Lexbase Social n°843 du 12 novembre 2020

Lexbase Social - Édition n°843

Accident du travail - Maladies professionnelles (AT/MP)

[Jurisprudence] L’action récursoire de la CPAM contre l’employeur en cas de faute inexcusable

Réf. : Cass. civ. 2, 8 octobre 2020, n° 19-13.730, F-P+B+I (N° Lexbase : A05533XR)

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par Yann Bougenaux, Avocat au barreau de Lyon

Le 12 Novembre 2020

 


Mots clés : faute inexcusable • reconnaissance ultérieure • action récursoire • CPAM

Une décision initiale de refus de prise en charge d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle demeure définitive à l’employeur même en cas de reconnaissance ultérieure de faute inexcusable.

En cas de reconnaissance ultérieure du caractère professionnel de l’accident ou de la maladie suivi d’une reconnaissance d’une faute inexcusable de l’employeur, la Cour de cassation considère que l’action récursoire de la CPAM ne peut être exercée.


L’arrêt rendu par la Cour de cassation le 8 octobre 2020, publié au bulletin, vient apporter une précision supplémentaire dans le contentieux portant sur l’action récursoire de la CPAM en cas de reconnaissance d’une faute inexcusable de l’employeur.

I. Le principe de l’action récursoire de la CPAM en cas de reconnaissance de faute inexcusable

Un principe…

À la suite d’un accident du travail, ou d’une maladie professionnelle, le salarié peut solliciter la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, en vue d’obtenir une indemnisation complémentaire (CSS, art. L. 452-1 N° Lexbase : L5300ADN).

Le salarié bénéficie d’une majoration de rente (CSS, art. L. 452-2 N° Lexbase : L7113IUY) et de la réparation des préjudices personnels.

La faute inexcusable correspond à un manquement à l’obligation de sécurité de l’employeur lorsqu’il aurait dû avoir conscience d’un danger et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour le prévenir.

En cas de reconnaissance de faute inexcusable de l’employeur, le versement des indemnités allouées au salarié est à la charge de la CPAM qui doit en faire l’avance puis qui peut ensuite agir contre la société pour en obtenir le remboursement, dans le cadre d’une action récursoire.

Cette solution est prévue par l’article L. 452-3, alinéa 3, du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L5302ADQ) :

« La réparation de ces préjudices est versée directement aux bénéficiaires par la caisse qui en récupère le montant auprès de l'employeur. »

La caisse verse ainsi au salarié les indemnités auxquelles leur ouvre droit la faute inexcusable de l’employeur (rente et dommages personnels) et ne dispose que d’une action récursoire contre l’employeur.

Les sommes en jeux peuvent être conséquentes, ce qui va nécessairement nourrir un contentieux abondant.

…Nécessairement limité

En effet, la problématique évoquée trouve sa place dans une relation triangulaire entre la CPAM, l’employeur et le salarié.

Par ailleurs, les relations sont régies par le principe de l’indépendance des rapports entre la caisse et l’employeur d’une part et la caisse et le salarié d’autre part.

Ce principe n’apparait explicitement dans aucun texte et se déduit simplement de l’article R. 441-10 (N° Lexbase : L6185IES, dans rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2010).

La Cour de cassation a consacré ce principe à de nombreuses reprises et celui-ci doit donc être pris en compte dans l’ordonnancement juridique.

Ainsi, ce principe de l’indépendance des rapports conduit à traiter de manière autonome chacun des recours du salarié ou de l’employeur.

À titre d’exemple en cas de reconnaissance de prise en charge d’un accident du travail, l’employeur peut contester la décision, mais cette procédure n’aura aucune incidence pour le salarié, même en cas d’issue favorable pour l’employeur.

Le salarié conserve donc tous les bénéfices de la reconnaissance du caractère professionnelle de sa pathologie.

L’exemple inverse est également vrai.

Ainsi, il est admis qu’une décision initiale de refus de prise en charge de l’accident du travail ou de la maladie professionnelle doive être définitive à l’égard de l’employeur.

L’employeur n’aura pas à subir les conséquences d’un recours du salarié du point de vue de la tarification et de son taux accident du travail / maladies professionnelles.

Ce principe de l’indépendance des rapports va donc nécessairement complexifier les relations, et notamment en cas de reconnaissance d’une faute inexcusable de l’employeur, qui consacre alors un manquement à l’obligation de sécurité.

Les problématiques concernent principalement deux questions :

  • en cas de refus initial de prise en charge de la pathologie ;
  • en cas de jugement déclarant inopposable à l’employeur la décision de prise en charge.

La Cour de cassation a déjà traité certaines interrogations à ce sujet.

Ainsi en cas d’augmentation du taux d’incapacité permanente partielle à la suite d’un recours du salarié, la majoration de rente ne peut être opposable à l’employeur que dans la limite du taux d’IPP initial (Cass. civ. 2, 9 mai 2018, n° 17-16.963, F-P+B N° Lexbase : A6179XMS) :

« Mais attendu que si la caisse primaire d'assurance maladie est fondée, en application de l'article L. 452-2 du Code de la Sécurité sociale, à récupérer auprès de l'employeur le montant de la majoration de la rente d'accident du travail attribuée à la victime en raison de la faute inexcusable de l'employeur, elle ne peut se prévaloir à l'égard de ce dernier d'une décision, même passée en force de chose jugée, rendue à l'issue d'une instance à laquelle il n'a pas été appelé »

Dans ce cas, le salarié bénéficie de la majoration de rente sur la base du taux d’incapacité permanente partielle obtenu à la suite de son recours, mais l’action récursoire de la caisse à l’encontre de l’employeur est limitée.

Il est donc communément admis que l’action récursoire de la CPAM puisse ne pas être utilisée pleinement à l’encontre de l’employeur.

La Cour de cassation, et le législateur, ont également apporté des précisions s’agissant des suites d’un jugement prononçant l’inopposabilité de la décision initiale de prise en charge, à la suite du recours de l’employeur.

Ainsi, il était acquis jusqu’en 2012 qu’un jugement d’inopposabilité de la décision de prise en charge privait la CPAM de la possibilité de récupérer les sommes versées au salarié au titre de la faute inexcusable auprès de l’employeur (Cass. soc., 2 mars 2004, n° 02-30.966, publié N° Lexbase : A4128DBI ; Cass. civ. 2, 21 septembre 2004, n° 03-30.067, F-D N° Lexbase : A4232DD4).

L’article L. 452-3-1 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L6937IUH), issu de la loi du 17 décembre 2012, prévoit désormais la possibilité pour la caisse de récupérer les dites sommes auprès de l’employeur, malgré un jugement d’inopposabilité, lorsque cette inopposabilité porte sur un moyen de procédure :

« Quelles que soient les conditions d'information de l'employeur par la caisse au cours de la procédure d'admission du caractère professionnel de l'accident ou de la maladie, la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur par une décision de justice passée en force de chose jugée emporte l'obligation pour celui-ci de s'acquitter des sommes dont il est redevable à raison des articles L. 452-1 à L. 452-3. »

Ce texte conduisait à une interrogation s’agissant d’un jugement prononçant l’inopposabilité de la décision de prise en charge sur un moyen non procédural (matérialité de l’accident, exposition au risque, …).

La Cour de cassation avait répondu clairement que dans ce cas, l’action récursoire de la CPAM n’était pas envisageable (Cass. civ. 2, 15 février 2018, n° 17-12.567, F-P+B N° Lexbase : A7740XDZ) :

« Mais attendu que si la caisse primaire d'assurance maladie est fondée, en application des articles L. 452-2 et L. 452-3 du Code de la Sécurité sociale, à récupérer auprès de l'employeur le montant des majorations de rente et indemnités allouées à la victime et à ses ayants droit en raison de la faute inexcusable de ce dernier, son action ne peut s'exercer dans le cas où une décision de justice passée en force de chose jugée a reconnu, dans les rapports entre la caisse et l'employeur, que l'accident ou la maladie n'avait pas de caractère professionnel ; »

Si la situation semble claire de ce côté, qu’en est-il en cas de décision initiale de refus de prise en charge de l’accident ou de la maladie ?

II. L’action récursoire limitée par la décision initiale de la CPAM de refus de prise en charge

En cas de décision de la CPAM de refus de prise en charge de l’accident ou de la maladie, le salarié peut contester cette décision devant la commission de recours amiable, puis devant le désormais pôle social du tribunal judiciaire.

En cas de succès et de reconnaissance du caractère professionnel de l’accident ou de la maladie, le salarié peut agir contre son employeur aux moyens d’une action en reconnaissance de faute inexcusable.

La question qui va nécessairement se poser est l’opposabilité à l’employeur de cette décision judiciaire de reconnaissance d’accident du travail ou de maladie professionnelle.

La problématique a été soulevée devant la cour d’appel de Lyon (CA Lyon, 30 janvier 2018, n° 16/05328 N° Lexbase : A4950XCC) qui, dans ce cas, avait considéré que la caisse ne pouvait recouvrer auprès de l’employeur que « les sommes correspondantes aux préjudices personnels de la victime et non celles correspondant aux prestations de Sécurité sociale, dont la majoration de rente. »

Saisi par la CPAM, la Cour de cassation avait censuré cette analyse et renvoyée devant la cour d’appel de Lyon autrement composée (Cass. civ. 2, 9 mai 2019, n° 18-14.515, F-P+B+I N° Lexbase : A0750ZBE).

Le contentieux est toujours pendant.

Il semble donc qu’il soit impossible de diviser l’action récursoire de la CPAM en deux, avec d’un côté la majoration de rente et de l’autre côté les sommes correspondantes à la réparation des préjudices personnels de la victime.

Par un arrêt du 8 octobre 2020 (Cass. civ. 2, 8 octobre 2020, n° 19-13.730, F-P+B+I N° Lexbase : A05533XR), la Cour de cassation apporte une précision supplémentaire.

En l’occurrence, la cour d’appel de Versailles (CA Versailles, 17 janvier 2019, n° 18/01020 N° Lexbase : A2469YWD) avait confirmé un jugement du tribunal des affaires de Sécurité sociale de Versailles qui considérait que l’action récursoire de la caisse était possible en cas de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur et ce malgré la décision initiale de refus de prise en charge de l’accident :

« Au demeurant, le caractère inopposable à l'employeur de la prise en charge d'un accident au titre de la législation professionnelle ne prive en aucune façon le salarié du droit de rechercher (et d'obtenir) la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur tandis que, dans ce cadre, ce dernier est tenu des condamnations qui seraient prononcées à l'encontre de la caisse dans l'hypothèse où celle-ci engagerait une action récursoire.

C'est ce que la caisse fait ici et la cour ne peut que, non pas dire la décision de prise en charge opposable à la Société, mais qu'il doit être fait droit à l'action récursoire de la caisse dans l'hypothèse où la faute inexcusable de l'employeur serait retenue. »

Ainsi, une des particularités de l’arrêt de la cour d’appel de Versailles est de confirmer que la décision de prise en charge n’était pas opposable à l’employeur, mais de juger que l’action récursoire de la caisse était malgré tout possible.

L’employeur avait alors saisi la Cour de cassation considérant que la CPAM ne pouvait pas user de son action récursoire en cas de décision initiale de refus de prise en charge de l’accident.

La Cour de cassation rappelle dans un premier temps que l’article R. 441-14 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L6170IEA), dans rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2010, applicable à l’époque des faits, conduit à ce que la décision de refus de prise en charge soit définitive à l’égard de l’employeur.

La Cour en déduit ensuite que les dépenses afférentes à l’accident du travail ne peuvent être inscrites au compte de l’employeur :

« En statuant ainsi, alors qu'elle constatait que la décision de la caisse de refuser la prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle était définitive à l'égard de l'employeur, ce dont il résultait que les dépenses afférentes à l'accident du travail ne pouvaient être inscrites au compte de l'employeur, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a violé le texte susvisé. »

La particularité de cette décision réside également dans le fait que la société avait été mise en cause devant le tribunal des affaires de Sécurité sociale dans le cadre du recours du salarié.

