Les perquisitions et les saisies effectuées dans les locaux de deux journaux ayant révélé des affaires dopage dans le milieu du cyclisme étaient des mesures disproportionnées compte tenu de la nécessaire sauvegarde de la liberté de la presse, dit pour droit la CEDH dans un arrêt rendu le 28 juin 2012 (CEDH, 28 juin 2012, Req. 15054/07
N° Lexbase : A2135IQ7). Les requérants étaient soupçonnés de recel de violation du secret de l'instruction car ils avaient publié dans plusieurs articles des passages
in extenso de procès verbaux de transcriptions d'écoutes téléphoniques, une liste de produits trouvés lors d'une perquisition et des pièces de procédure concernant une enquête en cours sur l'usage de substances prohibées dans le milieu du cyclisme. La Cour rappelle que la protection des sources journalistiques est l'une des pierres angulaires de la liberté de la presse, cette dernière jouant un rôle essentiel dans une société démocratique (voir CEDH, 27 mars 1996, Req. 17488/90
N° Lexbase : A1234GBC). L'article 10 de la Convention protège le droit des journalistes de communiquer des informations sur des questions d'intérêt général dès lors qu'ils s'expriment de bonne foi, sur la base de faits exacts et fournissent des informations "
fiables et précises" dans le respect de l'éthique journalistique. Si des mesures restreignant la liberté d'expression des journalistes ne peuvent être envisagées qu'en dernier recours, le respect de cette seule exigence ne dispense pas le Gouvernement d'établir l'existence d'un besoin social impérieux propre à justifier l'ingérence litigieuse. Or, la saisie et le placement sous scellés des
listings des appels des premier et deuxième requérants, les perquisitions et saisies opérées le 13 janvier 2005 aux sièges des deux journaux et les perquisitions opérées aux domiciles des deux premiers requérants furent validées par la chambre de l'instruction sans que soit démontrée l'existence d'un besoin social impérieux. En outre, ces perquisitions, impressionnantes et spectaculaires, ne pouvaient que marquer profondément les professionnels qui y travaillaient et être perçues par eux comme une menace potentielle pour le libre exercice de leur profession. La Cour en arrive à la conclusion que le Gouvernement n'a pas démontré qu'une balance équitable des intérêts en présence a été préservée. Les mesures litigieuses ne représentaient pas des moyens raisonnablement proportionnés à la poursuite des buts légitimes visés compte tenu de l'intérêt d'une société démocratique à assurer et à maintenir la liberté de la presse. Il y a donc eu violation de l'article 10 de la Convention (à ce sujet, lire
N° Lexbase : N1890BT8).
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable