La lettre juridique n°834 du 3 septembre 2020

La lettre juridique - Édition n°834

Terrorisme

[Brèves] Procès « Charlie Hebdo » : ce qu’il faut retenir

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N4403BYQ

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par Marie Le Guerroué et Adélaïde Léon

Le 03 Septembre 2020


Mots-clefs : attentats • janvier 2015 • terrorisme • cour d'assises spéciale • enregistrement des audiences • archives de la justice

Le procès historique des attentats de janvier 2015 s’est ouvert ce mercredi 2 septembre et devrait se tenir jusqu’au 10 novembre 2020. La nature et l’ampleur des faits, les enjeux juridiques et le dispositif mis en place autour de ces audiences sont autant de points inédits sur lesquels il est important de revenir alors que la cour d’assises spéciale s’apprête à juger ces évènements douloureux qui ont durablement marqué la France.


 

Quels sont les faits jugés ?

Les faits qui seront jugés depuis le mercredi 2 septembre sont ceux qui se sont déroulés les 7, 8 et 9 janvier 2015 respectivement dans les locaux du journal Charlie Hebdo (Paris), à Montrouge (Haut de Seine), Villers-Cotterêts (Aisne), Dammartin-en-Goël (Seine-et-Marne), Montagny-Saint-Félicité (Oise) et à l’Hypercacher de la porte de Vincennes (Paris) et au cours desquels dix-sept personnes ont été tuées et vingt autres blessées.

Le 7 janvier 2015, deux individus se rendent au 10, rue Nicolas Appart à Paris, dans l’immeuble abritant la rédaction de Charlie Hebdo et tuent dix personnes. Ils quittent ensuite les lieux en voiture. Quelques minutes plus tard, au cours d’une fusillade avec les forces de l’ordre rue Richard Lenoir, ils tuent un policier. Après une collision avec une autre voiture place du Colonel Fabien, ils braquent un automobiliste et lui vole son véhicule.

Le 8 janvier 2015, un homme abat une policière municipale à Montrouge et blesse un chef d’équipe voirie-propreté. Le même jour, deux individus, identifiés comme les auteurs des attaques du 7 janvier, commettent un vol à main armée à la station-service AVIA de Villers-Cotterêts (Aisne).

Le 9 janvier 2015, les auteurs présumés des tirs au sein de la rédaction de Charlie Hebdo volent, à nouveau sous la menace d’une arme, un véhicule à Montagny-Saint-Félicité (Oise). Ils se rendent ensuite dans une imprimerie à Dammartin-en-Goële (Seine-et-Marne) et prennent en otage son gérant. Ils seront ensuite localisés par les forces de l’ordre et abattus par ces dernières après avoir ouvert le feu.

Le même jour, l’auteur présumé du meurtre de Montrouge pénètre dans le magasin Hypercacher de la porte de Vincennes à Paris, tue quatre personnes et en prend dix-sept autres en otage. Il sera abattu par les forces spéciales quelques heures plus tard.

Qui sont les prévenus ?

Les quatorze personnes renvoyées devant la cour d’assises de Paris sont soupçonnées d’avoir contribué, à des degrés divers, à la logistique des attaques perpétrées les 7, 8 et 9 janvier 2015.

Onze prévenus, dix placés en détention provisoire et un sous contrôle judiciaire, devraient comparaître lors de ce procès. Les trois derniers, visés par un mandat d’arrêt, seront quant à eux jugés par défaut. Leur mort, évoquée à de nombreuses reprises n’a toutefois jamais été confirmée.

Quels sont les chefs d’accusation retenus à l’encontre des prévenus et les peines encourues ?

Deux des accusés, l’un en détention provisoire et l’autre visé par un mandat d’arrêt, sont notamment renvoyés pour complicité de crimes terroristes. Ils encourent tous deux la réclusion criminelle à perpétuité (C. pén., art. 421-1 et s. N° Lexbase : L8959K8C).

Les autres détenus ont, pour la grande majorité, été renvoyés pour « participation à une association de malfaiteur terroriste criminelle » et encourent de ce fait une peine de vingt ans de réclusion criminelle (C. pén., art. 421-6 N° Lexbase : L4481K9T).

Le seul prévenu à comparaître libre à quant à lui été renvoyé pour « participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation de crimes de droit commun sans caractère terroriste » (C. pén., art. 450-1 N° Lexbase : L1964AMP). La qualification terroriste n’a en effet pas été retenue à son encontre. Il encourt une peine de dix ans de prison.

Devant quelle formation ce procès se tiendra-t-il ?

Les faits ci-dessus exposés seront jugés par la cour d’assises spéciale de Paris laquelle est compétente en matière de terrorisme (C. proc. pén., art. 706-25 N° Lexbase : L7566LPW) mais également de trafic de stupéfiants (C. proc. pén., art. 706-27 et s. N° Lexbase : L4109AZ9), de trahison, d’espionnage et d’atteinte à la défense nationale (C. proc. pén., art. 702 N° Lexbase : L0574LTG), de prolifération d’armes de destruction massive (C. proc. pén., art. 706-167 et s. N° Lexbase : L7445IPG) et de certains crimes de droit commun commis par des militaires impliquant un risque de divulgation d’un secret de la défense nationale (C. proc. pén., art. 698-7 N° Lexbase : L4071AZS).

Contrairement aux cours d’assises « classiques », elle a la particularité de n’être composée que de magistrats professionnels. Aucun jury n’intervient donc dans le cadre du procès.

En réaction à la recrudescence d’affaires criminelles en matière de terrorisme, le nombre de magistrats composant cette cour a été réduit pas la loi n° 2017-258 du 28 février 2017, relative à la sécurité publique (N° Lexbase : L0527LDU). En modifiant l’article 698-6 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7524LPD), ce texte a réduit le nombre d’assesseurs de six à quatre en première instance et de huit à six en appel.

Aujourd’hui, la cour d’assises spéciale est donc composée d’un président et de quatre ou huit assesseurs selon si elle statue en première instance ou en appel. Ce procès sera présidé par Régis de Jorna, premier président de chambre à la cour d’appel de Paris.

Le ministère public sera quant à lui représenté par les avocats généraux Jean-Michel Bourles, procureur de la République antiterroriste adjoint ainsi que Julie Holveck, vice-procureur de la République antiterroriste.

Pourquoi s’agit-il d’un procès hors normes ? 

Contrairement au procès des attentats du Bataclan qui se déroulera en janvier prochain au Palais de justice de Paris sur l’île de la Cité (une structure spécifique dédiée est actuellement en construction dans la salle des pas perdus), le procès des attentats de Charlie Hebdo se déroule dans le nouveau tribunal judiciaire de Paris, porte de Clichy.  

Au-delà du caractère spécial de la formation qui aura à juger ces faits, il s’agit d’un procès hors normes à plusieurs titres. D’abord, en raison de sa durée. Le procès se déroulera, en effet, sur une période de 50 jours, du 2 septembre au 10 novembre 2020. Ensuite, en raison du nombre de ses protagonistes : 14 accusés, 94 avocats, 200 parties civiles, 144 témoins et 14 experts. 

Le contexte sanitaire ajoute aussi des difficultés pratiques. Toutes les personnes présentes devront porter un masque.  

Ce procès revêt également une dimension historique puisqu’il concerne des attaques qui ont durablement marquées les français et qui ont été parmi les premières d’une série d'actions terroristes dirigées contre la France durant cette même année 2015.

Pourquoi le procès est-il filmé ? 

En principe, depuis la loi de 1881 sur la liberté de la presse (N° Lexbase : L7589AIW), il est interdit de filmer ou d’enregistrer les audiences. La loi n° 85-699 du 11 juillet 1985 tendant à la constitution d'archives audiovisuelles de la Justice (N° Lexbase : C29607BA) a toutefois tempéré cette interdiction en autorisant la captation lorsque le procès « présente un intérêt pour la constitution d’archives historiques de la justice » (C. patr., articles L. 221-1 et s. N° Lexbase : L6883DYL). Ont ainsi été filmés pour leur dimension historique : le procès de Klaus Barbie en 1987, « du sang contaminé » en 1992 et 1993, de Paul Touvier en 1994, de Maurice Papon en 1998, d’AZF en 2009 et en 2011/2012 et le procès Pinochet en 2010.   

À la demande du Parquet national antiterroriste (PNAT), la cour d’appel a accepté que le procès des attentats de janvier 2015 soit intégralement filmé pour devenir lui aussi un témoignage de l’Histoire. Une première s’agissant d’ un procès pour terrorisme en France. La cour a souligné que les événements avaient « profondément marqué l’histoire du terrorisme national et international » et engendré un retentissement et une émotion qui « ont largement dépassé les frontières en raison des symboles visés : la liberté de la presse, l’État et ses représentants ainsi que la communauté juive ». La cour a également précisé que l’enregistrement vidéo se ferait à partir de points fixes dans la salle d’audience et « dans des conditions ne portant atteinte, ni au bon déroulement des débats, ni au libre exercice des droits de la défense » [1]. À noter, que l'enregistrement audiovisuel sera communicable à des fins historiques ou scientifiques dès que l'instance aura pris fin et que la décision sera devenue définitive. 

 

[1] Le procès des attentats de janvier 2015 sera filmé, voici comment, The Huffington Post, 2 septembre 2020 [En ligne].

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Actes administratifs

[Questions à...] Quel régime contentieux pour les ordonnances non ratifiées par le Parlement ? - Questions* à Thomas Perroud, Professeur de droit public, Université Paris II Panthéon-Assas et Emma Guernaoui, étudiante en droit à l'École normale supérieure de Paris et à l'Université Paris I Panthéon-Sorbonne

Réf. : Cons. const., décisions n°s 2020-851/852 QPC du 3 juillet 2020 (N° Lexbase : A28793QP) et 2020-843 QPC du 28 mai 2020 (N° Lexbase : A22923MT) ; CE 2° et 7° ch.-r., 1er juillet 2020, n° 429132, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A10663QK).

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N4374BYN

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Le 02 Septembre 2020

 


Mots clés : Actes législatifs et administratifs • ordonnances • ratification

 

Doivent être regardées comme des dispositions législatives les dispositions d’une ordonnance de l’article 38 de la Constitution, ne pouvant plus, passé le délai d’habilitation, être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif.


 

Plusieurs décisions récentes rendues au début de l’été par les juridictions siégeant du côté du Palais-Royal ont alimenté le débat relatif au régime contentieux des ordonnances non ratifiées par le Parlement une fois passé le délai d’habilitation. Ouvrant le bal, le Conseil constitutionnel estimait, dans une décision rendue le 28 mai 2020, que doivent être regardées comme des dispositions législatives les dispositions d’une ordonnance de l’article 38 de la Constitution (N° Lexbase : L1298A9X), ne pouvant plus, passé le délai d’habilitation, être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif. Il était suivi de peu par une décision du 1er juillet 2020 du Conseil d’Etat s’estimant compétent pour connaître d’un recours pour excès de pouvoir contre une ordonnance de l’article 38 de la Constitution non ratifiée, même après l’expiration du délai d’habilitation. Enfin, dans une décision du 3 juillet 2020, les Sages concluaient (provisoirement) cette passe d’armes en jugeant que « si les dispositions d’une ordonnance acquièrent valeur législative à compter de sa signature lorsqu’elles ont été ratifiées par le législateur, elles doivent être regardées, dès l’expiration du délai de l’habilitation et dans les matières qui sont du domaine législatif, comme des dispositions législatives […] ». Pour faire le point sur cette thématique, Lexbase Hebdo – édition publique a rencontré Thomas Perroud, Professeur de droit public, Université Paris II Panthéon-Assas et Emma Guernaoui, étudiante en droit à l'École normale supérieure de Paris et à l'Université Paris I Panthéon-Sorbonne.

Lexbase : Pouvez-vous nous rappeler l’apport de la décision du Conseil constitutionnel du 28 mai 2020 ?

Thomas Perroud et Emma Guernaoui : C’est un tournant majeur qui est opéré par le Conseil constitutionnel dans cette décision, et ce, à plusieurs égards.

Premièrement, la nature juridique des ordonnances de l’article 38 de la Constitution se voit réinventée. Le Conseil constitutionnel estime dans sa décision du 28 mai 2020 qu’une ratification implicite des ordonnances est suffisante pour leur consacrer une nature législative. Ces ordonnances « doivent être regardées comme des dispositions législatives » après le délai d’habilitation alors même que les dispositions n’ont pas été expressément ratifiées par le Parlement. La seule existence d’un projet de loi de ratification suffit pour conférer à ces dispositions une valeur législative si elles entrent dans le domaine de la loi. Cette appréciation étonne en ce sens que la constitutionnalisation des ordonnances de l’article 38 en 1958 ambitionnait de mettre fin aux controverses de la pratique des décrets-lois des IIIème et IVème Républiques. Elles permettent de déroger ponctuellement à la séparation des domaines de la loi et du règlement. Cette décision paralyse en outre la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 (loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008, de modernisation des institutions de la Ve République N° Lexbase : L7298IAK) qui imposait une ratification parlementaire expresse des ordonnances pour qu’elles acquièrent une valeur législative. La volonté du Parlement se voit donc présumée dès lors qu’est déposé un projet de loi de ratification, sans vote et sans débat…

Il est vrai qu’en pratique les ordonnances sont ratifiées expressément sans pour autant que des débats aient lieu au Parlement. Le contrôle exercé est bien souvent superficiel, voire inexistant. C’est néanmoins un recul supplémentaire dans l’équilibre des pouvoirs qui est acté et qui illustre, une fois de plus, une inclinaison largement favorable à l’accroissement du pouvoir exécutif. Même si la faculté d’accorder une habilitation reste un pouvoir discrétionnaire des parlementaires, il est peu probable que la décision du Conseil constitutionnel occasionne un rationnement drastique de cette pratique.

Par ailleurs, cette décision permet au Conseil constitutionnel d’opérer un changement majeur dans la répartition contentieuse des ordonnances. Considérées désormais comme des « dispositions législatives », contrairement à son interprétation usuelle [1], ces ordonnances sont susceptibles de recours par la voie des questions prioritaires de constitutionnalité. La nature matériellement hybride de certaines ordonnances avait effectivement été consacrée et n’était pas sans poser quelques difficultés. Ce revirement [2] permet d’harmoniser la nature des ordonnances non ratifiées en leur attribuant une valeur législative une fois passé le délai d’habilitation si elles entrent dans le domaine législatif. Toutefois, cela met à mal la jurisprudence constante du Conseil d’État [3] selon laquelle les ordonnances non ratifiées revêtent la nature d’actes administratifs susceptibles de recours devant lui. Il est décevant que la motivation de la première décision du Conseil constitutionnel soit si succincte compte tenu de l’approche nouvelle qu’elle consacre.

Finalement, on notera que l’affaire en question illustre les lacunes françaises [4] en matière de participation du public, cet « adjuvant sous-estimé » [5]. Les enjeux économiques [6] qui étaient en jeu ne sont certainement pas étrangers au raisonnement formulé par le Conseil constitutionnel.

Lexbase : Dans la foulée, le Conseil d’État s’estime compétent pour connaître d’un recours pour excès de pouvoir contre une ordonnance ayant acquis valeur législative. Quel est son raisonnement ?

Thomas Perroud et Emma Guernaoui : Le 1er juillet 2020, le Conseil d’État, appliquant une jurisprudence constante, se reconnaissait compétent pour contrôler la légalité d’une ordonnance non ratifiée par le Parlement après l’expiration du délai d’habilitation. Il faut reconnaître que sa jurisprudence sur la question est plus que centenaire [7]. La controverse juridique s’est donc concrétisée, sans surprise, en tant que le Conseil constitutionnel s’est arrogé une partie du contentieux relatif aux ordonnances tout en remodelant les équilibres institutionnels.

Dans cette décision rendue par les deuxième et septième chambres réunies [8], le Conseil d’État réhabilite son interprétation de l’article 38 de la Constitution. Il estime ainsi que seul le Parlement peut modifier ou abroger une ordonnance non ratifiée après le délai d’habilitation en vertu de l’article 24 de la Constitution (N° Lexbase : L0850AHX). Est donc légal le refus d’abrogation et de modification du pouvoir exécutif en tant que : « le Gouvernement n’a pas méconnu l’habilitation ». Le Conseil d’État réaffirme la nature réglementaire de ces ordonnances et, de manière implicite, sa compétence pour juger de leur légalité. Le recours en excès de pouvoir contre les ordonnances non ratifiées après expiration du délai d’habilitation serait donc toujours possible, malgré la décision du Conseil constitutionnel.

Le 11 juin 2020 [9], une première décision laissait déjà présager des réticences de la plus haute juridiction administrative. La septième chambre avait rejeté une demande de transmission de question prioritaire de constitutionnalité pour une ordonnance non ratifiée par le Parlement au motif que : « ces dispositions, qui ne sont au demeurant pas applicables au présent litige, n’ont pas été ratifiées. Les requérants ne peuvent par suite exciper de leur inconstitutionnalité dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité ». Cette décision allait à contre-courant de la décision rendue par le Conseil constitutionnel quinze jours auparavant. Certes, le rapporteur public n’en avait pas encore connaissance lorsqu’il a rendu ses conclusions - et on mesure à quel point son analyse est déterminante dans la résolution de nombreux litiges. Certes, la décision du Conseil constitutionnel n’était que très peu motivée et sa portée a pu être mal évaluée. Néanmoins, la lecture cumulée de ces deux décisions rend explicite la position du Conseil d’État et symbolise par là même sa résistance.

Lexbase : Deux jours plus tard, les Sages réaffirmant leur compétence pour connaître de ces ordonnances, néanmoins circonscrites aux cas dans lesquels sont invoqués des moyens relatifs aux droits et libertés. Que pensez-vous de ce positionnement ?

