La lettre juridique n°917 du 22 septembre 2022 : Institutions

[Focus] La recevabilité financière des amendements parlementaires, une question institutionnelle majeure

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par Jean Pierre Camby, Professeur Associé, Université de Paris Saclay

le 22 Septembre 2022

Mots clés : amendements • Assemblée nationale • réglement • commissions parlementaires • Constitution

Le 11 juillet 2022, la présidente de l’Assemblée nationale a statué, comme le texte du règlement lui en donne le pouvoir, sur une question de recevabilité financière des amendements. L’originalité tient au fait que sa décision désavoue sur le fond celle du président de la commission des finances. La remise en cause, par celui-ci, de l’exercice de sa propre compétence institutionnelle, forgée par la pratique et par les exigences d’un contrôle interne systématique, risque de porter atteinte à la crédibilité de l’application impartiale de la prohibition des initiatives parlementaires coûteuses, autant qu’à la règle constitutionnelle qui l’établit, inchangée depuis 1958. Or, la procédure interne aux assemblées, qui sanctionne le caractère absolu de l’irrecevabilité financière des initiatives coûteuses est la garantie de l’impartialité des décisions. Loin d’être cantonnée au droit parlementaire, la question met en cause la logique des institutions.


 

En 1958, est introduite dans la Constitution, avec le parlementarisme rationalisé [1], une disposition qui a pour objet et pour effet de réduire sensiblement l’initiative parlementaire. L’article 40 de la Constitution N° Lexbase : L1301A93 fait figure d’originalité, par le caractère radical de la prohibition qu’il établit, par la simplicité des principes qu’il énonce, par sa stabilité dans le texte de la Constitution, et par ce qu’il demeure un des rares mécanismes constitutionnels dont la mise en application incombe au Parlement [2]. Ce sont les assemblées, sous le contrôle second du Conseil constitutionnel, qui appliquent concrètement le droit de la recevabilité financière. Cette situation originale découle des exigences procédurales posées par le Conseil constitutionnel, qui exige que soit mise en place une procédure de contrôle systématique au dépôt des initiatives [3]. En 1959, l’article 98, alinéa 6, du règlement de l’Assemblée nationale confie le soin de décider à la présidence, mais « en cas de doute » [4] il ouvre la faculté de consulter le président de la commission des finances. Le premier rapport parlementaire établi sur le sujet [5] observe que le président de séance prononce la recevabilité lorsque celle-ci est évidente mais qu’il « ne décide presque jamais l’irrecevabilité sans consultation préalable ». La pratique a conduit à supprimer le mot « presque » pour garder l’affirmation principale : « dans la pratique tous les amendements litigieux sont transmis au président de la Commission des finances » [6].

Par voie de conséquence, le Conseil a ensuite posé l’exigence d’un nécessaire « préalable ». L’irrecevabilité doit avoir été contestée, au stade parlementaire, pour qu’il puisse en être saisi [7]. L’exigence de ce « préalable » parlementaire s’est appuyée sur les travaux d’élaboration de la Constitution [8] : rien n'est prévu quant à la compétence du Conseil constitutionnel, contrairement à l’autre irrecevabilité constitutionnelle de fond, qui concerne le partage des domaines de la loi et du règlement, à l’article 41. Aussi le Conseil a-t-il pu se reconnaître compétent en jugeant des seules décisions contestées, en valorisant la procédure interne aux assemblées. La procédure fait ainsi du Conseil constitutionnel un juge d’appel de la recevabilité financière, parce qu’il existe un juge de première instance, interne aux assemblées.

Jamais à ce jour, le Conseil constitutionnel n’a annulé une décision portant sur la recevabilité financière. Une telle annulation rendrait la procédure actuelle, aujourd’hui incontestée, sujette à caution.

Le maintien de cette autonomie décisionnelle impose donc la complète impartialité des décisions. Si celle-ci venait à être prise en défaut, le système risquerait fort d’être remis en cause.

On pourrait objecter que le sujet est technique : le droit parlementaire, en dehors de quelques affaires médiatisées, peine à trouver écho auprès du grand public, ou du moins intéressait il peu avant le 19 juin dernier. Et pourtant la question posée, pour l’instant interne à l’Assemblée, se répercute sur l’équilibre des institutions. 

L’histoire constitutionnelle montre que lorsque les assemblées détiennent une compétence de nature juridictionnelle, mais qu’elles l’exercent de façon arbitraire ou aléatoire, cette compétence finit par leur échapper. Tel fut le cas s’agissant des validations d’élections législatives. Depuis 1789, et de manière constante, il incombait à chaque assemblée de statuer sur l’élection de ses membres dans le cadre de la « vérification des pouvoirs », sur laquelle s’est progressivement greffé le contentieux électoral des élections législatives. Les assemblées étaient ainsi juges de l’élection de leurs propres membres, même si le point de savoir s’il s’agissait d’une conséquence de la souveraineté parlementaire ou d’une véritable fonction juridictionnelle était débattu [9]. Lors du contentieux ayant suivi l’élection du 2 janvier 1956, furent invalidés 11 députés poujadistes, mais le même motif ne fut pas retenu s’agissant d’autres députés.  Aussi, pour faire cesser le « scandale des invalidations partisanes » [10], comme n’hésita pas à le qualifier Michel Debré, cette compétence, échappa en 1958 aux assemblées pour incomber au Conseil constitutionnel.

