Le Quotidien du 30 janvier 2024

Le Quotidien

Droit des étrangers

[Brèves] Publication de la loi « Immigration »

Réf. : Loi n° 2024-42, du 26 janvier 2024, pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration N° Lexbase : L3809MLN

Lecture: 3 min

N8216BZC

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par Yann Le Foll

Le 31 Janvier 2024

► La loi n° 2024-42, du 26 janvier 2024, pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration N° Lexbase : L3809MLN, a été publiée au Journal officiel du 27 janvier 2024, avec pour objectif affiché de faciliter l’intégration des personnes en situation régulière et l’expulsion des personnes en situation irrégulière sur le territoire national.

Censure des Sages. Pour motif de procédure et en application d’une jurisprudence constante, le Conseil constitutionnel a censuré 32 articles de la loi comme « cavaliers législatifs ». Il a également censuré au fond l’article 1er de la loi déférée prévoyant la fixation par le Parlement du nombre d’étrangers autorisés à s’installer en France et l’article 38 de la loi déférée autorisant le relevé des empreintes digitales et la prise de photographie d’un étranger sans son consentement (Cons. const., décision n° 2023-863 DC, du 25 janvier 2024 N° Lexbase : A80172GZ).

Texte restant. La loi n° 2024-42, du 26 janvier 2024, compte comme principales dispositions le contrat d'engagement au respect des principes de la République, par lequel l’étranger s’engage à respecter la liberté personnelle, la liberté d'expression et de conscience, l'égalité entre les femmes et les hommes, la dignité de la personne humaine, la devise et les symboles de la République, l'intégrité territoriale, définie par les frontières nationales, et à ne pas se prévaloir de ses croyances ou de ses convictions pour s'affranchir des règles communes régissant les relations entre les services publics et les particuliers.

L’expulsion est facilitée à l’encontre de toute personne coupable de faits ayant été commis : à l'encontre de son conjoint, d'un ascendant ou de ses enfants ou de tout enfant sur lequel il exerce l'autorité parentale ; à l'encontre du titulaire d'un mandat électif public ; ou sur un enseignant ou tout membre des personnels travaillant dans les établissements d'enseignement scolaire, sur un agent d'un exploitant de réseau de transport public de voyageurs, ou toute personne chargée d'une mission de service public.

Les travailleurs faisant partie des filières « en tension » durant au moins douze mois, consécutifs ou non, au cours des vingt-quatre derniers mois et qui justifient d'une période de résidence ininterrompue d'au moins trois années en France peuvent se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention « travailleur temporaire » ou « salarié » d'une durée d'un an. Dans l'exercice de sa faculté d'appréciation, l'autorité compétente prend en compte, outre la réalité et la nature des activités professionnelles de l'étranger, son insertion sociale et familiale, son respect de l'ordre public, son intégration à la société française et son adhésion aux modes de vie et aux valeurs de celle-ci ainsi qu'aux principes de la République.

Le texte indique également que ne peuvent pris en charge par le service de l'aide sociale à l'enfance les majeurs âgés de moins de vingt-et-un ans et les mineurs émancipés qui ne bénéficient pas de ressources ou d'un soutien familial suffisants, lorsqu'ils ont été confiés à l'aide sociale à l'enfance avant leur majorité, lorsqu’ils l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français.

newsid:488216

Droit pénal du travail

[Brèves] Travail dissimulé : précisions sur la régularité des auditions conduites par les agents de contrôle

Réf. : Cass. crim., 16 janvier 2024, n° 22-84.243, FP-B N° Lexbase : A18172EZ

Lecture: 3 min

N8137BZE

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par Charlotte Moronval

Le 24 Janvier 2024

► L'exigence du consentement, préalable à son audition, de la personne entendue, en application des dispositions de l'article L. 8271-6-1 du Code du travail, ne vise qu'à la protection de ses intérêts. Dès lors, l’entreprise contrôlée n’a pas qualité pour invoquer leur violation, même si les personnes auditionnées sont salariées de cette dernière.

