Le Quotidien du 19 septembre 2019 : Propriété intellectuelle

[Brèves] Motif de la protection des dessins et modèles par le droit d’auteur : inefficacité de l’effet esthétique susceptible d’être produit

Réf. : CJUE, 12 septembre 2019, aff. C-683/17 (N° Lexbase : A0761ZNI)

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N0350BYM

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par Vincent Téchené

le 18 Septembre 2019

►La protection au titre du droit d’auteur ne peut pas être accordée à des modèles au seul motif que, au-delà de leur objectif utilitaire, ceux-ci produisent un effet esthétique spécifique ;

► Ces modèles doivent constituer l’expression d’œuvres originales pour bénéficier d’une telle protection.

Tel est le sens d’un arrêt rendu par la CJUE le 12 septembre 2019 (CJUE, 12 septembre 2019, aff. C-683/17 N° Lexbase : A0761ZNI).

 

Le droit portugais inclut les dessins et modèles dans la liste des œuvres pouvant bénéficier d’une protection au titre du droit d’auteur, mais ne précise pas explicitement quelles conditions doivent être remplies pour que des objets donnés, poursuivant un objectif utilitaire, bénéficient effectivement d’une telle protection. La question ne faisant pas consensus dans la jurisprudence et la doctrine portugaises, le juge portugais a donc saisi la CJUE d’une question préjudicielle  afin de savoir, substance, si la Directive sur le droit d’auteur (Directive 2001/29 du 22 mai 2001 N° Lexbase : L3222LQE), s’oppose à ce qu’une législation nationale prévoie l’octroi de cette protection dès lors qu’est remplie une condition spécifique selon laquelle des dessins et modèles doivent, au-delà de leur objectif utilitaire, produire un effet esthétique spécifique.

La Cour répond donc à cette question par l’affirmative. Elle rappelle, tout d’abord, sa jurisprudence constante selon laquelle tout objet original constituant l’expression d’une création intellectuelle propre à son auteur peut être qualifié d’«œuvre» au sens de la Directive sur le droit d’auteur (CJCE, 16 juillet 2009, aff. C-5/08 N° Lexbase : A9796EIN ; CJUE, 13 novembre 2018, aff. C-310/17 N° Lexbase : A0243YLL). Ensuite, la Cour relève qu’un ensemble d’actes de droit dérivé de l’Union met en place une protection spécifique pour les dessins et modèles, tout en prévoyant que cette protection spécifique peut s’appliquer de manière cumulative avec la protection générale assurée par la Directive sur le droit d’auteur. En conséquence, un dessin ou un modèle peut, dans un cas donné, également être qualifié d’«œuvre».

Cela étant, la Cour souligne que la protection des dessins et modèles, d’une part, et la protection au titre du droit d’auteur, d’autre part, poursuivent des objectifs différents et sont soumises à des régimes distincts. En effet, la première vise à protéger des objets qui, tout en étant nouveaux et individualisés, présentent un caractère utilitaire et ont vocation à être produits massivement. En outre, elle trouve à s’appliquer pendant une durée limitée, permettant de rentabiliser les investissements nécessaires à la création et à la production de ces objets sans pour autant entraver excessivement la concurrence. Pour sa part, la protection associée au droit d’auteur, dont la durée est significativement supérieure, est réservée aux objets méritant d’être qualifiés d’œuvres. Dans ce cadre, l’octroi d’une protection, au titre du droit d’auteur, à un objet déjà protégé en tant que dessin ou modèle ne doit pas porter atteinte aux finalités et à l’effectivité respectives de ces deux régimes, raison pour laquelle l’octroi cumulatif d’une telle protection ne peut être envisagé que dans certaines situations.

Enfin, la Cour explique que l’effet esthétique susceptible d’être produit par un dessin ou modèle ne constitue pas un élément pertinent pour déterminer, dans un cas donné, si ce dessin ou modèle peut être qualifié d’«œuvre», dès lors qu’un tel effet esthétique constitue le résultat de la sensation intrinsèquement subjective de beauté ressentie par chaque personne appelée à regarder le dessin ou modèle en cause. Cette qualification exige, en revanche, de démontrer, d’une part, l’existence d’un objet identifiable avec suffisamment de précision et d’objectivité et, d’autre part, que cet objet constitue une création intellectuelle reflétant la liberté de choix et la personnalité de son auteur. Par conséquent, la circonstance que des modèles produisent, au-delà de leur objectif utilitaire, un effet esthétique spécifique, ne permet pas, en elle-même, de qualifier de tels modèles d’«œuvres».

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