Réf. : Arrêté du 31 janvier 2025, autorisant la mise en œuvre d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « Portalis - Portail des juridictions » N° Lexbase : L3162MSW
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N1623B3I
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par Yann Le Foll
Le 05 Février 2025
Un arrêté du 31 janvier 2025 autorise la mise en œuvre d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « Portalis - Portail des juridictions ».
Il a pour première finalité l'enregistrement d'informations et de données à caractère personnel relatives aux procédures civiles et sociales relevant de la compétence des tribunaux judiciaires, à celles relevant de la compétence des conseils des prud'hommes, à celles relevant de la compétence des tribunaux paritaires des baux ruraux et à l'ensemble de ces procédures lorsqu'elles sont portées devant la juridiction du second degré.
Il doit ensuite permettre l'enregistrement des dépôts des actes pour lesquels la loi ou le règlement prévoient le dépôt auprès des juridictions civiles comme formalité.
Il a aussi pour objectif la communication électronique avec les partenaires de justice, notamment les notaires, les commissaires de justice, les experts, les médiateurs et les conciliateurs.
Il permettra enfin l'exploitation des données à des fins statistiques et de pilotage.
Concernant les parties, les catégories d'informations et de données à caractère personnel enregistrées dans le traitement sont notamment les données relatives à l'identité et aux coordonnées des personnes physiques mentionnées dans les décisions de justice, les données relatives à la situation administrative des personnes physiques, les données relatives à la vie personnelles ou professionnelles.
Peuvent y accéder les magistrats, certains agents de greffe et agents de catégorie A ou B et les adjoints administratifs, les juges non professionnels et certains attachés de justice.
Les données sont conservées pendant une durée d'une année à compter, respectivement, de la clôture du dossier de procédure dans l'enregistrement d'informations et de données à caractère personnel précité. Ensuite, les données ne sont accessibles qu'au directeur de greffe de la juridiction pour une durée de : quatre ans s'agissant des données relatives aux procédures judiciaires, à l'exception de celles contenues dans le répertoire général des affaires ; vingt-neuf ans s'agissant des données contenues dans le répertoire général des affaires ; neuf ans s'agissant des données contenues dans le registre de dépôt des actes.
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Réf. : CE, 5°-6° ch. réunies, 20 décembre 2024, n° 488061, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A99196NP
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N1511B3D
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par Yves Avril, Docteur en Droit, Avocat, Ancien Bâtonnier
Le 05 Février 2025
Mots clés : Avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation • responsabilité civile professionnelle • consultation • succès d'un recours • chances manifestes d'aboutir
Dans un arrêt rendu le 20 décembre 2024, la Haute juridiction a dit pour droit que l’avocat ayant dissuadé son client de poursuivre une action dont il n’est pas établi qu’elle avait eu de chances manifestes d'aboutir ne peut voir engagée sa responsabilité civile professionnelle.
Aucun texte légal ou réglementaire ne donne une définition de la consultation juridique. On peut toutefois appeler à l’aide deux réponses ministérielles [1]. Par une approche identique le Conseil national des Barreaux a adopté une définition lors de son assemblée générale du 18 juin 2011 [2]. La consultation consiste en une prestation intellectuelle personnalisée « tendant, à la fourniture d’un avis ou d’un conseil fondé sur l’application d’une règle de droit, en vue notamment, d’une éventuelle prise de décision ».
Des auteurs de référence [3] soulignent que l’avocat consultant est déjà présent dans l’ancien barreau et que la tâche de consultation était pratiquement aussi importante que celle de procédure ou de plaidoirie. Cette activité, dans le cadre de l’accès au droit, est suffisamment nécessaire au public pour que des consultations gratuites soient offertes par les avocats, sous l’égide de leur Barreau, au public. Les conseils départementaux d’accès au droit (CDAD) proviennent de la reconnaissance de l’accès au droit comme un principe fondamental de la citoyenneté exprimé dès 1991 dans la loi relative à l’aide juridique [4].
L’arrêt rendu en chambres réunies par le Conseil d’État présente ainsi un intérêt certain en déterminant les contours de la responsabilité de l’avocat consultant.
I. Les faits
Ils correspondent à un point de droit relevant de dispositions nouvelles que devait appréhender une avocate au Conseil d’État et à la Cour de cassation, très expérimentée. Il s’agissait d’apprécier les droits d’un notaire qui, avec une associée, avait obtenu, grâce à loi « Macron » [5] du 6 août 2015, par tirage au sort, l’attribution d’un office notarial dans une commune de l’Aveyron.
L’article 45 de l’ordonnance du 28 juin 1945 [6] prévoit que les associés nommés par arrêté ministériel (il était du 20 octobre 2017) sont déclarés d’office démissionnaires sauf cas de force majeure s’ils ne prêtent pas serment dans un délai fixé.
