Lecture: 38 min
N2004B3M
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par François Rousseau, professeur à Nantes Université, Laboratoire « Droit et changement social » (UMR CNRS 6297)
le 27 Mai 2025
Mots-clés : infractions sexuelles • viol • agressions sexuelles • consentement • mineurs
Alors que pour le commun des mortels, il va de soi que c’est bien l’absence de consentement qui caractérise le viol ou les agressions sexuelles, les choses sont plus subtiles en droit pénal français où cette absence de consentement doit résulter d’une « violence, contrainte ou surprise ». Ce modèle juridique est aujourd’hui remis en cause et fait l’objet d’un débat politique. Afin de l’éclairer (sans prétendre vouloir le trancher), il est proposé d’en rappeler l’histoire et d’en montrer les évolutions actuelles qui tendent à un renforcement général de la protection de l’intégrité du consentement, mais qui passe aussi paradoxalement, pour la protection plus spécifique des mineurs, par une indifférence à l’égard du consentement.
Si le consentement a toujours été au cœur de la répression du viol et plus généralement des agressions sexuelles, il n’a pas toujours eu la même portée ou signification sociale. En effet, pendant longtemps, la répression du viol protégeait tout autant l’honneur des familles que la liberté sexuelle de la victime. C’est pourquoi d’ailleurs le viol entre époux était par principe exclu. Cette conception ancienne du viol expliquait aussi sa définition étroite retenue par la jurisprudence (à défaut de définition légale) à savoir « la conjonction charnelle d’un homme avec une femme, contre le gré ou sans le consentement de celle-ci » [1]. Le consentement était donc bien techniquement au cœur de l’infraction mais cela ne veut pas dire pour autant que la liberté sexuelle était le seul enjeu social de l’infraction [2].
Il faudra attendre la grande réforme du 23 décembre 1980 pour que notre droit pénal intègre la profonde mutation sociale des mœurs opérées durant les années soixante et soixante-dix. Le viol s’émancipe des considérations morales liées au mariage pour devenir une protection de la liberté sexuelle et pas seulement des femmes [3]. En effet, le viol est avec cette réforme défini comme « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise », de sorte que la victime peut aussi bien être une femme qu’un homme. On précisera que depuis, cette définition a encore évolué : une première fois, à l’occasion de la loi n° 2018-703 du 3 août 2018 N° Lexbase : L6492MSA, pour étendre le viol aux actes de pénétration sexuelle commis sur la personne d’autrui ou « sur la personne de l’auteur » (auteur imposant une fellation à un homme) [4] et une seconde fois, à l’occasion de la loi n° 2021-478 du 21 avril 2021 N° Lexbase : L5564MSU, pour étendre le viol à tout acte bucco-génital (cunnilingus imposé à une femme) [5].
Pour ce qui est du consentement, la réforme de 1980 pourrait apparaitre assez paradoxale. Alors même que la liberté sexuelle devient le centre de gravité de la répression, le consentement est pourtant contourné par la loi qui ne le vise pas directement. En effet, le texte d’incrimination vise la « violence, contrainte, menace ou surprise ». Il est essentiel d’en rappeler les raisons et les enjeux judiciaires à l’époque. Il s’agissait par-là de tenter de mettre un terme à des pratiques judiciaires qui, en matière de viol, faisaient bien souvent tout autant le procès de l’auteur que celui de la victime pour savoir si cette dernière avait oui ou non consenti à l’acte sexuel. Le détour par un élément objectif, tel que la violence, la contrainte, la menace ou la surprise, devait permettre de recentrer le procès du viol sur l’auteur. Comme on a pu le dire, « la disparition du terme de consentement dans la définition pénale du viol fut, en son temps, perçue comme une garantie supplémentaire en faveur de la victime » [6].
Mais, ce procédé technique est aujourd’hui discuté, car il se retourne parfois contre la victime qui ne parvient pas à démontrer une situation de contrainte en particulier dans des contextes d’emprise, alors même que le consentement à l’acte sexuel semble faire défaut. C’est pourquoi des personnalités politiques comme des universitaires souhaiteraient que le consentement apparaisse de nouveau explicitement dans la définition des viols et plus largement des agressions sexuelles [7], à l’instar de certains systèmes étrangers comme le droit canadien ou le droit belge par exemple [8]. Ce débat a d’ailleurs largement été médiatisé à l’occasion du projet de directive européenne proposé par la commission en mars 2022 sur la lutte contre les violences sexuelles et les violences domestiques qui prévoyait initialement une définition du viol faisant directement référence au consentement, mais qui a finalement été retirée du texte final adopté le 14 mai 2024 par le Parlement européen pour des raisons de compétence législative de l’Union européenne en la matière [9]. On invoque parfois la Convention d’Istanbul du 11 mai 2011 ratifiée par la France [10] pour justifier l’intégration formelle du consentement dans la loi. Cet argument de droit international est cependant discutable ; certes la Convention fait référence explicitement au consentement mais elle n’en impose pas formellement l’intégration dans la législation pénale des États parties [11].
Si la conception juridique française du viol, héritée de la réforme de 1980, peut et doit être discutée aujourd’hui au regard du contexte sociopolitique et juridique, il est excessif d’y voir l’expression d’une forme de « sexisme des lois » [12]. La loi n’est d’ailleurs pas le seul levier dans la lutte contre les violences sexuelles, elle n’est que l’instrument juridique d’une politique criminelle largement dépendante du volontarisme des pouvoirs publics et comme on a pu très bien le dire, toute réforme en la matière « doit s’accompagner d’un véritable changement des mentalités et des pratiques judiciaires » [13]. À cet égard, il faut mesurer les progrès déjà parcourus. En effet, les statistiques judiciaires montrent une augmentation massive des condamnations pour viol et agressions sexuelles à la fin des années 1990 qui se poursuivra jusqu’en 2005, où un reflux assez net est observé jusqu’en 2016. Ce décrochage a interrogé, car en parallèle le nombre de plaintes n’a pas diminué. L’une des explications avancées serait le « traumatisme judiciaire » provoqué par la relaxe générale en appel dans l’affaire d’Outreau qui aurait alors plus ou moins consciemment amené les magistrats à davantage de rigueur et d’exigence en termes de preuves en matière de violences sexuelles [14].
