Le Quotidien du 26 mai 2021 : Vente d'immeubles

[Brèves] L’amiante, même confinée, peut caractériser un vice caché affectant la vente d’une maison

Réf. : Cass. civ. 3, 15 avril 2021, n° 20-16.320, FS-D (N° Lexbase : A80514PU)

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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, Rome Associés, Chargée d’enseignements à l’UPEC et Paris Saclay, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

le 25 Mai 2021

► La maison, qui contient de l’amiante même confinée par l’isolation, est affectée d’un vice caché lors de la vente, dès lors qu’elle en diminue l’usage de manière importante, et dans la mesure où aucun travaux affectant l’isolation des combles ou portant sur la toiture ne peuvent être entrepris sans traiter cette problématique, ce qui génère des travaux supplémentaires.

L’amiante tient encore d’un paradoxe. Alors que de nombreuses constructions en contiennent toujours, sous une forme non nocive parce que confinée, et que les travaux de désamiantage restent coûteux et complexes, les juges semblent de plus en plus sévères à l’égard des constructeurs, diagnostiqueurs et même vendeurs de biens contenant de l’amiante. L’arrêt rapporté en est une nouvelle illustration.

En l’espèce, des particuliers vendent leur maison à d’autres particuliers. Constatant, après expertise, la présence d’amiante dans les plaques de fibrociment constituant la couverture de l’immeuble, les acquéreurs assignent les vendeurs en dommages et intérêts sur le fondement de la garantie des vices cachés.

La cour d’appel de Chambéry, dans un arrêt rendu le 2 avril 2020, a retenu la responsabilité des vendeurs sur le fondement des vices cachés, au motif qu’ils avaient connaissance de la présence d’amiante au moment de la vente. En conséquence, la clause exonératoire de responsabilité contenue dans l’acte de vente leur est inopposable. Les vendeurs forment un pourvoi en cassation. Ils articulent que la présence d’amiante ne constitue pas, à elle seule, un vice caché dès lors qu’elle n’empêche pas l’usage de la chose et ne présente pas un danger. L’amiante est un matériau dont la dangerosité est liée à l’inhalation des fibres qui la composent.

Le pourvoi est rejeté. Si le vice ne rend pas la maison impropre à son usage dans la mesure où l’amiante est confinée par l’isolation, il en diminue l’usage de manière importante dès lors que des travaux affectant l’isolation intérieure des combles ou portant sur la toiture ne pourraient être entrepris sans qu’une procédure de travaux sur produits ou matériaux amiantés ne soit engagée. La maison est affectée d’un vice caché lors de la vente diminuant tellement son usage que, s’ils l’avaient connu, les acquéreurs n’en auraient donné qu’un moindre prix.

Il s’agit là d’un durcissement de la jurisprudence.

Pour exemple, la cour d’appel de Paris a pu considérer, dans un arrêt rendu le 12 novembre 2015 (CA Paris, 12 novembre 2015, n° 11/12332 N° Lexbase : A6998NW4), que la présence d’amiante dans les matériaux de construction de l’immeuble ne constituant pas un danger et ne rendant pas l’immeuble impropre à sa destination, ne caractérise pas un vice caché.

Autrement dit, l’acheteur ne pouvait rechercher la responsabilité du vendeur au titre de la garantie des vices cachés en raison de la découverte d’amiante que pour autant que le vendeur n’ait pas respecté les obligations mises à sa charge, par exemple en matière de diagnostics (pour exemple encore Cass. civ. 3, 7 octobre 2009, n° 08-12.920, FS-P+B N° Lexbase : A0833EMS ; Cass. civ. 3, 23 septembre 2009, n° 08-13.373, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A2422ELB, Constr. Urb. 2009, comm. 148) au regard, notamment, des articles 2 et 10 du décret du 7 février 1996 (N° Lexbase : L6473ASK), dont les obligations ne peuvent être transférées à l’acquéreur (Cass. civ. 3, 4 avril 2001, n° 99-11.522 N° Lexbase : A1867ATC).

Ce n’est plus le cas. L’impropriété n’est, en l’espèce, pas rapportée mais il y aura une diminution de l’usage du bien, sauf à réaliser des travaux pour enlever l’amiante, si les acquéreurs veulent eux-mêmes faire des travaux aux endroits qui contiennent de l’amiante.

Cela fait beaucoup de « si ».

L’arrêt rapporté est, également, l’occasion de rappeler les trois conditions cumulatives pour que la clause contractuelle de non-garantie des vices cachés puisse s’appliquer :

  • l’existence d’un vendeur non-professionnel ;
  • la mauvaise foi du vendeur ;
  • le respect de son obligation d’information par le vendeur.

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