Un même dessaisissement, ou un désaveu des décisions rendues, pourrait se produire si la procédure de contrôle des irrecevabilités financières lors du dépôt des amendements n’était pas gérée par le président de la commission des finances selon une approche juridictionnelle, cohérente et constante : respect des textes, impartialité, recours aux précédents, explicitation des changements de décision, interprétation favorable au demandeur, etc.  Aucun « trou dans la raquette » ne peut être toléré, sinon la partie est définitivement perdue. Or, le risque d’une application sélective du texte existe depuis l’élection de M. Coquerel. Certains membres du groupe auquel il appartient n’ont-ils pas fortement manifesté leur opposition à la procédure [11] ; plus généralement le groupe de la France insoumise fait de la critique des institutions un de ses thèmes de bataille.

Le président de la commission des finances est appelé à être le « censeur » de ses collègues, position inconfortable, d’autant que, depuis 2007, il appartient à l’opposition. Si l’on admet pas que la fonction de juge de la recevabilité financière des amendements est inhérente au mandat de président de la commission des finances, indissociable de celui-ci et qu’elle doit être exercée sans états d’âme, il lui serait difficile, voire politiquement intenable, d’appliquer systématiquement un texte auquel son groupe est profondément opposé. Il n’est pas possible de choisir, à la carte, d’exercer certaines des missions institutionnellement confiées par le mandat, comme les contrôles sur pièces et sur place ou le choix des sujets d’enquête de la Cour des comptes, et d’en refuser d’autres. Il n'est pas exigé d’un juge qu’il adhère à la règle qu’il doit appliquer, mais bien qu’il remplisse son office.

L’un des derniers bastions intacts du parlementarisme rationalisé, mais aussi de l’autonomie parlementaire, résistera-t-il à la configuration issue des élections des 12 et 19 juin dernier ? La réponse à cette question constitue un test « grandeur nature » de la solidité des logiques institutionnelles face à la composition inédite de l’Assemblée nationale sous la XVIème législature.

I. L’objet du dispositif : une prohibition absolue en matière de dépense publique, une obligation de compensation des diminutions de recettes

L’article 40 de la Constitution de 1958 interdit toute initiative parlementaire coûteuse, irrecevable lorsqu’elle qu’elle crée ou augmente « une charge publique » ou qu’elle diminue « les ressources publiques ». Comme dans bien des cas en droit parlementaire, le dispositif repose sur des précédents. Il trouve son origine dans la résolution dite « Berthelot » adoptée par la Chambre des députés en 1900 [12], puis dans l’article 17 de la Constitution du 27 octobre 1946, qui avait interdit, lors des discussions budgétaires, les créations ou les augmentations de dépenses, et enfin dans la loi dite des « maxima », appliquée à partir de 1949 et reprise par le décret du 19 juin 1956. Les initiatives coûteuses ou réductrices de recettes devaient être compensées par des recettes équivalentes. Mais l’application de ces principes fut hésitante et limitée.

En 1958, le dispositif est triplement renforcé : il ne permet plus les compensations de dépenses (augmentation et diminution corrélatives), crée une interdiction spécifique aux recettes, et rend l’application à tous les textes indiscutable. C’est dire que le texte de l’article 40 est un aboutissement.

L’emploi du singulier en ce qui concerne toute dépense crée une interdiction drastique et parfaitement voulue [13]: il n’est pas possible de compenser la création ou l’aggravation d’une charge ni par la diminution proposée d’une autre dépense publique, ni par une recette nouvelle qui financerait cette augmentation.  L’emploi du pluriel s’agissant des recettes – principalement fiscales – aboutit à protéger leur volume global d’ensemble, c’est-à-dire à permettre des compensations entre recettes. La restriction du droit d’amendement parlementaire est substantielle, pour ne pas dire violente.

Dès le début de la Vème République, et de façon constante, le champ de l’article 40 a été entendu largement par le Conseil constitutionnel, qui a jugé le 20 janvier 1961 qu’il couvrait l’administration de l’Etat et les dépenses de la sécurité sociale et des collectivités territoriales. Au fur et à mesure de l’extension de l’intervention de l’Etat et du domaine de la loi, ce champ s’est étendu [14].

C’est cette rigueur, autant que le caractère universel et automatique de l’irrecevabilité financière qui en font donc un mécanisme original.

Si cette règle paraît technique, il faut surtout y voir une restriction très forte à l’initiative parlementaire : il n’est pas possible de contourner la prohibition posée en matière de dépenses et il est obligatoire d’assortir toute initiative diminuant un impôt d’un gage qui augmente corrélativement une recette pour compenser cette diminution.

En matière de dépenses, il n’existe donc que bien peu d’échappatoires tant le texte est strict, comme il ressort des décisions du président de la commission des finances [15]. La jurisprudence interne aux assemblées n’a évolué dans un sens libéral que pour accepter des amendements demandant des rapports sur des mesures coûteuses, alors que leur auteur souhaite évidemment la mesure elle-même. 

Validant la pratique parlementaire, le Conseil constitutionnel a par ailleurs admis, le 9 novembre 1999 (décision n° 99-419 DC N° Lexbase : A8783ACB) que de simples charges de gestion puissent être proposées, quand elles se traduisent par un simple alourdissement de tâches administratives et non par la nécessité de recrutement de fonctionnaires. Il a aussi admis que dans le cadre des discussions budgétaires la charge soit assimilée à l’unité de vote (article 47 de la loi organique sur les lois de finances et LO 111-7-1,IV  du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L9839MBZ) : missions ou objectifs de dépenses, et non à chaque élément débattu (programmes ou sous objectifs) : le droit d’amendement parlementaire permet donc des transferts de charge internes à une unité de dépenses, dès lors que le déficit n’est pas aggravé.

En ce qui concerne les diminutions d’impôts d’Etat [16], un gage est presque systématiquement utilisé : la majoration des droits sur les tabacs visés aux articles 575 N° Lexbase : L3745MAX et 575 A ancien N° Lexbase : L8692L4P du CGI, désormais codifiés au «  chapitre IV du titre Ier du livre III du Code des impositions sur les biens et services » . S’agissant de compenser les pertes de recettes affectées au collectivités territoriales, c’est la majoration de la dotation globale de fonctionnement, qui est un prélèvement sur recettes et non une dépense, qui sert fréquemment de gage, à son tour compensée par le même gage d’Etat. Initialement, la question de la crédibilité du gage se posait, mais l’informatisation du dépôt des amendements fait que ces gages sont désormais automatiquement utilisés.

Si l’étau a été quelque peu desserré pour les débats budgétaires puisque la possibilité d’ amender des crédits a été reconnue en 2001, les prohibitions y sont étendues par des règles spécifiques d’irrecevabilité posées par les dispositions organiques, dont certaines s’appliquent également au Gouvernement : domaine de la loi de finances, affectations de recettes, prohibition des amendements qui ne respectent pas la sincérité budgétaire (LO art. 32, 1er août 2001) ce qui aboutissait par exemple à l’irrecevabilité des  réductions « indicatives » de crédits, qui visent en fait à mettre l’accent sur leur insuffisance, mais cette irrecevabilité a été abandonnée. Les cavaliers budgétaires, dispositions étrangères aux lois de finances — ou sociaux pour les lois de financement — sont également prohibés par les lois organiques. Le Conseil constitutionnel, même d’office, sanctionne ces dispositions avec une exigence supplémentaire en matière de lois de financement de la sécurité sociale, où sont prohibés les amendements qui n’ont pas d'effet ou ont un effet trop indirect sur les dépenses ou les recettes des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement. La chasse aux cavaliers est devenue un classique du contrôle de ces textes par le Conseil constitutionnel.

L’objet même de l’article 40, et de ces dispositions complémentaires, est fondamental et de portée générale : il s’agit de protéger le niveau des ressources publiques, donc de laisser exclusivement au Gouvernement la possibilité d’augmenter les déficits publics et de faire radicalement obstacle à toute mesure coûteuse, même si elle ne dégrade pas le déficit. Rouage crucial du « parlementarisme rationalisé »,  il préserve les droits de l’exécutif dans toute discussion législative, quel que soit le sujet abordé. C’est la seule irrecevabilité qui présente un caractère « absolu » (Cons. const., décision n° 78-94 DC 14 juin 1978 N° Lexbase : A7971AC9), ce qui revient à dire d’application constante.

S’il peut s’avérer utile, à l’occasion, pour lutter contre l’obstruction [17], le dispositif sert principalement à protéger le gouvernement, seul maître des équilibres financiers. La statistique, au moment où rien ne paraît pouvoir endiguer le flot d’amendements déposés, est trompeuse [18] : la barrière est en principe infranchissable. Elle doit donc être dissuasive.  

II. L’effet du dispositif : une irrecevabilité au dépôt

Si la portée de l’article 40 est certaine, et découle de la lettre même de la Constitution, cette dernière n’établit cependant aucune procédure, contrairement à celle qui régit le partage loi règlement au cours des débats, à l’article 41. Dans l’avant-projet de Constitution, était envisagée la même procédure pour les deux irrecevabilités, mais le texte final ne prévoit aucune procédure pour appliquer l’article 40 [19]. La charge de sa mise en œuvre est donc revenue à chacune des assemblées. Sur une base pourtant incertaine s’est construite une procédure originale et systématique de contrôle, confiée, après souvent quelques hésitations initiales, au président de la commission des finances. Dès 1920, d’ailleurs, l’article 86 du règlement de la Chambre prévoit cette compétence [20] . Mais l’histoire n’est pas le seul argument.

Le renvoi à une seule autorité parlementaire s’est vite trouvé conforté par le fait que le Conseil constitutionnel a exigé que les assemblées mettent en place un contrôle systématique exercé par les instances parlementaires lors du dépôt de l’amendement ou de la proposition de loi. Cette obligation, formulée dès 1978 [21], a encore été rappelée en 2009 [22].