Cela étant, depuis 2017, le nombre de condamnations repart à la hausse si l’on excepte l’année 2020 impactée par le confinement lié au COVID 19 [15].
Il sera intéressant de surveiller l’effet de la généralisation des Cours criminelles départementales à compter du 1er janvier 2023 dont les objectifs étaient de désengorger les Cours d’assises et d’éviter la correctionnalisation des viols [16] (le nombre de condamnations pour viol devrait logiquement augmenter sans nécessairement augmenter le nombre total de condamnation pour viol et agressions sexuelles). Et plus généralement, cette augmentation des poursuites et condamnations devraient se poursuivre, car le nombre de plaintes enregistrées ne cesse de croitre dans un contexte « post-#MeToo » de libération de la parole des victimes et d’une politique pénale toujours plus volontariste. À moyen terme, le nombre de plaintes ne peut qu’augmenter lorsque l’on sait, à l’appui d’une enquête de victimation datant de 2023, que seulement 5 % des personnes estimant avoir été victimes de violences sexuelles ont porté plainte.
En dépit de cette évolution de la politique criminelle qui a incontestablement produit des effets répressifs, en ce sens que l’on condamne davantage de viols et d’agressions sexuelles que par le passé, la justice pénale est encore parfois critiquée par ses insuffisances. On se souvient de l’émotion suscitée par la relaxe de la Cour d’assises de Seine-et-Marne, en 2017, d’un jeune majeur poursuivi pour viol à la suite d’une relation sexuelle avec une jeune mineure de 11 ans parce qu’elle était consentante [17].L’ampleur médiatique de l’affaire a d’ailleurs amené le Président de la République à s’exprimer pour de nouveau enclencher une énième réforme [18]. La sociologie du risque a depuis longtemps montré que plus un risque d’accident ou de catastrophe est contenu dans une société plus la réaction sociale est vive en cas d’accident ou catastrophe, car la fatalité n’est plus acceptable [19]. Ce n’est donc sans doute pas un paradoxe social si à l’heure où il n’y a jamais eu autant de poursuites et condamnations pour infractions sexuelles, les réactions sociales sont encore plus vives pour ce qui reste d’îlots d’impunité.
Dans ce contexte, le consentement doit-il faire son retour formellement au sein des agressions sexuelles ? Sans prétendre vouloir trancher la question, nous souhaitons brosser un état des lieux de la place du consentement au sein du viol et des agressions sexuelles. Cette place du consentement dans les infractions sexuelles est aujourd’hui assez paradoxale. En effet, d’un côté, on observe une forme de promotion du consentement de manière générale au regard notamment de l’extension de la notion de surprise opérée par la jurisprudence ces dernières années (I.). Et d’un autre côté, dans le cas spécifique des infractions sexuelles sur mineurs, on observe un mouvement radicalement opposé d’effacement de toute référence au consentement (II.).
I. La promotion du consentement dans les infractions sexuelles en général
Comme on l’a dit, le système français repose par principe sur une exigence d’objectivation du défaut de consentement par la violence, contrainte, menace ou surprise (A). Mais, la jurisprudence a fait évoluer la notion de surprise au cours de ces dernières années de sorte qu’on assiste à une forme de « subjectivation » [20] du défaut de consentement, qui renforce considérablement la place du consentement dans les agressions sexuelles (B).
A. L’objectivation traditionnelle du défaut consentement
Comme on a pu déjà l’expliquer, toute agression sexuelle, que ce soit un viol (acte de pénétration sexuelle) ou une autre agression sexuelle (acte d’attouchement sexuel), suppose d’être commise par « violence, contrainte, menace ou surprise ». Cet élément objectif présumant l’absence de consentement est juridiquement nécessaire, de sorte qu’un juge qui établirait une agression sexuelle en estimant que la victime n’a pas consenti à l’acte, mais sans démontrer une violence, une contrainte, une menace ou une surprise, sera censuré par la Chambre criminelle [21]. Comme on l’a déjà rappelé, l’intérêt de cette objectivation du défaut de consentement est de recentrer le procès du viol sur le comportement de l’auteur et moins sur l’attitude de la victime. Certains auteurs ont pu faire observer que la jurisprudence faisait preuve d’une relative souplesse et appréciait de manière assez extensive les notions de violence et de contrainte, en s’appuyant notamment sur le moindre coup porté à la victime ou bien à l’asymétrie des forces entre l’auteur et la victime [22]. Les difficultés en pratique se concentrent sur les situations d’emprise psychologique et de contrainte morale où la matérialisation de la contrainte est particulièrement difficile à établir. La jurisprudence retient une telle contrainte morale notamment en cas d’abus d’autorité « caractérisé » à l’égard d’une victime vulnérable soit en raison de son âge, de sa faiblesse psychologique ou de sa précarité économique. C’est par exemple l’infirmier qui impose une fellation à une patiente atteinte d’une psychonévrose dépressive incapable de manifester toute opposition [23]. C’est encore le directeur de colonie dont le comportement tyrannique a été reconnu sur sa jeune directrice adjointe de tout juste 18 ans timide et réservée qui a été incapable de s’opposer aux actes sexuels imposés par peur de la réaction de l’agresseur et du scandale en cas de révélation [24]. Un récent arrêt a, dans le même sens, semblé ouvrir la voie à la caractérisation d’une agression sexuelle résultant « d’un état de sidération » de la victime [25]. C’est enfin l’homme de 48 ans qui profite de la grande précarité sociale d’un mineur étranger en situation irrégulière afin d’avoir des relations sexuelles en échange d’avantages financiers [26]. Mais, en parallèle de ces quelques décisions, il faut bien admettre que de nombreuses autres ont parfois écarté la contrainte morale en dépit de l’autorité de l’auteur sur la victime ainsi que de l’écart d’âge entre les deux, à tel point que pour les mineurs de 15 ans le législateur a décidé de régler différemment les choses en se passant du consentement comme on le verra [27]. En dehors des victimes mineurs, il ne serait pas impossible de s’inspirer du délit d’abus de faiblesse, lequel intègre la notion de sujétion psychologique pour réprimer les dérives sectaires (article 223-15-2 du Code pénal N° Lexbase : L3278MMD) ; cette objectivation légale de l’emprise psychologique [28] serait tout aussi utile qu’une référence directe au consentement qui dans ce type d’hypothèse existe en apparence [29].
