Un salarié ne peut, tout à la fois, invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission et demander que cet acte de démission soit analysé en une prise d'acte, par lui, de la rupture de son contrat de travail en raison de faits et manquements imputables à l'employeur. Tel est le sens d'un arrêt rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation le 17 mars 2010 (Cass. soc., 17 mars 2010, n° 09-40.465, F-P+B
N° Lexbase : A8273ETL).
Dans cette affaire, un salarié, engagé le 10 avril 1995 en qualité d'aide conducteur, avait adressé à son employeur sa démission le 6 novembre 2000, avec préavis d'un mois. Il avait été en arrêt de travail pour maladie du 6 novembre au 7 décembre 2000. Par lettre du 20 novembre 2000, il avait rétracté sa démission, résultant, selon lui, de son état de santé. La société avait, le 24 novembre 2000, refusé cette rétractation et pris acte de sa démission. Elle avait été mise en redressement, puis en liquidation judiciaire les 2 juin 2003 et 2 juin 2004. Le salarié avait saisi la juridiction prud'homale de demandes d'indemnités au titre de la rupture de son contrat de travail. Débouté de ses demandes par l'arrêt rendu par la cour d'appel de Douai le 27 juin 2008, le salarié avait formé un pourvoi en cassation, faisant valoir que sa démission ne résultait pas d'une volonté claire et non équivoque, mais était la conséquence d'un syndrome dépressif réactionnel à des difficultés professionnelles ayant nécessité la prescription de Prozac. Toujours selon le pourvoi, la cour d'appel avait dénaturé le certificat médical du 19 octobre 2000 prescrivant ce médicament en retenant que le salarié ne justifiait pas du moment où il avait commencé à prendre son traitement, et que sa démission, remise en cause en raison de manquements imputables à son employeur, était équivoque, de sorte que le juge devait l'analyser en une prise d'acte de la rupture produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits la justifiait, ou dans le cas contraire, d'une démission. Le pourvoi est rejeté par la Haute juridiction qui considère, tout d'abord, que la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de preuve qui lui étaient soumis, a retenu qu'il n'était pas établi que la démission du salarié soit en relation avec son état de santé. Elle énonce, ensuite, que la cour d'appel n'a pas dénaturé le certificat médical du 19 octobre 2000 en retenant que le salarié ne justifiait pas de la date de la prise de son traitement. Elle conclut, enfin, en affirmant que le salarié ne peut, tout à la fois, invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission et demander que cet acte de démission soit analysé en une prise d'acte, par lui, de la rupture de son contrat de travail en raison de faits et manquements imputables à l'employeur (sur l'exigence d'une volonté libre de démissionner, cf. l’Ouvrage "Droit du travail"
N° Lexbase : E9027ES7).
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