Le Quotidien du 24 mars 2022

Le Quotidien

Actes administratifs

[Brèves] Validation du droit des préfets de déroger aux « normes arrêtées par l'administration »

Réf. : CE 5e - 6e ch. réunies, 21 mars 2022, n° 440871, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A99157QB

Lecture: 4 min

N0890BZY

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par Yann Le Foll

Le 23 Mars 2022

► Le décret autorisant les préfets à prendre, à raison de circonstances locales, des décisions non règlementaires dérogeant aux « normes arrêtées par l'administration » n’est pas contraire au principe d'égalité.

Grief. Est ici demandée l’annulation du décret n° 2020-412 du 8 avril 2020, relatif au droit de dérogation reconnu au préfet N° Lexbase : L6512LW4.

Rappel. Le décret n° 2017-1845 du 29 décembre 2017 N° Lexbase : L7915LHM a autorisé certains préfets identifiés à déroger pendant deux ans, pour la prise d'une décision non réglementaire relevant de leur compétence, aux normes réglementaires applicables dans certaines matières limitativement énumérées, dans le but d'alléger les démarches administratives, de réduire les délais de procédure ou de favoriser l'accès aux aides publiques. Dans un arrêt rendu le 17 juin 2019, le Conseil d’État a considéré que ce décret ne constitue pas une violation du principe de non-régression dès lors qu’il ne permet pas de déroger à des normes réglementaires ayant pour objet de garantir le respect de principes consacrés par la loi (CE 5e - 6e ch. réunies, 17 juin 2019, n° 421871, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A6649ZEY). Le décret n° 2020-412 du 8 avril 2020 pérennise ce dispositif avec quelques modifications (voir N° Lexbase : N3052BYP). 

Principe de séparation des pouvoirs. Le décret ne permet aux préfets de déroger qu'à des normes « arrêtées par l'administration ». Il n'a pas pour objet et ne saurait légalement avoir pour effet de leur permettre de déroger à des normes réglementaires visant à garantir le respect de principes consacrés par la loi. Dans ces conditions, les moyens tirés de la méconnaissance du principe de séparation des pouvoirs et du principe de non-régression consacré par le II de l'article L. 110-1 du Code de l'environnement N° Lexbase : L6857L74 peuvent être écartés (à ce sujet lire, S. Becue, Éclaircissements sur l'effectivité du principe de non-régression du droit de l'environnement, Lexbase public, février 2018, n° 490 N° Lexbase : N2490BXI).

Principe d'égalité. Le même décret ne peut conduire les préfets à décider de dérogations qu'afin d'alléger les démarches administratives, de réduire les délais de procédure ou de favoriser l'accès aux aides publiques. De telles dérogations ne peuvent intervenir que dans les matières limitativement énumérées à l'article 1er du décret. Elles ne peuvent être accordées, dans le respect des normes juridiques supérieures, que si elles sont justifiées par un motif d'intérêt général, qu'elles ne portent pas atteinte aux intérêts de la défense ou à la sécurité des personnes et des biens, ni ne portent d'atteinte disproportionnée aux objectifs poursuivis par les dispositions auxquelles il est dérogé. Dans ces conditions, eu égard au champ du décret attaqué et à ses conditions de mise en œuvre, dont le respect est placé sous le contrôle du juge administratif, la possibilité reconnue aux préfets, à raison de circonstances locales, de déroger à des normes établies par l'administration, laquelle ne devrait pas conduire à des différences de traitement injustifiées, n'est pas contraire au principe d'égalité.

Principe de sécurité juridique. Le décret attaqué détermine clairement et précisément les matières dans le champ desquelles les préfets sont susceptibles de mettre en œuvre le pouvoir de dérogation qu'il leur ouvre, ainsi que les objectifs auxquels les dérogations doivent répondre et les conditions auxquelles elles sont soumises.

La circonstance qu'il n'énumère pas les normes susceptibles de faire l'objet d'une dérogation, ni ne détaille les motifs d'intérêt général ou les circonstances locales susceptibles de justifier les dérogations accordées sur son fondement, n'est pas de nature à caractériser une méconnaissance de l'objectif à valeur constitutionnelle de clarté et d'intelligibilité de la norme.