Faits et procédure. Un contrôle a été effectué par des agents de la Direccte (aujourd’hui Dreets), d’une part, au sein de l'établissement d’une société de droit portugais et, d’autre part, dans les locaux d’une UES composée de plusieurs sociétés.

Le procès-verbal constate des manquements aux règles applicables aux conditions d'emploi et de détachement de salariés, susceptibles de constituer le délit de travail dissimulé.

Une information judiciaire a été ouverte, au cours de laquelle ont été mises en examen la société de droit portugais des chefs de travail dissimulé et travail dissimulé à l'égard de plusieurs personnes, puis chacune des autres sociétés pour recours au travail dissimulé en lien avec la société de droit portugais.

Cette dernière a saisi la chambre de l'instruction d'une requête en annulation des auditions des salariés, dès lors qu'aucune pièce de procédure n'indiquait que le consentement des salariés avait été recueilli par les agents de la Direccte.

La chambre de l’instruction de la cour d’appel juge les auditions des salariés des sociétés concernées régulières. Les sociétés décident de former un pourvoi en cassation.

La solution. Enonçant la solution susvisée, la Chambre criminelle de la Cour de cassation rejette le pourvoi.

Elle estime que c'est à tort que la chambre de l'instruction a jugé que les arguments exposés par mémoire déposé après expiration du délai de six mois, prévu à l'article 173-1 du Code de procédure pénale, étaient irrecevables, alors qu'elle était valablement saisie, par la requête initiale, déposée dans le délai susvisé, du grief pris de l'absence de consentement des intéressés à leur audition.

C'est encore à tort que la chambre de l'instruction a écarté des débats les attestations produites devant elle, dont elle était tenue d'apprécier, après débat contradictoire, la valeur probante au regard des autres pièces de la procédure, dès lors que lesdites attestations avaient un lien direct avec le grief dont elle était régulièrement saisie.

La Chambre criminelle relève cependant que l'arrêt attaqué n'encourt pas la censure, dès lors que l'exigence du consentement, préalable à son audition, de la personne entendue en application des dispositions de l'article L. 8271-6-1 du Code du travail ne vise qu'à la protection des intérêts de celle-ci. Ainsi, les sociétés requérantes n'avaient pas qualité pour invoquer leur violation, même si les personnes entendues étaient leurs salariés.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La responsabilité pénale de l’employeur, L’enquête, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E052003N et ÉTUDE : Les fraudes sociales, Les auditions et la garde à vue, in Droit pénal spécial, Lexbase N° Lexbase : E157503Q.

 

newsid:488137

Droit rural

[Brèves] Cession de bail intrafamiliale : la cession autorisée en justice n’est pas pour autant opposable au bailleur !

Réf. : Cass. civ. 3, 11 janvier 2024, n° 22-15.661, FS-B N° Lexbase : A20932DU

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N8162BZC

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 25 Janvier 2024

► La cession d'un bail rural, même autorisée en justice, ne produit effet à l'égard du bailleur que si, conformément à l'article 1216 du Code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, il est partie à l'acte de cession, si l'acte lui est notifié ou s'il en prend acte ; ► La qualité de preneur du destinataire du congé s'appréciant à la date de sa délivrance, un congé est valablement délivré au preneur en place, futur cédant de son bail rural, tant que la cession n'est pas devenue opposable au bailleur dans les conditions précitées.

L’arrêt rendu le 11 janvier 2024 apporte une précision d’importance pratique en matière de cession de bail rural intrafamiliale, puisqu’il vient préciser les conditions d’opposabilité de la cession, en particulier lorsqu’elle résulte d’une autorisation par le juge, à défaut d’agrément du bailleur (cf. C. rur., art. L. 411-35, alinéa 1er N° Lexbase : L4458I4U).

Attention en pareil cas : l'autorisation de céder le bail, fût-elle donnée par le tribunal, ne vaut pas réalisation de la cession ! Le preneur et le cessionnaire doivent encore accomplir certaines démarches afin de pouvoir opposer la cession au bailleur. Tel est l’apport de l’arrêt rendu le 11 janvier 2024.

