient, en effet, prévu de reconvoquer Éric Dupond-Moretti pour une ultime audition, juste avant le premier tour de l’élection présidentielle. Voyant comme la dernière s’est déroulée, ils doivent évidemment se demander, désormais, si le jeu en vaut vraiment la chandelle.

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Arbitrage

[Brèves] Le refus de paiement de provision sur les frais d’arbitrage vaut renonciation à la clause compromissoire

Réf. : Cass. civ. 1, 9 février 2022, n° 21-11.253, FS-B N° Lexbase : A78557MU

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par Lalaina Chuk Hen Shun, Docteur en droit

Le 07 Mars 2022

► En application du règlement d’arbitrage de la Chambre de Commerce Internationale (CCI), la provision pour frais est due en parts égales par le demandeur et le défendeur ; par ailleurs, la partie, qui a provoqué le retrait de la demande d’arbitrage en ne s’acquittant pas de sa part de provision sur frais, n’est pas recevable à invoquer la clause compromissoire devant le juge étatique.

Faits et procédures. À l’occasion d’un litige relatif à la résiliation du contrat qui le liait à son franchiseur, un franchisé saisit le tribunal de commerce de Pau. Ce dernier se déclare incompétent, en application d’une clause compromissoire insérée dans le contrat, et renvoie les parties à un arbitrage sous l’égide de la CCI (T. com. Pau, 26 mai 2020, aff. n° 2019000106 N° Lexbase : A42264TP). En conséquence, le franchisé introduit, auprès de la CCI, une demande d’arbitrage qui sera retirée après le refus du défendeur de payer sa part de provision pour les frais. Après quoi et en soulignant ce refus, le franchisé saisit la cour d’appel de Pau aux fins d’infirmation de la décision du juge consulaire palois. L’appel est rejeté et le jugement du tribunal du commerce est confirmé en toutes ses dispositions (CA Pau, 5 novembre 2020, n° 20/01175 N° Lexbase : A678733R).

Pourvoi. Le franchiseur forme pourvoi contre cet arrêt en faisant, d’abord, grief à la cour d’appel d’avoir, dans son examen de la question du paiement des provisions, dénaturé le règlement d’arbitrage de la CCI en l’interprétant sans y être restée fidèle. Ensuite, il soutient que le défendeur qui refuse de régler sa part pour les frais d’arbitrage ne devrait plus être recevable à invoquer la compétence arbitrale pour décliner celle du juge étatique.

Réponses de la Cour. Sur le premier moyen relatif à la dénaturation du règlement de la CCI, la Cour de cassation abonde dans le sens du demandeur au pourvoi en constatant que la cour d’appel avait retenu une interprétation selon laquelle la partie demanderesse à l’arbitrage assumait seule la provision sur frais, alors que ledit règlement prévoit clairement que la provision est due en parts égales par les parties. S’agissant de la recevabilité de l’exception d’incompétence, sur le fondement du « principe de loyauté procédurale régissant les parties à une convention d’arbitrage », la première chambre civile juge que, après avoir provoqué le retrait de la demande d’arbitrage en ne s’acquittant pas de la part de provision sur frais leur incombant, le franchiseur n’est plus recevable à invoquer la clause compromissoire pour décliner la compétence de la juridiction étatique.

Solution. La Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la cour d’appel de Pau en toutes ses dispositions.

Pour aller plus loin : v. L. Chuk Hen Shun, ÉTUDE : L’arbitrage, Les effets du consentement à l’arbitrage, in Procédure civile, (dir. E. Vergès), Lexbase N° Lexbase : E30164YD.

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Autorité parentale

[Brèves] Octroi d’un DVH à l’ex-épouse de la mère : l’appréciation souveraine des juges du fond

Réf. : Cass. civ. 1, 9 février 2022, n° 20-19.128, F-D N° Lexbase : A08747NP

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 07 Mars 2022

En relevant que l’enfant était né d’un projet parental commun et que des liens affectifs s’étaient tissés avec l’ex-épouse de la mère, la cour d’appel a pu en déduire qu'il était de l'intérêt de l’enfant que la place de cette dernière soit préservée, la seule mésentente entre les parties ne pouvant suffire à l'éluder, et qu’il y avait donc lieu de lui accorder un droit de visite et d'hébergement.

