Lexbase Fiscal n°857 du 11 mars 2021

Lexbase Fiscal - Édition n°857

Contrôle fiscal

[Brèves] Holding animatrice et attestation fiscale : la Cour de cassation tranche en faveur de l’administration fiscale dans l'affaire « Finaréa »

Réf. : Cass. com., 3 mars 2021, n° 19-22.397, FS-P+R (N° Lexbase : A01484KP) ; n° 18-15.826, F-D (N° Lexbase : A01724KL) ; n° 19-21.161, F-D (N° Lexbase : A01174KK) ; n° 20-11.838, F-D (N° Lexbase : A02414K7) ; n° 20-11.839, F-D (N° Lexbase : A00334KG) ; n° 20-11.840, F-D (N° Lexbase : A01534KU)

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par Marie-Claire Sgarra

Le 10 Mars 2021

► Est-ce la fin de l’un des plus gros redressements fiscaux à l’ISF ?

La Cour de cassation s’est prononcée, le 3 mars 2021, en faveur de l’administration fiscale dans la célèbre affaire « Finaréa ».

Ce contentieux qui dure depuis une décennie, concerne près d’un millier de contribuables qui avaient bénéficié d’une réduction d’ISF au titre de leurs investissements dans un fonds dédié au financement des PME. Ce redressement est estimé à plus de 25 millions d’euros.

Rapide rappel des faits.

⇒ les requérants, assujettis à l’ISF, ont pour bénéficier d’une réduction d’impôt conformément à l’article 885-0 V bis du Code général des impôts (N° Lexbase : L3204LCN), joint à leurs déclarations d’impôt une attestation de la société Finaréa certifiant qu’ils avaient investi une certaine somme dans le capital de cette société, se présentant comme une holding animatrice de groupe ;

⇒ l’administration fiscale a contesté ces réductions d’impôts en faisant valoir :

  • que les attestations délivrées par Finaréa n’étaient pas recevables,
  • que les sociétés du réseau Finaréa n’avaient pas le caractère de holding animatrice.

 

Voici les deux problématiques de cette affaire : la valeur de l’attestation fiscale et la notion de holding animatrice.

 

🔎 Comment encourager l’investissement dans les PME ?

La loi n° 2007-1223, du 21 août 2007, en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite loi « TEPA » (N° Lexbase : L2417HY8), a mis en place un dispositif de soutien aux PME reposant sur un mécanisme d’incitation fiscale.

Ce dispositif permet aux redevables de l'ISF qui le souhaitent d'imputer sur leur cotisation :

  • 75 % du montant des versements effectués au titre de la souscription directe ou indirecte au capital de PME au sens communautaire ou de la souscription de titres participatifs de sociétés coopératives de production (SCOP), dans la limite annuelle de 50 000 euros ;
  • 50 % du montant des versements effectués au titre de la souscription de parts de fonds d'investissement de proximité, dans la limite annuelle de 10 000 euros.

📢 À noter : le taux de réduction d’ISF, à l’origine de 75 % des sommes investies, a depuis été revu à 50 % du montant investi dans la limite d’un plafonnement annuel de la réduction d’ISF de 18 000 euros pour les FIP et FPCI, et de 45 000 euros pour les investissements réalisés en direct au sein des PME.

Pour bénéficier de la loi TEPA ISF, le contribuable doit :

  • être une personne physique soumise à l'ISF ;
  • effectuer un investissement (apport en numéraire ou en nature) par souscription au capital d'une PME s'engager à conserver les titres pendant 5 ans.

La loi de finances rectificative pour 2015 (loi n° 2015-1786, du 29 décembre 2015, de finances rectificative pour 2015 N° Lexbase : L1131KWS) a modifié ce dispositif.

Pour l’essentiel on notera :

  • un recentrage du dispositif sur les PME de moins de sept ans,
  • l’impossibilité pour les associés et actionnaires d’investir de nouveau dans leur société.

 

🔎 Sur la valeur de l’attestation fiscale

L’attestation fiscale est un document délivré par l’administration fiscale pour justifier qu’un contribuable est à jour de ses obligations fiscales déclaratives et du paiement des taxes et impôts dont il est redevable.

Elle peut être demandée par un particulier, une entreprise ou un organisme.

La délivrance de cette attestation constitue une preuve de cette régularité. L’attestation est valable pour l’année visée par la demande.

👉 Solution de la Cour de Cassation : « Si la remise de ce document est une formalité nécessaire à l’obtention de l’avantage en cause, elle ne suffit pas à démontrer que les conditions prévues à l’article 885-0 V bis sont réunies et ne confère aucun droit au contribuable à bénéficier de la réduction d’impôt à laquelle il prétend, fût-il de bonne foi ».

Précisions : Christian Patria avait attiré l’attention du ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industriel sur la façon dont sont traités, par certains fonctionnaires des impôts, des contribuables qui présentent, pour bénéficier de la déduction fiscale, des reçus fiscaux délivrés par des associations se déclarant ouvres ou organisme d'intérêt général. La réponse apportée par le ministre était à l’époque la suivante : « Le contribuable qui se prévaut de ce document n'encourt pour sa part aucun redressement, sauf si sa mauvaise foi ou l'existence de manœuvres frauduleuses, par exemple la collusion avec la personne ou l'organisme ayant délivré l'attestation, est démontrée par l'administration » (QE n° 55415 de M. Patria Christian, JOANQ 18 janvier 2005, réponse publ. 3 mai 2005 p. 4599, 12e législature N° Lexbase : L4827G8B).

Pour les avocats des contribuables, cette réponse ministérielle devait être prise comme une doctrine relative au mécanisme de l’attestation quel que soit l’impôt concerné. Cet avis n’a pas été partagé par la Cour de cassation pour qui cette réponse portait sur l’impôt sur le revenu et non sur l’ISF.

 

🔎 Sur la notion de « holding animatrice »

La notion complexe de « holding animatrice » agite les esprits depuis plusieurs années.

Un cadre légal imprécis :

La holding animatrice est définie par l’article 885-0 V bis du Code général des impôts comme celle qui, outre la gestion d’un portefeuille de participations, participe activement à la conduite de la politique de son groupe et au contrôle de ses filiales, et qui rend, le cas échéant et à titre purement interne, des services spécifiques.

La définition donnée par le Code général des impôts ne donne pas de précisions sur la notion de « conduite active de la politique d’un groupe ». D’où la multiplication des contentieux à ce sujet. Les juridictions ont donné tour à tour les contours de cette notion.

L’apport de la jurisprudence :

Pour l’essentiel on retiendra les éléments apportés par la jurisprudence récente.

Par un important arrêt de principe, le Conseil d’État a précisé la définition de la holding animatrice (CE 3°/8°/9°/10° ch.-r., 13 juin 2018, n° 395495, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A9347XQA).

Le Conseil d’État a notamment jugé qu’ « une société holding qui a pour activité principale, outre la gestion d’un portefeuille de participations, la participation active à la conduite de la politique du groupe et au contrôle de ses filiales et, le cas échéant et à titre purement interne, la fourniture de services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers, est animatrice de son groupe ».

Lire en ce sens :

F. Laffaille, À propos de la holding animatrice de groupe, Lexbase Fiscal, juillet 2018, n° 751 (N° Lexbase : N5126BX7) ;

Les conclusions du Rapporteur public, Lexbase Fiscal, septembre 2018, n° 753 (N° Lexbase : N5392BXY).

Dans un arrêt du 19 juin 2019, la Chambre commerciale de la Cour de cassation a précisé que le fait pour une société holding de détenir une participation minoritaire dans une société dont elle n’assure pas l’animation ne suffit pas à écarter la qualification d’animatrice de son groupe (Cass. comm., 19 juin 2019, n° 17-20.559, F-D N° Lexbase : A2924ZGE).

« Le rôle d’animation effective de la holding doit nécessairement être apprécié rigoureusement au niveau du groupe, c’est-à-dire au niveau de l’ensemble des sociétés qui composent le groupe, et non en distinguant selon les filiales afin d’exonérer celles d’entre elles pour lesquelles les conditions d’animation seraient effectivement remplies ; une société peut être qualifiée de holding animatrice dès lors qu’elle a pour activité principale l’animation de ses filiales. Le fait qu’elle détienne une participation minoritaire dans une autre société dont elle n’assure pas l’animation n’est pas de nature à lui retirer son statut de holding animatrice ».

Pour plus de précisions lire en ce sens, F. Chidaine, Retour synthétique sur la notion de holding animatrice, Lexbase Fiscal, juin 2020, n° 828 (N° Lexbase : N3698BYM).

👉 Solution de la Cour de cassation : la Cour de ne reconnait pas le caractère animateur de la société Finaréa.

« Une société holding qui ne contrôle aucune filiale opérationnelle ne peut être qualifiée de holding animatrice et ne peut donc être assimilée aux PME visées par l’article 885-0 V bis du Code général des impôts […] de sorte que la souscription à son capital n’est pas éligible à la réduction d’ISF […] ».

