Réf. : Décret n° 2025-321 du 7 avril 2025 N° Lexbase : L2073M9N
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N2150B3Z
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par La rédaction
Le 29 Avril 2025
Publié au Journal officiel du 8 avril, le décret n° 2025-321 du 7 avril 2025 vient préciser les modalités pratiques d'actualisation du prix d'acquisition versé par l'opérateur dans le cadre de l'expérimentation prévue au II de l'article 11 de la loi n° 2024-322 du 9 avril 2024 portant accélération et simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement, afin de calculer le prix maximum de revente par l'opérateur aux copropriétaires.
Pour rappel, l’article 11 de la loi « Habitat dégradé » N° Lexbase : L6275MS9, a prévu un nouvel outil à titre expérimental, pendant dix années, s’agissant des immeubles placés sous le régime de la copropriété remplit les conditions justifiant le prononcé du jugement mentionné aux I et III de l'article L. 615-6 du Code de la construction et de l'habitation N° Lexbase : L1063MMC, permettant à un opérateur, après autorisation de la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'habitat, de conclure avec le syndicat des copropriétaires une convention en vue de l'acquisition temporaire à titre onéreux soit du seul terrain d'assiette de la copropriété, soit des seuls parties et équipements communs des immeubles qui la constituent, soit du terrain et des parties et équipements communs, en vue d'en assurer la rénovation.
Les modalités de la cession sont fixées par une convention entre les copropriétaires et l'opérateur.
Cette convention fixe notamment les conditions de rachat du terrain ou des parties communes par les propriétaires en prévoyant que le prix de revente ne peut excéder le prix d'acquisition par l'opérateur, tel qu'initialement établi par une évaluation du service des domaines et actualisé selon des modalités définies par décret en Conseil d'État.
C’est ce texte qui a donc été publié au Journal officiel du 8 avril 2025. Il prévoit que le prix de revente des biens ne peut excéder le prix d'acquisition par l'opérateur, indexé sur la variation de l'indice de référence des loyers, publié par l'Institut national de la statistique et des études économiques, intervenue depuis la date d'acquisition par l'opérateur, majoré du coût des travaux réalisés entre l'acquisition des biens par l'opérateur et leur cession aux copropriétaires, duquel est déduit le montant des redevances versées à l'opérateur au seul titre des travaux de rénovation et de conservation des biens concernés ainsi que, le cas échéant, le montant des subventions et des contributions dont a pu bénéficier l'opérateur au titre de ces biens.
L'indice de référence des loyers pris en compte pour l'actualisation est celui du trimestre de la date d'acquisition du bien par l'opérateur.
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Réf. : Cass. civ. 2, 10 avril 2025, n° 22-15.931, FS-B N° Lexbase : A13760HG
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N2184B3B
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par Charlotte Moronval, Rédactrice en chef
Le 06 Mai 2025
L'annulation d'un acte de la procédure de recouvrement de l'indu ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce que l'organisme de Sécurité sociale puisse, sous réserve que sa créance ne soit pas prescrite, poursuivre le paiement des mêmes sommes au cours d'une nouvelle procédure de recouvrement.
En l’espèce, une caisse notifie à une assurée, le 6 octobre 2014, un indu d'indemnités journalières versées au titre de l'assurance maladie.
L'assurée saisit d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la Sécurité sociale. L'affaire est radiée par un jugement du 17 mai 2018, à défaut de diligence des parties.
Par un jugement du 17 août 2020, la même juridiction, saisie parallèlement d'une opposition à la contrainte décernée à l'assurée par la caisse le 12 mars 2019 en paiement du même indu, l'annule. La caisse obtient alors obtenu la réinscription au rôle de l'instance relative à la contestation de la notification d'indu du 6 octobre 2014.
Pour rejeter la demande en paiement de la caisse, le tribunal judiciaire relève que la contrainte du 12 mars 2019 a été annulée par un précédent jugement. Il constate que l'instance en opposition à contrainte avait le même objet que l'instance en paiement de l'indu, à savoir le remboursement d'indemnités journalières indues, qu'elle concernait les mêmes parties et qu'elle était motivée par la même cause, à savoir le caractère indu du versement des indemnités journalières. Les juges en déduisent que l'autorité de la chose jugée dont est revêtu le jugement annulant la contrainte doit conduire au rejet de la demande en paiement de l'indu.
La position de la Cour de cassation. La Cour de cassation censure le raisonnement des juges du fond.
Selon elle, l'annulation de la contrainte ne faisait pas obstacle à ce que la caisse poursuive de nouveau le paiement de sa créance, dès lors que celle-ci n'était pas prescrite.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Le règlement des cotisations sociales, La procédure de remboursement de l’indu, in Droit du travail N° Lexbase : E5344E73. |
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Réf. : CNIL, stratégie européenne et internationale pour 2025-2028 stratégie européenne et internationale pour 2025-2028
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N2114B3P
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par Vincent Téchené, Rédacteur en chef
Le 05 Mai 2025
La CNIL a publié le 14 avril sa stratégie européenne et internationale sa stratégie européenne et internationale pour 2025-2028.