Rappel : absence d'un « droit de principe » pour le parent d’intention de maintenir des liens avec l’enfant qu’il a élevé. L’ex-époux ou ex-compagnon d’un parent peut solliciter l’octroi d’un droit de visite et d’hébergement à l’égard de l’enfant a noué des liens affectifs durables avec celui-ci ; la demande est particulièrement fréquente lorsque l’enfant est né d’un projet parental commun.

Le fondement d’une telle demande réside à l’article 371-4, alinéa 2, du Code civil N° Lexbase : L8011IWM, aux termes duquel : « si tel est l'intérêt de l'enfant, le juge aux affaires familiales fixe les modalités des relations entre l'enfant et un tiers, parent ou non, en particulier lorsque ce tiers a résidé de manière stable avec lui et l'un de ses parents, a pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation, et a noué avec lui des liens affectifs durables ».

Pour rappel, la Cour de cassation a jugé que, ne présentait pas un caractère sérieux, la question de la conformité à la Constitution de l’article 371-4 du Code civil, en ce que cet article ne prévoit pas d'obligation, pour le parent d'intention, de maintenir ses liens avec l'enfant qu'il a élevé, et symétriquement, ne lui confère pas de droit de visite et d'hébergement de principe. De même, elle a jugé que ce texte était compatible avec les principes issus des articles 8 N° Lexbase : L4798AQR et 14 N° Lexbase : L4747AQU de la CESDH et 3, § 1, de la Convention internationale des droits de l’enfant N° Lexbase : L6807BHL (Cass. civ. 1, 6 novembre 2019, n° 19-15.198, FS-P+B+I N° Lexbase : A3962ZUB ; Cass. civ. 1, 24 juin 2020, n° 19-15.198, F-P+B+I N° Lexbase : A33673PE ; cf. A. Gouttenoire, L’ex-concubine de la mère n’est pas titulaire d’un droit à entretenir des relations avec l’enfant après la séparation, Lexbase Droit privé, juillet 2020, n° 833 N° Lexbase : N4274BYX).

Un droit soumis à l'appréciation du juge en considération de l'intérêt supérieur de l'enfant. Il résulte de cette absence d’un « droit de principe » que le rejet, par le juge, d’une demande de droit de visite et d’hébergement à l’égard de l’enfant présentée par l’ancienne compagne de la mère, qui, aux termes d’une décision motivée, a statué en considération de l’intérêt supérieur de l’enfant, ne porte pas atteinte de façon disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de la demandeuse (Cass. civ. 1, 24 juin 2020, n° 19-15.198, F-P+B+I, précité).

Dans l’affaire jugée le 9 février 2022, deux femmes s’étaient mariées le 20 mai 2017. L’une d’elles avait donné naissance à une fille, le 13 août 2017. Après la séparation du couple, en juillet 2018, l’ex-épouse avait saisi le juge aux affaires familiales pour bénéficier d'un droit de visite et d'hébergement à l'égard de l’enfant.

Elle obtient gain de cause. La Cour de cassation approuve en effet la décision rendue par la cour d’appel de Lyon qui avait retenu que, si l'examen des pièces produites établissait que le désir de maternité avait été initié par la mère de l’enfant, il révélait également que celle-ci était née d'un projet parental commun et que des liens affectifs s'étaient tissés entre celle-ci et l’épouse de la mère, laquelle avait, dès la naissance, pris la place d'un deuxième parent, ce qui avait conduit la mère, avant que les relations avec son épouse ne se dégradent au point de s'opposer à toute relation avec l'enfant, à lui accorder un droit de visite et d'hébergement.

Les conseillers d’appel en avaient déduit qu'il était de l'intérêt de l’enfant que la place de l’ex-épouse soit préservée, la seule mésentente entre les parties ne pouvant suffire à l'éluder.

Selon la Cour suprême, la cour d'appel, qui a statué en considération de l'intérêt supérieur de l'enfant qu'elle a souverainement apprécié et qui a procédé à la recherche prétendument omise, a ainsi légalement justifié sa décision.