Thomas Perroud et Emma Guernaoui : Le Conseil constitutionnel ne s’est pas fait attendre pour réaffirmer son interprétation en statuant sur deux nouvelles questions prioritaires de constitutionnalité le 3 juillet dernier. Celui-ci a été saisi par la Cour de cassation pour contrôler la constitutionnalité de l’article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 (N° Lexbase : L5506LWT). La tant décriée ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020, relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période (N° Lexbase : L5730LW7), consacrait en son article 16 la prolongation provisoire de plein droit de toutes les détentions. Les critiques ont été massives et les prolongations ont rapidement été soumises au contrôle d’un juge à travers la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire (N° Lexbase : L8351LW9).

Cette décision de rejet [10] et son commentaire [11] furent une occasion parfaite pour que le Conseil précise son interprétation récente. Celle-ci s’inscrit dans la continuité de sa décision du 28 mai 2020 : les ordonnances non ratifiées, une fois le délai d’habilitation passé, sont matériellement législatives à deux conditions. D’une part, un projet de loi de ratification doit avoir été déposé avant le délai d’expiration de l’habilitation et, d’autre part, les ordonnances doivent entrer dans le domaine de l’article 34 de la Constitution. Ces ordonnances sont dès lors des « dispositions législatives » qui peuvent faire l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité. Elles ne sont pas caduques si elles ne sont pas ratifiées de manière expresse par le Parlement.

Cela invite à formuler plusieurs commentaires.

D’une part, le Conseil consacre un contrôle de constitutionnalité a posteriori des lois d’habilitation en encadrant son étendue, qui se limite au « respect par une disposition législative des droits et libertés que la Constitution garantit ». Faisant figure de grande première dans l’histoire constitutionnelle de la Vème République, cette consécration permet au Conseil constitutionnel d’étendre sa compétence et son contrôle. C’est encore une fois un message dont le destinataire est le Conseil d’État. Le juge administratif avait en effet jugé dans une décision de 2015 [12] que ces ordonnances ne pouvaient faire l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité en tant qu’elles se « bornent » à habiliter le Gouvernement et qu’elles ne peuvent pas, par nature, porter atteinte aux droits et libertés. Il aura donc fallu que le juge judiciaire se saisisse de la question pour que le Conseil constitutionnel consacre sa compétence. Ce faisant, bien que la consécration de ce contrôle soit louable, les circonstances à l’occasion desquelles la loi fait écran aux ordonnances sont rares.

D’autre part, le Conseil constitutionnel confirme sa compétence pour contrôler les ordonnances non ratifiées qui sont des « dispositions législatives » d’après son interprétation de l’article 38 de la Constitution. Il manifeste sa volonté de contrôler les ordonnances qui prolifèrent de nos jours. Qu’en penser ? Cela traduit-il une avancée notable pour l’État de droit ? On peut légitimement en douter. Les délais d’habilitation sont courts - entre trois et quatre mois. Sans compter que les ordonnances sont prises à des dates généralement proches de l’expiration du délai d’habilitation. Cela laisse aux justiciables quelques semaines, au mieux, sinon quelques jours, pour contester les ordonnances en recours pour excès de pouvoir. À défaut, la question prioritaire de constitutionnalité est possible. On en connaît pourtant les limites. Elle concerne, à l’occasion d’un litige, le contrôle d’une disposition et non pas de l’ensemble de l’ordonnance comme le permet le recours en excès de pouvoir. Par ailleurs, elle sera matériellement limitée aux droits et libertés que la Constitution garantit.

Lexbase : Selon vous, quelles seront les conséquences contentieuses de cette dernière décision et que peut-on attendre de la répartition des compétences entre les deux occupants du Palais Royal ?

Thomas Perroud et Emma Guernaoui : Concernant les détentions provisoires et leur prolongation, le Conseil constitutionnel a jugé conforme à l’article 66 de la Constitution les deux questions formulées en tant que la loi d’habilitation ne semble pas avoir « exclu l’intervention d’un juge lors de la prolongation d’un titre de détention provisoire venant à expiration durant la période d’application de l’état d’urgence sanitaire ». Il envoie pourtant un signal assez clair en précisant que « l’inconstitutionnalité alléguée par les requérants ne pourrait résulter que de l’ordonnance prise sur le fondement de ces dispositions ». Il faut se résoudre à attendre que ces détentions fassent l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité, cette fois-ci sur le fondement de l’ordonnance du 25 mars 2020, pour connaître l’appréciation du juge constitutionnel. Inutile de rappeler que la France est déjà activement rappelée à l’ordre par la Cour européenne des droits de l’Homme [13] et qu’une telle décision est attendue. 

La répartition des compétences entre les deux occupants du Palais-Royal est quant à elle réévaluée au profit du Conseil constitutionnel. Le contentieux risque d’affluer vers ce dernier tant les ordonnances sont nombreuses. Le juge administratif est quant à lui cantonné à une compétence subsidiaire pour connaître des litiges qui n’entrent pas dans le champ du contrôle de l’article 61-1 de la Constitution (N° Lexbase : L5160IBQ). La répartition des compétences n’est plus dépendante de la ratification parlementaire des ordonnances mais du contenu de ces dernières. On substitue finalement une approche matérielle à l’approche organique originelle. Entre autres, si « le Parlement vote la loi », le gouvernement peut, sous couvert d’habilitation, prendre des ordonnances qui n’auront pas le statut de loi mais qui constitueront des « dispositions législatives ». Les subtilités sémantiques camoufleraient presque une réalité qui, au fond, est la même.

En étendant le champ de ces « dispositions législatives », le Conseil constitutionnel étend son contrôle mais aussi le pouvoir de l’exécutif. Cela est assez symptomatique : les ordonnances sont si nombreuses qu’il s’agit d’étendre le contrôle de constitutionnalité exercé sur ces dernières. Le Sénat s’est d’ailleurs récemment inquiété de leur multiplication [14] au sein du projet de loi relatif à diverses dispositions liées à la crise sanitaire. La commission mixte parlementaire a permis de réduire à dix le nombre d’ordonnances alors que le gouvernement en prévoyait quarante.

Il n’est pas impossible que dans un avenir proche le Conseil constitutionnel étende encore davantage sa compétence en conférant aux dispositions d’une ordonnance une valeur législative dès leur adoption. Le débat juridique devra finalement se trancher politiquement à l’occasion d’une révision constitutionnelle. Pour l’heure, les ordonnances prolifèrent à mesure que s’éloignent le contrôle du Parlement et les possibilités de recours des justiciables.

 

[1] Cons. const., décision 2011-219 QPC du 10 février 2012 (N° Lexbase : A3098ICQ).

[2] Th. Perroud,  La Constitution Total, Recueil Dalloz, n° 24, juil. 2020, pp. 1390-1394.

[3] CE, 24 novembre 1961, n° 52262.

[4] Th. Perroud, op. cit..

[5] Ch. Testard, Pouvoir de décision unilatérale de l'administration et démocratie administrative, L.G.D.J, coll. Thèses, 1ère éd., 2018, 786 p.

[7] CE, 6 décembre 1907, 04244, 04245, 04246, 04247, 04248, 04249, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A4584B7W).

[8] CE 2° et 7° ch.-r., 1er juillet 2020, n° 429132, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A10663QK).

[9] CE 7° ch., 11 juin 2020, n° 437851, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A69973NH).

[10] Cons. const., décision n° 2020-851/852 QPC du 3 juillet 2020.

[11] Commentaire de la décision n° 2020-851/852 QPC du 3 juillet 2020, site du Conseil constitutionnel.

[12] CE 9° et 10° s-s-r., 23 janvier 2015, n° 380339, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A9910M9W).

[13] CEDH, 30 janvier 2020, Req. 9671/15 (N° Lexbase : A83763C9).

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Avocats

[Brèves] Modification du RIN concernant la « pluralité d’exercice »

Réf. : Décision du 9 juillet 2020 portant modification du règlement intérieur national de la profession d'avocat (RIN) (art. 21-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée) (N° Lexbase : Z849049Y)

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N4365BYC

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par Marie Le Guerroué

Le 02 Septembre 2020

► A été publié au Journal officiel du 30 août 2020, la décision du 9 juillet 2020 portant modification du règlement intérieur national de la profession d'avocat (RIN) (art. 21-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée N° Lexbase : L6343AGZ) (N° Lexbase : Z849049Y).

Par cette décision le CNB met en conformité le Règlement intérieur national (RIN) avec le nouveau cadre légal et réglementaire qui résulte de l’introduction, par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance l’activité et l’égalité des chances économiques (N° Lexbase : L4876KEC) (« loi Croissance »), du principe de la pluralité d’exercice.

Le nouvel article 15.4.1 du RIN définit ainsi la pluralité d'exercice comme « la faculté pour l'avocat d’exercer son activité professionnelle en cumulant des modes d’exercice listés à l’article 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 et ce, dans le ressort d’un même barreau ou de barreaux différents. Cette possibilité est ouverte aux avocats exerçant à titre individuel, si cet exercice individuel se cumule avec un exercice en structure. La pluralité d’exercice ne déroge pas au principe énoncé à l’article 15.2 du [RIN] selon lequel l’avocat est inscrit au tableau de l’Ordre du seul barreau du lieu de son cabinet principal. La pluralité d’exercice ne résulte pas de l’ouverture d’un bureau secondaire ou de la création d’une structure inter-barreaux. Tout établissement d’exercice doit être conforme aux usages et permettre l’exercice professionnel de l’avocat dans le respect des principes essentiels de la profession. La pluralité d’exercice ne permet en aucune manière à l’avocat de déroger aux règles territoriales de la postulation ».

L’article 15.4.2 du RIN précise que « l’avocat peut disposer d’un ou plusieurs établissements d’exercice, distincts de son cabinet principal, lui permettant de cumuler des modes d’exercice listés à l’article 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971. L’établissement d’exercice doit répondre aux conditions générales du domicile professionnel et correspondre à un exercice effectif ». Les articles 15.4.3 et suivants précisent les conditions d’ouverture et de fermeture de l’établissement, la déclaration de missions et d’activités particulières et le régime disciplinaire.

Les articles 2 (secret professionnel), 4 (conflits d’intérêts), 16 (réseaux et autres conventions pluridisciplinaires) et 19 (prestations juridiques en ligne) du RIN ont également été modifiés en conséquence.

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Avocats/Déontologie

[Brèves] Du droit de porter le foulard et la robe…

Réf. : CA Douai, 9 juillet 2020, n° 19/05808 (N° Lexbase : A94213RD)

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N4311BYC

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par Marie Le Guerroué

Le 02 Septembre 2020

► Est légale la délibération du conseil de l’Ordre du barreau des avocats de Lille interdisant tout port de signe manifestant ostensiblement une appartenance ou une opinion religieuse, philosophique, communautaire ou politique et notamment le port du foulard lors des missions de l’avocat de représentation ou d’assistance d’un justiciable devant une juridiction (CA Douai, 9 juillet 2020, n° 19/05808 N° Lexbase : A94213RD).

Procédure. Le Bâtonnier de l’Ordre des avocats du barreau de Lille avait notifié à ses confrères la consolidation du règlement intérieur au barreau par l’ajout d’un alinéa 5 à l’article 9-3 relatif aux rapports avec les institutions, désormais, ainsi rédigé : « L’avocat ne peut porter avec la robe ni décoration, ni signe manifestant ostensiblement une appartenance ou une opinion religieuse, philosophique, communautaire ou politique ». Une élève avocate de l’IXAD avait formé un recours préalable contre cette délibération devant le Bâtonnier du barreau de Lille. Celle-ci avait été rejeté au motif qu’elle n’était pas avocate. Elle formait alors un recours devant la cour d’appel de Douai sollicitant l’abrogation du nouvel alinéa estimant celui-ci discriminatoire et donc contraire aux dispositions législatives en vigueur. Parallèlement, un avocat au barreau de Lille avait également formé un recours préalable contre cette délibération, également rejeté. Il formait également un recours devant la cour d’appel de Douai.

Réponse de la cour. La cour répond, d’abord, que l’appelante ne peut utilement revendiquer à son bénéficie les dispositions de l’article 15 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 (N° Lexbase : L8168AID), alors même que n’étant pas avocate, elle ne peut justifier d’un intérêt professionnel lésé par cette délibération. Le fait qu’elle ait prêté serment afin de pouvoir participer à la formation dispensée par l’IXAD ou que cette école soit directement liée, dans son fonctionnement et son financement, aux barreaux des ressorts de la cour d’appel auxquels elle est rattachée, n’est pas de nature à assimiler l’élève avocat à un avocat, ni à lui conférer la qualité exigée par ce texte. C’est donc à juste titre, pour les juges du fond, que le conseil de l’Ordre a déclaré irrecevable la réclamation de l’élève-avocate, sur le fondement de l’article 15, qui réserve les recours qu’il décrit aux seuls avocats. L’appelante, non-soumise au port de la robe en sa qualité d’élève- avocate, ne peut pas plus se prévaloir d’une violation actuelle de ses droits et libertés reconnus par la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, dès lors qu’elle a pu suivre sa formation tout en portant le foulard et que si elle avait voulu plaider vêtue ainsi aux côtés de son maître de stage devant une juridiction, la délibération litigieuse n’aurait pu l’en empêcher. En l’absence de toute violation actuelle du droit de porter le foulard, elle ne peut invoquer une privation de tout recours effectif à l’encontre de la délibération litigieuse au sens de l’article 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales (N° Lexbase : L1109HYQ).

Sur la compétence du conseil de l’Ordre. La cour répond que si, l’article 21-1 prévoit que le Conseil national des barreaux est l’organe qui dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, unifie par voie de dispositions générales les règles et usages de la profession d'avocats, force est toutefois de constater que le Conseil national des barreaux n’a pas entendu intégrer au Règlement Intérieur de la profession d’avocat des dispositions relatives au costume d’avocat, alors même que la conférence des Bâtonniers avait adopté une résolution relative au port de la robe et signe d’appartenance religieuse ou politique et avait appelé à réglementer l’usage et la forme du costume d’audience notamment en prescrivant l’interdiction d’ajouts personnels à la robe à l’exception des décorations françaises pour les audiences solennelles, et en disposant que les avocats se présentent tête nue dans l’exercice public de leurs fonctions d’assistance et de représentation. Au vu des dispositions législatives rappelés et dès lors que le costume d’audience est une question intéressant l’exercice de la profession des avocats inscrits au barreau de Lille son conseil de l’Ordre était compétent pour modifier son règlement intérieur à ce sujet.

Sur la demande d’annulation. Sur ce point, la cour précise qu'afin de protéger les droits et libertés d’autrui et en l’espèce ceux du justiciable que l’avocat représente ou assiste, chaque avocat dans l’exercice de ses fonctions de défense et de représentation se doit d’effacer ce qui lui est personnel au profit de la défense de son client et du droit, le port de la robe sans aucun signe distinctif étant nécessaire afin de témoigner de cette disponibilité à tout justiciable. Dès lors, selon la cour, l’interdiction édictée par la délibération litigieuse ne peut pas empêcher une femme portant le foulard de prêter serment et de devenir avocate, mais seulement restreindre la possibilité de garder le foulard quand cette avocate intervient devant une juridiction pour assister ou représenter un justiciable, la liberté qui lui est reconnue de manifester sa religion devant céder, lorsqu’elle intervient comme auxiliaire de justice, concourant au service public de la justice, devant la protection des droits et la liberté du justiciable. L’objectif recherché est ainsi bien légitime et l’exigence proportionnée, cette interdiction ne valant que lors des seules missions de l’avocat de représentation ou d’assistance d’un justiciable devant une juridiction. En conséquence, il ne sera pas fait droit à la demande d’annulation de la délibération litigieuse.

Rejet. La cour rejette la demande d’annulation de la délibération du conseil de l’Ordre des avocats du barreau de Lille prise le 24 juin 2019 (V., ETUDE : La qualité d'auxiliaire de justice de l'avocat N° Lexbase : E36283RS et ETUDE : La contestation des délibérations et des décisions du conseil de l'Ordre N° Lexbase : E33993RC in l’Ouvrage « La profession d’avocat »).

newsid:474311

Avocats/Procédure pénale

[Jurisprudence] De l’arbitraire du magistrat qui perquisitionne à l’excès de pouvoir du JLD

Réf. : Cass. crim., 8 juillet 2020, n° 19-85.491, F-P+B+I (N° Lexbase : A71553Q3)

Lecture: 30 min

N4317BYK

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par Vincent Nioré, Avocat au Barreau de Paris

Le 02 Septembre 2020

Mots-clefs : Jurisprudence • Commentaire • Perquisition • Cabinet d'avocat • Décision • Motivation 


 

La Chambre criminelle de la Cour de cassation a rendu une décision qui revêt une importance particulière en matière de contestation par le Bâtonnier ou son délégué de saisies opérées par un magistrat instructeur en cabinet d’avocat.

Elle concerne l’exigence de motivation de la décision de perquisition. Les magistrats instructeurs comme ceux du Parquet ne peuvent plus perquisitionner en s’abstenant de motiver ou en exposant n’importe quel motif de perquisition. Le risque encouru par eux est celui de l’excès de pouvoir du juge des libertés et de la détention (JLD) qui a pour socle celui du magistrat qui perquisitionne factuellement en excès voire en détournement de ses pouvoirs.