Ces démarches résultent de l’application de l’article 1216 du Code civil N° Lexbase : L0929KZG, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, aux termes duquel « un contractant, le cédant, peut céder sa qualité de partie au contrat à un tiers, le cessionnaire, avec l'accord de son cocontractant, le cédé. Cet accord peut être donné par avance, notamment dans le contrat conclu entre les futurs cédant et cédé, auquel cas la cession produit effet à l'égard du cédé lorsque le contrat conclu entre le cédant et le cessionnaire lui est notifié ou lorsqu'il en prend acte. La cession doit être constatée par écrit, à peine de nullité ».

Il en résulte que la cession du bail rural, même autorisée en justice, ne produit effet à l'égard du bailleur que si, conformément à l'article 1216 du Code civil, il est partie à l'acte de cession, si l'acte lui est notifié ou s'il en prend acte.

En l’espèce, pour annuler le congé pour reprise du 30 novembre 2015 délivré par le bailleur, la cour d’appel d’Amiens avait retenu qu'il avait été délivré au preneur seul, et non au cessionnaire, alors que le tribunal paritaire des baux ruraux avait, par jugement du 18 mai 2015, assorti de l'exécution provisoire, autorisé la cession du bail au profit de ce dernier, que cette décision avait été ultérieurement confirmée par la cour d'appel, par arrêt du 12 septembre 2017 et que l'acte de cession était intervenu entre les parties par acte authentique du 11 avril 2018 (CA Amiens, 14 décembre 2021, n° 20/00481 N° Lexbase : A10837G9).

Or, ainsi que le relève la Cour suprême, il ressortait des constatations de l’arrêt qu'à la date de délivrance du congé, aucune cession opposable aux bailleresses n'était intervenue. Or, la qualité de preneur du destinataire du congé s'apprécie à la date de sa délivrance. L’arrêt est donc censuré.

Pour aller plus loin : cf. ETUDE : Cession du bail rural, sous-location et cotitularité du bail, spéc. Cession intrafamiliale avec agrément du bailleur ou du TPBR , in Droit rural (dir. Ch. Lebel), Lexbase N° Lexbase : E9040E9P.

 

newsid:488162

Procédure civile

[Brèves] Procédure à bref délai : précision sur le formalisme aux incidents relatifs à l'irrecevabilité ou la caducité de l'appel, ou à l'irrecevabilité des conclusions et des actes de procédure

Réf. : Cass. civ. 2, 18 janvier 2024, n° 21-25.236, FS-B N° Lexbase : A43372ED

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N8211BZ7

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par Alexandra Martinez-Ohayon

Le 29 Janvier 2024

Dans la procédure à bref délai devant la cour d’appel, aucune disposition de la procédure à bref délai ne prévoit la désignation d'un conseiller de la mise en état qu'exclut l'application de l'article 907 du Code de procédure civile ; le président de chambre est compétent selon des règles spécifiques définies aux articles 905 et suivants du Code de procédure civile, pour connaître des incidents relatifs à l'irrecevabilité de l'appel, à la caducité de celui-ci, ou à l'irrecevabilité des conclusions et des actes de procédure, dans les conditions prévues à l'article 905-2 du code précité.

Les faits et procédure. Dans cette affaire, par ordonnance un juge-commissaire d’un tribunal de commerce a ordonné la vente par voie de saisie immobilière d'un immeuble dépendant de la liquidation judiciaire ouverte à l'égard de M. X. Ce dernier a interjeté appel à l’encontre de cette décision et l’affaire orientée à bref délai. Le liquidateur judiciaire de l’appelant a saisi par conclusions le président de la chambre désignée, après avoir mentionné qu'un avis du greffe avait invité l'appelant à présenter ses observations avant une date précise, et mentionné l'absence d'observations, a déclaré l'appel tardif. L’appelant a déféré cette ordonnance à la cour d’appel.