Il ne faudrait cependant pas croire que cette objectivation du défaut de consentement par la violence ou la contrainte est toujours un inconvénient sur le plan juridique. Il est bien souvent un élément central pour la reconnaissance d’un viol conjugal. En effet, si le viol entre époux a été clairement admis dans son principe par la jurisprudence [30] et reconnu par la loi [31], il n’en demeure pas moins qu’en pratique les relations sexuelles au sein du couple sont par présomption considérées comme ayant été consenties. C’est pourquoi toute brutalité ou violence au cours d’un acte sexuel sera de nature à renverser cette présomption de consentement au sein du couple. Et on fera remarquer que les arrêts qui ont reconnu le viol entre époux font état le plus souvent de violences au moment de l’acte sexuel [32]. On perçoit donc cette fois tout l’intérêt de l’objectivation du défaut de consentement par les violences au sein du couple et encore que, toute difficulté n’est pas à exclure, notamment si le couple à l’habitude d’avoir des pratiques sexuelles violentes [33].
B. La subjectivation nouvelle du défaut de consentement
On observe depuis quelques années une forme de « subjectivation » [34] du défaut de consentement à l’appui de la notion de surprise, laquelle va permettre à la jurisprudence de prendre en compte les intentions de la victime au moment de l’acte sexuel. La notion de « surprise » n’est pas forcément très parlante et il faut bien s’entendre sur son sens. Elle ne renvoie pas à l’idée d’imprévisibilité (de l’acte sexuel) ou d’étonnement [35], mais à celle de tromperie. Plus précisément, il s’agit pour l’auteur du viol ou de l’agression sexuelle d’obtenir un acte sexuel, non par la force, mais par la ruse en employant un stratagème assez comparable au comportement de l’escroquerie [36]. Si cette notion de surprise existe depuis longtemps [37], elle a pris ces dernières années une ampleur assez considérable.
Jusqu’alors, la surprise était en effet retenue pour des hypothèses où du fait de la ruse ou du stratagème la victime n’était pas en mesure de consentir consciemment à l’acte sexuel, soit que la victime était endormie [38] ou sous l’emprise de la drogue ou de l’alcool [39]. Dans toutes ces situations, c’est le principe même du consentement à l’acte sexuel qui semble faire défaut du fait du stratagème ou de la ruse. Mais, la jurisprudence est allée plus loin ces dernières années, en retenant le viol par surprise à l’encontre d’un homme d’une soixantaine d’années qui s’était fait passer pour un jeune trentenaire sur un site de rencontre afin de séduire une femme et d’avoir une relation sexuelle avec elle dans une chambre d’hôtel toutes lumières éteintes, la victime découvrant la réelle identité de son partenaire après coup [40]. La solution a été confirmée quelque temps après à propos d’un individu ayant profité d’un quiproquo avec une femme au cours d’une discussion en ligne pour se faire passer pour son ex-concubin et avoir là encore une relation sexuelle dans l’obscurité [41].
Le viol par surprise est ainsi admis dans ces affaires alors même qu’une forme de consentement à l’acte sexuel avait été donnée, mais pas totalement éclairé puisqu’il y avait mensonge sur les circonstances ou le contexte de cet acte [42]. Il y a là une évolution remarquable du viol qui peut résulter d’un défaut « relatif » du consentement, à savoir un vice du consentement sur l’une des conditions contextuelles déterminantes à la relation sexuelle [43]. C’est en cela qu’on peut parler de « subjectivation » du défaut du consentement qui dépend des éléments de contexte qui pour la victime étaient déterminants de son consentement à l’acte sexuel [44]. Il en résulte un renforcement indéniable de la liberté sexuelle et de l’intégrité du consentement [45], qui se rapproche considérablement de ce que pourrait produire une référence directe au consentement dans les infractions de viol et d’agressions sexuelles [46]. Il est vrai, néanmoins, que la surprise suppose un acte de tromperie ou un stratagème. Cette extension de la notion de surprise qui techniquement se défend mériterait néanmoins une réflexion sur ses limites [47]. Jusqu’à quel point faudrait-il considérer les éléments contextuels déterminants du consentement ? Un mensonge sur le métier, sur l’âge, sur la virginité, sur la religion pourrait-il être déterminant d’un consentement à l’acte sexuel ? À cet égard, on devrait pouvoir aujourd’hui traiter sous l’angle du viol et non plus de l’administration de substances nuisibles les situations où une personne dissimule à son partenaire sexuel sa séropositivité [48], à l’instar du droit canadien [49]. Sans vouloir remettre en cause le principe même de cette répression, cette conception plus subjective du viol et des agressions sexuelles fondée non pas sur le défaut du principe même de tout consentement mais sur un élément contextuel déterminant, n’appelle-t-elle pas une différenciation dans la répression ?
Quoi qu’il en soit et à l’aune de cette jurisprudence, le pas de l’intégration directe du consentement dans les incriminations d’agressions sexuelles n’est donc peut-être pas si grand à franchir [50]. On pourrait d’ailleurs parfaitement concevoir de combiner les deux méthodes à l’instar du système belge en affirmant, d’une part, que le viol et les agressions sexuelles sont définis comme tout acte sexuel commis sur autrui sans son consentement et, d’autre part, que le défaut de consentement est établi notamment en présence d’une violence, contrainte, menace ou surprise [51]. Une récente proposition de loi relative à la redéfinition du viol et des agressions sexuelles, déposée à l’Assemblée nationale le 1er avril 2025, va en ce sens [52].
En miroir de cette promotion du consentement, notre droit pénal a évolué de manière radicalement différente s’agissant des agressions sexuelles commises sur mineurs.
II. L’effacement du consentement dans les infractions sexuelles sur mineurs
La question du consentement dans les infractions sexuelles commises sur des victimes mineures a, elle aussi, suscité de nombreuses difficultés, dont la résolution s’est faite paradoxalement par l’effacement de toute référence au consentement dans deux situations : lorsqu’un acte sexuel est commis entre un majeur et un mineur de 15 ans (A) ou bien lorsqu’un acte sexuel est commis par un majeur sur un mineur dans un contexte incestueux (B).
A. L’acte sexuel du majeur sur un mineur de 15 ans
Avant la grande réforme opérée par la loi n° 2021-478 du 21 avril 2021, visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l’inceste N° Lexbase : L5564MSU, l’acte sexuel commis par un majeur sur un mineur de 15 ans ne constituait ni un viol, ni une agression sexuelle, dès qu’il était commis sans violence, contrainte, menace, ni surprise. L’acte était néanmoins réprimé au titre d’une « atteinte sexuelle sur mineur de 15 ans » (article 227-25 du Code pénal N° Lexbase : L2651L4X), mais dont les peines étaient inférieures à celles du viol ou d’une agression sexuelle sur mineur de 15 ans [53]. Cette distinction fondamentale entre atteinte sexuelle et agression sexuelle impliquait une possible aptitude au consentement d’un mineur de 15 ans face à un adulte, ce qui était de plus en plus contesté surtout lorsque la victime était très jeune et/ou que l’auteur adulte disposait d’une autorité liée à un lien familial ou une situation professionnelle. La jurisprudence avait d’ailleurs déjà eu l’occasion de considérer que les attouchements sexuels commis par un adulte sur de très jeunes enfants (en l’espèce 5 ans) constituaient bien une agression sexuelle par contrainte morale [54]. Mais, il faut bien reconnaitre que dans bien d’autres situations et notamment lorsque les victimes étaient plus âgées (13/14 ans), la jurisprudence admettait difficilement que la contrainte morale puisse résulter que de la seule différence d’âge entre l’auteur et la victime ou bien du seul abus d’autorité de l’auteur sur la victime [55].
C’est pourquoi le législateur est intervenu une première fois, à l’occasion de la loi n° 2010-121, du 8 février 2010 N° Lexbase : L5836MSX, pour introduire dans un nouvel article 222-22-1 du Code pénal N° Lexbase : L2619L4R une présomption légale de contrainte morale fondée sur la différence d’âge entre la victime mineure et l’auteur, d’une part, et l’abus d’autorité exercé par l’auteur sur la victime, d’autre part. Il fallait donc cumuler ces deux conditions pour établir la contrainte morale par présomption. Cet assouplissement probatoire restait donc limité et le législateur interviendra de nouveau sur ce dispositif à la suite des vives réactions politiques et médiatiques suscitées, en 2017, par les relaxes de la Cour d’assises du Val-d’Oise (13 février) et de Seine-et-Marne (17 novembre) où les poursuites pour viol ont été abandonnées contre de jeunes adultes ayant eu une relation sexuelle avec des jeunes filles de seulement 11 ans au moment des faits en raison de l’absence de violence ou de contrainte par ailleurs [56]. La loi du 3 août 2018 va donc prévoir que la contrainte morale peut non seulement résulter de la différence d’âge entre une victime et un auteur qui abuse de son autorité, mais elle va préciser que cet abus d’autorité peut résulter d’une différence d’âge « significative » entre l’auteur et la victime. Cette même loi ajoutera, en outre, que la contrainte morale peut résulter de l’abus de vulnérabilité d’une victime, mineure de 15 ans, ne disposant pas du discernement suffisant pour consentir à un acte sexuel.
Toutes ces subtilités probatoires ont perdu de l’intérêt depuis la réforme du 21 avril 2021 qui a amené le législateur à aller au bout de sa logique en considérant désormais que tout acte sexuel commis par un majeur sur un mineur de 15 ans constitue nécessairement un viol ou une agression sexuelle, sans avoir besoin de démontrer par ailleurs un acte de violence ou une situation de contrainte. Au cours des débats parlementaires, les députés et sénateurs ont hésité entre le seuil de 13 ans et celui de 15 ans. C’est finalement le seuil de 15 ans qui a été retenu, mais avec une exigence d’écart d’âge de 5 ans entre l’auteur et la victime (pour éviter la répression au titre du viol, d’un mineur de 17 ans venant d’avoir la majorité tout en ayant jusqu’alors des relations sexuelles avec une mineure de 14 ans).