En sens inverse, pour des exemples de refus d’octroi d’un DVH à l’ex-époux d’un parent :

- Cass. civ. 1, 26 juin 2019, n° 18-17.767, F-D N° Lexbase : A2995ZHE : ayant relevé, d’abord, que l’épouse de la mère, qui n’avait été qu’associée au projet de maternité de la mère, n’avait pas tenu à établir de liens de droit durables avec l’enfant, n’ayant engagé aucune procédure d’adoption de l’enfant pendant le temps de son mariage, ensuite, qu’elle n’avait élevé cette dernière que jusqu’à l’âge de deux ans, celle-ci ne démentant pas que le quotidien de l’enfant était pris en charge par sa mère, enfin, qu’elle n’établissait pas pouvoir accueillir sereinement l’enfant, alors que celle-ci paraissait souffrir de la situation de conflit liée à la séparation du couple, la cour d’appel a souverainement estimé qu’il n’était pas de l’intérêt actuel de l’enfant de maintenir des liens avec elle, et qu’il y avait lieu de rejeter la demande d’attribution d’un droit de visite et d’hébergement sur l’enfant ;

- Cass. civ. 1, 7 juillet 2021, n° 19-25.515, F-D N° Lexbase : A62624YL : jugeant également que le refus d'accorder à l'ex-épouse de la mère un droit de visite et d'hébergement est justifié au regard de l'intérêt de l'enfant. En l'espèce, il est fondé sur l'absence de lien affectif durable avec l'enfant, l'absence de réels souvenirs de l'enfant de celle-ci et la situation déstabilisante pour l'enfant que pourrait créer la mise en oeuvre de rencontres entre elle et lui en raison des relations conflictuelles entre la mère et son ex-épouse.

Pour aller plus loin : cf. ÉTUDE : L’autorité parentale sur la personne de l'enfant, L'entretien de relations personnelles des enfants avec leurs ascendants ou autres personnes, parents ou non, in L’autorité parentale, (dir. A. Gouttenoire), Lexbase N° Lexbase : E5810EYT.

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Avocats/Déontologie

[Brèves] Sollicitation personnalisée de clients-copropriétaires et non-respect des principes essentiels de la profession (illustration)

Réf. : CA Paris, 2 février 2022, n° 19/02425 N° Lexbase : A23817LR

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par Marie Le Guerroué

Le 07 Mars 2022

► L’avocat qui a manipulé de très nombreux copropriétaires de résidences de loisirs gérées par un grand groupe, en usant de l'interface d'une association dont il était le principal animateur, présentée comme bénévole, mais lui servant de faire-valoir, et de comités de pilotage créés à son initiative et dont il était la plume, pour leur proposer ses services de manière souvent indirecte, en utilisant les services de tiers dans le but de contourner ces interdictions, mais également directe sans que le plus grand nombre d'entre eux ne l'ait sollicité, et ce, au mépris de l'engagement de l'association selon lequel aucune proposition commerciale ne serait adressée à moins qu'elle ne soit expressément demandée et en dehors de l'association par un copropriétaire, a agi de manière déloyale et intéressée et donc en violation des principes essentiels de sa profession d'avocat.

Procédure. Des copropriétaires s’étaient rapprochés en 2015 de l'association « Assistance Pierre » dont le but est de défendre leur intérêt collectif dans le cadre de la négociation des conditions de renouvellement des baux avec le groupe « Pierre & Vacances », notamment sur le montant du loyer, la durée du contrat et la participation aux travaux. Dans ce cadre, certains s’étaient regroupés, par résidence, dans un collectif et avaient missionné un avocat associé et président de l'association, pour les assister dans la négociation. Plusieurs sociétés du groupe ont dans ce contexte fait assigner l’avocat en paiement de dommages et intérêts sur le fondement de leur responsabilité délictuelle devant le tribunal de grande instance de Paris. Le 12 décembre 2018, le tribunal de grande instance de Paris les a déboutées de leurs demandes. Les sociétés forment un recours.

  • Réponse de la cour sur le démarchage illicite et le respect des principes essentiels

La cour rappelle que la sollicitation personnalisée destinée à promouvoir les services d'un avocat à l'attention de clients déterminés n'est autorisée que si elle procure une information sincère sur la nature des prestations de services proposées et si sa mise en œuvre respecte les principes essentiels de la profession, dont la loyauté de l'avocat, le respect du secret professionnel et celui des règles de fixation des honoraires. De même, la sollicitation personnalisée permise par la loi exclut tout élément dénigrant.