L’associée n’ayant pas voulu prêter serment, un arrêté du ministre de la Justice du 8 janvier 2018 déclarait les deux associés démissionnaires d’office, leur société dissoute par voie de conséquence et supprimait l’office de notaire.
Le 19 mars 2018 une SCP d’avocats aux Conseils et à la Cour de cassation saisissait à titre conservatoire le tribunal administratif de Toulouse, mais faisait connaître, par un courriel du 28 mai, après une analyse sur 6 pages, que « de quelque point de vue que l’on se place, les recours envisagés contre et à la suite de l’arrêté du 8 juillet 2018 ont peu de chances de prospérer ». Après un dernier échange avec son client, l’avocate ajoutait que les chances d’un succès du recours lui paraissaient nulles.
Le notaire évincé saisissait, quatre ans plus tard, mais en temps non prescrit, le Conseil de l’Ordre des avocats au Conseil d’État et la Cour de cassation qui émettait un avis négatif. Le candidat évincé saisissait ensuite d’une requête le Conseil d’État en sollicitant la condamnation de l’avocate à lui payer 4 530 000 euros représentant une perte de chance à hauteur de 90 %, préjudice engendré par un avis erroné de l’avocat.
Par un arrêt du 20 décembre 2024, le Conseil d’État écartait la demande en considérant que l’avocate n’avait pas manqué à son devoir de conseil en dissuadant son client de poursuivre l’action.
II. L’analyse de la décision
Elle oblige d’abord à mettre en perspective la responsabilité particulière de l’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation pour voir si la solution est transposable à l’ensemble des avocats français.
A. Le régime de la responsabilité des avocats au Conseil
Cette responsabilité est peu connue. Dans un manuel consacré à la responsabilité des avocats on n’y trouve que de brèves allusions [7]. Le régime est certes ancien [8], mais particulier. Le contentieux relève de la compétence exclusive du Conseil d’État et de la Cour de cassation en premier et dernier ressort avec une saisine préalable obligatoire du Conseil de l’ordre qui émet un avis qui ne s’impose pas au plaideur.
Les tentatives pour faire déclarer ce régime hors du commun contraire à la Constitution ont échoué [9]. Ce régime exceptionnel reste une terra incognita ; cela s’explique parce que les exemples de mise en cause ne sont pas légion. On peut citer un exemple récent devant la Cour de cassation [10]. Le rapporteur [11] dans la procédure qui est commentée estime qu’il vient une affaire environ par an devant le Conseil d’État. Les actions portent souvent sur un défaut de diligence, par exemple l’omission de notifier le pourvoi à l’auteur d’un recours ou à son bénéficiaire [12]. Un auteur de référence met en perspective le nombre d’affaires et la rareté du contentieux de la responsabilité [13]. Un manquement au devoir de conseil peut également permettre de retenir la responsabilité lorsque l’avocat omet de produire une pièce au soutien des prétentions de son client [14]. L’appréciation de la responsabilité va alors se faire en vérifiant l’existence de trois éléments cumulatifs : la faute, le préjudice et le lien de causalité, approche qui paraît commune aux professionnels du droit [15]. Quand il faut apprécier le préjudice le juge se réfère à une méthode complexe, mais bien appréhendée par la doctrine [16] et la jurisprudence [17], la théorie de la perte de chance.
B. L’appréciation portée par le Conseil d’État
Pour apprécier la responsabilité de l’avocat, ainsi que le rapporteur l’a souligné [18], le manquement invoqué a un caractère inédit : une consultation déficiente. L’avis du rapporteur invite à ne pas reconstituer un jugement de manière fictive (ce qui est impossible) mais à vérifier que les chances de succès étaient sérieuses : « Il ne saurait donc être envisagé d’appliquer à deux reprises, pour la caractérisation de la faute, puis pour l’évaluation du préjudice, la mesure favorable de la « chance sérieuse » ».
Le Conseil d’État, statuant en chambres réunies, a voulu donner à l’affaire qui lui était soumise une réponse de principe : « La responsabilité est recherchée à raison d’une consultation donnée sur les chances de succès d’un recours, cette responsabilité n’est susceptible d’être engagée que si l’avocat a failli aux devoirs de sa charge en dissuadant son client d’entreprendre ou de poursuivre une action qui avait des chances sérieuses d’aboutir ».
Le Conseil d’État retient « qu’il n’est pas établi que l’action aurait eu des chances manifestes d’aboutir » et qu’en outre le client, « en sa qualité de notaire et s’agissant de l’exercice de sa profession, était en mesure de décider de façon éclairée, s’il entendait poursuivre cette action ou y renoncer ».
La demande est écartée et la demande de la SCP d’avocats, au titre d’une indemnisation des frais exposés et non compris dans les dépens est également rejetée au visa de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative N° Lexbase : L1303MAI.
Il faut en retenir que c’est au demandeur de prouver qu’il existait des « chances manifestes d’aboutir ». Échouant dans l’administration de la preuve qui lui incombe, il voit sa demande rejetée.
Il n’est pas inintéressant de voir si cette décision, dans un domaine méconnu, se démarque de la responsabilité des avocats devant les juridictions civiles, contentieux infiniment plus répandu.
III. Le rapprochement avec la jurisprudence civile
1. Comme la jurisprudence de la Cour de cassation, le Conseil d’État ne fait pas abstraction de la fonction de l’avocat aux Conseils et de sa déontologie [19], codifiée quelques mois avant l’avocat.
Dans son arrêt, le Conseil d’État vise les obligations de compétence, de dévouement, de diligence et de prudence (p. 2 ; §4). Celles-ci figurent bien dans le code de déontologie (article 4). Sous une forme identique ces obligations sont également celles de l’avocat. Exprimées pour la première fois dans l’article 3 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005, relatif aux règles de déontologie de la profession d'avocat N° Lexbase : L6025IGA, elles ont été reprises dans le nouveau décret n° 2023-552 du 30 juin 2023, portant Code de déontologie des avocats N° Lexbase : Z76354UW, sous le même article.
2. L’avocat au Conseil n’a pas à se faire dicter sa consultation et plus généralement sa conduite par un client. « En aucune circonstance (il) ne peut renoncer à son indépendance… » (art. 7). Quant à l’avocat il trouve dans les termes mêmes de son serment une obligation d’indépendance que le code de déontologie vient lui rappeler à deux reprises (art. 2 et 3). Au reste le serment de l’avocat et de l’avocat aux Conseils est constitué d’une formule identique [20].
3. Le Conseil d’État place en outre les devoirs de l’avocat aux Conseils dans un cadre institutionnel en indiquant (p. 3 ! 5) : « que la responsabilité n’est susceptible d’être engagée que si l’avocat a failli aux devoirs de sa charge ». La jurisprudence à la Cour de cassation, en se prononçant sur la responsabilité civile de l’avocat, ne dit rien d’autre quand elle rappelle qu’en tant qu’auxiliaire de justice, il doit satisfaire aux devoirs de sa déontologie [21].
4. Le Conseil d’État admet la pertinence d’une consultation négative pour des chances faibles (p. 3 ; §6).
La jurisprudence de la Cour de cassation admet que les chances minimes entraînent un principe d’indemnisation [22]. Ces deux solutions traduisent-elles une différence d’appréciation ? On ne le pense pas. En effet la question de la qualification des chances ne se pose que si la faute a été préalablement retenue. Si elle est retenue, on peut penser que toutes les gammes des qualifications vont perdurer, chances sérieuses, chances raisonnables, chances réelles, chances faibles, chances minimes. La faute étant écartée, point n’était besoin d’avancer davantage.
5. Dans ses conclusions le rapporteur indique que la consultation négative est une marque de désintéressement puisque l’avocat a un intérêt financier à introduire l’action, ce qu’il fera après avoir proposé à son client une convention de mission de frais et honoraires que la « loi Macron » lui impose. Ce devoir de désintéressement est applicable à l’avocat aux Conseils [23] comme à l’avocat [24].
6. Le Conseil d’État, pour écarter la faute de l’avocate, retient que le client « en sa qualité de notaire et s’agissant de l’exercice de sa profession, était en mesure de décider, de façon éclairée, s’il entendait poursuivre cette action ou y renoncer » (p. 3 ; §6). Est-ce ici une appréciation du devoir de conseil ? On sait que pour l’avocat il s’agit d’un devoir absolu. Par une motivation constante de la jurisprudence civile « les compétences personnelles du client ne dispensent pas l’avocat de son devoir de conseil ». Poussé à l’extrême, le principe permettra de sanctionner intégralement l’avocat, même si sa cliente est elle-même avocate [25].
En réalité l’on ne voit ici aucun attendrissement au devoir absolu de conseil. La référence aux compétences du client ne s’exprime pas pour le contenu du conseil donné, mais pour la conduite à tenir après que ce conseil ait été prodigué par l’avocat.
7. Enfin les frais non compris dans les dépens font l’objet d’une appréciation identique.
Le texte qui sert de référence au juge n’est pas le même. Devant la juridiction administrative la référence est celle de l’art. L. 761-1 du Code de justice administrative. Devant la juridiction civile la référence est celle de l’article 700 du Code de procédure civile N° Lexbase : L5913MBM. Dans un cas comme dans l’autre le juge tient compte « de l’équité ou de la situation économique des parties ». Il admet une indemnisation ou l’écarte, sans motiver la solution qu’il adopte.