En complément de son plan stratégique 2025-2028, la stratégie européenne et internationale de la CNIL vise à renforcer et coordonner son action notamment en prenant en compte les orientations du Comité européen de la protection des données (CEPD). Elle permet de clarifier la position de la CNIL auprès des parties prenantes en Europe et dans le monde et de donner des orientations sur des sujets structurants à l’échelle européenne et internationale.
Dans un environnement numérique de plus en plus interconnecté, la circulation des données personnelles pose des défis majeurs, qu'il s'agisse des flux transfrontaliers ou du développement mondial des technologies. Face à ces enjeux, la CNIL estime qu’il est d’autant plus important et légitime aujourd’hui de défendre un haut niveau de protection des données personnelles en France, en Europe et dans le monde.
La stratégie européenne et internationale de la CNIL pour les prochaines années se décline en trois principaux axes :
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Réf. : Cass. civ. 2, 30 avril 2025, n° 22-20.064, F-B N° Lexbase : A15810QM
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N2219B3L
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par Alexandre Autrand, doctorant, Université de Limoges, école doctorale Gouvernance des Institutions et des Organisations, Observatoire des Mutations Institutionnelles et Juridiques
Le 06 Mai 2025
La Cour de cassation rappelle sa jurisprudence en matière d’irrecevabilité de la déclaration d’appel (v. Cass. civ. 2, 1er octobre 2020, n° 19-11.490, FS-P+B+I N° Lexbase : A49893WP). Elle affirme qu’une déclaration d’appel irrégulière, faute d’avoir été communiquée par RPVA, qui fait encourir une irrecevabilité à l’appel, n’empêche pas l’appelant de former un second appel, sous réserve de l’expiration du délai d’appel, et tant que le premier appel n’a pas été déclaré irrecevable.
Faits et procédure. Mme [U] a interjeté appel le 4 décembre 2020, à l’encontre d’un jugement rendu le 12 novembre 2020 par un tribunal judiciaire, dans un litige l’opposant à M. [T]. Cette déclaration d’appel, n’a pas été déposée par l’intermédiaire du RPVA. Le 18 décembre 2020, elle dépose une seconde déclaration d’appel via le RPVA, et contre le même jugement ainsi que contre la même partie intimée. Par une ordonnance du 30 décembre 2020, le conseiller de la mise en état déclare irrecevable l’appel formulé par Mme [U] le 4 décembre 2020. Par une seconde ordonnance, du 29 juin 2021, le conseiller de la mise en état déclare irrecevable l’appel formulé par Mme [U] le 18 décembre 2020. Mme [U] décide alors de déférer cette dernière décision à la cour d’appel, qui a statué sur ce recours, dans un arrêt du 18 novembre 2021. Par la suite, Mme [U] décide d’attaquer cette décision devant la Cour de cassation.
Pourvoi/Appel. La demanderesse au pourvoi fait grief à l’arrêt de déclarer irrecevable, pour défaut d’intérêt à agir, l’appel formulé le 18 décembre 2020. Au soutien de son pourvoi, Mme [U] affirme que le droit d’appel appartient à toute partie qui y a intérêt. De ce fait, elle considère que la saisine d’une cour d’appel, qui est susceptible d’être déclarée irrecevable, n’interdit pas à son auteur de former un second appel, avant l’expiration du délai, et tant que le premier appel n’a pas été déclaré irrecevable ou caduc. Les juges du fond ont relevé que l’irrecevabilité ou la caducité du premier appel n’avait pas encore été constatée, lorsque le second a été formulé le 18 décembre 2020. De ce fait, la cour d’appel considère que ce second appel est irrecevable faute pour l’appelante de démontrer un intérêt à interjeter appel. En statuant ainsi, Mme [U] estime que la cour d’appel a violé les articles 546 N° Lexbase : L6697H78 et 911-1 N° Lexbase : L7243LEY du Code de procédure civile.
Solution. La Cour de cassation approuve l’argumentation de Mme [U] aux visas des articles 546 et 911-1 du Code de procédure civile. Après avoir rappelé la lettre du premier de ces textes, la Cour considère qu’une déclaration d’appel irrégulière, faute d’avoir été communiquée par RPVA, qui fait encourir une irrecevabilité à l’appel, n’interdit pas à l’appelant de former un second appel. Toutefois, la Haute juridiction précise que cette solution est envisageable, sous réserve de l’absence d’expiration du délai d’appel, et tant que le premier appel n’a pas été déclaré irrecevable. Après avoir rappelé le raisonnement de la cour d’appel, les juges du droit estiment que le premier appel, qui n’a pas été transmis par RPVA, était irrégulier. De ce fait, les juges du Quai de l’horloge estiment que la cour d’appel aurait dû constater que le second appel, transmis par RPVA dans le délai d’appel, et avant le prononcé de l’irrecevabilité du premier était recevable. Par conséquent, la Cour de cassation casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt rendu par la cour d’appel.
