Le Quotidien du 10 janvier 2022 : Droit pénal spécial

[Brèves] Stupéfiants : pas d’inconstitutionnalité, mais une définition utile

Réf. : Cons. const., décision n° 2021-960 QPC, du 7 janvier 2022 N° Lexbase : A69367HD

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par Adélaïde Léon

le 27 Janvier 2022

► Saisi d’une QPC portant sur le manque de définition des substances stupéfiantes et le renvoi à la compétence du pouvoir réglementaire pour fixer des règles dont la détermination revient constitutionnellement à la loi, le Conseil constitutionnel a retenu la conformité des dispositions visées, mais a fixé, à cette occasion, une définition qui pourrait à l’avenir être utilisée par la filière du CBD.

Rappel de la procédure. Le 13 octobre 2021, le Conseil constitutionnel avait été saisi par le Conseil d’État (CE, 1° et 4° ch.-r., 8 octobre 2021, n° 455024, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A824948Z) d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par l’association française des producteurs de cannabinoïdes et portant sur les articles L. 5132-1 N° Lexbase : L4601IRT, L. 5132-7 N° Lexbase : L0695LZR et L. 5132-8 N° Lexbase : L2213DLK du Code de la santé publique relatifs à la définition, la classification des plantes vénéneuses ainsi qu’aux opérations concernant ces produits.

Dans sa décision, le Conseil retient que la QPC portait plus spécifiquement sur :

  • le 2° de l’article L. 5132-1 du Code de la santé publique qui classe les substances stupéfiantes parmi les substances vénéneuses ;
  • ainsi que sur le mot « stupéfiants » figurant à l’article L. 5132-7 du même code, lequel prévoit que les plantes, substances ou préparations vénéneuses sont classées comme stupéfiants par décision du directeur général de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.

Motifs de la QPC. Il était reproché aux dispositions en cause de ne pas définir la notion de « substance stupéfiante » et de renvoyer au pouvoir règlementaire la détermination du champ d’application de la police spéciale qui réglemente ces substances. Le législateur aurait ainsi méconnu l’étendue de sa compétence dans des conditions affectant la liberté d’entreprendre.

Il était également fait grief aux dispositions en cause de méconnaitre le principe de légalité des délits et des peines, de proportionnalité des peines et d’égalité devant la loi pénale en ce sens qu’elles répriment le trafic et l’usage illicite de stupéfiants tout en renvoyant à l’article L. 5132-7 pour définir la notion de stupéfiants.

Décision. Le Conseil juge que les dispositions en cause sont conformes à la Constitution.

Le Conseil rappelle que les articles L. 5132-1 à L. 5132-10 N° Lexbase : L9509KXH du Code de la santé publique soumettent les substances vénéneuses à une police administrative spéciale visant, notamment, à réglementer leur production, leur commerce et leur emploi.

Par ailleurs, le Conseil juge que la notion de stupéfiants désigne des substances psychotropes qui se caractérisent par un risque de dépendance et des effets nocifs pour la santé. Les Sages estiment qu’en incluant ces substances parmi les substances nocives pour la santé humaine, le législateur n’a pas adopté des dispositions imprécises.

En outre, en confiant à l’autorité administrative le pouvoir de classer certaines substances dans cette catégorie, le législateur n’a pas conféré au pouvoir réglementaire la compétence pour fixer des règles dont la détermination revient constitutionnellement à la loi. Il appartient en effet à l’autorité administrative, sous le contrôle du juge, de procéder à ce classement en fonction de l’évolution de l’état des connaissances scientifiques et médicales.

Aux termes de ces constatations, le Conseil estime que le grief tiré de la méconnaissance par le législateur de l’étendue de sa compétence doit être écarté.

Enfin, les dispositions contestées n’instituant pas une sanction pénale, les griefs tirés de la méconnaissance des principes de nécessité et de proportionnalité des peines ainsi que de l’égalité devant la loi pénale ne peuvent qu’être jugés inopérants et donc écartés.

Si le Conseil constitutionnel ne donne pas raison aux requérants, on notera toutefois qu’en définissant ainsi la notion de stupéfiants, les sages ont livré des critères susceptibles d’être utilisés à l’avenir par la filière du CBD pour défendre l’idée que ce produit n’entre pas dans cette catégorie.

Contexte. Cette décision est rendue peu de jours après la publication au Journal officiel de l'arrêté du 30 décembre 2021, portant application de l'article R. 5132-86 du Code de la santé publique N° Lexbase : L9825IWS, lequel prévoit que sont "notamment interdites la vente aux consommateurs de fleurs ou de feuilles brutes sous toutes leurs formes, seules ou en mélange avec d'autres ingrédients, leur détention par les consommateurs et leur consommation".

La décision du Conseil constitutionnel intervient également alors que deux autres QPC, l’une transmise par le Conseil d’État (CE, 1 ch., 8 décembre 2021, n° 456556, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A53027E4) et l’autre par la Cour de cassation (Cass. crim., 24 novembre 2021, n° 21-83.406, F-D, QPC {"IOhtml_internalLink": {"_href": {"nodeid": 74951577, "corpus": "sources"}, "_target": "_blank", "_class": "color-sources", "_title": "Cass. crim., 24-11-2021, n\u00b0 21-83.406, F-D, qpc", "_name": null, "_innerText": "N\u00b0\u00a0Lexbase\u00a0: A50457D9"}}), sont également en instance sur le statut du cannabis et du CBD.

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