Par arrêt du 8 juillet 2020 (arrêt commenté) sur le recours en excès de pouvoirs de l’avocat perquisitionné contre l’ordonnance de validation des saisies rendue par le JLD, elle juge, comme elle l’avait fait le 9 février 2016, que : « Il résulte des articles 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme (N° Lexbase : L4798AQR) et 56-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L0488LTA) que les perquisitions dans le cabinet d’un avocat ou à son domicile ne peuvent être effectuées, par un magistrat et en présence du Bâtonnier ou de son délégué, qu’à la suite d’une décision écrite et motivée prise par le magistrat, qui indique la nature de l’infraction ou des infractions sur lesquelles portent les investigations, les raisons justifiant la perquisition et l’objet de celle-ci. Le contenu de cette décision est porté dès le début de la perquisition à la connaissance du Bâtonnier ou de son délégué. L’absence dans la décision des motifs justifiant la perquisition et décrivant l’objet de celle-ci, qui prive le Bâtonnier, chargé de la protection des droits de la défense, de l’information qui lui est réservée et qui interdit ensuite le contrôle réel et effectif de cette mesure par le juge des libertés et de la détention éventuellement saisi d’une contestation, porte nécessairement atteinte aux intérêts de l’avocat concerné. Excède en conséquence ses pouvoirs le juge des libertés et de la détention qui ordonne le versement au dossier de l’information de documents saisis au cours de cette perquisition irrégulièrement menée ».

La recherche de la manifestation de la vérité ne peut avoir ses racines ni dans le mensonge fût-il par omission ni dans le sophisme encore moins dans la version imagée ou orientée à charge voire sophistiquée d’un fait au soutien d’une mesure intrusive chez un avocat au mépris du secret professionnel.

Un magistrat instructeur a récemment reconnu que lors de l’audience de contestation devant le JLD, il lui arrivait de faire dans la « surenchère… pour sauver des pièces, on tient des propos qui parfois sont dans la surenchère » pour pallier son impossibilité de démontrer avant la perquisition l’existence d’indices de la participation de l’avocat à la commission d’une infraction soutenant que le Bâtonnier de Paris ou son délégué plaçaient « la barre très haut » au plan de l’exigence de démonstration de l’existence antérieure à la perquisition d’indices contre l’avocat lui-même.

L’idée étant pour certains magistrats de s’affranchir contra legem de l’exigence de motivation par la force de l’invocation de l’incrimination répétée à l’envi jusqu’à la provocation pour qu’il en reste toujours quelque chose d’afflictif et d’infamant sur l’avocat au mépris de la règle de droit. A titre anecdotique, dans un autre registre mais évocateur, un juge d’instruction avait lancé à l’adresse du délégué du Bâtonnier en pleine perquisition « Maître ! Vous nous fatiguez avec votre jurisprudence » en l’occurrence celle invoquée de la Chambre criminelle qui interdit à peine de nullité d’interroger au fond la personne perquisitionnée hors la présence de son conseil non prévue en l’état en cette circonstance par les textes.

C’était pourtant l’exigence jurisprudentielle tant de la Chambre criminelle que de celle du JLD.

Force au droit de contester pour se défendre en assurant la « prééminence du droit » au sens où l’entend la CEDH.

C’est donc sous l’angle de l’excès de pouvoir du JLD qui valide une saisie en l’état d’une ordonnance de perquisition non motivée elle-même en excès de pouvoir que statue la Chambre criminelle. Sur ce point, c’est sur le recours en excès de pouvoir que se prononce la Cour de cassation.

L’ordonnance du JLD rejetait la contestation du Bâtonnier au prix d’un excès de pouvoir. Cette ordonnance est mentionnée au texte de l’article 56-1 du Code de procédure pénale comme « non susceptible de recours » sauf la réserve de l’excès de pouvoir. Le seul fait pour le JLD de statuer par le rejet de la contestation en l’état d’une décision de perquisition non motivée suffit à marquer cet excès.

L’Ordre ne s’était pas associé à ce recours intenté par l’avocat perquisitionné certes en l’état des réserves du Bâtonnier qui contenaient une référence exhaustive à l’arrêt du 8 janvier 2013 qui définit le Bâtonnier comme un auxiliaire de justice en charge d’une mission de protection des droits de la défense et, à celui du 9 février 2016, qui réaffirme la qualité de protecteur des droits de la défense du Bâtonnier et fait droit à la requête en nullité des opérations de perquisition faute de motivation portée par l’avocat perquisitionné puis mis en examen. Résumons les solutions dégagées par la Chambre criminelle.

Un avocat perquisitionné avait entrepris de saisir la Cour suprême d’un recours en excès de pouvoir seul recours possible contre l’ordonnance du JLD en cette matière qui exclut toute autre voie de recours dans le sillage de la contestation du délégué du Bâtonnier finalement rejetée.

Les dispositions de l’article 56-1 alinéa 4 du Code de procédure pénale prévoient que le JLD statue sur la contestation par « ordonnance motivée non susceptible de recours ».

La perquisition avait été pratiquée par un magistrat instructeur dont le dessaisissement avait été demandé par le même avocat dans un autre dossier d’importance au profit d’un juge d’instruction parisien. C’est donc le cabinet de ce même confrère qui était perquisitionné par ce même magistrat dans une affaire autre que celle du dessaisissement et concernant les conditions d’un appel d’offres au profit du cabinet avec un client de droit public ce que rappelle la Cour de cassation en rejetant le pourvoi sur ce point de contestation de l’impartialité subjective au motif que « le JLD n’étant pas le juge de la récusation ».

La Chambre criminelle rejette l’argument de l’impartialité subjective en estimant que « Il ne peut être reproché au juge des libertés et de la détention d’avoir commis un excès de pouvoir en ordonnant le versement, au dossier de l’information, de documents saisis par le juge d’instruction au cabinet de la demanderesse au pourvoi, avocat au barreau de Paris, malgré un conflit qui opposerait ce juge d’instruction à un associé de cet avocat, exerçant dans le même cabinet, qui aurait mis en cause l’inaction de ce juge d’instruction dans la conduite d’une information, dans une affaire distincte. En effet, chargé de statuer sur les contestations élevées à l’occasion de la saisie de documents, effectuée lors d’une perquisition pratiquée par le juge d’instruction dans un cabinet d’avocat, le juge des libertés et de la détention n’est pas juge de la récusation du juge d’instruction. Le grief ne peut donc être admis ».

Au plan des apparences, il semblait légitime de penser que l’heure était à la « perquisition/vendetta » venue troubler la « sérénité » annoncée de temps à autre par la Conférence des procureurs généraux comme indispensable à l’équilibre des forces au sein de la sacro-sainte famille judiciaire pourtant dans certains dossiers en perpétuel affrontement.

Une perquisition chez un avocat ne peut être fondée que sur l’existence antérieure et effective d’indices de la participation de l’avocat à la commission d’une infraction comme auteur ou comme complice.

En cette matière, qu’il soit admis une fois pour toutes que le néant ne constituera jamais l’indice de quoi que ce soit.

Nos confrères perquisitionnés sont donc invités à exercer des recours en excès de pouvoir (comme d’ailleurs les Bâtonniers) ou encore à déposer des requêtes en nullité en fonction de l’évolution de la procédure.

I - La condition de l’existence d’indices effectifs préexistants à la perquisition constitue l’exigence impérative de motivation de l’ordonnance de perquisition

Comme le souligne avec force François Saint-Pierre, « les raisons qui justifient la perquisition doivent être établies dans le dossier de la procédure antérieurement à la mesure de perquisition ; elles doivent être objectives et sérieuses, et ne doivent pas résulter de seules hypothèses ou d’une suspicion que la perquisition aurait pour but d’étayer ; enfin, la mesure de perquisition doit être absolument nécessaire pour la suite de l’instruction judiciaire ; elle doit n’être donc envisagée qu’à défaut de tout autre mode d’investigation possible. Ces critères de nécessité, de proportionnalité et de légitimité dans une société démocratique doivent impérativement gouverner l’usage des perquisitions des locaux d’avocats ». La circulaire relative à la présentation des dispositions de la loi n° 2005-1549 du 12 décembre 2005 sur le traitement de la récidive des infractions pénales renforçant les droits de la défense est explicite : « 2. Modifications relatives aux perquisitions concernant les avocats

Raisons justifiant la perquisition

Les informations qui figureront dans la décision devront être suffisamment explicites pour justifier l’opération (en indiquant par exemple que l’avocat est mis en cause par certaines personnes comme coauteur ou complice de telle ou telle infraction).

Pour autant, elles ne devront pas consister en des révélations qui seraient de nature à gêner les investigations en cours (l’identité de ces personnes pouvant par exemple ne pas être précisée).

Il convient à cet égard d’observer qu’une motivation jugée insuffisamment explicite par le Bâtonnier ou son délégué pourra conduire celui-ci à contester le bien-fondé de la perquisition et à s’opposer en conséquence à toute saisie, ce qui amènera le juge des libertés et de la détention à se prononcer sur la contestation au vu de l’ensemble du dossier de la procédure, en application des dispositions, inchangées, des alinéas trois à sept (anciennement deux à six) de l’article 56-1 ».

La solution dégagée par le présent arrêt renvoie directement aux termes de l’article 56-1 du Code de procédure pénale alinéa 1er qui prévoit à peine de nullité (doublement au visa de l’article 59 alinéa 2 du Code de procédure pénale qui dispose que le respect des formalités de l’article précité est à peine de nullité) que la perquisition ne peut se faire qu’en vertu d’une décision écrite préalable et motivée indiquant la nature de l’infraction poursuivie, les raisons de la perquisition et son objet.

La décision visée est celle du magistrat, parquetier ou juge d’instruction, qui pratique la perquisition et non pas la décision du JLD qui en amont autorise le parquetier à perquisitionner sur sa requête dans les conditions de l’article 76 alinéa 4 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L0490LTC).

En l’occurrence, c’est ce manquement à cette règle d’ordre public que la Chambre criminelle sanctionne en annulant l’ordonnance du JLD qui validait les saisies fustigeant la déloyauté de la manœuvre organisant volontairement l’absence des motifs et des raisons justifiant la perquisition dans la décision de perquisition.

Précision d’importance, cette carence de motivation expressément voulue par certains magistrats qui perquisitionnent soucieux de ne rien révéler de leur instruction pour tenter de mieux surprendre en perquisition, se révèle préjudiciable non seulement au Bâtonnier « protecteur des droits de la défense privé de l’information qui lui est réservée » mais aussi à l’avocat perquisitionné qui pourtant n’est pas destinataire de la décision de perquisition faute pour le texte de prévoir sa communication à son profit.

II - Le Bâtonnier ou son délégué agit dans le cadre d’une mission d’auxiliaire de justice chargée de la protection des droits de la défense 

Par son arrêt du 8 janvier 2013 [1], la Chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé que :

« Attendu que le Bâtonnier de l'Ordre des avocats n'est pas, au sens de l'article R. 49-21 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L5793IGN), une partie lorsqu'il exerce les prérogatives qui lui sont données par l'article 56-1 dudit code à l'occasion d'une perquisition dans un cabinet d'avocat, dès lors qu'il agit dans le cadre d'une mission d'auxiliaire de justice chargée de la protection des droits de la défense ».

Dans le même sens, il faut relever l’arrêt de la Chambre criminelle du 9 février 2016 [2] qui juge que le Bâtonnier est « chargé de la protection des droits de la défense » et que la CEDH définit comme étant une « garantie spéciale de procédure ».

Par ce même arrêt, elle retient déjà l’exigence de motivation : « Il résulte des articles 56-1 du Code de procédure pénale et 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme que l'absence, dans la décision, prise par un magistrat, de perquisition du cabinet d'un avocat, des motifs justifiant la perquisition et décrivant l'objet de celle-ci, qui prive le bâtonnier, chargé de la protection des droits de la défense, de l'information qui lui est réservée et interdit ensuite le contrôle réel et effectif de cette mesure par le juge des libertés et de la détention éventuellement saisi, porte nécessairement atteinte aux intérêts de l'avocat concerné ».

Par arrêt du 25 juin 2013 (Cass. crim., 25 juin 2013, n° 12-88.021, FS-P+B N° Lexbase : A3071KIL), la Chambre Criminelle maintenant l’arrêt de la chambre de l’Instruction avait retenu que « le Bâtonnier ou son délégué est présent et exerce tout au long de la perquisition son contrôle avant toute éventuelle saisie d’un document en exprimant son opposition à la saisie lorsque celle-ci peut concerner d’autres infractions que celle mentionnée dans la décision ».

L’ordonnance de perquisition doit mentionner tous les faits compris dans la saisine du juge d’instruction afin que le Bâtonnier ou son délégué soit informé de l’étendue de la perquisition qui ne peut porter sur des faits différents de ceux appartenant à la saisine du magistrat instructeur.

Par arrêt rendu le 8 août 2007 [3], la Chambre criminelle a déjà jugé qu’il incombait au juge des libertés et de la détention d’exercer le contrôle prévu par les alinéas 4 à 7 de l’article 56-1 du Code de procédure pénale « afin de rechercher si la saisie des données informatiques ne portait pas atteinte au libre exercice de la profession d’avocat, au respect du secret professionnel et à celui des droits de la défense ».

Le Bâtonnier est un protecteur des droits de la défense qui doit bénéficier d’une information sérieusement motivée qui lui est réservée sous peine d’excès de pouvoir du JLD. Cette solution a été dégagée à trois reprises par la Cour de cassation.

Son rôle ne se limite pas à la seule défense du secret professionnel. Certes le texte de l’article 56-1 du Code de procédure pénale est muet et mérite d’être entièrement réécrit alors que l’article 56 alinéa 3 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L8552LXZ) définit l’OPJ comme gardien du secret professionnel et des droits de la défense en perquisition : « Toutefois, sans préjudice de l'application des articles 56-1 à 56-5, il a l'obligation de provoquer préalablement toutes mesures utiles pour que soit assuré le respect du secret professionnel et des droits de la défense ».

Ajoutons également que les solutions dégagées pour le Bâtonnier sont aussi valables pour le vice-Bâtonnier qui devra être mentionné par des termes identiques dans le texte lors d’une prochaine et urgente réforme pour actualiser le texte de l’article 56-1 du Code de procédure pénale aux solutions jurisprudentielles.

Ainsi, une décision de perquisition non motivée trompe le Bâtonnier ou son délégué privé de l’information que le magistrat doit lui réserver sauf à vouloir l’induire en erreur par l’omission et par la rétention dolosives d’informations essentielles à la compréhension de la mesure intrusive et au bon déroulement de l’audience du JLD d’autant que le Bâtonnier n’a pas accès au dossier pénal, contrairement au magistrat qui perquisitionne et au JLD.

Pour autant, la Chambre criminelle ne définit pas à proprement parler le contenu de la motivation de la décision de perquisition. Elle fustige à partir d’une analyse du dossier pénal auquel ni le Bâtonnier ni le perquisitionné n’ont accès, le fait d’avoir saisi des éléments « saisis hors saisine » pour marquer a posteriori l’insuffisance de motivation de la décision de perquisition.

En effet, elle retient que « L’ordonnance de perquisition, prise par le juge d’instruction, n’identifie pas les différents marchés publics visés par le réquisitoire introductif, ne contient pas les noms des personnes susceptibles d’avoir été victimes de harcèlement, visées au réquisitoire introductif, ne précise pas le document informatique qui aurait été supprimé de manière illégale, cette précision se trouvant dans le réquisitoire introductif, et n’indique pas la nature des documents qui auraient été falsifiés, ni des faux documents dont il aurait été fait usage. Cette ordonnance ne mentionne pas tous les marchés publics visés par le réquisitoire supplétif, et n’indique pas, en particulier, que la saisine du juge d’instruction s’étendait au projet de SEMOP, alors que des documents relatifs à ce projet ont été saisis par le juge d’instruction au cours de la perquisition ».

Mais elle ne formule pas expressément dans le texte l’exigence d’indices proprement dit antérieurs à la perquisition de la participation de l’avocat à la commission d’une infraction. En tout cas elle s’abstient d’en employer les termes stricto sensu alors qu’elle en formule l’exigence à propos du « degré de participation de l’avocat concerné » par ses critiques contre l’ordonnance du JLD dans les termes suivants « Il suit de là que le Bâtonnier, chargé de la protection des droits de la défense, n’a pas reçu, au début de la perquisition, les informations lui permettant de connaître les motifs de celle-ci, ainsi que son objet, qui comprenait la recherche de documents portant sur le marché public du projet de S..., afin de déterminer le degré de participation à celui-ci de l’avocat concerné. Il en résulte que cette imprécision de l’ordonnance de perquisition a porté atteinte aux droits de la défense ».

Pourtant par son arrêt du 22 mars 2016 [4] dans une espèce relative à l’annulation d’une perquisition concernant des magistrats dans ses propres locaux, la Chambre criminelle avait affirmé l’exigence du constat d’indices nécessairement antérieurs à la perquisition contre les magistrats eux-mêmes comme condition impérative à la perquisition chez certains de ses membres :

« Mais attendu qu’en refusant d’annuler la saisie de l’avis du rapporteur et du projet rédigé par lui, alors que cette appréhension n’était pas indispensable à la recherche de la preuve d’un trafic d’influence, dont seul était suspecté un magistrat étranger à la Chambre criminelle, qu’il n’existait aucun indice de participation d’un membre de la formation de jugement ayant participé au délibéré à une quelconque infraction et qu’en conséquence, en procédant ainsi, les juges d’instruction avaient porté une atteinte non nécessaire au secret du délibéré, la chambre de l’instruction a méconnu le texte susvisé et le principe énoncé ci-dessus ».

Pour sa part, le JLD a jugé à plusieurs reprises que la perquisition supposait la démonstration d’indices antérieurs « effectifs » préexistants/ antérieurs à la perquisition. Ainsi un avocat ne peut plus être perquisitionné parce qu’il détiendrait simplement « les pièces de la fraude » soit les pièces que son client lui a remises et qui d’ailleurs constituent les « pièces du dossier » couvertes par le secret au sens de l’article 2.2 du RIBP sans que soient pour autant marqués contre lui des indices antérieurs de sa participation à la commission d’une infraction en fait reprochée au client lui-même.