Pour les mêmes motifs, les moyens tirés de ce que le décret serait entaché d'incompétence négative ou méconnaîtrait le principe de sécurité juridique ou serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation, faute d'encadrer suffisamment le pouvoir de dérogation reconnu aux préfets, doivent être écartés.

Décision. Le pourvoi est donc rejeté.

newsid:480890

Assurances

[Brèves] La transaction conclue entre la victime et l’assuré : la participation de l’assureur aux négociations ne lui rend pas la transaction opposable

Réf. : Cass. civ. 1, 16 mars 2022, n° 20-13.552, FS-B N° Lexbase : A63727Q3

Lecture: 2 min

N0876BZH

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par Claire-Anne Michel, Maître de conférences, Université Grenoble-Alpes, Centre de recherches juridiques (CRJ)

Le 24 Mars 2022

► Lorsqu’un assureur a stipulé que la transaction intervenue en dehors de lui ne lui sera pas opposable, le seul fait de participer à la négociation ne permet pas de considérer qu’il a participé à la conclusion de l’accord et donc de considérer que la transaction lui est opposable.

Faits et procédure. Les faits ayant donné lieu à l’arrêt rendu le 16 mars 2022 par la première chambre civile ne sont pas banals : une société s’est vu confier l’impression de billets de banque dont certains avaient été volés pendant la réalisation du contrat. Après avoir assigné son assureur afin d’obtenir sa garantie, la société ayant imprimé les billets a conclu une transaction avec la société lui ayant passé la commande. Deux précisions méritent d’être ajoutées. D’une part, le contrat d’assurance précisait qu’une transaction conclue en dehors de l’assureur serait inopposable à celui-ci, stipulation autorisée par l’article L. 124-2 du Code des assurances N° Lexbase : L0107AA9. D’autre part, l’assureur avait été associé au déroulement des négociations, tout en ayant fait part de sa volonté de ne pas participer à la transaction. Le seul fait d’être associé au déroulement des négociations permettait-il d’admettre que l'assureur avait donné son accord à cette transaction ?

Solution. Au visa de l’article L. 124-2 du Code des assurances et de l’ancien article 1134 alinéa 1er du Code civil, siège de la force obligatoire des conventions, la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel (CA Paris, 2-5, 14 janvier 2020, n° 18/17529 N° Lexbase : A95663AK) pour violation de la loi, considérant qu’il ne résulte pas du fait, d’une part, que l’assureur ait été informé des modalités de la transaction, et d’autre part que s’il a, par son attitude exprimé sa volonté de ne pas y participer, il avait été associé au déroulement des négociations, que l’assureur « avait participé à la conclusion de l’accord ». La transaction lui était donc inopposable. Rares sont les arrêts à envisager la question. L’arrêt attire donc l’attention. En effet, par le passé, la Cour de cassation avait considéré que la présence des représentants de l’assureur aux pourparlers ayant abouti à la transaction suffisait à considérer que la transaction n’avait pas été conclue en dehors de lui quand bien même il ne l’avait pas signée (Cass. civ. 1, 30 juin 1970, n° 69-10.411 N° Lexbase : A5589CK9).

newsid:480876

Concurrence

[Brèves] Cumul de poursuites et de sanctions de nature pénale en droit de la concurrence : la CJUE précise la protection qu’offre le droit de l’Union contre la double incrimination

Réf. : CJUE, gde ch., 22 mars 2022, deux arrêts, aff. C-117/20 N° Lexbase : A00087RQ et aff. C‑151/20 N° Lexbase : A00097RR

Lecture: 7 min

N0889BZX

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par Vincent Téchené

Le 30 Mars 2022

► D’une part, la protection conférée par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ne s’oppose pas, compte tenu de la possibilité de limiter l’application du principe ne bis in idem, à ce qu’une entreprise soit sanctionnée pour une infraction au droit de la concurrence lorsque, pour les mêmes faits, elle a déjà fait l’objet d’une décision définitive pour non-respect d’une réglementation sectorielle ;

D’autre part, le principe ne bis in idem ne s’oppose pas à ce qu’une entreprise soit poursuivie, par l’autorité de concurrence d’un État membre, et se voie infliger une amende pour une infraction, en raison d’un comportement qui a eu un objet ou un effet anticoncurrentiel sur le territoire de cet État membre, alors que ce comportement a déjà été mentionné, par une autorité de concurrence d’un autre État membre, dans une décision définitive.