Ici le Conseil d’État écarte l’indemnité sollicitée par les avocats aux Conseils. On peut penser toutefois que ceux-ci ont consacré du temps à préparer leur défense si l’on rappelle que la demande, introduite plus de quatre ans après la consultation critiquée portait sur 4 530 000 euros. La demande d’une allocation pour frais non compris dans les dépens est écartée, ce qui est une solution fréquente. Elle est à rapprocher des appréciations de la Cour de cassation, tant en matière de responsabilité civile que de taxation des honoraires. On peut citer ici le cas d’un avocat qui a perçu 2 500 euros de frais et honoraires pour une consultation négative, mais dont la demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile devant la Cour de cassation a été écartée, après un arrêt de non-admission du pourvoi [26], ce qui aboutit dans les faits à le priver de toute rémunération.
Quant aux dommages-intérêts pour procédure abusive, la jurisprudence applique ici les critères les plus sévères de l’abus de droit. Dans le meilleur des cas, et encore ce cas est rare, l’avocat pourra obtenir l’euro symbolique compte tenu des moyens employés par son adversaire [27] : « La particulière volatilité des griefs invoqués avait imposé à l’avocat d’assurer sa défense dans des conditions singulièrement instables, lui causant troubles et tracas de sorte que ce comportement devait être considéré comme fautif » [28].
Ainsi, pour l’avocat, voir sa responsabilité mise en cause injustement ou les honoraires contestés sans une juste raison, apparaît aux juges comme un risque normal du métier.
Néanmoins, au moment de rédiger une consultation, la plume de l’avocat ne doit pas trembler. Il doit s’exprimer en conscience et en droit car l’écueil est difficile à parer. S’il encourage le client et que celui-ci connaît l’échec, l’avocat ne sera pas à l’abri d’une action en responsabilité pour un manquement au devoir de conseil.
Confronté à cette alternative, l’avocat peut se demander si, outre l’étude du droit, il ne devrait pas apprendre les arts du cirque pour employer la conduite adaptée, celle d’un funambule sur un fil.
[1] QE n° 24085 de M. Alain Fouché, JO Sénat 27 juillet 2006 p. 1991, réponse publ. 7 septembre 2006 p. 2356, 12ème législature N° Lexbase : L9980IPC ; Rép. Min. n° 66510, JOAN Q, 1ER mars 1993, p. 182.
[2] CNB, délibération AG, 18 juin 2011, confirmée par délibération AG, 15 mai 2020.
[3] S. Bortoluzzi, D. Piau, T. Wickers, Règles de la profession d’avocat, Dalloz Action, 18° éd., 2025 § 631.12.
[4] Loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l’aide juridique (art. 53 à 61) N° Lexbase : L8607BBE, modifiée par la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, de modernisation de la justice du XXIe siècle N° Lexbase : L1605LB3.
[5] Loi n° 2015-990 du 6 août 2015, pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques N° Lexbase : L4876KEC.
[6] Ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945, relative à la discipline des notaires et de certains officiers ministériels N° Lexbase : L7650IGG.
[7] Y. Avril, La responsabilité des avocats, Dalloz Référence 2021.
[8] Ordonnance du 10 septembre 1817.
[9] Const. const. décision n° 2024-1104 QPC du 26 septembre 2024 N° Lexbase : A9918544.
[10] Cass. civ. 1, 5 septembre 2024, n° 23-50.003, F-D N° Lexbase : A998254H.
[11] Conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public, rapport n° 488061.
[12] CE, 6 p jjs 30 décembre 2010, n° 3267-38.
[13] R. Bigot, L’imprudence de l’avocat aux Conseils dans l’écoulement du temps in Lexbase Hebdo édition Professions n° 282, 2019 N° Lexbase : N8190BXM.
[14] CE 6e jjs 27 octobre 2016, n° 37822.
[15] Pour les notaires, Dir. Ph. Le Tourneau, Droit de la responsabilité et des contrats, Régimes d’indemnisation, Dalloz Action 2023, § 3324-91.
[16] H. Méral, Préf. J.S. Borghetti, La perte de chance en droit privé, essai critique, Édition Panthéon-Assas 2024.
[17] CE, 6 juin 2001, n° 196052 N° Lexbase : A6518ATL.
[18] Ibidem, conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public.
[19] Pour l’avocat aux Conseils, décret n° 2023-146 du 1er mars 2023, relatif au Code de déontologie des avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation N° Lexbase : L0638MH4. Pour l’avocat, décret n° 2023-552 du 30 juin 2023, portant Code de déontologie des avocats.
[20] Loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, art. 3 ; décret n° 91-1125 du 28 octobre 1991 N° Lexbase : L1713IRU, art. 31.
[21] Cass. civ. 1, 23 novembre 2004, n° 03-15.090, 03-16.565 N° Lexbase : A0372DEI, Bull. Civ. I, n° 281, D. 2005, 2857, note J. Moret-Bailly, RTD Civ., 2005, Chron.. 371, obs. J. Hauser.
[22] Cass. civ. 1, 16 janvier 2013, n° 12-14.439 N° Lexbase : A4084I3N, Bull. Civ. I, n° 2.
[23] Art. 4 et 10 de son code de déontologie.
[24] Art. 3 de son code de déontologie.
