La lettre juridique n°731 du 15 février 2018

La lettre juridique - Édition n°731

Contrats administratifs

[Brèves] Annulation de la procédure de passation de la concession de mobiliers urbains passée à titre provisoire par la Ville de Paris

Réf. : CE 2° et 7° ch.-r., 5 février 2018, n° 416579, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6130XCZ)

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N2673BXB

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par Yann Le Foll

Le 15 Février 2018

Est confirmée l'annulation de la procédure de passation de la concession de mobiliers urbains passée à titre provisoire par la ville de Paris. Ainsi statue le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 5 février 2018 (CE 2° et 7° ch.-r., 5 février 2018, n° 416579, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6130XCZ).

La procédure litigieuse a été passée sans publicité ni mise en concurrence, la ville de Paris justifiant ce choix par la nécessité d'éviter une rupture dans la continuité du service public d'information municipale après l'annulation de la procédure de passation initiale (CE, 18 septembre 2017, n°s 410336, 410337, 410364, 410365 N° Lexbase : A0895WSX, confirmant TA Paris, 21 avril 2017, n°s 1704976 N° Lexbase : A6878WAY et 1705054 N° Lexbase : A6879WAZ). En l'espèce, la Haute juridiction rappelle qu'une personne publique peut lorsque l'exige un motif d'intérêt général tenant à la continuité du service public s'exonérer, à titre provisoire et selon certaines modalités, des règles de publicité et de mise en concurrence pour la conclusion d'une concession de service en cas d'urgence résultant de l'impossibilité dans laquelle elle se trouve, indépendamment de sa volonté, de continuer à faire assurer le service par son cocontractant ou de l'assurer elle-même.

En l'espèce, le Conseil d'Etat estime notamment que compte tenu de la grande diversité des moyens de communication, par voie électronique ou sous la forme d'affichage ou de magazines, dont dispose la ville de Paris, ceux-ci sont suffisants pour assurer la continuité du service public de l'information municipale en cas d'interruption du service d'exploitation du mobilier urbain d'information.

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Droit des étrangers

[Brèves] Guerre d'Algérie : les victimes de nationalité algérienne doivent aussi pouvoir bénéficier d'une pension

Réf. : Cons. const., décision n° 2015-530 QPC du 23 mars 2016 (N° Lexbase : A6042Q8B)

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N2691BXX

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par Marie Le Guerroué

Le 15 Février 2018

Le fait de réserver le bénéfice du droit à pension aux victimes, ou à leurs ayants droit, de nationalité française, tel que cela était prévu par l'article 13 de la loi du 31 juillet 1963, méconnait le principe d'égalité devant la loi. Dans sa décision du 8 février 2018, le Conseil constitutionnel censure, donc, les mots "de nationalité française" figurant deux fois au premier alinéa de l'article 13 de la loi du 31 juillet 1963 (Cons. const., décision n° 2015-530 QPC du 23 mars 2016 N° Lexbase : A6042Q8B).

Le Conseil constitutionnel avait été saisi le 23 novembre 2017 d'une question prioritaire de constitutionnalité (CE 3° et 8° ch.-r., 22 novembre 2017, n° 414421, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A5946W3M) portant sur l'article 13 de la loi du 31 juillet 1963, de finances rectificative pour 1963, dans sa rédaction résultant de la loi du 26 décembre 1964, portant prise en charge et revalorisation de droits et avantages sociaux consentis à des Français ayant résidé en Algérie, modifiée par la décision du Conseil constitutionnel n° 2015-530 QPC du 23 mars 2016 (Cons. const., décision n° 2015-530 QPC, du 23 mars 2016 N° Lexbase : A6042Q8B).

L'article 13 de la loi du 31 juillet 1963 crée un régime d'indemnisation des personnes de nationalité française victimes de dommages physiques subis en Algérie entre le 31 octobre 1954 et le 29 septembre 1962 du fait d'attentat ou de tout autre acte de violence, ainsi que de leurs ayants droit de nationalité française. L'objectif de ces dispositions était de garantir le paiement de rentes aux personnes ayant souffert de préjudices résultant de dommages qui se sont produits sur un territoire français à l'époque. M. K. reprochait à ces dispositions de méconnaître le principe d'égalité devant la loi, en ce qu'elles réservaient le bénéfice de ce droit à pension aux victimes, ou à leurs ayants droit, de nationalité française.

Le Conseil constitutionnel juge, d'une part, que le législateur ne pouvait, sans méconnaître le principe d'égalité devant la loi, établir, au regard de cet objet de la loi, une différence de traitement entre les victimes françaises et celles, de nationalité étrangère, qui résidaient sur le territoire français au moment du dommage qu'elles ont subi et, d'autre part, que l'objet de la pension servie à l'ayant droit étant de garantir à celui-ci la compensation de la perte de la pension servie au bénéficiaire décédé, le législateur ne pouvait établir, au regard de ce même objet, une différence de traitement entre les ayants droit selon leur nationalité.

Le Conseil constitutionnel déclare les mots "de nationalité française" figurant deux fois au premier alinéa de l'article 13 de la loi du 31 juillet 1963 contraires à la Constitution.

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Entreprises en difficulté

[Jurisprudence] Impossibilité pour un tiers d'intervenir dans une instance en revendication en l'absence d'acquiescement

Réf. : Cass. com., 24 janvier 2018, n° 16-20.589 et n° 16-22.128, FS-P+B+I (N° Lexbase : A0781XBK)

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N2697BX8

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par Pierre-Michel Le Corre, Professeur à l'Université Nice Côte d'Azur, Directeur du Master 2 Droit des entreprises en difficulté de la Faculté de droit de Nice, Membre CERDP (EA 1201), Avocat au barreau de Nice

Le 15 Février 2018

La demande en acquiescement de revendication est une innovation de la loi du 10 juin 1994 (loi n° 94-475 N° Lexbase : L9127AG7), dont les solutions ont été reprises par l'article R. 624-13, alinéa 1er, du Code de commerce (N° Lexbase : L0913HZT), dans la rédaction que lui a donnée le décret du 28 décembre 2005 (décret n° N° Lexbase : L3297HET). Elle prend la forme d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée à l'organe compétent en fonction de la procédure collective ouverte. La demande en acquiescement constitue une phase obligatoire, dans le cadre des demandes en revendication. L'acquiescement a pour effet de rendre opposable à la procédure collective le droit de propriété du revendiquant

Lorsque l'acquiescement est intervenu, le mandataire de justice compétent ne saurait discuter à nouveau le droit de propriété de l'intéressé, ayant renoncé définitivement à combattre les prétentions de celui-ci, dans le cadre de l'action en justice entamée (1). Si la demande en revendication a été introduite au titre d'un contrat qui n'est plus ou ne peut être un contrat en cours, l'acquiescement va autoriser le propriétaire du meuble revendiqué à reprendre le bien. Tel est le cas en présence d'une vente avec clause de réserve de propriété, contrat qui cesse d'être en cours au jour de l'ouverture de la procédure collective dès lors que le bien a été livré au débiteur acheteur avant l'ouverture de la procédure collective.

En l'absence d'acquiescement, il appartient au revendiquant de présenter au juge-commissaire une requête en revendication dans le délai du mois qui court à compter de l'expiration du délai du mois imparti à l'organe compétent pour se prononcer sur la demande en acquiescement.

Une difficulté particulière se présente lorsque l'organe compétent pour acquiescer à la demande en revendication reconnaît le principe de l'opposabilité du droit de propriété, par exemple celui reposant sur une clause de réserve de propriété, mais conteste sa portée. En raison du désaccord constaté entre l'administrateur judiciaire et le vendeur réservataire, la Cour de cassation a pu approuver une cour d'appel d'avoir estimé qu'il n'y avait pas eu acquiescement à la demande en revendication, de sorte que le vendeur était astreint à présenter une requête en revendication au juge-commissaire (2). Au final, Ce n'est donc qu'en cas d'acquiescement sans réserve que le propriétaire est dispensé de saisine du juge-commissaire (3).

En l'espèce, une difficulté liée à un acquiescement partiel s'était présentée. Le revendiquant avait alors estimé devoir saisir le juge-commissaire, analysant avec une juste projection de ce qui allait être par la suite la position de la Cour de cassation, l'acquiescement partiel en une absence d'acquiescement.

Devant le juge-commissaire, une société d'affacturage prétendant exercer des droits sur les biens revendiqués par le vendeur était intervenue volontairement à l'instance en contestant ce qu'elle avait qualifié d'acquiescement de la part de l'administrateur judiciaire.

La question première qui se posait était de déterminer si le juge-commissaire pouvait accueillir l'intervention volontaire de la société d'affacturage. Cette dernière se fondait sur les dispositions de l'article L. 621-9 du Code de commerce (N° Lexbase : L3502ICP), qui énonce que le juge-commissaire est chargé de veiller au déroulement rapide de la procédure et à la protection des intérêts en présence ; qu'il statue par ordonnance sur les demandes, contestations et revendications relevant de sa compétence ainsi que sur les réclamations formées contre les actes de l'administrateur, du mandataire judiciaire et du commissaire à l'exécution du plan. La société d'affacturage considérait qu'elle attaquait une décision de l'administrateur judiciaire ayant acquiescé à la demande en revendication et qu'elle avait qualité pour agir devant le juge-commissaire qui doit statuer sur cette réclamation.

La Cour de cassation, confirmant la décision de la cour d'appel, va rejeter la prétention. Elle énonce que l'action en revendication, qui tend à la seule reconnaissance du droit de propriété du revendiquant aux fins d'opposabilité de ce droit à la procédure collective, est strictement réglementée par l'article L. 624-17 du Code de commerce. La cour d'appel a donc pu à bon droit déduire qu'à défaut d'acquiescement à la demande par l'administrateur en cas de contestation de l'acquiescement donné par ce dernier, le juge-commissaire ne peut être saisi que par le revendiquant, le débiteur le mandataire de justice, à l'exclusion de toute autre personne. La Cour de cassation ajoute que peu importe que l'intervention d'une tierce personne prenne la forme d'une intervention volontaire ou d'une réclamation contre l'acte d'acquiescement, l'article L. 621-9 du Code de commerce ne pouvant, dans ce cas, recevoir application.

La Cour de cassation, pour parvenir à sa solution, implicitement, mais nécessairement, a dû reconduire la solution précédemment posée dans l'arrêt précité du 3 mai 2016, selon laquelle l'acquiescement partiel de l'administrateur judiciaire ne vaut pas acquiescement à la demande en revendication, ce qui oblige, par conséquent, le revendiquant à saisir le juge-commissaire par requête. Or, selon le texte de l'article L. 624-17, lui seul est habilité à le faire, à défaut d'acquiescement. La solution n'aurait, au demeurant, pas été différente, en cas de contestation de l'acquiescement. En ce cas, seul le débiteur aurait pu saisir le juge-commissaire pour contester l'acquiescement intervenu.

Une deuxième difficulté se présentait en l'espèce, qui portait sur l'obligation de restitution incombant au liquidateur, après conversion de la procédure de redressement en liquidation judiciaire, des sommes par lui perçues après l'ouverture de la procédure collective par le sous-acquéreur du fait de la revente des biens revendiqués.

On sait d'abord que si le bien vendu sous clause de réserve de propriété est revendu à un tiers acquéreur, le vendeur d'origine ne peut revendiquer son bien entre les mains du tiers, du fait de la règle posée par l'article 2276 du Code civil (N° Lexbase : L7197IAS), selon laquelle "en fait de meubles, possession vaut titre". Il existe en effet une présomption de bonne foi, qui résiste en cas de procédure collective, venant protéger le tiers acquéreur d'un meuble corporel, selon laquelle il est réputé tenir son droit d'un propriétaire.

Et c'est pourquoi le doit des entreprises en difficulté transforme l'action en revendication du bien en une action en revendication du prix, dès lors que, au jour de l'ouverture de la procédure collective, le prix de revente du bien n'a pas été payé à l'acheteur intermédiaire, celui qui sera le débiteur sous procédure collective.

Le droit de propriété du vendeur sous clause de réserve de propriété, qui n'a pas été payé au jour du jugement d'ouverture de la procédure collective de son acheteur, se reporte, par un mécanisme de subrogation réelle, sur la créance du prix de revente détenue par le débiteur sur le sous-acquéreur.

Si le sous-acquéreur paie après le jugement d'ouverture, l'administrateur judiciaire ou le liquidateur doit remettre au revendiquant subrogé le montant qui lui a été versé après le jugement d'ouverture par le sous-acquéreur. Mais cet organe ne doit remettre au revendiquant que le montant qu'il a reçu du sous-acquéreur, et c'est pourquoi le juge-commissaire et à sa suite la cour d'appel, appelé à statuer sur la demande en revendication, ne peut condamner l'administrateur judiciaire ou le liquidateur à resituer la totalité des sommes dues, sans rechercher si cet organe dispose des sommes revendiquées pour les avoir reçues après l'ouverture de la procédure collective, soit de la part du sous-acquéreur, soit de la part de l'affactureur subrogé dans les doits du débiteur.

L'apport de l'arrêt commenté tient précisément à cette obligation éditée par la Cour de cassation, qui repose sur le juge-commissaire et à sa suite sur la cour d'appel, du montant des sommes effectivement perçues par l'organe de la procédure collective.


(1) CA Nancy, 2ème ch. com., 21 juin 2000.
(2) Cass. com., 3 mai 2016, n° 14-24.586, F-P+B (N° Lexbase : A3352RNH) ; Gaz. Pal., 18 octobre 2016, n° 36, p. 63, note crit. E. Le Corre Broly ; Act. proc. coll., 2016/10, comm. 135, note Petit ; JCP éd. E, 2016, chron. 1465, n° 9, note Ph. Pétel ; Bull. Joly Entrep. en diff., 2016, 324, note L. Le Mesle ; LPA,17 octobre 2016, n° 207, p. 10, note crit. M. Laroche ; RTDCom., 2017, 190, n° 8, note A. Martin-Serf.
(3) L. Le Mesle préc., note sous Cass. com., 3 mai 2016, n° 14-24.586, préc..