L’affaire est renvoyée devant les cours d’appel qui devront trancher sur le fond.

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Douanes

[Brèves] Précisions sur l’assiette de l’impôt sur les cercles et maisons de jeux

Réf. : Cass. com., 3 mars 2021, n° 18-25.464, F-D (N° Lexbase : A00124KN)

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N6724BYP

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par Marie-Claire Sgarra

Le 10 Mars 2021

La Chambre commerciale de la Cour de cassation a rappelé dans un arrêt du 3 mars 2021 les éléments constituant l’assiette de l’impôt sur les cercles et maisons de jeux.

Les faits :

⇒ la direction des douanes, après avoir notifié au prévenu plusieurs infractions liées à l’organisation de jeux de hasard illicites dans un bar-restaurant, a émis un avis de mise en recouvrement au titre des impôts éludés des années 2011, 2012 et 2013,

⇒ après rejet de sa réclamation, le prévenu a assigné l’administration des douanes afin de voir annuler les procès-verbaux et obtenir la décharge totale des impositions.

🔎 Principes.

✔ Les recettes annuelles passibles de l'impôt au titre de l'article 1560 du Code général des impôts (N° Lexbase : L8601LHZ) sont constituées par le montant intégral de la cagnotte des jeux d'argent pratiqués dans les cercles et maisons de jeux.

✔ La cagnotte comprend le produit brut des jeux, c'est-à-dire le montant total des droits fixes, prélèvements ou redevances encaissés au profit du cercle ou de la maison de jeux à l'occasion des parties engagées (CGI, art. 147 annexe IV N° Lexbase : L7614I8I).

🖋️Obligations déclaratives.

  • dépôt d'une déclaration d'existence par l'exploitant auprès de la recette des douanes, 24 heures avant l'ouverture,
  • dépôt d'une déclaration mensuelle reprenant les recettes du mois écoulé. Pour rappel, l'ouverture d'un cercle ou d'une maison de jeux est également soumise à l'agrément du ministre.

Consulter le formulaire cerfa 10748.

Pour l’administration des douanes, l’impôt sur les spectacles est assis sur l’ensemble des recettes brutes, ces recettes brutes s’entendant du montant intégral de la cagnotte, comprenant le produit brut des jeux, soit le montant total des droits fixes, prélèvements ou redevances encaissés au profit du cercle ou de la maison de jeux.

👉 Solution de la Cour de cassation : « c’est à bon droit que la cour d’appel a retenu que l’assiette de cet impôt est constituée du montant intégral des mises, duquel doivent être déduites les sommes qui sont restituées aux joueurs au titre de leurs gains ».

 

 

newsid:476724

Douanes

[Brèves] La Commission européenne propose le renouvellement du régime de l’octroi de mer dans les régions ultrapériphériques françaises de l’UE

Réf. : Commission européenne, communiqué de presse, 3 mars 2021

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N6702BYU

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par Marie-Claire Sgarra

Le 10 Mars 2021

La Commission européenne a adopté le 3 mars 2021 une proposition renouvelant le régime de l'octroi de mer dans les régions ultrapériphériques de l'UE de la Guadeloupe, de la Guyane française, de la Martinique, de Mayotte, et de la Réunion pour la période 2022-2027.

Pour rappel, ce régime permet d'accorder des exonérations ou des réductions de la taxe octroi de mer en faveur d'une liste limitée de produits fabriqués localement.

🔎 Rappels sur l’octroi de mer

L’octroi de mer est un impôt indirect en vigueur uniquement dans les régions ultrapériphériques (RUP) françaises de Martinique, de Guadeloupe, de Guyane française, de La Réunion et de Mayotte.

Cet impôt s’applique aux importations de biens, quelle que soit leur provenance et aux livraisons de biens faites à titre onéreux par des personnes qui exercent des activités de production. Il s’applique en principe de la même façon aux produits fabriqués localement et aux produits importés.

Toutefois, la décision du Conseil n° 940/2014/UE du 17 décembre 2014 (N° Lexbase : L1084I7B) a autorisé la France à prévoir, jusqu'au 31 décembre 2020, des exonérations ou des réductions de l’« octroi de mer » pour certains produits pour lesquels il existe une production locale, des importations significatives pouvant compromettre le maintien de la production locale ainsi que des surcoûts renchérissant les prix de revient de la production locale par rapport aux produits provenant de l’extérieur. Selon les produits, la différence d'imposition entre les produits fabriqués localement et les autres produits ne peut excéder 10, 20 ou 30 points de pourcentage.

Le 1er mars 2019, les autorités françaises ont demandé à la Commission la reconduction du régime de l’ « octroi de mer » au‐ delà du 31 décembre 2020.

📌 Nouveautés de la proposition :

  • la proposition relève le seuil d'assujettissement à l'octroi de mer à 550 000 euros, permettant aux petites productions, mais aussi à l'essentiel des productions nouvelles de sortir du champ de la taxe,
  • elle introduit également davantage de transparence dans les critères de sélection des produits pouvant bénéficier d'une exonération ou d'une réduction d'octroi de mer,
  • elle prolonge pour six mois, jusqu'au 31 décembre 2021, la décision de 2014 afin de donner à la France le temps de transposer dans son droit national ce nouveau régime applicable entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2027.

👉  Consulter la proposition de renouvellement.

 

 

 

newsid:476702

Droits d'enregistrement

[Le point sur...] La formalité de l’enregistrement

Lecture: 11 min

N6765BY9

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par Virginie Pradel, Fiscaliste

Le 14 Avril 2021


Mots-clés : droits d’enregistrement • formalités

Certains actes sont obligatoirement soumis à la formalité de l'enregistrement. D’autres au contraire, sont soumis à une formalité facultative. Dans les deux cas, l’enregistrement produit des effets en droit civil et fiscal. Les développement ci-dessous synthétise toutes ces formalités et leurs effets.


 

Contrairement à d’autres impôts, la perception des droits d'enregistrement revêt un caractère ponctuel.

📌 Effets civils

L'exécution de la formalité de l’enregistrement produit les effets civils suivants :

👉 elle donne date certaine aux actes sous seing privé (C. civ., art. 1328 N° Lexbase : L1018KZQ) ;

👉 elle est nécessaire à la validité de certains actes : promesses unilatérales de vente (immeubles, fonds de commerce, droit au bail, actions ou parts de sociétés immobilières d'attribution) (C. civ., art. 1589-2 N° Lexbase : L7718HEL) ;

👉 elle confère une certaine publicité aux actes par l'exercice du droit de recherche et de communication ;

👉 elle contribue à assurer la régularité des actes et peut, éventuellement, fournir un commencement de preuve.

📌 Caractère obligatoire ou facultatif de l’enregistrement

Certains actes sont obligatoirement soumis à la formalité dans un délai de rigueur, tandis que d’autres n'y sont assujettis que par la volonté des parties. L'obligation de l'enregistrement s'applique aux actes portant :

✔ transmission de propriété ou d'usufruit d'immeubles, de fonds de commerce, de clientèles ou d'offices ;

✔ cession d'actions, de parts de fondateur ou de parts bénéficiaires, ou de parts d'intérêt dans les sociétés dont le capital n'est pas divisé en actions ;

✔ cession et rachat taxables de parts de fonds de placement immobilier ;

✔ cession de participation dans des personnes morales à prépondérance immobilière ;

✔ cession de droit à un bail ou du bénéfice d'une promesse de bail, portant sur tout ou partie d'un immeuble, ou transfert direct ou indirect du droit à la jouissance d'immeubles ou de locaux à usage commercial, industriel ou artisanal ;

✔ mutation de jouissance à vie ou à durée illimitée d'immeubles, de fonds de commerce ou de clientèles ;

✔ acceptation ou répudiation de succession, legs ou communauté.

Les autres actes devant être obligatoirement enregistrés sont ceux constatant :

✔ la prorogation, la transformation ou la dissolution d'une société, l'augmentation, l'amortissement ou la réduction de son capital ;

✔ la formation de groupements d'intérêt économique ;

✔ un partage de meubles ou d'immeubles ;

✔ la formation, la modification ou l'extinction d'un contrat de fiducie et le transfert de biens ou droits supplémentaires au fiduciaire dans les conditions fixées par l'article 2019 du Code civil (N° Lexbase : L0660LWD).

Sont également visés :

✔ les conventions à titre onéreux ayant pour effet de permettre à une personne d'exercer une profession, une fonction ou un emploi occupé par un précédent titulaire, même lorsque ces conventions ne s'accompagnent pas d'une cession de clientèle ;

✔ les promesses unilatérales de vente acceptées et afférentes à un immeuble, à un droit immobilier, à un fonds de commerce, à un droit à un bail portant sur tout ou partie d'un immeuble, ou aux titres des sociétés immobilières d'attribution, ainsi que les cessions portant sur ces promesses ;

✔ les certificats de propriété dressés en vue du règlement d'une succession ;

✔ les inventaires de meubles, titres et papiers et les prisées de meubles.