S’agissant de la jurisprudence du JLD, une première ordonnance du JLD de Rennes du 8 mars 2013 a consacré le principe de la présomption d’innocence au bénéfice des avocats : « S’agissant plus particulièrement des pièces échangées entre un avocat et son client dans le cadre de la défense pénale de ce dernier, la saisie n’est susceptible de concerner que les pièces qui sont de nature à faire suspecter l’implication de l’avocat lui-même dans la commission de l’infraction reprochée à son client. Il n’est évidemment pas nécessaire au stade de la perquisition que soit démontrée la culpabilité de l’avocat, lequel est présumé innocent, mais simplement qu’il existe au regard des pièces, des indices de la possible commission d’une infraction dont l’information devra confirmer ou infirmer l’existence. A cet égard, il convient d’observer que les pièces éventuellement versées à la procédure peuvent constituer des éléments à charge comme à décharge ».  

Une autre ordonnance du JLD de Paris du 9 octobre 2014 retient qu’au stade de la perquisition qu’il n’est « aucunement démontré que les téléphones portables utilisés par Me X ont été utilisés à des fins délictueuses ou criminelles, ou dans la préparation des faits, objets de l’information en cours » et les restitue.

Cette ordonnance ajoute, concernant le rôle du JLD, que ce magistrat doit « exercer un contrôle suffisamment rigoureux de nature à éviter, sous quelque forme que ce soit, que soit portée une quelconque atteinte au libre exercice de la profession d’avocat, au respect du secret professionnel et à celui des droits de la défense mais aussi au respect de la confidentialité qui s’attache aux fonctions de Bâtonnier en exercice, dans sa relation avec l’ensemble des confrères de son Barreau ».

Il a été jugé par ordonnance du JLD de Paris du 7 octobre 2016 que : « Le secret professionnel d’un avocat ne peut être évincé que s’il existe des indices effectifs de la participation de cet avocat à la commission d’une infraction, indices qui doivent préexister à la perquisition et résulter intrinsèquement du contenu de chacune des pièces saisies ». En outre, par cette même décision, le JLD a jugé que « la protection du secret professionnel fait obstacle à la saisie de pièces uniquement utiles à la détermination des circonstances d’une infraction ayant pu être commise par ailleurs » .

Relevons en outre l’ordonnance du JLD de Versailles du 26 mai 2017 qui retient que : « Le secret professionnel de l’avocat n’a pas un caractère absolu et les dispositions précitées (loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques art. 66-5 N° Lexbase : L6343AGZ) ne s’opposent pas à la saisie chez l’avocat des pièces :

- qui sont nécessaires à la manifestation de la vérité,

- mais à la condition que celles-ci ne soient pas relatives à l’exercice des droits de la défense,

- cette dernière restriction pouvant être levée seulement en cas de suspicion d’implication de l’avocat concerné dans l’infraction (…)

Qu’ainsi, le document saisi, nonobstant son utilité pour la manifestation de la vérité, bénéficie de la protection absolue des droits de la défense s’agissant d’une correspondance entre avocats où sont abordées des données confidentielles relatives à leurs clients respectifs et leurs intérêts.

Que faute d’éléments constitutifs d’une présomption d’implication de l’avocat dans l’infraction concernée, il ne saurait être dérogé au principe de la protection du secret professionnel.

Qu’il convient par conséquent d’invalider la saisie…, d’en ordonner la restitution… et d’ordonner la cancellation de toutes références aux documents restitués ou à leur contenu qui figureraient dans le dossier de la procédure ».

Également, une ordonnance du JLD de Paris du 2 avril 2017 retient qu’il y a lieu de « considérer que la perquisition litigieuse, qui par sa nature intrusive pourrait générer une atteinte excessive à la renommée du cabinet d’avocats, a été conduite en l’espèce avec mesure et célérité, sans priver l’avocat des originaux nécessaires au libre exercice de sa profession ».

Par conséquent, un document couvert par le secret professionnel, même s’il est objectivement utile à la manifestation de la vérité, ne peut être versé en procédure que s’il permet de caractériser « une présomption d’implication », en d’autres termes, des indices de la participation de l’avocat à la commission d’une infraction, appréciation qui devra se faire de manière intrinsèque.

Par ordonnance du 30 octobre 2018, le JLD de Paris a jugé « qu’il (l’élément saisi) ne contient pas d’indice suffisant et déterminant de la participation de Maître X aux infractions visées, étant observé par ailleurs, la faiblesse des éléments ayant motivé la perquisition de son cabinet, que l’atteinte portée au secret professionnel de l’avocat apparait disproportionnée ».

Par une ordonnance du 17 avril 2019, le JLD de Paris a jugé que « si le secret ainsi défini ne peut revêtir un caractère absolu de nature à faire échec aux dispositions du Code de procédure pénale, cette protection doit être strictement appréciée et ne peut connaitre de dérogation concernant l’exercice des droits de la défense que lorsque les documents saisis sont susceptibles d’établir ou non l’existence, la révélation intrinsèque des infractions reprochées à l’encontre de l’avocat ».

Par ordonnance rendue le 19 avril 2019, le JLD de Paris a jugé que « si le secret… ne peut revêtir un caractère absolu de nature à faire échec aux dispositions du Code de procédure pénale, cette protection doit être strictement appréciée et ne peut connaitre de dérogations concernant l’exercice des droits de la défense que lorsque les documents saisis sont susceptibles d’établir ou non l’existence la révélation intrinsèque des infractions reprochées à l’encontre de l’avocat ».

Par ordonnance rendue le 26 avril 2019, le JLD de Paris a jugé que « attendu néanmoins que le secret professionnel de l’avocat ne saurait avoir un caractère absolu et que les dispositions précitées ne s’opposent pas à la saisie chez l’avocat des pièces qui seraient de nature à démontrer son implication dans l’infraction, ou des pièces qui, dès lors qu’elles ne sont pas relatives à l’exercice des droits de la défense, sont nécessaires à la manifestation de la vérité et en relation directe avec l’infraction ».

Par ordonnance rendue le 29 avril 2019, le JLD de Paris a jugé que « si le secret ainsi défini ne peut revêtir un caractère absolu de nature à faire échec aux dispositions du Code de procédure pénale, cette protection doit être strictement appréciée et ne peut connaître de dérogations concernant l’exercice des droits de la défense que lorsque les documents saisis dans le cadre de l’information judiciaire sont susceptibles en l’espèce d’établir ou non à l’encontre de Maître X les infractions de (…) ».

Par une ordonnance du 3 juillet 2019, le JLD de Paris a jugé à propos des documents officiels, c’est-à-dire ceux qui ne sont pas relatifs à l’exercice des droits de la défense, que : « Si le secret ainsi défini ne peut revêtir aucun caractère absolu de nature à faire échec aux dispositions du Code de procédure pénale, cette protection doit être strictement appréciée et ne peut connaitre de dérogations concernant l’exercice des droits de la défense que lorsque les documents saisis sont susceptibles d’établir ou non l’existence des infractions reprochées à l’encontre de l’avocat.

Ainsi, il y a lieu de distinguer d’une part, les documents qui ne sont pas couverts par le secret professionnel et qui peuvent être versés à la procédure s’ils sont utiles à la manifestation de la vérité, et d’autre part, les documents couverts par le secret professionnel et qui ne peuvent être versés à la procédure d’instruction qu’à la condition qu’ils manifestent l’indice de la participation de l’avocat à l’infraction objet de la poursuite (…) ».

La CEDH par l’arrêt « André » (CEDH, 24 juillet 2008, André c. France, Req. 18603/03, N° Lexbase : A8281D9L) avait déjà dégagé cette solution et il est heureux de voir la Chambre criminelle de la Cour de cassation converger une fois encore dans le même sens qui par voie de conséquence fustige le fait de perquisitionner un avocat pour des faits reprochés à son seul client : « Ensuite, et surtout, la Cour constate que la visite domiciliaire litigieuse avait pour but la découverte chez les requérants, en leur seule qualité d’avocats de la société soupçonnée de fraude, de documents susceptibles d’établir la fraude présumée de celle-ci et de les utiliser à charge contre elle. A aucun moment les requérants n’ont été accusés ou soupçonnés d’avoir commis une infraction ou participé à une fraude commise par leur cliente ».

III - Reste l’impossibilité d’apprécier l’existence ou non d’indices faute d’accès au dossier par le Bâtonnier ou son délégué :

La perquisition, par sa nature intrusive, génère nécessairement une atteinte excessive aux droits de la défense et au secret professionnel que le Bâtonnier ou son délégué est dans l’obligation de contester à charge pour le magistrat de saisir le JLD.

En outre, le délégué du Bâtonnier se heurte en fait à l’impossibilité d’apprécier l’existence ou non des indices mentionnés à la décision de perquisition ou invoqués en cours de perquisition comme en l’occurrence, faute d’accès au dossier pénal dont aucune règle d’ailleurs n’interdit la communication lors de la perquisition comme lors de l’audience du JLD à son profit.

En effet, qu’il s’agisse des pièces et objets, documents papiers ou dématérialisés copiés ou non sur un support par le magistrat saisissant, couverts par le secret professionnel ou officiels, le Bâtonnier ou le délégué du Bâtonnier est par principe dans l’incapacité d’apprécier si ces objets et éléments contiennent ou non l’indice de la participation de l’avocat - présumé innocent - à la commission d’une infraction faute d’avoir accès au dossier pénal dont l’absence de communication empêche l’exercice d’un contrôle suffisamment rigoureux de nature à éviter que soit portée une quelconque atteinte au libre exercice de la profession d’avocat et au respect du secret professionnel.

Une réforme des textes s’impose sur ce point.

Surtout, cet arrêt de la Chambre criminelle ouvre aussi une autre perspective sur les rapports entre magistrats et avocats qu’il est urgent de véritablement reconstruire dans une relation plus que jamais apaisée loin des paroxysmes inutiles à une bonne vie judiciaire respectueuse des droits et des êtres. Que des incidents ponctuels qui participent de la liberté d’expression, que revendiquent de manière absolue à l’audience certains magistrats comme les avocats, s’interposent dans le débat judiciaire fusse de manière vécue comme violente par les mots est une chose. Vouloir en revanche la « guerre » - le mot est fréquemment employé - et son inévitable cortège d’horreurs en est une autre. Il est regrettable que ne soit pas à l’ordre du jour des réformes de la Chancellerie, faute de « temps » semble-t-il, le « souhait » du Garde des Sceaux EDM de réformer l’ENM « ferment du corporatisme » qu’il dénonce et dans la foulée d’organiser la fusion avec les écoles d’avocats. Une formation commune, au moins sur  quelques  thèmes essentiels,  des avocats et des magistrats s’impose impérativement comme un socle de valeurs partagées et de respect mutuel. Vraiment qui donc parmi les avocats et les magistrats veut réellement le désastre et le chaos comme mode de résolution des litiges ? Les enchères sont ouvertes entre défenseurs de l’intérêt public et défenseurs des intérêts privés. Sincèrement.

 

[1] Cass. QPC, 8 janvier 2013, n° 12-90.063, F-D (N° Lexbase : A5069I37).

[2] Cass. crim., 9 février 2016, n° 15-85.063, FS-P+B (N° Lexbase : A0246PLP).

[3] Cass. crim., 8 août 2007, n° 07-84.252, F-P+F (N° Lexbase : A0577DYZ).

[4] Cass. crim., 22 mars 2016, n° 15-83.207, FS-P+B (N° Lexbase : A7140Q9C).

newsid:474317

Commercial

[Brèves] Futur guichet unique électronique pour les formalités des entreprises : désignation de l’INPI

Réf. : Décret n° 2020-946 du 30 juillet 2020, relatif à la désignation de l'Institut national de la propriété industrielle en tant qu'organisme unique mentionné à l'article 1er de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019, relative à la croissance et la transformation des entreprises (N° Lexbase : L8142LXT)

Lecture: 2 min

N4363BYA

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par Vincent Téchené

Le 03 Septembre 2020

► Un décret, publié au Journal officiel du 1er août 2020, désigne l'Institut national de la propriété industrielle (INPI) en tant qu'opérateur du guichet unique électronique des formalités d'entreprises prévu par l'article 1er de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019, relative à la croissance et la transformation des entreprises (N° Lexbase : L3415LQK).

En effet, l’article 1er de la loi « PACTE » a substitué aux sept réseaux de CFE existants un guichet électronique unique (C. com., art. L. 123-33, nouv. N° Lexbase : L8959LQU ; lire V. Téchené, Loi « PACTE » : la création et l’exercice de l’activité des entrepreneurs individuels « facilités », Lexbase Affaires, mai 2019, n° 595 N° Lexbase : N9019BXC).

Le décret confie à l'INPI la gestion de deux services informatiques actuellement gérés par l'État. Le premier de ces services permet aux créateurs d'entreprise et aux entreprises d'accomplir par voie électronique, d'une part, les formalités liées à la création, à la modification de la situation et à la cessation d'activité des entreprises et, d'autre part, les formalités liées à l'accès à une profession réglementée entrant dans le champ de la Directive relative aux services dans le marché intérieur (Directive n° 2006/123 du 12 décembre 2006 N° Lexbase : L8989HT4) et à l'exercice de cette activité. Le deuxième service informatique permet aux ressortissants de l'Union européenne et des États parties à l'accord sur l'Espace économique européen d'accomplir par voie électronique les procédures et exigences en matière de reconnaissance, pour l'exercice d'une profession réglementée en France, de la qualification professionnelle acquise dans un État membre de l'Union européenne ou de l'Espace économique européen, notamment pour la réalisation de formalités d'entreprises.

newsid:474363

Concurrence

[Brèves] Contrôle des concentrations : publication des nouvelles lignes directrices de l’Autorité de la concurrence

Réf. : Aut. conc., lignes directrices, 23 juillet 2020

Lecture: 3 min

N4278BY4

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par Vincent Téchené

Le 03 Septembre 2020

► L’Autorité de la concurrence a publié, le 23 juillet 2020, ses nouvelles lignes directrices relatives au contrôle des concentrations.

Le 20 avril 2019, la publication d'un décret portant simplification de la procédure de notification d'une opération de concentration à l'Autorité de la concurrence (décret n° 2019-339 du 18 avril 2019 N° Lexbase : L0098LQP ; lire N° Lexbase : N8736BXT) a déjà permis une simplification substantielle des démarches des entreprises, en allégeant le formulaire de notification et en réduisant son formalisme. En octobre 2019, l’Autorité a également ouvert la possibilité pour les entreprises de notifier en ligne certaines opérations de rachats ou de fusion, par le biais d’une plate-forme dédiée.

Ces nouvelles lignes directrices ont pour objectif de fournir aux entreprises et à leurs conseils une présentation pédagogique sur le champ d’application du contrôle des concentrations en France, sur le déroulement de la procédure devant l’Autorité de la concurrence et sur les objectifs, critères et méthodes employés pour les analyses au fond.

Les nouvelles lignes directrices adoptent une architecture nouvelle et plus didactique. Pour mémoire, les lignes directrices rappellent les contraintes qui pèsent sur les entreprises lors du dépôt d’un projet de concentration et les comportements qu’elles doivent adopter lors de la période de préparation de l’opération. Par ailleurs, les lignes directrices identifient les opérations qui ne sont, a priori, pas susceptibles de générer de préoccupations de concurrence.

Afin d’anticiper la notification prochaine d’une opération de concentration, les entreprises peuvent désormais se rapprocher du service des concentrations en vue de formuler une demande de désignation d’une équipe en charge de l’examen du dossier. À la suite de cette demande, le nom de l’adjoint au chef de service chargé de l’examen du dossier est communiqué à la partie notifiante dans un délai de cinq jours ouvrés. L’Autorité de la concurrence s’engage en outre à ce qu’une réponse concernant la complétude, id est le caractère complet, des dossiers de notification soit généralement apportée dans un délai de dix jours ouvrés après la notification. L’Autorité introduit également un délai indicatif de dix jours ouvrés pour confirmer si une opération pourra être traitée selon la procédure simplifiée, ce qui confère à la partie notifiante davantage de visibilité pour organiser le calendrier de finalisation de son opération.

Certains aspects de la présentation de l’analyse concurrentielle ont été clarifiés, notamment s’agissant de l’horizon temporel dans lequel se place l’analyse prospective.

Les nouvelles lignes directrices incluent également de nouvelles annexes, avec un modèle d’engagement structurel et un modèle de contrat de mandat à jour des évolutions récentes de la pratique décisionnelle et des précisions sur les demandes de documents internes susceptibles d’être formulée par l’Autorité en cours d’instruction.

Elles entrent en vigueur le 23 juillet 2020 et se substituent aux précédentes lignes directrices du 4 juillet 2013.

newsid:474278

Consommation

[Brèves] Encadrement du démarchage téléphonique et lutte contre les appels frauduleux : publication de la loi au Journal officiel

Réf. : Loi n° 2020-901 du 24 juillet 2020, visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux (N° Lexbase : Z481199X)

Lecture: 4 min

N4282BYA

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Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/60143291-edition-n-834-du-03092020#article-474282
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par Vincent Téchené

Le 03 Septembre 2020

► La loi n° 2020-901 du 24 juillet 2020, visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux, a été publiée au Journal officiel du 26 juillet 2020 ; elle a pour objectif de renforcer les garanties des consommateurs.

Démarchage téléphonique : renforcement des obligations des professionnels. L’article 1er modifie l’article L. 223-1 du Code de la consommation (N° Lexbase : L1537K73) qui permet déjà à un consommateur de s’inscrire sur la liste d'opposition au démarchage téléphonique et interdit à un professionnel de démarcher un consommateur qui se serait inscrit sur cette liste.

La loi ajoute l’interdiction de toute prospection commerciale par voie téléphonique, ayant pour objet la vente d'équipements ou la réalisation de travaux pour des logements en vue de la réalisation d'économies d'énergie ou de la production d'énergies renouvelables, à l'exception des sollicitations intervenant dans le cadre de l'exécution d'un contrat en cours.