Le pourvoi. Le liquidateur fait notamment grief à l'arrêt (CA Basse Terre, 8 novembre 2021, n° 21/00633) d’avoir rejeté la demande tendant à l'annulation de l'ordonnance querellée. Il fait valoir que la cour d’appel a méconnu le sens et la portée de l’article 905-2 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7036LEC, en décidant que le président de la chambre n’était pas tenu de répondre aux écritures dès lors qu’elles avaient été transmises sur RPVA à l’attention de la cour et non à l’attention du président de chambre. Le demandeur ajoute que la cour d’appel a, par un excès de formalisme, méconnu le principe du droit à un procès équitable prévu par l’article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l’Homme et des libertés fondamentales N° Lexbase : L7558AIR.

Solution. Énonçant la solution susvisée, la Cour de cassation valide le raisonnement de la cour d’appel. Elle énonce que la cour d’appel n’a pas méconnu l’article 6, § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, compte tenu du fait qu’elle a retenu qu’il ne pouvait être reproché au président de chambre de ne pas avoir visé ces conclusions et de ne pas les avoir prises en considération. Elle déclare le moyen non fondé et rejette le pourvoi.

newsid:488211

Propriété intellectuelle

[Brèves] Marque : un constructeur automobile peut interdire l’usage d’un signe identique ou similaire pour des pièces détachées

Réf. : CJUE, 25 janvier 2024, aff. C-334/22 N° Lexbase : A77542GB

Lecture: 4 min

N8204BZU

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par Vincent Téchené

Le 29 Janvier 2024

► Un tiers qui, sans le consentement d’un constructeur de véhicules automobiles titulaire d’une marque de l’Union européenne, importe et propose à la vente des pièces détachées contenant un élément qui est conçu pour la fixation de l’emblème représentant cette marque et dont la forme est identique ou similaire à ladite marque, fait un usage d’un signe dans la vie des affaires d’une manière qui est susceptible de porter atteinte à une ou des fonctions de la même marque, ce qu’il appartient au juge national de vérifier ;

Un constructeur de véhicules automobiles titulaire d’une marque de l’Union européenne peut interdire à un tiers l’usage d’un signe identique ou similaire à sa marque pour des pièces détachées pour ces véhicules automobiles.

Faits et procédure. Le constructeur automobile Audi est titulaire de la célèbre marque figurative de l’Union européenne constituée de quatre anneaux entrelacés. Cette marque est reproduite et utilisée en tant qu’emblème d’Audi.

Un commerçant polonais offre à la vente, en en faisant la publicité sur son site internet, des calandres non originales adaptées pour d’anciens modèles de voitures Audi. Ces calandres comportent un élément dont la forme est similaire ou identique à cette marque et qui est conçu pour la fixation de l’emblème d’Audi.

Audi agit alors en justice contre ce commerçant pour que lui soit interdit de commercialiser des calandres non originales portant un signe identique ou similaire à la marque « AUDI ». Saisi de cette demande, le juge polonais a posé des questions préjudicielles à la CJUE afin de déterminer si la commercialisation des pièces détachées automobiles telles que les calandres en question constitue, selon le « RMUE » (Règlement (UE) n° 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l'Union européenne N° Lexbase : L0640LGS), un « usage d’un signe dans la vie des affaires » susceptible de porter atteinte aux fonctions de la marque AUDI. Il l’interroge aussi sur la question de savoir si le titulaire de cette marque peut interdire à un tiers un tel usage.

Décision. La Cour répond à ces deux questions par l’affirmative.