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Réf. : Cass. crim., 11 mars 2025, n° 23-86.261, FS-B+R N° Lexbase : A3034647
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N2051B3D
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par Jean-Yves Maréchal, Professeur de droit pénal à l’Université de Lille – Codirecteur de l’institut de criminologie de Lille CRDP – ERADP – ULR n° 4487
Le 30 Avril 2025
Mots-clés : avocat • secret professionnel • perquisition • saisie • droits de la défense
Lorsqu’une perquisition dans le cabinet ou le domicile d’un avocat est justifiée par la mise en cause de ce dernier, elle ne peut être autorisée que s’il existe des raisons plausibles de le soupçonner d’avoir participé à l’infraction qui fait l’objet de la procédure ou une infraction connexe. Si tel est le cas, peuvent être saisis les documents révélant sa participation éventuelle à cette infraction y compris s'ils relèvent de l'exercice des droits de la défense et sont couverts par le secret professionnel de la défense et du conseil. Les raisons plausibles de soupçonner la participation de l’avocat à l’infraction doivent être expressément mentionnées dans l’ordonnance autorisant la perquisition, l’absence de telles indications privant le bâtonnier de l’information nécessaire à l’exercice de sa mission de protection des droits de la défense.
Depuis la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 N° Lexbase : L6493MSB, l’article 56-1, alinéa 1er, du Code de procédure pénale N° Lexbase : L1314MAW, réglementant les perquisitions au sein des cabinets et domiciles d’avocats, distingue selon que la perquisition est justifiée ou non par la mise en cause de l’avocat dans les faits objets de l’enquête ou de l’instruction. Dans le premier cas, le législateur prévoit que les actes ne peuvent être autorisés que s'il existe des raisons plausibles de soupçonner l’avocat d’avoir commis ou tenté de commettre, en tant qu'auteur ou complice, l’infraction qui fait l'objet de la procédure ou une infraction connexe. Il s’agit donc d’une obligation pour le juge des libertés et de la détention de motiver spécialement son ordonnance sur ce point, alors qu’en l’absence de mise en cause de l’avocat, la décision doit seulement indiquer la nature de l'infraction sur laquelle portent les investigations, les raisons justifiant la perquisition, l'objet de celle-ci et sa proportionnalité au regard de la nature et de la gravité des faits. Le législateur précise, in fine, que ces exigences sont prévues à peine de nullité mais n’en tire aucune autre conséquence en termes de saisissabilité des documents susceptibles d’être découverts lors de la perquisition, l’alinéa 2 du texte énonçant, sans faire de distinction, que les documents relevant de l'exercice des droits de la défense et couverts par le secret professionnel de la défense et du conseil, prévu à l'article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 N° Lexbase : L6343AGZ, ne peuvent être saisis.
Dans un arrêt rendu le 11 mars 2025, la Cour de cassation établit un lien entre ces dispositions, qui semblent plus protectrices du secret professionnel des avocats, et sa propre jurisprudence antérieure, pour aboutir à une solution qui diffère de la lettre du texte, concernant la nature des documents saisissables. Dans l’affaire qui lui était soumise, un juge des libertés et de la détention a autorisé des perquisitions au cabinet et au domicile d’avocats intervenus dans des négociations en vue d’obtenir la libération d’une personne emprisonnée au Qatar, dans le cadre d’une instruction ouverte notamment des chefs d’arrestation, enlèvement, séquestration ou détention arbitraire aggravés et extorsion. Une contestation de la saisie de documents a été élevée par le délégué du bâtonnier et le président de la chambre de l'instruction, sur recours contre l’ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant statué sur cette contestation, a écarté les arguments invoqués aux fins d’annulation de l’autorisation de perquisitionner, selon lesquels cette décision n’avait pas mentionné quels étaient les soupçons pesant sur les avocats d’avoir participé aux infractions objet de l’instruction.
La Chambre criminelle censure la décision du président de la chambre de l'instruction, au visa des articles 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme et 56-1 du Code de procédure pénale. Elle énonce en substance que lorsque la perquisition est justifiée par la mise en cause de l'avocat, elle ne peut être autorisée que s'il existe des raisons plausibles de le soupçonner d'avoir commis ou tenté de commettre l'infraction qui fait l'objet de la procédure ou une infraction connexe. Si tel est le cas, il peut être procédé à la saisie de documents révélant la participation éventuelle de l'avocat à cette infraction y compris s'ils relèvent de l'exercice des droits de la défense et sont couverts par le secret professionnel de la défense et du conseil. Elle ajoute que les raisons plausibles de soupçonner la participation de l'avocat à l’infraction doivent être expressément mentionnées dans l'ordonnance autorisant la perquisition, l'absence de telles indications privant le bâtonnier de l'information nécessaire à l'exercice de sa mission de protection des droits de la défense. Hors cette hypothèse, aucun document relevant de l'exercice des droits de la défense et couvert par ledit secret professionnel ne peut être saisi et placé sous scellé.
Cette décision combine donc les règles légales issues de la loi de 2021, relatives aux conditions de la perquisition chez un avocat soupçonné, avec la jurisprudence de la Cour de cassation concernant la saisissabilité des documents découverts chez ce dernier, pour parvenir à une solution mitigée faisant découler des conséquences défavorables d’une disposition légale conçue comme permettant une meilleure protection du secret professionnel de l’avocat.
Si la perquisition dans le cabinet ou le domicile d’un avocat mis en cause n’est donc possible qu’à des conditions renforcées (I.), le magistrat qui la réalise se voit octroyer un pouvoir élargi de saisir des documents relevant de l’exercice des droits de la défense (II.).
I. Les conditions renforcées de la perquisition chez un avocat mis en cause
C’est l’article 3 du projet ayant conduit à l’adoption de la loi du 22 décembre 2021 qui a introduit, à l’article 56-1 du Code de procédure pénale, une nouvelle règle selon laquelle, lorsque la perquisition est justifiée par la mise en cause de l’avocat, elle ne peut être autorisée que s’il existe contre lui des raisons plausibles de le soupçonner d’avoir commis ou tenté de commettre l’infraction qui fait l’objet de la procédure. L’objectif du législateur était donc de rendre plus difficile le recours à ces investigations, le magistrat souhaitant y procéder devant pouvoir caractériser, au préalable, la suspicion pesant sur l’avocat. De surcroît, la même loi a renforcé les exigences de motivation pour le cas où la perquisition n'est pas justifiée par la mise en cause de l’avocat. Ainsi, dans cette situation qu’on pourrait qualifier d’ordinaire, le juge des libertés et de la détention qui autorise les investigations doit indiquer la nature de l'infraction ou des infractions sur lesquelles portent les investigations, les raisons justifiant la perquisition, l'objet de celle-ci et sa proportionnalité au regard de la nature et de la gravité des faits. Dans le cas où les actes sont justifiés par la mise en cause de l’avocat, le magistrat doit compléter cette motivation par les éléments qui caractérisent l’implication de celui-ci, à savoir les « raisons plausibles de le soupçonner d'avoir commis ou tenté de commettre, en tant qu'auteur ou complice, l'infraction qui fait l'objet de la procédure ou une infraction connexe ».
Dans l’espèce à l’origine de l’arrêt commenté, il n’est pas précisé si le juge d'instruction a sollicité l’autorisation de perquisitionner en raison de la suspicion pesant sur les avocats mais le débat devant le président de la chambre de l'instruction a porté sur cette question. Ce magistrat a estimé que l’ordonnance du juge des libertés et de la détention autorisant les actes comportait les éléments factuels caractérisant les raisons plausibles de soupçonner les avocats d’être auteur des infractions objet de l’instruction, mais la Cour de cassation ne partage pas cette analyse. Elle relève, en effet, que les motifs de l’ordonnance autorisant la perquisition n’ont établi que l'utilité d'une telle mesure pour la manifestation de la vérité, sa nécessité et sa proportionnalité au regard de la nature et de la gravité des faits objet de l'information, s'agissant notamment de faits d'arrestation, enlèvement, séquestration ou détention arbitraire accompagnés de tortures ou d'actes de barbarie commis en bande organisée. En revanche, le juge n’a pas caractérisé de raisons plausibles de soupçonner les avocats d'avoir commis, comme auteurs ou comme complices, les infractions citées, et encore moins celle d'extorsion en bande organisée, non citée.
En d’autres termes, l’ordonnance était suffisamment motivée pour autoriser une perquisition chez un avocat non suspecté mais pas pour justifier les investigations chez un avocat soupçonné et la Chambre criminelle énonce, dans son attendu principal, que les raisons plausibles de soupçonner la participation de l'avocat à l'infraction doivent être expressément mentionnées dans l'ordonnance autorisant la perquisition, l'absence de telles indications privant le bâtonnier de l'information nécessaire à l'exercice de sa mission de protection des droits de la défense. Cette référence au rôle du bâtonnier et à son pouvoir de s’opposer à la saisie de documents couverts par le secret professionnel se comprend au regard des conséquences que la Cour de cassation tire de la distinction entre la situation de l’avocat suspecté et celle de l’avocat qui ne l’est pas [1].
On pourrait toutefois se demander quel est l’intérêt réel de cette distinction opérée par l’article 56-1 du Code de procédure pénale. Certes, elle offre la possibilité, comme l’arrêt commenté en est l’illustration, de contester plus aisément l’autorisation de perquisitionner qui doit être « surmotivée », mais les règles légales ainsi posées paraissent susceptibles d’être contournées. En effet, le magistrat demandeur de l’autorisation de perquisitionner pourrait, au moins dans certains cas, ne pas faire état des éléments de suspicion pesant sur l’avocat, dont il aurait connaissance, notamment s’ils sont peu nombreux ou trop vagues, afin de ne pas prendre le risque que le juge des libertés et de la détention refuse d’autoriser les investigations.
Ainsi, soit le procureur de la République ou le juge d'instruction ne dispose pas d’éléments suffisants de suspicion et il pourra néanmoins obtenir une autorisation de perquisitionner, en exposant au juge des libertés et de la détention quelles sont « les raisons justifiant la perquisition, l'objet de celle-ci et sa proportionnalité au regard de la nature et de la gravité des faits » [2]. Soit, il estime disposer de tels éléments et il devra alors, en plus, faire état des raisons plausibles de soupçonner la participation de l’avocat aux faits poursuivis [3]. Mais il pourra avoir intérêt à le faire, même s’il prend le risque d’un refus ou d’une annulation de l’autorisation, en raison de la conséquence tirée par la Cour de cassation de l’existence de cette suspicion, en termes de pouvoirs du magistrat pratiquant la saisie.
II. La saisissabilité des documents découverts chez un avocat mis en cause
Que la perquisition soit autorisée en raison de la suspicion pesant sur l’avocat ou en l'absence de celle-ci, l’article 56-1, alinéa 2, du Code de procédure pénale énonce que les documents couverts par le secret professionnel de la défense et du conseil et relevant de l’exercice des droits de la défense sont insaisissables, le bâtonnier de l’ordre pouvant s’opposer à la saisie. Or, la solution affirmée dans l’arrêt commenté n’est pas celle-là. En effet, la Cour de cassation rappelle ici sa propre jurisprudence en vertu de laquelle les documents couverts par le secret professionnel de l’avocat sont saisissables, même lorsqu’ils relèvent de l’exercice des droits de la défense, lorsque cet avocat est soupçonné d’avoir participé à une infraction pénale. Il résulte donc de la combinaison du texte et de cette jurisprudence que l’autorisation de perquisitionner chez un avocat suspecté est plus difficile à motiver en raison des exigences légales renforcées mais qu’elle permet d’accroitre les pouvoirs de saisie du magistrat procédant à la perquisition.
La solution prétorienne dont il s’agit est ancienne, la Chambre criminelle jugeant déjà en 1992 [4] que « si le juge d'instruction est (…) investi du pouvoir de saisir les objets et documents utiles à la manifestation de la vérité, ce pouvoir trouve sa limite dans le principe de la libre défense, qui domine toute la procédure pénale et qui commande de respecter les communications confidentielles des inculpés avec les avocats qu'ils ont choisis ou veulent choisir comme défenseurs ; que la saisie des correspondances échangées entre un avocat et son client ne peut, à titre exceptionnel, être ordonnée ou maintenue qu'à la condition que les documents saisis soient de nature à établir la preuve de la participation de l'avocat à une infraction » [5]. En dépit de l’évolution de l’article 56-1 du Code de procédure pénale vers une plus grande protection [6] du secret professionnel de l’avocat, cette jurisprudence n’a pas été infléchie. Au contraire, dans un arrêt du 5 mars 2024 [7], la Cour de cassation énonce, d’une manière générale, que « le secret professionnel de l’avocat ne peut faire obstacle à la saisie de pièces susceptibles d'établir la participation éventuelle de celui-ci à une infraction pénale » et que, « en adoptant les dispositions précitées du deuxième alinéa de l'article 56-1 du Code de procédure pénale, le législateur n'a pas entendu remettre en cause cette jurisprudence ».
L’arrêt commenté s’inscrit donc dans la continuité de cette jurisprudence qui considère que le secret professionnel de l’avocat ne peut valablement être invoqué afin d’empêcher la saisie d’éléments de preuve d’une infraction à laquelle il aurait participé, ce qui n’est guère contestable sur le plan des principes, une solution contraire conduisant à une sorte d’immunité contestable au profit de l’avocat ayant une activité délictueuse. Mais la décision fait également le lien avec l’exigence d’une motivation renforcée de la décision autorisant la perquisition.
Ainsi, l’existence d’une suspicion à l’égard de l’avocat d’avoir participé à une infraction permet au procureur de la République ou au juge d'instruction d’obtenir une autorisation de perquisitionner qui offrira la possibilité de saisir les documents qui, soit ne sont pas couverts par le secret professionnel au sens de l’article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, soit sont couverts par ce secret mais ne relèvent pas de l’exercice des droits de la défense, soit encore, et c’est la précision apportée par l’arrêt, sont couverts par le secret professionnel et relèvent de l’exercice des droits de la défense à condition qu’ils paraissent constituer des éléments de preuve de l’implication de l’avocat dans les faits poursuivis. Si l’on imagine, par exemple, qu’un avocat participe à une infraction avec un de ses clients, seraient saisissables les échanges entre les intéressés, même relevant de l’exercice des droits de la défense, s’ils établissent l’implication de l’avocat dans les faits infractionnels.
Le bâtonnier de l’ordre conserve évidemment, en pareil cas, le droit de contester les opérations mais le fait pour le juge des libertés et de la détention d’avoir préalablement autorisé celles-ci sur le fondement de soupçons pesant sur l’avocat a pour conséquence que la contestation qui porterait sur la nature des documents saisis aurait un champ d’application restreint aux seuls documents relevant de l’exercice des droits de la défense mais n’incriminant pas l’avocat. En revanche, si la perquisition n’a pas été autorisée au regard de l’existence de soupçons à l’égard de l’avocat, il est évidemment possible qu’elle donne lieu à la découverte de documents faisant naître une telle suspicion mais, en pareil cas, la contestation du bâtonnier conduirait alors le juge saisi à vérifier d’abord la consistance des soupçons et, s’il la considère comme établie, à permettre la saisie des documents relevant de l’exercice des droits de la défense et incriminant l’avocat. En d’autres termes, les moyens au soutien de la contestation sont en cette hypothèse plus nombreux [8] que lorsque l’autorisation a été initialement donnée sur le fondement de raisons plausibles de penser que l’avocat a participé à une infraction.
