La règle selon laquelle la prescription ne court pas contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement quelconque résultant soit de la loi, soit de la convention ou de la force majeure, ne s'applique pas lorsque le titulaire de l'action disposait encore, au moment où cet empêchement a pris fin, du temps utile pour agir avant l'expiration du délai de prescription. Tel est le principe énoncé par la première chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 23 juin 2011, au visa des articles 2251 (
N° Lexbase : L2539ABN) et 2277-1 (
N° Lexbase : L2565ABM) du Code civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 (Cass. civ. 1, 23 juin 2011, n° 10-18.530, F-P+B+I
N° Lexbase : A2995HUH). En l'espèce, M. P., preneur d'un local à usage commercial, ayant sollicité le renouvellement de son bail, avait reçu, le 24 septembre 1984, signification du refus de ses bailleurs sans offre de paiement d'une indemnité d'éviction ; il avait chargé de la défense de ses intérêts M. B., avocat. Le 15 octobre 1987, il avait été assigné en expulsion faute d'avoir contesté ce refus dans le délai de deux mois. L'arrêt rendu le 30 mars 1989 par la Cour de cassation, lui accordant le paiement d'une indemnité d'éviction ayant été cassé, M. P. avait été jugé forclos en sa demande en paiement d'indemnité d'éviction par arrêt du 28 novembre 1994 devenu irrévocable. Par exploit du 25 novembre 2004, imputant à la faute de M. B. l'impossibilité d'obtenir une indemnité d'éviction, il avait recherché sa responsabilité. M. B. ayant été déchargé de sa mission par courrier du 6 avril 1990, la prescription de l'action avait été soulevée en défense. Pour déclarer recevable comme non prescrite l'action de M. P., la cour d'appel d'Agen avait retenu que le délai de dix années ayant commencé à courir le 6 avril 1990 avait été suspendu jusqu'au 28 novembre 1994 et que l'action engagée par exploit du 25 novembre 2004 était donc recevable (CA Agen, 1ère ch., 31 mars 2010, n° 09/00693
N° Lexbase : A7527E38). Mais le raisonnement est censuré par la Cour suprême qui relève qu'en statuant ainsi, sans rechercher comme elle y était invitée si, à la date du 28 novembre 1994, M. P. ne disposait pas encore du temps nécessaire pour agir avant l'expiration du délai de prescription qui devait normalement survenir le 6 avril 2000, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
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