Cette exigence a été, dès l’origine et pendant longtemps faiblement suivie au Sénat. Tacitement, l’article 24 du règlement de la chambre haute permettait que l’on attende que le gouvernement soulève, par exception d’irrecevabilité, l’article 40. Dans le silence du règlement, cette pratique plus souple au Sénat, était difficilement admise par les députés qui se voyaient appliquer en interne une rigueur systématique que leurs collègues sénateurs parvenaient à ignorer [23]. Pourtant, le Conseil constitutionnel a un temps admis que le contrôle ne soit pas, comme à l’Assemblée, systématique [24]. Cette application différenciée fragilisait l’ensemble de la procédure. Le Conseil constitutionnel, comme l’a relevé alors un commentaire particulièrement autorisé, a donc réaffirmé la rigueur initiale d’une irrecevabilité absolue, c’est à dire absolument contrôlée lors du dépôt de l’initiative au sein des assemblées [25] ; le Sénat s’y est parfaitement plié [26]. L’unification de la procédure entre les deux chambres milite donc pour son respect : c’est pour mettre fin aux divergences et dans le sens de la rigueur de son application que la procédure a été réaffirmée comme identique dans les deux assemblées [27].   

Désormais celle-ci s’impose à tout parlementaire, selon la nature de l’initiative.

Pour les propositions de loi, dont la discussion est incertaine l’appréciation relève, lors du dépôt, d’une délégation du Bureau. Il incombe ensuite au gouvernement de faire appliquer cet article : le contrôle est à double détente. Le renvoi est systématique conformément à l’exigence posée en 1978, mais le contrôle de fond qui en résulte est très souple lors du dépôt de la proposition [28], où la pratique « bienveillante » consiste à ce stade à admettre, contrairement à la lettre de l’article 40, les charges gagées [29]. Si la proposition de loi est inscrite à l’ordre du jour, le contrôle des amendements s’applique, mais la base de départ est le texte débattu, qui, on le voit, n’est pas nécessairement purgé de l’irrecevabilité [30]. Il incombe alors au Gouvernement, ou à tout acteur du débat, soit au stade de la commission [31], soit de la séance, de soulever l’irrecevabilité, ce qui n’est pas rare [32]. Mais si tel n’est pas le cas, notamment par ce que le gouvernement omet de faire respecter le dispositif, un texte d’origine parlementaire coûteux pourra donc être adopté [33]. Certes, le contrôle des amendements s’applique, mais la base de départ est le texte de la commission, qui, on le voit, n’est pas nécessairement purgé de l’irrecevabilité [34].       

Pour les amendements, qui, eux, ont vocation immédiate à être débattus, la recevabilité fait l’objet d’un contrôle systématique. Celui-ci est le fait du président de la Commission des finances et s’exerce à trois niveaux. L’article 86, alinéa 4, du règlement de l’Assemblée prévoit que chaque président de commission peut déclarer l’irrecevabilité sur les amendements soumis à celle-ci. Cette phase est devenue systématique dans les deux assemblées, depuis que la procédure a été modifiée par la révision constitutionnelle de 2008 (loi n° 2008-103 du 4 février 2008, modifiant le titre XV de la Constitution N° Lexbase : L7923H3T) : le texte débattu est celui issu des travaux de la commission saisie au fond. Ceci conduit chaque président de commission à appliquer l’irrecevabilité financière. Le fait que la discussion ordinaire s’engage désormais sur le texte issu des travaux de la commission – à l’exception par exemple des lois de finances et de financement –  a donc créé une nouvelle difficulté d’application. Jusque-là il incombait en pratique au président de la Commission des finances d’apprécier la recevabilité des amendements avant la séance publique, ou en amont pour les textes relevant de la Commission des finances. Désormais cette phase de filtre avant la discussion devient insuffisante, puisque le texte débattu est susceptible de comporter des initiatives coûteuses par adoption d’amendements en commission. Sans que le texte – qui fait référence à l’« avis » du président de la Commission des finances n’ait à être substantiellement modifié, la possibilité pour chaque président de commission compétente d’appliquer lui-même l’irrecevabilité, qui demeure rare, est maintenue, mais surtout est ouverte la faculté de renvoyer à cet « avis » les initiatives que ce dernier estime douteuses. C’est cette pratique qui s’est imposée au nom de l’unification des décisions [35].

Celle-ci découle du contrôle avant discussion en séance. Au moment de leur dépôt, il revient, selon le texte, au président de l’Assemblée (art. 89, al. 3) [36] de refuser ceux des amendements qui sont contraires à l’article 40 et aux dispositions des lois organiques relatives aux lois de finances et de financement de la sécurité sociale. Si le texte ne prévoit qu’un pouvoir d’avis du président de la commission des finances « en cas de doute », c’est ici encore la pratique qui s’impose : le renvoi de tout amendement financier est systématique et les décisions du « juge de la recevabilité » sont définitives. L’article 45 du règlement du Sénat est plus explicite en ce qui concerne cette compétence : « Le président de la commission des finances contrôle la recevabilité, au regard de l'article 40 de la Constitution et de la loi organique relative aux lois de finances, des amendements déposés en vue de la séance publique…. La commission des finances est compétente pour contrôler la recevabilité au regard de l'article 40 de la Constitution et de la loi organique relative aux lois de finances des modifications apportées par les commissions aux textes dont elles ont été saisies » [37].

Par construction les décisions de recevabilité rendues sur le même amendement au stade de la commission et de la séance doivent être identiques. Tel n’a pourtant pas été le cas à l’Assemblée lors du débat du projet de loi ayant abouti à la loi n° 2022-1089 du 30 juillet 2022, mettant fin aux régimes d'exception créés pour lutter contre l'épidémie liée à la covid-19 N° Lexbase : L5682MDS. Les mêmes amendements, émanant des mêmes auteurs, qui prévoyaient la réintégration de personnels non vaccinés ont été déclarés irrecevables en commission, recevables en séance.   

