Le Quotidien du 29 septembre 2023

Le Quotidien

Assurances

[Brèves] De la clarté d’une clause d’exclusion de garantie des dommages corporels causés par l'amiante

Réf. : Cass. civ. 2, 21 septembre 2023, n° 21-19.776, FS-B N° Lexbase : A28791H4

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N6912BZZ

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 27 Septembre 2023

► La clause, qui exclut de la garantie, « les dommages corporels, matériels et immatériels (consécutifs ou non), causés par l'amiante et ses dérivés », exclut de façon claire et précise, tous les dommages corporels causés par l'amiante, sans requérir aucune interprétation ; elle est formelle et doit ainsi recevoir application.

Faits et procédure. En l’espèce, une société, qui avait pour activité principale la construction et la réparation navales, et qui avait été en activité du 31 décembre 1970 au 31 juillet 2000, date de sa dissolution anticipée, avait souscrit plusieurs contrats d'assurances garantissant sa responsabilité civile.

Se prévalant de l'inscription, par arrêté du 7 juillet 2000 publié au Journal officiel du 22 juillet 2000, sur le fondement de l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 N° Lexbase : L5411AS9, de la société sur la liste des établissements ouvrant droit au versement de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA) aux salariés et anciens salariés y ayant travaillé pendant des périodes où étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, 150 anciens salariés de la société avaient engagé, à compter du 6 juillet 2009, plusieurs procédures à son encontre, afin d'être indemnisés de leur préjudice spécifique d'anxiété. Plusieurs arrêts irrévocables avaient condamné la société à verser, à chacun d'entre eux, une certaine somme en réparation de ce préjudice.

La société avait ensuite assigné les différents assureurs devant un tribunal de grande instance afin qu'elles la garantissent des condamnations mises à sa charge.

Clause d’exclusion de garantie des dommages corporels. Les assureurs ont alors opposé une clause d’exclusion de garantie, qui visait « les dommages corporels, matériels et immatériels (consécutifs ou non), causés par l'amiante et ses dérivés ».

Inapplicabilité de la clause selon la cour d’appel. La cour d’appel de Rouen avait jugé que ladite clause ne pouvait recevoir application, en tant qu’elle ne serait pas formelle et limitée et nécessiterait d'être interprétée (CA Rouen, 20 mai 2021, n° 19/03634 N° Lexbase : A33714SN). Précisément, elle avait relevé que la seule lecture de cette clause ne permettait pas de connaître avec certitude son étendue et, notamment, si elle visait seulement les maladies causées par l'amiante.

L’arrêt avait retenu que les assureurs, qui recouraient à la notion de « cause technique », à savoir l'exposition des salariés à l'amiante, étaient contraintes d'interpréter la clause et d'expliquer la nature du lien de causalité qui reliait le préjudice spécifique d'anxiété subi par les anciens salariés de la société ACH à l'amiante.

Elle les avait donc condamnés à verser à la société la somme de 2 115 794,45 euros au titre des garanties responsabilité civile et frais de défense.

Cassation : applicabilité de la clause. Les assureurs ont alors formé un pourvoi. Ils obtiennent gain de cause devant la Haute juridiction, qui rappelle d’abord, qu’il résulte de l’article L. 113-1 du Code des assurances N° Lexbase : L0060AAH que les clauses d'exclusion de garantie qui privent l'assuré du bénéfice de la garantie en considération de circonstances particulières de la réalisation du risque doivent être formelles et limitées ; ensuite qu’une clause d'exclusion n'est pas formelle lorsqu'elle ne se réfère pas à des critères précis et nécessite interprétation (cf. Cass. civ. 1, 22 mai 2001, n° 99-10.849, publié au bulletin N° Lexbase : A5004ATI ; et plus récemment : Cass. civ. 3, 27 octobre 2016, n° 15-23.841, FS-P+B  N° Lexbase : A3270SC4 ; Cass. civ. 2, 26 novembre 2020, n° 19-16.435, F-P+B+I N° Lexbase : A173538R).

Or, en l’espèce, la Haute juridiction estime que la clause, qui excluait de la garantie, de façon claire et précise, tous les dommages corporels causés par l'amiante, ne requérait pas interprétation.

À noter que la Cour de cassation opère dans ce domaine un véritable contrôle de l’appréciation des clauses par les juges du fond.

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Bancaire

[Brèves] Précisions sur le régime applicable à rupture de crédit à durée indéterminée aux entreprises

Réf. : Cass. com., 20 septembre 2023 , n° 22-15.878, F-B N° Lexbase : A24081HN

Lecture: 5 min

N6864BZA

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par Jérôme Lasserre Capdeville

Le 27 Septembre 2023

► La notification par une banque, en application de l’article L. 313-12 du Code monétaire et financier, de la résiliation d'un concours à durée indéterminée à l'expiration d’un délai de préavis ne le transforme pas en concours à durée déterminée.

De longue date, le législateur craint que la rupture de crédit à durée indéterminée accordé à une entreprise n’aggrave la situation de cette dernière. Il est vrai qu’une rupture trop soudaine d’un concours, précédemment octroyé à une entreprise commençant à connaître des difficultés, pourrait entraîner à court terme l’ouverture d’une procédure collective. Face à de tels dangers, le législateur a décidé de préserver les intérêts de l’entreprise par l’intermédiaire d’un encadrement légal spécifique, en l’occurrence l’article 60 de la loi n° 84-46, du 24 janvier 1984, relative à l’activité et au contrôle des établissements de crédit N° Lexbase : L7223AGM (dite loi « bancaire »), devenu l’article L. 313-12 du Code monétaire et financier N° Lexbase : L2507IX7.

Ainsi, en vertu de ce texte, le banquier souhaitant rompre un crédit à durée indéterminée à une entreprise devra respecter des règles de forme (notification de la rupture, délai de préavis de 60 jours, voire indication des motifs la rupture en cas de demande de l’entreprise). Or, il n’est pas rare que la Cour de cassation (Cass. com., 30 novembre 2022, n° 21-17.703, F-B N° Lexbase : A54848WZ), comme les juges du fond (CA Paris, 5-6, 7 décembre 2022, n° 21/05295 N° Lexbase : A88138Y3 ; CA Versailles, 22 juin 2023, n° 23/00121 N° Lexbase : A953694X), nous donnent des précisions sur cet encadrement juridique. Tel est à nouveau le cas ici.

Faits et procédure. En l’espèce, le 26 juillet 2006, la banque X. avait consenti à la société Y. une ouverture de crédit en compte courant pour une durée de vingt-quatre mois, à l’expiration de laquelle le contrat avait été tacitement reconduit pour une durée indéterminée.

Le 3 mai 2018, la banque avait notifié à la société que son concours serait résilié à l’expiration du délai de soixante jours prévu à l’article L. 313-12 du Code monétaire et financier. Puis, le 13 juin 2018, la même banque avait envoyé une seconde lettre à la société Y., par laquelle elle l’informait qu’en application de l'article 16 de la convention initiale, elle prononçait la déchéance du terme en raison du dépassement du plafond du découvert autorisé, et exigeait le paiement des sommes dues dans un délai de huit jours.

Arrêt d’appel. Par une décision du 15 mars 2022, la cour d’appel de Montpellier (CA Montpellier, 15 mars 2022, n° 19/05176 N° Lexbase : A61037Q4) avait considéré que la banque n’avait pas respecté les conditions légales de résiliation d'un concours bancaire, puis prononcé la nullité de la résiliation de l’ouverture de crédit et de la déchéance du terme décidée le 13 juin 2018 et, enfin, rejeté son action en paiement dirigée contre la société et les cautions. L’établissement bancaire avait alors formé un pourvoi en cassation.

Moyen. Il prétendait par ce dernier que, dans le cas où (conformément à l’article L. 313-12 du Code monétaire et financier) le contrat d’ouverture de crédit renouvelé est interrompu et où le préavis de soixante jours est en cours, cette situation a pour effet de métamorphoser, pour la durée du préavis, le contrat à durée indéterminée en contrat à durée déterminée. Dès lors, la clause du contrat d’origine qui prévoit que le bénéficiaire de l'ouverture de crédit devra rembourser, dans les huit jours d’une lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au banquier dispensateur du crédit le montant des sommes dont il est alors redevable envers lui lorsque le compte de l'emprunteur enregistre un découvert non autorisé, devrait être pleinement applicable. En conséquence, en décidant le contraire au motif que la banque « ne peut valablement se prévaloir de son courrier du 13 juin 2018 prononçant la déchéance du terme en application » de l'article 16 de la convention d'ouverture de crédit d'origine, « la seule possibilité de dénonciation d'un découvert à durée indéterminée résidant dans la mise en œuvre des dispositions de l’article L. 313-12 du code », la cour d’appel aurait violé l’article L. 313-12 précité, mais aussi les articles 1214 N° Lexbase : L0924KZA et 1215 N° Lexbase : L0923KZ9 du Code civil.

Décision. Ce moyen ne parvient cependant pas à convaincre la Haute juridiction. Elle énonce que « la notification par une banque, en application de l’article L. 313-12 du Code monétaire et financier, de la résiliation d'un concours à durée indéterminée à l’expiration d'un délai de préavis ne le transforme pas en concours à durée déterminée ». Dès lors, le moyen, qui postule le contraire, n’est pas jugé fondé.

Observations. Cette solution est importante pour la pratique. En effet, si l’on suit la lettre de l’article L. 313-12 du Code monétaire et financier, le crédit à durée indéterminée devrait prendre fin le dernier jour du préavis légal (voire à la date de la réception de la notification en cas d’hypothèses dérogeant au délai de préavis) à minuit.

Or, en pratique, les banques ne sont pas aussi rigoureuses. Beaucoup laissent le concours se poursuivre quelques jours, voire quelques semaines… La décision étudiée devrait donc les pousser à mettre un terme à de telles pratiques !

newsid:486864

Comité social et économique

[Brèves] Incompétence du CSE d’établissement pour désigner un expert sur la situation économique et financière de l’entreprise

Réf. : Cass. soc., 20 septembre 2023, n° 21-25.233, FS-B N° Lexbase : A22231HS

Lecture: 2 min

N6890BZ9

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par Charlotte Moronval

Le 27 Septembre 2023

► En l’absence d’accord collectif d’entreprise prévoyant la consultation récurrente du CSE d’établissement ou de décision de l’employeur de le consulter, le CSE d’établissement ne peut pas désigner d’expert sur la situation économique et financière de l’entreprise.

Faits et procédure. Un CSE d’établissement décide, par délibération, de recourir à un cabinet d’expertise en vue de la consultation sur la situation économique et financière de l'entreprise.

L'employeur, contestant le droit à consultation et à expertise du comité, saisit le président du tribunal judiciaire aux fins d'annulation de cette délibération.

Le tribunal judiciaire rejette sa demande, au motif que la possibilité pour le comité central d’être assisté par un expert-comptable ne prive pas le comité d’établissement, qui dispose d'une autonomie suffisante, et dans les limites des pouvoirs confiés au chef d'établissement, d’être assisté par un expert-comptable pour l’examen de la situation économique et financière de l’établissement, pour pouvoir notamment se comparer avec les autres établissements.

L’employeur forme un pourvoi en cassation.

La solution. Enonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation censure la décision du tribunal judiciaire.

Rappel. En l'absence d'accord, le CSE est consulté chaque année sur la situation économique et financière de l'entreprise. Cette consultation est conduite au niveau de l'entreprise, sauf si l'employeur en décide autrement et sous réserve d’un accord de groupe (C. trav., art. L. 2312-22 N° Lexbase : L6663L7W).

Le CSE peut également décider de recourir à un expert-comptable en vue de la consultation sur la situation économique et financière de l'entreprise (C. trav., art. L. 2315-88 N° Lexbase : L8400LG9).