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Fiscalité des particuliers

[Brèves] Les dispositions subordonnant le bénéfice de l'exonération prévu à l'article 151 septies du CGI à l'inscription du loueur en meublé au RCS jugées contraires à la Constitution

Réf. : Cons. const., 8 février 2018, n° 2017-689 QPC (N° Lexbase : A6139XCD)

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N2676BXE

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par Marie-Claire Sgarra

Le 14 Avril 2020

Les dispositions subordonnant, la reconnaissance de la qualité de loueur en meublé professionnel à une inscription au registre du commerce et des sociétés prévues par l'article 151 septies VII du Code général des impôts (N° Lexbase : L8692I4P) ont été déclarées non-conformes à la Constitution.

Telle est la solution du Conseil constitutionnel dans sa décision du 8 février 2018 (Cons. const., 8 février 2018, n° 2017-689 QPC N° Lexbase : A6139XCD).

Le Conseil constitutionnel avait été saisi par le Conseil d'Etat, dans un arrêt du 20 novembre 2017 (CE 20 novembre 2017, n° 408176, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A7467WZL), des dispositions du VII de l'article 151 septies du Code général des impôts, dans ses rédactions issues successivement de la loi du 30 décembre 2005, de finances rectificative pour 2005 (N° Lexbase : L6430HEU), de la loi du 27 décembre 2008, de finances pour 2009 (N° Lexbase : L3783IC4), et de l'ordonnance du 30 janvier 2009, portant diverses mesures relatives à la fiducie (N° Lexbase : L6939ICY), subordonnant la reconnaissance de la qualité de loueur en meublé professionnel à une inscription en cette qualité au registre du commerce et des sociétés. Pour rappel, l'article 151 septies du Code général des impôts prévoit une exonération des plus-values de cession en faveur des redevables de l'impôt sur le revenu exerçant une activité de location d'appartements meublés à titre professionnel.

Le Conseil constitutionnel a considéré, qu'en subordonnant le bénéfice de l'exonération prévue à l'article 151 septies du Code général des impôts à l'inscription du loueur en meublé au RCS, "le législateur a entendu empêcher que des personnes exerçant l'activité de loueur en meublé à titre seulement occasionnel en bénéficient". L'article L. 123-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L5559AIQ) prévoit que seules peuvent être inscrites au registre du commerce et des sociétés les personnes physiques "ayant la qualité de commerçant", laquelle est, en vertu de l'article L. 121-1 du même code (N° Lexbase : L5549AID), conférée à "ceux qui exercent des actes de commerce". Dès lors, en subordonnant le bénéfice de l'exonération à une condition spécifique aux commerçants, alors même que l'activité de location de biens immeubles ne constitue pas un acte de commerce au sens de l'article L. 110-1 du même code (N° Lexbase : L1282IWE), le législateur ne s'est pas fondé sur un critère objectif et rationnel en fonction du but visé. Par conséquent, les dispositions contestées méconnaissent le principe d'égalité devant les charges publiques.

newsid:462676

Fiscalité internationale

[Jurisprudence] De la (non) application de la jurisprudence "de Ruyter" aux résidents d'Etats tiers

Réf. : CJUE, 18 janvier 2018, aff. C-45/17, 18 janvier 2018 (N° Lexbase : A4171XAQ)

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N2737BXN

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par Franck Laffaille, Professeur de droit public, Faculté de droit (CERAP) - Université de Paris XIII (Sorbonne/Paris/Cité), Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition fiscale

Le 15 Février 2018

La jurisprudence "de Ruyter" est-elle transposable aux résidents d'Etats tiers à l'EEE et à la Suisse ? Non. La législation française est-elle contraire au droit de l'UE en ce qu'elle soumet aux prélèvements sociaux les revenus du capital d'un ressortissant français résidant en un Etat tiers (la Chine) ? Non. Voici en peu de mots l'essence de cette décision rendue par la CJUE le 18 janvier 2018. Le juge de Luxembourg avait été saisi d'une question préjudicielle par le Conseil d'Etat (français) ; ce dernier avance prudemment depuis l'arrêt de Ruyter (CJUE, 26 février 2015, aff. C-623/13 N° Lexbase : A2333NCE), réceptionné en la jurisprudence nationale (CE 10° et 9° ch.-r., 27 juillet 2015, n° 334551, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A0729NNC).

Dans la présente décision, il est demandé à la CJUE de cogiter sur la situation de ce ressortissant français résidant en Chine (depuis 2003), pays où il exerce une activité professionnelle et est affilié à un régime privé de sécurité sociale. Il subit en France (entre 2012 et 2014) divers prélèvements portant sur le revenu foncier et sur une plus-value réalisée lors de la cession d'un immeuble. Selon le demandeur, de tels prélèvements doivent se voir octroyer le même régime juridique que ceux visés dans l'affaire "de Ruyter" : dans cette dernière, les prélèvements en question -en ce qu'ils présentent un lien direct et pertinent avec certaines branches de sécurité sociale (cf. l'article 4 du Règlement n°1408/71 N° Lexbase : L4570DLT)- relèvent du champ d'application dudit règlement. Ils sont alors soumis au principe d'unicité de la législation applicable (cf. l'article 13 §1 du Règlement n°1408/71), alors même qu'ils sont assis sur les revenus du patrimoine des personnes assujetties, et cela indépendamment de l'exercice de toute activité professionnelle. L'application du principe d'unicité de la législation relative à la sécurité sociale interdit d'opérer de tels prélèvements, quand bien même ils seraient qualifiés d'impôts par ladite législation nationale. L'application de cette politique jurisprudentielle conduit à ce que toute personne affiliée à un régime de sécurité sociale dans un autre Etat membre a vocation à demander la décharge des prélèvements touchant les revenus de son patrimoine. Pour la France, s'il existe un droit au remboursement (cf. les déclarations d'un membre du Gouvernement en 2015 et celle du Directeur général des Finances publiques), il concerne les seules personnes physiques affiliées à un régime de sécurité sociale d'un Etat autre que la France... situé dans l'UE, l'EEE ou notre voisin ami la jolie Confédération suisse. Selon M. X., une telle interprétation de la jurisprudence de la CJUE -emportant exclusion des personnes résidant dans un Etat tiers- serait contraire au Règlement n°883/2004 (Règlement n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004, portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale N° Lexbase : L7666HT4) et au principe de libre circulation des capitaux.

Il n'en est rien, répond la CJUE. Celle-ci fait lecture de l'article 63 TFUE pour rappeler qu'il s'applique et entre Etats membres et entre Etats membres/pays tiers ; les restrictions aux mouvements de capitaux sont interdites, qu'il s'agisse tant des relations entre Etats UE que des relations entre Etats UE/Etats tiers. C'est une lecture extensive du champ d'application territorial de la libre circulation des capitaux que retient la CJUE. Si la notion de "mouvements de capitaux" n'est pas définie par le TFUE, la Cour en retient une lecture ductile : sont visées également les "opérations par lesquelles des non-résidents effectuent des investissements immobiliers sur le territoire d'un Etat membre".

Grâce à ce rappel, il est acté que les prélèvements -portant sur des revenus fonciers et une plus-value réalisée à la suite de la cession d'un immeuble perçus dans un Etat membre par une personne physique détenant la nationalité de cette Etat mais résidant dans un Etat tiers- relèvent bien de la notion de "mouvements de capitaux" (au sens de l'article 63 TFUE N° Lexbase : L2713IP8).

Reste à savoir désormais si nous sommes en présence d'une restriction aux mouvements de capitaux lorsque M. X. -déjà affilié à un régime de sécurité sociale en Chine- subit le traitement fiscal qui est sien à la suite de l'application de la législation française. Oui, nous sommes bien en présence d'une restriction à la libre circulation des capitaux constate la Cour. Il existe en effet des dispositions nationales à mêmes de dissuader les non-résidents de faire des investissements dans un Etat membre ou de dissuader les résidents d'un Etat membre de faire de même dans d'autres Etats. En revanche, un tel phénomène ne peut être constaté lorsque sont concernés les ressortissants de l'UE affiliés à un régime de sécurité sociale d'un autre Etat membre (ou d'un Etat de l'EEE, ou la Suisse) : nous sommes en présence d'un traitement plus favorable, à savoir une différence de traitement susceptible de dissuader les personnes concernées d'opérer des investissements immobiliers. La législation française constitue une indéniable restriction à la libre circulation des capitaux entre un Etat membre de l'UE et un Etat tiers ; elle est en principe interdite sur le fondement de l'article 63 TFUE. Reste à savoir s'il est possible de justifier une telle restriction à la libre circulation des capitaux ; c'est à cet instant que l'arrêt bascule.

La CJUE fait lecture de l'article 65 TFUE (N° Lexbase : L2715IPA) : "1. L'article 63 ne porte pas atteinte au droit qu'ont les Etats membres: a) d'appliquer les dispositions pertinentes de leur législation fiscale qui établissent une distinction entre les contribuables qui ne se trouvent pas dans la même situation en ce qui concerne leur résidence ou le lieu où leurs capitaux sont investis[...]".

S'il est possible de déroger au principe fondamental de la prohibition de la libre circulation des capitaux, seule une interprétation stricte doit prévaloir. Cela emporte récusation de toute compatibilité automatique avec le traité quand une législation comporte une distinction entre contribuables en fonction du lieu où ils résident. Ce que la CJUE entend éviter est l'édiction de législations nationales constituant un moyen de discrimination arbitraire ou une restriction déguisée à la libre circulation des capitaux et des paiements. S'ensuit une distinction -fondamentale- entre traitements inégaux (autorisés en vertu de l'article 65§1 du TFUE) et discriminations arbitraires (prohibées en vertu de l'article 65 §3 du TFUE).

A l'aune de cette césure, la législation française pourra passer -à bon droit- sous les fourches caudines du droit UE si la "différence de traitement concerne des situations qui ne sont pas objectivement comparables ou (est) justifiée par une raison impérieuse d'intérêt général".

Question : existe-t-il une différence de situation objective, au regard de la résidence, entre un ressortissant UE (relevant d'un régime de sécurité sociale d'un Etat membre autre que celui de l'Etat membre visé) et un ressortissant de cet Etat membre affilié à un régime de sécurité sociale dans un Etat tiers (autre qu'un Etat de l'EEE et que la Suisse) ? De la comparaison, encore et toujours, mère de l'herméneutique juridique. Selon la Cour, il existe une différence objective de traitement entre la situation d'un ressortissant d'un Etat membre résidant dans un Etat tiers (autre que l'EEE et la Suisse) dans lequel il est affilé à un régime de sécurité sociale... et ... un ressortissant de l'UE affilié à un régime de sécurité sociale d'un autre Etat membre.

L'argument principal : ce dernier -ressortissant de l'UE affilié à un régime de sécurité sociale d'un autre Etat membre- est seul "susceptible de bénéficier du principe d'unicité de la législation en matière de sécurité sociale [...] en raison de son déplacement à l'intérieur de l'Union". Principe d'unicité et déplacement à l'intérieur de l'UE se conjuguent pour objectiviser la différence de traitement et, ainsi, la rendre compatible avec les dispositions du droit de l'UE. Le déplacement au sein de l'UE permet de bénéficier du principe d'unicité ; ce dernier vise à éviter les "complications qui peuvent résulter de l'application simultanée de plusieurs législations nationales et à supprimer les inégalités de traitement qui seraient la conséquence d'un cumul partiel ou total des législations applicables". A défaut de faire usage de la liberté de circulation, il n'est pas possible d'invoquer le bénéfice du principe d'unicité de la législation en matière de sécurité sociale. Et la CJUE de réaliser une comparaison négative, souhaitant sans doute, par l'exemple, convaincre davantage le lecteur : il n'existe aucune différence objective entre la situation d'un ressortissant d'un Etat membre résidant en un Etat tiers (autre que l'EEE et la Suisse) et affilié à un régime de sécurité sociale ... et... la situation d'un ressortissant de ce même Etat membre quand il y réside tout en étant affilié à un régime de sécurité sociale. Dans les deux cas, précise la CJUE, ces personnes ne font pas usage de leur liberté de circulation au sein de l'UE ; ils ne peuvent donc revendiquer, à leur profit, le bénéfice du principe d'unicité de la législation en matière de sécurité sociale.

Sans doute la CJUE entend elle, par cet exemple négatif, rassurer les résidents des Etats tiers ; qu'ils ne pensent pas à victimes d'ostracisme juridique automatique par rapport aux ressortissants/résidents UE. La législation française apparaît justifiée -au regard des prescriptions de l'article 65§1 TFUE- en raison de l'existence de la situation objective constatée. Pour conforter son propos, la CJUE ajoute une argumentation ad absurdum (si nous faisions autrement...) : si la CJUE accueillait les prétentions de M. X., un ressortissant UE (résidant dans un Etat tiers autre que l'EEE et la Suisse) pourrait bénéficier du principe de l'unicité de la législation en matière de sécurité sociale. Or, le règlement n°883/2004 ne s'applique qu'aux ressortissants d'un des Etats membres soumis à la législation sociale d'un ou plusieurs Etats membres (§46 de l'arrêt). Le processus d'objectivisation promu par la CJUE peut paraître -d'un point de vue formel- cohérent. Mais son argumentation apparaît teintée de quelques circonvolutions. Il aurait été plus simple de commencer son arrêt par le raisonnement tenu in fine en son §46 : le Règlement n°883/2004 ne s'applique qu'aux ressortissants d'un des Etats membres soumis à la législation sociale d'un ou plusieurs Etats membres.