Les actes soumis à la formalité en raison de la qualité de leur rédacteur comprennent :

✔ les actes notariés et les testaments déposés chez les notaires, ceux-ci étant toutefois dispensés de présenter à la formalité certains actes de leur ministère ou déposés en leur étude, les droits d'enregistrement étant payés sur états ;

✔ certains actes d'huissier ;

✔ les décisions judiciaires, à condition qu'elles donnent ouverture à des droits proportionnels ou progressifs. Les droits dus sur les décisions dispensées de la formalité de l'enregistrement sont payés sur états.

S’agissant des biens situés à l'étranger, il convient de distinguer selon que les actes sont passés en France ou à l’étranger.

Pour les actes passés en France :

✔ l'acte passé en France portant mutation d'immeubles situés à l'étranger ne doit être soumis à la formalité que s'il revêt la forme d'un acte notarié, judiciaire ou extrajudiciaire.

✔ les actes passés en France et portant mutation de meubles étrangers sont soumis aux droits de mutation dans les mêmes conditions que si la mutation avait pour objet des biens français de même nature.

Pour les actes passés à l'étranger :

✔ L'acte passé à l'étranger et ayant pour objet un immeuble étranger, qu'il soit rédigé dans la forme authentique ou dans la forme sous seing privé, n'est pas assujetti à l'enregistrement en France.

✔ Les actes passés à l'étranger et ayant pour objet des biens mobiliers situés à l'étranger échappent à l'obligation de l'enregistrement.

📌 Délais d’enregistrement

Le délai d'enregistrement est de :

✔ six mois à compter du décès en matière de mutations par décès ;

✔ un mois en ce qui concerne les actes obligatoirement enregistrés au service de la publicité foncière (ventes d'immeubles notamment, à l'exception des adjudications bénéficiant de deux mois) ;

✔ un mois si la formalité est accomplie au service des impôts. Ce délai s'applique notamment aux cessions de fonds de commerce ou de clientèle, de droits sociaux ;

✔ dix jours pour les actes sous seing privé portant promesse unilatérale de vente d'immeubles, de fonds de commerce, de droits au bail relatifs à un immeuble de titres de sociétés immobilières d'attribution, le délai commençant à courir à compter de l'acceptation des promesses. Il en est de même des cessions de promesses.

📌 Exécution de la formalité

La formalité de l'enregistrement peut être effectuée soit de manière autonome auprès du service des impôts, soit en même temps que la publication de l'acte au service de la publicité foncière. Ce second cas vise essentiellement les actes portant mutation d'immeubles. Le service de la publicité foncière compétent est celui de la situation des immeubles.

📌 Service des impôts

La compétence des bureaux s'apprécie d'après la nature des actes ou mutations, ou d'après les parties intéressées.

Actes notariés, judiciaires ou administratifs : ces actes doivent être enregistrés au bureau de la circonscription dans laquelle les rédacteurs exercent leurs fonctions.

Actes extrajudiciaires : les huissiers peuvent enregistrer leurs actes soit au bureau de leur résidence, soit au bureau du lieu où ils ont été dressés.

Actes sous seing privé assujettis à l'enregistrement : ils doivent être enregistrés au bureau de la situation des biens lorsqu'ils portent mutation d'immeubles, de fonds de commerce ou de droit au bail, et au domicile de l'une des parties contractantes dans les autres cas.

Les actes sous seing privé autres que ceux soumis à l'enregistrement dans un délai déterminé peuvent être enregistrés dans tous les bureaux indistinctement.

Déclarations de mutations verbales,  de mutations verbales d'immeubles, de fonds de commerce ou de clientèle, ainsi que les déclarations de cessions verbales de droit à un bail ou du bénéfice d'une promesse de bail portant sur tout ou partie d'un immeuble : elles doivent être faites au bureau de la situation des biens.

Déclarations de successions : elles doivent être déposées au bureau du domicile du décédé.

📌 Base d’imposition

Pour les mutations à titre onéreux, les droits exigibles sont liquidés sur le prix convenu par les parties ou sur la valeur vénale des biens si elle est supérieure. Pour les mutations à titre gratuit, les droits sont liquidés sur la valeur vénale des biens, sauf application en matière de succession d'une base forfaitaire ou d'un abattement dans certains cas. Pour la liquidation des droits de mutation, l'évaluation de la nue-propriété ou de l'usufruit d'un bien est déterminée de manière forfaitaire en fonction d'un barème.

📌 Droits exigibles

On distingue les droits progressifs, les droits proportionnels et les droits fixes.

Droits progressifs : le taux de ces droits varie et s'élève au fur et à mesure que croissent les valeurs qu'ils frappent. Sont concernés notamment les droits de succession et de donation.

Droits proportionnels : les droits proportionnels sont liquidés en fonction de l'importance pécuniaire des opérations juridiques imposables. Ils s'appliquent notamment aux mutations à titre onéreux d'immeubles.

Droits fixes : les droits fixes frappent les opérations juridiques non soumises expressément au droit proportionnel ou au droit progressif et notamment les actes dits innomés, parce qu'ils ne sont pas spécialement tarifés par la loi.

 

📌 Délais de paiement

Le paiement des droits d'enregistrement doit être préalable à l'exécution de la formalité. Il est, toutefois, dérogé à cette règle en cas de paiement sur états mensuels, d'enregistrement en débet et de paiement fractionné ou différé de certains droits de mutation.

🔎 Modifications apportées par la loi de finances pour 2021

Afin de simplifier les démarches des sociétés qui sont actuellement dans l’obligation de déposer leurs actes auprès des services des impôts pour l’exécution de la formalité de l’enregistrement, puis auprès des greffes des tribunaux de commerce, pour l’inscription au RCS, l’article 67 de la loi de finances pour 2021 (loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021 N° Lexbase : L3002LZ9) a supprimé l’enregistrement obligatoire de certains actes de sociétés à très faible enjeu budgétaire.

Sont concernés par cette simplification les actes, anciennement prévus à l’article 635 du CGI (N° Lexbase : L7307LU8), constatant :

  • les augmentations de capital des sociétés en numéraire et par incorporation de bénéfices, de réserves ou de provisions,
  • les augmentations nettes de capital de sociétés à capital variable constatées à la clôture d’un exercice,
  • l’amortissement ou la réduction du capital des sociétés,
  • la formation des GIE.

Sont également concernées, en l’absence d’acte, les opérations suivantes, anciennement mentionnées à l’article 638 A du CGI (N° Lexbase : L6239LUM) :

  • les augmentations de capital en numéraire et par incorporation de bénéfices, de réserves ou de provisions des sociétés et des GIE,
  • les augmentations nettes de capital de sociétés à capital variable constatées à la clôture d’un exercice,
  • l’amortissement ou la réduction du capital des sociétés et des GIE.

Par ailleurs, l’article 862 du CGI (N° Lexbase : L4267LST) est modifié de telle sorte que le dépôt des actes de sociétés au greffe du tribunal devient possible avant l’exécution de la formalité d’enregistrement au service des impôts, même lorsque celle-ci reste obligatoire, sauf pour :

  • les actes portant transmission de propriété ou d'usufruit de fonds de commerce, de clientèles ou d'offices, ou cession de droit à un bail ou du bénéfice d'une promesse de bail portant sur tout ou partie d'un immeuble,
  • les actes portant cession d'actions, de parts de fondateurs ou de parts bénéficiaires ou cession de parts sociales dans les sociétés dont le capital n'est pas divisé en actions,
  • les actes portant cession de participations dans des personnes morales à prépondérance immobilière, y compris lorsque ces cessions sont réalisées à l'étranger et quelle que soit la nationalité des parties.

Ces dispositions s’appliquent aux actes établis et aux opérations réalisées à compter du 1er janvier 2021.

Par ailleurs, l'article 157 de la loi de finances pour 2021 a aménagé les dispositions de l'article 658 du CGI (N° Lexbase : L7707HLZ) afin de permettre de donner la formalité sur une copie des actes sous seing privé signés électroniquement à enregistrer (l'article 855 du CGI N° Lexbase : L8701HLT est corrélativement aménagé).

En sont toutefois expressément exclues, les promesses unilatérales de vente afférentes à un immeuble, à un droit immobilier, à un fonds de commerce, à un droit à un bail portant sur tout ou partie d'un immeuble ou aux titres de sociétés immobilières de copropriétés (visées aux articles 728 N° Lexbase : L7961HLG et 1655 ter N° Lexbase : L1910HMP du CGI).

Par ailleurs, ne sont pas visées les copies présentées à l'enregistrement des actes dont l'original est sous format papier.