Une première lecture pourrait donc conduire à penser que la décision initiale de refus serait définitivement acquise au profit de l’employeur, même s’il a été mis en cause dans le cadre du recours du salarié.

Cependant il convient d’être prudent sur ce point, dans la mesure où le tribunal des affaires de Sécurité sociale n’avait pas déclaré le jugement commun et opposable à la société, ce qu’avait très justement relevé la cour d’appel de Versailles.

Il est donc difficile de conclure qu’un jugement reconnaissant un accident du travail ou une maladie professionnelle à la suite d’un recours du salarié ne puisse, en aucun cas, être opposable à la société.

Ainsi, la solution de la Cour de cassation apparait favorable aux employeurs qui peuvent se prévaloir d’une décision de refus de prise en charge initiale, même en cas de reconnaissance du caractère professionnel et d’une faute inexcusable de sa part.

L’effet d’une décision initiale de refus de prise en charge semble donc plus favorable aux employeurs qu’une décision judiciaire d’inopposabilité.

En effet dans ce dernier cas, l’effet de la décision judiciaire d’inopposabilité ne peut être invoqué lorsque la décision d’inopposabilité repose sur un moyen de procédure.

Contrairement à une décision de refus de prise en charge qui demeure donc plus favorable aux employeurs.

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Accident du travail - Maladies professionnelles (AT/MP)

[Jurisprudence] Précisions par la Cour de cassation des conditions de reconnaissance de la faute inexcusable

Réf. : Cass. civ. 2, 8 octobre 2020, deux arrêts, n° 18-25.021 (N° Lexbase : A05513XP) et n° 18-26.677 (N° Lexbase : A05523XQ), FS-P+B+I

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par Corentin Moynat, juriste-consultant au sein du Cabinet Fayan-Roux, Bontoux et Associés

Le 11 Novembre 2020

 


Mots clés : faute inexcusable • conditions de reconnaissance • conscience du danger

La Cour de cassation apporte une précision en matière de faute inexcusable s’agissant de la conscience du danger par l’employeur et des moyens de protections mis en place.

Pourvoi n° 18-25.021 : l’évaluation de la conscience du danger par l’employeur doit être effectuée par l’analyse de l’ensemble des moyens à sa disposition et un risque d’agression n’est pas nécessairement hypothétique.

Pourvoi n° 18-26.677 : l’évaluation des moyens mis en œuvre par l’employeur pour protéger ses salariés doit être effectuée en prenant en compte l’efficacité des mesures et pas seulement leur mise en place.


La Cour de cassation considère que la faute inexcusable de l’employeur est constituée par la réunion de l’inexécution de l’obligation de sécurité et du cumul entre la conscience du danger et l’inaction de l’employeur : « Le manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l’employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d’une faute inexcusable lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver ».

Par deux arrêts du 8 octobre 2020, publiés au bulletin des arrêts des chambres civiles et au bulletin d’information, la Cour de cassation a précisé la notion de conscience du danger (pourvoi n° 18-25.021) (I.) et la notion d’absence ou d’insuffisance de mesures pour protéger le salarié (pourvoi n° 18-26.677) (II.).

I. La conscience du danger par l’employeur

La conscience du danger est nécessaire à la qualification de faute inexcusable [1]. Ainsi, l’absence de conscience du danger constitue une cause d’exonération de la responsabilité de l’employeur [2]. La conscience du danger qui caractérise la faute inexcusable de l'employeur renvoie à la notion de prévision raisonnable du risque. Selon la position traditionnelle de la Cour de cassation, il convient de rechercher si un employeur moyen, dans la même situation, aurait eu conscience de la dangerosité de la situation.

Une attitude proactive est attendue de la part de l’employeur concernant l’évaluation de la conscience du danger. En effet, l’établissement du document unique d’évaluation des risques (DUER) est une obligation, elle est prévue à l’article R. 4121-1 du Code du travail (N° Lexbase : L9062IPC). C’est-à-dire que les risques pouvant atteindre les salariés doivent être recherchés par l’employeur. La conscience du danger par l’employeur ne doit donc pas seulement résulter de l’information données par le salarié lui-même ou des instances représentatives du personnel. C’est la solution retenue par la Cour de cassation par son arrêt du 8 octobre 2020 (pourvoi n° 18-25.021). En l’espèce, le salarié avait fait l’objet d’une agression physique à bord de l’autobus qu’il conduisait. La cour d’appel a retenu que ni le salarié, ni le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), n’avaient interpellé l’employeur sur le risque d’agression des conducteurs. Elle a ainsi retenu que la connaissance par l’employeur d’un danger n’était pas établie.

La Cour de cassation a cassé cet arrêt en retenant qu’il résultait des constatations de la cour d’appel que l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du risque d’agression physique auquel étaient exposés les conducteurs. En effet, il résulte des constatations de la cour d’appel que le risque d’agression était répertorié au DUER. Si le risque considéré est répertorié dans ce document, il est alors établi que l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience de ce risque. La cour d’appel ne pouvait donc pas retenir l’absence de conscience du risque par l’employeur alors que ce dernier l’avait pris en compte dans son évaluation.

L’évaluation des risques par l’employeur constitue ainsi une donnée déterminante dans la constatation de sa conscience du danger. Une évaluation rigoureuse des risques professionnels dans l’entreprise peut permettre d’établir l’absence de conscience du danger si ce dernier ne figure pas au document unique. En effet, lorsqu’un risque particulier ne figure pas dans un DUER correctement établi, il peut être légitimement soutenu que l’employeur n’avait pas conscience de ce risque. Il est en revanche établi que l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience d’un danger si ce dernier est répertorié dans ce document. A contrario, l’absence de mention au DUER d’un risque ne fait pas obstacle à ce qu’il soit reconnu que l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience de ce danger [3]. En effet, si le risque a été évalué, le juge doit contrôler s’il l’a été à sa juste mesure.

La conscience du danger peut également résulter de la survenance précédemment de ce danger. En effet, l’employeur peut de manière légitime affirmer ne pas avoir eu conscience d’un risque qui ne s’était jamais réalisé. En revanche, l’employeur doit avoir conscience qu’un risque déjà réalisé peut se reproduire [4]. En l’espèce, au jour de l’accident, quatre agressions en vingt mois avaient été signalées sur la ligne occupée par le salarié. Il en résulte que l’employeur avait nécessairement conscience du danger encouru par son salarié.

II. L’absence ou l’insuffisance de mesures pour protéger le salarié

Lorsque l’employeur a conscience d’un danger auquel ses salariés sont exposés, il doit mettre en œuvre les mesures permettant de les protéger. En effet, la conscience du danger suppose que l’employeur prenne les mesures nécessaires à la préservation du salarié dudit danger. L’absence ou l’insuffisance de mesures pour protéger le salarié peut caractériser la faute inexcusable de l'employeur.

Selon l’article L. 4121-3 du Code du travail (N° Lexbase : L9296I3P), lorsque l’employeur a établi le DUER, il doit ensuite mettre en œuvre les actions de prévention permettant de contenir les risques et de garantir la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs. L’absence de mise en œuvre des mesures permettant de protéger les salariés alors que l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience d’un danger constitue une faute inexcusable. Quel niveau d’efficacité dans la protection est demandée à l’employeur ? Doit-il empêcher totalement toute réalisation du risque, doit-il mettre en œuvre tous les moyens à sa disposition ?

Avant 2015, l’employeur était tenu à une obligation de sécurité de résultat. C’est-à-dire que le manquement à cette obligation était caractérisé par le seul fait matériel de son inexécution. Il ne pouvait alors se libérer de son obligation qu'à la condition de démontrer un cas de force majeure. Autrement dit, la simple survenance d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle suffisait à démontrer la non-réalisation de l'obligation de résultat.

Cette obligation de résultat était clairement affirmée par les célèbres arrêts amiante de 2002 : « Tout manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, notamment révélé par l’accident ou la maladie, a le caractère d’une faute inexcusable si l’employeur avait conscience ou, en raison de son expérience et de ses connaissances techniques, aurait dû avoir conscience du danger encouru par les salariés, et qu’il n’a pas pris les dispositions nécessaires pour les en préserver. » [5]. Cette définition était rapidement étendue aux accidents du travail [6] avant d’être reprise par la deuxième chambre civile de la Cour de Cassation [7] et consacrée en 2005 par l’Assemblée plénière [8].

Depuis 2015, la Cour de cassation adopte une position plus pragmatique et considère que l’employeur démontrant avoir mis en place et donc respecté des mesures réglementaires de sécurité ne méconnaissait pas son obligation légale de sécurité, même en cas de réalisation du risque connu. La Cour de cassation se référait alors aux articles L. 4121-1 (N° Lexbase : L8043LGY) et L. 4121-2 (N° Lexbase : L6801K9R) du Code du travail qui prévoient la mise en œuvre de mesures pour assurer la sécurité des travailleurs : « Mais attendu que ne méconnaît pas l'obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail » [9]. Ainsi, la Cour de cassation estime qu’il est nécessaire de rejeter une demande de reconnaissance de la faute inexcusable lorsque le juge constate que l’employeur a pris toutes les mesures de prévention visées aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 [10].

Par son arrêt du 8 octobre 2020 (pourvoi n° 18-26.677), la Cour de cassation vient apporter une précision sur cette exigence de respect des mesures de prévention visées aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2.

La Cour de cassation impose de s’intéresser à l’efficacité des mesures de protections. Ainsi, si les mesures développées par l’employeur pour protéger ses salariés s’avèrent inefficaces, alors celui-ci s’expose à la reconnaissance de sa faute inexcusable.

En l’espèce, le salarié avait contracté une silicose en travaillant dans une mine. La CPAM avait pris en charge la maladie au titre de la législation sur les risques professionnels. Quant à l’appréciation de la faute inexcusable de l’employeur, les parties s’accordaient sur la conscience par l’employeur du danger constitué par l'inhalation de poussières de silice. Il existait cependant un débat sur l'existence et l'efficacité des mesures de protection individuelle et collective prises par l'employeur afin de préserver la victime du danger auquel elle était exposée [11]. Selon la cour d’appel, les attestations produites par le salarié ne permettaient pas d’établir l’absence ou l’insuffisance des mesures de protection (celle-ci étant très ancienne). Le juge d’appel a ainsi considéré qu’il ne pouvait apprécier la faute de l’employeur, en raison d’un manque de précision de la part du demandeur sur les moyens de protections. Par ailleurs, la cour d’appel avait constaté que l’employeur respectait une instruction de 1956 qui admettait la foration à sec sur des massifs à faible teneur en silice, et que le travail semblait se dérouler dans des conditions conformes aux normes en vigueur.

Cependant, la Cour de cassation casse l’arrêt de cour d’appel en imposant une vérification de l’efficacité des mesures mises en œuvre pour protéger les salariés. En effet, la Cour de cassation a estimé, contrairement la cour d’appel, qu’il résultait de ses constatations une inefficacité des mesures de protection mises en œuvre par l’employeur.

C’est à l’employeur de démontrer l’efficacité des moyens de protections et non au salarié de démontrer leur inefficacité.

La Cour de cassation vient ainsi contrôler l’appréciation par les juges du fond des moyens mis en œuvre par l’employeur pour protéger ses salariés. En effectuant un contrôle de l’efficacité des mesures de protection mises en œuvre par l’employeur, la Haute juridiction indique que l’employeur ne doit pas uniquement justifier avoir pris des mesures de protection. Il doit également justifier l’effectivité de ces mesures et leur efficacité. La cassation intervient au visa des articles L. 452-1 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L5300ADN), L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail. L’article L. 4121-2 du Code du travail précise que l’employeur doit mettre en œuvre des mesures de prévention afin notamment d’éviter les risques. L’employeur doit ainsi mettre en œuvre des mesures efficaces, ce qui suppose de démontrer un travail rigoureux de réflexion autour de la prévention dans le but de réduire de manière effective les dangers auxquels sont exposés les salariés.