Pourquoi a-t-elle tourné, de manière quasi chamanique, autour des articles 63 et 65 du TFUE pour terminer par une lecture froidement littérale du Règlement n°883/2004 (article 11 et article 2§1) ? La CJUE répond, à sa manière, à cette question. Elle constate que le traité UE ne comporte pas de dispositions étendant la libre circulation des travailleurs aux personnes migrant vers un Etat tiers. Il convient alors de réaliser une opération juridictionnelle de protection de l'intégrité du droit UE : éviter une interprétation par trop ductile de l'article 63§1 du TFUE. Il faut éviter, explique le juge, que des personnes -ne rentrant pas "dans les limites du champ d'application territorial de la libre circulation des travailleurs"- tirent profit de ladite liberté. Le processus d'objectivisation réalisé par la CJUE ne découle donc pas d'une interprétation centrée sur les articles du TFUE ; elle s'appuie en réalité sur le règlement n°883/2004 (en la lecture littérale de ses dispositions). Et ce dernier fait office de bouclier : il permet de limiter le champ d'application territorial de la libre circulation des travailleurs. Tout cela n'est-il pas contradictoire avec les assertions soutenues en amont par la CJUE, notamment quand elle précise que l'article 63 TFUE s'applique et entre Etats membres et entre Etats membres/pays tiers ? On avait compris que les restrictions aux mouvements de capitaux sont interdites, qu'il s'agisse tant des relations entre Etats UE que des relations entre Etats UE/Etats tiers. Que vaut désormais -la décision de la Cour lue en son entièreté- cette lecture extensive du champ d'application territorial de la libre circulation des capitaux ? Que vaut encore la lecture ductile de la notion de "mouvements de capitaux ", entendue comme "opérations par lesquelles des non-résidents effectuent des investissements immobiliers sur le territoire d'un Etat membre" ?

Quoi qu'il en soit, la CJUE a tranché : la législation nationale française ne s'oppose pas à la législation d'un Etat membre...

newsid:462737

Licenciement

[Brèves] Précisions relatives au délai de recours contre une décision implicite d'homologation d'un PSE et aux circonstances dans lesquelles l'administration refuse la demande d'homologation

Réf. : CE, 4° et 1° ch.-r., 7 février 2018, n° 399838, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6162XC9)

Lecture: 2 min

N2789BXL

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par Blanche Chaumet

Le 16 Février 2018



Le délai de recours contre une décision implicite d'homologation d'un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) ne court, à l'égard des salariés de l'entreprise, qu'à compter du jour où, postérieurement à la naissance de cette décision implicite, ils ont été destinataires de la demande d'homologation présentée par l'employeur et de son accusé de réception par l'administration, soit par affichage de ces documents sur leurs lieux de travail, soit par tout autre moyen permettant de donner à cette information une date certaine. L'administration refuse l'homologation demandée s'il apparaît que les catégories professionnelles concernées par le licenciement ont été déterminées par l'employeur en se fondant sur des considérations, telles que l'organisation de l'entreprise ou l'ancienneté des intéressés, qui sont étrangères à celles qui permettent de regrouper, compte tenu des acquis de l'expérience professionnelle, les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, ou s'il apparaît qu'une ou plusieurs catégories ont été définies dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou en raison de leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée. Telle est la solution dégagée par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 7 février 2018 (CE, 4° et 1° ch.-r., 7 février 2018, n° 399838, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6162XC9).

En l'espèce, la société X, qui exerçait une activité de bureau d'études et d'ingénierie, a été placée, le 29 janvier 2015, en procédure de sauvegarde par le tribunal de commerce de Lyon pour une durée de dix mois. Elle a alors soumis à l'administration une demande d'homologation de son document fixant, de manière unilatérale, le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi de trente-huit salariés sur les cent soixante-dix-sept qu'elle employait. Le silence gardé pendant vingt-et-un jours sur le dossier complet accompagnant cette demande par le Direccte a fait naître, le 4 mai 2015, une décision implicite d'homologation.

Par un jugement du 20 octobre 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande d'annulation de cette décision présentée par un salarié de la société X. La cour administrative d'appel de Lyon ayant annulé, d'une part, ce jugement et, d'autre part, la décision implicite d'homologation du 4 mai 2015, la société X, et les sociétés Y et Z, mandataires judiciaires, se sont pourvues en cassation.

En énonçant les règles susvisées, la Haute juridiction rejette leur pourvoi (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E9334ESI).

newsid:462789

Procédures fiscales

[Brèves] Réclamation portant sur la déduction de déficits nés d'exercices prescrits mais qui, imputés sur un exercice non prescrit, sont regardés comme une charge de cet exercice

Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 7 février 2018, n° 396926, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6155XCX)

Lecture: 1 min

N2720BXZ

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par Marie-Claire Sgarra

Le 16 Février 2018

En application de l'article R. 196-3 du Livre des procédures fiscales (N° Lexbase : L5551G4D), un contribuable qui fait l'objet d'une procédure de reprise ou de rectification de la part de l'administration des impôts dispose d'un délai égal à celui de l'administration pour présenter ses propres réclamations.

Telle est la solution dégagée par le Conseil d'Etat dans un arrêt du 7 février 2018 (CE 9° et 10° ch.-r., 7 février 2018, n° 396926, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6155XCX).

En l'espèce la société requérante a absorbé une autre société. Par suite elle déduit de son résultat imposable au titre de l'exercice clos en 2003 le déficit de la société absorbée, provenant de la déduction de charges engagées au cours d'exercices antérieurs à la fusion et qui n'avaient pas été déduites au titre de ces exercices.

L'administration, au cours d'une vérification de comptabilité adresse, le 22 septembre 2006 à la société requérante, une proposition de rectification de ses bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2003, motif pris de ce que le déficit déduit par la société requérante excédait le montant du déficit mentionné dans l'agrément délivré à cette dernière, les impositions correspondantes ayant été mises en recouvrement par un avis de mise en recouvrement du 11 janvier 2007.

Le Conseil d'Etat juge que la société requérante disposait d'un délai qui courait jusqu'à l'expiration du délai de reprise de l'administration, lequel avait été interrompu par la proposition de rectification en vertu de l'article L. 189 du Livre des procédures fiscales (N° Lexbase : L8757G8T), pour contester, non seulement l'imposition supplémentaire correspondant à cette rectification, mais encore l'imposition primitive à laquelle elle avait été assujettie au titre de cet exercice. Par suite, la société requérante était recevable, le 10 mai 2007, à demander la majoration des déficits nés en 2001 et 2002 au sein de la société absorbée, qui lui avaient été transférés en application de l'agrément délivré par l'administration et qui, imputables sur l'exercice 2003, devaient être regardés comme une charge de cet exercice (cf. le BoFip - Impôts annoté (N° Lexbase : X6038AL9).

newsid:462720

Rel. collectives de travail

[Brèves] Revirement de jurisprudence concernant l'assiette de fixation des subventions dues au comité d'entreprise sur la base de la masse salariale

Réf. : Cass. soc., 7 février 2018, deux arrêts, n° 16-16.086 (N° Lexbase : A6143XCI) et n° 16-24.231 (N° Lexbase : A6144XCK), FS-P+B+R+I

Lecture: 2 min

N2677BXG

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par Charlotte Moronval

Le 15 Février 2018

L'évolution de la jurisprudence, qui a exclu de l'assiette de référence du calcul de la subvention de fonctionnement et de la contribution aux activités sociales et culturelles diverses sommes figurant au compte 641 mais n'ayant pas la nature juridique de salaires, conduit à priver de pertinence le recours à ce compte pour la mise en oeuvre des dispositions des articles L. 2325-43 (N° Lexbase : L9874H89) et L. 2323-86 (N° Lexbase : L2957H9E) alors applicables du Code du travail. Les sommes payées à titre de provision sur intéressement doivent ainsi être déduites de la base de calcul. Par ailleurs, la rémunération versée aux salariés mis à disposition par leur employeur n'a pas à être incluse dans la masse salariale brute de l'entreprise utilisatrice servant de base au calcul de la subvention de fonctionnement et de la contribution aux activités sociales et culturelles. Tels sont les apports dégagés par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans deux arrêts rendus le 7 février 2018 (Cass. soc., 7 février 2018, deux arrêts, n° 16-16.086 N° Lexbase : A6143XCI et n° 16-24.231 N° Lexbase : A6144XCK, FS-P+B+R+I ; abandon de la jurisprudence ancienne, Cass. soc., 30 mars 2011, n° 09-71.438, F-D N° Lexbase : A3941HMW).

Dans ces deux arrêts, des comités d'entreprise saisissent le tribunal de grande instance pour obtenir le paiement par l'employeur de sommes dues au titre de la subvention de fonctionnement et de la contribution aux activités sociales et culturelles. Dans le premier arrêt (n° 16-24.231), le comité d'entreprise est débouté de sa demande par la cour d'appel (CA Versailles, 22 juillet 2016, n° 15/04436 N° Lexbase : A7632RXX) alors que dans le second (n° 16-16.086), l'employeur est condamné à payer (CA Lyon, 26 février 2016, n° 14/07853 N° Lexbase : A7537Q8N). Un pourvoi en cassation est formé dans les deux arrêts.

Enonçant la nouvelle règle susvisée, la Haute juridiction, dans le premier arrêt (n° 16-24.231), rejette le pourvoi. Elle considère que c'est à bon droit que la cour d'appel a refusé d'intégrer dans la masse salariale brute les provisions sur congés payés, les indemnités légales et conventionnelles de licenciement et les indemnités de retraite, ainsi que les rémunérations versées aux salariés mis à disposition par une entreprise extérieure, toutes sommes qui ne figurent pas dans la DADS. Dans le second arrêt (n° 16-16.086), la Cour de cassation casse et annule l'arrêt de la cour d'appel au visa des articles L. 2323-86 et L. 2325-43 alors applicables et L. 3312-4 du Code du travail (N° Lexbase : L3252IME). En effet, viole ces articles, la cour d'appel qui refuse de déduire de cette masse salariale les indemnités légales et conventionnelles de licenciement, les indemnités de retraite et les sommes versées au titre de l'intéressement (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E1935ETT).

newsid:462677

Responsabilité

[Brèves] Agression mortelle sur le quai d'un RER : cas de force majeure exonérant la SNCF de sa responsabilité

Réf. : Cass. civ. 2, 8 février 2018, n° 17-10.516, FS-P+B+I (N° Lexbase : A6696XCY)

Lecture: 1 min

N2694BX3

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par June Perot

Le 15 Février 2018

La circonstance selon laquelle une personne a été agressée sur le quai d'un RER par une autre souffrant de schizophrénie, qu'aucune altercation n'avait opposé les deux hommes qui ne se connaissaient pas, qu'un laps de temps très court s'était écoulé entre le début de l'agression et la collision avec le train, que l'enquête pénale avait conclu à un homicide volontaire et à un suicide et qu'aucune mesure de surveillance ni aucune installation n'aurait permis de prévenir ou d'empêcher une telle agression, sauf à installer des façades de quai dans toutes les stations ce qui, compte tenu de l'ampleur des travaux et du fait que la SNCF n'était pas propriétaire des quais, ne pouvait être exigé de celle-ci à ce jour, présente un caractère irrésistible et imprévisible permettant de déduire l'existence d'un cas de force majeure exonératoire de responsabilité pour la SNCF.

Telle est la solution retenue par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 8 février 2018 (Cass. civ. 2, 8 février 2018, n° 17-10.516, FS-P+B+I N° Lexbase : A6696XCY).

Alors qu'il se trouvait sur un quai de RER, M. X a été, au moment où le train entrait en gare, soudainement ceinturé et entraîné sur les voies par un tiers. Chutant sur les rails, les deux hommes ont été immédiatement percutés par le train et sont décédés. Le FGTI qui a indemnisé les ayants droit de M. X. a agi en remboursement des sommes versées contre la SNCF.

En cause d'appel, la SNCF avait été exonérée de sa responsabilité et un pourvoi avait été formé par le FGTI. Celui-ci arguait de ce que la SNCF ne rapportait pas la preuve d'un événement revêtant les caractères de la force majeure. Egalement, selon le Fonds, il incombait à la SNCF, de rapporter la preuve de l'impossibilité d'installer des façades sur les quais, afin de prévenir ce genre d'accident.

La Haute juridiction, énonçant la solution précitée, confirme l'exonération de responsabilité de la SNCF et définit le heurt survenu sur le quai comme un cas de force majeure (cf. l’Ouvrage "Responsabilité civile" N° Lexbase : E0763E97).

newsid:462694

Rupture du contrat de travail

[Jurisprudence] Nullité du retrait de l'enfant confié à une assistante maternelle en état de grossesse

Réf. : Cass. soc., 31 janvier 2018, n° 16-17.886, F-P+B (N° Lexbase : A4693XCS)

Lecture: 9 min

N2693BXZ

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par Gilles Auzero, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux

Le 16 Février 2018

Figurant autrefois dans l'accueillante septième partie du Code du travail regroupant des "Dispositions particulières à certaines professions" (C. trav., anc. art. L. 773-1 N° Lexbase : L9628GQN et s.), les règles régissant la situation des assistants maternels ont, à l'occasion de la recodification intervenue en 2008, migré vers le Code de l'action sociale et des familles. Pour être uni au particulier employeur par un contrat de travail, l'assistant maternel ne bénéficie cependant pas de l'ensemble du Code du travail. Ici comme ailleurs, le législateur a fait le choix d'une application limitée de celui-ci, ne renvoyant qu'à certaines de ses dispositions. Ainsi, si les dispositions du Code du travail intéressant la rupture du contrat de travail ne sont pas applicables aux assistants maternels, il en va différemment de celles relatives à la maternité. En procédant ainsi par exclusion et inclusion, le législateur n'a pas facilité la gestion de la relation de travail, ce qui oblige le juge à faire oeuvre de conciliation. Un intéressant arrêt rendu par la Cour de cassation le 31 janvier 2018 en porte témoignage.
Résumé

Dès lors que l'assistante maternelle adresse, dans les quinze jours suivant la rupture, un certificat médical attestant de son état de grossesse et que l'employeur, qui ne prouve pas le refus de l'intéressée d'accepter les nouvelles conditions de garde de l'enfant qui lui ont été proposées, ne justifie pas de l'impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement, le retrait de l'enfant est nul.