[25] Cass. civ. 1, 20 novembre 2012, n° 11-15.270 N° Lexbase : A1650IZ7.
[26] Cass. civ. 2, 7 novembre 2024, n° 23-13.101 [LXB=A85096EU].
[27] Cass. civ. 1, 16 novembre 2016, n° 15-23.548 N° Lexbase : A2442SIB.
[28] Cass. civ. 1, 16 novembre 2016, n° 15-23.548, préc.
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Réf. : Décret n° 2024-1251 du 30 décembre 2024, portant diverses mesures de simplification du droit de la commande publique N° Lexbase : L9879MRC
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Le 21 Février 2025
Mots clés : marchés publics • simplification • groupements d'opérateurs • bons de commande • accords cadres
Le décret n° 2024-1251 du 30 décembre 2024, portant diverses mesures de simplification du droit de la commande publique, apporte des modifications au Code de la commande publique afin, notamment, de simplifier l'accès des entreprises à la commande publique et d'assouplir les règles d'exécution financière des marchés publics. Il fait suite aux rencontres de la simplification initiées à l’automne 2023, par Bruno Le Maire, alors ministre de l’Économie, des Finances, de la Souveraineté industrielle et numérique, et Olivia Grégoire, alors ministre déléguée chargée des Petites et Moyennes Entreprises, du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme. Ces rencontres visaient à recueillir les contributions de chefs d’entreprises français pour faciliter, améliorer, simplifier leur vie dans la compréhension des normes, dans leurs relations avec les administrations, dans leurs démarches du quotidien. Pour faire le point sur les dispositions du décret que l’on pourra juger au choix optimistes ou audacieuses, Lexbase Public a interrogé Jean-Marc Peyrical, Maître de conférence en droit public, responsable de la Chaire Achat Public de l’Université Paris Saclay*.
Lexbase : Quels besoins ressortaient de la consultation publique de novembre 2024 ?
Jean-Marc Peyrical : On peut tout d’abord souligner le succès d’une telle démarche, qui a provoqué la réception de centaines de contributions dont deux tiers en provenance d’acheteurs publics.
Comme il fallait s’y attendre, on ressent un fort besoin de simplification et d’allègement des procédures tant de la part de ces derniers que de celle des opérateurs économiques… ce qui peut se comprendre alors que le Code de la commande publique ne cesse de s’enrichir -s’alourdir diraient certains- de dispositions qui n’ont pas toutes un lien direct avec l’acte d’achat proprement dit.
Mais les positions ne sont pas toujours unanimes. On peut prendre pour exemple le fameux seuil de 100 000 euros HT pour les marchés de travaux (les marchés de travaux, dont la valeur estimée est inférieure à 100 000 euros hors taxes, sont dispensés de procédure jusqu'au 31 décembre 2025 suite à la publication du décret), très apprécié par bien des acheteurs, les petites communes par exemple, et décrié par d’autres qui mettent en avant le risque d’atteinte aux principes fondamentaux de la commande publique.
N’oublions pas que les textes -finalement adoptés en décembre- à l’origine de cette consultation sont eux-mêmes issus des assises et des rencontres de la simplification de 2023, où de nombreuses propositions ont été faites en faveur de la simplification des démarches et procédures, d’accès à la commande publique ou encore de respect des délais de paiement.
Il y a donc une vraie attente de l’ensemble des acteurs de la commande publique sur cet objectif - utopique?- de simplification, alors que la Cour des comptes européenne a, dans son rapport d’octobre 2023 [1] relatif aux 10 ans de mise en application des Directives marchés publics de 2014 [2], dénoncé, outre la diminution de la concurrence dans le domaine des marchés publics, l’allongement de moitié de la durée des procédures de passation sur cette période.
Lexbase : Quelles sont les principales mesures du décret n° 2024-1251 touchant aux procédures de passation des marchés ?
Jean-Marc Peyrical : Au-delà de la pérennisation pour un an supplémentaire du seuil susvisé de 100 000 euros pour les travaux qui fait d’ailleurs l’objet d’un autre décret [3], on peut de prime abord avoir l’impression de mesures sans grande importance alors que, certaines d’entre elles tout au moins, apportent de vrais assouplissements.
Je pense notamment à celle de la possibilité de modifier la composition des groupements d’opérateurs en cours de passation dans le cadre de procédures incluant une ou plusieurs phases de négociation ou de dialogue (CCP, art. R. 2142-3 N° Lexbase : L0438MSZ et R. 2142-26 N° Lexbase : L0440MS4, proscrite jusqu’à présent alors que, en fonction de la durée des procédures, un groupement peut être amené à évoluer pour diverses raisons. Dommage qu’il soit, du fait du droit européen, limité aux procures de négociation et de dialogue ; mais, couplé avec l’impossibilité, sauf si cela se justifie par la bonne exécution du marché, d’imposer aux opérateurs une forme de groupement déterminée représente une vraie évolution en faveur de ces derniers.
L’autre souplesse -mais on se situe davantage dans l’exécution- qui me paraît vertueuse est celle qui permet pour les accords-cadres multi-attributaires de passer d’un mécanisme de bons de commande à la passation de marchés subséquents (CCP, art. R. 2162-2 N° Lexbase : L0442MS8), si tant est que cela ait été prévu dans les documents de la consultation, les critères d’analyse des bons de commande mis en concurrence devant, en outre, se concentrer sur les conditions d’exécution des prestations.
Saluons également l’accès favorisé des petites et moyennes entreprises aux marchés globaux, des marchés de partenariat et des contrats de concession (20 % minimum du montant prévisionnel du marché de partenariat hors coût de financement, sauf lorsque la structure économique du secteur concerné ne le permet pas) (CCP, art. R. 2213-5 N° Lexbase : L0436MSX) et le relèvement à 300 000 euros HT le seuil de dispense de publicité et de mise en concurrence pour les marchés innovants de défense ou de sécurité (CCP, art. R. 2322-16 N° Lexbase : L0437MSY).
Lexbase : Et celles concernant l’exécution financière du marché ?
Jean-Marc Peyrical : Du déclenchement unifié des délais de paiement dans les marchés de travaux et de maîtrise d’œuvre (CCP, art. R. 2192-16 N° Lexbase : L0432MSS), à la suppression de la borne de fin de remboursement des avances dans les marchés à tranches (CCP, art. R. 2391-10 N° Lexbase : L0453MSL), les dispositions peuvent apparaître plus timides mais répondent certainement à des demandes notamment des opérateurs.
Lexbase : Au final, ces textes vous semblent-ils susceptibles de faciliter l’accès des entreprises à la commande publique ?
Jean-Marc Peyrical : Tout ce qui concerne l’assouplissement des règles tant de passation que d’exécution des marchés publics va dans le bon sens et ne peut qu’être positif, notamment en termes d’accès des PME-TPE… accès qui dépend aussi et surtout, ne l’oublions pas, du respect par les acheteurs publics de leurs délais de paiement.
Peut-être irons nous plus loin dans cette démarche avec la loi de simplification adoptée par le Sénat en 2024, qui va sans doute susciter des débats lors de sa discussion devant l’Assemblée nationale, tout particulièrement sur le sujet sensible de l’accès gratuit à la plate-forme PLACE pour les acheteurs locaux.
Et puis il y a le vaste chantier de la révision des Directives européennes qui s’est ouvert… pour lequel il faut espérer que le choc de simplification attendu suite au rapport déjà mentionné de la Cour des comptes européenne mais aussi au rapport « Draghi » de septembre 2024) [4] ne soit pas occulté par la problématique de plus en plus présente de l’utilisation de la commande publique dans le but de renforcer les souverainetés tant européenne que nationales.
*Propos recueillis par Yann Le Foll, Rédacteur en chef de Lexbase Public
[1] Rapport spécial 28/2023 : Marchés publics dans l’UE – Recul de la concurrence pour les contrats de travaux, de biens et de services passés entre 2011 et 2021.
[2] Directive (UE) n° 2014/23 du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014, sur l’attribution de contrats de concession N° Lexbase : L8591IZ9 ; directive (UE) n° 2014/24 du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014, sur la passation des marchés publics et abrogeant la Directive 2004/18/CE N° Lexbase : L8592IZA ; directive (UE) n° 2014/25 du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014, relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux et abrogeant la Directive 2004/17/CE N° Lexbase : L8593IZB.
[3] Décret n° 2024-1217 du 28 décembre 2024 relatif au seuil de dispense de publicité et de mise en concurrence préalables pour les marchés de travaux N° Lexbase : L9748MRH.
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Réf. : Cass. civ. 2, 9 janvier 2025, n° 22-18.726, F-D N° Lexbase : A25096QY
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N1622B3H
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par Alexandre Autrand, doctorant, Université de Limoges, école doctorale Gouvernance des Institutions et des Organisations, Observatoire des Mutations Institutionnelles et Juridiques
Le 26 Mars 2025
La Cour de cassation confirme et précise sa jurisprudence en matière de péremption d’instance dans les procédures orales, notamment en matière de contentieux de la Sécurité sociale (v. Cass. civ. 2, 10 octobre 2024, n° 22-12.882 N° Lexbase : A441859I et n° 22-20.384 N° Lexbase : A441359C). Elle réaffirme que dans ces procédures, sauf diligence particulière imposée par la juridiction, les parties n’ont pas à solliciter la fixation d’une audience pour interrompre le délai biennal de péremption. Exit donc les excès de formalisme !