La définition de la faute inexcusable et donc, ses conditions de caractérisation, sont jurisprudentielles. L’essence même de la faute inexcusable est de permettre au salarié victime d’une telle faute de prétendre à une réparation presque intégrale de ses préjudices. Du point de vue de la réparation du préjudice, il est important de ne pas trop restreindre les conditions de la caractérisation de la faute inexcusable. Cependant, du point de vue de la prévention des risques en entreprise, il est également important de donner du poids aux moyens mis en œuvre par l’employeur dans l’appréciation de la faute inexcusable. Il semble que la Cour de cassation impose aux employeurs de mettre en œuvre des plans de prévention ambitieux, réfléchis et résolument tournés vers la réduction effective des risques.

 

[1] Cass. civ. 2, 5 avril 2012, n° 11-13.946, F-D (N° Lexbase : A1275II3).

[2] Cass. civ. 2, 2 mai 2007, n° 06-10.083, FS-D (N° Lexbase : A0609DWH).

[3] Cass. civ. 2, 7 juillet 2016, n° 15-19.975, F-D (N° Lexbase : A9931RWQ).

[4] Cass. civ. 2, 7 juillet 2016, n° 15-19.975, F-D, préc..

[5] Cass. soc., 28 février 2002, n° 00-10.051 (N° Lexbase : A0806AYI), n° 99-18.389 (N° Lexbase : A0766AYZ), n° 99-18.390 (N° Lexbase : A0602AYX), n° 99-21-255 (N° Lexbase : A0773AYB) et n° 99-17.201 (N° Lexbase : A0761AYT), FP-P+B+R+I.

[6] Cass. soc., 11 avril 2002, n° 00-16.535, publié, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A4836AYR).

[7] Cass. civ. 2, 16 septembre 2003, n° 01-20.780, inédit (N° Lexbase : A5375C9X).

[8] Ass. plén., 24 juin 2005, n° 03-30.038 (N° Lexbase : A8502DIQ).

[9] Cass. soc., 25 novembre 2015, n° 14-24.444, FP-P+B+R+I (N° Lexbase : A7767NXX).

[10] Cass. soc., 1er juin 2016, n° 14-19.702, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A2663RR3).

[11] CA Metz, 25 octobre 2018, n° 17/00267 (N° Lexbase : A2174YID).

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Covid-19

[Brèves] Télétravail : mobilisation de l’inspection du travail pour contrôler l’application du protocole sanitaire en entreprise

Réf. : Min. Travail, communiqué de presse, 3 novembre 2020

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par Charlotte Moronval

Le 13 Novembre 2020

► Les services de l’inspection du travail sont chargés de vérifier la stricte application du protocole sanitaire dans les entreprises, qui prévoit notamment le recours au télétravail à 100 % dès que possible. En vue de cette phase de contrôle de la mise en œuvre du télétravail, le ministère du Travail a par ailleurs préparé un questionnaire à destination des entreprises.

La Direction générale du travail (DGT), autorité centrale de l’inspection du travail, a adressé une instruction, en date du 3 novembre, à ses services en région et en département pour préciser leur fonctionnement durant cette nouvelle période de confinement. L’ensemble des missions du service public doivent rester assurées : missions de contrôle, service d’accès au droit…

S’agissant du télétravail que le protocole sanitaire généralise pour toutes les activités qui s’y prêtent, la DGT précise que c’est à l’employeur de déterminer les tâches pouvant être effectuées en télétravail et de s’organiser en conséquence. Le télétravail doit être généralisé pour tous les salariés en mesure de réaliser l’ensemble de leurs tâches à distance. Pour les autres, l’organisation du travail doit permettre de réduire les déplacements et la présence en entreprise en regroupant sur certains jours les tâches ne pouvant être effectuées que sur place.

En parallèle de cette instruction, le ministère du Travail a rédigé un questionnaire à destination des employeurs, dans lequel ceux-ci devront détailler leur démarche, et justifier de la mise en place du télétravail. Ce questionnaire permet également de s’assurer que les représentants du personnel sont pleinement associés à la démarche des employeurs.

Par ailleurs, le ministère du Travail a également procédé à une nouvelle mise à jour de ses questions/réponses relatives au télétravail. Il y rappelle les règles applicables pour mettre en place le télétravail, l’impossibilité pour le salarié d’imposer le télétravail à son employeur et les risques de sanction pour les entreprises qui refusent le télétravail.

Pour en savoir plus. Lire S. Gustin, Covid-19 : le télétravail à l'heure de la seconde vague, Lexbase Social, novembre 2020, n° 842 (N° Lexbase : N5160BYR)

 

newsid:475185

Covid-19

[Brèves] Communication de l’ACOSS sur les mesures exceptionnelles pour accompagner les entreprises et les travailleurs indépendants dans le cadre du reconfinement

Réf. : Communiqué de presse de l’ACOSS, Covid-19 – Mesures exceptionnelles pour accompagner les entreprises et les travailleurs indépendants dans le cadre du reconfinement

Lecture: 3 min

N5197BY7

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par Laïla Bedja

Le 09 Novembre 2020

► Les nouvelles mesures de restriction sanitaire ont à nouveau amené l’URSSAF à mettre en place des mesures exceptionnelles pour accompagner la trésorerie des entreprises et des travailleurs indépendants.

L’ACOSS expose ces mesures exceptionnelles dans un communiqué de presse, mesures aussi exposées par l’URSSAF sur son site (pour les employeurs, pour les indépendants).

Rappel : l’URSSAF a mis à disposition un site dédié aux mesures liées à la situation sanitaire : https://mesures-covid19.urssaf.fr/

Pour les employeurs

Les employeurs peuvent reporter tout ou partie du paiement de leurs cotisations salariales et patronales pour les échéances des 5 et 15 novembre 2020. Les déclarations doivent néanmoins être déposées aux dates prévues. Le report de cotisations Urssaf vaut également pour les cotisations de retraite complémentaire.

Pour bénéficier du report, il suffit de remplir en ligne un formulaire de demande préalable . En l’absence de réponse de l’Urssaf sous 48h, cette demande est considérée comme acceptée.

Les cotisations qui ne seront pas payées sont automatiquement reportées. L’Urssaf contactera ultérieurement les employeurs pour leur proposer un plan d’apurement de leurs dettes.  

Aucune pénalité ni majoration de retard ne sera appliquée.

Il est néanmoins rappelé par l’organisme que dans le contexte actuel, où le système de soins et plus largement la protection sociale et l’action de l’Etat sont plus que jamais sollicités, il est important que les entreprises qui le peuvent continuent à participer au financement de la solidarité nationale. Les entreprises doivent faire preuve de responsabilité dans l'usage des facilités qui leur sont accordées, afin qu'elles bénéficient avant tout aux entreprises qui en ont besoin.

Pour les travailleurs indépendants

Les cotisations sociales personnelles des travailleurs indépendants ne seront pas prélevées en novembre (l’échéance trimestrielle du 5 novembre ainsi que les échéances mensuelles du 5 et du 20 novembre sont suspendues). Le prélèvement automatique des échéances de novembre ne sera pas réalisé, sans que les travailleurs indépendants aient de démarche à engager. Ceux qui paient par d’autres moyens de paiement pourront ajuster le montant de leur paiement.

Aucune pénalité ni majoration de retard ne sera appliquée. Les modalités de régularisation de ces échéances seront précisées ultérieurement.

Toutefois, les travailleurs indépendants qui le peuvent sont invités à régler leurs cotisations de façon spontanée, selon des modalités qui leur seront communiquées par leur Urssaf. Ils peuvent ajuster leur échéancier en réestimant leur revenu 2020 qui sert de base au calcul des cotisations provisionnelles.

Les travailleurs indépendants bénéficiant d’un délai de paiement sur des dettes antérieures peuvent également demander à en reporter les échéances.

En complément de ces mesures, les travailleurs indépendants peuvent solliciter l’intervention de l’action sociale du Conseil de la Protection sociale des travailleurs indépendants (CPSTI) pour la prise en charge partielle ou totale de leurs cotisations ou pour l’attribution d’une aide financière exceptionnelle.

Pour les autoentrepreneurs

L’échéance mensuelle de septembre et l’échéance trimestrielle du troisième trimestre doivent être déclarées normalement d’ici au 2 novembre à 12 heures.

Les autoentrepreneurs ont la possibilité de payer la totalité, ou une partie seulement, ou de ne pas payer les cotisations sociales dues sur cette échéance.

Ceux qui ont déjà réalisé leurs déclarations peuvent modifier leur ordre de paiement pour réduire ou mettre à zéro le montant payé.

Aucune majoration de retard ne sera appliquée, les modalités de régularisation des paiements partiels ou absents seront précisées ultérieurement.

Les auto-entrepreneurs bénéficiant d’un délai de paiement peuvent également demander à en reporter les échéances.

newsid:475197

Emploi

[Brèves] Modalités relatives à l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés

Réf. : Décret n° 2020-1350 du 5 novembre 2020, relatif à l'obligation d'emploi en faveur des travailleurs handicapés (N° Lexbase : L6120LYC)

Lecture: 1 min

N5258BYE

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par Charlotte Moronval

Le 10 Novembre 2020

► Publié au Journal officiel du 6 novembre 2020, le décret n° 2020-1350 du 5 novembre 2020 apporte plusieurs modifications aux dispositions relatives à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés.

Ce texte précise les modalités de déclaration et de déduction des employeurs relatives à l'obligation d'emploi.

Il détermine également les modalités de la modulation de la contribution prenant en compte les emplois exigeant des conditions d'aptitude particulière occupés par des salariés de l'entreprise, qui peut prendre la forme d'une déduction du montant de la contribution annuelle. Il précise que les entreprises de portage salarial sont également concernées par cette obligation.

Pour en savoir plus. Lire J.-J. Fournier, Satisfaire à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés à compter du 1er janvier 2020, Lexbase Social, 2020, n° 808 (N° Lexbase : N1751BYI)

 

newsid:475258

Licenciement

[Jurisprudence] L’impossible suspension judiciaire lors de la procédure d’information/consultation des représentants du personnel de la mise en œuvre d’une restructuration impliquant un PSE

Réf. : Cass. soc., 30 septembre 2020, n° 19-13.714, F-P+B+I (N° Lexbase : A41403WA)

Lecture: 15 min

N5210BYM

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par Magali Gadrat, Maître de conférences à l’Université Sorbonne Paris Nord

Le 11 Novembre 2020

Afin de rationaliser et de sécuriser les procédures de grand licenciement collectif dans les entreprises de cinquante salariés au moins imposant l’élaboration d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), la loi du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l’emploi (N° Lexbase : L0394IXU) a confié le contrôle de la régularité de la procédure d’information/consultation des représentants du personnel sur le projet de grand licenciement collectif et le PSE qui l’accompagne à l’administration du travail [1]. Ainsi, en application de l’article L. 1233-57-5 du Code du travail (N° Lexbase : L0642IX3), si les représentants du personnel estiment que l’employeur ne respecte pas les dispositions relatives à leur information/consultation dans le cadre d’un projet de licenciement collectif imposant l’établissement d’un PSE, ils doivent saisir la Direccte d’une demande tendant à ce qu’il soit enjoint à l’employeur de se conformer aux règles de procédure ou de fournir des éléments d’information relatifs à cette procédure. Les décisions rendues par l’administration dans le cadre de cette procédure d’injonction ainsi que la régularité de la procédure de licenciement collectif ne peuvent faire l’objet d’un litige distinct de celui afférent à la décision administrative d’homologation/validation du projet et du PSE qui l’accompagne en application de l’article L. 1235-7-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0653IXH). Ces principes sont rappelés par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 30 septembre 2020, dans lequel elle estime, sans surprise, que le juge judiciaire est incompétent pour ordonner en référé la suspension de la mise en œuvre d’une restructuration imposant l’élaboration du PSE tant que la procédure d’information/consultation des représentants du personnel n’est pas achevée (I.). Une telle demande relève de la compétence exclusive de la Direccte avant toute homologation/validation du projet de grand licenciement collectif et du PSE qui l’accompagne, seule à même d’enjoindre à l’employeur de respecter son obligation d’information/consultation des représentants du personnel à ce stade (II.). Cette solution, rendue dans une affaire dans laquelle le CHSCT et le comité d’entreprise étaient consultés, est transposable en présence d’un comité social et économique (CSE).