Le troisième filtre est en effet la séance publique, puisque le Gouvernement, tout député ou tout sénateur, peut soulever l’irrecevabilité d’une disposition. C’est alors le président de séance qui tranche, après « avis » du président de la Commission des finances. Ce cas est rarissime, conduisant parfois à des incidents de séance [38] .

Ainsi fragmentée, à l’Assemblée, entre toutes les commissions pour son déclenchement, mais unifiée dans son processus décisionnel au profit du seul président de la Commission des finances, la procédure d’examen de la recevabilité des amendements a toujours en pratique fait appel aux décisions du président de la Commission des finances, même si à l’Assemblée est ménagée la possibilité pour la présidence ou le rapporteur général d’ intervenir lors de cette troisième phase. Il fallait rappeler ces règles désormais clairement établies, pour montrer en quoi une divergence de décision est improbable.

C’est pourtant précisément ce qui s’est produit à l’Assemblée le 11 juillet 2022, où confrontée à une discordance du contrôle de la recevabilité financière, la présidente a repris la main, comme le règlement lui en donne la possibilité.

III. La conséquence

L’application de l’article 40 fait fréquemment l’objet de débats dans les hémicycles. Mais jamais ces débats n’ont conduit à mettre en cause l’impartialité ou l’absence de cohérence des décisions du président de la commission. Au contraire, cette cohérence est assurée par le fait que les procédures aboutissent toujours au même décideur parlementaire.

Jusqu’ici la double casquette, institutionnelle et politique, du président de la commission des finances n’avait pas posé de problèmes, parce que son rôle juridictionnel était pleinement assumé par le titulaire de la fonction, qu’il appartienne à la majorité, comme ce fut le cas avant 2007, ou à l’opposition comme c’est souvent le cas depuis lors. Mais le début de la Législature marque de façon flagrante la contradiction entre les prises de position politique du groupe LFI et la mission institutionnelle qui échoit à l’un de ses membres.

La confrontation entre la conjoncture politique et la place de l’article 40 dans l’arsenal protecteur du gouvernement et dans l’autonomie parlementaire expliquent donc que le désaccord se soit cristallisé, dès le début de la législature, sur cette question. M. Coquerel a soutenu que les amendements en cause, relatifs à la réintégration et au paiement de personnels de santé suspendus  étaient constitutifs d’une charge de gestion [39], ce qui, en toute hypothèse, ne justifie pas deux positions contradictoires sur les mêmes amendements. 

En outre, l’argument serait soutenable si la charge de gestion ne faisait pas l’objet d’une définition précise [40] : elle ne couvre qu’un « aménagement limité des missions » incombant aux services publics [41] et non une charge certaine comme c’est le cas d’amendements réintégrant des personnes dans la fonction publique dont les traitements et l’ancienneté seraient rétablis -c’est l’objet de l’initiative – et donc il s’agit incontestablement d’une charge par rapport au droit existant, en application duquel ils ne sont pas payés. L’article 40 ne permet pas d’apprécier l’opportunité ou la légalité de l’initiative, mais seulement son coût.

M. Coquerel a protesté sur le fait que la présidente lui avait ravi sa compétence en indiquant qu’il s’était assuré de l’absence de précédents, argument lui aussi peu convaincant. C’est la différence entre deux décisions qui ne peuvent qu’être qu’identiques (sauf erreur, intention du Gouvernement au moment du débat, etc.) qui a justifié que le président de la commission des lois, stade auquel l’irrecevabilité avait été opposée, rappelle lors des débats la décision initiale qu’il a appliquée, puis l’exercice de sa compétence par la présidente au stade de la séance. C’est la carence du contrôle qui a provoqué ce dessaisissement.

Cet incident pourrait paraître anodin, « on en a vu d’autres ». Mis en perspective, il constitue au contraire une brèche inédite dans la procédure qui s’est patiemment construite au profit d’un contrôle unifié et interne pour donner toute leur portée aux irrecevabilités financières.

On peut naturellement critiquer le fond de la prohibition « absolue » et la trouver excessivement sévère : l’article 40 fait figure de couperet.

Les textes les plus durement frappés concernent le droit social, les revenus minimums, comme ici les régimes indemnitaires de la fonction publique ou encore, même si le thème est moins mobilisateur aujourd’hui, les anciens combattants.

Mais si cette construction progressive a abouti, dans le texte en 1958, dans la procédure en 2005, à unifier les décisions, c’est bien qu’elle correspond à une nécessité, plus actuelle que jamais dans l’état de nos finances publiques, d’encadrer le travail parlementaire, afin de ne pas remettre en cause des équilibres fiscaux ou financiers qui doivent rester de la compétence gouvernementale. Quant à la procédure, elle doit garantir au parlementaire qu’il n’y a pas de modulation, a fortiori pas de « censure politique » par application différenciée ou aléatoire du contrôle selon l’opportunité de l’amendement ou son auteur [42].  