Observations

I - Le retrait de l'enfant comme cause de rupture du contrat de travail

Des textes spéciaux. Relevant d'une section intitulée "Dispositions communes à tous les assistants maternels et familiaux", l'article L. 423-2 du Code de l'action sociale et des familles (N° Lexbase : L4172H8Z) vise les dispositions du Code du travail qui leur sont applicables. Si les règles intéressant la maternité sont explicitement évoquées (1), celles qui intéressent la rupture du contrat de travail ne figurent pas dans l'énumération. Il convient, toutefois, de ne pas s'en tenir là. En effet, figurant dans une sous-section relative aux "Dispositions applicables aux seuls assistants maternels employés par des particuliers", l'article L. 423-24 du Code de l'action sociale et des familles (N° Lexbase : L4194H8T) énonce quelques dispositions intéressant la rupture du contrat de travail de l'assistant maternel. Selon l'alinéa 1er de ce texte, "le particulier employeur qui décide de ne plus confier d'enfant à un assistant maternel qu'il employait depuis trois mois doit notifier à l'intéressé sa décision de rompre le contrat par lettre recommandée avec demande d'avis de réception [...]".

Faisant application de ces textes, dont la lettre même exigeait la solution, la Cour de cassation a clairement affirmé que "les dispositions du Code du travail sur la rupture du contrat de travail ne sont pas applicables aux assistants maternels employés par des particuliers" (2). En conséquence, le particulier employeur n'est tenu ni de convoquer l'assistant maternel à un entretien préalable (3), ni de mentionner le motif de la rupture dans la lettre recommandée (4).

On est tenté de considérer que la rupture trouve sa cause dans la loi elle-même et, plus exactement, dans le droit que celle-ci reconnaît au particulier employeur de décider de ne plus confier l'enfant à l'assistant maternel. Peu importe, dès lors, le motif sur lequel repose ce droit de retrait (5). Cela étant, rien n'interdit au particulier employeur de motiver sa décision, en invoquant, par exemple, une faute de l'assistant maternel, son insuffisance professionnelle ou encore des difficultés économiques. Mais, en tout état de cause, le juge ne pourra pas examiner le motif énoncé pour conclure que la rupture n'est pas justifiée (6). Cela ne signifie pas, pour autant, que le motif fondant la décision de ne plus confier l'enfant à l'assistant maternel ne pourra jamais être pris en compte. Ce serait oublier que l'article L. 423-2 du Code de l'action sociale et des familles rend applicables aux assistants maternels les dispositions du Code du travail relatives aux discriminations et harcèlements.

De façon plus générale, la Cour de cassation a justement considéré, dans un arrêt rendu le 26 mars 2002, que "si le droit de retrait d'un enfant ouvert par l'article L. 773-8 du Code du travail (N° Lexbase : L6858ACYaux particuliers employant des assistantes maternelles peut s'exercer librement, le motif de ce retrait ne doit pas être illicite". Elle a ajouté, dans la même décision, qu'"il ne peut être porté atteinte aux dispositions d'ordre public relatives à la protection de la maternité" (7). L'arrêt sous examen doit être situé dans le prolongement de cette solution.

Une affaire particulière. En l'espèce, Mme Y avait été engagée le 1er septembre 2010 en qualité d'assistante maternelle par les époux Z. Le 19 juillet 2012, ceux-ci avaient notifié à la salariée le retrait de la garde de leur enfant. Par lettre du 30 juillet suivant accompagnée d'un certificat médical de grossesse, Mme Y avait informé ses employeurs qu'elle était enceinte.

L'employeur reprochait à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré nulle la rupture du contrat de travail. A l'appui de son pourvoi, il soutenait que le droit de retrait d'un enfant ouvert aux particuliers employant des assistantes maternelles peut s'exercer librement, sous réserve que le motif de ce retrait ne soit pas illicite, et que la lettre de rupture n'a pas à être motivée. En l'espèce, la cour d'appel a expressément retenu que, par les pièces qu'il versait aux débats, M. Z établissait avoir fait, dès le mois de janvier 2012, des démarches auprès de la directrice de l'école maternelle aux fins d'inscription de son fils Paul à la rentrée de septembre 2012 en très petite section, que cette inscription était intervenue le 16 mars 2012 et que, par courrier du 26 juin 2012, il avait été informé que l'école accueillerait Paul à la rentrée de septembre 2012. Elle a également retenu que M. Z ne connaissait pas l'état de grossesse de Mme Y lorsqu'il lui avait notifié le retrait de l'enfant le 19 juillet 2012, et qu'il n'en avait eu connaissance que le 31 juillet 2012. En conséquence, M. Z pouvait valablement, le 19 juillet 2012, notifier le retrait de l'enfant sans le motiver et il résultait nécessairement de ces énonciations que le motif du retrait de l'enfant de M. Z, exercé librement par ce dernier, n'était pas illicite, mais motivé par une impossibilité de maintenir le contrat de travail étrangère à la grossesse de Mme Y. En décidant, néanmoins, que l'information donnée par Mme Y de son état de grossesse dans les quinze jours de la notification du retrait de l'enfant Paul Z avait entraîné de plein droit la nullité de ce retrait "non motivé... par une impossibilité de maintenir le contrat de travail étrangère à la grossesse ou à l'accouchement", la cour d'appel a violé les articles L. 423-24 du Code de l'action sociale et des familles et 18 de la Convention collective des salariés du particulier employeur (N° Lexbase : X0711AE3), ensemble les articles L. 1225-4 (N° Lexbase : L7160K93) et L. 1225-5 (N° Lexbase : L0856H9L) du Code du travail.

L'employeur arguait, par ailleurs, que la rupture du contrat de travail d'une assistante maternelle ayant informé le particulier employeur de son état de grossesse dans les quinze jours de la notification de l'exercice par celui-ci du droit de retrait de son enfant n'est pas annulée lorsque ce retrait est motivé par l'impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement. La scolarisation d'un enfant, entraînant la modification du contrat de l'assistante maternelle dans l'un de ses éléments essentiels, du fait de l'impossibilité, pour celle-ci, de retrouver son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente, caractérise l'impossibilité pour le particulier employeur de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement. En l'espèce, la cour d'appel a expressément relevé qu'aux termes du courrier du 1er août 2012, le retrait de Paul Z de chez Mme Y était motivé par le souhait de ses parents de maintenir l'enfant chez une assistante maternelle trois jours par semaine jusqu'à ce qu'il ait acquis la propreté, puis d'assurer son passage en périscolaire. Il résultait nécessairement de ces énonciations que la scolarisation de Paul Z à compter du mois de septembre 2012 entraînait la modification du contrat de travail de Mme Y dans l'un de ses éléments essentiels, du fait de l'impossibilité pour celle-ci de retrouver son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente, de sorte que M. Z justifiait de l'impossibilité de maintenir son contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement.

Ces arguments sont écartés par la Cour de cassation qui, pour rejeter le pourvoi, énonce "qu'ayant constaté, d'une part, que l'assistante maternelle avait adressé dans les quinze jours suivant la rupture, un certificat médical attestant de son état de grossesse, d'autre part, que l'employeur, qui ne prouvait pas le refus de l'intéressée d'accepter les nouvelles conditions de garde de l'enfant qui lui avaient été proposées, ne justifiait pas de l'impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement, la cour d'appel en a exactement déduit qu'en application de l'article L. 1225-5 du Code du travail, le retrait prononcé le 19 juillet 2012 était nul".

II - La maternité comme cause de nullité du retrait de l'enfant

Une nullité justifiée. Ainsi que cela a été indiqué précédemment, il résulte expressément de l'article L. 423-2, 3° du Code de l'action sociale et des familles que sont applicables aux assistants maternels les dispositions du Code du travail relatives "à la maternité, à la paternité, à l'adoption et à l'éducation des enfants, prévues par le chapitre V du titre II du livre II de la première partie".

Parmi les différents textes auxquels il est ainsi renvoyé, figure l'article L. 1225-5 du Code du travail qui, dans un alinéa 1er, dispose que "le licenciement d'une salariée est annulé lorsque, dans un délai de quinze jours à compter de sa notification, l'intéressée envoie à son employeur, dans des conditions déterminées par voie réglementaire, un certificat médical justifiant qu'elle est enceinte". A s'en tenir là, il ne saurait être discutée que la rupture du contrat de travail de l'assistante maternelle devait, en l'espèce, être annulée, cette dernière ayant adressé dans les temps à son employeur un certificat médical attestant de son état de grossesse.

Il nous paraît intéressant de relever que la Cour de cassation ne vise pas la nullité de la rupture, mais bien celle du retrait de l'enfant "prononcé" par les parents. C'est rappeler là que la rupture n'est que la conséquence du retrait. Mais cela ne change rien quant aux conséquences de la nullité. La salariée doit retrouver son emploi c'est-à-dire que l'enfant doit lui être à nouveau confié (8).

Cela étant, il convient de ne pas oublier que la nullité de la rupture du contrat de travail de la salariée enceinte peut être écartée.

Une nullité susceptible d'être écartée. En application de l'alinéa second de l'article L. 1225-5 du Code du travail, les dispositions de l'alinéa 1er "ne s'appliquent pas lorsque le licenciement est prononcé pour une faute grave non liée à l'état de grossesse ou par impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement". La réserve est logique dans la mesure où, faut-il le rappeler, l'article L. 1225-4 du même Code autorise le licenciement d'une salariée enceinte lorsque l'employeur est en mesure de justifier d'une faute grave de l'intéressée, non liée à l'état de grossesse, ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement.

S'il ne fait aucun doute que ce texte trouve à s'appliquer à l'assistante maternelle, sa mise en oeuvre doit être adaptée à cette situation particulière. Il faut, en effet, se souvenir que la rupture n'a pas à être motivée dès lors qu'elle repose nécessairement sur la décision des parents de ne plus confier leur enfant à l'assistante maternelle. Cela impose de devoir admettre que, postérieurement à la rupture, l'employeur est en droit d'invoquer une faute grave ou l'impossibilité de maintenir le contrat, dès lors qu'il ignorait l'état de grossesse de la salariée au moment du retrait de l'enfant (9). A lire l'arrêt sous examen, une impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse aurait pu être retenue si l'employeur avait été en capacité de prouver que l'assistante maternelle avait refusé d'accepter les nouvelles conditions de garde de l'enfant qui lui avaient été proposées. Pour le dire autrement, le refus de ce qui s'apparente fort à une modification du contrat de travail pourrait constituer une telle impossibilité.

Sans doute convient-il d'être ici prudent et de ne surtout pas considérer que cette interprétation, à supposer qu'elle soit juste, puisse recevoir application générale. On peut, au contraire, penser qu'elle doit être limitée à la situation particulière de la relation unissant un particulier employeur à une assistante maternelle, voir au cas d'espèce où "les nouvelles conditions de garde de l'enfant" étaient dictées par le fait que ce dernier avait été inscrit à l'école.


(1) C. act. soc. et fam., art. L. 423-2, 3° (N° Lexbase : L4172H8Z).
(2) Cass. soc., 31 mai 2012, n° 10-24.497, FS-P+B (N° Lexbase : A5360IMH), Bull. civ. V, n° 167. Notons qu'il en va différemment lorsqu'est en cause un assistant maternel employé par une personne morale de droit privé, par l'effet des dispositions des articles L. 423-10 (N° Lexbase : L4180H8C) et suivants du Code de l'action sociale et des familles.
(3) Cass. soc., 16 juin 1998, n° 95-45.592, publié (N° Lexbase : A5401ACZ), Bull. civ. V, n° 327.
(4) Cass. soc., 8 avril 2009, n° 07-43.868, FS-P+B (N° Lexbase : A1034EGE), Bull. civ. V, n° 112 ; JCP éd. S, 2009, 1359, note Th. Lahalle.
(5) Cela est confirmé par l'article 18 de la Convention collective nationale des assistants maternels du particulier employeur (N° Lexbase : X0711AE3). Affirmant, d'abord, que "l'employeur peut exercer son droit de retrait de l'enfant. Ce retrait entraîne la rupture du contrat de travail", le texte conventionnel stipule, ensuite, que "l'employeur qui décide de ne plus confier son enfant au salarié, quel qu'en soit le motif, doit lui notifier sa décision par lettre recommandée avec avis de réception".
(6) V. en ce sens, Cass. soc., 2 décembre 2015, n° 14-24.546, FS-P+B (N° Lexbase : A6935NYI). En l'espèce, le particulier employeur avait invoqué une faute grave de l'assistant maternel. Ainsi que l'affirme la Cour de cassation, "si l'absence de faute grave justifiait l'octroi d'une indemnité de préavis et d'une indemnité conventionnelle de rupture, elle n'avait pas d'incidence sur le bien-fondé de l'exercice du droit de retrait prévu par les articles L. 423-24 du Code de l'action sociale et des familles et 18 de la Convention collective nationale étendue des assistants maternels du particulier employeur du 1er juillet 2004".
(7) Cass. soc., 26 mars 2002, n° 99-45.980, FS-P (N° Lexbase : A3754AYP), Bull. civ. V, n° 108.
(8) La salariée peut opter pour l'indemnisation. Si tel n'est pas le cas, il reste à savoir si les parents souhaiteront lui confier l'enfant à nouveau. Il est, certes, possible de considérer qu'ils n'ont, juridiquement, pas le choix. En tout état de cause, si le contrat de travail reprend effet, ce sera nécessairement à de nouvelles conditions, dès lors que l'enfant est, par ailleurs, inscrit à l'école.
(9) En revanche, et de notre point de vue, dès lors que l'employeur a connaissance de la grossesse de l'assistante maternelle, il doit nécessairement faire état d'une faute grave ou de l'impossibilité de maintenir le contrat dans la lettre de notification de la rupture.

Décision

Cass. soc., 31 janvier 2018, n° 16-17.886, F-P+B (N° Lexbase : A4693XCS)

Rejet (CA Angers, 29 mars 2016, n° 14/00228 N° Lexbase : A5622RAH)

Textes concernés : C. act. soc. et fam., art. L. 423-2 (N° Lexbase : L4172H8Z) et L. 423-24 (N° Lexbase : L4194H8T) ; C. trav., art. L. 1225-5 (N° Lexbase : L0856H9L).

Mots-clefs : assistante maternelle ; rupture du contrat de travail ; maternité.

Liens base : (N° Lexbase : E3337ETR) et (N° Lexbase : E3343ETY).