Sur le non-respect du principe de loyauté, de délicatesse, d'indépendance et de désintéressement. Pour la cour, il se déduit des éléments du dossier que l’avocat a pris l'initiative, en arguant d'un prétexte relatif à la consultation des procès-verbaux des assemblées générales, de solliciter la liste de tous les copropriétaires de nombreuses résidences gérées par le groupe Pierre & Vacances puis tenu la main de quelques propriétaires déjà clients pour qu'ils donnent connaissance aux copropriétaires de leur résidence de l'existence non seulement de l'association « Assistance Pierre », faussement dite d'intérêt général, dont le but était d'aider des copropriétaires de résidences dans leur renégociation de bail spécialement avec les filiales du groupe, mais aussi du nom de son avocat agissant à titre bénévole au sein de l'association, sans révéler que ce dernier était également le président de cette association, laquelle se chargeait d'organiser une conférence d'information sur les actions possibles systématiquement animée par lui, ce qui lui permettait de se faire connaître. À la suite de ces conférences et dans une véritable confusion des identités de l'association et de la société d'avocats, l’avocat lui-même n'hésitait pas à inciter par écrit des copropriétaires à adhérer à l'association et, l'association comme la société d'avocats, ses collaborateurs agissant au nom de l'une comme de l'autre, pressaient les copropriétaires de se réunir en collectif et former un comité de pilotage dont les réunions se déroulaient à Paris et dans les locaux de l'association en présence systématique de l’avocat qui en rédigeait les comptes-rendus. Attirés par l'association animée essentiellement par l’avocat et ses collaborateurs se présentant comme bénévoles, mais œuvrant en réalité uniquement au profit de l'avocat dans le but de le faire connaître du plus grand nombre, les membres des comités de pilotage se retrouvaient captifs des conseils et du plan d'action proposé par l’avocat et se voyaient proposer une lettre de mission accompagnée ou pas d'une convention d'honoraire, laquelle était ensuite adressée aux copropriétaires qui ne faisaient pas partie du comité de pilotage, non seulement par les membres dudit comité, mais aussi par l'association et surtout par la société d'avocats elle-même, et constituait un mandat donné à l'avocat sous couvert d'une adhésion au collectif qu'ils étaient fortement incités à accepter dans un climat d'urgence. L’avocat a, ainsi de manière déloyale et intéressée et donc en violation des principes essentiels de sa profession d'avocat, manipulé de très nombreux copropriétaires de résidences de loisirs gérées par un grand groupe, en usant de l'interface d'une association dont il était le principal animateur, présentée comme bénévole, mais lui servant de faire-valoir, et de comités de pilotage créés à son initiative et dont il était la plume, pour leur proposer ses services de manière souvent indirecte, en utilisant les services de tiers dans le but de contourner ces interdictions, mais également directe sans que le plus grand nombre d'entre eux ne l'ait sollicité et ce, au mépris de l'engagement de l'association selon lequel aucune proposition commerciale ne serait adressée à moins qu'elle ne soit expressément demandée et en dehors de l'association par un copropriétaire. En revanche, la violation des principes de délicatesse et d'indépendance n’est, selon la cour, pas démontrée.

Sur la violation du secret professionnel. L’avocat a annexé à sa lettre de mission, un tableau mettant en avant les « résultats obtenus sur les dossiers Pierre & Vacances résidence par résidence ». Ce faisant et comme l'ont justement apprécié les premiers juges, il a démarché certains de ses clients au prix d'une atteinte à un principe essentiel de la profession d'avocat, celui du secret professionnel, puisqu'il ne prouve pas que l'ensemble des résultats prétendus dont bon nombre sont argués de faux par les sociétés appelantes, aient fait l'objet d'une publication et qu'il n'en a, dès lors, eu connaissance que par sa qualité d'avocat.

Sur la violation des règles de fixation des honoraires. La cour rappelle les dispositions de l’article 10 de loi n° 71-1130 du 31 septembre 1971 N° Lexbase : L6343AGZ et de l'article 11.3 dudit Règlement intérieur national de la profession d'avocat N° Lexbase : L1523KZG. Elle constate que le paiement d'un honoraire fixe et d'un honoraire de résultat dépendant de l'issue des négociations menées par l'avocat est licite. En revanche, la Selar d’avocats qui ne produit aucune convention d'honoraires signée, ne justifie pas du respect de la prescription de l'article 15 du décret du 12 juillet 2005 N° Lexbase : Z99923NU prévoyant que la sollicitation personnalisée précise les modalités de détermination du coût de la prestation qui devra faire l'objet d'une convention d'honoraires. La cour condamne, notamment, l’avocat et sa société in solidum à payer à la Sa Pierre et Vacances la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre des surcoûts humains engendrés par la sollicitation personnalisée de clients copropriétaires illicite.