En l’espèce, à défaut d’un accord collectif d'entreprise prévoyant la consultation du CSE d’établissement et dès lors que l'employeur n'a pas décidé de le consulter, la consultation récurrente sur la situation économique et financière de l'entreprise relevait du seul CSE central.

Le CSE d’établissement ne pouvait donc recourir à une expertise à ce titre.

Pour aller plus loin :

  • v. aussi Cass. soc., 9 mars 2022, n° 20-19.974, F-B N° Lexbase : A94407PC, L. Thomas, Désignation d’un expert-comptable par un CSE d’établissement, Lexbase Social, avril 2022, n° 902 N° Lexbase : N1113BZA ;
  • lire également I. Odoul-Asorey, Attributions du CSE central et des CSE d’établissement relatives à la gestion de l’entreprise : actualités de la Cour de cassation, Lexbase Social, octobre 2022, n° 919 N° Lexbase : N2801BZR ;
  • v. ÉTUDE : Les attributions du comité social et économique dans les entreprises d'au moins 50 salariés, La consultation sur la situation économique et financière de l'entreprise, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E1963GAX.

 

newsid:486890

Construction

[Brèves] Insuffisance des travaux de reprise & sécheresse

Réf. : Cass. civ. 3, 14 septembre 2023, n° 21-22.429, F-D N° Lexbase : A00821HI

Lecture: 3 min

N6900BZL

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par Juliette Mel, Docteur en droit Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

Le 27 Septembre 2023

► Départir ce qui relève du régime « CAT NAT » de la responsabilité des constructeurs n’est pas simple ; l’entreprise est responsable de l’insuffisance des travaux de reprise.

Le lien d’imputabilité entre l’intervention de l’entreprise et le dommage est toujours au cœur d’une jurisprudence nourrie surtout lorsque les dommages initiaux proviennent d’un épisode de sécheresse et que les désordres réapparaissent, malgré les reprises. Le cas est fréquent et l’arrêt rapporté en est une nouvelle illustration.

En l’espèce, l’assureur MRH de particuliers les indemnise de désordres de fissuration affectant leur maison, dus à des mouvements de terrain consécutifs à plusieurs épisodes de sécheresse, ayant fait l’objet d’arrêtés de catastrophe naturelle. Une entreprise intervient pour réaliser les travaux de reprise mais les désordres réapparaissent. Les propriétaires constatent, en effet, l’apparition de nouvelles fissures. L’assureur MRH refuse de les prendre en charge, ce qui entraîne une procédure contentieuse.

La cour d’appel de Toulouse, dans un arrêt du 12 juillet 2021 (CA Toulouse, 12 juillet 2021, n° 17/03276 N° Lexbase : A81944Y7), considère que le constructeur et, par devers lui, son assureur RCD, doivent prendre en charge les travaux de reprise. Les conseillers considèrent que l’entreprise a réalisé des travaux qui n’ont pas permis de remédier à l’insuffisance structurelle des semelles de fondation de la maison et à la faiblesse d’origine de la dalle portante.

Ils forment un pourvoi aux termes duquel ils articulent, notamment, que les fissures ne seraient pas imputables à l’intervention de l’entreprise mais à la sécheresse. Autrement dit, les travaux ne sont pas la cause des désordres ni leur aggravation. Le moyen est rejeté.

Cette décision est l’occasion de revenir sur l’exigence d’un lien d’imputabilité, tout en rappelant que l’appréciation de ce lien relève de la libre appréciation des juges du fond.

La solution n’est pas nouvelle.

Ce n’est pas parce que le constructeur est présumé responsable des dommages de nature décennale que le maître d’ouvrage peut se borner à prouver l’existence de son préjudice et rien d’autre. Autrement dit, toute objective qu’elle soit, la responsabilité civile décennale des articles 1792 N° Lexbase : L1920ABQ et 1792-2 N° Lexbase : L6349G9Z du Code civil n’implique pas, per se, automatiquement la responsabilité du constructeur. À l’exigence de la preuve de la gravité du dommage s’ajoute celle de l’imputabilité. Autrement dit, le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, pour reprendre les termes de l’article 1792 précité, doit établir le lien entre le dommage, d’une part, et les travaux réalisés par le constructeur qu’il met en cause, d’autre part.

