Dans un arrêt du 29 octobre 2009, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris avait déclaré irrecevable la constitution de partie civile de l'association Transparence International France contre trois chefs d'Etat étrangers et certaines personnes de leur entourage, des chefs de détournement de fonds publics, blanchiment, abus de biens sociaux, complicité de ces infractions, abus de confiance et recel, dans la très médiatique affaire des "biens mal acquis" (CA Paris, Pôle 7, 2ème ch., 29 octobre 2009, n° 2009/03948
N° Lexbase : A1264EQU ; lire
N° Lexbase : N1610BNX). Dans un arrêt du 9 novembre 2010, la Chambre criminelle de la Cour de cassation casse l'arrêt des juges parisiens, déclare recevable en l'état la constitution de partie civile et ordonne le retour du dossier au juge d'instruction du tribunal de grande instance de Paris afin de poursuivre l'information (Cass. crim., 9 novembre 2010, n° 09-88.272, F-D
N° Lexbase : A4182GGY). Elle rappelle, au visa des articles 2 (
N° Lexbase : L6998A4X), 3 (
N° Lexbase : L7014A4K) et 85 (
N° Lexbase : L8627HWG) du Code de procédure pénale que, pour qu'une constitution de partie civile soit recevable devant la juridiction d'instruction, il suffit que les circonstances sur lesquelles elle s'appuie permettent au juge d'admettre comme possible l'existence du préjudice allégué et la relation directe de celui-ci avec une infraction à la loi pénale. Or, pour infirmer la décision du juge d'instruction, sur appel du ministère public, la cour d'appel avait retenu notamment que seules la diffusion d'un bulletin d'information et l'organisation d'un colloque, en 2007, peuvent être attribuées à la partie civile et que celle-ci ne justifie pas d'un préjudice personnel, économique, directement causé par les infractions qu'elle dénonce. Les juges avaient ajouté, relève la Cour, que l'objet de l'association est la prévention et la lutte contre la corruption, prise dans une définition très large. Ils en avaient alors déduit que l'association entend se substituer aux Etats dans l'exercice de l'action publique alors que la recevabilité de l'action d'une association suppose une proximité et une adéquation créant un lien fort et spécifique entre celle-ci et une catégorie de comportements illégaux qui portent atteinte au but et à l'objet de sa mission. Mais, en prononçant ainsi, par des motifs pour partie inopérants tenant à la définition large de la corruption que la partie civile entend, selon ses statuts, prévenir et combattre, alors qu'à les supposer établis les délits poursuivis, spécialement le recel et le blanchiment en France de biens financés par des détournements de fonds publics, eux-mêmes favorisés par des pratiques de corruption mais distincts de cette infraction, seraient de nature à causer à l'association Transparence International France un préjudice direct et personnel en raison de la spécificité du but et de l'objet de sa mission, la chambre de l'instruction a méconnu le sens et la portée du principe ci-dessus rappelé.
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