Par ailleurs, la loi fait désormais obligation aux professionnels de saisir Bloctel pour s'assurer de la conformité de leurs fichiers de prospection commerciale avec la liste d'opposition au démarchage téléphonique et de respecter un code de bonnes pratiques déterminant les règles déontologiques applicables au démarchage téléphonique.

Le professionnel qui a tiré profit de sollicitations commerciales par voie téléphonique en violation de ces dispositions est présumé responsable de leur non-respect, sauf s'il démontre qu'il n'est pas à l'origine de leur violation.
En outre, tout contrat conclu avec un consommateur à la suite d'un démarchage téléphonique réalisé en violation de ces dispositions est nul.

Les professionnels qui contactent par téléphone une personne en vue de la réalisation d'une étude ou d'un sondage doivent également respecter des règles déontologiques, rendues publiques, ces règles devant notamment préciser les jours et horaires ainsi que la fréquence auxquels les appels téléphoniques aux fins de réalisation d'études ou sondages sont autorisés.

Renforcement significatif du montant des amendes administratives. Les amendes aujourd'hui encourues ne peuvent excéder 3 000 et 15 000 euros, selon qu'il s'agit d'une personne physique ou morale. Les articles 5, 6, 7 et 8 de la loi relèvent ces montants à 75 000 euros et 375 000 euros en cas de non-respect du cadre législatif relatif :

- au démarchage téléphonique ;

- à l’information du consommateur lors d'un appel de prospection commerciale ;

- à linterdiction des appels masqués ;

- au consentement préalable du consommateur pour la prospection commerciale automatisée.

En cas d’infraction à la législation sur le démarchage téléphonique, l’article 12 prévoit que la décision rendue par la DGCCRF est publiée aux frais de la personne sanctionnée. En outre, elle peut décider de reporter la publication d'une décision, de publier cette dernière sous une forme anonymisée ou de ne pas la publier dans l'une ou l'autre lorsque certaines circonstances l’imposent.

Contrat d'un éditeur de service à valeur ajoutée frauduleux. L’article 10 de la loi définit, pour sa part, les conditions dans lesquelles les opérateurs de communications électroniques exploitant un numéro affecté à un service à valeur ajoutée peuvent suspendre ou résilier le contrat avec un éditeur frauduleux, tout en permettant la suspension de l'accès au numéro pour les abonnés d'un fournisseur d'un service téléphonique au public.

Saisine de l'autorité judiciaire par la DGCCRF. L’article 11 de la loi encadre la saisine de l'autorité judiciaire par la DGCCRF aux fins d'enjoindre aux fournisseurs d'un service téléphonique au public ou aux opérateurs de communications électroniques de prévenir ou faire cesser un dommage causé par un numéro à valeur ajoutée. Elle peut ainsi demander à l'autorité judiciaire de prescrire en référé ou sur requête toutes mesures proportionnées propres à prévenir ou à faire cesser un dommage causé par un service à valeur ajoutée. Elle peut notamment demander à l'autorité judiciaire de prescrire de ne pas affecter au fournisseur de service à valeur ajoutée de nouveaux numéros pouvant être surtaxés pendant une durée qui ne peut excéder un an.

newsid:474282

Copropriété

[A la une] Dossier spécial - Volet réglementaire de la réforme du droit de la copropriété

Réf. : Décret n° 2020-834, du 2 juillet 2020, pris pour l'application de l'ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis et relatif à diverses mesures concernant le fonctionnement de la copropriété (N° Lexbase : L5804LXA)

Lecture: 3 min

N4392BYC

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 03 Septembre 2020

Ô combien attendu par l’ensemble des professionnels - alors que la réforme du droit de la copropriété opérée par l’ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019 (N° Lexbase : Z955378U), et entrée en vigueur le 1er juin 2020, restait en partie inapplicable faute de parution du volet réglementaire -, le décret d’application a été publié au Journal officiel du 3 juillet 2020 (décret n° 2020-834, du 2 juillet 2020, pris pour l'application de l'ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis et relatif à diverses mesures concernant le fonctionnement de la copropriété N° Lexbase : L5804LXA ; complété par l’arrêté, du même jour, fixant le modèle de formulaire de vote par correspondance aux assemblées générales de copropriétaires N° Lexbase : L5872LXR).

Ce texte vient donc parachever le premier acte (constitué par l’ordonnance du 30 octobre 2019, et sous réserve, bien entendu, de la loi de ratification) de la réforme d’ensemble du droit de la copropriété, portée par la loi « ELAN » (loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 N° Lexbase : L8700LM8), dont l’article 215 (I et II), habilitait le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance, en deux temps, sous des échéances respectives de douze et vingt-quatre mois, en vue d’intervenir d’abord sur le fond, puis sur la forme. Une seconde ordonnance doit donc, en principe, paraître d’ici le mois de novembre 2020, en ayant pour objet la création d’un « Code de la copropriété ».

Après (re)lecture du premier dossier consacré à l’acte I de cette réforme, paru en décembre 2019, commentant l’ordonnance du 30 octobre 2019 (Lexbase, Droit privé, n° 806, décembre 2019), le lecteur pourra donc appréhender dans le détail le contenu de ce décret du 2 juillet 2020, qui réécrit en grande partie le décret n° 67-223 du 17 mars 1967 (N° Lexbase : L8032BB4), à travers le présent dossier, composé des articles suivants.

  • Les travaux et les charges de copropriété, après le décret du 2 juillet 2020, Par Julien Prigent, Avocat au barreau de Paris, Mutelet-Prigent et associés (N° Lexbase : N4404BYR)
  • Les assemblées générales de copropriétaires après le décret n° 2020-834 du 2 juillet 2020, par Vivien Zalewski-Sicard, Enseignant-chercheur, Université Toulouse Capitole, IEJUC (N° Lexbase : N4371BYK)
  • Le conseil syndical après le décret du 2 juillet 2020 : précisions sur la mise en œuvre des délégations de pouvoirs, par Marine Parmentier, Avocat au barreau de Paris, Woog et associés (N° Lexbase : N4372BYL)
  • Le syndic de copropriété et son contrat après le décret du 2 juillet 2020, par Pierre-Edouard Lagraulet, Docteur en droit, chargé d’enseignement à l’IUT de Bordeaux (N° Lexbase : N4373BYM)
  • Les petites copropriétés et les copropriétés à deux personnes, précisées par le décret du 2 juillet 2020, par Marine Parmentier, Avocat au barreau de Paris, Woog et associés (N° Lexbase : N4393BYD)
  • Les notifications et mises en demeures par voie électronique en droit de la copropriété après le décret du 2 juillet 2020, par Pierre-Edouard Lagraulet, Docteur en droit, chargé d’enseignement à l’IUT de Bordeaux ({"IOhtml_internalLink": {"_href": {"nodeid": 60142884, "corpus": "reviews"}, "_target": "_blank", "_class": "color-reviews", "_title": "[Textes] Les notifications et mises en demeure par voie \u00e9lectronique en droit de la copropri\u00e9t\u00e9 apr\u00e8s le d\u00e9cret du 2 juillet 2020", "_name": null, "_innerText": "N\u00b0\u00a0Lexbase\u00a0: N4377BYR"}}).

newsid:474392

Copropriété

[Textes] Le syndic de copropriété et son contrat après le décret du 2 juillet 2020

Réf. : Décret n° 2020-834, du 2 juillet 2020, pris pour l'application de l'ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis et relatif à diverses mesures concernant le fonctionnement de la copropriété (N° Lexbase : L5804LXA)

Lecture: 19 min

N4373BYM

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par Pierre-Edouard Lagraulet, Docteur en droit, chargé d’enseignement à l’IUT de Bordeaux

Le 02 Septembre 2020

 


Mots clés : copropriété • réforme • syndic • contrat de syndic

Le présent article est extrait d’un dossier spécial consacré au volet réglementaire de la réforme du droit de la copropriété, paru dans la revue Lexbase, Droit privé, n° 834 du 3 septembre 2020 (N° Lexbase : N4392BYC).


 

Le décret du 2 juillet 2020 consacre deux chapitres au syndic de copropriété et à son contrat afin de mettre en œuvre les dispositions de l’ordonnance du 30 octobre 2019 dont la loi de ratification n’est toujours pas adoptée. C’est dire si, à nouveau, le droit de la copropriété focalise l’attention des pouvoirs publics et en particulier les dispositions relatives au représentant du syndicat des copropriétaires

Nous présenterons ici successivement ces deux chapitres, ceux-ci ne présentant que peu de liens entre eux, à l’exceptions de quelques dispositions que nous présenterons alors mutuellement à l’occasion de l’étude du premier relatif aux fonctions du syndic, ce pour plus de clarté.  

Dans tous les cas, nous laisserons largement de côté les modifications apportées au contrat de syndic qui ne font que transcrire les nouvelles dispositions de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L5536AG7) résultant de l’ordonnance du 30 octobre 2019 (N° Lexbase : Z955378U). Par exemple, l’article 50 du décret du 2 juillet 2020 ajoute une clause relative à la résiliation du contrat de syndic à l’initiative du conseil syndical. Cette clause transcrit la mesure issue de l’ordonnance ayant modifié le régime de résiliation du contrat. Sans autre précision apportée au décret, nous renvoyons ainsi le lecteur aux études qui ont pu être rédigées sur ce sujet et publiées par la présente revue au dossier spécialement consacré à la réforme de la loi de 1965 [1]. Nous laisserons, enfin, de côté les mesures de pure coordination ou dite de « correction légistique » des articles 33-2 et 35 2°, 3° et 39 du décret du 2 juillet 2020.

I. Mesures relatives au syndic

Exception à la durée maximale des fonctions de syndic. - L’article 28 du décret de 1967 (décret n° 67-223 du 17 mars 1967 N° Lexbase : L8032BB4) est modifié par l’article 28 du décret du 2 juillet 2020 afin d’étendre la limitation de la durée des fonctions du syndic à une année au cas où son concubin a directement ou indirectement, à quelque titre que ce soit, participé à la construction de l’immeuble. Cette limitation s’applique pendant toute la durée des délais prévus à l’article 1792-4-1 du Code civil (N° Lexbase : L7166IAN), c’est-à-dire jusqu’à l’expiration de la garantie décennale.

Dans un mouvement inverse, la règlementation ayant été jugée trop sévère, si ce n’est exagérée, cette limitation ne s’appliquera plus aux parents ou alliés jusqu’au troisième degré mais seulement jusqu’au deuxième degré. Ne sont donc plus concernés les syndics dont les oncles, tantes, neveux et nièces, ou plus rare, les arrière-grands-parents, ont participé, même par personne interposée, à la construction de l’immeuble. La modification met ainsi en cohérence cette dérogation avec la liste des personnes inéligibles aux fonctions de membre du conseil syndical étendue au concubin du syndic et également limitée à leurs parents et alliés jusqu’au deuxième degré [2].

Précisons que compte tenu de la portée limitée de la réforme, la solution retenue par la troisième chambre civile de la Cour de cassation le 2 décembre 2009 [3] devrait continuer de s’appliquer. C’est pourquoi la limitation de la durée des fonctions à un an doit être retenue même lorsque le syndic, ou les personnes visées par l’article 28 du décret de 1967, a perdu la qualité justifiant l’application de la règle et ce jusqu’à l’expiration de la garantie décennale.

Suppression de la dispense d’ouverture d’un compte bancaire. - L’article 29-1 du décret de 1967 est abrogé par l’article 29 du décret du 2 juillet 2020. L’article précisait le régime de la dispense d’ouverture d’un compte bancaire séparé. Depuis l’ordonnance du 30 octobre 2019 (art. 15), cette dispense ne peut plus être accordée et tous les syndicats devront bénéficier d’un tel compte. La mesure est donc logiquement supprimée. Elle ne le sera toutefois qu’au 31 décembre 2020, par application de l’article 53 du décret, puisqu’un délai a été laissé par l’ordonnance de 2019 afin de laisser le temps jugé nécessaire aux syndics d’ouvrir un compte bancaire séparé pour chaque syndicat.

En conséquence, le contrat de syndic est modifié par la suppression de l’alinéa 2 du point 7.1.4 qui indiquait que le syndicat pouvait dispenser le syndic d’ouvrir un compte bancaire ou postal séparé. Les annexes 1 et 2 sont également modifiées afin de supprimer toute référence au compte bancaire non séparé (décret du 2 juillet 2020, art. 50).

Délivrance de copies ou extraits des procès-verbaux des décisions adoptées hors assemblées générales. - L’article 30 du décret du 2 juillet 2020 ajoute un alinéa à l’article 33 du décret de 1967 (N° Lexbase : Z78759SS) afin de préciser les modalités de délivrance des copies ou extraits des procès-verbaux des décisions prises selon les nouvelles modalités résultant de l’ordonnance du 30 octobre 2019 ; c’est-à-dire par voie de consultation dans les petites copropriétés, par un seul copropriétaire ou à l’occasion d’une réunion des copropriétaires sans convocation préalable pour les copropriétés à deux, ainsi que par le conseil syndical exerçant un pouvoir délégué par l’assemblée générale en application du nouvel article 21-1 de la loi de 1965 (N° Lexbase : L4206LX3).

Ces copies ou extraits devront être délivrés, dans les mêmes conditions que les copies ou extraits des procès-verbaux des assemblées générales. Le syndic devra donc les certifier. Étonnamment, aucune modification n’est apportée pour cette nouvelle tâche au contrat de syndic. En conséquence, le syndic ne pourra pas au titre des prestations particulières facturer de frais de délivrance d’une copie certifié sur support papier, seul celle de l’assemblée générale étant visée.

Dans la mesure où ces copies ou extraits sont délivrés « dans les mêmes conditions » que les copies ou extraits de procès-verbaux d’assemblée générale, la jurisprudence relative à la délivrance de ces documents devrait logiquement s’étendre aux nouveaux documents visés par l’article 33 et par conséquent obliger le syndic à les délivrer sans pouvoir apprécier l’utilité ou la légitimité de la demande [4].

Transmission au nouveau syndic d’archives dématérialisées. - L’article 31 du décret du 2 juillet 2020 ajoute, à l’article 33-1 du décret de 1967 (N° Lexbase : Z78761SS), l’obligation pour l’ancien syndic de transmettre au nouveau l’ensemble des documents dématérialisés relatifs à la gestion de l’immeuble ou aux lots gérés figurant dans l’espace en ligne sécurisé prévu au dixième alinéa du I de l’article 18 de la loi de 1965 (N° Lexbase : Z13556RS). Cette obligation n’a toutefois cours qu’à défaut de dispense accordée au syndic par l’assemblée générale de proposer un accès en ligne. Ce n’est que « le cas échéant », comme le précise l’article 33-1 modifié, à l’instar de l’article 18-2 de la loi de 1965 (N° Lexbase : L4815AHS), que le syndic se trouvera obligé par cette nouvelle disposition. Cette corrélation nous paraît pourtant regrettable dans la mesure où l’obligation de transmission des archives est distincte de leur mise à disposition des copropriétaires en cours de mandat.

L’ancien syndic devra ainsi remettre, le cas échéant donc, l’ensemble des archives papier qu’il détient ainsi que les documents dont la liste minimale a été définie par décret du 23 mai 2019 [5]. Selon ces dispositions, certains documents sont accessibles à certains copropriétaires, d’autres à tous les copropriétaires et enfin aux membres du conseil syndical. Il faut ici constater, en raison de l’obligation de transmettre « l’ensemble des documents », que le syndic devra remettre les documents sans distinction des catégories de personnes auprès de qui ils sont mis à disposition. La référence maladroite aux documents relatifs aux « lots gérés » doit s’entendre, nous semble-t-il, comme les documents accessibles à certains copropriétaires, c’est-à-dire, relatifs à leurs lots tels que les appels de fonds. Le syndic devra enfin remettre ses attestations d’assurance, carte professionnelle et garantie financière qui font partie de la liste des documents obligatoires à mettre en ligne.

Si l’objet de la transmission est défini, comme nous venons de le voir, les modalités de remise de ces documents ne sont pas précisées et le syndic sera donc libre de les transmettre par la remise d’une clef USB, d’un cédérom ou encore par un envoi dématérialisé sécurisé.  La seule condition, qui est étonnamment fixée par la loi et non le décret, figure à l’article 18-2 de la loi de 1965 : « les documents devront être remis dans un format téléchargeable et imprimable ».

Quelle que soit la modalité de remise, celle-ci devra intervenir dans les mêmes conditions que pour les archives physiques, c’est-à-dire dans le même délai et devra être accompagnée d’un bordereau récapitulatif des pièces dont une copie est remise au conseil syndical, ce qui est assez peu pratiqué.

À défaut de réception [6] des archives numériques, le nouveau syndic ou le président du conseil syndical pourra saisir le président du tribunal judiciaire conformément aux articles 18-2 de la loi de 1965 et 34 du décret de 1967 (N° Lexbase : L5527IGS) afin que celle-ci soit ordonnée.

Modification du rythme de mise à jour de l’extranet. - L’article 33-1-1 (N° Lexbase : Z78765SS), introduit au décret de 1967 par le décret du 27 juin 2019, précise les modalités d’accès par les copropriétaires à l’espace en ligne sécurisé mentionné à l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965. Cet espace, appelé le plus souvent « extranet », devait être mis à jour par le syndic dans les trois mois précédant l’assemblée générale annuelle. Cette périodicité a été modifiée par l’article 32 du décret du 2 juillet 2020 et c’est désormais dans les trois mois suivants, et non plus précédant, l’assemblée générale que le syndic devra s’exécuter. Le terme « annuelle » est également remplacé, pour éviter tout débat sur sa nature, par l’expression « ayant été appelée à connaître des comptes ». C’est, en somme, l’assemblée générale que l’on appelle ordinaire qui est ici visée. Ce changement est censé faciliter la réunion des documents pour le copropriétaire vendeur et ainsi ne plus avoir à recourir aux services du syndic afin d’obtenir ce que la pratique appelle le « pré-état daté » et qui correspond aux informations visées par l’article L. 721-2 du Code de la construction et de l’habitation (N° Lexbase : L8656KGP) devant être remises à l’acquéreur du lot lors de la signature d’une promesse de vente.