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Covid-19

[Brèves] Aide en faveur des personnes encadrant des activités sportives affectées par la fermeture des remontées mécaniques : la limite de dépôt des demandes d'aide est repoussée

Réf. : Décret n° 2022-266, du 25 février 2022, modifiant le décret n° 2021-1295 du 5 octobre 2021 instituant une aide exceptionnelle en faveur des personnes physiques et morales de droit privé encadrant des activités sportives et particulièrement affectées par la fermeture des remontées mécaniques dans le contexte de l'épidémie de covid-19 N° Lexbase : L5494MB4

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par Vincent Téchené

Le 07 Mars 2022

► Un décret, publié au Journal officiel du 27 février 2022, modifie la date limite de dépôt des demandes d'aide en faveur des personnes physiques et morales de droit privé encadrant des activités sportives et particulièrement affectées par la fermeture des remontées mécaniques dans le contexte de l'épidémie de covid-19 en la portant au 6 mars 2022.

Cette aide a été mise en place par le décret n° 2021-1295 du 5 octobre 2021 instituant une aide exceptionnelle en faveur des personnes physiques et morales de droit privé encadrant des activités sportives et particulièrement affectées par la fermeture des remontées mécaniques dans le contexte de l'épidémie de covid-19 N° Lexbase : L4279L8Y (V. Téchené, Lexbase Affaires, octobre 2021, n° 692 N° Lexbase : N9070BYL). À l’origine la demande d'aide devait être effectuée par voie dématérialisée, au plus tard dans un délai de trois mois à compter de la publication du décret, soit le 6 janvier 2022. Ce délai est donc repoussé de deux mois.

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Durée du travail

[Brèves] Le droit européen impose-t-il de fixer une limitation à la durée du travail de nuit des sapeurs-pompiers ?

Réf. : CJUE, 24 février 2022, aff. C-262/20, VB N° Lexbase : A03677PB

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par Lisa Poinsot

Le 07 Mars 2022

► La Directive n° 2003/88 laisse aux États membres un large pouvoir d’appréciation en ce qui concerne la réglementation du travail de nuit, sans préjudice des exigences minimales imposées par la Directive en question, qui a pour objectif d’assurer la pleine effectivité de la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs ;

Les sapeurs-pompiers doivent ainsi bénéficier d’autres mesures de protection en matière de durée du travail, de salaire, d’indemnités ou d’avantages similaires, permettant de compenser la pénibilité particulière qu’implique le travail de nuit qu’ils effectuent.

Faits et procédure. Un sapeur-pompier du secteur public effectue pendant plusieurs années des gardes permanentes pendant des durées de 24 heures. Chaque trimestre, les heures supplémentaires qu’il a effectuées au-delà du temps de travail normal sont comptabilisées et rémunérées. Le temps de travail de nuit de ce travailleur fait l’objet d’un calcul permettant de revaloriser la rémunération perçue. En ce sens, 7 heures de travail de nuit sont comptées comme 8 heures de travail effectuées. Cependant, appliquant les dispositions d’une nouvelle ordonnance, son employeur ne fait dès lors plus application du mécanisme de conversion. En conséquence, le travailleur saisit la juridiction nationale compétente d’une demande de versement de rémunération des heures supplémentaires travaillées mais non payées en vertu de l’ancien système de conversion.

La juridiction de renvoi décide de surseoir à statuer et de poser notamment les questions suivantes à la CJUE :

« La protection effective au titre de l’article 12, sous a), de la Directive n° 2003/88 N° Lexbase : L5806DLM exige-t-elle que la durée normale du travail de nuit des policiers et des sapeurs-pompiers soit inférieure à la durée normale prévue pour le travail de jour ? […]

La réalisation effective de l’objectif énoncé au considérant 8 de la Directive n° 2003/88, consistant à limiter la durée du travail de nuit, suppose-t-elle que la législation nationale fixe expressément la durée normale du travail de nuit, y compris pour les travailleurs du secteur public ? »

Par ces questions préjudicielles, la CJUE examine, non pas le montant de la rémunération dudit travailleur, mais les modalités relatives à l’aménagement, la répartition du temps de travail de nuit et sa comptabilisation. En outre, il s’agit d’apprécier la compensation du travail effectué en dehors des heures normales de service.

La solution. Énonçant la solution susvisée, la CJUE interprète les articles 8 et 12 de la Directive n° 2003/88 en ce qu’ils n’imposent pas aux Étas membres de fixer expressément une durée normale de travail de nuit ni une limite à cette durée inférieure à celle du travail de jour. Néanmoins, les sapeurs-pompiers étant des « travailleurs de nuit dont le travail comporte des risques particuliers ou des tensions physiques ou mentales importantes », les législations nationales doivent adapter la durée légale de travail afin de préserver leur santé et leur sécurité.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La durée quotidienne et la durée hebdomadaire de travail, Le travail de nuit, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E330343Q.

 

newsid:480589

Électoral

[Brèves] Production de programmation et de diffusion des émissions de la campagne en vue de l'élection présidentielle : l’ARCOM fixe les règles

Réf. : Décision ARCOM n° 2022-104 du 2 mars 2022 N° Lexbase : Z9482914

Lecture: 4 min

N0654BZA

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par Yann Le Foll

Le 09 Mars 2022

La décision de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) n° 2022-104 du 2 mars 2022, publiée au Journal officiel du 4 mars 2022, fixe les conditions de production, de programmation et de diffusion des émissions de la campagne en vue de l'élection du Président de la République pour les premier et second tours du scrutin.

Rappel

Les émissions de la campagne électorale sont de deux types :

- des émissions de petit format, d'une durée de 1 minute 30 secondes pour le premier tour du scrutin et de 2 minutes pour le second tour du scrutin ;
- et des émissions de grand format, d'une durée de 3 minutes 30 secondes pour le premier tour du scrutin et de 5 minutes pour le second tour du scrutin.

Production des émissions

Au plus tard dans les quinze jours qui suivent la publication de la liste des candidats établie par le Conseil constitutionnel, la société France Télévisions met à la disposition de chaque candidat des moyens de production identiques.

Le candidat doit s'exprimer personnellement, pendant tout ou partie du temps de chaque émission. La présence du candidat doit être visuelle et vocale dans chacune des émissions télévisées ; elle doit être vocale dans chacune des émissions radiophoniques.

Au cours des émissions, les intervenants s'expriment librement.
Ils ne peuvent toutefois, conformément aux lois en vigueur :

- porter atteinte à l'ordre public ou à la sécurité des personnes et des biens ;
- tenir de propos interdits et punis par la loi ou portant atteinte à la dignité de la personne humaine, à l'honneur et à la considération d'autrui ;
- porter atteinte aux secrets protégés par la loi ;
- tenir des propos à caractère publicitaire, au sens de la réglementation sur la publicité et le parrainage ;
- ou procéder à des appels de fonds.

Lorsque le candidat n'utilise pas au cours de son émission la totalité du temps d'émission qui lui a été alloué, il ne peut ni obtenir le report du reliquat sur une autre de ses émissions, ni céder ce reliquat à un autre candidat.

Programmation des émissions

Pour le premier tour du scrutin, les émissions sont programmées du lundi 28 mars au samedi 2 avril et du lundi 4 avril au vendredi 8 avril 2022. En cas de second tour, les émissions sont programmées du lundi 18 avril au vendredi 22 avril 2022.

Les émissions de la campagne électorale sont mentionnées dans les avant-programmes et font l'objet de bandes-annonces diffusées à des heures d'écoute favorable.

Les horaires de diffusion des émissions de petit format sont les suivants pour le premier et le second tours :

- sur France 2, vers 20 heures 40 minutes ;
- sur France 3, vers 22 heures 45 minutes ;
- sur franceinfo, vers 21 heures 45 minutes.

Les horaires de diffusion des émissions de grand format sont les suivants pour le premier et le second tours :

- sur France 2, vers 10 heures 5 minutes, après le programme « Les maternelles » ;
- sur France 3, vers 11 heures ;
- sur franceinfo, vers 15 heures 30 minutes.

Diffusion des émissions

Les sociétés nationales de programme France Télévisions, Radio France et la société France Médias Monde veillent à la bonne diffusion des émissions de la campagne électorale.