Moyen de lutter contre la démagogie – il est aisé de proposer des réductions d’impôt et des augmentations de dépenses- le barrage est effectivement efficace parce que son contrôle s’effectue à la source. Porter atteinte à ce contrôle risque de le voir échapper à l’autonomie parlementaire, pour un résultat plus brutal encore : si le gouvernement devait, comme c’est le cas pour les propositions de loi, être le seul censeur, l’application serait bien vite différenciée entre les initiatives qui lui conviennent et … les autres, c’est-à-dire entre celles de la majorité, déjà filtrées en amont sur le fond, et celles de l’opposition. Confié à un membre de l’opposition, il n’est pas pour autant un outil aux mains de l’opposition.

Il faut même ajouter, au moment où le Gouvernement exprime la volonté de limiter ses initiatives législatives au profit de celles de sa majorité que l’article 40 peut être un obstacle à ces tentatives d’avancer derrière ses troupes et non en les dirigeant. Le dispositif impose en effet que seul le Gouvernement détienne la clef financière des réformes, et fait donc obstacle à ce qu’il apparaisse seulement comme soutien à une initiative dont il est en réalité l’auteur. Il arrive même que le gouvernement dépose un amendement coûteux, suscitant des amendements parlementaires similaires, puis le retire au profit de la discussion de ces derniers, qui apparaissent alors comme la seule source de l’initiative.  

Les tentatives de modification ou de suppression, y compris par ceux qui ont eu la charge d’ appliquer le contrôle de recevabilité [43] ou d’aménagement du texte, fort nombreuses, ont toutes échoué [44].

Tant que l’article 40 existe, lui porter atteinte par application aléatoire, contestable et contestée aboutira à voir retirer sa compétence systématique au président de la Commission des finances. Cette perte de compétence, possible à textes inchangés, ne fera que rendre plus pesante la prohibition édictée par cet article pour les élus de la Nation. L’autonomie parlementaire et l’égalité entre les acteurs du jeu parlementaire auraient tout à y perdre.

On peut contester la logique et la rigueur qui inspirent ce dispositif, comme on peut contester le parlementarisme rationalisé. Mais il est difficile d’en enrayer l’application sans aboutir à fausser le débat parlementaire et la logique des institutions.

Comme dans les jeux à somme négative, tout le monde serait alors perdant*. 


[1] V J.-F. de Bujadoux, Rationalisations du parlementarisme en France, thèse, Paris II, 2 décembre 2019, multig.

[2] Voir doc. AN, dont Charbonnel, AN n° 2064, 19 novembre 1971, Barrot n° 1273, 25 mai 1994, Méhaignerie, n° 3246, 5 juillet 2006, Cahuzac, n° 4392, 21 février 2012, Carrez, n° 4546, 22 février 2017, Woerth, n° 5106  23 février 2022, et doc. Sénat, dont Marini, n° 263, 7 janvier 2014 ; O. Gariazzo, L'article 40 in Luchaire, Conac et Prétot, La Constitution de la République française, 3ème édition 2009, p. 1009 ; X. Roques, Les irrecevabilités financières, RFDC, 1996 , n° 16 1009 ; L’initiative financière des députés français, information constitutionnelle et parlementaire, n° 189, septembre 2005.

[3] Après quelques hésitations initiales (v. Ch. Roig, L’évolution du Parlement en 1959, étude sur le Parlement de la Ve République, PUF, 1965, p. 87), le contrôle est devenu dès l’origine automatique s’agissant des amendements.

[4] L’expression subsiste dans l’article 89, alinéa 6, du règlement de l’Assemblée.

[5] J. Charbonnel, op. cit., p.9.

[6] Idem, p.9.

[7]  Cons. const., décisions n° 82-77 DC du 20 juillet 1977 N° Lexbase : A7956ACN, n° 93-329 DC du 13 janvier 1994 N° Lexbase : A8296ACA, n° 2002-464 DC du 27 décembre 2002 N° Lexbase : A2081DIW. À défaut, il refuse de statuer :  décision n° 2012-654 DC du 9 août 2012 N° Lexbase : A4218IRN.

[8] B. Genevois, La jurisprudence du Conseil constitutionnel, STH, n° 98, 1988 : « n'est pas irréprochable d'un strict point de vue juridique » ; J.P. Lebreton, Conseil constitutionnel et initiative financière, RA, 1978 : « n'emporte pas la conviction ». Cet auteur rappelle que le comité consultatif obtint la suppression du contrôle par le Conseil constitutionnel, initialement prévue par les rédacteurs (travaux du comité, p. 101). Ceci justifie la position prudente du Conseil en l'espèce. Cette jurisprudence a été étendue aux lois de financement de la Sécurité sociale (Cons. const., décision n° 96-384 DC du 19 décembre 1996 N° Lexbase : A8347AC7).

[9] M. Waline (Éléments d’une théorie de la juridiction constitutionnelle en droit français, RD publ., 1928. 441) voit dans la vérification des pouvoirs l’exercice d’une fonction juridictionnelle qui n’est pas nécessairement déclenchée par un recours : aucune règle nouvelle n’est créée, la question ne peut être tranchée qu’en droit, sans intervention d’aucune considération politique, elle crée une situation irrévocable. On retrouve ces mêmes critères dans le contrôle parlementaire de la recevabilité financière  

[10] Le 18 février 1937, la Chambre valide l’élection d’un candidat inéligible, définitivement condamné pour vol , et de nombreux exemples historiques demeurent célèbres : Murat, Garibaldi, Benjamin Constant etc..

[11] V. F. Ruffin qui dénonce une « censure politique » et la réponse d’E. Woerth, alors  président de la commission des finances, AN, 13 oct. 2020.