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Successions - Libéralités

[Brèves] Autorisation judiciaire accordée à un tuteur de placer, sur un contrat d'assurance sur la vie, des capitaux revenant à un majeur protégé : pas d'obstacle à la demande en réintégration à l'actif successoral des primes manifestement excessives

Réf. : Cass. civ. 1, 7 février 2018, n° 17-10.818, FS-P+B+I (N° Lexbase : A6768XCN)

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N2695BX4

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 15 Février 2018

L'autorisation donnée par le juge des tutelles à un tuteur de placer, sur un contrat d'assurance sur la vie, des capitaux revenant à un majeur protégé, ne prive pas les créanciers du droit qu'ils tiennent de l'article L. 132-13 du Code des assurances (N° Lexbase : L0142AAI) de revendiquer la réintégration, à l'actif de la succession, des primes versées par le souscripteur qui sont manifestement excessives au regard de ses facultés. Tel est l'enseignement délivré par la première chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 7 février 2018 (Cass. civ. 1, 7 février 2018, n° 17-10.818, FS-P+B+I N° Lexbase : A6768XCN).

En l'espèce, le juge des tutelles avait autorisé le tuteur de Pierre X à placer, sur un contrat d'assurance sur la vie, le prix de vente d'un immeuble ; Pierre X était décédé en laissant pour lui succéder quatre enfants, qui avaient reçu, courant 2009, leur quote-part du capital de l'assurance sur la vie ; Pierre X ayant bénéficié d'une allocation de solidarité aux personnes âgées de 1987 jusqu'à son décès, la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Centre (la CARSAT) avait demandé aux héritiers, notamment à Mme X, par lettre du 18 octobre 2010, la récupération des sommes servies au défunt sur l'actif de la succession ; cette dernière avait contesté la demande devant le tribunal des affaires de Sécurité sociale. Mme X faisait grief à l'arrêt de rejeter sa demande. En vain.

Après avoir énoncé la solution précitée, la Cour de cassation approuve les juges d'appel qui, après avoir relevé que l'autorisation du juge résultait de la nécessité d'assurer la gestion des ressources du majeur protégé en permettant au tuteur, soit de procéder au placement des fonds, ouvrant ainsi à la CARSAT la possibilité de récupérer les sommes versées au titre de l'allocation de solidarité aux personnes âgées, après le décès, dans les conditions fixées à l'article L. 815-13 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L0981LDP), soit d'affecter les fonds à l'entretien du majeur protégé, renonçant ainsi au bénéfice de cette allocation, en avaient exactement déduit que l'autorisation judiciaire du placement ne faisait pas obstacle à la demande en réintégration à l'actif successoral des primes manifestement excessives au regard des très faibles ressources de Pierre X (sur l'autre point de l'arrêt concernant la possibilité de décharge d'une partie de la dette successorale, lire N° Lexbase : N2777BX7).

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Transport

[Doctrine] La prescription des actions en responsabilité dans le contentieux des transports maritimes de marchandises en droit CEMAC

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N2571BXI

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par Ebénézer Kenguep, Maître de conférences en droit privé et sciences criminelles, Université de Douala - Cameroun

Le 15 Février 2018

Depuis son entrée en vigueur, le 22 juillet 2012, le nouveau Code de la marine marchande de la CEMAC (1) est au centre d'un important débat portant sur la prescription des actions en responsabilité. D'après son article 561, ces actions seraient éteintes à l'expiration d'un délai de deux ans. Cependant, le domaine de cette prescription est très étendu puisqu'elle couvre toutes les actions introduites par l'assureur qui, après avoir indemnisé l'assuré exerce son recours contre le transporteur. Par ailleurs, le transporteur ou la partie exécutante exposé à une condamnation aux dommages et intérêts dispose d'une action récursoire à exercer contre le tiers garant ou responsable du dommage. Or, le nouveau Code vient de provoquer une véritable tempête dans une mer jusque-là calme en disposant, contre toute attente, que le délai de deux ans ne peut être "ni suspendu ni interrompu". Par son approche analytique, l'article explore les deux grandes tendances du droit de la prescription issu du nouveau texte qui se caractérise par la brièveté et l'harmonisation des délais. Par un Règlement n° 08/12-UEAC-088-CM- 23 du 22 juillet 2012, un nouveau Code de la marine marchande a été adopté en CEMAC en vue de mettre la législation communautaire en harmonie avec l'évolution récente du droit maritime international. Il s'agissait pour les experts réunis au sein de la commission de révision d'introduire dans le nouveau Code des dispositions très controversées des "Règles de Rotterdam" (Convention des Nations Unies sur le contrat de transport international de marchandises effectué entièrement ou partiellement par mer, 2008). Sur le plan juridique, ce volumineux Code de 800 articles constitue désormais le droit positif de la CEMAC puisqu'en vertu de l'article 41, paragraphe 2, du Traité révisé de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC), "les règlements et les règlements cadres ont une portée générale. Les Règlements sont obligatoires dans tous leurs éléments et directement applicables dans tout Etat Membre..." (2). Au regard des nombreuses critiques, développées contre les "Règles de Rotterdam", par les spécialistes et les chargeurs tant africains qu'asiatiques ou même arabes, l'adoption de ce Code en même temps que celui portant sur l'aviation civile (3), est apparu comme un véritable coup de massue pour les modestes pays de chargeurs de la sous-région (4). Pour la majorité des maritimistes africains et communautaires, l'effort de modernisation est à saluer mais l'adoption "dans la précipitation des textes et conventions que le reste de la communauté internationale évite ou se refuse de ratifier" (5) est une démarche critiquable qui perpétue inutilement le déséquilibre contractuel au détriment des chargeurs africains (6).

La question de l'uniformisation du droit maritime ne manque cependant pas d'intérêt, l'Afrique Centrale étant caractérisée aujourd'hui par la disparité des textes internationaux applicables au transport de marchandises. En l'état actuel de la situation, l'on distingue au moins trois catégories d'Etats dans la sous-région : le Cameroun, qui applique les "Règles de Hambourg" ; la République du Congo qui applique la "Convention de Bruxelles" non modifiée et les autres Etats qui ne sont liés par aucune de ces conventions : le Gabon, la Guinée Equatoriale, la République Centrafricaine et le Tchad. En outre, le Cameroun, le Congo et le Gabon sont signataires des "Règles de Rotterdam" (7).

Mais au fond, quelle cacophonie et que de conflits à résoudre puisque la scène internationale est dominée par les "Règles de la Haye" de 1924, les "Règles de la Haye-Visby" précédant elles-mêmes les "Règles de Hambourg", les "Règles de Rotterdam " ne venant qu'en quatrième position. Les premières sont très anciennes et éprouvent le poids de l'âge. Elles ont toujours été présentées comme fortement déséquilibrées en dépit de leurs modifications successives. Celles de Hambourg, qui interviennent dans un contexte de "renouveau" maritime international marqué par la construction d'un nouvel ordre maritime international, ont séduit par leur clarté et leur effort d'équilibre des intérêts. Elles ont largement inspiré le législateur de la CEMAC qui s'en est abondamment servi pour la rédaction du Code révisé du 3 août 2001. Mais en raison des nombreuses campagnes de dénigrement et de torpillage dont elles ont été victimes, les "Règles de Hambourg" n'ont malheureusement connu qu'un faible succès. Les "Règles de Rotterdam" ont, quant à elles, été présentées comme un texte de compromis chargé de moderniser le droit international des transports et de réaliser les différents équilibres. Les grandes lignes de cette Convention ont été copieusement reprises dans le nouveau Code de la marine marchande de la CEMAC (8).

Toutefois, au regard des dispositions vétustes et surannées des précédentes versions de 1994 et 2001, le nouveau Code innove à bien d'égards puisqu'il modernise les règles applicables au contentieux des transports maritimes de marchandises. Depuis l'entrée en vigueur de sa première version, le Code de la marine marchande des Etats membres de la CEMAC a rendu d'innombrables et incontestables services à la communauté maritime de la sous-région (9). Il constitue aujourd'hui encore, l'une des plus belles réussites africaines en matière de communautarisation du droit des transports et l'on comprend qu'il ait inspiré de très nombreux travaux de doctrine et fondé d'abondantes décisions de justice (10).

Cependant, en choisissant d'aligner sa nouvelle législation sur les "Règles de Rotterdam", le législateur communautaire s'inscrit dans la même philosophie que le système des "Règles de la Haye-Visby" longtemps décrié par les chargeurs (11). Ce faisant, il a malheureusement rompu avec son passé glorieux hérité des "Règles de Hambourg" qui lui avaient permis de résoudre efficacement les problèmes liés à l'équilibre des intérêts dans le contrat de transport maritime de marchandises. Dès lors, l'option législative de la CEMAC d'aligner sa réglementation sur un régime international fragile, non éprouvé, non encore en vigueur et fortement critiqué, même par les puissances maritimes traditionnelles, paraît incongrue et suscite beaucoup d'interrogations surtout en ce qui concerne la prescription des actions en responsabilité dont les dispositions particulièrement audacieuses ont fortement ému toute la classe intellectuelle du continent (12). Ces actions sont, en principe, subordonnées à un avis de perte ou de dommage subi par la marchandise indiquant la nature générale de la perte ou du dommage (13). Cet avis, qui est adressé au transporteur ou à la partie exécutante qui a procédé à la livraison, doit être donné avant ou au moment de la livraison en cas de dommage apparent (14), ou dans un délai de sept jours ouvrables à compter de la livraison en cas de dommage non apparent (15). Cet avis n'est cependant pas nécessaire en cas de dommage constaté lors d'une inspection contradictoire des marchandises, effectuée par le réceptionnaire et le transporteur ou son mandataire (16). Toutefois, l'absence de cet avis n'a pas d'incidence sur le droit à réparation de l'ayant droit, ni sur le régime de la preuve (17). Par contre, en cas de retard, la réparation est subordonnée à un "avis de préjudice" adressé au transporteur dans un délai de vingt et un jours consécutifs à compter de la livraison (article 560 § 4 du nouveau Code communautaire de 2012).

Les actions ainsi visées doivent, sous peine de prescription, être introduites dans des délais très stricts prévus par les textes. Le Code civil présente la prescription comme un mode d'extinction d'un droit résultant de l'inaction de son titulaire pendant un certain laps de temps (C. civ., art. 2219 N° Lexbase : L7189IAI). Il s'agit donc d'une fin de non-recevoir, qui a pour but de faire déclarer irrecevable, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, l'action en responsabilité introduite par le chargeur contre le transporteur (18). La prescription constitue, pour le transporteur qui la soulève, le moyen de contester l'existence même de ce droit d'agir (19). Elle se distingue ainsi des défenses au fond qui ont pour objet de faire rejeter la prétention du demandeur en s'attaquant au bien-fondé de la demande. Celles-ci permettent au défendeur de se confronter directement à la prétention adverse pour obtenir son rejet définitif par une démonstration de la dénégation de son droit. La particularité de ce moyen est de porter le débat sur le fond du litige et non sur la forme de l'action et c'est précisément ce qui lui permet d'emporter des effets définitifs là où les exceptions de procédure ont des effets provisoires et n'emportent pas de sanction sur le fond. La qualification de défense au fond s'impose dès lors que le moyen tend à faire écarter la demande comme infondée et non pas irrégulière (exception) ou irrecevable (fin de non-recevoir) (20). Le sujet ne manque donc pas d'intérêt puisqu'il permet, sur le plan théorique, de préciser les notions de prescription et de moyens de défense et, sur le plan pratique, d'attirer l'attention des plaideurs et de leurs conseils sur le respect scrupuleux des délais d'action.

En contrepartie de la responsabilité objective qui pèse, en principe, sur le transporteur maritime de marchandises (21), le droit a toujours accordé à ce dernier le bénéfice d'une prescription brève. Celle-ci se justifie par le fait qu'il n'est pas nécessaire que le transporteur maritime reste trop longtemps sous la menace d'une action en justice pour les dommages causés aux marchandises. A l'instar de tous les autres textes de droit maritime, le nouveau Code communautaire accorde un délai aux ayants droit pour intenter leur action en réparation. L'article 561 du nouveau Code communautaire, prévoit que cette action serait éteinte à l'expiration d'un délai de deux ans tandis que la "Convention de Bruxelles" s'en tient au délai d'un an (22). A l'instar du Code communautaire, les "Règles de Hambourg" et de "Rotterdam" portent ce délai à deux ans (23).

Par ailleurs, en vertu de l'article 563 du nouveau Code communautaire, le transporteur ou la partie exécutante exposé à une condamnation aux dommages et intérêts dispose d'une action récursoire à exercer contre le tiers garant ou responsable du dommage (24). Dans ce cas, il bénéficie légalement d'un délai supplémentaire de quatre-vingt-dix jours pour l'exercice de ce recours à compter de la date à laquelle il a soit réglé la réclamation, soit lui-même reçu notification de l'assignation, selon l'évènement qui survient en premier (article 563 susvisé). Il s'ensuit que l'étude portant sur la prescription des actions en responsabilité dans le contentieux des transports maritimes de marchandises varie selon qu'il s'agit de l'action principale, dirigée en principe contre le transporteur (I) ou des actions récursoires prévues pour ce dernier (II).

I - La brève prescription de l'action principale : la sécurité juridique du défendeur

En tant que mode d'extinction du droit d'action, la prescription couvre non seulement les actions introduites par les chargeurs contre le transporteur maritime mais également toutes celles qui seraient initiées par l'assureur qui, après avoir indemnisé l'assuré, exerce son recours contre ce dernier. Il doit intenter son action dans le délai de deux ans à compter de la survenance du sinistre en application des dispositions de l'article 707 du nouveau code communautaire. D'après l'article 561 de ce Code, la prescription biennale s'applique à toutes les actions nées "d'un manquement à une obligation" du transporteur ou du chargeur. Il s'ensuit que les actions du transporteur contre le chargeur obéissent au même régime de prescription.