Plus précisément, elle relève, tout d’abord, que la clause de réparation prévue pour les dessins ou modèles n’est pas applicable. Ensuite, elle note qu’en l’occurrence, les calandres ne proviennent pas du titulaire de la marque « AUDI » et sont mises sur le marché sans le consentement de celui-ci. Or, l’élément conçu pour la fixation de l’emblème d’Audi y est intégré aux fins de la commercialisation des calandres par le tiers. Il est visible pour le public souhaitant acheter une telle pièce détachée. Cela pourrait constituer un lien matériel entre la pièce détachée en question et le titulaire de la marque « AUDI ». Dès lors, pour la CJUE, un tel usage est susceptible de porter atteinte aux fonctions de la marque consistant notamment à garantir la provenance ou la qualité du produit. La Cour laisse à la juridiction nationale le soin de vérifier, d’une part, si l’élément de la calandre en question est identique ou similaire à la marque « AUDI » et, d’autre part, si la calandre est identique ou similaire à un ou des produits pour lesquels cette marque est enregistrée.

Néanmoins, si le juge national estime que la marque « AUDI » jouit d’une renommée dans l’Union, son titulaire devra bénéficier, sous certaines conditions, d’une protection renforcée. Dans ce cas, il importe peu que les calandres en cause et les produits pour lesquels cette marque est enregistrée soient identiques, similaires ou différents. La Cour confirme aussi que, lorsque le choix de la forme de l’élément conçu pour la fixation de l’emblème du constructeur automobile est guidé par la volonté de commercialiser une calandre qui ressemble d’une manière aussi fidèle que possible à la calandre originale, le droit de l’Union ne limite pas le droit exclusif de ce constructeur titulaire de la marque d’interdire de faire usage d’un signe identique ou similaire.

newsid:488204

Responsabilité administrative

[Brèves] Suicide d'un détenu : la responsabilité de l’administration engagée si elle disposait d’informations alarmantes

Réf. : CE, 5°-6° ch. réunies, 18 décembre 2023, n° 457847, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A2842197

Lecture: 2 min

N8173BZQ

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par Yann Le Foll

Le 24 Janvier 2024

► Est engagée la responsabilité pour faute de l’administration du fait du suicide d'un détenu si elle n’a pas pris, compte tenu des informations dont elle disposait, les mesures que l'on pouvait raisonnablement attendre de sa part pour prévenir le suicide.

Principe. La responsabilité de l'Etat en cas de préjudice matériel ou moral résultant du suicide d'un détenu peut être recherchée pour faute des services pénitentiaires en raison, notamment, d'un défaut de surveillance ou de vigilance.

Une telle faute ne peut toutefois être retenue qu'à la condition qu'il résulte de l'instruction que l'administration n'a pas pris, compte tenu des informations dont elle disposait, en particulier quant à l'existence chez le détenu de troubles mentaux, de tentatives de suicide ou d'actes d'auto-agression antérieurs, de menaces suicidaires, de signes de détresse physique ou psychologique, les mesures que l'on pouvait raisonnablement attendre de sa part pour prévenir le suicide (critères précisés par rapport à CE, 1°-6° ch. réunies, 28 décembre 2017, n° 400560, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A7903W9L, ne comportant que le comportement et la santé).

Décision CE. La carence est ici avérée :

- les expertises psychiatriques dont avait fait l'objet l’intéressé avaient fait état de graves troubles de la personnalité ;

- en raison des craintes qu'il éprouvait pour sa sécurité du fait du comportement de certains détenus à son encontre, il avait demandé à être transféré dans un bâtiment placé en « régime différencié volontaire » (demande partiellement satisfaite) ;

- l'administration pénitentiaire avait connaissance de la précédente tentative de suicide commise par l'intéressé.

La Haute juridiction annule les deux décisions précédentes (CAA Bordeaux, 23 avril 2021, n° 21BX01099 N° Lexbase : A26264QC et TA Limoges, 27 janvier 2021, n° 1900215 N° Lexbase : A77864LX).