[12] Qui limitait au budget l’ impossibilité d’augmenter les traitements indemnités ou pensions ou d’en étendre le champ.

[13] Voir les propos de M Devaux (Documents pour servir à l’histoire de l’élaboration de la Constitution du 4 octobre 1958, Documentation française, 1991 , tome III, p. 139 : « le texte que vous avez là empêche les opérations compensées , à tout le moins dans le domaine des dépenses .. par conséquent il atteint vraiment l’initiative  parlementaire des dépenses . Par contre il laisse c’est admissible la possibilité d’une proposition compensée en matière de ressources » . Le rédacteur plaide ensuite pour une acception large des charges incluses dans le champ de cet article, qui sera retenue par le Conseil constitutionnel en 1961.

[14] Par exemple aux autorités administratives indépendantes (P. Méhaignerie, op. cit., p. 19). Mais des matières comme le  financement de la formation professionnelle sont exclus de ce champ (J. Barrot, op cit, p . 27)  ou y entrent en fonction de leur source (E. Woerth., op. cit., p. 45)

[15] A titre d’exemple E . Woerth : « s’il n’est pas possible de proposer par amendement parlementaire de remplacer une flotte entière de voitures par des voitures électriques, ce qui reviendrait à un remplacement de tout le stock, il est possible par la voie d’un amendement parlementaire de prévoir qu’à l’occasion du renouvellement de la flotte les voitures nouvellement acquises seront électriques. Le raisonnement retenu est le suivant : l’auteur de l’amendement se place sur le terrain d’une sujétion existante – assurer le renouvellement régulier du matériel, sans accélérer ce rythme de replacement –, pas sur le terrain d’une dépense supplémentaire, » commission des finances, compte rendu n° 45, 23 février 2022.

[16] L’Assemblée dispose depuis 2020 d’un outil de simulation « leximpact » pour mesurer l’impact des amendements. V. J. N. Barrot, Les progrès de l’évaluation des politiques publiques au Parlement, colloque Changer de culture normative, JCP, 18 janv. 2021, p. 39.

[17] 17 777 sont déclarés irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution, en 2006, toujours à l’Assemblée nationale, sur la loi relative à l’énergie qui avait donné lieu au dépôt de 137 600 amendements.

[18] 7 % des amendements enregistrés sont déclarés irrecevables (Méhaignerie, op cit, p . 11) pour la XIVème législature 8 000 sont déclarés irrecevables pour 46 000 renvoyés, et  sur environ 200 000 amendements déposés au cours de la XVème législature, 27 000 ont subi le même sort (28 % des renvois, 13% des amendements déposés) (v. Woerth, op cit).

[19] V note 8. Certains auteurs ont pu conclure que le Conseil constitutionnel n’était pas compétent : L. Philip, Sirey, 1961, J  p. 164.  

[20] « Si la réalité de la réduction ou de la suppression de la recette de l’établissement d’une dépense ou de son augmentation est affirmée au nom de la commission des finances par son président…. La disjonction et le renvoi ne peuvent être contestés ».

[21] 14 juin 1978 : « le respect de l'article 40 de la Constitution exige qu'il soit procédé à un examen systématique de la recevabilité, au regard de cet article, des propositions de loi formulées par les sénateurs, et cela antérieurement à l'annonce par le président de leur dépôt et donc avant qu'elles ne puissent être imprimées, distribuées et renvoyées en commission, afin que soit annoncé le dépôt des seules propositions qui, à l'issue de cet examen, n'auront pas été déclarées irrecevables ».

[22] Cons. const., décision n° 2009-582 DC du 25 juin 2009 N° Lexbase : A4085EI7 : « chaque assemblée doit avoir mis en œuvre un contrôle de recevabilité effectif et systématique au moment du dépôt des amendements y compris auprès de la commission saisie au fond ; (…) les dispositions qui permettent à la commission saisie au fond de se réunir « pour examiner les amendements du rapporteur ainsi que les amendements déposés au plus tard l’avant-veille de cette réunion » après avoir permis leur dépôt et leur mise en distribution, sans exiger un examen préalable de recevabilité, sont contraires à la Constitution ». 

[23] Voir sur la question des concours financiers des collectivités locales aux établissements d’enseignement privés, des décisions successives contraires au Sénat : rép. min., 6 août 1986, p. 3370, 7 mai 1991, p. 894, 13 juin 1991, p. 1642, alors que l'article 40 est opposé, systématiquement, à l'Assemblée nationale dès lors qu’une charge est aggravée (voir la décision n° 93-329 DC du 13 janvier 1994 N° Lexbase : A8296ACA à propos de la réformation de la loi « Falloux »).

[24] Cons. const., décision n° 96-381 DC du 13 octobre 2005 N° Lexbase : A8335ACP.  

[25] Cons. const., décision n° 2005-519 DC du 29 juillet 2005 N° Lexbase : A1640DKX, v. J.-E. Schoettl, Le forfait-jours des salariés non cadres devant le Conseil constitutionnel, LPA, 11-14 novembre 2005, n° 225-226, p. 7-13 ; Cons. const., décision n° 2005-526 DC du 13 octobre 2005 N° Lexbase : A8270DKI.

[26] Règlement du Sénat, art. 45, voir rapport de J. Arthuis, n° 401, 2008.