Pour rappel, la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après « la Charte ») dispose que « nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement en raison d’une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné dans l’Union par un jugement pénal définitif conformément à la loi ». Par deux arrêts rendus le 22 mars 2022, la Cour de justice se prononce sur l’étendue de la protection offerte par cette interdiction de la double incrimination (qui s’appelle aussi le principe ne bis in idem) en droit de la concurrence.

  • Affaires soumises à la CJUE

Affaire « bpost » (CJUE, 22mars 2022, aff. C-117/20). La société bpost s’est vu infliger successivement des amendes par deux autorités nationales belges. En juillet 2011, une première sanction pécuniaire lui a été imposée par l’autorité de régulation du secteur postal qui a conclu que le régime de rabais appliqué par cette entreprise à partir de l’année 2010 était discriminatoire envers certains de ses clients. En mars 2016, cette décision a été annulée par la cour d’appel de Bruxelles, dont l’arrêt est devenu définitif, au motif que la pratique tarifaire en cause n’était pas discriminatoire. En décembre 2012, l’autorité de concurrence belge a entretemps infligé à bpost une amende pour abus de position dominante en raison de l’application de ce même système de rabais entre janvier 2010 et juillet 2011. La société bpost a donc contesté devant la cour d’appel de Bruxelles la régularité de cette seconde procédure au nom du principe ne bis in idem.

Affaire « Nordzucker e.a » (CJUE, 22 mars 2022, aff. C151/20). La Cour suprême d’Autriche a été saisie par l’autorité autrichienne de la concurrence d’un appel dans une procédure visant à faire constater que Nordzucker, un producteur allemand de sucre, a enfreint le droit de l’Union en matière d’ententes ainsi que le droit de la concurrence autrichien et à faire condamner Südzucker, un autre producteur allemand du sucre, à une amende pour la même infraction. Cette procédure est fondée, notamment, sur un entretien téléphonique au cours duquel des représentants de ces deux entreprises ont discuté du marché autrichien du sucre. Cet entretien avait déjà été mentionné, par l’autorité allemande de la concurrence, dans une décision devenue définitive. Par cette décision, cette autorité a constaté que les deux entreprises avaient violé tant le droit de l’Union que le droit allemand de la concurrence et a imposé une sanction pécuniaire à Südzucker.

  • Décisions de la CJUE

Réunie en grande chambre, la Cour rappelle, dans les deux affaires, que l’application du principe ne bis in idem est soumise à une double condition : il est nécessaire, d’une part, qu’une décision antérieure soit devenue définitive (condition « bis ») et, d’autre part, que les mêmes faits soient visés par la décision antérieure et par les poursuites ou les décisions postérieures (condition « idem »). La Cour précise que, en droit de la concurrence, comme dans tout autre domaine du droit de l’Union, le critère pertinent aux fins d’apprécier l’existence d’une même infraction (« idem ») est celui de l’identité des faits matériels, compris comme l’existence d’un ensemble de circonstances concrètes indissociablement liées entre elles qui ont conduit à l’acquittement ou à la condamnation définitive de la personne concernée. Elle rappelle cependant que des limitations peuvent être apportées par la loi à l’exercice d’un droit fondamental, comme celui qui est conféré par l’interdiction de la double incrimination (le principe ne bis in idem), si elles respectent le contenu essentiel de ces droits, sont nécessaires et répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union.