Ce lien d’imputabilité n’est pas présumé (Cass. civ. 3, 12 mai 2010, n° 09-12.722, FS-D N° Lexbase : A1652EXH). Mais la jurisprudence, par une approche in favorem à l’égard du maître d’ouvrage et/ou de l’acquéreur, se montre particulièrement large dans la compréhension de ce lien d’imputabilité. Si, le plus souvent, l’imputabilité résulte d’une faute du constructeur (Cass. civ. 3, 5 janvier 2017, n° 15-18.084, F-D N° Lexbase : A4843S3R), la jurisprudence admet aussi un rattachement des dommages en considération de l’activité elle-même du constructeur (Cass. civ. 3, 27 janvier 2015, n° 13-21.945, F-D N° Lexbase : A7100NA9). Inversement, l’absence de lien doit conduire à l’absence de responsabilité civile décennale du constructeur (pour exemple Cass. civ. 3, 6 décembre 2006, n° 05-16.826, FS-D N° Lexbase : A8342DSR).

Ce qui est intéressant, en l’espèce, est qu’elle est rendue dans le domaine de la « CAT NAT », pour lequel la jurisprudence tend - pour schématiser - à étendre le périmètre de responsabilité des constructeurs, qui interviennent dans le cadre des travaux de reprise.

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Durée du travail

[Brèves] Travail de nuit : réparation d’un préjudice né du dépassement de la durée maximale de travail

Réf. : Cass. soc., 27 septembre 2023, n° 21-24.782, F-B N° Lexbase : A11611IT

Lecture: 3 min

N6932BZR

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par Lisa Poinsot

Le 04 Octobre 2023

Le dépassement de la durée maximale de travail du travailleur de nuit, calculée sur une période quelconque de 12 semaines consécutives ouvre, à lui seul, droit à la réparation.

Faits et procédure. Licencié avec une dispense d’exécuter son préavis, un salarié, travaillant de nuit, saisit la juridiction prud’homale d’une demande en paiement d’une indemnité pour non-respect des durées maximales quotidiennes, hebdomadaires et mensuelles de travail.

La cour d’appel (CA Paris, 30 septembre 2021, n° 19/05960 N° Lexbase : A861047Z) relève tout d’abord que le salarié soutient avoir régulièrement dépassé la durée maximale hebdomadaire de 46 heures.

Ensuite, elle retient qu’il ressort de la synthèse conducteur que l’amplitude horaire avancée par l’intéressé dans ses écritures ne correspond pas au travail effectif. En outre, le salarié dispose de temps de repos et de mise à disposition.

Enfin, les juges du fond constatent que le salarié ne justifie pas d’un préjudice distinct de celui réparé au titre du repos compensateur.

Par conséquent, la demande du salarié en paiement de dommages et intérêts pour non-respect des durées maximales de travail est rejetée.

Ce dernier forme dès lors un pourvoi en cassation.

La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation casse et annule la décision de la cour d’appel sur le fondement de l'article L. 3122-35 du Code du travail N° Lexbase : L0391H9D, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 N° Lexbase : L8436K9C, les articles L. 3122-7 N° Lexbase : L6852K9N et L. 3122-18 N° Lexbase : L6841K9A du même code, dans leur rédaction issue de ladite loi, l'article 2.2 de l'accord du 14 novembre 2001 relatif au travail de nuit, attaché à la Convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950 N° Lexbase : X8152APM et l'article 1315 N° Lexbase : L0965KZR, devenu 1353, du Code civil.

En l’espèce, la cour d’appel n’a pas constaté que l’employeur justifiait avoir respecté la durée hebdomadaire maximale de travail du travailleur de nuit calculée sur une période quelconque de 12 semaines consécutives.

→ Quel impact en pratique ? Cette solution rappelle aux employeurs leurs obligations de garantir la santé et la sécurité des travailleurs par la prise d’un repos suffisant. Il faut être prudent dans la gestion des horaires des travailleurs de nuit puisque tout dépassement des durées maximales de travail, prévues par la loi ou la convention ou accord collectif applicable, entraîne automatiquement des sanctions financières.

Pour aller plus loin :

  • cette nouvelle solution s’inscrit dans la jurisprudence de la Cour de cassation en matière de manquement de l’employeur aux règles sur la durée du travail : v. déjà Cass. soc., 11 mai 2023, n° 21-22.281, FS-B N° Lexbase : A66769TG (dépassement de la durée maximale de travail quotidienne) ; Cass. soc., 26 janvier 2022, n° 20-21.636, FS-B N° Lexbase : A53037KM (dépassement de la durée maximale de travail hebdomadaire) ;
  • v. fiches pratiques, FP182, Déroger aux règles de repos quotidien et hebdomadaire N° Lexbase : X2754CQ3, FP213, Déroger à la règle du repos dominical N° Lexbase : X2757CQ8, Durée et temps de travail ;
  • v. ÉTUDE : La durée quotidienne et la durée hebdomadaire de travail, Le travail de nuit, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E330343Q ;
  • v. aussi ÉTUDE : Les régimes spécifiques de durée du travail, Les durées maximales quotidiennes et hebdomadaires du travailleur de nuit, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E0581ETP.

 

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Environnement

[Brèves] Délivrance des cartes de membre d’ACCA en cas de fusion de communes

Réf. : Cass. civ. 3, 21 septembre 2023, n° 22-16.945, FS-B N° Lexbase : A28681HP

Lecture: 2 min

N6906BZS

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par Yann Le Foll

Le 27 Septembre 2023

► En cas de fusion de communes, l'adhésion à une association intercommunale de chasse agréée créée ne peut être refusée à une personne domiciliée sur la commune.

Principe. Il résulte de l'article L. 422-4 du Code de l'environnement N° Lexbase : L7932K9N qu'en cas de fusion de communes, une association communale de chasse agréée (ACCA), préalablement constituée, peut coexister avec l'association intercommunale de chasse agréée créée, par union ou fusion, de celles préexistantes sur son territoire.

Il résulte de L. 422-21 du même code N° Lexbase : L3494IS9 que l'adhésion à l'association intercommunale créée ne peut être refusée à une personne domiciliée sur la commune, peu important que ce domicile soit en dehors du périmètre de chasse de la nouvelle association.

En cause d’appel. La cour d'appel a, d'abord, constaté que le demandeur résidait sur le territoire de l'ancienne commune de (…), faisant désormais partie de la commune de (…), puis, a relevé que l'association intercommunale de chasse agréée fusionnée (AICAF) des Trois ruisseaux était la seule à y avoir son siège.

Elle a retenu, ensuite, à bon droit, que les dispositions de l'article L. 422-21 du Code de l'environnement imposaient que les statuts de l’AICAF des Trois ruisseaux prévoient l'adhésion des titulaires du permis de chasser domiciliés dans la commune de son siège.

Décision. Elle en a exactement déduit, sans se contredire, ni modifier l'objet du litige, que l'article 6 des statuts de l'AICAF des Trois ruisseaux ne pouvait faire obstacle à l'adhésion du demandeur, qui, domicilié dans la commune, était, à ce titre, membre de droit de l'association.

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Procédure pénale

[Brèves] Présence de l’avocat après la séance d’identification et conditions d’autorisations d’une géolocalisation : la Chambre criminelle procède à des rappels

Réf. : Cass. crim., 19 septembre 2023, n° 23-81.285, F-B N° Lexbase : A28701HR

Lecture: 6 min

N6929BZN

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par Adélaïde Léon

Le 18 Octobre 2023

► Le droit, pour la personne à l’égard de laquelle existent une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a participé à la commission d’un crime ou d’un délit puni d’emprisonnement, de solliciter la présence d’un avocat lors d’une séance d’identification de suspects dont elle fait partie, ne s’étend pas à l’audition des témoins suivant cette séance.