I. L’incompétence du juge judiciaire pour suspendre en référé la mise en œuvre d’une restructuration impliquant l’élaboration d’un PSE

En l’espèce, une société employant 496 salariés et comptant 31 magasins en France envisageait de procéder à une restructuration consistant à fermer 21 magasins, à licencier 227 salariés et à ne pas renouveler 35 CDD. L’employeur avait ainsi convoqué, le 10 septembre 2018, le CHSCT et le CE à deux réunions prévues le 17 septembre suivant et leur avait communiqué, à cet effet, le projet de restructuration prévoyant la fermeture de certains magasins à compter du 30 septembre 2018 et un projet d’accord collectif relatif au PSE. Estimant que l’employeur ne respectait pas le principe d’antériorité de la consultation des représentants du personnel avant toute mise en œuvre d’une restructuration destructrice d’emploi, les représentants du personnel et un syndicat saisirent le tribunal de grande instance (TGI) en référé d’une demande de suspension sous astreinte de la fermeture de magasins et de toute mise en œuvre du projet de restructuration avant que ne soit achevée la procédure d’information/consultation des instances représentatives du personnel. Le TGI, puis la cour d’appel, déclarèrent ces demandes irrecevables devant le juge judiciaire, solutions confirmées sans surprise par la Cour de cassation dans cet arrêt du 30 septembre 2020.

En effet, il résulte de l’article L. 1235-7-1 du Code du travail que le législateur de 2013 a souhaité confier au juge administratif un bloc de compétences en matière de grand licenciement collectif dans une entreprise employant au moins cinquante salariés dans la mesure où ce texte dispose que la régularité de la procédure de licenciement collectif ne peut faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à la décision de validation ou d'homologation du projet de licenciement collectif et du PSE qui l’accompagne, litige relevant de la compétence, en premier ressort, du tribunal administratif, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux.

Certes, ce texte ne visant que la régularité de la procédure de licenciement collectif et non celle d’information/consultation relative au projet de restructuration, on aurait pu penser que le juge judiciaire restait compétent pour apprécier le respect par l’employeur de la procédure d’information/consultation des représentants du personnel relative à l’opération de restructuration. Fort logiquement, la Cour de cassation juge qu’il n’en est rien à l’instar du Conseil d’Etat qui a affirmé qu’il appartient à l’administration, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, de vérifier si le comité a été mis à même d'émettre régulièrement un avis, d'une part, sur l'opération projetée et ses modalités d'application et, d'autre part, sur le projet de licenciement collectif et le plan de sauvegarde de l'emploi [2]. En effet, comme le souligne le numéro spécial de la lettre de la Chambre sociale d’octobre 2020, « l’intention du législateur était d’investir l’administration de l’ensemble du contrôle de la régularité de la procédure de consultation du comité d’entreprise lorsque celle-ci est en cours et de fermer la voie, jusque-là ouverte, de saisine du juge des référés judiciaire sur le fondement d’un trouble manifestement illicite lié à l’absence de régularité de la consultation » [3]. Dès lors, la Cour de cassation estime que le juge judiciaire ne saurait suspendre en référé la mise en œuvre d’une restructuration destructrice d’emploi jusqu’à l’achèvement de la procédure d’information/consultation des représentants du personnel.

Cette solution fait écho à celle rendue le 28 mars 2018 [4], dans laquelle la Chambre sociale de la Cour de cassation affirme qu’il résulte des articles L. 1233-57-5 (N° Lexbase : L0642IX3) et L. 1235-7-1 (N° Lexbase : L0653IXH) du Code du travail que le juge judiciaire est incompétent pour statuer en référé sur une demande de communication de pièces formulée à l'encontre de l'employeur par l'expert-comptable, désigné dans le cadre de la procédure de consultation du comité d'entreprise prévue à l'article L. 1233-30 du Code du travail (N° Lexbase : L8096LGX) en cas de grand licenciement collectif donnant lieu à l’établissement d’un PSE, solution également valable en présence d’un CSE.

La solution adoptée par la Chambre sociale de la Cour de cassation le 30 septembre dernier s’inscrit également dans la droite ligne de l’arrêt rendu le 8 juin 2020 par le Tribunal des conflits qui dénie toute compétence au juge judiciaire des référés en cas de demande  de suspension d’un projet de réorganisation donnant lieu à l’établissement d’un PSE jusqu'à ce qu'il soit mis fin au trouble manifestement illicite résultant de l'absence de mesures d'identification et de prévention des risques psychosociaux et de la souffrance au travail des salariés [5]. En effet, selon le Tribunal des conflits, dans le cadre d'une réorganisation qui donne lieu à élaboration d'un PSE, il appartient uniquement à l'autorité administrative de vérifier le respect, par l'employeur, de ses obligations en matière de prévention des risques pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. A cette fin, elle doit contrôler, tant la régularité de l'information et de la consultation des institutions représentatives du personnel que les mesures auxquelles l'employeur est tenu en application de l'article L. 4121-1 du Code du travail (N° Lexbase : L8043LGY) au titre des modalités d'application de l'opération projetée, ce contrôle n'étant pas séparable de celui mis en œuvre dans le cadre de l’examen de la demande d’homologation/validation du projet de licenciement collectif et du PSE qui l’accompagne, étant précisé qu’il n'appartient qu'à la juridiction administrative de connaître de la contestation de la décision prise par l'autorité administrative.

Ainsi, si les représentants du personnel estiment que l’employeur ne respecte pas la procédure d’information/consultation afférente au projet de restructuration et de grand licenciement collectif assorti d’un PSE, ils n’ont d’autre choix que de saisir la Direccte pour que celle-ci enjoigne à l’employeur de se conformer aux exigences légales ou conventionnelles afférentes à cette procédure. En effet, la Direccte, sous le contrôle du juge administratif, est seule compétente pour se prononcer sur l’application et le respect de stipulations conventionnelles afférentes à la procédure de grand licenciement collectif et au PSE (telles qu’un accord de méthode) [6], à l’exclusion de toute compétence au profit du juge judiciaire [7].

II. La procédure d’injonction, seule voie de recours en cours de procédure

La Cour de cassation affirme, dans cet arrêt du 30 septembre 2020, que la procédure d’injonction administrative, prévue par l’article L. 1233-57-5 du Code du travail (N° Lexbase : L0642IX3), est le seul recours offert, avant l’homologation/validation du projet de licenciement et du PSE, aux représentants du personnel qui estimeraient que l’employeur méconnaît son obligation de les informer/consulter sur le projet de restructuration donnant lieu à une compression d’effectif ou sur celui de grand licenciement collectif en résultant et sur le PSE l’accompagnant.

En l’espèce, après avoir été déboutés par le TGI en référé de leur demande de suspension de la mise en œuvre de la restructuration tant que la procédure d’information/consultation n’était pas achevée, les représentants du personnel ont saisi la Direccte, sur le fondement de ce texte, d’une demande à ce qu’elle enjoigne à l’employeur de suspendre la mise en œuvre de la restructuration et notamment les projets de fermeture imminente de magasins et qu’elle impose à l’employeur de rouvrir ceux qui avaient été fermés alors que la procédure de consultation n’était pas achevée. La Direccte a fait partiellement droit à leur demande le 26 octobre 2018. Elle a enjoint à la société notamment de suspendre sa réorganisation pendant la période déterminée de la procédure d’information/consultation, afin que l’employeur se conforme à la règle de procédure prévue en matière de PSE, mais elle a rejeté la demande relative à la remise en état de l’un des magasins fermés, au motif qu’une telle remise en état ne relevait pas de ses attributions énumérées par l’article L. 1233-57-5.

Il convient de préciser que cette affaire a donné lieu à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) : « les articles L. 1235-7-1 et L. 1233-57-5 du Code du travail […], en ce que ces dispositions ne prévoient pas le droit des représentants du personnel d'accéder de manière utile et effective à un juge afin de faire cesser le trouble illicite résultant de la mise en œuvre anticipée d'un projet de réorganisation avant l'achèvement de la procédure légale de consultation des instances représentatives du personnel dans un contexte de compression des effectifs et d'ouverture d'un plan de sauvegarde de l'emploi, portent-t-ils atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, précisément à l'article 16 de la Déclaration de 1789 et à l'alinéa 8 du préambule de la Constitution ? ».

La Cour de cassation a refusé de transmettre cette QPC au Conseil constitutionnel au motif, d’une part, qu’elle n’était pas nouvelle et, d’autre part, et surtout, qu’elle ne présentait pas un caractère sérieux « en ce qu'il ne résulte ni des dispositions législatives contestées ni d'une interprétation jurisprudentielle constante de la Cour de cassation ou du Conseil d'Etat que les représentants du personnel sont privés d'accéder de manière utile et effective à un juge, afin de faire cesser le trouble illicite résultant de la mise en œuvre anticipée d'un projet de réorganisation avant l'achèvement de la procédure légale de consultation des instances représentatives du personnel dans un contexte de compression des effectifs et d'ouverture d'un plan de sauvegarde de l'emploi » [8].

Or, il est faux de prétendre que les représentants du personnel peuvent saisir un juge pour faire cesser le trouble illicite résultant de la mise en œuvre anticipée d'un projet de restructuration avant l'achèvement de la procédure d’information/consultation, dans la mesure où ils ne peuvent ni saisir le juge judiciaire des référés comme l’affirme l’arrêt ici étudié, ni le juge administratif des référés en cours de procédure. En effet, le Conseil d’Etat décide qu’une « demande tendant à ce qu'il soit enjoint à l'employeur de communiquer des pièces à l'expert-comptable désigné dans le cadre de la procédure de consultation du comité d'entreprise en cas de licenciements collectifs pour motif économique prévue à l'article L. 1233-30 du Code du travail ne peut être adressée qu'à l'autorité administrative et ne peut faire l'objet d'un litige distinct du litige relatif à la décision de validation ou d'homologation mentionnée à l'article L. 1233-57-4 de ce Code » [9]. Le juge administratif des référés doit donc déclarer irrecevable toute demande tendant à ce que l’employeur communique à l’expert les documents qu’il sollicite et, plus largement, toute demande tendant à ce qu’il se conforme à une règle de procédure afférente à l’information/consultation des représentants du personnel avant l’homologation/validation du projet de grand licenciement collectif et du PSE qui l’accompagne. La Direccte est seule compétente pour faire droit à une telle demande dans le cadre de la procédure d’injonction, étant précisé que sa décision ne pourra pas être contestée dans le cadre d’un litige distinct de celui afférent à sa décision d’homologation/validation du projet.