Affaire « bpost » (CJUE, 22mars 2022, aff. C-117/20). Selon la Cour, la protection conférée par la Charte ne s’oppose pas, compte tenu de cette possibilité de limiter l’application du principe ne bis in idem, à ce qu’une entreprise soit sanctionnée pour une infraction au droit de la concurrence lorsque, pour les mêmes faits, elle a déjà fait l’objet d’une décision définitive pour non-respect d’une réglementation sectorielle (par exemple, la réglementation du secteur postal régissant les activités de bpost). Ce cumul de poursuites et de sanctions est toutefois conditionné par l’existence de règles claires et précises permettant de prévoir quels actes et omissions sont susceptibles d’en faire l’objet ainsi que la coordination entre les deux autorités compétentes. De surcroît, les deux procédures doivent avoir été menées de manière suffisamment coordonnée dans un intervalle de temps rapproché et l’ensemble des sanctions imposées doit correspondre à la gravité des infractions commises. Sinon, la seconde autorité publique qui intervient viole l’interdiction de la double incrimination en engageant des poursuites.

Affaire « Nordzucker e.a » (CJUE, 22 mars 2022, aff. C151/20). Selon la Cour, le principe ne bis in idem ne s’oppose pas à ce qu’une entreprise soit poursuivie, par l’autorité de concurrence d’un État membre, et se voie infliger une amende pour une infraction, en raison d’un comportement qui a eu un objet ou un effet anticoncurrentiel sur le territoire de cet État membre, alors que ce comportement a déjà été mentionné, par une autorité de concurrence d’un autre État membre, dans une décision définitive. La Cour souligne, toutefois, que cette dernière décision ne doit pas reposer sur le constat d’un objet ou d’un effet anticoncurrentiel sur le territoire du premier État membre. Si tel est le cas, en revanche, la seconde autorité de la concurrence qui engage des poursuites relatives à cet objet ou cet effet viole l’interdiction de la double incrimination. La dernière question posée dans cette affaire interroge la Cour sur l’applicabilité du principe ne bis in idem aux procédures ayant concerné l’application d’un programme de clémence et dans lesquelles une amende n’a pas été infligée. La Cour indique à cet égard que le principe ne bis in idem est applicable à une procédure de mise en œuvre du droit de la concurrence dans laquelle, en raison de la participation de la partie concernée au programme national de clémence, une infraction à ce droit ne peut qu’être constatée.

Observations. On notera que, dans une décision du 25 mars 2022, le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution les dispositions du paragraphe VII de l'article L. 470-2 du Code de commerce N° Lexbase : L9607LQU, qui prévoient l’exécution cumulative de sanctions prononcées à l'encontre d'un même auteur pour des manquements en concours relevant de pratiques restrictives de concurrence (Cons. const., décision n° 2021-984 QPC, du 25 mars 2022 N° Lexbase : A30397RY, V. Téchené, Lexbase Affaires, mars 2021, n° 711 N° Lexbase : N0941BZU).

newsid:480889

Construction

[Brèves] Cession de créances, sous-traitance et action directe contre le maître d’ouvrage

Réf. : Cass. civ. 3, 16 mars 2022, n° 20-22.037, FS-B N° Lexbase : A63837QH

Lecture: 3 min

N0839BZ4

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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignement à l’UPEC et Paris Saclay, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

Le 23 Mars 2022

► Le maître d’ouvrage ne peut invoquer, à l’égard du cessionnaire, l’inopposabilité de la cession de créance faite en fraude des droits du sous-traitant ;
► Il le peut néanmoins lorsque le sous-traitant exerce l’action directe à son encontre.

Cette décision permet de revenir sur un article relativement méconnu : l’article 13-1 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 N° Lexbase : C715548I. Aux termes de cet article, l'entrepreneur principal ne peut céder ou nantir les créances résultant du marché ou du contrat passé avec le maître de l'ouvrage qu'à concurrence des sommes qui lui sont dues au titre des travaux qu'il effectue personnellement.