La tolérance prévue pour les actes des avocats est ainsi légalisée et étendue à l'ensemble des actes sous seing privé (autres que les promesses unilatérales de vente). Il n'est toutefois pas exigé que la copie soit certifiée conforme à l'original.

Depuis l'intervention de l'article 4 de l'ordonnance 2016-131, du 10 février 2016 (N° Lexbase : L3113LAK) (codifié sous l'article 1379 du Code civil N° Lexbase : L1021KZT), une copie fiable a la même force probante que l'original. Aux termes du décret 2016-1673, du 5 décembre 2016 (N° Lexbase : L5536LBN), pris pour l'application de ce texte, est présumée fiable la copie résultant :

  • soit d'un procédé de reproduction qui entraîne une modification irréversible du support de la copie,
  • soit, en cas de reproduction par voie électronique, d'un procédé répondant à certaines conditions.

 

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Fiscalité des entreprises

[Brèves] Exonération des plus-values par les petites entreprises : quand commence le délai de cinq ans ?

Réf. : CAA Nantes, 28 janvier 2021, n° 19NT00450 (N° Lexbase : A17794EM)

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N6703BYW

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par Marie-Claire Sgarra

Le 10 Mars 2021

► La cour administrative d’appel de Nantes est revenue sur les conditions de prise en compte du délai de cinq ans nécessaire pour bénéficier de l’exonération des plus-values prévue par l’article 151 septies du Code général des impôts.

Les faits.

⇒ le requérant a cédé, par une convention à une société, l'activité d'expertise en bâtiment gros oeuvre, menuiserie, bardage et toiture qu'il exerçait auparavant à titre individuel ;

⇒ le requérant a réalisé, à l'occasion de cette cession, une plus-value qu'il a entendu placer sous le régime d'exonération prévu par l'article 151 septies du Code général des impôts (N° Lexbase : L4192LI4) ;

⇒ l'administration fiscale a remis en cause le bénéfice de cette exonération. Le rehaussement a été maintenu par réponse aux observations du contribuable et les impositions supplémentaires en résultant ont été mises en recouvrement ;

⇒ le requérant et son épouse  ont présenté une réclamation qui a été rejetée ;

⇒ le tribunal administratif d’Orléans a rejeté leur demande.

🔎 Rappel du dispositif d’exonération des plus-values professionnelles pour les petites entreprises :

  • les plus-values professionnelles réalisées par les petites entreprises dont le chiffre d’affaires n’excède pas certains seuils au titre d’une activité exercée depuis au moins cinq ans sont exonérées d’impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux,
  • le délai de cinq ans prévu à l’article 151 septies du CGI est décompté à partir du début effectif d’activité,
  • le délai s’apprécie activité par activité.

Application au cas d’espèce :

✔ Les requérants ont produit une attestation d'inscription à l'Institut de l'expertise du 10 décembre 2004 au 26 février 2005, un certificat de formation du 26 février 2005 et une convocation à l'hôtel de police de Bourges du 21 mars 2005 en vue de sa désignation en tant qu'expert judiciaire.

👉 Pour la cour, ces éléments n'attestent pas de l'exercice d'une activité professionnelle.

✔ Une ordonnance de référé du TGI de Nevers du 5 décembre 2006 a désigné le requérant en tant qu'expert, dans un contentieux relatif à des malfaçons consécutives à des travaux de rénovation, en lui demandant de déposer son rapport dans les quatre mois de sa saisine.

👉 « Les requérants n'établissent pas que M. D... exerçait effectivement une activité professionnelle d'expert judiciaire au 1er décembre 2006, correspondant à une période d'au moins cinq ans avant la cession de son activité d'expertise ».

Ainsi, les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir de l'exonération prévue par les dispositions de l'article 151 septies du Code général des impôts.

 

 

 

newsid:476703

Fiscalité internationale

[Brèves] Montages financiers abusifs : nouveau rapport de l’OCDE

Réf. : OCDE, communiqué de presse, 25 février 2021

Lecture: 2 min

N6704BYX

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par Marie-Claire Sgarra

Le 07 Mars 2021

Selon un nouveau rapport de l’OCDE, annoncé par un communiqué de presse du 25 février 2021, les pays devraient intensifier leurs efforts pour mieux dissuader, détecter et neutraliser les activités des intermédiaires qui facilitent la fraude fiscale et d'autres délits financiers.

Le rapport analyse les stratégies et les mesures pouvant être adoptées par les pays pour s’attaquer aux prestataires de services professionnels qui jouent un rôle essentiel dans la planification et la mise en œuvre d'activités à caractère criminel, appelés « intermédiaires fiscaux ».

Cette criminalité a des répercussions substantielles sur les recettes publiques, la confiance des citoyens et la croissance économique, y compris sur la reprise post-Covid 19.

Le rapport met en lumière le rôle dommageable de ces intermédiaires et l’importance d’une action nationale et internationale concertée pour les combattre, et décrit les contre-stratégies recommandées pour dissuader ces professionnels d’apporter leur concours aux infractions fiscales et aux crimes d’affaires, mettre un terme à leurs activités, mener des enquêtes et engager des poursuites à leur encontre.

Le rapport invite les pays à concevoir ou à renforcer leurs stratégies nationales afin de lutter plus efficacement contre les intermédiaires fiscaux. Ces stratégies devraient :

  • veiller à ce que les enquêteurs fiscaux aient les moyens d’identifier les groupes d’intermédiaires fiscaux opérant sur leur territoire, et de déterminer les risques liés à la manière dont ces derniers conçoivent, commercialisent, mettent en œuvre et dissimulent les délits fiscaux et financiers ;
  • veiller à ce que la loi confère aux enquêteurs et procureurs des pouvoirs suffisants pour identifier, poursuivre et sanctionner les intermédiaires fiscaux, dans une optique de dissuasion et de pénalisation ;
  • mettre en œuvre des stratégies pluridisciplinaires de prévention et de neutralisation, notamment en mobilisant les organismes de contrôle, sectoriels et professionnels, en vue de prévenir les pratiques abusives, d’encourager la divulgation rapide et la dénonciation des irrégularités et de mener une action répressive rigoureuse ;
  • veiller à ce que les autorités compétentes mettent spontanément à la disposition d’autres organismes nationaux et internationaux le plus grand nombre d’informations et de renseignements possible et leur confèrent les pouvoirs d’enquête nécessaires pour combattre les intermédiaires fiscaux qui mènent des opérations complexes et transfrontalières ;
  • désigner sur le territoire de compétence un responsable et un organisme chargés de superviser la mise en œuvre de la stratégie, de procéder à un examen de son efficacité dans la durée et d’y apporter des modifications le cas échéant.

 

Pour consulter le rapport.

 

 

newsid:476704

Fiscalité internationale

[Brèves] Système d’imposition des sociétés : le Conseil de l’UE approuve un renforcement de la transparence pour les grandes multinationales

Réf. : Conseil de l’Union européenne, communiqué de presse, 3 mars 2021

Lecture: 1 min

N6701BYT

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par Marie-Claire Sgarra

Le 10 Mars 2021

Les ambassadeurs des États membres ont chargé le 3 mars 2021 la présidence portugaise d'engager des négociations avec le Parlement européen en vue de l'adoption rapide de la proposition de Directive concernant la communication, par certaines entreprises et succursales, d'informations relatives à l'impôt sur les bénéfices, communément appelée « Directive relative à la publication d'informations pays par pays ».

📌 Précisions sur ce nouveau texte :

  • la Directive impose aux entreprises multinationales ou aux entreprises autonomes, établies ou non dans l'UE, dont le chiffre d'affaires total consolidé dépassait 750 millions d'euros pour chacun des deux derniers exercices financiers consécutifs, de publier, parmi d'autres informations d'ordre fiscal pertinentes, une déclaration d'informations spécifique, relative à l'impôt sur les bénéfices qu'elles paient dans chaque État membre,
  • la Directive comporte une liste complète et définitive des informations qui doivent être divulguées,
  • la déclaration devra être faite dans un délai de douze mois à compter de la date de clôture du bilan de l'exercice financier en question. La directive fixe les conditions dans lesquelles une société peut obtenir le report de cette divulgation pour une période maximale de six ans.

Sur la base du mandat de négociation qui a été approuvé, la présidence portugaise examinera avec le Parlement européen la possibilité de parvenir à un accord permettant l'adoption rapide de la Directive en deuxième lecture.

newsid:476701

Fiscalité internationale

[Le point sur...] Article 57 du CGI – Prix de transfert : attention au fichier local !

Lecture: 16 min

N6712BYA

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par Clément Thomas, Doctorant en fiscalité internationale et européenne a l’université Aix - Marseille et Consultant en fiscalité

Le 20 Juillet 2021


Mots-clés : prix de transfert • entreprises • bénéfices • fichier local 

Selon la définition de l'Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE), les prix de transfert sont les « prix auxquels une entreprise transfère des biens corporels, des actifs incorporels, ou rend des services à des entreprises associées ». Les prix de transfert figurent au premier plan des sujets de fiscalité internationale. 