En matière de contentieux maritime, la brièveté de la prescription s'explique par la nécessité d'assurer au défendeur une sécurité juridique qui interdit d'intenter en justice des actions en réclamation de créances trop anciennes, ce qui l'obligerait à conserver au-delà d'un délai raisonnable les pièces justificatives en rapport avec l'opération de transport. Pour la Haute juridiction, le moyen tiré de la prescription brève du droit des transports maritimes de marchandises peut être soulevé en tout état de cause y compris pour la première fois devant la Cour suprême en tant que moyen de pur droit (25). Cette rigueur jurisprudentielle permet d'envisager les problèmes liés à l'application de la prescription et surtout en ce qui concerne son point de départ (A), sa prorogation (B) ou même les cas d'interruption et de suspension (C).

A - Le point de départ du délai de prescription en droit communautaire

D'après l'article 561, § 2, du nouveau Code communautaire, le délai de prescription des actions contre le transporteur "court à compter du jour où les marchandises ont été livrées par le transporteur ou, lorsqu'elles n'ont pas été livrées ou ne l'ont été que partiellement, à partir du dernier jour où elles auraient dû être livrées. Le jour indiqué comme point de départ n'est pas compris dans la computation" (26). Cette disposition est appliquée dans toute sa rigueur par les juridictions camerounaises. Celles-ci relèvent, par exemple, dans une espèce récente, "qu'entre la date des constatations des avaries et celle de l'assignation en justice, il s'est écoulé plus de deux ans ; qu'il échet donc de déclarer l'action de la société des produits avicoles du Cameroun (SPAC) prescrite" (27).

La rédaction de l'article 561, § 2 permet cependant de distinguer trois hypothèses. La première vise celle où les marchandises ont été effectivement livrées par le transporteur mais avec des avaries. Dans ce cas, le délai court du jour où les marchandises ont été remises au destinataire ou à son représentant (28). En revanche, si les marchandises ont été offertes au destinataire mais non retirées par lui, le délai ne peut donc courir qu'à compter du jour de l'avis adressé à ce dernier. Cette situation se distingue de celle où les marchandises n'ont pas été livrées (perte totale) ou ne l'ont été que partiellement c'est-à-dire avec des manquants (perte partielle). Dans ces deux hypothèses, le délai de prescription court du "dernier jour où elles auraient dû être livrées" c'est-à-dire, en principe, du jour où le déchargement du navire prend fin (29).

Pour le calcul de la prescription, le nouveau Code communautaire (article 561) précise que le jour indiqué comme point de départ du délai (dies a quo) ne compte pas dans la computation. Cette disposition trouve son origine dans l'article 2260 du Code civil (N° Lexbase : L2546ABW) (disposition application) qui dispose que "la prescription se compte par jours et non par heures". Ce délai expire normalement le dernier jour anniversaire sans qu'il soit possible de procéder à une réduction conventionnelle. En droit interne, il est courant que le délai de prescription soit prorogé jusqu'au premier jour ouvrable s'il expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé mais s'agissant d'un droit international, il est évident que les fêtes et les jours non ouvrables peuvent varier d'un pays à un autre. La précaution juridique commanderait donc de s'en tenir au dernier jour du délai d'après le décompte strict des jours ou du quantième jour à la fin duquel le délai expire (dies ad quem). En s'inspirant du droit commun, il est possible de dire aujourd'hui qu'il n'est pas permis aux parties de s'accorder pour réduire la durée du délai de prescription prévue par la loi. C'est ce qui ressort d'une importante décision rendue par la cour d'appel d'Aix-en-Provence rendue le 28 avril 1989 (30). En revanche, la prorogation conventionnelle est prévue par l'ensemble de la législation internationale et communautaire.

B - La prorogation conventionnelle du délai de prescription

Le problème de la validité de l'accord de prorogation a été réglée par l'article 562 du nouveau Code communautaire de la marine marchande qui dispose que "la personne à qui une réclamation est adressée peut, à tout moment, pendant le cours du délai, proroger celui-ci par une déclaration adressée à l'ayant droit". Ce délai peut être de nouveau prorogé par une ou plusieurs autres déclarations. Cette disposition est une reproduction littérale de l'article 63 des "Règles de Rotterdam" sur la prorogation du délai pour agir. La possibilité de proroger le délai est prévue en des termes similaires par l'article 20, § 4 des "Règles de Hambourg" qui déclare que celui-ci peut être prolongé "par une déclaration adressée par écrit à l'auteur de la réclamation". Il en est de même de l'article 3, § 4 de la "Convention de Bruxelles" tel que modifié par les "Règles de Visby" qui donne la possibilité aux parties de prolonger le délai de prescription, mais à condition que l'accord conclu à cet effet intervienne "postérieurement à l'évènement qui a donné lieu à l'action" (31).

La forme de cet accord a également retenu l'attention du législateur communautaire qui précise, à cet effet, que la prorogation du délai de prescription doit être faite par une déclaration adressée à l'ayant droit. Pour être efficace, il est important que cette déclaration se fasse par écrit ainsi que le précise l'article 20 des "Règles de Hambourg". Faisant application du texte de la "Convention de Bruxelles", la jurisprudence décide qu'en raison de son caractère exceptionnel, l'accord de prolongation doit être formel. Pour elle, la prolongation ne saurait résulter du seul silence opposé par le transporteur à la réclamation du destinataire, car ce silence ne vaut pas accord du transporteur sur une prolongation de la prescription (32). Par ailleurs, elle poursuit en décidant que, si la prorogation du délai de la prescription est acquise par un accord contractuel, on ne peut cependant pas, à défaut de stipulation contractuelle contraire, considérer que, lorsque la prorogation arrive à son terme, elle se trouve à nouveau prolongée, par une sorte de tacite reconduction (33). Il a également été jugé, conformément aux principes, que le défendeur, "en l'espèce, il s'agissait d'une entreprise de manutention, mais il en serait de même du transporteur", pouvait renoncer au bénéfice de la prescription, mais seulement après son expiration, et à condition que cela résulte d'une manifestation formelle de volonté, et non, par exemple, d'une simple participation aux opérations d'expertise (34).

C - Suspension et interruption du délai de prescription : désormais impossible ?

En droit commun, la prescription peut être suspendue par certaines causes limitativement prévues par les textes. Celles-ci sont des événements qui allongent, d'un laps de temps égal à leur durée, les délais de prescription. En droit civil, il y a deux sortes d'événements qui peuvent suspendre le délai de prescription : ceux prévus par l'article 2251 du Code civil (N° Lexbase : L2539ABN) à savoir, les exceptions tenant aux relations personnelles entre le créancier et le débiteur, et ceux qui empêchent le créancier d'agir tels que l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement légal, d'une convention des parties ou d'un cas de force majeure. Il en va de même, mais en partie seulement, en droit maritime puisque sous l'empire du Code communautaire de 2001, et des Conventions internationales de "Bruxelles" et de "Hambourg", la jurisprudence considère que la prescription de l'action en responsabilité contre le transporteur maritime peut être suspendue au cas d'empêchement majeur d'agir (35). La suspension qui en résulte ne proroge cependant pas le délai de prescription de toute la durée de l'empêchement. Elle en déduit que, si au moment où l'empêchement prend fin le destinataire a encore devant lui un délai raisonnable pour agir avant l'expiration du délai normal de prescription, il doit assigner sans attendre la fin de ce délai, s'il ne veut pas que son action soit déclarée prescrite (36).

Cette règle fondamentale du droit maritime, relative à la suspension, vient cependant d'être totalement remise en cause par les dispositions de l'article 562 du nouveau Code communautaire adopté le 22 juillet 2012 qui, reproduisant les dispositions de l'article 63 des "Règles de Rotterdam", déclare que "le délai de prescription ne peut être 'ni suspendu ni interrompu". Cette disposition légale porte une sérieuse atteinte aux droits de la défense car, à la différence des délais de procédure qui sont des délais de rigueur, les délais de prescription sont, en principe, susceptibles de suspension et d'interruption (37). A notre sens, elle confère un avantage exorbitant et inutile au transporteur maritime qui conserve seul le pouvoir souverain de proroger le délai de prescription par une déclaration adressée au chargeur ou au destinataire.

En revanche, l'interruption résulte d'évènements qui effacent le délai de prescription acquis et font courir un nouveau délai de même durée que l'ancien. Dans le Code civil, les articles 2244 (N° Lexbase : L1509C3B) et 2248 (N° Lexbase : L2536ABK) prévoient que la prescription puisse être interrompue par la reconnaissance du droit du réclamant (expéditeur, destinataire, commissionnaire ou transporteur), par une demande en justice ou par un acte d'exécution forcée. Faisant application des "Règles de la Haye" et d'"Hambourg", la jurisprudence maritime décide que la prescription de l'action est interrompue, soit par la reconnaissance de sa responsabilité par le transporteur, soit par l'assignation en justice du transporteur. Il s'ensuit que "l'échange de correspondances entre les parties ne constitue pas une cause d'interruption de la prescription" (38). Dans le nouveau Code communautaire de 2012, le délai de prescription ne peut plus être interrompu ainsi que l'indique l'article 562. Il s'agit donc d'une grande première aussi bien en droit maritime qu'en droit commun, qui porte gravement atteinte aux droits des plaideurs. Cette disposition n'est pas sans poser de sérieuses difficultés en ce qui concerne les effets d'une reconnaissance en responsabilité ou d'une assignation en justice introduite avant l'expiration du délai de prescription.

S'agissant de la reconnaissance de responsabilité, cette solution a été inaugurée en droit français, avec beaucoup de surprise, par la cour d'appel de Paris. Dans un arrêt du 9 mars 2011, il a été jugé que "le transporteur ayant signé une lettre par laquelle il reconnaît son entière responsabilité et son obligation de réparer les dommages ainsi causés, il s'ensuit que la prescription applicable à l'action litigieuse initiée par l'ayant droit à la marchandise tendant à obtenir réparation de cette faute est la prescription décennale de droit commun, une reconnaissance précise de responsabilité valant titre nouveau substituant à la prescription annale la prescription décennale entre commerçants" (39).

Il résulte des faits de l'espèce que la société Riso France, spécialisée dans le marché de duplicopieurs avait, dans le cadre d'une relation contractuelle établie avec la société SBI INT installée à Dakar (Sénégal), confié le 30 janvier 2005 à la société Necotrans, transporteur, l'expédition par voie maritime d'un conteneur au départ du Havre pour être livré à Dakar à la société SBI INT selon le connaissement FBL 61610/100563. Il était convenu entre les parties que les marchandises ne devaient être livrées à la société SBI INT qu'après remise documentaire. Et pourtant, c'est tout l'inverse qui est survenu, les marchandises ayant, en effet, été livrées par le transporteur sans présentation des connaissements originaux.

Bien qu'ayant retenu une responsabilité contractuelle du transporteur défaillant, l'arrêt de la cour d'appel décide, contrairement aux autres décisions, que les termes de la lettre signée en l'espèce par le transporteur maritime Necotrans, constituent de sa part "une reconnaissance expresse de sa responsabilité" des conséquences dommageables pouvant résulter de sa faute consistant dans la remise des marchandises sans connaissement, cette reconnaissance s'accompagnant d'un engagement de réparer le dommage à hauteur de 48 617,14 euros. Les juges en concluent alors que la prescription applicable à l'action litigieuse initiée par la société Riso France tendant à demander réparation à la société Necotrans des conséquences dommageables de cette faute est la prescription décennale de droit commun, "une reconnaissance précise de responsabilité valant titre nouveau substituant à la prescription annale la prescription décennale entre commerçants" (40). En l'espèce, l'action litigieuse ayant été initiée par acte d'huissier délivré le 2 janvier 2007, soit moins de dix ans après la livraison fautive des marchandises intervenue le 24 mars 2005, les juges estiment qu'il y a lieu de déclarer non prescrite cette action et de rejeter la fin de non-recevoir.

Pour le Professeur Martin Ndendé, commentateur avisé de cette décision, l'arrêt procède à un glissement subtil entre la responsabilité contractuelle, qui est strictement fondée sur le contrat de transport maritime proprement dit, et celle qui serait, comme en l'espèce, fondée sur une obligation nouvelle née des cendres du contrat préexistant et cristallisée par le nouvel engagement du transporteur souscrit dans sa "lettre". La démarche, précise-t-il, est fort astucieuse car, elle offre à l'ayant droit à la marchandise une plus grande facilité de pouvoir poursuivre le transporteur maritime, reconnu défaillant, au-delà de la prescription annale prévue par la Convention de "Bruxelles" de 1924. Cette solution mérite cependant d'être accueillie avec beaucoup de prudence, "le risque étant trop grand d'assister, par le jeu des prescriptions différenciées, à un éclatement interminable des contentieux nés pourtant d'une même opération juridique" (41).

En des termes presque identiques, la cour d'appel du Littoral (Cameroun) avait déjà reconnu la responsabilité de la société Campship Lines SA. Dans une affaire l'opposant à la société EPA, il a été décidé que "tout en essayant de dégager sa responsabilité et en se réfugiant derrière une panne mécanique du navire chargé dudit transport pour prétendre qu'il y a absence de faute de sa part parce qu'il y avait vice caché, s'était cependant engagée dans une correspondance, à allouer à la société EPA et à lui accorder une remise sur fret" (42). La cour a alors jugé que la société Campship entendait ainsi contribuer à la réparation du préjudice subi et que, dans ces conditions, la société EPA était fondée à demander réparation des pertes subies.

La cour d'appel vient d'être suivie dans cette voie par le tribunal de grande instance du Wouri, qui décide, en des termes presque semblables que, "la reconnaissance implicite de leur responsabilité dans la nécessaire réparation du dommage découle de leur évaluation respective du préjudice à hauteur de 1 803 882 F par le transporteur et de 727 436 F par l'acconier" (43).

Dans cette espèce, Mme K. avait fait expédier, d'Anvers à Douala, par la voie maritime en date du 4 février 2007, un véhicule de marque Mercedes E 290 réceptionné au départ sans réserves par le capitaine commandant le M/S Euro - Cargo Africa appartenant à l'Armement Grimaldi. A l'arrivée du navire au port de Douala, les opérations de débarquement ont été assurées par la société camerounaise d'opérations maritimes (SOCOMAR). Lors de la livraison du véhicule, d'importants dommages ont été constatés et attestés par un rapport d'expertise dressé le 9 mars 2007 par l'expert Chapeh Njiejie Michel.