La loi du 21 avril 2021 ne doit pas être vue comme un assouplissement de plus permettant de faciliter la répression du viol et des agressions sexuelles lorsque l’auteur est majeur et la victime mineure de 15 ans. Elle opère plus fondamentalement une modification sociologique de la ratio legis des agressions sexuelles sur mineurs de 15 ans. Désormais, il n’y a plus de détour par la contrainte morale et sa présomption, le seul fait qu’un acte sexuel soit commis par un majeur sur un mineur de 15 ans (sous réserve d’un écart d’âge de 5 ans) est en soi une agression. Il y a au fond l’idée que le mineur de 15 ans face à un adulte est « statutairement » dans l’incapacité de consentir à un acte sexuel [57]. Il ne s’agit donc plus d’une question de présomption d’absence de consentement, mais d’une question d’incapacité au consentement sexuel [58]. Toute référence au consentement dans cette situation a donc disparu. C’est à la même conclusion que l’on peut parvenir lorsque l’on observe l’évolution de la qualification d’inceste en droit pénal.
B. L’acte sexuel incestueux du majeur sur un mineur
Pendant longtemps, le droit pénal français ne s’est jamais intéressé formellement à l’inceste. Tout au plus, les agressions sexuelles (viol compris) étaient aggravées lorsqu’elles étaient commises par un ascendant de la victime (articles 222-24, 4° N° Lexbase : L2625L4Y et 222-28, 2° N° Lexbase : L6221LLY du Code pénal). Puis sous l’impulsion d’associations de victimes, le législateur a décidé d’introduire une qualification d’inceste, à l’occasion de la loi du 8 février 2010, en la définissant comme toute agression ou atteinte sexuelle commise « au sein de la famille sur la personne d’un mineur par un ascendant, un frère, une sœur ou par toute autre personne, y compris s’il s’agit d’un concubin d’un membre de la famille, ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait » (articles 222-31-1 N° Lexbase : L6216LLS et 227-27-2 N° Lexbase : L2662L4D du Code pénal) [59]. Mais la référence à un « membre de la famille » a été jugée trop imprécise par le Conseil constitutionnel qui a donc censuré cette nouvelle qualification [60]. Le législateur est revenu à la charge à l’occasion de la loi n° 2016-297, du 14 mars 2016 N° Lexbase : L6342MSP en redéfinissant l’inceste de manière plus précise comme les viols et les agressions sexuelles commis sur la personne d'un mineur par :
« 1° Un ascendant ;
« 2° Un frère, une sœur, un oncle, une tante, un neveu ou une nièce ;
« 3° Le conjoint, le concubin d'une des personnes mentionnées aux 1° et 2° ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité avec l'une des personnes mentionnées aux mêmes 1° et 2°, s'il a sur le mineur une autorité de droit ou de fait. »
Deux observations sont à faire sur cette définition et son rôle au lendemain de la loi de 2016. Tout d’abord, l’inceste en matière pénale est conçu à l’époque de manière étroite, c’est-à-dire à l’égard des seules victimes mineures, alors que le tabou sociologique de l’inceste se conçoit beaucoup plus largement y compris à l’égard de relations sexuelles entre adultes [61]. Ensuite, la loi de 2016 ne tirait aucune conséquence répressive de l’inceste, si ce n’est que le juge devait se prononcer sur le retrait de l’autorité parentale dans ce cas. C’est dire que la qualification d’inceste lorsqu’elle était retenue relevait surtout de la fonction « symbolique » du droit pénal [62].
Mais, les choses ont évolué par la suite, et ce, sur les deux aspects. Tout d’abord, la loi du 3 août 2018 a étendu la notion pénale d’inceste à toute victime de viols ou d’agressions sexuelles y compris en présence d’une victime majeure [63]. Ensuite et surtout, la loi du 21 avril 2021 a introduit une notion de viol incestueux en dehors de toute violence, contrainte ou surprise du seul fait des relations incestueuses entre un auteur majeur et une victime mineure, dès lors que l’auteur dispose d’une autorité sur le mineur (articles 222-23-2 N° Lexbase : L2621L4T et 222-29-2 N° Lexbase : L2631L49 du Code pénal). La qualification d’inceste a donc désormais une conséquence technique et répressive puisqu’elle permet de fonder un viol ou une agression sexuelle entre un auteur majeur et une victime mineure (par hypothèse de 15 à 18 ans). On pourrait y voir une sorte de présomption de non consentement, mais il y a peut-être là encore quelque chose de plus fondamental. Car, le législateur n’a pas fait formellement de l’inceste un cas de présomption de contrainte morale, comme il a pu le faire par le passé pour les victimes mineures à l’article 222-22-1. Il a en effet fait le choix d’une infraction spéciale qui pourrait par-là exprimer symboliquement une règle morale d’interdit de toute sexualité même sans contrainte dans les relations intrafamiliales entre un majeur et un mineur. Et là encore toute référence au consentement est indifférente ; le garçon de 17 ans qui souhaiterait entretenir des relations amoureuses et/ou sexuelles avec la nouvelle jeune compagne de son père ne le pourra pas avant ses 18 ans, sauf à exposer sa belle-mère à la répression. Il est vrai, cependant, que le législateur est encore hésitant à l’assumer pleinement puisqu’il a quand même exigé un rapport d’autorité dont le but est sans doute d’éviter la répression de collatéraux dont l’un seulement a atteint la majorité. Or, si la ratio legis était l’interdit de l’inceste entre majeur et mineur, cette considération devrait être indifférente.
Entre promotion et effacement du consentement, voilà l’état des lieux du droit pénal que l’on peut aujourd’hui dresser en matière de lutte contre les violences sexuelles. Les finalités sont communes et parées de bonnes intentions : mieux protéger les victimes. Mais ces deux voies expriment deux conceptions bien différentes de la sexualité : la première entend promouvoir la liberté sexuelle de chacun, la seconde pour les mineurs semble davantage inspirée par des considérations « d’ordre public sexuel » ou, pour le dire autrement, de morale sexuelle.
