Le Quotidien du 17 novembre 2022 : Entreprises en difficulté

[Brèves] Caducité de l’accord de conciliation : précision sur le sort des sûretés

Réf. : Cass. com., 26 octobre 2022, n° 21-12.085, FS-B N° Lexbase : A01128RL

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[Brèves] Caducité de l’accord de conciliation : précision sur le sort des sûretés. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/89791958-breves-caducite-de-l-accord-de-conciliation-A0-precision-sur-le-sort-des-suretes
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par Vincent Téchené

le 16 Novembre 2022

► Le créancier, qui a consenti, pour les besoins d’un accord de conciliation, une avance donnant naissance à une nouvelle créance, garantie par un cautionnement, est en mesure de demander l'exécution par la caution de cet engagement, en dépit de la caducité de l'accord résultant de l'ouverture d'une procédure collective.

Faits et procédure. Une société a conclu avec ses principaux créanciers un accord de conciliation homologué par un jugement du 12 avril 2012 selon lequel une banque s'engageait à consentir un prêt de 75 000 euros, lequel a été signé le 4 mai suivant. Le gérant de la société s'est rendu caution solidaire du prêt dans la limite de la somme de 86 250 euros, couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des intérêts de retard.

Le 30 octobre 2013, la société a été mise en redressement judiciaire. La banque a déclaré sa créance le 19 novembre suivant et a prononcé la déchéance du terme du prêt le 24 décembre 2015 puis a assigné la caution en paiement le 19 juin 2015.

La cour d’appel (CA Rennes, 15 décembre 2020, n° 18/00320 N° Lexbase : A809839S) ayant déclaré caduc le cautionnement et rejeté les autres demandes de la banque, cette dernière a formé un pourvoi en cassation. Elle soutenait notamment que la caducité du plan de conciliation résultant de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire n'entraîne pas l'extinction des sûretés qui garantissent le remboursement d'un nouvel apport de trésorerie consenti au débiteur.

Décision. La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa de l'article L. 611-12 du Code de commerce N° Lexbase : L4116HB3.

Elle rappelle que si, selon ce texte, lorsqu'il est mis fin de plein droit à un accord de conciliation en raison de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire du débiteur, le créancier, qui a consenti à celui-ci des délais ou des remises de dettes dans le cadre de l'accord de conciliation, recouvre l'intégralité de ses créances et des sûretés qui les garantissaient, il ne conserve cependant pas le bénéfice des nouvelles sûretés obtenues dans le cadre de l'accord en contrepartie de ces délais ou de ces abandons de créances.

En revanche, énonce la Cour, le créancier, qui a consenti, pour les besoins de l'accord, une avance donnant naissance à une nouvelle créance, garantie par un cautionnement, est en mesure de demander l'exécution par la caution de cet engagement, en dépit de la caducité de l'accord.

Par conséquent, la Haute juridiction en conclut qu’a violé ce texte la cour d'appel qui, pour déclarer caduc le cautionnement du gérant de la société débitrice, a retenu que le concours consenti par la banque, destiné en partie au remboursement d'une ligne de découvert, qui constitue pour le surplus un nouvel apport en trésorerie, a été accordé dans le cadre de l'accord de conciliation auquel le prononcé du redressement judiciaire a mis fin et en déduit que l'échec de l'accord a entraîné la caducité de celui-ci dans son intégralité, notamment celle des engagements de caution

Observations. Rappelons ici que la caducité de l’accord de conciliation n’est prévue par aucun texte du livre VI du Code de commerce. C’est la jurisprudence qui, complétant les dispositions de l’article L. 611-12 de ce code, prévoyant la fin de l’accord de conciliation en cas d’ouverture d’une procédure collective pendant son exécution, a utilisé le concept de caducité pour préciser la nature de cette sanction. Cette jurisprudence prévoit aussi, comme conséquence de la caducité de l’accord, la perte des sûretés consenties en contrepartie des remises ou délais accordés par les créanciers parties à l’accord (Cass. com., 25 septembre 2019, n° 18-15.655, F-P+B N° Lexbase : A0346ZQU, G. Piette, Lexbase Affaires, octobre 2019, n° 609 N° Lexbase : N0692BYB). C’est le rappel opéré ici, en premier lieu, par la Cour de cassation.

Mais, l’ordonnance de réforme du livre VI du 15 septembre 2021 (ordonnance n° 2021-1193 N° Lexbase : L8998L7E) a pris le contrepied de cette jurisprudence de 2019 en insérant un article L. 611-10-4 N° Lexbase : L9112L7M, précisant que « la caducité ou la résolution de l’accord amiable ne prive pas d’effets les clauses dont l’objet est d’en organiser les conséquences ». Plus exactement, la mesure adoptée, si elle ne revient pas directement sur la solution de l'arrêt précité, permet de l’écarter par des clauses organisant les conséquences de la caducité ou résolution de l’accord. Et à ce sujet, il est fort à parier que les clauses de l’accord de conciliation prévoyant que les sûretés seront maintenues, en cas d’échec du plan, ne manqueront pas de se développer. La situation des créanciers concernés en sortira finalement améliorée car ils retrouveront l’intégralité de leur créance, redevenue pour le reste exigible (C. com., art. L. 611-12), avec une sûreté qui n’existait pas à l’origine. Il conviendra, ici, toutefois de prendre garde, notamment, au risque de nullité de la période suspecte.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les règles spécifiques à la conciliation constatée et à la conciliation homologuée, L’inexécution de l’accord, in Entreprises en difficulté, (dir. P.-M. Le Corre), Lexbase N° Lexbase : E7885EPQ.

 

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