Le Quotidien du 10 janvier 2022 : Actualité judiciaire

[A la une] La Justice retire les bracelets électroniques des Balkany après des alertes mais ne les place pas en détention pour autant

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par Vincent Vantighem

le 27 Janvier 2022

Avec ses petits-enfants qu’elle surnomme affectueusement ses « lutins ». Avec ses copines. En train de jardiner. Parfois à la tronçonneuse. Avec ses chiens. Ou avec « l’homme de [sa] vie », Patrick. Isabelle Balkany a pris l’habitude, quasi quotidienne, de poster des photos d’elle sur les réseaux sociaux. Les observateurs les plus avisés n’avaient eu aucun mal à discerner le bracelet électronique qu’elle arborait à la cheville, bien souvent au-dessus du pantalon. Ce temps-là est révolu. Au moins pour quelques mois…

Le 17 décembre 2021, le tribunal d’application des peines (TAP) d’Évreux (Eure) a, en effet, annulé le placement sous surveillance électronique à domicile dont bénéficiaient Patrick et Isabelle Balkany, a-t-on appris le mardi 4 janvier. Condamnés à trois ans de prison ferme et dix ans d’inéligibilité pour « fraude fiscale » le 4 mars 2020, les anciens barons des Hauts-de-Seine qui ont régné pendant des années sur la ville de Levallois-Perret avaient bénéficié d’un aménagement de peine, après un passage de cinq mois à la prison de la Santé pour Patrick.

Sauf que la Justice a décidé de revenir sur cette mesure après avoir constaté que les époux Balkany, domiciliés dans leur moulin de Cossy, à Giverny (Eure), ne respectaient pas l’ensemble des obligations auxquelles ils étaient pourtant contraints. La première d’entre elles étant le respect de l’assignation à résidence... En dehors d’une fenêtre de quatre à six heures par jour, les époux Balkany avaient en effet interdiction de quitter le périmètre autorisé par leur juge d’application des peines et contrôlé par leurs bracelets électroniques. Sauf que ceux-ci ont « sonné » une centaine de fois depuis qu’ils en sont équipés, montrant qu’ils ont donc contrevenu à la mesure…

Le courrier au portail, les chiens dans le jardin...

Pour leur défense, Patrick et Isabelle Balkany ont invoqué la taille de leur propriété de Giverny (1 298 m² habitables, onze chambres, neuf salles de bains, une piscine de 100 m², un pool house, un terrain de tennis, d’après le rapport de la 32e chambre du tribunal judiciaire de Paris lu lors de leur procès en première instance) et les dysfonctionnements du système de surveillance dont ils sont équipés par la Justice. « La vérité, c’est que quand ils vont au portail chercher le courrier, leurs bracelets sonnent... Quand ils vont promener les chiens le soir dans le jardin, leurs bracelets sonnent…, résume Pierre-Olivier Sur, l’un de leurs avocats et ancien bâtonnier de Paris. Il y a en effet eu une centaine d’alertes mais, à chaque fois, ce n’était des alertes que d’une trentaine de secondes maximum ! Ce sont des problèmes mineurs. »

Sauf que le TAP d’Évreux ne leur a pas seulement opposé les « bip-bip » de leur récent outillage. Pour justifier le retrait de leurs bracelets, la Justice a également avancé le fait qu’ils n’avaient pas déféré à certaines convocations devant les services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP). Sur ce point, les anciens lieutenants de Nicolas Sarkozy se sont également défendus en évoquant leur situation personnelle. Et notamment les nombreux rendez-vous médicaux qui encombrent leurs agendas et les empêchent, donc, de rencontrer les agents chargés de leurs projets de réinsertion.

Au surplus, la Justice s’interroge aussi sur le remboursement des amendes, des dommages et intérêts et des frais de justice que l’ancien édile de Levallois-Perret et sa première adjointe d’alors ont été condamnés à verser. « C’est n’importe quoi !, s’étrangle Pierre-Olivier Sur à cette évocation. La Justice a saisi le fruit de la vente de la villa Pamplemousse à Saint-Martin (Antilles), soit 2,5 millions d’euros. Et il y a aussi la caution d’un million d’euros qui a été versée. Les Balkany ont donc déjà versé 3,5 millions d’euros. Ce n’est pas de leur faute si l’argent est mal fléché par les services de Bercy... »

Dans l’attente d’un examen par la chambre d’application des peines

Si les raisons de la décision du TAP sont discutées, ses conséquences le sont tout autant. Les bracelets électroniques étant désormais retirés, la procédure pénale, stricte en matière d’application des peines, prévoit normalement l’incarcération des époux Balkany. En toute logique, les septuagénaires auraient dû être inscrits sur le fichier des personnes recherchées (FPR) et conduits en détention au premier contrôle de police. En effet, si Patrick et Isabelle Balkany ont fait appel du jugement du TAP, celui-ci n’est pas suspensif.

Mais pourtant, les Balkany ne vont pas rejoindre Claude Guéant derrière les barreaux. Du moins pas tout de suite. Dominique Puechmaille, la procureure de la République d’Évreux, a en effet décidé de ne pas mettre à exécution « immédiatement » la décision du TAP, de ne pas demander à les conduire en prison. « Au regard de la personnalité des intéressés, j’ai, en opportunité, décidé d’attendre l’expiration des voies de recours », confie-t-elle. C’est-à-dire que les Balkany devront donc désormais attendre la décision, en appel, de la chambre d’application des peines pour connaître leur sort carcéral. Pour l’instant, aucune date d’audience n’est fixée.

Résultat, Patrick et Isabelle Balkany se retrouvent dans une situation incongrue : ils ne sont plus sous bracelet électronique mais pas plus en détention alors qu’ils doivent purger leur peine. « Si le placement sous surveillance électronique est rétabli [par la chambre d’application des peines], on décomptera le délai de retrait et s’ils sont placés effectivement en détention aussi, décrypte encore Dominique Puechmaille. L’idée, c’est qu’ils finissent par faire toute la durée de la peine soit avec un aménagement, soit sans. C’est pourquoi sur cette période intermédiaire de l’examen du recours, les écrous ont été levés. »

En attendant, les Balkany ont d’autres soucis à se faire. Le 9 février, ils doivent repasser devant la cour d’appel de Paris dans le volet « blanchiment fiscal » et « prise illégale d’intérêts ». Définitivement reconnus coupables d’avoir dissimulé plus de 13 millions d’euros au fisc, les anciens barons de droite doivent comparaître lors de cette audience qui ne sera consacrée qu’au quantum de leurs peines, après une décision de la Cour de cassation, en juin 2021. En mai 2020, dans ce dossier, Patrick et Isabelle Balkany avaient été condamnés, respectivement dans ce volet, à cinq et quatre ans d’emprisonnement. Si le 9 février, la cour d’appel venait à prendre une décision similaire, les services d’application des peines pourront se préparer à résoudre un nouveau casse-tête.

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