En cas d'incident de diffusion, la société concernée en informe immédiatement le coordonnateur.
L’ARCOM peut décider de la rediffusion à l'échelle nationale ou régionale, partielle ou totale, des émissions de la campagne qui ont été affectées par l'incident de diffusion.
En cas de survenance d'un événement exceptionnel et majeur lié à l'actualité, la diffusion des émissions de la campagne électorale sur les chaînes d'information en continu franceinfo et France 24 peut être différée, sous réserve de l'accord préalable de l’ARCOM et dans les conditions que celle-ci détermine.

En cas d'urgence absolue, l’ARCOM est immédiatement informée de ce report et délibère dans les plus brefs délais des nouvelles conditions de diffusion des émissions.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les élections présidentielles, L'accès aux médias audiovisuels des candidats à l'élection présidentielle, (dir. P. Tifine), Lexbase N° Lexbase : E3710E9B.

newsid:480654

Procédure civile

[Brèves] L’obligation de la cour d’appel de soulever d’office l’irrecevabilité tirée du non-acquittement du timbre fiscal dû par les parties à l’instance d’appel

Réf. : Cass. civ. 2, 3 mars 2022, n° 20-23.329, F-B N° Lexbase : A24657PY

Lecture: 2 min

N0653BZ9

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par Alexandra Martinez Ohayon

Le 09 Mars 2022

► La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans son arrêt rendu le 3 mars 2022, précise que lorsque l'appel entre dans le champ d'application de l'article 1635 bis P du Code général des impôts N° Lexbase : L3170LCE, les parties justifient, à peine d'irrecevabilité de l'appel ou des défenses, selon le cas, de l'acquittement du droit prévu à cet article ; l'irrecevabilité est constatée d'office par le magistrat ou la formation compétents ; les parties n'ont pas qualité pour soulever cette irrecevabilité.

Faits et procédure. Dans cette affaire, la demanderesse a acquis un véhicule d’occasion auprès d’un autre particulier. Se plaignant d’une délivrance non conforme, elle a intenté une action en résolution de la vente, en sollicitant des dommages-intérêts devant le tribunal de grande instance. La juridiction a rendu une décision favorable. Le vendeur a interjeté appel à l’encontre du jugement.

Le pourvoi. La demanderesse fait grief à l’arrêt rendu le 19 novembre par la cour d’appel de Metz d’avoir infirmé le jugement et de l’avoir déboutée de ses demandes en résolution de la vente du véhicule et celle tendant à condamner la partie adverse à lui payer la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts. En l’espèce, il ressort du dossier de la procédure que l’appelant ne s’est pas acquitté du droit prévu par l’article 1635 bis P du Code général des impôts avant que la cour d’appel ne statue. En l’espèce, la cour d’appel n'a pas relevé d’office l’irrecevabilité de l’appel tirée de ce que les parties ne s’étaient pas acquittées du paiement du droit précité.

Solution. Énonçant la solution précitée au visa des articles 963 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1244IZ4 et l'article 1635 bis P du Code général des impôts, la Cour de cassation casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt rendu par la cour d’appel de Metz, et renvoie l’affaire devant la cour d’appel de renvoi.

Pour aller plus loin : v. F. Seba, ÉTUDE : L’appel, Déclaration d’appel : pièces à joindre, in Procédure civile, (dir. E. Vergès), Lexbase N° Lexbase : E522649G.

 

newsid:480653

Procédure pénale/Enquête

[Brèves] Réquisitions à personnes qualifiées en enquête préliminaire : inconstitutionnalité du défaut d’information du droit de se taire au cours de l’examen

Réf. : Cons. const., décision n° 2021-975 QPC, du 25 février 2022 N° Lexbase : A03467PI

Lecture: 5 min

N0662BZK

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par Adélaïde Léon

Le 07 Mars 2022

► En ne prévoyant pas que le mis en cause soit informé de son droit de se taire à l’occasion d’un examen au cours duquel il peut être interrogé sur les faits qui lui sont reprochés, l’article 77-1 du Code de procédure pénale méconnait les dispositions de l’article 9 de la DDHC N° Lexbase : L1373A9Q dont découle le droit de se taire.