Lorsque l'entrepreneur principal cède sa créance sans fournir de cautionnement préalable, en méconnaissance de l’article 13-1 précité, la cession est inopposable au sous-traitant (Cass. civ. 3,  18 mars 1992, n° 89-21.405, P N° Lexbase : A4815AHS : RJDA 6/92 n° 582), même occulte (Cass. civ. 3, 9 juin 1999, n° 98-10.291, P-B N° Lexbase : A5401AWX : RJDA 11/99 n° 1207) et non pas nulle (Cass. civ. 3, 17 janvier 2019, n° 17-11.853, F-D N° Lexbase : A6539YTD). La nullité aurait pour effet de priver le cessionnaire de tout droit sur la créance, y compris pour la partie des travaux qui n'ont pas été sous-traités.

Il en va différemment lorsque le sous-traitant exerce une action directe à l’encontre du maître d’ouvrage comme l’illustre l’arrêt rapporté.

Statuant sur renvoi après cassation, la cour d’appel de Nancy, dans un arrêt rendu le 7 septembre 2020 (CA Nancy, 7 septembre 2020, n° 19/00999 N° Lexbase : A28643TA), considère que les premiers juges d’appel ont inexactement décidé que les cessions de créances pratiquées en contravention à l’interdiction édictée à l’article 13-1 étaient nulles alors que la sanction est l’inopposabilité aux sous-traitants concernés.

Un nouveau pourvoi est formé. Il est, notamment, articulé que la cession de créance consentie en contravention à l’interdiction ci-avant rappelée, est seulement inopposable au sous-traitant, lequel, s’il n’exerce pas l’action directe que cette disposition a pour objet de protéger, n’est pas concerné par le litige opposant la banque cessionnaire de la créance de l’entrepreneur principal, créancier cédé, au maître d’ouvrage, débiteur cédé, de sorte qu’en l’absence de tout conflit entre le sous-traitant et le banquier cessionnaire, le maître d’ouvrage n’est pas fondé à se prévaloir de cette disposition pour refuser le paiement de cette créance cédée.

La Haute juridiction censure. Le cessionnaire n’était pas en conflit avec le sous-traitant lequel n’avait pas été indemnisé sur le fondement de l’action directe mais sur un fondement quasi-délictuel.

Le sous-traitant, qui agit en indemnisation de son préjudice sur le fondement quasi-délictuel de l’article 14-1 de la loi sur la sous-traitance N° Lexbase : C715948N, n’est pas en conflit avec le cessionnaire pour l’attribution des sommes dues par le maître d’ouvrage en exécution du marché de travaux.

Cette affaire, en procédure depuis 2007, montre les difficultés de l’articulation des dispositions de la loi sur la sous-traitance en cas de cession de créance, pourtant fréquente sur les chantiers.

newsid:480839

Droit Administratif Général

[Brèves] Destruction par l’administration de documents devant être communiqués : reconstitution obligatoire, sauf charge de travail manifestement disproportionnée

Réf. : CE 9e - 10e ch. réunies, 17 mars 2022, n° 452034, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A99087QZ

Lecture: 2 min

N0851BZK

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par Yann Le Foll

Le 23 Mars 2022

► Une administration ayant procédé à la destruction de documents devant être communiqués a l’obligation, le cas échéant, de les reconstituer, sauf charge de travail manifestement disproportionnée.

Principe. Les administrations mentionnées à l'article L. 311-1 du Code des relations entre le public et l'administration N° Lexbase : L4912LA8 ne peuvent s'exonérer de leur obligation d'assurer l'exécution d'une décision de justice annulant une décision de refus de communication de documents administratifs et de celle de communiquer les documents sollicités dans les conditions prévues par cette décision, qu'à la condition d'établir l'impossibilité matérielle de communiquer lesdits documents.

Elles ne peuvent en aucun cas procéder à la destruction délibérée des documents dont le refus de communication a été annulé par le juge administratif, alors même que la réglementation ne leur imposerait plus, à cette date, de les conserver.

Si elles ont procédé à une telle destruction après la notification du jugement, elles sont tenues d'accomplir toutes les diligences nécessaires pour les reconstituer, sous réserve d'une charge de travail manifestement disproportionnée, sans préjudice de l'engagement de leur responsabilité.