* Cette contribution est issue d’une intervention à la 16e édition du Congrès français de psychiatrie qui s’est tenu à Rennes du 27 au 30 novembre 2024.
[1] V. R. Merle et A. Vitu, Traité de droit criminel, Droit pénal spécial, par A. Vitu, t.2, Cujas, 1982, n° 1852 et s.
[2] V. D. Mayer, Le nouvel éclairage donné au viol par la réforme du 23 décembre 1980, D., 1981, p. 283.
[3] V. Collectif Raison garder, Mineurs et sexualité, Dalloz, 2e éd., 2022, p. 59 et s. ; D. Mayer, art. préc. ; sur cette évolution, v. également, M. Iacub, Le crime était presque sexuel et autres essais de casuistiques juridiques, Champs essais, 2002 ; G. Vigarello, Histoire du viol, Seuil, 1998 ; I. Théry, Moi aussi. La nouvelle civilité sexuelle, Seuil, 2022.
[4] La jurisprudence n’ayant pas souhaité procéder à cette extension, v. Cass. crim., 21 octobre 1998, n° 98-83.843 N° Lexbase : A5291ACX ; D., 1999, p. 7, note Y. Mayaud ; JCP, 1998, II, 10215, note D. Mayer, après avoir hésité, Cass. crim., 16 décembre 1997, n° 97-85.455 N° Lexbase : A1451ACQ ; JCP, 1998, II, 10074, note D. Mayer ; D., 1998, p. 212, note Y. Mayaud.
[5] À la suite d’un arrêt ayant écarté le viol pour un cunnilingus imposé à défaut d’avoir démontré une pénétration suffisante, v. Cass. crim., 14 octobre 2020, n° 20-83.273, F-D N° Lexbase : A96353X7 : AJ pénal, 2020, p. 590, obs. A. Darsonville.
[6] J. Portier et F. Sobry, L’importance d’être consentant : les enjeux d’une exigence de consentement sexuel explicite en droit pénal français, AJ pénal, 2019, p. 431 ; v. également, V. Le Goaziou, Viol. Que fait la justice, Presses de Sciences Po, 2019, chap. 4.
[7] V. A. Darsonville, Réformer l’incrimination de viol ?, Entretien, D., 2017, p. 640 ; J. Portier et F. Sobry, art. préc. ; v. également, la tribune : Faire du consentement libre et éclairé à l’acte sexuel la norme, par A. Darsonville, M. Lafourcade, F. lavallière, C. Le Maguerese et E. Tuaillon-Hibon, Dalloz actualité, 5 juin 2024 [en ligne].
[8] V. J.-C. Saint-Pau, Redéfinition du viol : le piège du consentement, Dr. pén., 2024, étude 14 ; v. également, B. Ancel, Vers une nécessaire consécration législative du consentement explicite ?, Dr. pén., 2025, étude 5.
[9] Sur ce point, v. P. Beauvais, L’Union européenne, nouvel acteur de la lutte pénale contre les violences sexistes, RTD Eur., 2024, p. 169.
[10] V. Loi n° 2014-476, du 14 mai 2014, autorisant la ratification de la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre les violences à l’égard des femmes et la violence domestique N° Lexbase : L1788I3M et décret n° 2015-148, du 10 février 2015, portant publication de la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (ensemble une annexe), signée à Istanbul le 11 mai 2011 N° Lexbase : L8709I7P.
[11] V. Art. 35 de la Convention.
[12] C. Le Magueresse, Viol et consentement en droit pénal français. Réflexions à partir du droit pénal canadien, Arch. polit. crim. 2012/1, n° 34
[13] B. Ancel, art. préc.
[14] J.-B. Jacquin, En dix ans, le nombre de personnes condamnées pour viol a chuté de 40%, Le Monde, 14 septembre 2018 [en ligne].
[15] Le graphique ci-dessous a été effectué à partir des données du ministère de la Justice (SDSE, fichier statistique du Casier judiciaire national).
[16] V. Rapport du comité d’évaluation et de suivi des cours criminelles, octobre 2022 [en ligne] ; v. également, S. Grunvald, Instauration des Cours criminelles départementales et correctionnalisation, in S. Grunvald, N. Rafin et F. Rousseau, L’instauration des Cours criminelles en France, de l’expérimentation à la généralisation : enjeux et perspectives, L’Harmattan, 2025 (à paraître).
[17] V. Le Monde avec AFP, Une cour d’assises acquitte un homme accusé d’avoir violé une fille de 11 ans, Le Monde, 11 novembre 2017 [en ligne].
[18] Discours du Président de la République à l’occasion de la journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes et du lancement de la grande cause du quinquennat, 25 novembre 2017 [en ligne].
[19] V. R. Castel, L’insécurité sociale, Éditions du Seuil, 2003 ; D. Bourg, P.-B. Joly et A. Kaufmann (ss-dir.), Du risque à la menace. Penser la catastrophe, Puf, 2013.
[20] Nous empruntons la formule à J.-C. Saint-Pau, art. préc.
[21] Par exp., v. Cass. crim., 10 mai 2001, n° 00-87.659 N° Lexbase : A5696AT7 ; Cass. crim., 21 février 2007, n° 06-88.735, F-P+F N° Lexbase : A6119DU8 ; Cass. crim., 25 janvier 2023, n° 22-83.344, F-B N° Lexbase : A06509AC.
[22] V. F. Desprez, Preuve et convictions du juge en matière d’agressions sexuelles, Arch. pol. crim., 2012, p. 45.
[23] V. Cass. crim., 8 juin 1994, n° 94-81.376 N° Lexbase : A8745ABI.