La décision commentée présente donc l’avantage de clarifier la situation juridique en cas de perquisition chez un avocat, motivée par l’existence de soupçons à son égard, en permettant de mieux cerner les stratégies qui peuvent être adoptées par le procureur de la République ou le juge d'instruction, d’une part, par le bâtonnier de l’ordre des avocats, d’autre part. Elle met toutefois en lumière le fait que la lettre de l’article 56-1, alinéa 2, du Code de procédure pénale est trompeuse, en ce qu’elle ne fait aucune allusion au caractère saisissable des documents relevant de l’exercice des droits de la défense et constituant des éléments établissant une suspicion pesant sur l’avocat concerné par la perquisition. Cette solution prétorienne devrait donc être examinée par le législateur et figurer dans ce texte. On observera d’ailleurs que la Cour européenne des droits de l’Homme ne la considère pas comme contraire à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme mais qu’elle exige que le législateur encadre strictement toutes les mesures qui restreignent le secret professionnel des avocats parce que ces derniers occupent « une situation centrale dans l’administration de la justice » [9].
[1] V. infra, 2.
[2] C. proc. pén., art. 56-1 N° Lexbase : L1314MAW, al. 1er, première phrase.
[3] C. proc. pén., art. 56-1, al. 1er, troisième phrase.
[4] Cass. crim., 12 mars 1992, n° 91-86.843 N° Lexbase : A0745AB9.
[5] Voir également, Cass. crim., 14 novembre 2001, n° 01-85.965 N° Lexbase : A4801CHB ; Cass. crim., 18 juin 2003, n° 03-81.979, F-P+F N° Lexbase : A0422C9I, Bull. crim. 2003, n° 129.
[6] Ou du moins une plus claire affirmation.
[7] Cass. crim., 5 mars 2024, n° 23-80.110, FS-B N° Lexbase : A83362R8 ; C. Fonteix, Perquisition au cabinet : elle peut conduire à la saisie de documents exclus du champ de la relation « avocat-client », sans qu’il soit besoin d’examiner le critère – toujours en vigueur – tiré des soupçons de participation de l’avocat à la commission d’une infraction, Lexbase Avocats, mai 2024 N° Lexbase : N9245BZG ; Procédures, 2024, comm. 126, obs. A.-S. Chavent-Leclère.
[8] Contestation de la réalité des soupçons et du caractère saisissable des documents.
[9] CEDH, 24 juillet 2008, Req. n° 18603/03, aff. André c. France N° Lexbase : A8281D9L, n° 42.
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Réf. : CE, 1°-4° ch. réunies, 7 mars 2025, n° 495227, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A664163D
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N2164B3K
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par Lionel Inrep, notaire associé et Eléonore Chirossel, Lab Cheuvreux
Le 30 Avril 2025
Mots clés : intervention foncière • préemption • notification de la décision • notaires • déclaration d'intention d'aliéner
Le notaire du vendeur du bien objet de la préemption doit être regardé comme ayant reçu mandat lorsqu'il signe la déclaration d'intention d'aliéner.
Comme tout acte administratif individuel, les décisions de préemption doivent être notifiées à leur destinataire pour être exécutoire. Cette notification déclenche, en plus, le délai de recours contentieux. Ce qui fait la particularité des décisions de préemption c’est qu’elles doivent être notifiées à leur destinataire dans le délai de deux mois suivant réception de la déclaration d’intention d’aliéner, à peine d’illégalité [1] qui justifierait ainsi la nullité de la vente consentie au profit du titulaire du droit de préemption [2]. La régularité des notifications de décisions de préemption est donc cruciale.
Telles qu’écrites dans la loi « ALUR », les règles de notification des décisions de préemption suscitaient plusieurs interrogations que le Conseil d’État dissipe dans un arrêt rendu le 7 mars dernier.
I. Les interrogations après la loi « ALUR »
Avant la loi « ALUR » (loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, pour l’accès au logement et un urbanisme rénové N° Lexbase : L6496MSE), les textes étaient silencieux sur les destinataires des notifications des décisions de préemption.
Les formulaires de déclaration d’intention d’aliéner (DIA) établis selon le modèle prévu par l’article A. 213-1 du Code de l’urbanisme N° Lexbase : L4958H87 permettaient d’indiquer à qui, du propriétaire ou de son mandataire chez lequel il fait élection de domicile, la décision de préemption devait être notifiée.
Lorsque cette case était remplie, c’était bien la notification de la décision de préemption au seul destinataire mentionné qui conditionnait la légalité de la décision de préemption [3]. Ainsi, lorsque la DIA indiquait uniquement une notification au notaire, une notification à l’adresse du vendeur ne pouvait faire courir le délai de recours contentieux [4]. Réciproquement, dans le cas d’une DIA remplie par un mandataire mais précisant que les notifications devaient être faites à l’adresse du propriétaire, toute notification à une autre adresse, y compris celle du mandataire, était irrégulière [5].
En l’absence de cette précision dans la déclaration d’intention d’aliéner, le Conseil d’État a jugé que la signature de la DIA par le notaire permettait de le regarder comme mandataire du propriétaire ; ainsi une notification au seul notaire était valide et faisait courir le délai de recours contre cette décision [6].