[27] Le Sénat a choisi , depuis 2015 d’effectuer également un contrôle du respect du domaine législatif ; v. E. Tavernier, Le Sénat et les irrecevabilités de l’ article 41 et de l’article 45, Mélanges Herin, mare et martin, 2020, p. 215.

[28] Deux propositions déclarées irrecevables à l’Assemblée entre 1988 et 1993, pour 1 654 propositions enregistrées, mais bien peu étaient alors inscrites à l’ordre du jour. Depuis 1995, et plus encore 2008, l’ordre du jour ménage des initiatives parlementaires impliquant la discussion de propositions de loi. 

[29] J. Cahuzac, op cit., p. 21.

[30] Il peut l’être au stade du débat en commission , puisque le débat s’engage sur le texte adopté par celle-ci : Cons. const., décision n° 93-329 DC du 13 janvier 1994 N° Lexbase : A8296ACA.  

[31] Voir par exemple doc AN n° 1251 8 décembre 1998, qui cite plusieurs cas où la commission laisse le débat se dérouler, contrairement au cas d’espèce portant sur les retraites ou débats ; An, 27 novembre 2001 p.8561 : proposition de loi n° 3370, tendant à ouvrir le droit à la retraite à taux plein pour les salariés ayant cotisé quarante annuités avant d'atteindre l'âge de 60 ans.

[32] Voir D. Migaud, débats AN, 28 sept. 2009.

[33] Ce fut le cas pour la proposition de loi sur les langues régionales, dont ne subsiste principalement, après la décision du Conseil constitutionnel n° 2021-818 DC du 20 mai 2021 N° Lexbase : A44904S4, qu’un seul dispositif essentiel portant sur la participation financière des communes, qui aurait dû tomber sous le coup de l’article 40.

[34] Il peut l’être au stade du débat en commission, puisque le débat s’engage sur le texte adopté par celle-ci : Cons. const., 13 janvier 1994.

[35] V E. Woerth, op cit. : chaque président conserve son autonomie , mais en cas  de doute le renvoi et systématique , et l’avis systématiquement suivi.

[36] « La recevabilité des amendements déposés sur le bureau de l’Assemblée est appréciée par le président. Leur dépôt est refusé s’il apparaît que leur adoption aurait les conséquences prévues par l’article 40 de la Constitution. En cas de doute, le président décide après avoir consulté le président ou le rapporteur général de la Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire ou un membre de son bureau désigné à cet effet ; à défaut d’avis, le président peut saisir le Bureau de l’Assemblée ».

[37] Il attribue une compétence identique au président de la commission des affaires sociales pour les lois de financement.

[38] AN, 24 juillet 2007, 2e séance, pour une charge de gestion.

[39] Débats AN, 11 juillet 2022 : « M. Éric Coquerel,  C’est une charge de gestion, parce que ce personnel est suspendu, il n’était pas licencié. (M. Philippe Vigier fait des signes de dénégation.) M. Éric Woerth. Bien sûr que non ! M. Éric Coquerel, président de la commission des finances. Pour preuve : si ce personnel (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES) décide d’être vacciné demain, il peut être réintégré. Cela signifie que cette charge de personnel existait. (Mêmes mouvements.)

Deuxièmement, cela concerne un nombre infime de personnes – c’est la ministre de la Santé elle-même qui l’a dit l’autre jour – puisque cela correspond à 0,53 % de la masse salariale. ». Ces deux arguments ne paraissent pas pertinents : les décisions sont prises par rapport au droit existant – soit des paies non versées – et la  modicité d’une charge n’est pas un moyen de s’exonérer de l’article.

[40] Cons. const., 9 novembre 1999, préc : « Les députés auteurs de la première saisine soutiennent que la proposition de loi était également irrecevable en raison de ses effets sur les charges publiques ; qu'ils font valoir que l'exigence d'un enregistrement du pacte civil de solidarité faisait peser 'sur les autorités chargées d'assurer à la fois cet enregistrement et la gestion des divers droits qui s'y rattachent' une aggravation de charges directe et certaine … Considérant que l'augmentation des dépenses pouvant résulter, pour les services compétents, des tâches de gestion imposées par la proposition de loi n'était ni directe, ni certaine ; qu'en conséquence, c'est à bon droit que la proposition de loi n'a pas été déclarée irrecevable en raison de son incidence sur les charges publiques ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la loi n'a pas été adoptée en méconnaissance de l'article 40 de la Constitution ». Pour d’autres exemples, déclarant irrecevables la mise en place de bases de données informatiques, l’organisation généralisée de débats publics, une filière d’enseignement des langues régionales, v. G. Carrez, op cit. p. 92.

[41] J. Barrot, op cit., 90.

[42] Le Règlement de l’Assemblée prévoit, depuis 2014, que l’auteur de l’amendement peut demander une explication écrite de l’irrecevabilité.

[43] V. D. Migaud D. et J. Arthuis, Le Monde, 17 mai 2008 ; J.-F. Kerléo, RFDC, 2014, p. 507.

[44] Certains militent même pour l’extension du dispositif au Gouvernement : A. Baudu, Les amendements budgétaires en France, Politeia, n° 39, 2020 p. 213.

*L’auteur tient à remercier les relecteurs, mais les propos n’engagent que lui.

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