Saisi d'une demande en réparation émanant de Dame Kitio, le juge d'instance a certainement tiré parti de la décision rendue précédemment par la cour d'appel, et qui infirmait une position contraire du tribunal de grande instance (44). Pour lui, le fait pour les défendeurs de conclure à une limitation de responsabilité tenant compte de la nature de la marchandise, tout en indiquant les montants de réparation éventuelle en application de l'article 6, alinéa 1 (a), équivaut à une "reconnaissance implicite de responsabilité" de leur part. Une reconnaissance de responsabilité vaut donc interruption de la prescription. En revanche, l'offre de règlement faite par le transporteur maritime au destinataire de la marchandise "ne peut être considérée comme une reconnaissance, même partielle, de sa responsabilité ou comme une renonciation de sa part à se prévaloir de tous les moyens de droit opposés à ce jour à la réclamation" (45). Dans une autre espèce, il a été décidé en jurisprudence comparée qu'une proposition d'indemnisation, adressée par le transporteur à l'autre partie, valait interruption de la prescription par reconnaissance de sa responsabilité (46), mais pas la simple transmission du dossier à l'assureur (47).

En revanche, introduite avant l'expiration du délai, l'assignation en justice établit la preuve de la diligence du demandeur et sa ferme volonté d'interrompre la prescription qui court en faveur du transporteur. Pour être valable et produire un effet interruptif, l'assignation doit être adressée soit au transporteur lui-même, soit au consignataire du navire qui le représente (48). Toutefois, puisque l'interruption a un caractère personnel, l'assignation d'un transitaire ou d'un commissionnaire agréé en douane, chargé des formalités de déclaration des marchandises en détail, ne saurait interrompre la prescription à l'égard du transporteur maritime.

II - La prescription des actions récursoires (49) : l'harmonisation délais

La prescription biennale fixée par l'article 561, § 1 du nouveau Code communautaire de la marine marchande s'applique à toutes les actions relatives aux réclamations et aux litiges découlant d'un manquement à une des obligations du transporteur maritime ou chargeur. Elle s'étend aux actions dirigées contre les auxiliaires du transport maritime notamment, les consignataires du navire et de la cargaison en vertu de l'article 621, § 4 du Code, les entrepreneurs de manutention (article 633) et les transitaires (article 641, § 1). Il en est de même des actions nées des opérations de pilotage (article 659) et de remorquage (article 663) (50). En ce qui concerne les actions nées du contrat d'assurance maritime sur facultés, la prescription biennale court à compter de la date de la survenance du sinistre (article 707). Dans un souci d'harmonisation des prescriptions, le Code prévoit que les actions nées du contrat d'affrètement se prescrivent par deux ans à compter :

- de la date du débarquement complet de la marchandise, ou de l'évènement qui a mis fin au voyage, en cas d'affrètement au voyage ;

- de l'expiration de la durée du contrat ou de l'interruption définitive de son exécution en cas d'affrètement à temps ou "coque nue" ;

- pour le sous-affrètement, dans les conditions réglées ci-dessus selon que le sous-affrètement est au voyage ou à temps.

Il s'ensuit que la prescription est de deux ans aussi bien pour les contrats d'affrètement que pour les sous-affrètements. Curieusement, contrairement à l'article 562, la prescription, en ce qui concerne ces deux catégories de contrats, peut être interrompue ou suspendue conformément au droit commun de chaque Etat membre de la CEMAC. Il s'agit manifestement d'une incohérence législative et d'une discrimination négative qui peut être source de nombreuses injustices pour les chargeurs maritimes. Cependant, l'exploitation des textes permet de relever qu'une prescription spéciale a été fixée pour les actions récursoires (A), ce qui impose de déterminer non seulement les bénéficiaires (B) mais également le point de départ de cette prescription (C).

A - La prescription spéciale des actions récursoires

L'application généralisée de la prescription biennale à toutes les actions nées du contrat de transport maritime de marchandises ou d'affrètement aurait été préjudiciable aux nombreux plaideurs disposant d'une action récursoire contre un tiers, responsable ou garant. Ces derniers seraient ainsi exposés à un risque permanent d'irrecevabilité de leurs propres actions au cas où ils auraient été assignés quelque temps seulement avant l'expiration du délai de deux ans. Pour corriger cette injustice pouvant résulter d'une application trop rigoureuse des dispositions légales, l'article 563 prévoit que toute "personne tenue responsable, peut exercer une action récursoire après l'expiration du délai prévu à l'article 561 si elle le fait dans les quatre-vingt-dix jours à compter de la date à laquelle elle a soit réglé la réclamation, soit elle-même reçu signification de l'assignation, selon l'évènement qui survient en premier".

Des dispositions similaires ont été prévues en ce qui concerne les actions dirigées contre l'affréteur coque nue ou toute personne identifiée comme étant le transporteur. Ces actions peuvent être intentées même après l'expiration du délai de deux ans, si elles le sont dans les quatre-vingt-dix (90) jours à compter de la date à laquelle le transporteur a été identifié, ou le propriétaire inscrit ou l'affréteur coque nue a réfuté la présomption selon laquelle il est transporteur (article 564).

La prescription spéciale est également prévue en droit international par l'article 64 des "Règles de Rotterdam" qui fixe deux délais, le plus long étant retenu selon qu'il s'agit du délai déterminé par la loi applicable de l'Etat où l'action est engagée ou, dans les quatre-vingt-dix jours à compter de la date à laquelle la personne tenue responsable a soit réglé la réclamation, soit elle-même reçu signification de l'assignation, selon l'évènement qui survient le premier. Sous l'empire des "Règles de Hambourg", encore en vigueur au Cameroun, l'action récursoire de la personne tenue responsable peut être exercée même après l'expiration du délai de prescription de deux ans prévu à l'article 20 § 1, si elle l'est dans le délai déterminé par la loi de l'Etat où les poursuites sont engagées ou dans le délai de quatre-vingt-dix (90) jours qui suivent le règlement de la réclamation ou la signification de l'assignation (article 20 § 5 des Règles de Hambourg). Cette solution est identique à celle issue de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 telle que modifiée par les "Règles de Visby" du 23 février 1968. D'après l'article 3 de cette Convention, "les actions récursoires pourront être exercées même après l'expiration du délai prévu au paragraphe précédent [prescription annale], si elles le sont dans le délai déterminé par la loi du tribunal saisi de l'affaire. Toutefois ce délai ne pourra être inférieur à trois mois à partir du jour où la personne qui exerce l'action récursoire a réglé la réclamation ou a elle-même reçu signification de l'assignation".

C - Les bénéficiaires de la prescription spéciale

La prescription spéciale de quatre-vingt-dix jours, instituée par l'article 563 du nouveau Code de la marine marchande de la CEMAC, s'applique d'abord à tous les recours introduits par les transporteurs maritimes dont la responsabilité est recherchée, qu'il s'agisse d'un recours contre un autre transporteur, condamné in solidum, ou même d'un recours contre un chargeur, en cas de dommage causé par sa marchandise à celle d'un autre chargeur mais pour lequel le transporteur doit en répondre au premier chef. Le recours du transporteur peut également être exercé contre tout autre intervenant de la chaîne de transport, notamment les commissionnaires de transport chargés de faire exécuter un transport de bout en bout, les consignataires de navires et les entrepreneurs de manutention mandatés par le transporteur pour accomplir les opérations qu'il ne peut pas accomplir lui-même dans les ports d'escale.

La prescription spéciale s'applique aussi aux recours exercés contre le transporteur maritime par le commissionnaire de transport qui a indemnisé son commettant pour le dommage subi par sa marchandise et qui se trouve subrogé dans les droits de ce dernier (51). En effet, lorsque le commissionnaire de transport exécute spontanément son obligation contractuelle en réglant sans plus attendre son cocontractant, il bénéficie, en principe, d'un recours contre le transporteur maritime en se fondant sur les dispositions de l'article 1251 du Code civil qui opère au profit de celui qui, étant tenu avec d'autres ou pour d'autres au paiement de la dette, avait intérêt de l'acquitter. La prescription spéciale s'applique enfin aux actions récursoires des assureurs sur facultés qui, après avoir indemnisé l'assuré, se retournent contre le transporteur maritime, auteur du dommage subi par la marchandise (52). Par ailleurs, il n'est pas nécessaire que la prescription de l'action principale soit acquise au moment où l'action récursoire est engagée, dès lors qu'on est toujours dans les limites du délai de quatre-vingt-dix jours (53).

B - Le point de départ de la prescription spéciale

Le délai de quatre-vingt-dix jours prévu en droit communautaire pour l'exercice des actions récursoires ne s'ajoute pas nécessairement au délai de deux ans, prévu pour la prescription de l'action principale. Ce délai de quatre-vingt-dix jours ne court pas de l'expiration du délai de deux ans, mais du jour où l'auteur du recours, généralement le transporteur ou l'assureur, a été lui-même assigné comme responsable, ou du jour où il a indemnisé le demandeur à l'amiable, quelle que soit la date de cette transaction (54). Au surplus, il importe peu que la prescription de l'action principale soit acquise ou non lorsque l'action récursoire est engagée, du moment qu'on est toujours dans les limites du délai de quatre-vingt-dix jours (55).

Le délai de quatre-vingt-dix jours étant considéré comme indépendant du délai de prescription de deux ans prévue pour l'action principale, il s'ensuit que l'exercice de l'action récursoire peut très bien prospérer alors que le délai d'action contre le transporteur est expiré (56). La validité de l'action récursoire a ainsi été retenue alors que l'action principale avait été intentée dans le délai de report de prescription accordé (57). De même, il a été jugé que si l'assureur a entamé des négociations avant d'être assigné par son assuré, le délai de son action récursoire ne part que du jour où il aura, à l'amiable, réglé la réclamation (58). En revanche, dans une espèce récente, la Cour de cassation rappelle que la suspension conventionnelle de la prescription n'est opposable aux substitués que si ces derniers y ont consentie (59). En l'espèce, le report n'était pas opposable à la société CMA CGM qui n'y avait pas adhéré. Par conséquent, l'action diligentée au-delà du délai d'un an prévu par l'article 3 § 6 de la "Convention de Bruxelles" du 25 août 1924 amendée par le protocole du 23 février 1968, était prescrite. Pour la Haute juridiction, le plaideur qui souhaite préserver la recevabilité de l'action récursoire au-delà du délai de prescription doit veiller impérativement à obtenir un report de prescription du substitué avant d'accorder le sien.