L'étude ci-dessous portera sur méthodologie applicable à ce dispositif. 


 

Il est nécessaire de partir du constat que chaque juridiction a une fiscalité différente. Ainsi, un groupe de sociétés peut avoir intérêt à diminuer son bénéfice dans les pays à fiscalité élevée dans lesquels il est présent, pour l’augmenter mécaniquement dans d’autres États où la pression fiscale est moins forte. Le résultat net du groupe après impôt est ainsi augmenté et le groupe dispose donc de davantage de ressources financières pour de nouveaux investissements ou pour servir un dividende plus élevé à ses actionnaires.

La difficulté étant qu’entre entreprises associées, la pression du marché n’existe a priori pas. Tout du moins, bon nombre de groupes d’entreprises tentent de neutraliser les effets néfastes de celui-ci par l’intermédiaire de prix de transfert. Ces derniers qui ont tendance à s’éloigner très largement de ceux pratiqués entre sociétés dites « indépendantes ». S’ils peuvent dans certains cas être utilisés pour soutenir une société du groupe en difficulté, dans de très nombreux cas ces prix sont un moyen de réduire à peau de chagrin l’impôt initialement dû par le groupe. Ce qui n’est pas sans impact budgétaire pour les juridictions dites « victimes ».

Cette problématique des prix de transfert est l’un des sujets d’actualité les plus évoqués en matière de fiscalité internationale. Néanmoins, il demeure l’un des plus opaques en raison de sa complexité technique. En effet, bien que rattaché au droit fiscal, cette pratique relève tantôt du droit tantôt de l’économie. De ce fait, aborder ce contentieux suppose au fiscaliste de faire preuve d’une certaine ouverture d’esprit pour aborder la question de son contentieux. Nombreux sont les articles qui citent les diverses pratiques en cause, les méthodes de détermination des prix de transfert, etc.
Toutefois, peu d’articles abordent cette thématique sous l’angle « méthodologique ». Or, si le fond est d’une importance capitale, la forme, demeure la pierre angulaire de ce contentieux. Ainsi, se pose les questions suivantes : Comment s’y prendre, par où commencer et surtout quel est le document sur lequel porte l’essentiel du contentieux ? Cette étude tentera de répondre de la meilleure des manières à l’étude pratique des prix de transfert.

Tout d’abord, il est nécessaire de rappeler que dans le cas français, les moyens de contrôle fiscal ont pour base l’article 57 du Code général des impôts (ci-après CGI) (N° Lexbase : L9738I33), article qui vise principalement à protéger la juridiction française contre les pertes de recettes pouvant résulter de la mise en œuvre de stratégies de localisation des bénéfices.

Ce n’est qu’après la vérification des conditions de fond que le législateur a doté, à travers l’article L. 13 B du Livre des procédures fiscales (ci-après LPF) (N° Lexbase : L3165LC9) l’administration fiscale du pouvoir d’exiger des entreprises, dans le cadre d’une vérification de comptabilité et suivant une procédure spécifique, des éléments d’information sur les conditions de détermination des prix de transfert pratiqués.

Alors qu’elle n’est qu’une suggestion audit article, la constitution, par les sociétés françaises, d’une documentation générale couvrant les transactions réalisées avec des entreprises étrangères a été érigée en obligation à l’article L. 13 AA du LPF (N° Lexbase : L9494LH4) pour les plus grandes entreprises par la loi de rectificative pour 2010 [1]. Documentation obligatoire refondue dans le cadre de la loi de finances pour 2018 [2] afin de la mettre en conformité avec le standard international prévu par l’action 13 des travaux BEPS figurant en Annexe II au chapitre V des Principes de l’OCDE. La documentation doit être constituée de deux fichiers (LPF, art. R. 13 AA-1 N° Lexbase : L9529LK7) :

  • un fichier principal,
  • un fichier local

I - Le fichier principal ou « Master file »

Le fichier principal est un document permettant une vision d’ensemble du groupe, de ses activités, de sa politique globale en matière de prix de transfert et de répartition des bénéfices au niveau mondial. Ce document bien que nécessaire n’est que rarement sujet à contentieux. La raison étant qu’ici les informations évoquées ne sont que « descriptives » et ne concernent en rien les flux économiques effectués entre les diverses entités. Bien que générales, ces informations doivent néanmoins être évoquées et commentées par nos soins.

Au sein du fichier principal, doivent être mentionnées les 5 rubriques suivantes :

A - Structure organisationnelle : La description de la structure organisationnelle du groupe multinational comprend un schéma illustrant la structure juridique et capitalistique du groupe, ainsi que la situation géographique des entités opérationnelles de ce groupe. Bien que recommandée par nos soins, il n’est pas exigé de faire une étude approfondie. Pour ce faire, la mise en place de schémas est fortement appréciée.

B - Domaines d’activité du groupe : Cette rubrique se divise en plusieurs sous-rubriques.

Description des sources importantes de bénéfices du groupe (a) : il s’agit ici des activités réalisées par des entités du groupe et qui exercent une influence déterminante dans la réalisation des bénéfices. Il serait intéressant ici pour les conseils de faire une répartition précise du chiffre d’affaires de chacune des entités du groupe ainsi que des différents pôles concernés.

Description de la chaîne d’approvisionnement (b) : cela consiste à décrire les principales étapes qui conduisent à la commercialisation des biens et/ou services. Cela peut se matérialiser par l’intermédiaire de schémas voire de frise.

Mention des accords importants de prestations de services entre entreprises associées (c) : à ce titre doit être mentionnée la description des accords importants de prestations de services entre les entreprises associées du groupe [3], à l’exception des accords de recherche et développement. Cela peut se matérialiser librement. À titre d’exemple, voici le tableau que propose l’administration fiscale [4].

Objet de l'accord

Identité du prestataire (dénomination, État d'implantation)

Identité du/ des preneurs (dénomination et juridiction d'implantation)

Description générale de l'accord

Méthode de rémunération retenue (OCDE ou autres )

Description des principaux marchés géographiques sur lesquels les biens et services du groupe sont vendus (d) : il s’agit ici de décrire la répartition géographique des entités et de déterminer les revenus générés par chacune des filiales en cause.

Analyse fonctionnelle des principales entités du groupe (e) : cette analyse décrit les principales contributions des différentes entités du groupe à la création de valeur, c’est-à-dire les fonctions-clés exercées par les différents acteurs dans le processus de prix de transfert, les risques importants assumés par chacun des acteurs et les actifs importants utilisés [5]. Il sera nécessaire de déterminer précisément le rôle de chacun des acteurs. À savoir, qui endosse les risques, qui est le bénéficiaire. Cette analyse permet ainsi d’effectuer les ajustements nécessaires à la mise en œuvre des méthodes de comparaison avec le comportement de tiers sur le marché libre. Ainsi, une entité qui supporte des risques doit être davantage rémunérée que si elle n’en supporte pas. De nouveaux développements sur ces analyses ont été effectués par l’OCDE [6].

Description des opérations importantes de réorganisations d’entreprises (f) : il s’agit de la description des opérations importantes de réorganisations d’entreprises, ainsi que d’acquisitions et de cessions d’éléments d’actifs intervenues au cours de l’exercice. Les opérations devant être décrites sont celles qui correspondent aux opérations réalisées par des entreprises du groupe, indépendamment du fait qu’elles soient ou non en lien avec l’entreprise, et qui se sont traduites par des disparitions, des transferts ou des créations d’activité, ainsi que par des changements de statut juridique ou de fonction.

C - Actifs incorporels du groupe : cette catégorie comprend en elle-même 4 catégories :

Description générale de la stratégie du groupe en matière de mise au point, de propriété et d’exploitation des actifs incorporels (a) : cette description comporte notamment la localisation des principales installations de recherche et développement et de la direction effective de ces activités. En ce qui concerne la description de la stratégie du groupe, celle-ci doit notamment comprendre des renseignements sur :

les entités qui sont propriétaires des actifs incorporels et celles qui réalisent les travaux de développement; les entités qui exploitent les actifs incorporels dans le cadre de leur activité, en distinguant les entités qui perçoivent des revenus passifs afférents à ces actifs (redevances), de celles qui utilisent les incorporels pour la production d’un bien ou d’un service ; les activités qui sont réalisées au sein du groupe et celles qui sont sous-traitées auprès d’entreprises tierces ; les modes d’exploitation des actifs incorporels (exploitation en pleine propriété, concession de droits d’usage, etc.).

En ce qui concerne les installations de recherche, celles-ci correspondent aux unités opérationnelles de recherche et développement telles que les centres, laboratoires ou ateliers de recherche.