De ce point de vue, si la Direccte ne fait pas droit à la demande d’injonction des représentants du personnel que l’employeur respecte son obligation d’information/consultation préalable à la mise en œuvre d’une restructuration accompagnée d’un projet de licenciement collectif impliquant l’élaboration d’un PSE ou si l’employeur ne se conforme pas à l’injonction administrative, les représentants du personnel sont dépourvus de tout recours juridictionnel avant l’achèvement de la procédure pour contester la décision administrative refusant l’injonction ou pour obtenir de l’employeur qu’il se conforme à la décision d’injonction rendue (certes, s’il ne s’y conforme pas, la Direccte n’homologuera/validera certainement pas le projet paralysant ainsi le prononcé des licenciements [10]). C’est pourquoi, les représentants du personnel estimaient, dans le pourvoi ayant donné lieu à l’arrêt du 30 septembre 2020, que le fait qu’ils ne puissent solliciter auprès du juge judiciaire des référés la suspension de la mise en œuvre de la restructuration avant l’achèvement de la procédure d’information consultation méconnaissait le droit à un recours effectif devant un juge, garanti par l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (CEDH).

La Cour de cassation ne retient pas l’argument. Elle se contente d’affirmer qu’« ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que les demandes du comité d’entreprise et du syndicat tendaient à ce qu’il soit enjoint à la société de suspendre sous astreinte la fermeture de magasins et toute mise en œuvre du projet de restructuration avant l’achèvement de la consultation des instances représentatives du personnel relative au projet de restructuration et au projet de licenciement collectif pour motif économique donnant lieu à l’établissement d’un plan de sauvegarde de l’emploi, la cour d’appel en a exactement déduit, sans méconnaître le principe du droit au recours effectif, que ces demandes ne relevaient pas de la compétence du juge judiciaire », sans démontrer le bienfondé de cette assertion.

Certes, les représentants du personnel disposent d’un recours devant la Direccte en cours de procédure par le biais de la demande d’injonction prévue par l’article L. 1233-57-5, mais ce recours n’est pas un recours juridictionnel et la décision de la Direccte ne pourra faire l’objet d’une contestation distincte de celle afférente à la décision d’homologation/validation du projet, contestation qui ne pourra avoir lieu devant le juge administratif avant que la procédure ne soit achevée…

Une saisine de la Cour européenne des droits de l’Homme sur le fondement de l’article 6 de la CEDH semble ainsi envisageable dans la mesure où, en cours de procédure, les représentants du personnel n’ont aucun recours effectif en justice (certes, ils ont le recours administratif mais le recours au juge des référés tant judiciaire qu’administratif leur est fermé) pour faire cesser la mise en œuvre d’une restructuration destructrice d’emploi au mépris de l’obligation d’information/consultation préalable des représentants du personnel…

 

[1] Loi n° 2013-504, du 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l’emploi (N° Lexbase : L0394IXU) ; C. trav., art. L. 1233-57-1 (N° Lexbase : L0638IXW) et s..

[2] CE, 22 juillet 2015, n° 385816, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A9295NM9), RDT, 2015, 514, concl. G. Dumortier ; ibid. 528, note F. Géa ; JCP éd. S, 2015, n° 1346, note J. Martinez et J.-J. Giudicelli ; RJS, 10/2015, n° 630 ; JSL, 2015, n° 395-1, obs. M.  Hautefort.

[3] Lettre de la Chambre sociale, Les compétences respectives du juge administratif et du juge judiciaire en cas de licenciement économique collectif, numéro spécial, octobre 2020.

[4] Cass. soc., 28 mars 2018, n° 15-21.372, FS-P+B (N° Lexbase : A8718XIQ), Bull. civ. V, n° 46 ; D. actu., 14 mai 2018, obs. B. Ines ; RJS, 6/2018, n° 413 ; SSL, 2018, n° 1811, p. 11, obs. F. Champeaux ; JCP éd. S, 2018, 1164, obs. A. Bugada.

[5] T. confl., 8 juin 2020, n° 4189 (N° Lexbase : A55163NM).

[6] CE, 4° et 1° ch.-r., 13 avril 2018, n° 404090, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A2007XLW), concl. F. Dieu ; SSL, n° 1818, p. 6 ; AJDA, 2018, 829 ; RDT, 2018, 452, obs. F. Géa ; V. également, Des frontières encore à préciser pour le juge du PSE, entretien avec D. Piveteau, SSL, n° 1846.

[7] Cass. soc., 25 mars 2020, n° 18-23.692, FS-P+B (N° Lexbase : A60263KE).

[8] Cass. soc., 9 octobre 2019, n° 19-13.714, FS-P+B (N° Lexbase : A0114ZRN).

[9] CE, 1° et 4° ch.-r., 25 septembre 2019, n° 428510, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A9297ZPZ), RDT, 2019, p. 785, note F. Géa.

[10] C. trav., art. L. 1233-39 (N° Lexbase : L0703IXC).

newsid:475210

Licenciement

[Brèves] Menace pesant sur la compétitivité : la faute de l’employeur peut priver les licenciements de cause réelle et sérieuse

Réf. : Cass. soc., 4 novembre 2020, n° 18-23.029, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A518733I)

Lecture: 2 min

N5198BY8

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par Charlotte Moronval

Le 10 Novembre 2020

Si la faute de l'employeur à l'origine de la menace pesant sur la compétitivité de l'entreprise rendant nécessaire sa réorganisation est de nature à priver de cause réelle et sérieuse les licenciements consécutifs à cette réorganisation, l'erreur éventuellement commise dans l'appréciation du risque inhérent à tout choix de gestion ne caractérise pas à elle seule une telle faute.

Faits. Des salariés sont licenciés pour motif économique après avoir refusé la modification de leur contrat de travail dans le cadre d’une réorganisation de l'entreprise ayant donné lieu à un PSE contenu dans un accord collectif majoritaire et validé par le Direccte mais annulé par la suite par la cour d'appel administrative, au motif que l’accord de revêtait pas le caractère majoritaire. Les salariés ont alors saisi la juridiction prud'homale pour voir juger sans cause réelle et sérieuse leur licenciement pour motif économique.

La position de la cour d’appel. Ils obtiennent gain de cause devant la cour d'appel qui, dans plusieurs arrêts, ordonne également le remboursement par l'employeur des indemnités de chômage payées aux salariés dans la limite de trois mois d'indemnités.

La solution. Enonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation casse et annule les arrêts rendus par la cour d’appel de Caen au visa de l’article L. 1233-3 du Code du travail (N° Lexbase : L1446LKR). Elle considère que la cour d'appel, par des motifs insuffisants, n'a pas caractérisé la faute de l'employeur à l'origine de la menace pesant sur la compétitivité de l'entreprise. Les arrêts sont censurés, la cour d'appel ayant seulement caractérisé la faute de l'employeur par « des décisions de mise à disposition de liquidités empêchant ou limitant les investissements nécessaires », en l'occurrence les remontées de dividendes de la société vers la holding qui permettaient d'assurer le remboursement d'un emprunt du groupe résultant d'une opération d'achat avec effet levier (LBO).

Pour la jurisprudence en la matière, lire la note explicative attachée à l’arrêt.

V. également ETUDE : Le motif économique du licenciement, La prise en compte de la faute ou de la fraude de l'employeur dans le choix du motif de licenciement, in Droit du travail, Lexbase (N° Lexbase : E9283ESM).

 

newsid:475198

Licenciement

[Brèves] Au salarié de démontrer que la rupture de son contrat de travail constitue une mesure de rétorsion à son action en justice

Réf. : Cass. soc., 4 novembre 2020, n° 19-12.367, FS-P+B+I (N° Lexbase : A518933L)

Lecture: 2 min

N5196BY4

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par Charlotte Moronval

Le 10 Novembre 2020

► Le seul fait qu'une action en justice exercée par le salarié soit contemporaine d'une mesure de licenciement ne fait pas présumer que celle-ci procède d'une atteinte à la liberté fondamentale d'agir en justice.

Faits et procédure. Des actions en justice sont engagées par deux salariés, portant sur la question de leur lieu de pause. Mis à pied à titre conservatoire puis licenciés pour faute grave au motif de la réalisation d'une collecte bilatérale interdite et dangereuse, ils décident de saisir la juridiction prud’homale en référé, soutenant que leur licenciement intervient en violation de la liberté fondamentale d’agir en justice. La cour d’appel estime qu’il n’a pas lieu à référé et rejette leurs demandes. Les salariés forment alors un pourvoi en cassation.

La solution. Enonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi. En effet, la cour d'appel a constaté :

  • que les actions en justice engagées portaient sur la question du lieu de pause, soit sur une question sans rapport avec le motif de licenciement ;
  • que la lettre de licenciement ne contenait pas de référence à ces actions en justice ;
  • que la procédure de licenciement avait été régulièrement suivie ;
  • que la lettre de notification du licenciement était motivée en ce qu'elle contenait l'exposé de faits circonstanciés dont il appartient à la seule juridiction du fond de déterminer s'ils présentent un caractère réel et sérieux notamment au regard de la pratique antérieure, des consignes et de la formation reçues et qu'enfin, pour avoir été inopiné, le contrôle terrain n'en était pas moins une pratique dans l'entreprise dont la déloyauté n'était pas en l'état manifeste s'agissant de celui subi par les deux salariés.

Il en résultait que le licenciement ne présentait pas de caractère manifestement illicite. La cour d’appel a donc, sans inverser la charge de la preuve et procédant à la recherche prétendument omise, exactement déduit l'absence d'un trouble manifestement illicite.

A retenir. Il appartient au salarié considérant que son licenciement a été motivé par son action en justice de rapporter la preuve de ce lien.

V. récemment Cass. soc., 30 septembre 2020, n° 19-10.633, F-D (N° Lexbase : A70363WI) : « lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement caractérisent une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient au salarié de démontrer que la rupture de son contrat de travail constitue une mesure de rétorsion à une action en justice introduite pour faire valoir ses droits ».

Sur le sujet, v. ETUDE : La cause réelle et sérieuse de licenciement pour motif personnel, Le motif lié à une atteinte à une liberté fondamentale, in Droit du travail, Lexbase (N° Lexbase : E5015ZN3).

 

newsid:475196

Licenciement

[Brèves] Nécessité de prouver que le salarié a relaté ou témoigné de faits susceptibles d'être constitutifs d'un délit ou d'un crime pour invoquer le statut de lanceur d’alerte

Réf. : Cass. soc., 4 novembre 2020, n° 18-15.669, FS-P+B (N° Lexbase : A9362337)

Lecture: 4 min

N5240BYQ

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par Charlotte Moronval

Le 11 Novembre 2020

Le juge ne peut, pour reconnaître à un salarié le statut de lancer d’alerte, relever que la révélation des faits d'atteinte à la liberté d'expression, dans le cadre d'échanges avec un syndicat, est intervenue par la voie de médias, d’abord par internet, lors de la diffusion d’un enregistrement puis de l'entretien entre le salarié et un journaliste, alors que le salarié avait personnellement et préalablement constaté que son employeur remettait en cause son droit à sa libre communication avec les syndicats de la société Y, au vu des propos tenus par le dirigeant de la société X lors d’un entretien informel et de la procédure disciplinaire avec mise à pied conservatoire et suivie d'un avertissement puis de son licenciement pour faute grave, sans constater que le salarié avait relaté ou témoigné de faits susceptibles d'être constitutifs d'un délit ou d'un crime.

Faits. Un salarié, engagé en qualité de consultant senior par une société X, spécialisée dans le développement de solutions logicielles et d'expertises dans le domaine de l'optimisation et des solutions d'aide à la décision, s'est vu confier une mission auprès d'un technocentre d’une société Y.

Lors d'un entretien du 16 mars 2016, l'employeur a évoqué avec le salarié avoir été averti de l'envoi par l'intéressé d'un courriel politique à des salariés de la société Y. Le 18 mars 2016, il lui a notifié une mise à pied conservatoire et l'a convoqué à un entretien préalable prévu le 25 mars suivant en vue d'un éventuel licenciement. Le 31 mars 2016, le salarié a fait l'objet d'un avertissement pour violation du guide d'information de la société Y et notamment de sa lettre de mission au technocentre. Il a été licencié le 21 avril 2016 pour faute grave, l'employeur lui reprochant un manquement à ses obligations de loyauté et de bonne foi, pour avoir procédé à l'enregistrement sonore de l'entretien informel du 16 mars 2016 à son insu et pour avoir communiqué cet enregistrement à des tiers afin d'assurer sa diffusion le 21 mars 2016 dans le cadre d'une vidéo postée sur le site internet Youtube. L'enregistrement diffusé révélait qu'au cours de l'entretien du 16 mars 2016 l'employeur avait déclaré : « donc ils surveillent, ils surveillent les mails, et à ton avis les mails de qui ils surveillent en priorité ? […] Bah les mails des syndicalistes bien évidemment […] t'es pas censé, en tant qu'intervenant chez [la société Y], discuter avec les syndicats [de la société Y]. Les syndicats de [la société Y], ils sont là pour les salariés de [la société Y] ».

Procédure. Le salarié, faisant valoir que son licenciement était intervenu en violation de la protection des lanceurs d'alerte, a sollicité devant le juge des référés la cessation du trouble manifestement illicite résultant de la nullité de son licenciement et l'octroi de provisions à valoir sur la réparation de son préjudice.

La cour d’appel (CA Versailles, 27 février 2018, n° 16/04357 N° Lexbase : A7480XER, lire N° Lexbase : N3172BXR) prononce la nullité du licenciement pour atteinte à la liberté d'expression et condamne l'employeur au paiement de diverses sommes. Elle retient que la révélation des faits d'atteinte à la liberté d'expression, dans le cadre d'échanges avec un syndicat, est intervenue par la voie de médias par internet, lors de la diffusion de l'enregistrement litigieux le 21 mars 2016, puis de l'entretien entre le salarié et un journaliste le 22 mars 2016, alors que le salarié avait personnellement et préalablement constaté que son employeur remettait en cause son droit à sa libre communication avec les syndicats de la société Y, au vu des propos tenus par le dirigeant de la société X lors de l'entretien informel du 16 mars 2016 et de la procédure disciplinaire avec mise à pied conservatoire engagée dès le 18 mars 2016 et suivie d'un avertissement puis de son licenciement pour faute grave. La cour d’appel en déduit que le salarié est recevable à invoquer le statut de lanceur d'alerte et en conclut qu'en application des articles L. 1132-3-3 (N° Lexbase : L7446LBE) et L. 1132-4 du Code du travail (N° Lexbase : L0680H93), il y a lieu de prononcer la nullité du licenciement.

L’employeur forme un pourvoi en cassation.

La solution. Enonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation casse et annule l’arrêt rendu par la cour d’appel. En statuant comme elle l’a fait, sans constater que le salarié avait relaté ou témoigné de faits susceptibles d'être constitutifs d'un délit ou d'un crime, la cour d'appel a violé l’article L. 1132-3-3 du Code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013.

Pour en savoir plus. V. ETUDE : Les dispositions relatives à la protection des salariés, La protection des salariés lanceurs d'alerte, in Droit du travail, Lexbase (N° Lexbase : E9886E9Z).

 

newsid:475240

Protection sociale complémentaire

[Brèves] Portabilité des droits garantie en cas de liquidation judiciaire

Réf. : Cass. civ. 2, 5 novembre 2020, n° 19-17.164, FS-P+B+I (N° Lexbase : A521033D)

Lecture: 3 min

N5188BYS

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par Laïla Bedja

Le 10 Novembre 2020

► L’article L. 911-8 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L0437IXH) permet aux salariés garantis collectivement de bénéficier du maintien à titre gratuit de cette couverture en cas de cessation du contrat de travail, non consécutive à une faute lourde, ouvrant droit à prise en charge par l’assurance chômage, selon des conditions qu’il détermine ; ces dispositions, à caractère d’ordre public, n’opèrent aucune distinction entre les salariés des entreprises ou associations in bonis et les salariés dont l’employeur a fait l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire et ne prévoient aucune condition relative à l’existence d’un dispositif assurant le financement du maintien des couvertures santé et prévoyance.

Les faits et procédure. Une société a souscrit, le 1er décembre 2012, un contrat collectif d’assurance complémentaire santé au bénéfice de ses salariés auprès d’une société d’assurance.

Par un jugement du 17 mai 2016, la société a été placée en liquidation judiciaire, avec désignation d’un liquidateur. Ce dernier a sollicité de l’assureur la mise en œuvre, au bénéfice des salariés licenciés, du dispositif de maintien des garanties prévu par l’article L. 911-8 du Code de la Sécurité sociale.

L’assureur soutenant que le régime de portabilité des droits ne pouvait s’appliquer en cas de liquidation judiciaire de l’adhérent, le liquidateur l’a assigné devant un tribunal de commerce.

Le pourvoi. La cour d’appel ayant ordonné à l’assureur de maintenir le contrat de complémentaire santé souscrit postérieurement au prononcé de la liquidation judiciaire et d’assurer la portabilité des droits correspondants au profit des anciens salariés, l’assureur a formé un pourvoi en cassation selon le moyen que le maintien des garanties est subordonné à l’existence d’un dispositif assurant le financement du maintien des couvertures santé et prévoyance lorsque l’entreprise souscriptrice est placée en liquidation judiciaire. En l’espèce, la cour d’appel a considéré que la loi ne subordonnait la portabilité des droits au profit des salariés licenciés qu’à l’existence et l’application d’un contrat collectif de complémentaire au jour où le licenciement du salarié est intervenu et ne crée aucune exclusion sauf en cas de faute lourde du salarié. Pour l’assureur, la cour d’appel aurait dû rechercher l’existence d’un dispositif assurant le financement du maintien de la couverture santé et prévoyance, le financement pesant sur l’employeur et les salariés, et non sur l’assureur.

Rejet. L’argument ne sera pas retenu par les Hauts-magistrats. Énonçant la solution précitée, la Haute juridiction rejette le pourvoi.

La Cour de cassation s’était prononcée sur ce point dans plusieurs avis du 6 novembre 2017 (Cass. avis, 6 novembre 2017, n° 17013 N° Lexbase : A8557WYL, , n° 17014 N° Lexbase : A8558WYM, n° 17015 N° Lexbase : A8559WYN, n° 17016 N° Lexbase : A8560WYP et n° 17017 N° Lexbase : A8561WYQ ; lire le comm. de Ch. Willmann, Liquidation judiciaire de l'employeur : maintien des garanties prévoyance et santé, mais de manière limitée, Lexbase Social, novembre 2017, n° 721 N° Lexbase : N1526BXS).

Pour en savoir plus : V. ÉTUDE : Mise en place des régimes de protection sociale complémentaire, La mise en oeuvre de la portabilité, in Droit de la protection sociale, Lexbase (N° Lexbase : E3553EU7)

L’arrêt sera prochainement commenté dans Lexbase Social.

newsid:475188

Rémunération

[Brèves] Modification du plan d’épargne entreprise : le consentement de tous les porteurs de parts n’est pas nécessaire

Réf. : Cass. soc., 4 novembre 2020, n° 18-20.210, FS-P+B (N° Lexbase : A923633H)

Lecture: 3 min

N5245BYW

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par Charlotte Moronval

Le 10 Novembre 2020

La modification du plan d’épargne entreprise réalisée conformément aux règles applicables selon qu'il s'agit d'une décision unilatérale ou d'un accord collectif, s'impose à tous les porteurs de parts, sans qu'il soit besoin de recueillir leur consentement, quelle que soit la date des versements effectués sur leur compte au plan épargne entreprise.

Faits. Un salarié a été engagé en qualité d'assistant principal, chef de mission, par une société d'expertise comptable X, aux droits de laquelle vient la société Y. Après avoir acquis le statut d'associé du groupe Y, tout en conservant sa qualité de salarié, il est devenu, en 2007, directeur de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et membre du comité Régions regroupant les dirigeants de région. La société Y a mis en place, par décision unilatérale du 1er septembre1996, un plan d'épargne d'entreprise offrant aux salariés la faculté d'investir des fonds dans différents FCPE, dont des FCPE dédiés leur permettant d'acquérir indirectement des actions ou obligations Y et prévoyant que ceux qui quittent l'entreprise, à l'exception des retraités et préretraités, ne peuvent plus alimenter leur compte au plan d'épargne entreprise mais peuvent néanmoins, après leur départ, conserver sur leur compte les sommes placées. Le salarié a fait le choix d'acquérir des actions. Par un avenant du 16 octobre 2007, adopté après avis du comité d'entreprise, la société Y a apporté différentes modifications au plan initial, en y ajoutant notamment une clause prévoyant le transfert automatique de l'épargne investie en titres de l'entreprise que le salarié quitte, en parts du FCPE Multi-entreprises à orientation monétaire « Natixis Avenir 6 Sécurité ». L'article 15 du règlement du FCPE du 7 septembre 2010 précisait ainsi que les porteurs de parts ayant quitté l'entreprise étaient avertis de la disponibilité de leurs parts et que leurs parts seraient transférées, à l'expiration d'un délai d'un an à compter de la date de disponibilité des droits dont ils étaient titulaires, vers le fonds commun de placement monétaire.

Après avoir été licencié le 10 septembre 2012, le salarié a été averti, par lettre du 24 avril 2013, qu'en raison de son départ de l'entreprise, il était procédé, aux termes d'une demande formulée auprès de Natixis Interépargne, au transfert automatique, en date du jour même, de ses parts du FCPE. Reprochant notamment à son ancien employeur d'avoir ainsi réaffecté, sans qu'il en fût informé, son épargne du fonds commun de placement initial vers le fonds commun de placement à orientation monétaire « Natixis

Avenir 6 Sécurité », il a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir, à titre principal, la nullité de ce transfert et la réaffectation de son épargne.

Procédure. La cour d’appel (CA Aix-en-Provence, 25 mai 2018, n° 16/11846 N° Lexbase : A3026XTA) déboute le salarié de sa demande en nullité du FCPE et du transfert automatique de ses parts effectué le 24 avril 2013 ainsi que de sa demande en paiement des dividendes qui lui étaient dus annuellement depuis son licenciement. Il forme alors un pourvoi en cassation.

La solution. Rappelant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi sur ce point.

Pour en savoir plus. V. ETUDE : Les dispositifs d’épargne salariale, La modification du mode de placement, in Droit du travail, Lexbase (N° Lexbase : E1156ETY).

 

newsid:475245

Représentation du personnel

[Brèves] De la possibilité de désigner comme représentant de la section syndicale le salarié qui exerçait cette fonction au moment des élections professionnelles

Réf. : Cass. soc., 4 novembre 2020, n° 19-13.151, FS-P+B (N° Lexbase : A932633S)

Lecture: 2 min

N5255BYB

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par Charlotte Moronval

Le 10 Novembre 2020

Les dispositions de l'article L. 2142-1-1 du Code du travail (N° Lexbase : L6225ISD), qui interdisent de désigner immédiatement après l'organisation des élections professionnelles en qualité de représentant de section syndicale le salarié qui exerçait cette même fonction au moment des élections, ne sont pas opposables au syndicat dès lors que la nouvelle désignation intervient à la suite des élections professionnelles organisées en exécution d'un jugement ayant procédé à l'annulation des élections professionnelles à l'issue desquelles le salarié avait précédemment été désigné en qualité de représentant de section syndicale.

Faits. Les 6 et 20 juin 2018, se sont tenues les élections des représentants du personnel au comité social et économique au sein d’une société. Le 12 juin 2018, un syndicat a procédé à la désignation de M. X en qualité de représentant de la section syndicale de la société au titre de la CFE-CGC. Par jugement du 14 septembre 2018, le tribunal d’instance a annulé le premier et le second tour des élections au sein de la société pour l'ensemble des trois collèges, et a ordonné à la société d'engager un nouveau processus électoral. Le premier et unique tour des élections des représentants du personnel au comité social et économique de l'entreprise a eu lieu le 5 novembre 2018 et le syndicat a procédé à la désignation du même salarié en qualité de représentant de la section syndicale au sein de l'entreprise.