► Les opérations de géolocalisation en temps réel doivent être autorisées par le magistrat compétent par écrit et avant la mise en place du dispositif. L’autorisation, donnée par téléphone au service enquêteur par le magistrat compétent, de procéder à la pose immédiate d’un dispositif de géolocalisation sur un véhicule, accompagnée de l’annonce de l’envoi ultérieur d’une décision écrite ne répond pas à ces conditions lorsqu’il résulte du dossier que le dispositif a été mis en place vingt minutes après l’appel et que la décision écrite est parvenue au service enquêteur une heure et quart après cette pose.

Rappel de la procédure. Mis en examen des chefs de vols et destruction par un moyen dangereux, en bande organisée, et association de malfaiteurs, un individu a présenté une requête en annulation d’actes et de pièces de la procédure intéressant :

  • des auditions, hors la présence de l’avocate du mis en examen, de témoins à la suite d’une séance d’identification de suspects dont l’intéressé faisait partie ;
  • la mise en place d’un dispositif de géolocalisation par un officier de police judiciaire sur un scooter.

En cause d’appel. La chambre de l’instruction a dit n’y avoir lieu à annulation des procès-verbaux d’identification et de géolocalisation.

La juridiction d’appel a estimé, s’agissant de l’identification, que l’absence de l’avocate du mis en examen durant l’audition des témoins suivant la phase d’identification ne constituait pas une cause de nullité de la procédure.

Elle a par ailleurs jugé que si le dispositif de géolocalisation avait été mis en place avant la réception de son autorisation, il ne pouvait en être déduit que l’autorisation écrite n’avait pas d’existence avant sa réception et qu’elle n’avait pas été prise au moment de la pose du moyen technique. Selon la cour, l’article 230-33 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L7401LPS n’impose pas que les enquêteurs soient en possession de l’écrit au moment de l’installation du dispositif. Enfin, compte tenu de l’urgence et du risque de dépérissement des preuves décrit au magistrat du parquet et de la survenance d’un moment favorable pour l’installation du dispositif, l’officier de police judiciaire pouvait, conformément à l’article 230-35 du même code N° Lexbase : L8965IZ3, procéder sans autorisation, à charge pour lui de rendre compte ensuite au magistrat.

Le mis en examen forme un pourvoi en cassation contre l’arrêt de la chambre de l’instruction.

Moyens du pourvoi. Il était fait grief à la chambre de l’instruction :

  • d’avoir écarté la nullité des procès-verbaux d’identification alors qu’à la suite d’une séance d’identification au cours de laquelle l’avocate du mis en examen était présente, les témoins ont été auditionnés par les enquêteurs sur cette identification, hors la présence de l’avocate. Or, le droit pour une personne gardée à vue de pouvoir bénéficier de la présente de son avocat lors d’une séance d’identification s’étend tout au long de la phase d’identification ;
  • d’avoir écarté la nullité de la géolocalisation alors que, d’une part, l’autorisation d’utiliser un dispositif de géolocalisation avait été réceptionnée par le service enquêteur plus d’une heure après la mise en place dudit dispositif et que, d’autre part, l’officier de police judiciaire n’avait pas en l’espèce fait référence à l’article 230-35 du Code de procédure pénale lequel l’autorise en cas d’urgence à procéder d’initiative à la poste du dispositif technique, à charge pour lui d’en informer immédiatement le procureur de la République.

Décision. La Chambre criminelle casse et annule l’arrêt de la chambre de l’instruction.

S’agissant de la présence l’avocat, la Cour énonce sans détour qu’il résulte de l’article 61-3 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L2775LBE que la possibilité, pour la personne à l’égard de laquelle existent une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a participé à la commission d’un crime ou d’un délit puni d’emprisonnement, de solliciter la présence d’un avocat lors d’une séance d’identification de suspects dont elle fait partie, ce droit de s’étend pas à l’audition des témoins suivant cette séance. Selon la Cour, il s’agit d’un acte distinct. Dès lors, la chambre de l’instruction n’a pas méconnu le texte visé.