[24] V. Cass. crim., 8 février 1995, n° 94-85.202 N° Lexbase : A5646CPS.
[25] V. Cass. crim., 11 septembre 2024, n° 23-86.657, F-B N° Lexbase : A53365YB : Dr. pén., 2024, n° 182, obs. P. Conte ; AJ pénal, 2024, p. 518, obs. A. Darsonville ; RSC, 2024, p. 810, obs. Y. Mayaud.
[26] V. Cass. crim., 4 septembre 2019, n° 18-84.334, F-D N° Lexbase : A6493ZMG.
[27] V. infra II.
[28] Laquelle est déjà consacrée légalement à l’article 226-14 N° Lexbase : L3283MMK, depuis une loi du 30 juillet 2020, pour permettre au médecin de dénoncer aux autorités judiciaires des violences conjugales sans le consentement de la victime, sur cette consécration, v. M. Trachman & A. Amado, L’emprise saisie par le droit pénal. Problématisation des violences conjugales et protection des victimes en France, RSC, 2024, p. 297.
[29] En ce sens, v. J.-C. Saint-Pau, art. préc.
[30] V. Cass. crim., 5 septembre 1990, n° 90-83.786 N° Lexbase : A3056ABS ; Cass. crim., 11 juin 1992, n° 91-86.346 N° Lexbase : A0722ABD ; CEDH, 22 novembre 1995, Req. n° 20166/92, SW c/ RU N° Lexbase : A8378AW9 ; v. également, CEDH, 23 janvier 2025, Req. n° 13805/21, H.W. c/ France N° Lexbase : A53956SM, estimant que l’attribution aux torts exclusifs d’un divorce à l’épouse refusant d’avoir des relations sexuelles après le mariage est contraire à la liberté sexuelle garantie par l’article 8 de la Convention.
[31] V. C. pén., art. 222-22 N° Lexbase : L2618L4Q, al. 2 tel, que modifié par les lois n° 2006-399 du 4 avril 2006, renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commise contre les mineurs N° Lexbase : L5958MSH et n° 2010-769 du 9 juillet 2010, relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants N° Lexbase : L7042IMR : « Le viol et les agressions sexuelles sont constitués […] quelle que soit la nature des relations existant entre l’agresseur et la victime, y compris s’ils sont unis par les liens du mariage ».
[32] V. Cass. crim., 5 septembre 1990, préc. ; Cass. crim., 11 juin 1992, préc. ; v. également, Cass. crim., 17 juillet 1984, n° 84-91.288 N° Lexbase : A8260AA8, pour un viol sous la menace d’un couteau ; V. J.-M. Bruguière, Le devoir conjugal, D., 2000, chron. p. 10, qui relativise de ce fait la portée de ces arrêts.
[33] V. Cass. crim., 29 mars 2017, n° 17-80.237, F-P+B N° Lexbase : A0868UTC.
[34] J.-C. Saint-Pau, art. préc.
[35] V. Cass. crim., 25 avril 2001, n° 00-85.467 N° Lexbase : A1203AWH.
[36] V. Cass. crim., 22 janvier 1997, n° 96-80.353 N° Lexbase : A1098ACN.
[37] V. Cass. crim., 25 juin 1857 : S. 1857, 1, 711, ayant admis la tentative de viol à l’encontre d’un homme s’étant introduit de nuit dans le lit d’une femme en faisant croire au retour de son mari afin de tenter d’avoir une relation sexuelle avec elle.
[38] Cass. crim., 9 janvier 2019, n° 18-82.829, F-D N° Lexbase : A9701YS4 ; v. également, Cass. crim., 11 janvier 2017, n° 15-86.680, F-P+B N° Lexbase : A0754S8G.
[39] Cass. crim., 1er octobre 2013, n° 13-84.944, F-D N° Lexbase : A3257KML ; l’administration d’une drogue à autrui en vue d’obtenir une relation sexuelle constitue désormais, en soi, un délit, v. article 222-30-1 du Code pénal N° Lexbase : L6200LL9, introduit par la loi n° 2018-703, du 3 août 2018, renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes N° Lexbase : L6492MSA.
[40] V. Cass. crim., 23 janvier 2019, n° 18-82.833, FS-P+B N° Lexbase : A3070YUA : Dr. pén., 2019, n° 42, obs. F. Gauvin ; D., 2019, p. 361, note E. Dreyer ; AJ pénal, 2019, p. 153, obs. A. Darsonville ; v. également, M. Daury-Fauveau, Le viol par mensonge (ou Casanova, pointure 36 fillettes), D., 2019, p. 945.
[41] V. Cass. crim., 4 septembre 2019, n° 18-85.919, F-D N° Lexbase : A6486ZM8.
[42] V. A. Darsonville, Rép. pén. Dalloz, Viol, n° 34.
[43] V. E. Dreyer, Viol par tromperie sur l’apparence, D., 2019, p. 361 ; v. également, F. Rouvière, Le viol interprété à la lumière du droit civil, RTD civ., 2019, p. 701.
[44] J.-C. Saint-Pau, art. préc.
[45] V. A. Dejean de la Batie, Du tabou au fantasme, les dérives sémantiques des infractions sexuelles, in Mélanges P. Conte, LexisNexis, 2023, p. 333.
[46] C. Guery, On crée le crime en le nommant : pour une redéfinition du viol, RSC, 2020, p25.
[47] V. J.-C. Saint-Pau, art. préc.