Faits et procédure. Dans cette affaire, un employeur est en litige avec la CPAM, dans le cadre de la prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l’accident dont a été victime l’un de ses salariés. L’employeur décide de contester cette prise en charge, en saisissant le tribunal des affaires de la Sécurité sociale de Caen le 14 octobre 2016. Dans un jugement du 3 décembre 2018, le tribunal fait droit partiellement aux demandes de l’employeur. La caisse décide d’interjeter appel sur cette décision, le 10 janvier 2019. L’affaire se retrouve alors devant la cour d’appel de Caen, qui statue sur cette dernière dans un arrêt du 12 mai 2022. L’employeur décide alors d’attaquer cette décision devant la Cour de cassation.
Pourvoi / Appel. Le demandeur au pourvoi fait notamment grief à l’arrêt de rejeter l’exception relative à la péremption de l’instance. Après avoir rappelé la lettre de l’article 386 du Code de procédure civile N° Lexbase : L2277H44, l’employeur affirme que le rôle attribué au greffe de convoquer les parties à l’audience, ne prive pas ces dernières de la possibilité d’accomplir des diligences qui peuvent faire progresser l’instance. À titre d’illustration, l’employeur évoque la possibilité pour ces dernières de demander la fixation de l’affaire à une audience. Dans le cas d’espèce, l’employeur affirme que les parties n’ont accompli aucune diligence pendant deux ans, après la déclaration d’appel du 10 janvier 2019. Pour rejeter l’exception relative à la péremption d’instance, et ce, malgré l’absence de diligences des parties pendant plus de deux ans, les juges du fond ont considéré que lorsque la réalisation de convocations incombe au greffe, le point de départ du délai de péremption se situe au jour où ces diligences ont été accomplies, c’est-à-dire dans notre cas, le 2 avril 2021 et non le 10 janvier 2019. En statuant ainsi, l’employeur considère que la cour d’appel a violé l’article 386 du Code de procédure civile.
Solution. La Cour de cassation rejette le pourvoi de l’employeur, sur le fondement des articles 386 et 946 N° Lexbase : L8617LYS du Code de procédure civile, et L.142-1 N° Lexbase : L1769LZK et R.142-11 N° Lexbase : L6655LMG du Code de la Sécurité sociale, ainsi qu’au regard de sa jurisprudence récente en matière de péremption (Cass. civ. 2, 10 octobre 2024, n° 22-12.882 et n° 22-20.384, précité). Les juges du droit ont considéré qu’il ne peut être imposé aux parties, dans le cadre d’une procédure orale, de solliciter la fixation de l’affaire à une audience, dans le seul but d’interrompre le cours de la péremption, laquelle ne peut leur être opposée pour ce motif. Par ce motif de pur droit substitué à ceux critiqués, l’arrêt qui rejette l’exception de péremption d’instance, sans préciser qu’une diligence particulière avait été mise à la charge des parties par la juridiction, est légalement justifié.
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Réf. : CE, 1°-4° ch. réunies, 20 décembre 2024, n° 489830, mentionné aux tables du recueil Lebon Lebon N° Lexbase : A98946NR
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par Laura Picavez, Avocate à la Cour
Le 31 Janvier 2025
Mots-clés : intérêt à agir • héritier de l’usufruitier du bien affecté • absence d’intérêt • urbanisme • permis de construire
Par une décision du 20 décembre 2024, le Conseil d’État apporte de nouvelles précisions s’agissant de l’appréciation de l’intérêt à agir des tiers et juge que l'héritier de la personne qui, à la date de l'affichage en mairie de la demande de permis, était usufruitière du bien immobilier dont les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance seraient directement affectées par le projet, ne dispose pas, en cette seule qualité, d’un intérêt à agir.
Dans cette affaire, le maire de la commune de l'Île de Bréhat a délivré à une société civile immobilière (SCI), par arrêté du 4 juillet 2016, un permis de construire en vue de l’extension d’une maison d’habitation.
Bien que la demande de permis du pétitionnaire, déposée le 27 avril 2016, ait été affichée en mairie dans les quinze jours qui suivent leur réception par la commune conformément à l’article R. 423-6 du Code de l’urbanisme N° Lexbase : L3483L77, ce n’est qu’en août 2019 que l’arrêté du 4 juillet 2016 a été affiché sur le terrain.
A la suite du décès en janvier 2019 de l’usufruitière du bien immobilier situé sur les parcelles immédiatement voisines du projet litigieux, son héritière, Mme X, a alors contesté le permis de construire, le 13 février 2020, en demandant au tribunal administratif de Rennes d’annuler pour excès de pouvoir cet arrêté du 4 juillet 2016. Par un jugement n° 2000748 du 11 juin 2021, le tribunal administratif de Rennes a fait droit à cette demande.
La SCI a, en conséquence, interjeté appel à l’encontre de ce jugement. Par un arrêt n° 21NT02179 du 10 octobre 2023 N° Lexbase : A60971RA, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l’appel et confirmé le jugement attaqué.
La SCI a alors formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt.