Liste des actifs incorporels ou des catégories d’actifs incorporels (b) : cette liste comprend les actifs incorporels ou les catégories d’actifs incorporels qui sont importants pour l’établissement des prix de transfert, ainsi que les entités qui en sont légalement propriétaires.

Liste des accords importants entre entreprises associées relatifs aux actifs incorporels (c) : cette liste mentionne les accords importants entre entreprises associées relatives aux actifs incorporels, y compris les accords de répartition de coûts, les principaux accords de services de recherche et les accords de licence.

Description des éventuels transferts importants d’actifs incorporels (d) : l’entreprise présente une description générale des éventuels transferts importants d’actifs incorporels entre entreprises associées en mentionnant les pays et les rémunérations correspondantes.

D - Activités financières interentreprises du groupe : il s’agit de la description générale de la façon dont le groupe est financé, y compris une description des accords de financement importants conclus avec des prêteurs indépendants du groupe (date, durée, conditions financières, etc.). En outre, doit être évoquée la politique du groupe en matière de prix de transfert.

E - Situation financière et fiscale du groupe : Il s’agit ici d’évoquer les états financiers consolidés annuels du groupe pour l’exercice fiscal considéré, lorsqu’ils sont préparés par ailleurs à des fins d’information financière, réglementaires, de gestion interne, fiscale ou autre ainsi que les décisions des autorités fiscales, c’est-à-dire les rulings et accords préalables en matière de prix de transfert unilatéraux conclus par le groupe.

Il est donc aisé de respecter cette obligation documentaire. À ce titre, il est important de mettre en lumière que l’essentiel du contentieux « prix de transfert » ne porte pas sur le fichier principal. La raison étant que les informations évoquées sont très générales et ne portent pas à proprement parler sur les flux « prix de transfert » effectués entre les diverses entités du groupe.

           

II - Le fichier local ou « Local file »          

L’administration fiscale si elle ne s’attarde que peu sur le fichier principal, elle demeure néanmoins très attentive au fichier local. Ce document demeure la pierre angulaire du contentieux prix de transfert. Il doit contenir des informations spécifiques, précises concernant les transactions contrôlées et les informations financières de l’entreprise en cause.

Le contenu du fichier local est prévu à articles L. 13 AA du LPF et  R. 13 AA-1 du LPF. Les informations peuvent être réparties en trois catégories :

A - Entité en France :

La rubrique « entité en France » comporte la description de la structure de gestion de l’entité locale, des activités exercées et de l’environnement concurrentiel. Cela suppose de dresser un organigramme précis de l’entité ainsi que des activités exercées au sein de celle-ci.

En outre, une description des activités effectuées et de la stratégie d’entreprise mise en œuvre est nécessaire. À ce titre, il peut être intéressant de fournir en annexe, les statuts de l’entreprise locale en cause.

Enfin, il sera apprécié de l’administration fiscale un développement sur la « concurrence » entre l’entité en cause et les autres acteurs du marché.

B - Transactions contrôlées :

C’est certainement le point le plus important et délicat de la documentation prix de transfert. C’est donc sur celui-ci que porte l’essentiel du contentieux « prix de transfert ». Très généralement, cette sous-rubrique comprend une description des transactions importantes avec des entreprises associées, les montants des paiements et des recettes intragroupes, l’identification des entreprises associées impliquées dans les transactions contrôlées, les accords interentreprises importants, une analyse de comparabilité et une analyse fonctionnelle, une indication de la méthode de détermination des prix de transfert utilisé. Les transactions concernées sont celles entre l’entreprise qui établit la documentation et une ou plusieurs entreprises associées et dont le montant, agrégé par catégorie, excède 100 000 euros au titre de l’exercice.

Afin de répondre aux attentes de l’administration fiscale, il convient d’évoquer avec précision les différents points suivants :

Description des transactions importantes avec des entreprises associées et des conditions dans lesquelles elles sont réalisées. La description des transactions comporte toutes les informations relatives aux types de biens ou de produits concernés, à leur montant, aux conditions de paiement, aux garanties, ainsi qu’à la rémunération d’intermédiaires éventuels.

Il est nécessaire de ventiler par nature (ventes, prestations de services, etc.) toutes les opérations concernées. Toutefois, cette description peut être réalisée par catégorie de transactions dès lors que les transactions au sein d’une catégorie portent sur les mêmes biens et services et sont effectuées dans les mêmes conditions.

Vous trouverez ci-joint l’exemple de tableau récapitulatif des opérations en cause [7].

Nature des transactions avec des entreprises associées

Biens ou services concernés par la transaction

Montant agrégé supérieur à
100 000 euros des transactions par nature

Juridiction concernée par le flux (selon norme ISO)

Conditions de réalisation des transactions

 

Les montants des paiements et recettes intragroupes. Il convient de mentionner les paiements réalisés pour chaque catégorie de transactions impliquant l’entreprise. Il est nécessaire de les ventiler en fonction de la juridiction fiscale du payeur ou du bénéficiaire étranger. Fiscalement, il est important que ces montants se traduisent par des produits, des charges, des augmentations ou des diminutions d’actifs.

Identification des entreprises associées. Il s’agit d’identifier les entreprises associées impliquées dans chaque catégorie de transactions contrôlées et de décrire les relations qu’elles entretiennent avec l’entreprise.

Mention des accords interentreprises. Il s’agit des accords dont l’exécution se traduit par des transactions entre entreprises associées et dont le montant agrégé par catégorie excède 100 000 euros au titre de l’exercice. Il est nécessaire que les conseils remettent en sus une copie de chacun des accords en cause.

Analyse de comparabilité et analyse fonctionnelle. Ces points sont capitaux dans l’édition de la documentation prix de transfert puisqu’il s’agit de la matérialisation et la justification des flux effectués entre les entités du groupe.

Ces analyses sont accompagnées d’autres informations tout aussi importantes lors de la remise de la documentation prix de transfert, à savoir :   

  • la méthode de détermination des prix de transfert la plus adaptée et les raisons pour lesquelles cette méthode a été retenue;
  • les hypothèses importantes retenues pour justifier les transactions en cause ;
  • l’analyse pluriannuelle où l’entreprise doit obligatoirement expliquer la façon dont les analyses ont été réalisées sur une période pluriannuelle afin de déterminer le prix des transactions contrôlées;
  • les comparables utilisés. Pour ce faire, il peut est judicieux d’utiliser un logiciel spécifique (lien) ou de faire appel à un spécialiste afin d’établir un document pertinent aux yeux de l’administration fiscale. Document que l’on appelle « Benchmark ».
  • le principe de pleine concurrence qui fait état d’une description par l’entreprise des raisons pour lesquelles il a été conclu que les prix des transactions avaient été établis conformément au principe de pleine concurrence en application de la méthode de prix de transfert retenue.
  • les informations financières qui une synthèse des informations financières utilisées pour appliquer la méthode de détermination des prix de transfert est effectuée par l’entreprise.

 

C - Les informations financières de l'entité en cause

Cette rubrique comprend les comptes financiers annuels de l’entreprise, ainsi que des informations et des tableaux de répartition indiquant comment les données financières utilisées pour appliquer la méthode des prix de transfert peuvent être reliées aux états financiers annuels.

Enfin l’entreprise doit tenir à la disposition de l’administration fiscale les décisions prises par les administrations étrangères de même nature que les interprétations, instructions et circulaire fournies par l’administration fiscale française. (LPF, art. L80. A N° Lexbase : L6958LLB), et fournir une copie des accords de fixation des prix de transfert unilatéraux, bilatéraux ou multilatéraux, ou autres décisions fiscales (rulings) liées à des transactions contrôlées avec l’entreprise.

Quels sont les risques en cas de non-respect de l’obligation documentaire?

Lorsque la documentation requise n’est pas mise à la disposition de l’administration fiscale l’engagement de la vérification de comptabilité, l’administration adresse à la personne morale concernée une mise en demeure de la produire ou de la compléter dans un délai de trente jours, ne précisant la nature des documents ou compléments attendus. L’entreprise peut solliciter une prorogation du délai de réponse qui dans tous les cas ne pourra excéder 2 mois.

Le défaut de réponse ou la réponse partielle à la mise en demeure entraine l’application de l’amende prévue à l’article 1735 ter du CGI (N° Lexbase : L3123I7S). Celle-ci peut atteindre, compte tenu de la gravité des manquements, le plus élevé des deux montants suivants :

  • 0,5 % du montant des transactions concernées par les documents ou compléments qui n’ont pas été mis à la disposition de l’Administration après mise en demeure ;
  • 5 % des rectifications du résultat fondées sur l’article 57 du CGI et afférentes aux transactions ci-dessus visées.

Le montant de l’amende ne peut être inférieur à 10 000 euros. Amende qui peut s’appliquer même si aucune rectification n’a été effectuée par le service.

 

[1] Loi n° 2009-1674, du 30 décembre 2009, de finances rectificative pour 2010 (N° Lexbase : L1817IGE).