Pouvoir du syndic d’exiger un paiement par les copropriétaires. - L’article 34 du décret du 2 juillet 2020, outre les mesures de pure correction légistique (2° et 3°), contient quelques mesures d’harmonisation, coordination et clarification relatives au pouvoir du syndic, défini par l’article 35 du décret de 1967 (N° Lexbase : Z78773SS), d’exiger le paiement de certaines sommes par les copropriétaires.

La référence faite aux provisions spéciales, au 5° de l’article 35 du décret de 1967, est ainsi supprimée et remplacée par les cotisations au fonds de travaux que le syndic peut donc exiger.

Il est ajouté à l’article un 6° relatif aux provisions sur les sommes allouées au conseil syndical au titre des dépenses non comprises dans le budget prévisionnel, pour la mise en œuvre de sa délégation, prévues à l’article 21-2 de la loi du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L4207LX4).

Il est enfin ajouté un 7° afin de permettre au syndic d’exiger les éventuelles avances décidées en assemblée générale et destinées à pallier un manque temporaire de trésorerie du syndicat des copropriétaires. Cette catégorie de charges pour les copropriétaires figurait à l’article 45-1 du décret de 1967 (N° Lexbase : Z78810SS) et correspond à un emprunt du syndicat auprès des copropriétaires. L’introduction du 7° permet ainsi une harmonisation des terminologies, corrélée par la modification de l’article 45-1 qui empêchera désormais le syndicat d’emprunter auprès de certains copropriétaires seulement. Les avances ne pourront plus qu’être consenties collectivement et non par un copropriétaire seulement et certainement pas par le syndic, mais cela n’est pas une nouveauté [7].

II. Mesures relatives au contrat de syndic

Mesures d’application. - Parmi les modifications du contrat de syndic se trouvent de nombreuses mesures d’application des articles nouveaux ou modifiés de la loi de 1965 par l’ordonnance de 2019.

C’est ainsi que sont modifiés les paragraphes 3 à 6 du contrat type (décret de 1967, annexe 1) relatifs à la révocation du syndic pour l’adapter à la résiliation à l’initiative du conseil syndical, à l’initiative du syndic, et à la nouvelle désignation du syndic. 

Il en va de même pour la modification du paragraphe 6 relatif à la fiche synthétique (6.1) et à la transmission des pièces au conseil syndical (6.2) afin de rappeler les modalités d’exécution de celle-ci et les pénalités de retard applicables en cas de défaut de transmission [8], selon les dispositions de l’article 21 modifié de la loi de 1965 (N° Lexbase : L4821AHZ). Quelques précisions sont toutefois apportées et notamment celle qu’une pénalité de retard sera fixée par décret pour la non-transmission à un copropriétaire de la fiche synthétique (elle devrait ainsi l’être, sous toute vraisemblance au montant de quinze euros par jour de retard). Le reste n’est qu’une transcription des mesures de l’ordonnance et nous renvoyons en conséquence, faute de nouveauté sur ces sujets, aux commentaires de l’ordonnance.

Par application de l’ordonnance du 30 octobre 2019, il est également procédé à la suppression de la mention de l’interdiction d’indiquer un barème d’honoraires relatif aux travaux, même à titre indicatif. Il s’agit de la transcription de la modification de l’article 18-1 A de la loi de 1965 (N° Lexbase : L5472IGR). Il n’est toutefois pas ajouté au contrat type un espace permettant aux syndics de mentionner un tel barème. Cela signifie que ce barème ne pourra être proposé que séparément et éventuellement dans la mesure où le contrat-type ne peut toujours subir aucune modification, raison pour laquelle d’ailleurs il s’agit toujours d’un contrat-type et en aucun cas d’un « contrat-socle ». Dans tous les cas, que le syndic propose un barème indicatif ou non, ses honoraires devront être débattus devant l’assemblée générale et fixés par elle.

Il est, enfin, ajouté à l’article 9.2 du contrat-type le montant maximal pouvant être perçu par le syndic pour l’établissement de l’état daté ainsi qu’il a été défini par le décret n° 2020-153 du 21 février 2020 (N° Lexbase : L1968LWS), soit 380,00 euros TTC.

Mesures de clarification. - Le contrat reçoit quelques modifications assez formelles afin d’apporter des clarifications. C’est le cas pour la modification du point 7.1.2 relatif aux précisions concernant la tenue de l’assemblée générale annuelle. Il est ajouté un espace à compléter, matérialisé par « … » afin que soit précisée la durée de l’assemblée générale. C’est une modification formelle car la phrase supposait déjà la précision. Elle était en effet (mal) rédigée de la sorte : « tenue pour une durée de heure à l’intérieur d’une plage horaire ». L’ajout de l’espace, matérialisé par « … » est donc bienvenu.

L’article 7.1.3 du contrat est également modifié pour clarification. Le même ajout d’un espace à remplir est effectué à l’alinéa deux afin de permettre la précision du nombre d’assemblées générales pouvant être préparées, convoquées et tenues sans coût supplémentaire. Il est également ajouté au dernier alinéa de ce point l’obligation pour les parties de convenir, comme pour l’assemblée générale, la durée et la plage horaire des réunions avec le conseil syndical. Ces réunions pourront donc faire l’objet de dépassement horaire et emporter une facturation selon le coût horaire indiqué au point 7.2.1 du contrat.

Nouveautés relatives à la rémunération des prestations particulières (« hors forfait »). -  La plupart des syndics proposaient au titre des prestations particulières des rémunérations selon un coût horaire, notamment pour des prestations comme la tenue d’assemblée générale supplémentaire, et selon un coût forfaitaire, notamment pour l’état-daté. Ce panachage avait fait l’objet d’un débat et certaines associations souhaitaient voir disparaitre ce système au profit d’une modalité unique, si possible au forfait, afin de faciliter la comparaison entre les propositions de contrats. Le décret du 2 juillet 2020 vient clore ce débat, au moins pour un temps, puisqu’il est explicitement retenu, à l’occasion d’une modification du point 7.2.1 du contrat, la faculté de panacher. Le professionnel précisera « pour chacune d’elles », c’est-à-dire pour chaque prestation particulière, les modalités de sa rémunération. Corrélativement, la précision selon laquelle le tarif forfaitaire était convenu par les parties « pour chaque prestation particulière » est supprimée puisque cette expression avait, à juste titre nous semble-t-il, semé le doute sur la capacité du syndic de panacher le mode de facturation des prestations de ces prestations.

Il est en outre apporté une précision importante qui oblige les syndics à ne faire figurer au contrat qu’un « seul » coût horaire. Là encore la question avait fait débat, car il avait été remarqué que certains syndics indiquaient au contrat un coût horaire selon la qualité de la personne intervenant sur le dossier, différenciant ainsi l’intervention du « principal de copropriété », du « gestionnaire de copropriété » et de « l’assistant de copropriété ». Cette distinction rendait, d’après certaines associations, difficile la comparaison entre les contrats. Ce procédé, pratiqué par de nombreuses professions libérales, permettait tout de même de différencier les coûts au profit des syndicats. Sa disparition nécessitera de retenir un montant « moyen » ce qui conduit généralement à une hausse des prix. La comparaison ne paraîtra alors guère mieux assurée et le coût pour les syndicats augmentera. Le mieux est décidément toujours l’ennemi du bien…

Dans la même veine, est modifié l’article 7.2.2 du contrat ayant pour objet les prestations relatives aux réunions et visites supplémentaires afin d’empêcher les syndics de prévoir plusieurs taux de majoration pour dépassement d’horaires convenus pour la tenue d’une assemblée générale supplémentaire. Il avait en effet été remarqué que, parfois, des taux différents étaient retenus selon la personne tenant l’assemblée (principal ou gestionnaire) ou encore selon le jour ou l’heure de la tenue de l’assemblée.

Il est enfin précisé, à bon escient nous semble-t-il cette fois, aux articles 7.2.1 [9], 7.2.5 [10], et 9 [11], que la rémunération du syndic doit être exprimée hors taxes et toutes taxes comprises afin de permettre, toujours, une meilleure comparaison du coût.

Nouveautés relatives à l’obligation de convoquer l’assemblée générale à la demande d’un copropriétaire. - Depuis l’ordonnance du 30 octobre 2020, tout copropriétaire a le droit de demander au syndic de convoquer une assemblée générale afin de poser des questions relatives à ses droits et obligations (loi de 1965, art. 17-1 AA N° Lexbase : L4205LXZ). Ce droit emporte l’obligation pour le syndic de convoquer l’assemblée mais également le droit de percevoir une rémunération pour cette tâche. Il en fixera les modalités, forfait ou taux horaires, à l’article 9.4 nouveau du contrat auquel est fait le rappel de ses obligations en la matière, conformément aux articles 10-1 (N° Lexbase : L5204A37) et 17-1 AA de la loi du 10 juillet 1965.

Notons qu’à ce nouvel article du contrat est visée l’obligation pour le syndic d’informer les occupants de l’immeuble de la copropriété des décisions prises par l’assemblée générale par l’affichage d’un procès-verbal abrégé dans les parties communes selon les dispositions, expressément visées, de l’article 44 de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 (N° Lexbase : L8834AGB). Sont ainsi oubliées les dispositions du décret n° 2015-1681 du 15 décembre 2015 (N° Lexbase : L8009KU8) qui font pourtant obligation aux syndics de procéder de la sorte pour tous les syndicats de copropriétaires…

Cet oubli du Gouvernement nous paraît être la preuve de l’urgente nécessité de faire aboutir le projet en cours de codification du droit de la copropriété.

 

[1] V° V. Zalewski-Sicard, Le syndic : une liberté mieux encadrée et des obligations supplémentaires après l’ordonnance du 30 octobre 2019, Lexbase, Droit privé, n° 806, décembre 2019 (N° Lexbase : N1571BYT) ; V° également P.-E. Lagraulet, L’administration de la copropriété réformée, AJDI 2019, p. 852 ; Ch. Coutant-Lapalus, Les incidences de la réforme du droit de la copropriété sur le syndic de copropriété, Loyers et copr., n° 1, janvier 2020, dossier 2.

[2] Cette modification, résultant de l’article 20 de l’ordonnance du 30 octobre 2019, est reçue par le décret de 1967 à l’article 39. Il s’agit d’une mesure de pure cohérence et n’appelle pas de commentaires nouveaux.

[3] Cass. civ. 3, 2 décembre 2009, n° 08-20.073, FS-P+B (N° Lexbase : A3439EP3) : JCP 2010, n° 15, obs. H. Périnet-Marquet.

[4] Cass. civ. 3, 18 décembre 2001, n° 00-14.110 (N° Lexbase : A6891AXI).

[5] V° P.-E. Lagraulet, Esquisse des nouveaux contours du droit de la copropriété, AJDI 2019, p. 604.

[6] Nous rappelons ici que les archives sont portables et non quérables, bien que la pratique soit quasi-systématiquement inverse. V° Cass. civ. 3, 3 novembre 2011, n° 10-21.009, FS-P+B (N° Lexbase : A5242HZ8).

[7] V° Cass. civ. 3, 20 janvier 1999, n° 97-16.470, publié au bulletin (N° Lexbase : A2275CI4).

[8] Le montant de la pénalité de retard en cas de défaut de transmission au conseil syndical a été fixé par le décret n° 2019-503 du 23 mai 2019 à quinze euros par jour de retard.

[9] Relatif aux prestations particulières.

[10] Relatif aux prestations relatives aux travaux et études techniques.

[11] Relatif aux frais et honoraires imputables aux seuls copropriétaires.

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Covid-19

[Brèves] Covid-19, conditions de détention et demande de mise en liberté : la Cour de cassation précise ses exigences

Réf. : Cass. crim., 19 août 2020, n° 20-82.171, F-P+B+I (N° Lexbase : A09993SS)

Lecture: 5 min

N4323BYR

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par Adélaïde Léon

Le 23 Septembre 2020

► Le détenu qui fonde sa demande de mise en liberté sur la violation des articles 2 (N° Lexbase : L4753AQ4) et 3 (N° Lexbase : L4764AQI) de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme (CESDH), du fait de ses conditions de détention dans le contexte de l’épidémie de covid-19 dans un établissement pénitentiaire en situation de surpopulation carcérale, doit faire état de ses conditions personnelles de détention de façon suffisamment crédible et actuelle pour constituer un commencement de preuve de leur caractère indigne et alléguer que sa vie a été exposée à un risque réel et imminent en raison de ses conditions de détention dans le contexte de ladite épidémie.

Rappel des faits. Une personne détenue provisoirement a saisi le juge d’instruction d’une demande de mise en liberté. Par ordonnance, le juge des libertés et de la détention (JLD) a rejeté cette demande. L’intéressé a interjeté appel de cette décision soutenant que les conditions de sa détention durant la crise sanitaire justifiait sa remise en liberté compte tenu de la surpopulation carcérale et de l’état de délabrement de l’établissement pénitentiaire lesquels rendaient impossible la mise en place des mesures de distanciation nécessaires.

En cause d’appel. La chambre de l’instruction a confirmé l’ordonnance du JLD en précisant que la situation sanitaire liée à l’épidémie de covid-19, si elle justifie l’adoption de mesures spécifiques, ne saurait constituer un obstacle légal au maintien en détention provisoire d’une personne à l’égard de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis une infraction.

L’intéressé a formé un pourvoi contre cette décision.

Moyens du pourvoi. Le pourvoi dénonce la violation des articles 2 et 3 de la CESDH respectivement relatifs au droit à la vie et à l’interdiction de la torture. Selon le requérant, il appartient au juge de s’assurer que la privation de liberté est exempte de tout traitement inhumain et dégradant. À défaut, il doit ordonner la mise en liberté de l’intéressé en l’astreignant, le cas échéant, à un contrôle judiciaire.

L’intéressé faisait valoir que son maintien en détention au cours de l’épidémie de covid-19 dans un établissement pénitentiaire en situation de surpopulation carcérale l’exposait à un risque sanitaire très élevé portant atteinte à son droit à la vie et à la dignité et constituait ainsi un traitement inhumain ou dégradant. Il précisait notamment que les mesures de distanciation sociale et les gestes barrières étaient rendus impossibles par la grande promiscuité dans l’établissement. Il estimait avoir décrit ses conditions personnelles de détention comme constitutives de mauvais traitements en raison d’un risque élevé pour sa santé et sa sécurité en période de crise pandémique liée à un virus potentiellement mortel.

L’auteur du pourvoi reprochait par ailleurs à la chambre de l’instruction d’avoir subordonné sa remise en liberté à la réunion des conditions des articles 147-1 (N° Lexbase : L7700LPU) et 382 (N° Lexbase : L0504LTT) du Code de procédure pénale relatifs à la mise en liberté pour motif médical.

Décision de la Cour. La Cour rejette le pourvoi formé par le demandeur estimant que la chambre de l’instruction n’a méconnu aucun des textes visés par celui-ci.

S’agissant de l’article 3 de la CESDH, la Cour constate que le demandeur n’a pas fait état de ses conditions personnelles de détention au sein de l’établissement pénitentiaire de façon suffisamment crédible, précise et actuelle susceptible de constituer un commencement de preuve de leur nature indigne. La Cour précise qu’il n’appartenait pas à la chambre de l’instruction de faire constater lesdites conditions.

Concernant l’article 2 de la CESDH, la Haute juridiction estime que le requérant n'a pas démontré que sa vie était exposée à un risque réel et imminent en raison de ses conditions personnelles de détention dans le contexte de l’épidémie de covid-19.

Enfin, la Cour écarte le débat sur l’article 147-1 du Code de procédure pénal jugeant le motif surabondant et soulignant que sa mise en œuvre n’avait pas été sollicitée.

Contexte. Jusqu’au 8 juillet 2020, selon la jurisprudence de la Cour, des conditions indignes de détention n’étaient pas susceptibles de faire, en elles-mêmes, obstacle au placement ou au maintien en détention provisoire d’un individu. La mise en liberté ne pouvait être ordonnée qu’en présence d’éléments propres à la personne concernée attestant que son état de santé physique ou mentale était incompatible avec la détention et à la condition qu’il n’existe pas de risque grave de renouvellement de l’infraction.

Dans un arrêt du 8 juillet 2020 (Cass. crim., 8 juillet 2020, n° 20-81.739, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A71573Q7), la Cour de cassation était venu préciser que la constatation de conditions indignes de détention pouvait désormais constituer un obstacle au maintien de cette mesure.

Quelques semaines après l’arrêt du 8 juillet 2020 la Chambre criminelle vient ici préciser ses exigences de démonstration s’agissant des demandes de mise en liberté fondées sur des conditions de détention contraires aux articles 2 et 3 de la CESDH.

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Covid-19

[Brèves] Les mesures fiscales de la troisième loi de finances rectificative pour 2020

Réf. : Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020, de finances rectificative pour 2020 (N° Lexbase : L7971LXI)

Lecture: 8 min

N4307BY8

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par Marie-Claire Sgarra

Le 15 Juin 2021

La troisième loi de finances rectificative (loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020, de finances rectificative pour 2020 N° Lexbase : L7971LXI) a été publiée au Journal officiel du 31 juillet 2020.