I. L’appréciation de l’intérêt à agir d’un tiers requérant
Alors qu’auparavant, la recevabilité des recours des tiers était admise dès lors qu’ils disposaient de la qualité de voisin [1], l’appréciation de l’intérêt à agir du requérant tiers a été, depuis, limitée dans le temps et dans l’espace.
1.1.- D’une part, si l’appréciation de l’intérêt à agir du requérant a pu s’effectuer à la date d’introduction du recours, la situation du requérant est désormais appréciée à partir de la date d’affichage en mairie de la demande de permis de construire, de démolir ou d’aménager, « sauf pour le requérant à justifier de circonstances particulières ».
Dans la décision commentée, le Conseil d’État rappelle d’ailleurs les dispositions de l’article L. 600-1-3 du Code de l’urbanisme N° Lexbase : L4349IXD :
« Sauf pour le requérant à justifier de circonstances particulières, l'intérêt pour agir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager s'apprécie à la date d'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire. »
1.2.- D’autre part, le recours du tiers n’est désormais possible « que si la construction, l’aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien » du requérant « régulier ». Par conséquent, tout requérant doit dorénavant prouver qu’il est affecté directement dans la jouissance de son bien et que le bien est occupé de façon régulière. A défaut, la requête sera considérée comme irrecevable [2].
C’est ce que rappelle le Conseil d’État par la décision ainsi commentée lorsqu’il énonce les dispositions de l’article L. 600-1-2 du Code de l'urbanisme N° Lexbase : L0037LNP :
« Une personne autre que l'État, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du Code de la construction et de l'habitation N° Lexbase : L0015LNU (…) »
À cet égard, la Haute juridiction relève que « la contestation d'une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le Code de l'urbanisme est ouverte aux personnes physiques ou morales qui justifient de leur qualité d'occupant régulier ou de propriétaire d'un bien immobilier, usufruitier ou nu-propriétaire, dont les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance sont de nature à être directement affectées par le projet ».
Le Conseil d’État précise alors qu’en vertu des dispositions de l'article L. 600-1-3 précité, « cette qualité s'apprécie, sauf pour le requérant à justifier de circonstances particulières, à la date d'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire ».
II. L’absence d’intérêt à agir de l’héritier de l’usufruitier du bien dont les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance sont directement affectées par le projet
2.1.- La cour administrative d’appel de Nantes avait jugé que « la seule qualité d'héritière de sa mère, usufruitière de la maison à la date de l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire et décédée depuis, suffisait à donner intérêt pour agir contre le permis attaqué ».
La cour se fondait ainsi sur les dispositions de l’article 724 du Code civil N° Lexbase : L3332ABZ au terme duquel « Les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt (...) ».
2.2.- Le Conseil d’État censure toutefois ce raisonnement. Il retient, pour ce faire, que la juridiction d’appel a commis une erreur de droit dans la mesure où l'intérêt pour agir contre un permis de construire s'apprécie sur le seul fondement des articles L. 600-1-2 et L. 600-1-3 du Code de l'urbanisme et donc uniquement « au regard de la qualité d'occupant régulier ou de propriétaire d'un bien immobilier dont les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance sont de nature à être directement affectées par le projet à la date d'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire ».
Au cas présent, la Haute Juridiction relève notamment qu'à cette même date, l’héritière requérante n'était plus nue-propriétaire de la maison d'habitation dès lors qu'elle avait cédé cette nue-propriété à ses enfants et qu’elle ne justifiait pas, en outre, l'occuper de façon régulière.
2.3.- Réglant ensuite l’affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du Code de justice administrative N° Lexbase : L3298ALQ, le Conseil d’État souligne qu'à la date d'affichage en mairie de la demande de permis, l’héritière ne justifiait ni détenir ni occuper régulièrement la maison voisine du projet et ne faisait valoir aucune autre circonstance qui aurait été de nature à lui conférer, à cette date, un intérêt pour agir à l'encontre du permis de construire en litige, non plus qu'aucune circonstance particulière qui justifierait que son intérêt pour agir soit apprécié à une autre date.
En conséquence, le Conseil d’État censure la juridiction d'appel qui s’était fondée sur l’article 724 du Code civil relatif aux successions puisqu’en qualité d’héritière, la requérante ne pouvait être considérée comme s’étant trouvée saisie de plein droit des biens, droits et actions de sa mère défunte, y compris des actions qui n’avaient pas été initiées par cette dernière.
Ce faisant, le Conseil d’État rappelle à cette occasion que l'intérêt pour agir des tiers contre un permis de construire s'apprécie sur le seul fondement des articles L. 600-1-2 et L. 600-1-3 du Code de l'urbanisme.
[1] CAA Lyon, 1ère ch., 17 février 2015, n° 13LY03373 N° Lexbase : A4944NDH.
[2] A. Lallet, L’intérêt pour agir contre un permis de construire, conclusions sur CE, 10 juin 2015, n° 386121, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A6029NKI, RFDA, 2015, p. 993.
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