Faits. Le tribunal administratif de Nantes a, d'une part, annulé la décision implicite par laquelle la société X a refusé de communiquer à l'association Nos Amis Les Animaux (NALA) une copie des registres légaux d'entrée et de sortie des animaux de la fourrière et des registres de suivi sanitaire de l'ensemble des communes où elle assure sa mission, pour la période allant du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2015 et, d'autre part, enjoint à la société X de communiquer à l'association NALA, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du jugement et après occultation de certaines mentions, l'ensemble des documents sollicités.

Position CE. Si, pour justifier de l'absence d'exécution du jugement du 11 décembre 2018 qui lui avait été notifié le 19 décembre suivant, la société faisait état de ce qu'elle avait procédé à la destruction des documents sollicités au début du mois de janvier 2019, le tribunal, après avoir relevé, par une appréciation souveraine non entachée de dénaturation, que la société s'était bornée à produire une attestation non circonstanciée de son gérant, a pu en déduire, sans commettre d'erreur de droit, qu'elle ne justifiait ni de l'exécution du jugement, ni de la destruction des documents demandés.

Décision CE. La société X n'est donc pas fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque.

newsid:480851

Droit financier

[Brèves] Délit d'initiés : un journaliste financier peut communiquer des informations privilégiées lorsque c'est nécessaire et proportionné

Réf. : CJUE, gde ch., 15 mars 2022, aff. C-302/20 N° Lexbase : A48437QG

Lecture: 3 min

N0858BZS

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par Vincent Téchené

Le 23 Mars 2022

► La divulgation par un journaliste d’une information privilégiée portant sur la publication prochaine d’un article relayant des rumeurs concernant des sociétés cotées en Bourse est licite lorsqu’elle est nécessaire pour mener à bien une activité de journalisme et respecte le principe de proportionnalité.

Faits et procédure. Un journaliste a publié sur le site internet d’un journal deux articles relayant des rumeurs de dépôt d’offres publiques d’achat sur les titres de Hermès (par LVMH) et de Maurel & Prom. Les prix indiqués dépassaient largement les cours de ces titres sur Euronext. Cette publication a fait augmenter considérablement les cours de ces titres. Peu avant la publication des articles, des ordres d’achat ont été passés sur les titres en question par certains résidents britanniques, qui les ont vendus une fois cette publication intervenue. Le journaliste s’est vu infliger par l’Autorité des marchés financiers (AMF, décision du 24 octobre 2018, sanction N° Lexbase : L6147LMM) une sanction pécuniaire d’un montant de 40 000 euros parce qu’il aurait fait part de la publication prochaine de ses articles à ces résidents britanniques et leur aurait ainsi communiqué des « informations privilégiées ».

Saisie d’un recours en annulation de cette décision, la cour d’appel de Paris (CA Paris, 5-7, 9 juillet 2020, n° 18/28497 N° Lexbase : A76887LC) a interrogé la Cour de justice à titre préjudiciel sur l’interprétation des dispositions du droit de l’Union sur les opérations d’initiés (Règlement n° 596/2014, du 16 avril 2014, sur les abus de marchés N° Lexbase : L4814I3P) :

  • une information portant sur la publication prochaine d’un article de presse relayant une rumeur de marché peut être considérée comme une information privilégiée, relevant de l’interdiction de divulguer de telles informations ?
  • quelles sont les exceptions à l'interdiction de divulguer des informations privilégiées, dans le contexte particulier de la presse ?

Décision. Selon la Cour de justice, une information portant sur la publication prochaine d’un article de presse relayant une rumeur de marché concernant un émetteur d’instruments financiers est susceptible de constituer une information « à caractère précis » et, donc, de relever de la notion d’« information privilégiée », lorsqu’elle fait notamment mention du prix auquel seraient achetés les titres, du nom du journaliste ayant signé l’article ainsi que de l’organe de presse en assurant la publication.