Procédure. La société a décidé de saisir le tribunal d'instance pour contester cette désignation. Sa demande est rejetée. Elle forme alors un pourvoi en cassation.

La solution. Enonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi.

newsid:475255

Représentation du personnel

[Brèves] Absence de préjudice nécessaire lorsque l’employeur n’organise pas d’élections partielles

Réf. : Cass. soc., 4 novembre 2020, n° 19-12.775, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A518833K)

Lecture: 2 min

N5182BYL

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par Charlotte Moronval

Le 11 Novembre 2020

► Il appartient au salarié de démontrer l’existence d’un préjudice lorsque, l’institution représentative du personnel ayant été mise en place, des élections partielles doivent être organisées du fait de la réduction du nombre des membres élus de l’institution représentative du personnel, les salariés n’étant pas, dans cette situation, privés d’une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts.

Faits et procédure. Une cour d’appel déboute un salarié de sa demande de dommages-intérêts pour refus de mise en place des élections des délégués du personnel.

Le salarié forme un pourvoi en cassation.

La solution. Enonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi.

Rappel de la jurisprudence antérieure. La Cour a jugé (Cass. soc., 17 mai 2011, n° 10-12.852, FS-P+B N° Lexbase : A2562HSP ; Cass. soc., 17 octobre 2018, n° 17-14.392, FS-P+B N° Lexbase : A9890YGE ; Cass. soc., 8 janvier 2020, n° 18-20.591, F-D N° Lexbase : A46443AA), qu’il résulte de l’application combinée de l’alinéa 8 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (N° Lexbase : L6821BH4), de l’article 27 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, des articles L. 2323-1 (N° Lexbase : L5638KGW) et L. 2324-5 (N° Lexbase : L2973H9Y) du Code du travail, 1382 du Code civil (N° Lexbase : L1018KZQ) et de l’article 8, § 1, de la Directive 2002/14/CE du 11 mars 2002 (N° Lexbase : L7543A8U), que l’employeur qui, bien qu’il y soit légalement tenu, n’accomplit pas les diligences nécessaires à la mise en place d’institutions représentatives du personnel, sans qu’un procès-verbal de carence ait été établi, commet une faute qui cause nécessairement un préjudice aux salariés, privés ainsi d’une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts.

→ En l’espèce, il résulte de l’arrêt de la cour d’appel et des productions, d’une part, qu’à la suite des élections des délégués du personnel ayant eu lieu en avril 2013, les deux élus délégués du personnel titulaires ont quitté l’entreprise respectivement en novembre 2013 et avril 2014 et l’un des deux suppléants a également quitté l’entreprise en avril 2014, ce dont il résultait qu’un délégué du personnel était toujours présent et, d’autre part, que dès que le salarié avait demandé l’organisation d’élections partielles, l’employeur y avait procédé.

newsid:475182

Salariés protégés

[Brèves] Rupture conventionnelle de maires et d'adjoints au maire d’une commune d’au moins 10 000 habitants : nécessité d’une autorisation préalable de l'inspecteur du travail

Réf. : Cass. soc., 4 novembre 2020, n° 19-11.865, F-P+B (N° Lexbase : A928933G)

Lecture: 3 min

N5235BYK

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par Laïla Bedja

Le 11 Novembre 2020

► Doit être autorisée préalablement par l'inspecteur du travail, la rupture conventionnelle des maires et adjoints au maire des communes de 10 000 habitants au moins qui n'ont pas cessé leur activité professionnelle.

Les faits et procédure. Un salarié a été engagé par une société le 6 janvier 2014. Ce salarié a informé son employeur, le 13 décembre 2014, de son élection aux fonctions d'adjoint délégué au sport de la commune de Bouguenais le 20 novembre précédent. Par la suite, une convention de rupture conventionnelle a été signée par les parties le 10 décembre 2015 et homologuée tacitement par la Direccte et le contrat de travail a pris fin le 26 janvier 2016.

Le salarié a saisi la juridiction prud’homale d’une demande en annulation de la rupture conventionnelle pour absence d’autorisation de la Direccte malgré son statut de salarié protégé et obtenir le règlement de dommages-intérêts pour licenciement nul, de salaire pendant la période de protection et d'indemnité de préavis. La cour d’appel (CA Rennes, 7 décembre 2018, n° 17/05259 N° Lexbase : A4336YPB) accède à sa demande et dit la rupture conventionnelle nulle et condamne ainsi l’employeur au paiement de dommages-intérêts pour licenciement nul et à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de deux mois d'indemnités.

Le pourvoi. Contestant la décision de la cour d’appel, l’employeur forme un pourvoi en cassation, arguant notamment que l'adjoint au maire d'une commune d'au moins 10 000 habitants bénéficiant du statut de salarié protégé au titre de l'article L. 2123-9 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L2941I8G) ne compte pas au nombre des bénéficiaires mentionnés aux articles L. 2411-1 (N° Lexbase : L8528LGX) et L. 2411-2 (N° Lexbase : L8527LGW) du Code du travail. En vain.

Rejet. Énonçant la solution précitée, la Haute juridiction rejette le pourvoi de l’employeur sur ce moyen. En effet, aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 2123-9 du Code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-366 du 31 mars 2015 (N° Lexbase : L2830I8C), lorsqu'ils n'ont pas cessé d'exercer leur activité professionnelle, les élus mentionnés au premier alinéa du même article, soit les maires et les adjoints au maire des communes de 10 000 habitants au moins, sont considérés comme des salariés protégés au sens du livre IV de la deuxième partie du Code du travail. La cour d’appel avait donc pu décider que la rupture conventionnelle d’un adjoint au maire d’une commune de 10 000 habitants au moins devait être autorisée par l’inspecteur du travail. En l’espèce, le salarié ayant informé l’employeur de son mandat, et l’autorisation n’ayant pas été demandé, la cour d’appel en a exactement déduit que cette rupture conventionnelle était nulle et produisait les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur du salarié.

newsid:475235

Salariés protégés

[Brèves] Protection d’une durée de six mois appliquée au délégué du personnel d’une entreprise de moins de cinquante salarié désigné délégué syndical

Réf. : Cass. soc., 4 novembre 2020, n° 19-12.279, F-P+B (N° Lexbase : A9391339)

Lecture: 3 min

N5239BYP

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par Laïla Bedja

Le 10 Novembre 2020

► Dans les entreprises de moins de cinquante salariés, seul un délégué du personnel peut être désigné délégué syndical pour le terme de son mandat de délégué du personnel ; la protection supplémentaire est celle de six mois attachée à sa qualité de délégué du personnel et non celle d'un an attachée à la qualité de délégué syndical s'il a exercé plus d'un an.

Faits et procédure. Un salarié a sollicité l'organisation d'élections pour la désignation de délégués du personnel au sein de la société Galloo Littoral (la société), celle-ci comportant moins de cinquante salariés et a été élu délégué du personnel titulaire le 24 juin 2011 et désigné, le 22 juillet 2011, en qualité de délégué syndical pour le collège cadres-agents de maîtrise.

Le 25 octobre 2011, il a été désigné en qualité de délégué syndical au sein de l'unité économique et sociale constituée des différentes sociétés du groupe. Cette désignation a été contestée par les sociétés du groupe Galloo Littoral devant le tribunal d'instance, lequel, par jugement du 16 août 2012, a fait droit à leur demande.

Le 28 octobre 2013, le salarié a démissionné de ses mandats de délégué du personnel et délégué syndical, à effet au 1er janvier 2014. Le 15 juillet 2014, le salarié a été convoqué à un entretien préalable fixé au 24 juillet 2014. Après autorisation administrative de licenciement accordée le 29 septembre 2014, le salarié s'est vu notifier son licenciement pour motif économique le 6 octobre 2014. Par décision du 3 avril 2015, le ministre du Travail a annulé l'autorisation de licenciement, considérant que l'inspection du travail n'était pas compétente pour statuer sur la demande d'autorisation, dans la mesure où le mandat de délégué syndical détenu par le salarié avait nécessairement pris fin au terme de son mandat de délégué du personnel et que la protection s'y rattachant avait expiré à l'issue du délai de six mois suivant la cessation des mandats, soit avant que ne soit engagée la procédure de licenciement. Cette décision n'a donné lieu à aucun recours.
Le 31 juillet 2015, le salarié a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir la condamnation de son ancien employeur au paiement de diverses sommes.

La cour d’appel (CA Douai, 21 décembre 2018, n° 16/04482 N° Lexbase : A7894YRS) ayant rejeté sa demande en nullité du licenciement et donc les demandes de sommes afférentes, le salarié a formé un pourvoi en cassation. En vain.

Rejet. Énonçant la solution précitée, la Haute juridiction rejette le pourvoi.

newsid:475239

Social général

[Panorama] Panorama des arrêts inédits rendus par la Cour de cassation - Semaine du 2 au 6 novembre 2020

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N5261BYI

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par Asima Khan et Charlotte Moronval

Le 10 Novembre 2020

Retrouvez, chaque semaine, une sélection des arrêts inédits de la Cour de cassation, réalisée par Christophe Radé, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux et Directeur scientifique de Lexbase Social.

I - Discrimination et harcèlement

  • Harcèlement moral/tâches confiés au salarié dépassant ses capacités physiques/mise en péril de l’état de santé du salarié

- Cass. soc., 4 novembre 2020, n° 19-11.626, F-D (N° Lexbase : A933933B) : en retenant que la société avait confié au salarié de manière habituelle, au mépris des prescriptions du médecin du travail, des tâches dépassant ses capacités physiques eu égard à son état de santé et mis ainsi en péril l'état de santé de son salarié, la cour d'appel a fait ressortir l'existence d'éléments laissant supposer un harcèlement moral et l'absence de preuve par l'employeur d'éléments objectifs étrangers à tout harcèlement (rejet, CA Rennes, 14 décembre 2018, n° 16/05449 N° Lexbase : A5785YQC ; sur L’objet ou les effets des actes de harcèlement moral, cf. l’Ouvrage « Droit du travail » N° Lexbase : E6453YUK).

II - Négociation collective

  • Convention collective/contentieux/irrecevabilité de l’action/clause instituant une procédure de conciliation obligatoire/fin de non-recevoir

- Cass. soc., 4 novembre 2020, n° 19-13.922, F-D (N° Lexbase : A9389337) : il résulte des articles 122 (N° Lexbase : L1414H47) et 124 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1417H4A) que les fins de non-recevoir ne sont pas limitativement énumérées. Licite, la clause d'une convention collective instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont la mise en œuvre suspend jusqu'à son issue le cours de la prescription, constitue une fin de non-recevoir qui s'impose au juge si les parties l'invoquent. En conséquence, la cour d’appel, devant laquelle la société soulevait une fin de non-recevoir tirée de l'absence de saisine, préalable à l'action, de la commission nationale mixte, prévue à l'article 2 de la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959, prévoyant que « la commission est obligatoirement saisie des différends collectifs qui peuvent naître à l'occasion de l'interprétation ou de l'application de la présente convention et de ses annexes, lorsque ces différends n'ont pu être résolus dans le cadre de l'entreprise » et qui a relevé que les syndicats lui soumettaient un différend collectif né à l'occasion de l'interprétation ou de l'application de cette convention collective, étendue par arrêté du 10 janvier 1964, en a exactement déduit l'irrecevabilité de leur action (rejet, CA Paris, Pôle 6, 2ème ch., 17 janvier 2019, n° 18/00327 N° Lexbase : A4019YTZ).