Depuis la réforme de 2014, l’article L. 213-2 du Code de l’urbanisme N° Lexbase : L0202LNS impose que la décision de préemption soit « notifiée au vendeur, au notaire et, le cas échéant, à la personne mentionnée dans la déclaration d'intention d'aliéner qui avait l'intention d'acquérir le bien ».
Pris à la lettre, le texte impose une double notification (voire une triple, lorsque l’acquéreur pressenti est mentionné dans la DIA).
La question qui se pose toutefois est de savoir si le texte impose une double notification même lorsque le notaire est le mandataire du propriétaire vendeur. L’interrogation est d’autant plus forte que jusqu’en 2021, les formulaires prévoyaient toujours une case dédiée à l’indication du destinataire de la décision de préemption.
Une réponse ministérielle de 2017 a indiqué dans ce cas que « la formalité de notification accomplie à l'égard du mandataire sera réputée accomplie tant à l'égard du vendeur que de son notaire, sous réserve que soit jointe à la déclaration d'intention d'aliéner la copie du mandat donné au notaire et que le propriétaire vendeur y ait fait élection de domicile » [7].
Ainsi, avec la loi « ALUR », la solution qui prévalait jusqu’à alors n’a pas été remise en cause dans son principe, mais a semblé être soumise à des conditions plus strictes. En effet, selon la doctrine administrative, la validité d’une telle notification au seul notaire supposait (i) qu’une copie du mandat soit jointe (exigence mentionnée dans les différentes versions du formulaire Cerfa qui précisent que lorsque le signataire de la DIA est autre que le propriétaire, il convient de joindre à la déclaration une copie du pouvoir ou du mandat) et (ii) que le propriétaire vendeur y ait fait élection de domicile.
Cette position ne semblait pas pleinement partagée par la jurisprudence, qui, comme avant la loi « ALUR », ne s’interrogeait pas sur l’existence d’un mandat annexé à la DIA et continuait de juger que, lorsque la rubrique I du formulaire de la DIA était remplie et qu’ainsi le propriétaire faisait élection de domicile chez le notaire chargé de la vente, seule la notification au notaire suffisait [8] ; une notification aux vendeurs dans ce cas n’était pas requise [9].
Allant plus loin, la CAA de Bordeaux a jugé expressément qu’« aucune disposition légale ou réglementaire n’impose dans ce cas la production d’un mandat en annexe du formulaire d’intention d’aliéner, une telle obligation ne pouvant résulter d'une réponse ministérielle » [10].
Pour autant, le nouveau formulaire Cerfa applicable à partir de 2023 continue de préciser que lorsque le signataire est autre que le propriétaire, il convient de joindre à la déclaration une copie du pouvoir ou du mandat.
Ainsi, le doute était toujours permis et l’arrêt du Conseil d’État était très attendu par la pratique.
II. La confirmation de la validité d’une notification au seul notaire, mandataire du vendeur
L’arrêt du Conseil d’État rendu le 7 mars 2025 met fin à toute incertitude. En l’espèce, se posait la question de la tardiveté d’un recours exercé par une partie des indivisaires enregistré le 29 juin 2020 contre une décision de préemption notifiée au seul notaire le 9 avril 2018, soit plus de deux ans auparavant (ainsi que l’explique le rapporteur public Monsieur Thomas Janicot dont les conclusions sont accessibles sur ArianeWeb, cette durée s’expliquerait, selon les dires des parties, qu’elles n’étaient pas informées par leur notaire de la purge du droit de préemption d’autant qu’en ayant proposé en priorité le bien à la commune, elles pensaient l’avoir fait).
Dans la droite ligne de la jurisprudence des juges du fond et la doctrine administrative, le Conseil d’État accepte que lorsque le notaire est le mandataire du propriétaire, il n’y a pas lieu pour le titulaire du droit de préemption de procéder à une double notification. Selon lui, si, en principe, « la décision du titulaire du droit de préemption d'acquérir un bien doit faire l'objet d'une publication et être notifiée à la fois au vendeur du bien objet de la préemption et à son notaire ainsi que, le cas échéant, à la personne mentionnée dans la déclaration d'intention d'aliéner qui avait l'intention d'acquérir le bien (…), ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le vendeur donne mandat à un tiers pour recevoir cette notification pour son compte ». Il pérennise ainsi la solution établie en 2006.
Les conclusions du rapporteur public mettent en lumière les différents arguments au soutien de cette solution.
Tout d’abord, il souligne que les travaux parlementaires révèlent que le but de ce texte est avant tout « l’information de toutes les parties concernées » avec un renforcement de la place du notaire, chargé de transmettre la décision de préemption aux titulaires de droits d'emphytéose, d'habitation ou d'usage, aux personnes bénéficiaires de servitudes, aux fermiers et aux locataires mentionnés dans la déclaration d'intention d'aliéner. Il souligne que ces débats ne caractérisent pas une volonté du législateur de remettre en cause la théorie du mandataire. Dès lors, selon lui, la règle de double notification de l’article L. 213-2 n’interdit pas une notification au seul notaire, dans l’hypothèse où il est le mandataire du vendeur.