Toutefois, elle précise que la communication d’informations privilégiées à des fins journalistiques peut être justifiée, en vertu du droit de l’Union, au titre de la liberté de la presse et de la liberté d’expression. Les fins journalistiques peuvent englober des travaux d’investigation préparatoires à la publication réalisés par un journaliste pour vérifier la véracité des rumeurs. En revanche, la divulgation d’une information privilégiée par un journaliste n’est licite que lorsqu’elle est considérée comme nécessaire à l’exercice de sa profession et comme respectant le principe de proportionnalité.

Doivent ainsi être examinées par la juridiction nationale les questions suivantes :

  • d’une part, est-ce qu’il était nécessaire pour le journaliste qui cherche à vérifier la véracité d’une rumeur de marché de divulguer à un tiers, outre la teneur de cette rumeur, le fait qu’un article relayant cette rumeur serait publié prochainement ?
  • d’autre part, est-ce qu’une éventuelle restriction à la liberté de la presse que l’interdiction d’une telle divulgation engendrerait serait excessive, compte tenu de son effet potentiellement dissuasif pour l’exercice de l’activité journalistique ainsi que des règles et des codes auxquels les journalistes sont soumis, par rapport au préjudice qu’une telle divulgation risque de porter non seulement aux intérêts privés de certains investisseurs mais aussi à l’intégrité des marchés financiers ?

newsid:480858

Fiscalité immobilière

[Brèves] Maintien de la réduction d’impôt « Pinel » : précisions sur le niveau de qualité des logements à respecter

Réf. : Décret n° 2022-384, du 17 mars 2022, relatif au niveau de qualité des logements résultant de l'application en France métropolitaine de l'article 168 de la loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021 N° Lexbase : L9987MBI

Lecture: 3 min

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par Marie-Claire Sgarra

Le 23 Mars 2022

Le décret n° 2022-384, du 17 mars 2022, publié au Journal officiel du 18 mars 2022, précise le niveau de qualité des logements prévu à l'article 168 de la loi de finances pour 2021 à respecter en France métropolitaine pour bénéficier du maintien des taux de la réduction d'impôt sur le revenu « Pinel » en faveur de l'investissement immobilier locatif intermédiaire.

Pour rappel, la loi de finances pour 2021 (loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021 N° Lexbase : L3002LZ9) a :

  • prorogé le dispositif « Pinel » jusqu’en 2024 avec des taux de réduction d’impôt dégressif ;
  • étendu la condition liée à la réalisation d’investissements dans des bâtiments d’habitation collectifs aux logements que le contribuable fait construire.

Taux de réduction applicables :

 

Investissements réalisés avant le 31 décembre 2022

2023

2024

Engagement initial pris pour une durée de 6 ans

Métropole : 12 %

Outre-mer : 23 %

Métropole : 10,5 %

Outre-mer : 21,5 %

Métropole : 9 %

Outre-mer : 20 %

Engagement initial pris pour une durée de 9 ans

Métropole : 18 %

Outre-mer : 29 %

Métropole : 15 %

Outre-mer : 26 %

Métropole : 12 %

Outre-mer : 23 %

 

Que prévoit le décret du 17 mars 2022 ? Le décret a pour objet de définir, pour la France métropolitaine, les critères du niveau de qualité en matière de performance énergétique et environnementale prévu au II de l'article 168 de la loi de finances pour 2021, au regard de la RE 2020 et de la nouvelle méthode de détermination du diagnostic de performance énergétique (DPE), qui permettent de bénéficier du maintien des taux de la réduction d'impôt Pinel pour les logements acquis ou construits par les contribuables en 2023 et 2024.

Pour les logements que le contribuable acquiert en 2023 et 2024 dans le cadre d'une opération de construction, ou qu'il fait construire et qui font l'objet d'un dépôt de demande de permis de construire ces mêmes années (logements mentionnés au 1° du B du I de l'article 199 novovicies du CGI N° Lexbase : L6970LZ8), le décret définit des niveaux de performance énergétique et environnementale minimale à respecter, fondés sur les exigences de la RE 2020 qui entreront en vigueur en 2025.

Pour ces mêmes logements que le contribuable acquiert en 2024, ou, pour ceux qu'il fait construire et qui font l'objet d'un dépôt de demande de permis de construire en 2024, il est ajouté un critère de performance énergétique et environnementale complémentaire : le respect d'une classe A du DPE.