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE, La responsabilité administrative pour faute, La faute lourde de l'administration pénitentiaire, in Responsabilité administrative (dir. P. Tifine), Lexbase N° Lexbase : E3742EU7.

newsid:488173

Sociétés

[Brèves] Obligation au passif des associés de sociétés civiles : autorité de la chose jugée et liquidation judiciaire

Réf. : Cass. civ. 3, 18 janvier 2024, n° 22-19.472, FS-B N° Lexbase : A43392EG

Lecture: 3 min

N8118BZP

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par Perrine Cathalo

Le 24 Janvier 2024

► La demande en paiement d'un créancier à l'encontre des associés d'une société civile ne peut être déclarée irrecevable en raison de l'autorité de la chose jugée attachée à un précédent jugement ayant écarté la même demande faute de préalables et vaines poursuites contre la société, alors que constitue un événement nouveau la liquidation judiciaire de celle-ci, prononcée depuis ce jugement, sans qu'il soit établi qu'elle aurait pu l'être antérieurement et que le créancier aurait pu satisfaire aux conditions de l'article 1858 du Code civil avant le premier jugement.

Faits et procédure. Une banque, créancière de deux sociétés civiles au titre du solde débiteur de leurs comptes bancaires, a assigné les associés de ces deux sociétés en paiement de ces créances, par actes des 4 et 8 février 2016.

Deux jugements du 17 décembre 2018 ont rejeté ses demandes, au motif que la banque ne démontrait pas avoir engagé de vaines et préalables poursuites à l'encontre des SCI.

Après avoir obtenu l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la première société, par jugement du 22 octobre 2019, et à l'encontre de la seconde, par jugement du 15 novembre 2019, la banque a déclaré ses créances au passif de chacune de ces deux SCI, puis a assigné leurs associés, notamment en paiement du solde débiteur des comptes bancaires de celles-ci.

Par une décision du 25 mai 2022, la cour d’appel (CA Chambéry, 25 mai 2022, n° 21/01507 N° Lexbase : A56017Y4) a déclaré irrecevables les demandes de la banque comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée attachée aux jugements rendus le 17 décembre 2018 par le tribunal de grande instance de Chambéry.

Cette dernière a formé un pourvoi devant la Cour de cassation.

Décision. La Haute juridiction censure l’arrêt de la cour d’appel au visa des articles 1858 N° Lexbase : L2055ABQ et 1355 N° Lexbase : L1011KZH du Code civil et 480 du Code de procédure civile N° Lexbase : L2318LUE.

Ce faisant, la Cour rappelle le principe selon lequel les créanciers ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé qu'après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale (v. déjà Cass. com., 27 septembre 2005, n° 03-20.390, F-P+B N° Lexbase : A5803DK7 ; Cass. civ. 3, 3 novembre 2011, n° 10-23.951, FS-P+B N° Lexbase : A5241HZ7).

Elle ajoute qu’il est couramment admis que l'autorité de la chose jugée ne peut être opposée lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice (v. déjà Cass. civ. 1, 22 octobre 2002, n° 00-14.035, publié N° Lexbase : A3324A3I ; Cass. civ. 3, 25 avril 2007, n° 06-10.662, FS-P+B N° Lexbase : A0267DWS ; Cass. civ. 2, 10 décembre 2020, n° 19-12.140, F-P+B+I N° Lexbase : A593839S).

Or, la troisième chambre civile juge que la liquidation judiciaire des SCI constituait un événement nouveau, sans qu'il soit établi qu'elle aurait pu être prononcée avant les jugements rendus le 17 décembre 2018 et que la banque aurait pu satisfaire aux conditions de l'article 1858 du Code civil avant cette date.

Observations. La vanité des poursuites est avérée dès lors que la SCI est en liquidation judiciaire et que la créance a été déclarée. Elle n'est donc plus à démontrer dans cette hypothèse (v. déjà Cass. mixte, 18 mai 2007, n° 05-10.413 N° Lexbase : A3178SWM ; Cass. com., 16 juin 2009, n° 07-14.913, F-D N° Lexbase : A2894EIZ).