[2] Loi n° 2017-1837, du 30 décembre 2017, de finances pour 2018, art. 107 (N° Lexbase : L7952LHY).

[3] Deux entreprises sont considérées comme associées lorsque :

  • l’une participe directement ou indirectement à la direction, au contrôle ou au capital de l’autre,
  • Ou que les mêmes personnes participent directement ou indirectement à la direction, au contrôle ou au capital d’une entreprise d’un État et d’une entreprise de l’autre État.

[4] BOI-BIC-BASE-80-10-40 (N° Lexbase : X3777BN9).

[5] Principes directeurs, n° 1.51.

[6] Principes directeurs, n° 1.56 à 1.106.

[7] BOI-BIC-BASE-80-10-40.

newsid:476712

Fiscalité internationale

[Brèves] La Commission demande à la France de modifier ses règles en matière de retenue à la source concernant les dividendes versés aux compagnies d'assurances d'autres États membres de l'EEE

Réf. : Commission européenne, actualités, 18 février 2021

Lecture: 2 min

N6767BYB

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par Marie-Claire Sgarra

Le 10 Mars 2021

La Commission européenne prend, à intervalles réguliers, des décisions relatives à des procédures d'infraction contre les États membres qui ne se conforment pas aux obligations qui leur incombent en vertu de la législation de l'Union européenne. Pour le mois de février 2021, la France a reçu une mise en demeure. La Commission lui demande de modifier ses règles en matière de retenue à la source concernant les dividendes versés aux compagnies d'assurances d'autres États membres de l'EEE.

Dans le détail, la Commission a adressé une lettre de mise en demeure à la France, l'exhortant à modifier ses règles en matière de retenue à la source concernant les dividendes versés aux compagnies d'« assurances en unités de compte » établies dans d'autres États membres de l'Espace économique européen (EEE).

Une assurance en unités de compte est un régime d'assurance-vie dans le cadre duquel les primes versées par le preneur d'assurance sont utilisées pour acheter des parts dans des fonds d'investissement choisis par cette personne et les dividendes versés par ces fonds sont reversés par l'assureur au preneur d'assurance.

Les dividendes français reçus par les compagnies d'assurances en unités de compte établies dans des États membres de l'EEE font l'objet d'une retenue à la source définitive. En revanche, les compagnies d'assurances en unités de compte établies en France n'ont pas de retenue à la source sur ces dividendes ou peuvent imputer la retenue à la source effectuée sur l'impôt français sur les sociétés, ce qui revient à zéro. En effet, les dividendes reçus constituent des provisions déductibles ou des réserves techniques.

La Commission estime que ces règles portent atteinte à la libre circulation des capitaux (article 63, paragraphe 1, du TFUE et article 40 de l'accord EEE). La France dispose de deux mois pour répondre aux arguments avancés par la Commission. À défaut, cette dernière pourrait décider de lui adresser un avis motivé.

 

 

newsid:476767

Procédures fiscales

[Brèves] Désignation par le contribuable d’un mandataire : effets lorsque le mandat est porté à la connaissance de l’administration avant toute procédure de rectification

Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 24 février 2021, n° 428745, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A06014I4)

Lecture: 4 min

N6695BYM

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par Marie-Claire Sgarra

Le 04 Mars 2021

Aucun texte ni aucun principe ne fait obstacle à ce qu'un mandat, adressé avant l'engagement d'une procédure d'imposition, habilite le mandataire à recevoir l'ensemble des actes des procédures susceptibles d'être engagées au titre d'impositions déterminées et à y répondre, et emporte dès lors élection de domicile auprès de ce dernier. 

Les faits. 

⇒ à la suite de la vérification de la comptabilité d’une société, son gérant a fait l'objet d'un contrôle sur pièces et d'un ESFP à l'issue desquels il a été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de ces quatre années.  

⇒ la cour administrative d'appel de Versailles, après avoir prononcé un non-lieu à hauteur des sommes dégrevées en cours d'instance, a rejeté le surplus de ses conclusions d'appel contre le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu'il avait rejeté le surplus des conclusions de sa demande en décharge contre les impositions restant en litige (CAA Versailles, 10 janvier 2019, n° 17VE01135 N° Lexbase : A5182YUH). 

Rappel :

✔ l'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation,

✔ lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée (LPF, art. L. 57 N° Lexbase : L0638IH4).

Le requérant a produit devant la cour une lettre, reçue par l'administration fiscale, par laquelle son avocat indiquait que le requérant élisait domicile à son cabinet et lui donnait « mandat pour recevoir l'ensemble des actes de la procédure le concernant, et y répondre » en demandant à l'administration de lui adresser toute correspondance qui serait destinée au contribuable « dans le cadre de toutes les conséquences personnelles attachées à la vérification de comptabilité de la société CSD pour les années 2007 à 2010 ».

La cour administrative d’appel a relevé que ce mandat avait été adressé à l'administration avant que ne lui soient notifiés, d'une part, l'avis d'examen de situation fiscale personnelle et, d'autre part, la proposition de rectification résultant du contrôle sur pièces opéré sur ses revenus de l'année 2010.

La cour en a déduit que le mandat à son conseil n'était pas opposable à l'administration parce qu'il avait été adressé antérieurement à l'engagement des procédures d'imposition litigieuses.

Solution du Conseil d’État.

👉 Sauf stipulation contraire, le mandat donné à un conseil ou à tout autre mandataire par un contribuable pour recevoir l'ensemble des actes de la procédure d'imposition et y répondre emporte élection de domicile auprès de ce mandataire.

👉 Lorsqu'un tel mandat a été porté à la connaissance de l'administration fiscale, celle-ci est en principe tenue d'adresser au mandataire l'ensemble des actes de la procédure d'imposition.

👉 Lorsque le mandataire du contribuable a la qualité d'avocat et que celui-ci déclare que son client a élu domicile à son cabinet, l'administration fiscale est tenue de lui adresser les actes de la procédure d'imposition sans qu'il soit besoin d'exiger la production d'un mandat exprès.

Jurisprudences antérieures :

📌 En cas d’élection de domicile, le service est tenu d’adresser l’ensemble des actes de procédure et notamment la proposition de rectification au mandataire et non au contribuable (CE 8° et 3° ssr., 23 mai 2003, n° 253223, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A9488C7K).

Lire sur cet arrêt, F. Girard, Destinataire de la notification de redressements : à quoi sert la domiciliation fiscale ?, Lexbase Fiscal, juin 2003, n° 76 (N° Lexbase : N7801AA8).

📌 S'agissant des exigences tenant au contenu du mandat, le Conseil d’État a jugé que pour l'application des dispositions des articles L. 57 et L. 76 (N° Lexbase : L3318LCU) du Livre des procédures fiscales relatives à la procédure de rectification des déclarations du contribuable, lorsque le mandat donné à un conseil ou à tout autre mandataire par un contribuable pour l'assister dans ses relations avec l'administration ne contient aucune mention expresse habilitant le mandataire à recevoir l'ensemble des actes de la procédure d'imposition, ce mandat n'emporte pas élection de domicile auprès de ce mandataire.

Dans ce cas, l'administration n'entache pas la procédure d'imposition d'irrégularité en notifiant l'ensemble des actes de la procédure au contribuable, alors même que le mandat confie au mandataire le soin de répondre à toute notification de redressements, d'accepter ou de refuser tout redressement.

(CE 8° et 3° ssr., 27 octobre 2010, n° 327163, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A1098GDZ).


 

 

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Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

[Jurisprudence] À propos des notions de « terrain à bâtir » et de « fondations »

Réf. : CAA de Nantes, 28 janvier 2021, n° 19NT01800 (N° Lexbase : A17864EU)

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par Franck Laffaille, Professeur de droit public, Faculté de droit (CERAP) - Université de Paris XIII (Sorbonne/Paris/Cité), Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition fiscale

Le 10 Mars 2021


Mots-clés : TVA • terrain à bâtir • parcelles • TVA à la marge

La cour administrative d’appel de Nantes a jugé, dans un arrêt du 28 janvier 2021 que la  circonstance que les parcelles cédées ont fait l’objet d’aménagements de viabilisation, qui ont été utilisées lorsqu’elles servaient de terrains de camping ou de caravaning n’a pas pour effet de leur donner un caractère bâti.


 

Une SNC – dont l’activité consiste en la gestion de campings et en la vente de mobile-homes et d’habitations légères de loisirs – opère cession de lots numérotés dans chacune des 10 parcelles composant l’un de ses campings. La finalité de l’opération est de poser des habitations légères de loisirs à titre de résidence secondaire. L’administration impose la vente des parcelles selon le régime de la marge (CGI, art. 268 N° Lexbase : L4910IQW) ; selon elle, les parcelles possèdent la qualité de terrains à bâtir au sens de l’article 257 (1° du 2 du I) du CGI (N° Lexbase : L6267LUN). Saisi d’une demande aux fins de prononcer la décharge – en droits et pénalités – des rappels de TVA mis à la charge de la SNC, le tribunal administratif de Caen déboute la requérante. Saisie, la cour administrative d’appel de Nantes confirme le jugement.