Par dérogation, pour les logements acquis en 2023 et 2024 dans le cadre d'une opération de construction dont la demande de permis de construire a été déposée avant le 1er janvier 2022, date d'entrée en vigueur de la réglementation environnementale des nouvelles constructions de bâtiments (RE 2020), des dispositions spécifiques sont toutefois prévues : elles supposent le respect des critères fondés sur le référentiel E+C- utilisé pour préfigurer la RE 2020 et d'une classe A du DPE au sens de l'article L. 173-1-1 du Code de construction et de l'habitation.

Pour les logements acquis par les contribuables en 2023 et 2024 dans le cadre d'une opération autre qu'une opération de construction, et pour laquelle par conséquent ni la RE 2020 ni le référentiel E+C- ne sont applicables au bâtiment, le respect d'une classe A ou B du DPE au sens de l'article L. 173-1-1 du Code de construction et de l'habitation est exigé.

Le décret prévoit enfin les critères de qualité d'usage et de confort à respecter en France métropolitaine pour l'application du II de l'article 168 de la loi de finances pour 2021.

Le texte est entré en vigueur le 19 mars 2022.

Lire en ce sens, M-C. Sgarra, Dispositif Pinel : fiche pratique, Lexbase Fiscal, avril 2021, n° 862 N° Lexbase : N7187BYT.

 

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Formation professionnelle

[Brèves] Résiliation du contrat d’apprentissage par l’employeur après 2 mois dans l’entreprise : prise en compte des salaires et des congés payés dans l'indemnisation de l'apprenti

Réf. : Cass. soc., 16 mars 2022, n° 19-20.658, FP-B N° Lexbase : A63827QG

Lecture: 2 min

N0838BZ3

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Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/82667083-edition-du-24-03-2022#article-480838
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par Lisa Poinsot

Le 23 Mars 2022

► Dans l’hypothèse où l’employeur décide de rompre le contrat d’apprentissage après la période légale de 2 mois autorisant la résiliation unilatérale du contrat, ce dernier doit verser à l’apprenti les salaires dus jusqu’au terme du contrat, lesquels ouvrent droit au paiement des congés payés afférents.

Faits et procédure. Un apprenti voit son contrat d’apprentissage rompu unilatéralement par l’employeur plus de 2 mois après le début de la formation professionnelle. L’apprenti saisit la juridiction prud’homale afin de contester la régularité de la rupture de son contrat.

La cour d’appel (CA Rouen, 17 janvier 2019, n° 16/04183 N° Lexbase : A3368YTW) constate que la rupture unilatérale par l’employeur du contrat d’apprentissage est intervenue hors des cas prévus par la loi. Elle retient alors que l’apprenti est fondé à obtenir une indemnité équivalente au rappel de salaire jusqu’au terme du contrat mais ne peut pas prétendre aux congés payés afférents.

La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation, en formation plénière, s’appuie sur l’article L. 6222-18 du Code du travail N° Lexbase : L9944LLU, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 N° Lexbase : L2618KG3. Elle rappelle qu’en vertu de ce texte, l’employeur peut rompre le contrat d’apprentissage durant les deux premiers mois d’apprentissage. Au-delà, en cas de rupture unilatérale du contrat d’apprentissage, l’employeur doit payer les salaires soit jusqu’à la date de la résiliation judiciaire prononcée par le juge saisi soit jusqu’au terme du contrat. L’indemnisation comprend le paiement des congés payés.

Pour aller plus loin :

  • v. Cass. soc., 4 mai 1999, n° 97-40.049, publié N° Lexbase : A4694AGX: le juge qui prononce la résiliation du contrat aux torts de l'employeur doit le condamner à payer une indemnité réparant le préjudice subi par l'apprenti du fait de la rupture anticipée du contrat ;
  • v. aussi : ÉTUDE : Le contrat d’apprentissage, La résiliation du contrat d’apprentissage après l’échéance des 45 premiers jours en entreprise, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E1330ETG.

 

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