Rappel de la procédure. Le Conseil constitutionnel a été saisi par la Chambre criminelle (Cass. crim., 7 décembre 2021, n° 21-90.038 F-D N° Lexbase : A80437EM) d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant, d’une part, sur l’article 77-1 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L5531LZU et, d’autre part, sur l’article 706-112-2 du même code N° Lexbase : L7198LPB, dans sa rédaction issue de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice N° Lexbase : L6740LPC.

Le premier article permet au procureur de la République d’avoir recours, à l’occasion d’une enquête préliminaire, à toutes personnes qualifiées pour procéder à des constatations ou examens techniques ou scientifiques.

Le second article dispose quant à lui que lorsqu’il résulte des éléments recueillis au cours d’une procédure concernant un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement qu’une personne devant être entendue librement fait l’objet d’une mesure de protection juridique, l’officier ou l’agent de police judiciaire en avise par tout moyen le curateur ou le tuteur, qui peut désigner un avocat ou demander qu’un avocat soit désigné par le bâtonnier pour assister la personne lors de son audition.

Motifs de la QPC. Le requérant reprochait aux dispositions de l’article 77-1 du Code de procédure pénale de ne pas prévoir que la personne mise en cause soit informée de son droit de garder le silence lorsqu’elle est entendue sur les faits qui lui sont reprochés.

Il était par ailleurs fait grief aux dispositions de l’article 706-112-2 du même code de ne pas prévoir que le tuteur ou le curateur, lorsqu’il est avisé de l’audition libre du majeur protégé, soit informé de la possibilité qu’il a de désigner ou de faire désigner un avocat pour l’assister.

Il résulterait de ces carences une méconnaissance du droit de se taire et des droits de la défense.

Le Conseil constitutionnel retient que la QPC porte, d’une part, sur les mots « a recours à toutes personnes qualifiées » de l'article 77-1 du Code de procédure pénale et, d'autre part, sur la première phrase de l'article 706-112-2 du même code.

Décision.

Sur l’article 77-1 du Code de procédure pénale. Pour retenir l’inconstitutionnalité des dispositions litigieuses dans l’article 77-1 du Code de procédure pénale, le Conseil prend l’hypothèse spécifique de l’examen psychologique ou psychiatrique de la personne soupçonnée d’avoir commis une infraction, qui pourrait être requis sur ce fondement, afin, notamment de s’assurer des conditions préalables à l’exercice des poursuites.

Comme le souligne le Conseil, il s’agit d’un examen au cours duquel, la personne requise a la faculté d’interroger le mis en cause sur les faits qui lui sont reprochés. À cette occasion, ce dernier pourrait donc être amené à reconnaître sa culpabilité et répondant aux questions posées. Or, le rapport établi à l’issue de l’examen et dans lequel les déclarations de l’intéressé sont consignées, est susceptible d’être porté à la connaissance de la juridiction de jugement.

En ne prévoyant pas que le mis en cause soit informé de son droit de se taire à l’occasion d’un examen au cours duquel il peut être interrogé sur les faits qui lui sont reprochés, l’article 77-1 du Code de procédure pénale méconnait les dispositions de l’article 9 de la DDHC N° Lexbase : L1373A9Q dont découle le droit de se taire.

Le Conseil constate que les dispositions en cause ne sont plus en vigueur dans leur rédaction contestée et décide, pour éviter des conséquences manifestement excessives, que les mesures prises sur leur fondement ne peuvent être contestées sur le fondement de l’inconstitutionnalité déclarée.

Sur l’article 706-112-2 du Code de procédure pénale. Le Conseil estime que les dispositions contestées ont pour objectif de permettre au majeur protégé d’être, au cours de son audition libre, assisté dans l’exercice de ses droits et, en particulier, dans l’exercice de son droit à l’assistance d’un avocat. Dès lors, les Sages ont considéré que les dispositions en cause impliquent nécessairement que, lorsqu’il est avisé de l’audition libre du majeur protégé, le tuteur ou le curateur est informé par les enquêtes de la possibilité qu’il a de désigner ou de faire désigner un avocat pour assister ce dernier.

Le Conseil écarte donc le grief tiré de la méconnaissance des droits de la défense.

Pour aller plus loin : J.-Y. Maréchal, ÉTUDE : Les actes d'investigation, Les réquisitions, in Procédure pénale, (dir. J.-B. Perrier), Lexbase N° Lexbase : E7358ZKQ.

newsid:480662

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