(1) Très réputée pour son dynamisme dans le domaine du droit maritime, la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC) a été créée par un Traité signé à N'Djamena au Tchad le 16 mars 1994 et révisé le 30 janvier 2009 à Libreville au Gabon. Dotée de la personnalité juridique en vertu de son article 3, elle compte six Etats membres à savoir : le Cameroun, le Congo, le Gabon, la Guinée Equatoriale, la République Centrafricaine et le Tchad. Voir le texte complet du Traité révisé de la CEMAC dans le numéro 87 de Juridis Périodique, juillet-août-septembre 2011, p. 103 et s. et le commentaire de J. Bipele Kemfouedio intitulé : La CEMAC à la recherche de son affermissement.
(2) Voir, Juridis Périodique, n° 87, juillet-août-septembre 2011, p. 103 et s. et le commentaire de J. Bipele Kemfouedio intitulé : la CEMAC à la recherche de son affermissement, art. préc..
(3) Le Code de l'aviation civile de la CEMAC a été adopté dans les mêmes conditions le 22 juillet 2012 par Règlement n° 07/12-UEAC-066-CM-23.
(4) Voir par contre, G. Ngamkan, Etude comparée entre le droit maritime français et le droit maritime communautaire de l'Afrique centrale (CEMAC), DMF juillet-août 2012, p. 647 et s ; et DMF septembre 2012, p. 756 et s., cité par M. Ndendé, Adoption de deux nouveau codes CEMAC (Aviation Civile et Marine marchande), Ramatrans, n° 5, juillet 2013, p. 96.
(5) M. Ndende, Adoption de deux nouveau Codes CEMAC (Aviation Civile et Marine marchande), Ramatrans, n° 5, juillet 2013, p. 96.
(6) E. Kenguep, Les Règles de Rotterdam : dérive et servitude du législateur maritime de la CEMAC, Juridis Périodique, n° 97, janvier - février - mars 2014, p. 99 à 110 ; "Les clauses dérogatoires de compétence maritime : les ambigüités d'un antagonisme Nord-Sud, Revue électronique Neptunus, Volume 22, 2015/2, avril - mai - juin 2015 ; Kamel Khelifa, Les Règles de Rotterdam : un autre marché de dupes concocté par les puissances maritimes ?, Le Phare, Journal des échanges internationaux, des transports et de la logistique, n° 131, mars 2010, p. 5 ; Ben Fadhel relève par exemple que cet esprit hégémonique se trouve derrière chaque convention de droit matériel uniforme dont la bonne intention est de fédérer tout le monde : Les Règles de Rotterdam 2009, une 7ème version de droit uniforme sur la responsabilité du transporteur international de marchandises, Le Phare, Journal des échanges internationaux, des transports et de la logistique, n° 131, mars 2010, p. 14 et s. ; Voir par contre, G. Ngamkan, Les Règles de Rotterdam : le point de vue d'un maritimiste africain, DMF, n° 755, février 2014, p. 151 et s..
(7) Les "Règles de Rotterdam" ont déjà été ratifiées par l'Espagne (le 19 janvier2011), le Togo (le 17 juillet 2012), le Congo - Brazzaville (28 janvier 2014) et le Cameroun (décret présidentiel N° 2017/130 le 18 avril 2017). La ratification de la nouvelle Convention par ces deux pays de la CEMAC (Congo Brazzaville et Cameroun) est la conséquence immédiate de l'adoption du nouveau Code communautaire et de son entrée en vigueur.
(8) E. Kenguep, Les Règles de Rotterdam : dérive et servitude du législateur maritime de la CEMAC, Juridis Périodique, art. préc..
(9) Le Traité fondateur de la CEMAC est un dispositif de sept articles signé le 16 mars 1994 à N'djamena au Tchad. La CEMAC a été créée pour remplacer l'UDEAC qui existait depuis 1964.
(10) Voir par exemple, J. Biamo, La communautarisation du droit des transports en Afrique : le cas de l'Afrique de l'Ouest et du Centre, Thèse de Doctorat en droit soutenue le 10 novembre 2008 à l'Université de Yaoundé II - Soa (Cameroun) ; J. Nguene Nteppe, La nouvelle Convention des nations unies dite "Règles de Rotterdam" et le défi de la construction d'un nouvel ordre maritime international, Ramatrans, janvier 2011, n° 3, p. 33 et s. ; CA Littoral, 15 février 2013, Affaire "Société Express Afrique Congo S.A. c/ Société SDV Cameroun S.A. et Société SOCOMAR SA", inédit ; CA du Littoral, 1er avril 2013, n° 095/C, inédit.
(11) E. Kenguep,
La ratification des Règles de Rotterdam par le Cameroun : un coup d'épée dans la mer, Bulletin de l'UCCA, juillet 2017.
(12) Sur l'ensemble de la question voir, E. Kenguep, Les Règles de Rotterdam : dérive et servitude du législateur maritime de la CEMAC, Juridis Périodique, n° 97, janvier - février - mars 2014, p. 99 à 110 ; Les clauses dérogatoires de compétence maritime : les ambigüités d'un antagonisme Nord - Sud, Revue électronique Neptunus, Volume 22, 2015/2, avril - mai - juin 2015 ; G. Ngamkan, Les Règles de Rotterdam : le point de vue d'un maritimiste africain, DMF, n° 755, février 2014, p. 151 et s..
(13) Code de la marine marchande de la CEMAC du 22 juillet 2012, art. 560. L'avis consiste dans le constat de dommage effectué sur la marchandise c'est-à-dire, l'émission de réserves circonstanciées dans des conditions acceptables : RR : article 23, paragraphe 1 ; nouveau Code de la marine marchande : article 560, paragraphe 1.
(14) Le dommage apparent est celui qui résulte d'un constat extérieur tel que le pointage des marchandises. Celui-ci permet de vérifier les allégations du transporteur quant au nombre de colis. Selon les usages du port, le pointage peut être fait contradictoirement ou pas et surtout en présence d'un commissaire aux avaries maritimes. Le dommage apparent peut également être déterminé par prélèvement d'un échantillon ou par contrôle visuel, olfactif ou auditif. Ces contrôles permettent alors au destinataire de détecter un produit défectueux, une odeur de pourriture ou même un bruit de verres cassés, autant d'indices qui vont l'obliger à émettre des réserves sur l'état et la quantité des marchandises réceptionnées.
(15) Le dommage non apparent est, en revanche, celui qui ne peut être détecté qu'après un contrôle approfondi soit par un expert maritime soit après dépotage du conteneur dans les magasins du destinataire. Dans ce cas, ce dernier dispose d'un délai de sept jours pour adresser un avis au transporteur, ce qui est largement inférieur aux quinze jours prévus par l'article 19 des "Règles de Hambourg" encore en vigueur au Cameroun. On le perçoit bien, la tendance du nouveau texte est de réduire les délais d'action accordés au destinataire afin de le rapprocher de la situation de l'époque des "Règles de la Haye" qui lui accordaient pour le même type de dommage un délai de trois jours.
(16) Dans la pratique, les constats contradictoires sont effectués par un commissaire aux avaries maritimes, assermenté, en présence des parties et consignés dans un procès-verbal établi par ses soins.
(17) Le droit à réparation naît du dommage ou de la perte et non de l'avis prévu par les textes.
(18) La prescription est appliquée avec beaucoup de rigueur par les juridictions camerounaises : tribunal de grande instance du Wouri, jugement n° 035/Com. du 11 mars 2013, "Société des produits avicoles du Cameroun (SPAC) c/ Le capitaine commandant le navire Virana, la société OT Africa Lines et la société Delmas Cameroun S.A.", inédit.
(19) L'action en justice se présente comme le droit pour l'auteur d'une prétention d'être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée.
(20) Les moyens de défense tendent au rejet d'une prétention initiale ou incidente ; ils ne portent en eux-mêmes aucune prétention spécifique. Les moyens mis à la disposition du défendeur pour s'opposer, définitivement ou temporairement, au succès de la prétention formée à son encontre se classent en trois catégories : les défenses au fond, les fins de non-recevoir et les exceptions de procédure qui tendent, soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours. Voir Xavier Marchand, Jurisclasseur Procédure civile, Fasc. 128 : Moyens de défense - Règles générales, 10 septembre 2014, n° 5.
(21) Le fondement de cette responsabilité a connu une évolution significative au fil des ans puisqu'on est passé d'une présomption de responsabilité dans la Convention de Bruxelles de 1924 à une responsabilité pour faute présumée dans les Règles de Hambourg et le Code de la marine marchande de 2001, puis à un système ambigu de responsabilité. Ce dernier combine le principe d'une présomption de responsabilité, celui d'une responsabilité pour faute prouvée et celui d'une responsabilité pour faute présumée (nouveau Code communautaire de la marine marchande adopté le 22 juillet 2012 et les Règles de Rotterdam.
(22) Convention de Bruxelles, art. 3 § 6 (d).
(23) Convention de Hambourg, art. 20, al. 1er ; "Règles de Rotterdam", art. 62 (1) ; Code CEMAC, art. 407.
(24) L'action récursoire est également prévue en droit maritime international par l'article premier des "Règles de Visby" du 23 février1968 modifiant et complétant certaines dispositions de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 (Règles de la Haye) et l'article 64 des "Règles de Rotterdam".
(25) Cass. com., 6 février 1990, n° 88-15.495 (N° Lexbase : A3572CNM), DMF, 1992, p. 210 et 1993, p. 88, obs. P. Bonassies.
(26) Dans une formule similaire, l'article 3 § 6, alinéa 4, de la Convention internationale de Bruxelles, modifié par l'article 1er des "Règles de Visby", dispose que "sous réserve des dispositions du paragraphe 6 bis [concernant les actions récursoires], le transporteur et le navire seront en tous cas déchargés de toute responsabilité quelconque relativement aux marchandises, à moins qu'une action ne soit intentée dans l'année de leur délivrance ou de la date à laquelle elles eussent dû être délivrées".
(27) TGI du Wouri, jugement n° 035/com du 11 mars 2013, "Société des produits avicoles du Cameroun (SPAC) c/ Le capitaine commandant le navire Virana, la société OT Africa Lines et la société Delmas Cameroun S.A.", inédit.
(28) La livraison est également considérée comme effective, par la jurisprudence comparée, si la marchandise a été déposée dans un entrepôt sous douane, conformément aux indications du connaissement, où le destinataire pouvait la retirer : CA Aix-en-Provence, 5 juillet 1988, DMF, 1991, p. 43 et 1992, p. 168, obs. P. Bonassies.
(29) CA Paris, 5 mai 1978, DMF 1978, p. 716.
(30) DMF, 1991, p. 254 et 1992, p. 170, obs. P. Bonassies.
(31) Faisant application de la prolongation du délai de prescription telle que prévue par la Convention de Bruxelles modifiée par les Règles de Visby, la jurisprudence déclare que l'accord des parties doit être formel, en raison de son caractère exceptionnel. En particulier, la prolongation du délai de prescription ne saurait résulter du seul silence opposé par le transporteur à la réclamation du destinataire, car ce silence ne vaut pas accord du transporteur sur une prolongation de la prescription : CA Rennes, 21 octobre 1987, DMF 1989, p. 460 et 1990, p. 155, obs. P. Bonassies.
(32) CA Rennes, 21 octobre 1987, DMF 1989, p. 460 et 1990, p. 155, obs. P. Bonassies. De même, une offre, ou un accord sur la prorogation du délai, qui serait subordonné à une condition, serait caduc au cas de défaillance de cette condition. V. CA Aix-en-Provence, 14 avril 1992, DMF 1993, p. 118 et 1994, p. 179, obs. P. Bonassies, en l'espèce, le transporteur avait donné son accord sur la prorogation de la prescription, à condition que le litige soit soumis aux juridictions de Hambourg ; et le destinataire avait saisi le tribunal de commerce de Marseille. V. également, CA Rouen, 18 juin 1992, DMF 1993, p. 357 et 1994, p. 179, obs. P. Bonassies.
(33) CA Paris, 5e ch., sect. A, 23 février 1994.
(34) Cass. com., 7 juillet 1987, n° 86-11.174 (N° Lexbase : A9504AT8).
(35) V. par exemple, dans le cas où cet empêchement venait du comportement du transporteur, Cass. com., 16 juillet 1958, Bull. civ. III, n° 314 ; DMF 1959, p. 34. En l'espèce, le transporteur retenait indûment les pièces du dossier qui lui avaient été communiquées, pour empêcher son adversaire d'agir. V. également, CA Paris, 5 mai 1978, DMF 1978, p. 716.
(36) Cass. com., 11 janvier 1994, n° 92-10.241 (N° Lexbase : A6719ABH), Bull. civ. IV, n° 22.
(37) La jurisprudence rappelle très opportunément que, pour les délais de prescription et les délais de forclusion, la suspension et l'interruption sont la règle : Cass. crim., 14 janvier 1977, n° 74-15061 (N° Lexbase : A3834CHH), p. 89, concl. Schmelk ; Gaz. Pal., 1977, 1, p. 145, note R. Rodière ; RTDCiv., 1977, p. 366, obs. R. Perrot.
(38) Tribunal de grande instance du Wouri, jugement n° 035/Com. du 11 mars 2013, "Société des produits avicoles du Cameroun (SPAC) c/ Le capitaine commandant le navire Virana, la société OT AFRICA LINES et la société Delmas Cameroun S.A.", inédit.
(39) RD transp., n ° 5, mai 2011, comm. 83, note M. Ndendé.
(40) CA Paris, 9 mars 2011 (N° Lexbase : A1827HAW), RD transp. n° 5, mai 2011, comm. 83, note M. Ndendé.
(41) Pour un cas récent de maintien de la prescription annale en dépit d'une livraison irrégulière effectuée par le transporteur, V. CA Rouen, 2ème ch., 16 septembre 2010, RD transp., 2011, comm. 25, note M. Ndendé.
(42) CA du Littoral, 18 décembre 2009, n° 161/C affaire "Campship Lines SA., c/ Elevage Promotion Afrique", infirmant le jugement civil n° 639/C du 13 août 2008, rendu par le TGI du Wouri à Douala, préc.
(43) Jugement n° 438 du 3 juin 2010, affaire "Mme Kitio née Nanfack Zebate Claudine Marie Pascale c/ CPT CDT M/S Euro-Cargo, Armement Grimaldi Compagnia Di Navigazione et Socomar, inédit.
(45) Arrêt n° 161 / C, du 18 décembre 2009, affaire "Campship Lines SA., c/ Elevage Promotion Afrique", préc..
(46) Tribunal de Grande Instance du Wouri, jugement n° 035/COM du 11 mars 2013, "Société des produits avicoles du Cameroun (SPAC) c/ Le capitaine commandant le navire Virana", la société "OT AFRICA LINES et la société Delmas Cameroun SA", inédit.
(46) CA Paris, 5 mai 1978, DMF 1978, p. 716.
(47) V. dans le cadre d'un transport terrestre CA Lyon, 31 octobre 1986, DMF 1988, p. 159, obs. P. Bonassies, Comp. pour un arrêté de compte, CA Rouen, 9 juillet 1970, DMF, 1971, p. 279.
(48) Cass. com., 20 janvier 1987, n° 85-13164 (N° Lexbase : A6435AAL), Gaz. Pal. 1987, 1, pan. jurispr., p. 79 ; DMF, 1988, p. 48 ; 1989, p. 84, obs. P. Bonassies. Dans le même sens CA Aix-en-Provence, 17 décembre 1986, DMF 1988, p. 43 ; 1989, p. 84, obs. P. Bonassies.
(49) E. Kenguep, Le recours subrogatoire de l'assureur maritime sur facultés en droit interne et communautaire des transports : juges, soyez vigilants ! Juridis Périodique, n° 95, juillet-août-septembre, 2013, p. 103 à 113 ; Annuaire de Droit Maritime et Océanique de Nantes, Tome XXXII - 2014, n° 000534 - 2014, p. 243 à 263.
(50) Bien que le Code ne le déclare pas expressément, les actions nées des contrats de lamanage devraient être soumises à la même prescription biennale. Le contraire serait difficilement admissible et rendrait le texte non seulement discordant mais aussi et surtout disharmonieux.
(51) Cass. com., 12 janvier 1988, n° 86-14.609 (N° Lexbase : A7434CRR), Bull. civ. IV, n° 27 ; JCP éd. G, 1988, IV, 108, cet arrêt rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu par CA Aix-en-Provence, 20 mars 1986, DMF, 1987, p. 141, obs. P. Bonassies.
(52) E. Kenguep, Le recours subrogatoire de l'assureur maritime sur facultés en droit interne et communautaire des transports : juges, soyez vigilants !, art. préc.
(53) CA Aix-en-Provence, 10 mars 1994, BTL 1994, p. 624.
(54) CA Rouen, 29 mai 1986, DMF 1988, p. 160, obs. P. Bonassies.
(55) CA Aix-en-Provence, 10 mars 1994, précité.
(56) CA Rouen, 3 décembre 1998, DMF 2000, p. 664.
(57) CA Rouen, 12 juin 1997, navire Tadeusz Kosciuszko, DMF 1998, p. 151, obs. J.-F. Tantin : dans cette espèce, les juges du fond ont fait partir le délai de prescription de la fin du report de report de prescription.
(58) CA Rennes, 19 mai 1986, BTL 1987, p. 319, obs. A. Chao.
(59) M. Follin, Rappel des règles en matière de suspension, interruption de la prescription et délais de l'action récursoire, note sous Cass. com., 20 avril 2017, n° 14-28.849, F-D (N° Lexbase : A3093WAS), DMF, n° 796, novembre 2017, p. 898 et s..

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