Le deuxième argument tient à ce que la théorie du mandat permet classiquement à la personne ayant la qualité de mandataire d’être destinataire des correspondances de l’administration à son mandant. Il souligne que les formulaires de renseignement de la DIA jusqu’en 2021 prévoyaient toujours une case permettant d’indiquer le destinataire de la décision de préemption et que la pratique est bien établie sur ce point.
Enfin, il souligne que la présence d’un mandataire permet d’éviter certaines difficultés pratiques, liées à la pluralité éventuelle de propriétaires, comme dans le cas d’une indivision successorale.
Le Conseil d’État juge explicitement que « la signature de la déclaration d'intention d'aliéner par le notaire établit, en principe, en l'absence d'expression d'une volonté contraire du vendeur, le mandat confié par le vendeur au notaire pour l'ensemble de la procédure se rapportant à l'exercice du droit de préemption mentionné à l'article L. 213-2 du Code de l'urbanisme et, à ce titre, en particulier, pour la notification éventuelle de la décision du titulaire du droit de préemption ». Il reprend ainsi complètement les principes établis dans son arrêt « Commune de Mane » et confirme ainsi la position de la CAA de Douai qui avait jugé que « Le notaire, qui signe la déclaration d'intention d'aliéner concernant le bien litigieux, doit être regardé comme le mandataire du vendeur. Par suite et dès lors que la déclaration d'intention d'aliéner ne mentionne pas expressément, comme elle peut le faire, à qui - du propriétaire ou de son mandataire - la décision de préemption doit être notifiée, cette notification au notaire fait courir le délai de recours contentieux à l'encontre du propriétaire » [11]. Sont ainsi sécurisées les notifications de préemption au seul notaire, lorsqu’il est mandataire du propriétaire.
Comme l’indique le rapporteur public, « la présomption de représentation qu’emporte la signature de la DIA (…) semble donc toujours être de mise et couvre à la fois cette signature proprement dite et la réception de la décision de préemption. Ces deux actes nous semblent en effet former un continuum procédural qui place le notaire comme unique point de contact de l’administration » ; ce « continuum » inclut d’ailleurs la réception des demandes de pièces complémentaires et de visite du bien [12].
Il convient toutefois, pour les titulaires du droit de préemption, de bien s’assurer que le propriétaire n’a pas restreint le mandat confié au notaire, notamment en vérifiant qu’il n’est pas indiqué dans la case « observations », que les décisions de préemption doivent lui être adressées. Cela étant, en pratique, le mandat pour recevoir la vente implique classiquement la possibilité de purger le droit de préemption urbain et une déclaration expresse contraire du propriétaire est extrêmement rare.
Relevons que le rapporteur public souligne que cette présomption se justifie également par la qualité particulière attachée aux fonctions des notaires, officiers ministériels.
En effet, il existe une pratique assez répandue confiant à des intermédiaires autres que les notaires le soin de collecter les pièces nécessaires à un dossier de vente en ce compris l’établissement et l’envoi de la déclaration d’intention d’aliéner. Dès lors, lorsque le mandataire n’est pas notaire, il demeure nécessaire que les autorités compétentes s’assurent que la personne qui a signé la DIA et dont les coordonnées sont renseignées dans la rubrique H détient bien un mandat confié par le vendeur ainsi que le rappelle le rapporteur public. En effet, le Conseil d’État a récemment rappelé qu’était illégale une préemption sur une DIA souscrite par une personne qui, à la date de cette déclaration, n’était pas propriétaire du bien [13]. En allant plus loin, une décision de préemption sur une DIA souscrite par une personne qui n’a pas le pouvoir d’engager le propriétaire du bien serait également illégale.
[1] CE, 15 février 2002, n° 230015 N° Lexbase : A7297AYW.
[2] Cass. civ. 3, 5 juin 2 3007, n° 06-14.407 N° Lexbase : A5594DW4.
[3] CAA Nancy, 10 juin 2010, n° 09NC00542 N° Lexbase : A1885E39.
[4] CAA Nantes, 1er juillet 2016, n° 15NT01302 N° Lexbase : A9198RWL.
[5] Cass. civ. 3, 5 juin 2007, n° 06-14.407 N° Lexbase : A5594DW4.
[6] CE, 30 juin 2006, n° 274062 N° Lexbase : A0862DQY.
[7] QE n° 92031 de M. Philippe Meunier, JOANQ 22 décembre 2015, réponse publ. 9 mai 2017, p. 3276, 14ème législature N° Lexbase : L8728LEY.
[8] CAA Douai, 10 décembre 2019, n° 18DA00847 N° Lexbase : A86293AT.
[9] CAA Versailles, 17 mai 2018, n° 15VE03830 N° Lexbase : A7781XNI ; CAA Bordeaux, 9 novembre 2022, n° 20BX02526 N° Lexbase : A28588SN.
[10] CAA Bordeaux, 12 janvier 2023, n° 21BX00306 N° Lexbase : A146688S.
[11] CAA Douai, 18 avril 2024, n° 23DA01312 N° Lexbase : A8227289.
[12] CAA Paris, 6 juillet 2023, n° 22PA03304 N° Lexbase : A431698D ; CAA Nancy, 21 février 2024, n° 20NC00969 N° Lexbase : A97802NK.
[13] CE, 1er mars 2023, n° 462877 N° Lexbase : A30019GA.
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