Pour en savoir plus :

  • v. ÉTUDE : Les cautions, garants et coobligés, Cas particulier : la poursuite des associés répondant indéfiniment aux dettes sociales, garants subsidiaires non coobligés, in Entreprises en difficulté (dir. P.-M Le Corre), Lexbase N° Lexbase : E7966ET9.
  • v. ÉTUDE : L’action en justice confrontée à l’autorité de la chose jugée, Le principe de la concentration des moyens et des demandes, in Procédure civile (dir. E. Vergès), Lexbase N° Lexbase : E028003R.  

newsid:488118

Successions - Libéralités

[Brèves] Conjoint survivant : imputation des libéralités, et non pas cumul avec les droits légaux

Réf. : Cass. civ. 1, 17 janvier 2024, n° 21-20.520, F-B N° Lexbase : A43412EI

Lecture: 3 min

N8153BZY

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 25 Janvier 2024

► En application de l'article 758-6 du Code civil, les droits successoraux du conjoint survivant se déterminent d'abord en imputant en intégralité les libéralités qui lui ont été consenties par le défunt sur les droits qu'il tient des articles 757 et 757-1 du même code.

Pour mémoire, s'agissant des successions ouvertes à compter du 1er janvier 2007, la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 a réintroduit la règle de l'imputation en insérant un article 758-6 dans le Code civil N° Lexbase : L9839HNQ, de sorte que le conjoint survivant ne peut plus bénéficier du cumul des droits successoraux prévus aux articles 757 N° Lexbase : L3361AB4, 757-1 N° Lexbase : L3478AWQ et 757-2 N° Lexbase : L3479AWR du Code civil avec une ou des libéralités consenties en application de l'article 1094 N° Lexbase : L0259HPB ou de l'article 1094-1 N° Lexbase : L0260HPC du même code.

La question est toutefois un peu plus complexe que cela, puisque l’application de la règle, si elle exclut un cumul total par le mécanisme de l’imputation, peut conduire à un cumul partiel (pour une explication très claire, cf. J. Casey, obs. n° 7, in [Panorama] Sommaires de droit des successions et libéralités (janvier 2022 – juillet 2022), Lexbase Droit privé, n° 924, 17 novembre 2022 N° Lexbase : N3321BZZ : « on voit bien que ce qui est voulu par le droit positif, c’est le complément de droits, non une imputation stricte »).

C’est précisément l’obligation d’appliquer la règle de l’imputation prévue par l’article 758-6 du Code civil qui est ici rappelée par la Cour de cassation aux juges du fond.

En l’espèce, la cour d’appel avait retenu que les droits successoraux de l’épouse se cumulaient avec les libéralités que le défunt lui avait consenties (legs de la pleine propriété des liquidités et valeurs et de l'usufruit de tous les biens meubles et immeubles composant la succession) selon les dispositions de l'article 758-6 du code civil et que, par application combinée des articles 757 et 1094-1 du même code, celle-ci bénéficiait, outre du quart en pleine propriété de la succession, de l'usufruit des trois quarts, au titre de la quotité disponible spéciale au profit du conjoint survivant.

La cour en avait déduit que les droits de l’héritier demandeur (qui avait assigné le notaire en responsabilité s’estimant lésé dans le partage) dans la succession de son père étaient de la nue-propriété du quart et qu'ayant reçu du partage des droits d'une valeur supérieure, celui-ci ne justifiait d'aucune perte de chance de refuser le partage proposé et de négocier un partage plus avantageux.

C’est ainsi que la Haute juridiction vient préciser que, pour la détermination des droits successoraux du conjoint survivant, en vue de faire une exacte appréciation de l'existence de la perte de chance, les legs consentis à l’épouse survivante devaient d'abord, non pas se cumuler, mais s'imputer en intégralité sur les droits légaux de celle-ci.

Elle poursuit en indiquant qu'il y avait lieu, dès lors :

  •  de calculer la valeur totale de ces legs (en ajoutant à la valeur des droits légués en propriété celle, convertie en capital, des droits légués en usufruit) ;
  • et de comparer le montant ainsi obtenu à la valeur de la propriété du quart des biens calculée selon les modalités prévues à l'article 758-5 du Code civil.

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