[48] V. B. Chapleau, La pénalisation de la transmission du VIH par voie sexuelle, Dr. pén., 2006, étude 18 ; R. Ollard, De l’opportunité de la pénalisation de la transmission du VIH par voie sexuelle : analyse de droit comparé, RSC, 2016, p. 37. Cette réponse pénale éviterait d’ailleurs d’avoir à démontrer la contamination effective de la victime dont l’absence empêchera de retenir l’administration de substance nuisible, v. Cass. crim., 5 mars 2019, n° 18-82.704, FS-P+B N° Lexbase : A0187Y3C : Dr. pén., 2019, n° 80, obs. P. Conte ; en effet, pour le viol, l’infraction sera consommée du seul fait des relations sexuelles à la suite du mensonge sur la maladie du partenaire, indépendamment de toute contamination ; cette dernière, en revanche, pourrait aggraver le viol puisqu’elle constituerait une infirmité permanente, v. article 222-24 du Code pénal N° Lexbase : L2625L4Y.
[49] V. J.-C. Saint-Pau, art. préc.
[50] Et à défaut de bouleversement technique, la référence expresse au non-consentement pourrait avoir quelques vertus pédagogiques en matière d’éducation sexuelle, v ; D. Salas, Faut-il une loi pour redéfinir le viol ?, Les Cahiers de la justice 2025, p. 7, éducation sexuelle dont on conviendra qu’elle ne relève pas en premier lieu du droit pénal.
[51] V. J.-C. Saint-Pau, art. préc. Le nouveau Code pénal belge adopté le 22 février 2024 prévoit d’autres situations dans lesquelles le consentement est exclu : abus de faiblesse de la victime ou bien encore état de sommeil ou d’inconscience de la victime, v. art. 138 du Nouveau Code Pénal belge.
[52]Sur laquelle, v. J.-C. Saint-Pau, Vers une redéfinition mixte du viol et des autres agressions sexuelles : beaucoup de bruit pour rien ?, JCP G, 2025, p. 493.
[53] Même si ces peines ont été considérablement durcies : deux ans d’emprisonnement lors de l’adoption du Code pénal actuel en 1994, puis cinq ans d’emprisonnement avec la loi n° 98-468, du 17 juin 1998, relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu’à la protection des mineurs N° Lexbase : L8570AIA et enfin sept ans d’emprisonnement depuis la loi n° 2018-703, du 3 août 2018, renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes N° Lexbase : L6492MSA. Par comparaison, le viol sur mineurs de 15 ans est puni de vingt ans de réclusion criminelle, v. C. pén., art. 222-24 N° Lexbase : L2625L4Y.
[54] V. Cass. crim., 7 décembre 2005, n° 05-81.316, FS-P+F+I N° Lexbase : A1215DMX : Dr. pén., 2006, n° 31, obs. M. Véron ; RSC, 2006, p. 319, obs. Y. Mayaud.
[55] V. Cass. crim., 21 octobre 1998, n° 98-83.843 N° Lexbase : A5291ACX (belle-mère) ; Cass. crim., 14 novembre 2001, n° 01-80.865 N° Lexbase : A4800CHA (beau-père) ; Cass. crim., 10 mai 2001, n° 00-87.659 N° Lexbase : A5696AT7 (oncle) ; v. également, Cass. crim., 18 juin 2003, n° 02-87.216 N° Lexbase : A35330EL, pour une victime de 9/10 ans.
[56] Ces décisions n’étaient peut-être pas incontestables et l’une d’entre elle fut d’ailleurs réformée en appel l’année suivante (CA Paris, 27 novembre 2018).
[57] Sur le concept de « consentement statutaire », v. I. Théry, Moi aussi. La nouvelle civilité sexuelle, Seuil, 2022.
[58] En ce sens, v. Cons. const., décision n° 2023-1058 QPC, du 21 juillet 2023 N° Lexbase : A86161BQ. À cet égard, n’y a-t-il pas une incohérence ou contradiction à avoir maintenu le délit d’atteinte sexuelle, dans l’hypothèse d’un écart d’âge inférieur à 5 ans (majeur 18 ans et mineure 14 ans…) ? Car, en l’absence de l’écart d’âge, la capacité sexuelle du mineur n’est-elle pas rétablie ? Sur les raisons du maintien de cette qualification, v. J.-B. Perrier & F. Rousseau, Chronique législative, RSC, 2021, p. 453.
[59] V. O. Baldes, Le retour de l'inceste dans le Code pénal : pour quoi faire ?, Dr. pén., 2010, étude n° 7 ; A. Montas et G. Roussel, La pénalisation de l’inceste : nommer l’innommable, APC 2010/1, n° 32, p. 289 ; pour une analyse de droit comparé, v. Ch. Guéry, L’inceste : étude de droit comparé, D., 1998, chron. p. 47.
[60] V. Cons. const., décision n° 2011-163 QPC, du 16 septembre 2011 : Dr. pén., 2011, n° 130, obs. Véron ; RSC, 2012, p. 221, obs. de Lamy ; RPDP, 2011, p. 694, obs. A. Lepage, abrogeant l’article 222-31-1 N° Lexbase : L6216LLS ; v. également, Cons. const., décision n° 2011-222, du 17 février 2012 N° Lexbase : A9099MWW, abrogeant pour les mêmes motifs l’article 227-27-2 N° Lexbase : L2662L4D.
[61] Le droit civil s’en fait d’ailleurs l’écho avec les règles d’opposition à mariage du Code civil qui par hypothèse concerne des personnes majeures, v. articles 161 à 163 du Code civil N° Lexbase : L8846G9I.
[62] Sur cette fonction, v. S. Simonet, Les lois pénales didactiques, Th. Lyon 3, 2024.
[63] Depuis, la loi du 21 avril 2021, l’inceste est défini aux articles 222-22-3 N° Lexbase : L2621L4T et 222-29-3 N° Lexbase : L2631L49 du Code pénal et a été élargi aux infractions sexuelles commises par un grand-oncle ou une grand-tante.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:492004