Les griefs de la SNC sont de diverses natures.

  • tout d’abord, elle soutient que les propositions de rectification sont insuffisamment motivées ; elles ne font pas état d’une vérification de la qualification des terrains à l’aune de la « loi littoral » et du plan de prévention des risques territoriaux. Se trouveraient ainsi violées les dispositions de l’article L. 57 du Livre des procédures fiscales (N° Lexbase : L0638IH4),
  • secondement, l’administration aurait méconnu la définition « objective » du terrain à bâtir qui repose sur un critère de constructibilité effective (instruction BOI-TVA-IMM-10-10-10-20 n° 20 N° Lexbase : X8483ALR),
  • troisièmement, l’administration ne saurait nier le fait que les parcelles sont situées dans une zone d’urbanisation diffuse : proches du rivage de la Manche, elles sont entourées de terrains de camping, d’une zone naturelle et d’une zone constructible,
  • quatrièmement, il ne saurait être contesté que les parcelles ne méritent pas la qualification de terrain à bâtir au regard des règles d’urbanisme,
  • cinquièmement, le terrain en question n’a pas été transformé en parc résidentiel de loisirs ; aucune démarche n’a d’ailleurs été menée en vue d’une construction neuve,
  • sixièmement, exploitation commerciale des parcelles il y a eu, avant même leur cession dans le cadre d’une location qualifiée de commerciale au regard de la TVA (location de terrain),
  • septièmement, des aménagements de viabilisation ayant été réalisés s’agissant des parcelles cédées en lots, elles possèdent un caractère bâti,
  • huitièmement : dans la mesure où les cessions des parcelles incluent aussi une quote-part de bâtiments communs à la résidence, elles portent sur des terrains bâtis depuis plus de cinq ans.

La CAA de Nantes n’est pas convaincue par les arguments développés à l’appui des prétentions de la SNC.

S’agissant tout d’abord de la régularité de la procédure d’imposition, le juge estime que l’administration n’a pas méconnu les dispositions de l’article L. 57 du LPF (« L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation [...] »). Est opérée une lecture formaliste de la disposition invoquée :  une proposition de rectification est régulière dès lors que l’impôt visé est désigné, que sont mentionnées l’année d’imposition et la base d’imposition, que sont énoncés les motifs justifiant les rectifications envisagées. De telles exigences s’imposent pour que le contribuable soit à même de formuler des observations en soutien de sa cause. Mais – estime le juge – la régularité de la procédure d’imposition « ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs » ; tout comme elle ne dépend pas « des précisions apportées par administration sur l’origine des documents » par elle utilisés pour opérer les redressements. Dans le cas présent, les propositions de rectification sont réputées suffisamment motivées : il est indiqué qu’elles portent sur la TVA, les périodes concernées et les bases d’imposition sont mentionnées, les motifs de rappel de la taxe (relatifs à l’existence de terrains à bâtir) sont précisés.

Quid du bien-fondé de l’imposition ?

Le juge opère lecture des dispositions législatives visées. En vertu de l’article 257 du CGI, sont des terrains à bâtir « les terrains sur lesquels des constructions peuvent être autorisées en application d'un plan local d'urbanisme, d'un autre document d'urbanisme en tenant lieu, d'une carte communale ou de l'article L. 111-1-2 du Code de l'urbanisme ». En vertu de l’article 268 du CGI relatif à la livraison d'un terrain à bâtir, la base d'imposition est constituée (si l'acquisition par le cédant n'a pas ouvert droit à déduction de la TVA) « par la différence entre / 1° D'une part, le prix exprimé et les charges qui s'y ajoutent ; / 2° D'autre part, selon le cas : / a) soit les sommes que le cédant a versées, à quelque titre que ce soit, pour l'acquisition du terrain ou de l'immeuble ». Selon l’article 261 du CGI, sont exonérées de la TVA « les livraisons de terrains qui ne sont pas des terrains à bâtir au sens du 1° du 2 du I de l'article 257 ».

Reste maintenant à cogiter sur la nature et la spécificité des habitations légères de loisirs au centre du contentieux. Ces habitations – posées sur les lots de parcelles vendus par la SNC – sont des « maisonnettes préfabriquées », démontables ou transportables au sens du code de l’urbanisme. Cette simple constatation semble étayer la thèse de la SNC. Cependant, précise le juge, de telles habitations « constituent des constructions posées sur des murets faits de parpaings scellés en béton et fixés au sol par des fondations ». De cela, il convient de tirer la conclusion suivante : elles n’ont pas vocation – dans le cadre d’une « utilisation normale et courante » - à être déplacées. Il s’agit bien de constructions au sens de l’article 257 du CGI (1° du 2 du I). Le juge préfère ainsi retenir comme critère pertinent non pas celui de la nature intrinsèque des constructions – des préfabriqués démontables ou transportables – mais celui de la non mobilité au regard d’une utilisation dite « normale et courante ». Les terrains sont réputés « à bâtir » dans la mesure où ils posés sur des murets faits de parpaings scellés en béton et fixés au sol par des fondations. Reste qu’ils peuvent aisément être démontés et transportés… Reste que la notion d’« utilisation normale et courante » mériterait quelque précision substantielle pour éviter de sombrer dans une généricité par trop commode…

La nature des constructions n’est pas la seule donnée expliquant pourquoi la CAA de Nantes aligne sa position sur celle de l’administration. Il est encore fait référence au plan d’occupation des sols de la commune sur laquelle se trouvent les parcelles : le POS a autorisé les aires naturelles de camping, les terrains de caravanning et les parcs résidentiels de loisirs. Cette autorisation porte sur les zones constructibles et classées en secteur UCI, secteur à l’intérieur duquel sont situées les parcelles. Un tel classement des parcelles conduit le juge – en vertu de ce que l’on pourrait dénommer principe d’attractivité fiscale – à les qualifier de terrains à bâtir au sens de l’article 257 du CGI. Que les parcelles aient fait l’objet d’aménagements de viabilisation – utilisés alors qu’elles étaient faisaient office de terrains de camping ou de caravanning – ne change rien à la donne. Cela ne permet pas de leur donner la qualité de terrain bâti.

La SNC soutient que les parcelles doivent être qualifiées de terrains bâtis pour une autre raison : les cessions incluent une quote-part des bâtiments communs à la résidence et portent sur des terrains bâtis depuis plus de cinq ans. La CAA de Nantes n’estime pas pertinente une telle argumentation. Scrutant la teneur des accords conclus entre les parties, elle constate que l’unique acte de cession comprend un prix global de vente. Cela emporte la conséquence suivante : la SNC n’a pas vendu à titre principal des parcelles comportant une construction achevée depuis plus de cinq ans.

Enfin, la SNC ne peut se prévaloir à bon droit – en vertu de l’article L. 80 A du LPF (N° Lexbase : L6958LLB)[1] – du paragraphe 20 de l’instruction BOI-TVA-IMM-10-10-10-20 (12 septembre 2012). Selon le §20 de ladite instruction, « le législateur a retenu une définition de nature administrative, autonome des définitions fiscales connues par ailleurs qui reposent sur un critère de constructibilité effective. En l'espèce, aux termes mêmes du texte, la qualification de terrain à bâtir sera acquise dès lors que « des constructions peuvent être autorisées en application des documents (d'urbanisme) », indépendamment de la question de savoir si la réalisation concrète d'une construction se trouve en outre subordonnée à la réalisation d'autres conditions tenant, par exemple, à des exigences de surface, de densité ou de consistance, ou encore au respect de servitudes du fait de tiers.

Il s'agit donc des terrains pour lesquels, au moment de leur livraison, la documentation publique opposable ne fait pas obstacle à construire, quelle que soit la densité de construction autorisée et sans qu'il soit nécessaire d'apporter préalablement une modification aux documents en cause ». Ce paragraphe 20 ne peut être utilisé avec profit par la société requérante : la notion de livraison de terrain à bâtir renvoie ici à un « terrain qui ne comporte pas d’ores et déjà des « bâtiments », au sens de « construction incorporée au sol ». Ce faisant, il n’existe aucun hiatus entre cette interprétation de la loi fiscale et l’interprétation au cœur du présent litige.

La CAA de Nantes rejette la requête de la SNC et confirme le jugement du TA de Caen.

 

[1] « Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration.

Il en est de même lorsque, dans le cadre d'un examen ou d'une vérification de comptabilité ou d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, et dès lors qu'elle a pu se prononcer en toute connaissance de cause, l'administration a pris position sur les points du contrôle, y compris tacitement par une absence de rectification.

Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales ».

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