III - Représentation du personnel

  • Consultation du comité d’entreprise/examen annuel de la situation économique et financière/possibilité pour le comité d’établissement de recourir à un expert-comptable

- Cass. soc., 4 novembre 2020, n° 19-11.738, F-D (N° Lexbase : A929233K) : en application des articles L. 2323-12 (N° Lexbase : L5589KG4), L. 2325-35 (N° Lexbase : L7214K93) et L. 2325-36 du Code du travail (N° Lexbase : L9859H8N), alors applicables, le droit du comité central d'entreprise d'être assisté pour l'examen annuel de la situation économique et financière de l'entreprise ne prive pas le comité d'établissement du droit d'être assisté par un expert-comptable afin de lui permettre de connaître la situation économique, sociale et financière de l'établissement dans l'ensemble de l'entreprise et par rapport aux autres établissements avec lesquels il doit pouvoir se comparer (cassation, CA Aix-en-Provence, 6 décembre 2018, n° 17/17216 N° Lexbase : A6012YPD ; sur La consultation annuelle sur la situation économique et financière de l'entreprise, cf. l’Ouvrage « Droit du travail » N° Lexbase : E0821E9B).

  • Action en justice du comité d’entreprise/irrecevabilité/contestation du transfert d’un contrat de travail/droit exclusivement attaché à la personne du salarié

- Cass. soc., 4 novembre 2020, n° 19-10.626, F-D (N° Lexbase : A926433I) : le comité d'entreprise ne tient d'aucune disposition légale le pouvoir d'exercer une action en justice au nom des salariés ou de se joindre à l'action de ces derniers, lorsque ses intérêts propres ne sont pas en cause. S’il peut avoir un intérêt propre à faire valoir que la violation de l’article L. 1224-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0840H9Y) porte atteinte à son fonctionnement et ses ressources, de sorte que son intervention au côté du salarié à l'occasion d'un litige portant sur l'applicabilité de ce texte serait recevable, l'action en contestation du transfert d'un contrat de travail est un droit exclusivement attaché à la personne du salarié (rejet, CA Versailles, 15 novembre 2018, n° 17/00244 N° Lexbase : A3320YLK).

IV - Rupture du contrat de travail

  • Licenciement pour motif économique/obligation d’établissement d’un PSE/refus de modification d’un élément essentiel du contrat de travail

- Cass. soc., 4 novembre 2020, n° 18-23.103, FS-D (N° Lexbase : A935933Z) : dès lors que la cour d'appel a constaté que les dix salariés concernés par le projet de réorganisation, dont elle a fait ressortir qu'il avait été mené à son terme sans modification, avaient tous refusé la modification de leur contrat de travail selon le procès-verbal de réunion de la délégation unique du personnel du 29 octobre 2013 et que si le procès-verbal de réunion extraordinaire de la même délégation du 13 novembre 2013 mentionnait que seuls neuf salariés avaient refusé la proposition de mutation qui leur avait été faite, l'employeur ne justifiait ni des conditions, ni de la date de modification du contrat de travail du dixième salarié, à savoir antérieurement ou postérieurement à l'engagement de la procédure de licenciement économique, elle a pu en déduire que l'employeur était tenu de mettre en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi (rejet, CA Agen, 24 avril 2018, n° 16/01265 N° Lexbase : A9631XLB ; voir aussi Cass. soc., 7 juillet 2009, n° 08-70.071, F-D N° Lexbase : A7578EII ; sur L'obligation d'élaborer un plan de sauvegarde de l'emploi, cf. l’Ouvrage « Droit du travail » N° Lexbase : E9317ESU)

newsid:475261

Protection sociale

[Brèves] Proche aidant : modalités de prise en compte des revenus associés pour la détermination du RSA et de la prime d’activité

Réf. : Décret n° 2020-1343 du 4 novembre 2020, relatif aux modalités de prise en compte du dédommagement perçu par les aidants familiaux, de la prestation de compensation et de l'allocation journalière du proche aidant dans le calcul du revenu de solidarité active et de la prime d'activité (N° Lexbase : L6049LYP)

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N5194BYZ

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par Laïla Bedja

Le 09 Novembre 2020

► Un décret du 4 novembre 2020, publié au Journal officiel du 5 novembre 2020, précise les modalités de prise en compte du dédommagement perçus par les aidants familiaux, de la prestation de compensation et de l’allocation journalière du proche aidant dans le calcul du revenu de solidarité active et de la prime d’activité.

RSA. En principe, pour la détermination du RSA, les ressources prises en compte comprennent l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient et de toutes les personnes composant le foyer. Des exceptions sont prévues par l’article R. 262-11 du Code de l’action sociale et des familles (N° Lexbase : L6228LYC).

Le décret modifie cet article et ajoute les trois exceptions suivantes :

  • les sommes perçues au titre du dédommagement par l’aidant familial ;
  • l’allocation journalière du proche aidant ;
  • la prestation de compensation pour l'ensemble des éléments visés à l'article L. 245-3.

Prime d’activité. Concernant la prime d’activité, les exclusions de ressources prises en compte pour son calcul sont prévues à l’article R. 844-5 du Code de la Sécurité sociale ([LXB=]). Le décret modifie le texte et ajoute :

  • les sommes perçues au titre du dédommagement par l'aidant familial ;
  • l’allocation journalière du proche aidant.

Ces nouvelles dispositions entrent en vigueur à compter du 6 novembre 2020.

newsid:475194

Travail illégal

[Brèves] Saga de l’EPR de Flamanville : la Cour de cassation fournit des réponses en matière de certificat A1 et de solidarité financière

Réf. : Cass. soc., 4 novembre 2020, n° 18-24.451, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A519033M)

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N5181BYK

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par Laïla Bedja

Le 11 Novembre 2020

Sur le conflit de lois en matière de Sécurité sociale :

Les obligations de déclaration aux organismes de Sécurité sociale prévues aux articles L. 8221-3 (N° Lexbase : L0323LMW) et L. 8221-5 (N° Lexbase : L7404K94) du Code du travail, qui, respectivement, définissent le travail dissimulé par dissimulation d’activité et le travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié, ne s’appliquent que dans la mesure où l’activité ou l’emploi salarié relève du régime français de Sécurité sociale ;

À la lumière des interprétations de la Cour de justice de l’Union européenne reprenant les principes de coopération loyale et de confiance mutuelle, et des termes des dispositions de droit de l’Union européenne (Règlements n° 1401/71 N° Lexbase : L4570DLT, art. 13 et 14, n° 574/72 N° Lexbase : L7131AUN, art. 11 § 1 et 12 bis, n° 987/2009 N° Lexbase : L8946IE3, art. 19 § 2), la caractérisation de situations de détachement ou d’exercice d’une activité salariée dans deux ou plusieurs États membres au sens des règlements de coordination ressort uniquement à la compétence soit de l’institution compétente de l’État membre dans lequel l’employeur exerce normalement son activité, dans le cas où une situation de détachement est alléguée, soit, dans le second cas, de l’institution désignée par l’autorité compétente de l’État membre de résidence ;

Dès lors, en l’absence de certificat E101/A1 résultant d’un refus de délivrance ou d’un retrait par l’institution compétente, seule trouve à s’appliquer la législation de l’État membre où est exercée l’activité salariée ;

Sur les conditions d’engagement de la solidarité financière du donneur d’ordre et son étendue :

Les articles L. 8222-2, 3° (N° Lexbase : L3605H9E), et L. 8222-5, alinéas 1 et 2 (N° Lexbase : L7791I3X), du Code du travail, peuvent être interprétés en ce sens qu’il appartient à l’entreprise utilisatrice, informée de l’intervention de salariés, employés par une entreprise de travail temporaire, en situation irrégulière au regard des formalités mentionnées aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 de ce code, d’enjoindre aussitôt à celle-ci de faire cesser sans délai cette situation et que, à défaut, elle est tenue solidairement avec l’entreprise de travail temporaire au paiement des indemnités pour travail dissimulé ;

Concernant l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, l’article L. 8222-2, 3°, du Code du travail, mentionne les rémunérations, les indemnités et les charges dues par celui qui a fait l’objet d’un procès-verbal pour délit de travail dissimulé ; cet article et l’article L. 8222-5 du code précité figurent dans le chapitre de ce code intitulé « Obligations et solidarité financière des donneurs d’ordre et des maîtres d’ouvrage » qui instaure, par les dispositions qu’il prévoit, au bénéfice du Trésor, des organismes de sécurité sociale et des salariés, une garantie de l’ensemble des créances dues par l’employeur qui exerce un travail dissimulé à la charge des personnes qui recourent aux services de celui-ci afin de prémunir ces créanciers du risque d’insolvabilité du débiteur principal ; il résulte de l’objet et de l’économie de ces dispositions que ce mécanisme de garantie est applicable aux créances indemnitaires pour travail dissimulé des salariés employés par des entreprises de travail temporaire.

Faits et procédure. Plusieurs salariés, de nationalité polonaise et domiciliés en Pologne, ont été mis à disposition d’une société de droit français spécialisée dans les travaux publics, par une entreprise de travail temporaire chypriote, pour exercer une activité salariée sur un chantier de construction d’un réacteur nucléaire sur le site de Flamanville. L’institution compétente de l’État chypriote, sur le territoire duquel est situé le siège de l’employeur, a retiré les certificats E101 et A1 qu’elle avait précédemment délivrés pour les salariés.

Le pourvoi. Le pourvoi, formé par l’entreprise utilisatrice, critiquait l’arrêt de la cour d’appel en ce que celle-ci, d’une part a jugé que l’entreprise de travail temporaire avait exercé un travail dissimulé et a condamné cette dernière au paiement d’une indemnité forfaitaire à ce titre, et d’autre part a déclaré engagée la solidarité financière de l’entreprise utilisatrice au titre de ce travail dissimulé sur le fondement de l’article L. 8222-5 du Code du travail.

Deux moyens étaient analysés par la Cour de cassation.

Rejets (double). Le premier porte sur le conflit de lois en matière de Sécurité sociale auquel la Cour de cassation répond par la solution précitée, le rejetant.

Le second porte sur les conditions d’engagement de la solidarité financière du donneur d’ordre et son étendue. L’entreprise française soutenait que l’article L. 8222-5 du Code du travail ne couvre pas l’intervention d’une entreprise de travail temporaire en situation irrégulière et que la solidarité financière qu’il prévoit ne porte pas sur l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

Énonçant la solution précitée, la Haute juridiction rejette le pourvoi.

newsid:475181

Travail illégal

[Brèves] Audition pour travail dissimulé : nécessité d’obtenir le consentement préalable des personnes entendues

Réf. : Cass. civ. 1, 4 novembre 2020, n° 19-20.772, FS-P+B (N° Lexbase : A936533A)

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N5234BYI

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par Charlotte Moronval

Le 10 Novembre 2020

Les officiers et agents de police judiciaire peuvent entendre toute personne susceptible de fournir des informations utiles à l'accomplissement de leur mission de lutte contre le travail illégal et demander aux employeurs, aux travailleurs indépendants, aux personnes employées dans l'entreprise ou sur le lieu de travail ainsi qu'à toute personne dont ils recueillent les déclarations dans l'exercice de leur mission, de justifier de leur identité et de leur adresse, qu’à la condition de recueillir le consentement préalable des intéressés à être entendus.

Faits. Des fonctionnaires de police effectuent un contrôle de travail dissimulé sur un chantier de construction d'une maison individuelle et procède au contrôle d'identité de M. X, de nationalité albanaise. Celui-ci, en situation irrégulière sur le territoire national, est placé en rétention administrative.

Procédure. Le premier président de la cour d’appel de Nîmes décide, par ordonnance, de prolonger cette mesure, relevant que le contrôle de l'identité de M. X est intervenu sur le fondement de l'article L. 8271-6-1 du Code du travail (N° Lexbase : L5006K8W).

M. X forme un pourvoi en cassation.

La solution. Enonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation casse et annule l’arrêt rendu par la cour d’appel. En statuant comme elle l’a fait, sans constater que M. X avait préalablement consenti à son audition, le premier président a violé les articles L. 8211-1 (N° Lexbase : L9238K4W) et L. 8271-6-1 du Code du travail.

newsid:475234

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