S’agissant de la géolocalisation, la Cour  rappelle qu’il résulte de l’article 230-33 du Code de procédure pénale que les opérations de géolocalisation en temps réel doivent être autorisées par le magistrat compétent par écrit et avant la mise en place du dispositif. La Chambre criminelle affirme également que la chambre de l’instruction ne peut faire application de l’article 230-35 du Code de procédure pénale lorsqu’il n’a pas été mis en œuvre par l’OPJ. Or, en l’espèce :

  • si le magistrat avait autorisé par téléphone la pose immédiate du dispositif sur le véhicule et annoncé l’envoi ultérieur de la décision écrite, la mise en place a eu lieu vingt minutes plus tard et la décision écrite est parvenue au service enquêteur, une heure et quart après la pose. Dans ces conditions, il n’était pas établi que l’acte faisait l’objet d’une décision écrire avant d’être exécuté.
  • l'officier de police judiciaire n’avait pas mis en œuvre les dispositions de l’article 230-35 du Code de procédure pénale

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Propriété intellectuelle

[Brèves] Protection d’un produit par une indication géographique : le savoir-faire traditionnel et la réputation sont des caractéristiques alternatives

Réf. : Cass. com., 27 septembre 2023, n° 21-25.334, F-B N° Lexbase : A11511IH

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par Vincent Téchené

Le 05 Octobre 2023

► Il résulte de l'application combinée des articles L. 721-2 et L. 721-7, 4°, du Code de la propriété intellectuelle que, pour être protégé par une indication géographique, un produit doit être caractérisé par un savoir-faire traditionnel ou une réputation qui peuvent être attribués essentiellement à cette zone géographique, ces caractéristiques étant alternatives et non cumulatives.

Faits et procédure. Le syndicat des tisseurs du linge basque d'origine a déposé à l'Institut national de la propriété industrielle (l'INPI) une demande d'homologation portant sur l'Indication Géographique (IG) « Linge basque », accompagnée du projet de cahier des charges. L’INPI a homologué le cahier des charges de l'IG « Linge basque » et reconnu le syndicat déposant comme organisme de défense et de gestion du produit bénéficiant de cette IG.

Une société a formé un recours contre cette décision, que la cour d’appel de Bordeaux a rejeté (CA Bordeaux, 12 octobre 2021, n° 20/04960 N° Lexbase : A011249Z). La société requérante a donc formé un pourvoi en cassation.

Décision. La Cour de cassation énonce qu’il résulte de l'application combinée des articles L. 721-2 N° Lexbase : L7690IZT et L. 721-7, 4° N° Lexbase : L2034KGG, du Code de la propriété intellectuelle que, pour être protégé par une indication géographique, un produit doit être caractérisé par un savoir-faire traditionnel ou une réputation qui peuvent être attribués essentiellement à cette zone géographique, ces caractéristiques étant alternatives et non cumulatives.

Par ailleurs, aux termes de l'article L. 721-3, alinéa 4, du même code N° Lexbase : L7691IZU, lorsqu'il instruit la demande d'homologation ou de modification du cahier des charges, l'INPI s'assure que les opérations de production ou de transformation décrites dans le cahier des charges, ainsi que le périmètre de la zone ou du lieu, permettent de garantir que le produit concerné présente effectivement une qualité, une réputation ou d'autres caractéristiques qui peuvent être essentiellement attribuées à la zone géographique ou au lieu déterminé associés à l'indication géographique.

La Cour de cassation approuve alors la cour d’appel en ce qu’elle a retenu que la réalisation du tissage du linge dans les Pyrénées-Atlantiques résultait d'un savoir-faire local historique, fût-il non exclusif à cette zone géographique. Elle précise que dès lors qu'elle a fait ressortir que la réalisation du tissage dans les Pyrénées-Atlantiques était la caractéristique propre et essentielle du linge basque et qu’elle a établi que le linge tissé dans les Pyrénées-Atlantiques selon un savoir-faire traditionnel développé dans cette zone géographique jouissait d'une réputation de qualité, la cour d’appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision.

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