Pour rappel, le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, et le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, ont présenté en Conseil des ministres, le 10 juin 2020, un troisième projet de loi de finances rectificative (PLFR 3) pour 2020. Sur fond de crise sanitaire, ce troisième texte rectificatif a pour objectif de renforcer son dispositif de soutien aux secteurs les plus touchés par la crise du Coronavirus Covid-19 et de déployer des mesures exceptionnelles d’aide aux collectivités territoriales et d’accompagnement des plus précaires.

Pour ce qui concerne les mesures fiscales, le texte prévoit :

  • l’exonération temporaire de droits de mutation à titre gratuit : cette nouvelle mesure s’applique aux donations consenties entre le 15 juillet 2020 et le 30 juin 2021 au profit d’un descendant (ou, à défaut de descendance, au profit des neveux ou nièces), sous réserve que les sommes reçues soient affectées, dans un délai de 3 mois, à la souscription au capital d’une petite entreprise, à des travaux de rénovation énergétique ou à la construction de la résidence principale du bénéficiaire de la donation. La limite de 100 000 euros (au lieu de 30 000 euros habituellement) est individuelle. Le dispositif est codifié à l’article 790 A bis du Code général des impôts (N° Lexbase : L8515LXN) ;
  • la mise en place d’un remboursement anticipé des créances de carry-back (article 5) : par dérogation au cinquième alinéa du I de l'article 220 quinquies du Code général des impôts (N° Lexbase : L9172LNZ), peuvent, sur demande déposée au plus tard à la date limite de dépôt de la déclaration de résultats de l'exercice clos au 31 décembre 2020, être remboursées les créances non utilisées, autres que celles cédées dans les conditions prévues aux articles L. 313-23 (N° Lexbase : L9528LGY) à L. 313-35 (N° Lexbase : L9269DYX) du Code monétaire et financier, nées d'une option exercée au titre d'un exercice clos au plus tard le 31 décembre 2020. Pour rappel, l’article 220 quinquies du Code général des impôts précité prévoit que les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés peuvent reporter le déficit d’un exercice sur le bénéfice de l’exercice précédent, dans la limite d’un million d’euros ;
  • le report d’application des obligations prévues par la Directive DAC 6 : la Directive « DAC 6 » (Directive (UE) n° 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018, modifiant la Directive 2011/16/UE en ce qui concerne l'échange automatique et obligatoire d'informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l'objet d'une déclaration N° Lexbase : L6279LKR) prévoit une obligation pour les intermédiaires ou les contribuables de déclarer à l’administration les dispositifs transfrontières à caractère potentiellement agressif, afin de renforcer la transparence et la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. Cette obligation prenait en principe effet à compter du 1er juillet 2020. En raison de la crise sanitaire liée au Covid-19, une nouvelle Directive a été adoptée et a autorisé un report de six mois des délais de déclaration (Directive (UE) 2020/876 du Conseil, du 24 juin 2020, modifiant la Directive 2011/16/UE afin de répondre au besoin urgent de reporter certains délais pour la déclaration et l’échange d’informations dans le domaine de la fiscalité en raison de la pandémie de COVID-19 N° Lexbase : L5104LXC). Le texte introduit les mesures suivantes :

1) Les dispositifs transfrontières dont la première étape a été mise en œuvre entre le 25 juin 2018 et le 30 juin 2020 sont déclarés au plus tard le 28 février 2021 par les intermédiaires et les contribuables mentionnés à l'article 1649 AE du Code général des impôts (N° Lexbase : L8506LXC) ;

2) Lorsqu'un dispositif transfrontière est mis à disposition aux fins de sa mise en œuvre, ou est prêt à être mis en œuvre, ou lorsque la première étape de sa mise en œuvre a été accomplie entre le 1er juillet 2020 et le 31 décembre 2020, ou lorsque les intermédiaires fournissent, directement ou par l'intermédiaire d'autres personnes, une aide, une assistance ou des conseils entre le 1er juillet 2020 et le 31 décembre 2020, le délai de trente jours pour déclarer les informations court à compter du 1er janvier 2021 ;

3) Dans le cas des dispositifs conçus, commercialisés, prêts à être mis en œuvre ou mis à disposition aux fins de mise en œuvre sans avoir besoin d'être adaptés de façon importante, la première mise à jour est communiquée par les intermédiaires au plus tard le 30 avril 2021.

  • un crédit d'impôt pour le premier abonnement à un journal, à une publication périodique ou à un service de presse en ligne d'information politique et générale (article 2) : l'abonnement à un service de presse en ligne n'est pas éligible au bénéfice du crédit d'impôt lorsqu'il est inclus dans un service assurant la diffusion numérique groupée de services de presse en ligne ou de versions numérisées de journaux ou publications périodiques ne présentant pas tous le caractère de presse d'information politique ou générale, ou associé à tout autre service. Ce crédit d'impôt est égal à 30 % des dépenses effectivement supportées par le contribuable et est accordé une fois pour un même foyer fiscal jusqu'au 31 décembre 2022 ;
  • un dégrèvement exceptionnel de la cotisation foncière des entreprises (CFE) (article 11) : les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre peuvent, par délibération prise au plus tard le 31 juillet 2020, instituer un dégrèvement des deux tiers du montant de la cotisation foncière des entreprises dus au titre de l’année 2020. Ce dégrèvement s'applique aux établissements qui satisfont aux conditions suivantes : relever d'une entreprise qui a réalisé, au cours de la période de référence prévue à l'article 1467 A du Code général des impôts (N° Lexbase : L0811IPQ), un chiffre d'affaires annuel hors taxes inférieur à 150 millions d'euros, éventuellement corrigé pour correspondre à une année pleine, exercer leur activité principale dans ceux des secteurs relevant du tourisme, de l'hôtellerie, de la restauration, du sport, de la culture, du transport aérien et de l'évènementiel qui ont été particulièrement affectés par les conséquences économiques et financières de la propagation de l'épidémie de covid-19 au regard de l'importance de la baisse d'activité constatée en raison notamment de leur dépendance à l'accueil du public. La liste de ces secteurs a été définie par un décret du 5 août 2020 (décret n° 2020-979 du 5 août 2020, pris pour l'application de l'article 11 de la loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020 N° Lexbase : L8877LX3) ;
  • un crédit d’impôt pour dépenses de création audiovisuelle et cinématographique (article 49) : ce dispositif s’adresse aux entreprises exerçant l’activité d’éditeur de services de télévision, de services de radio ou de services de médias audiovisuels à la demande au sens de l'article 2 de la loi n° 86-1067, du 30 septembre 1986, relative à la liberté de communication et soumises à l'impôt sur les sociétés (N° Lexbase : L8240AGB). Les entreprises doivent justifier d’une baisse de chiffre d’affaires d’au moins 10 % pour la période allant du 1er mars 2020 au 31 décembre 2020, par comparaison avec la période allant du 1er mars 2019 au 31 décembre 2019 ;
  • pour les lauréats du concours « French tech Tremplin » (article 20), les aides reçues jusqu'au 31 décembre 2023 au titre de ce concours sont exonérées d'impôt sur les sociétés, d'impôt sur le revenu et de toutes les cotisations et contributions sociales d'origine légale ou conventionnelle.

À lire :

  • G. Massé, DAC 6 : une application plus complexe et incertaine, Lexbase Fiscal, mai 2020, n° 824 (N° Lexbase : N3300BYU) ;
  • C. Dedieu, Les dispositions fiscales de la seconde loi de finances rectificative pour 2020, Lexbase Fiscal, mai 2020, n° 823 (N° Lexbase : N3193BYW).

 

 

 

newsid:474307

Covid-19

[Brèves] Publication du nouveau protocole national sanitaire pour les entreprises

Réf. : Min. Travail, protocole, 31 août 2020

Lecture: 2 min

N4352BYT

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par Charlotte Moronval

Le 02 Septembre 2020

► Publiée sur le site du ministère du Travail, la nouvelle version du protocole national sanitaire pour les entreprises du 31 août 2020 met en place de nouvelles mesures sanitaires et s’applique à compter du 1er septembre.

Port du masque obligatoire. Ce protocole rend systématique le port du masque dans les espaces partagés et clos à compter de la rentrée. Cela concerne les open space, les salles de réunions, les couloirs, les salles communes, les vestiaires.

Cependant, deux cas peuvent faire l’objet d’une dérogation au port du masque :

  • lorsque le salarié travaille seul dans son bureau ;
  • en atelier, car les salariés sont souvent amenés à effectuer des efforts physiques plus intenses que la moyenne, dès lors que les conditions de ventilation/aération fonctionnelle sont conformes à la réglementation, que le nombre de personnes présentes dans la zone de travail est limité, que ces personnes respectent la plus grande distance possible entre elles et portent une visière.

Par ailleurs, dans le cas des bureaux partagés, notamment les open space, un salarié qui est à son poste de travail peut enlever temporairement son masque si un certain nombre de critères, dont le nombre varie en fonction du niveau de circulation du virus dans le département, sont remplis. Il est cependant exclu de retirer le masque de manière permanente toute la journée.

À noter que cette obligation généralisée du port du masque sera à la charge de l’employeur et qu’un salarié qui n’accepterait pas le port du masque lorsqu’il est obligatoire peut recevoir un avertissement et s’il persiste, une mise à pied, voire un licenciement pour faute.

Mesures complémentaires. Le port du masque doit être associé au respect d’une distance physique d’au moins un mètre entre les personnes, de l’hygiène des mains, des gestes barrières, ainsi que du  nettoyage, de la ventilation, de l’aération des locaux et la gestion des flux de personnes.

Les employeurs doivent mettre à jour le Document unique d’évaluation des risques (DUER) et pour les entreprises disposant d’un règlement intérieur, il est conseillé d’intégrer l’obligation du port du masque. Pour les entreprises disposant d'un CSE, il faut informer les représentants du personnel.

S’agissant du télétravail, il est toujours encouragé et doit être priorisé à chaque fois que c’est possible dans les zones de circulation active du virus, afin de limiter le nombre de salariés présents simultanément dans l’entreprise.

À noter que ce protocole se substitue au protocole national de déconfinement et se mettra en place progressivement dans les entreprises.

newsid:474352

Électoral

[Brèves] Radiation des listes électorales : non-respect du délai de convocation et violation des droits de la défense

Réf. : Cass. civ. 2, 26 août 2020, n° 20-60.214, F-P+B+I (N° Lexbase : A24983SC)

Lecture: 3 min

N4353BYU

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par Yann Le Foll

Le 02 Septembre 2020

►Le respect des droits de la défense d’un électeur faisant l’objet d’une radiation des listes électorales implique le strict respect du délai d’avertissement de trois jours dès lors que celui-ci n’est ni matériellement impossible, ni incompatible avec le droit d’accès au juge du tiers électeur (Cass. civ. 2, 26 août 2020, n° 20-60.214, F-P+B+I N° Lexbase : A24983SC).

Faits. Une personne, agissant en qualité de tiers électeur, a, par requête du 6 mars 2020, sollicité la radiation de Mme X de la liste électorale de la commune d’Ignaux. A l’audience des débats, cette dernière, représentée par un Avocat, a conclu que la procédure était nulle faute de respect du délai de trois jours prévu à l’article R. 18 du Code électoral (N° Lexbase : L4341LTX) et soutenu que le non-respect du délai de convocation l’avait empêché de préparer sa défense. Le jugement attaqué a rejeté cette demande, même après avoir constaté l’irrégularité de l’avis écrit délivré à l’intéressée le 10 mars 2020 pour l’audience du 13 mars 2020.

Principe. En vertu de l’article R. 18 précité, le tribunal statue sur les contestations relatives à la composition de la liste électorale d’une commune sur simple avertissement donné trois jours à l'avance à toutes les parties intéressées. Aux termes de l’article R. 21 du même code (N° Lexbase : L7974IE3), le délai prévu à l’article R. 18, est exprimé en jours calendaires. Il en résulte d’une part, que sont exclus de la computation du délai le jour où l'audience doit être tenue et le jour où l'avertissement est donné, d’autre part que ce délai peut inclure des jours fériés ou chômés. En vertu de l’article 114 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1395H4G], la nullité de l'avertissement doit être prononcée dès lors que l'irrégularité cause un grief à la partie qui l'invoque.

Décision. En se déterminant ainsi par des motifs inopérants, dès lors que le respect des exigences de l’article R. 18 du Code électoral n’était ni matériellement impossible, ni incompatible avec le droit d’accès au juge du tiers électeur, ni contraire aux exigences de l’article 3 du protocole n° 1 de la CESDH (N° Lexbase : L1625AZ9) qui implique la reconnaissance de droits subjectifs comme le droit de voter ou d’être éligible, et sans rechercher comme il y était invité, si l’inobservation du délai d’avertissement de l’électrice contestée ne lui avait pas causé grief en la privant de la possibilité de préparer sa défense, le tribunal n’a pas donné de base légale à sa décision (sur l’impartialité des membres de la commission de contrôle appelée à connaître de la liste électorale de la commune, voir Cass. civ. 2, 12 juin 2020, n° 20-60.143, F-P+B+I N° Lexbase : A53603NT).

Pour aller plus loin : Le recours contre la décision de refus d'inscription ou de radiation prise par le maire in Droit électoral, Lexbase (N° Lexbase : E4777ZBK).

newsid:474353

Harcèlement

[Jurisprudence] Harcèlement sexuel : jurisprudence estivale

Réf. : Cass. soc. 8 juillet 2020, n° 18-23.410 (N° Lexbase : A10413RY) et n° 18-24.320 (N° Lexbase : A12673RD), FS-P+B

Lecture: 16 min

N4366BYD

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par Patrice Adam, Professeur à l’Université de Lorraine

Le 02 Septembre 2020

 


Il résulte des dispositions des articles L. 1153-1 (N° Lexbase : L8840ITL) et L. 1154-1 (N° Lexbase : L6799K9P) du Code du travail que pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement sexuel, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments présentés par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement (espèces n° 1 et n° 2). L'obligation de prévention des risques professionnels est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral instituée par l'article L. 1152-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0724H9P) et des agissements de harcèlement sexuel instituée par l'article L. 1153-1 du même code et ne se confond pas avec elle (espèce n° 2).


Deux arrêts (publiés) rendus, le 8 juillet 2020, par la Chambre sociale de la Cour de cassation, dans le champ du harcèlement sexuel au travail, méritent ici de retenir l’attention. Dans l’affaire « Alutil » (n° 18-23.410), deux salariés, licenciés (en mars 2014) pour faute grave pour avoir subtilisé le matériel de l’entreprise (deux garde-corps aluminium vitrés fabriqués par l’un, chef d’atelier, à la demande de l’autre, opératrice de saisie-accueil), sollicitent, entre autres demandes, la nullité de l’acte de rupture de leur contrat de travail. La première soutient avoir été victime de harcèlement sexuel ; le second, avoir été, en réalité, licencié au motif (caché) qu’il a relaté le harcèlement subi par sa collègue et complice du détournement de matériel dont il lui est fait « officiellement » grief. Dans la seconde décision, « AG2R Réunica » (n° 18-24.320), une salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail (en septembre 2015), imputant à son employeur un harcèlement sexuel, et saisi, un mois plus tard, la juridiction prud'homale aux fins de voir juger que sa prise d'acte produit les effets d'un licenciement nul. Elle sollicite, par ailleurs, des dommages et intérêts pour manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat.

Dans ces deux affaires, les juges du second degré ont repoussé, sans ménagement, les prétentions des salariés. A tort, dans la première espèce ; à tort et à raison dans la seconde, selon la Chambre sociale de la Cour de cassation. Si ces deux arrêts n’apportent aucun bouleversement à l’état du droit, ni même aucune véritable innovation, ils n’en restent pas moins dignes d’intérêt. La Haute juridiction énonce d’abord -sans surprise- que la méthode probatoire qu’elle a initialement ciselée en matière de harcèlement moral trouve pleinement à s’appliquer sur les terres du harcèlement sexuel (I).  Ensuite, elle réaffirme, avec force, que l'obligation de prévention des risques professionnels est distincte de la prohibition des agissements harcelants (II). Enfin, elle offre une illustration, qui n’est pas si fréquente, de l’exigence d’exactitude de la cause du licenciement dans l’appréciation judiciaire de sa légitimité/validité (III).

I. Harcèlement sexuel : méthode probatoire

Sur le terrain probatoire, la position adoptée par la Chambre sociale peut être présentée en deux points. Le premier concerne la méthode que doit suivre le juge du contrat de travail pour caractériser une situation de harcèlement sexuel (A). Le second est relatif au contrôle qu’exerce la Cour de cassation sur le bon usage de cette méthode par les juges du fond (B).

A. Règles de méthode (probatoire)

Cette méthode est strictement -et logiquement [1]- identique à celle qui s’applique dans le champ du harcèlement moral.

D’abord, « il résulte [des articles L. 1153-1 et L. 1154-1 du Code du travail] que pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement sexuel, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments présentés par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ». C’est dire que le juge doit examiner l’ensemble des faits avancés par le salarié et s’en saisir, pour ceux bien évidemment qui sont avérés, dans leur ensemble. Voilà qui interdit au juge social de « saucissonner » son appréciation des faits dont la réalité a été établie. Les apprécier « dans leur ensemble » signifie que le juge doit chercher si ces faits, qui pris indépendamment les uns des autres peuvent paraitre anodins, bénins ou insignifiants, ne caractérisent pas un système, un processus attentatoire à la dignité de celui qui les subit. L’opération attendue du juge n’est pas une addition au sens des mathématique linéaires (où le cumul de signaux faibles produirait un signal fort ; 1+1 = 2) mais bien plutôt une équation, reprise par la systémique et selon laquelle « le tout est supérieur à la somme des parties » (1+1 = 3), rendue vraie par un effet de synergie (chaque fait entre en écho avec les autres faits et produit un résultat qui n’est pas réductible à leur seule addition). Ensuite, « dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ». Si dans la première phase probatoire, l’employeur peut discuter de la réalité des faits avancés par le salarié, dans la seconde -si elle s’ouvre, i.e. si le salarié a préalablement réussi à tisser un voile d’apparence-, il lui revient de donner à voir les raisons des comportement ou actes dont il lui est fait reproche et de convaincre le juge qu’elles ne relèvent en rien d’un processus harcelant. Démonstration dont on peine un peu à saisir comment il pourrait concrètement fonctionner dans le champ du harcèlement sexuel, surtout lorsque « l’apparence » suffit à caractériser l’intention harcelante comme c’est le cas pour le « harcèlement sexuel assimilé » (C. trav., art. L. 1153-1, 2°). L’espace ouvert à la justification patronale semble bien réduit (à tout le moins, bien plus qu’en matière de harcèlement moral).

Dans les affaires « Alutil » et « AG2R Réunica », les débats ne se sont noués qu’autour de la première étape de cette démarche probatoire. Dans la première : « pour dire que la salariée n’a pas subi de harcèlement sexuel et la débouter de ses demandes à titre de dommages-intérêts pour harcèlement sexuel et au titre de la nullité du licenciement et des indemnités afférentes, l’arrêt [d’appel] retient que les éléments présentés par l’intéressée, considérés dans leur ensemble, s'ils constituent un comportement inadapté sur le lieu de travail, ne laissent pas présumer l’existence d'un harcèlement sexuel ». Décision des juges du second degré censurée par la Haute juridction pour manque de base légale. En effet, « en se déterminant ainsi, alors que la salariée soutenait que son supérieur hiérarchique avait reconnu avoir été entreprenant à son égard et que l'employeur avait sanctionné ce dernier par un avertissement pour comportement inapproprié vis à vis de sa subordonnée, la cour d'appel, n’a pas pris en considération tous les éléments présentés par la salariée ». A vrai dire, ce n’est pas tant l’absence de prise en considération de ces éléments que semble vilipender la Cour de cassation que le peu de considération montrée à leur égard par le juge d’appel ! Où l’on croit percevoir que s’ils avaient été justement pris en compte, ces éléments auraient dû conduire les juges du fond à basculer du « comportement inadapté » au harcèlement sexuel…

Dans la seconde, pour rejeter le moyen du salarié, la Cour de cassation souligne que « la cour d'appel, par une appréciation souveraine des éléments de preuve et de fait qui lui étaient soumis, a, d'une part, constaté que certains des éléments de fait invoqués par la salariée comme étant susceptibles de constituer un harcèlement sexuel n'étaient pas établis et, d'autre part, estimé, sans dénaturation et exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1154-1 du Code du travail, s'agissant des autres faits qu'elle a examinés dans leur ensemble, qu'ils ne permettaient pas de présumer l'existence d'un harcèlement sexuel ». Si le salarié n’a point à prouver le harcèlement, il lui faut néanmoins convaincre le juge (lors de la première phase probatoire) que la situation qu’il dénonce est possiblement harcelante. Mais cette apparence doit trouver de solides étaies sur des faits dont la réalité est avérée. Et la charge d’en livrer démonstration pèse sur le salarié. Il ne peut se contenter de simples allégations… Ce n’est donc que sur l’ensemble des faits établis que le juge peut apprécier la situation qui lui est soumise. 

B. Contrôle de la Cour de cassation

Dans son arrêt du 8 juin 2016 (n° 14-13.418), la Cour de cassation a abandonné le contrôle de la qualification de harcèlement moral qu’elle avait repris en main quelques années plus tôt [2]. Cette position de repli allait-elle être étendue au cas du harcèlement sexuel ? L’esprit rechignait à ne point l’admettre. Pourquoi traiter différemment le harcèlement sexuel et le harcèlement moral ? De l’opportunité d’une approche identique, il était cependant des raisons légitimes de douter. C’est que le changement de cap jurisprudentiel opéré en juin 2016 reposait sur deux principales raisons. La première : la difficulté, sinon la gêne, pour la Cour de cassation de se saisir d’un contentieux massif où la qualification de harcèlement moral procède essentiellement d’appréciations d’ordre factuel dont les juges du fond sont les mieux à même de connaître. La seconde : pendant huit ans, la Haute juridiction a livré d’importantes directives d’interprétation de l’article L. 1152-1 du Code du travail. Aussi, maintenant que, dans les herbes folles d’une évanescente définition légale du harcèlement moral, le chemin était tracé, il était possible de redonner la main aux juges du fond qui ne risquaient plus de s’égarer. La voie était balisée [3].  

Dans le champ du harcèlement sexuel, la situation semblait bien différente. Le nombre d’informations factuelles à traiter y est, en général, moins important (l’exigence d’une connotation sexuelle des actes dénoncés en limite souvent le nombre) ; le contentieux social du harcèlement sexuel, relativement faible, est également sans commune mesure avec celui du harcèlement moral ; enfin, et peut-être surtout, la définition rénovée par la loi n° 2012-954 du 6 août 2012 (N° Lexbase : L8784ITI) n’avait point encore donné lieu à de précises directives d’interprétation de la part des Hauts magistrats. Abandonner aux juges du fond la qualification de harcèlement sexuel pouvait donc faire craindre, au regard du large champ interprétatif ouvert par le texte de l’article L. 1153-1 du Code du travail, un éparpillement des solutions adoptées dans les forges du contentieux.

Reste que ces dissemblances n’ont pas parue suffisantes, ou suffisamment pertinentes, à la Cour de cassation pour maintenir (encore un temps) son contrôle sur la qualification de harcèlement sexuel.  Comme pour le harcèlement moral, « le juge [du fond] apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement ». Il faut tout de même souligner qu’en se défaisant du contrôle de qualification au profit des juges du fond, la Cour de cassation ne renonce pas à tout contrôle sur leur décision (au-delà du « contrôle disciplinaire » dont elle ne se peut se délester). D’abord, elle continue d’exercer son contrôle sur l’interprétation de la loi logée dans la décision qui lui est déférée. Cet office-là, traditionnel, n’est pas remis en cause. La Cour de cassation continuera de censurer les lectures hasardeuses de l’article L. 1153-1 du Code du travail. Ensuite, la liberté d’appréciation concédée aux juges du fond suppose que ces derniers respectent scrupuleusement la méthode probatoire que leur impose de suivre la Cour de cassation et sur laquelle elle maintient un ferme contrôle (les juges du fond apprécient souverainement en revanche les éléments de fait et de preuve qui leur sont soumis [4]).

II. Harcèlement sexuel et obligation de prévention

« L'obligation de prévention des risques professionnels est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral instituée par l'article L. 1152-1 du Code du travail et des agissements de harcèlement sexuel instituée par l'article L. 1153-1 du même code et ne se confond pas avec elle ». Rendu au visa des articles L. 4121-1 du Code du travail (N° Lexbase : L8043LGY) (dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017 N° Lexbase : L7627LGL) et L. 4121-2 (N° Lexbase : L6801K9R) du même code (dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 N° Lexbase : L8436K9C), la solution -ciselée dans des arrêts plus anciens [5]- posée par l’arrêt « AG2R Réunica » ne devrait en rien être affectée par les modifications apportées aux énoncés législatifs qui la fondent. Sur le fondement de cette distinction, la Chambre sociale de la Cour de cassation assoit deux solutions. Si la première, relative au devoir d’enquête de l’employeur, n’est pas contestable (A), la seconde, attachée à l’indemnisation du (des) préjudice(s) subi(s) par le salarié, semble plus critiquable (B).

A. Le devoir d’enquête de l’employeur

La distinction ainsi opérée entre obligation de prévention et prohibition des agissements harcelants a déjà permis de juger que l’employeur peut voir sa responsabilité engagée pour ne pas avoir diligenté une enquête sur des faits possibles de harcèlement quand bien même il s’avérerait ultérieurement qu’aucun des faits dénoncés n’est avéré [6]. Solution parfaitement logique. Dans ce cas particulier, l’impératif de prévention qui pèse sur l’employeur lui fait obligation de mettre fin le plus rapidement possible à la situation de harcèlement rapportée. Mais cette nécessité d’y mettre un terme suppose que des agissements répréhensibles aient été préalablement caractérisés, ce qui suppose que l’employeur mène de sérieuses investigations (plus ou moins longues, plus ou moins difficiles).  Il ne peut prétendre avoir correctement rempli son obligation de prévention, si, n’ayant point mené d’enquête, il ne compte que sur la providence, ou sa bonne fortune, pour, a posteriori, justifier son inaction. L’absence de harcèlement avéré ne légitime pas, après coup, son inaction, puisque en restant passif, l’employeur a pris le risque de laisser l’un de ses salariés subir un processus harcelant. Reste évidemment à identifier, mais c’est là un autre problème, le dommage (et les préjudices qui lui sont liés) dont le salarié peut demander réparation.

Dans l’affaire « AG2R Réunica », pour débouter la salariée (ayant pris acte de la rupture de son contrat de travail) de sa demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité, les juges d’appel ont retenu que « dès lors que les seules déclarations de la salariée ne sont pas suffisantes pour établir des faits permettant de présumer l'existence du harcèlement sexuel et que celle-ci n'établit pas l'existence de faits qui, pris dans leur ensemble, seraient de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral à son égard, il n'y a pas lieu d'examiner si un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité est à l'origine de ce harcèlement sexuel et moral invoqué ». Position qui ne pouvait qu’être infirmée au regard de la distinction, mise en règle, ci-dessus énoncée.

Si la solution ici retenue s’imposait, il en est une autre que la Chambre sociale rattache à cette règle de distinction qui semble bien plus critiquable.

B. L’indemnisation du (des) préjudice(s) du salarié

Elle juge en effet que « les obligations résultant des articles L. 1153-1 et L. 1153-5 du Code du travail sont distinctes en sorte que la méconnaissance de chacune d'elles, lorsqu'elle entraîne des préjudices distincts, peut ouvrir droit à des réparations spécifiques ». Initiée en matière de harcèlement moral [7], la solution a été étendue cinq ans plus tard au harcèlement sexuel [8]. Reste que si cette jurisprudence avait sa cohérence en 2012, elle semble l’avoir perdue aujourd’hui.  C’est que désormais l’employeur ne peut voir sa responsabilité engagée que s’il n’a pas mis en œuvre toutes les mesures de préventions nécessaires pour éviter la situation de harcèlement (moral ou sexuel) [9]. La seule caractérisation d’un harcèlement ne permettra donc pas -plus- de lui en faire systématiquement reproche (à supposer, évidemment, qu’il n’en soit pas l’auteur !), ou à tout le moins de lui en imputer la responsabilité. Il faudra nécessairement pour que ce reproche soit justifié qu’une faute de prévention puisse lui être attribuée. Mais, ce faisant, les obligations supportées par les articles L. 1152-1 et L. 1153-1 n’ont d’autre signification que celle d’une obligation de prévention (« de résultat », si l’on veut vraiment user de ce vocabulaire emprunté au droit des obligations contractuelles). Pour le dire encore autrement, dès lors qu’un harcèlement moral ou sexuel est établi, la seule question qui se pose est de savoir si l’employeur a, ou non, correctement exécuté son obligation de prévention. En fait, la jurisprudence de la Cour de cassation, en distinguant, l’obligation assise sur l’article L. 1153-1 (ou L. 1152-1) du Code du travail et celle que signifient les articles L. 4121-1 et suivants du même code, dessine, sur un même plan, deux cercles totalement séparés, dont aucun des points ne se touchent. Bancale géométrie, pensons-nous. Il serait bien plus juste de considérer que ces deux cercles sont, en réalité, concentriques, celui qui désigne l’obligation de sécurité (cercle A) ayant ici le diamètre le plus grand. Ce type de représentation exprimerait les solutions suivantes :

  • l’absence de harcèlement n’exclut pas la faute de prévention de l’employeur (où l’on retrouve l’hypothèse d’une absence fautive d’enquête) ;
  • l’existence d’un harcèlement ne permet d’engager la responsabilité de l’employeur que s’il a commis une faute de prévention (position qui implique de considérer que la survenance d’une situation harcelante ne caractérise pas, en soi, une telle faute et qu’elle ne permet d’aucune manière de la présumer).

Représentation qui exclut donc que le salarié, victime de harcèlement, puisse exiger une double indemnisation. Le problème n’est pas de rapporter la preuve de préjudices distincts, mais tout simplement l’absence en réalité d’obligations distinctes !

III. Harcèlement sexuel et cause exacte de licenciement

Si, lors d’un contentieux relatif à la légitimité de son licenciement, il est courant que le salarié conteste la réalité -l’existence- des griefs qui lui sont imputés, il est bien moins fréquent [10] qu’il en discute l’exactitude [11]. Posture qui le conduit à soutenir que le motif mis en avant dans la lettre de licenciement n’est pas la véritable cause de la rupture ; qu’il n’en est que le prétexte, le simple paravent d’une raison inavouée parce qu’inavouable. C’est là l’argument avancé par l’un des salariés licenciés pour avoir subtilisé le matériel de l’entreprise dans l’affaire « Alutil ». A l’en croire, son licenciement constituait, en réalité, une mesure de représailles prononcée en réaction au refus opposé par sa collègue aux avances de son supérieur hiérarchique et au soutien qu’il lui a apporté. Soulevé par le salarié dans ses conclusions, il incombait aux juges du fond de répondre, de façon motivée, à l’argument (CPC, art. 455 N° Lexbase : L6565H7B). Faute de l’avoir fait, la Cour de cassation censure leur décision. La cour d’appel de renvoi devra donc examiner avec soin l’éventuelle inexactitude du motif de licenciement. Et si sa preuve est toujours difficile, la chronologie des évènements ou la proximité temporelle entre le soutien du salarié et son licenciement pourra l’aider à se forger solide conviction.

👉 Quel enseignement pratique tirer de ces arrêts ?

Il en est un très fort : face à une situation potentielle de harcèlement, l’employeur doit immédiatement agir, réagir et prendre toutes les mesures de précautions qui s’imposent (en premier lieu, lancer une enquête sérieuse !). En aucun cas, ne doit-il compter sur sa « bonne fortune » (l’absence avérée de harcèlement) pour tenter, a posteriori, de justifier sa coupable passivité.


[1] Les dispositions de l’article L. 1154-1 du Code du travail (N° Lexbase : L6799K9P) sont communes aux harcèlement moral et sexuel.

[2] Cass. soc. 24 septembre 2008, n° 06-45.747, n° 06-45794, n° 06-45.579 et n°06-43504, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A4540EAE).

[3] P. Adam, Harcèlement moral et contrôle de qualification. Nouveau régime de "liberté surveillée", SSL, 13 juin 2016, n° 1727, p. 5.

[4] Cass. soc., 10 mai 2016, n° 15-10.467 (N° Lexbase : A0765RPZ) et n° 14-27.216, n° 14-27.216, F-D (N° Lexbase : A0701RPN) ; Cass. soc., 7 avril 2016, n° 15-13.258, F-D (N° Lexbase : A1640RCQ) ; Cass. soc., 11 février 2016, n° 15-14.092, F-D (N° Lexbase : A0341PL9) ; une formule alternative : les juge du fond apprécient souverainement « la valeur et la portée des éléments de fait et de preuve » qui leur sont soumis (Cass. soc., 7 avril 2016, n° 14-23.705, F-D N° Lexbase : A1501RCL ; Cass. soc., 16 mars 2016, n° 14-26.207, F-D N° Lexbase : A3603Q8X).

[5] Cass. soc., 6 juin 2012, n° 10-27.694, FS-P+B (N° Lexbase : A3825INY) : « les obligations résultant des articles L. 1152-4 et L. 1152-1 du Code du travail sont distinctes en sorte que la méconnaissance de chacune d'elles, lorsqu'elle entraîne des préjudices différents, peut ouvrir droit à des réparations spécifiques » ; Cass. soc., 3 mars 2015, n° 13-23.521, FS-P+B (N° Lexbase : A9009NCN) ; Cass. soc., 17 mai 2017, n° 15-19.300, FS-P+B (N° Lexbase : A4797WDZ) ; Cass. soc., 12 avril 2018, n° 16-29.072, F-D (N° Lexbase : A1472XL4) ; Cass. soc., 20 juin 2018, n° 16-27.915, F-D (N° Lexbase : A8627XTP) ; Cass. soc., 17 octobre 2018, n° 17-21.689, F-D (N° Lexbase : A9820YGS) ; V. aussi, Cass. soc., 26 mars 2014, n° 12-27.028, FS-D (N° Lexbase : A2484MIT).

[6] Cass. soc., 27 novembre 2019, n° 18-10.551, FP-P+B (N° Lexbase : A3486Z4U).

[7] Cass. soc., 6 juin 2012, n° 10-27.694, FS-P+B (N° Lexbase : A3825INY), Droit social, 2012, 845, obs. Ch. Radé.

[8] Cass. soc., 17 mai 2017, n° 15-19.300, FS-P+B (N° Lexbase : A4797WDZ), RDT, 2017, 548, nos obs..

[9] Cass. soc., 1er juin 2016, n° 14-19.702, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A2663RR3) : « Attendu que ne méconnaît pas l'obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, notamment en matière de harcèlement moral, l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail et qui, informé de l'existence de faits susceptibles de constituer un harcèlement moral, a pris les mesures immédiates propres à le faire cesser ».

[10] Cass. soc., 6 avril 2011, n° 09-66.818, FS-P+B (N° Lexbase : A3516HNK) ; V. aussi, Cass. soc., 23 octobre 1991, n° 88-44.099 (N° Lexbase : A4500ABB) ; Cass. soc., 9 juin 1998, n° 96-40.390 (N° Lexbase : A5591AC3).

[11] « L’exactitude de la cause est souvent confondue avec l’existence de la cause » (G. Auzero, D. Baugard, E. Dockès, Droit du travail, Précis Dalloz 2020, 33ème éd., p. 580).

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